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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones

Fascicule 15 - Témoignages


OTTAWA, le mardi 1er décembre 1998

Le comité sénatorial permanent des peuples autochtones, auquel a été renvoyé le projet de loi S-14, Loi prévoyant l'autonomie gouvernementale des Premières nations du Canada, se réunit aujourd'hui, à 10 h 09, pour en faire l'examen.

Le sénateur Charlie Watt (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Chers collègues, ce matin, nous avons quatre points à l'ordre du jour. Pour commencer, je mentionne qu'un projet de loi d'initiative parlementaire a été déposé au Bureau, il y a longtemps déjà.

Le sénateur Tkachuk et moi essayons de trouver un moyen de le faire progresser. Nous éprouvons des difficultés. En tant que comité, nous avons entrepris d'examiner les questions de gouvernement. J'ai tendance à croire que le projet de loi S-14 devrait faire partie de l'étude globale concernant l'autonomie gouvernementale des autochtones.

J'en ai parlé au sénateur Tkachuk qui ne voit pas forcément les choses du même oeil que moi. En tant que président, j'aimerais accélérer ce dossier sans pour autant compromettre nos travaux futurs.

Il y a plus cependant. Je m'inquiète du fait que cette collectivité particulière s'est attirée de la très mauvaise publicité en raison de certaines mesures qu'elle a prises. Si nous décidons de faire une étude article par article du projet de loi au Sénat, je crois que nous nous attirerons beaucoup de critiques dans les médias, ce que j'aimerais éviter. Je le précise parce que j'ai la responsabilité de faire du bon travail pour le compte de nos gens.

J'aimerais essayer d'accorder à cette collectivité particulière le même traitement qu'ont reçu les autres. Toutefois, si ce n'est pas le cas, j'aimerais alors entendre ce que le sénateur Tkachuk a à dire.

Je l'ai invité à venir ici pour nous expliquer son raisonnement. Nous pourrons alors décider une fois pour toutes si le projet de loi fera partie de l'étude globale ou si son étude sera accélérée ici, puis s'il sera renvoyé à la Chambre des communes.

Je maintiens depuis le départ que, si le projet de loi est renvoyé à la Chambre des communes, il n'aura aucune chance d'être adopté. Cela pourrait avoir des conséquences très néfastes sur ce que nous tentons de faire, c'est-à-dire sur des recommandations concrètes au sujet du partenariat qui devrait exister entre les peuples autochtones et le gouvernement du Canada.

Le sénateur Tkachuk: Monsieur le président, je vous remercie de l'appui que vous donnez à cette initiative depuis plusieurs années. Je suis ici en tant que collègue, plutôt qu'en tant que témoin, afin de voir s'il n'y aurait pas moyen de discuter du projet de loi S-14 et de s'organiser pour qu'il soit soumis au Sénat.

Tout d'abord, je tiens à mentionner que le projet de loi S-14, bien qu'il soit associé de près à la bande indienne de Sawridge, en Alberta, est en réalité une initiative du Slave Lake Band Regional Council, qui représente quelque 9 000 autochtones, soit 3 000 de plus que le nombre d'autochtones visés par le traité qui donne lieu à tant de controverse en Colombie-Britannique et 2 000 de plus que la population visée par l'accord de règlement des questions d'autonomie gouvernementale au Yukon. Voilà qui représente un nombre important d'autochtones du Canada qui semblent n'avoir pas réussi, pour quelque raison que ce soit, à s'entendre avec le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.

Certains d'entre vous m'ont déjà entendu dire que le projet de loi à l'étude fournit un cadre unique pour réaliser l'autonomie gouvernementale. Le projet de loi n'oblige pas les bandes indiennes du Canada à faire quoi que ce soit. Il prévoit simplement un cadre grâce auquel elles peuvent réaliser leur autonomie gouvernementale. C'est en ce sens qu'il est unique.

Donc, une bande indienne peut examiner la loi. Ses membres peuvent ensuite opter pour l'autonomie gouvernementale à condition de respecter certaines règles qui y sont énoncées. Je me rends compte que cela pourrait faire perdre leur emploi à beaucoup de personnes, parce que les bandes elles-mêmes peuvent assumer les fonctions prévues dans la loi. Tout ce qui est écrit dans la loi leur permet de faire le travail elles-mêmes et de demander à se gouverner elles-mêmes, à condition, je le répète, de respecter certaines exigences législatives, plutôt que constitutionnelles.

Monsieur le président et chers collègues, je crois savoir que le projet de loi à l'étude suscite de la controverse. Toutefois, tous les projets de loi visant l'autonomie gouvernementale sont controversés. Que je sache, il n'y en a pas eu un seul qui n'ait pas suscité de la controverse. Certains qui ont déjà été adoptés en suscitent encore. Voilà dans quelles eaux nous nageons. Il faut que nous trouvions le moyen de nous en sortir.

Le projet de loi à l'étude a été renvoyé au comité à la fin de mars. Je suis d'accord avec vous, monsieur le président, que, si l'examen de ce projet de loi pouvait être intégré à l'étude sur l'autonomie gouvernementale, tel que prévu par la commission royale, ce serait une bonne façon de procéder. Cependant, le rapport de la commission royale est déjà plutôt volumineux, de sorte qu'il faudra peut-être beaucoup de temps avant d'en mettre en oeuvre les recommandations. Cela signifie que le projet de loi S-14 pourrait être renvoyé aux calendes grecques. Il faudrait alors le redéposer plus tard, ce qui rend les choses encore plus difficiles.

Je me demande s'il n'y a pas moyen de remplir l'obligation que nous avons en tant que sénateurs d'examiner le projet de loi une fois qu'il a été renvoyé au comité. Si j'ai bonne mémoire, le Règlement du Sénat du Canada prévoit, à l'article 98, qu'il faut que cela soit fait dans un délai raisonnable.

Voilà huit mois qu'il a été renvoyé au comité, et nous n'avons pas encore entamé notre étude. C'est pourquoi le président et moi nous sommes réunis la semaine dernière. Il a bien voulu convoquer cette réunion pour que nous puissions en parler et trouver un moyen de nous en sortir.

Le sénateur St. Germain: Honorables sénateurs, nous devons cette mesure législative particulière à un de nos ex-collègues, soit le sénateur Walter Twinn. C'est vrai qu'il y a de la controverse, mais je crois qu'il y en aura toujours si une bande indienne connaît du succès. Il y a toujours de la jalousie et de l'opposition. Le sénateur Twinn incarne le succès à certains égards, y compris en ce qui concerne la viabilité économique de son peuple.

Il rêvait d'une loi habilitante qui permettrait aux bandes indiennes d'aller de l'avant, comme l'a fait valoir le sénateur Tkachuk, et de se gouverner elles-mêmes à un coût abordable. Actuellement, c'est le ministère des Affaires indiennes ou le gouvernement de l'heure qui décide si la bande aura l'aide financière qui lui permettra d'y accéder. En effet, négocier l'autonomie gouvernementale coûte très cher.

C'était son rêve de faire cette contribution à son peuple en particulier et à tous les peuples autochtones du pays, de leur permettre de s'appuyer sur ce texte de loi, comme l'a dit le sénateur Tkachuk, pour réaliser leur autodétermination ou leur autonomie gouvernementale à un coût raisonnable, sans avoir à s'endetter ou à se plier au scénario paternaliste qui aura probablement toujours cours au ministère des Affaires indiennes.

C'est dans cet esprit qu'il faudrait aller de l'avant et examiner le projet de loi. Je suis d'accord que, si nous prévoyons y consacrer du temps, il ne faudrait pas que ce soit inutile. Le projet de loi à l'étude ne minera pas les études que nous effectuons. Il s'agirait simplement d'un autre processus entamé dans l'intérêt de nos peuples autochtones.

J'ai apporté beaucoup de documentation, monsieur le président, notamment une lettre qui vous a été adressée le 18 février 1994. Elle fournit des renseignements et vous demande, à vous, monsieur le président, de régler cette question particulière pour le compte du Lesser Slave Lake Regional Council.

Monsieur le président, le projet de loi dont il est question a reçu l'aval du Cabinet. Cette volonté a manifestement été contrecarrée. Dans la documentation fournie par la Bibliothèque du Parlement, on apprend qu'en dépit de sa ratification par le Cabinet, la bande et le gouvernement fédéral sont incapables de résoudre certaines questions d'ordre technique et juridique en raison de la loi sur le gouvernement de Sawridge. Ce que je me demande, c'est si ce sont encore les bureaucrates qui bloquent cette mesure?

Plus je lis, plus s'étire mon mandat au sein du comité, plus je soupçonne que les membres de l'appareil gouvernemental préféreraient que le statu quo soit maintenu en ce qui concerne les peuples autochtones. Nous avons le comité le moins sectaire qui puisse exister. Je ne fais pas cette déclaration par intérêt sectaire. C'était le cas avant que notre parti n'arrive au pouvoir, et ça l'est toujours. Quand je vois ce genre de scénario, je m'interroge sur la raison.

Voici un groupe d'autochtones qui ont une bonne assise économique. Ils sont disposés à investir beaucoup d'argent en vue de lancer ce programme. Le Cabinet lui a en principe donné le feu vert. Pourquoi laissons-nous de petits détails bloquer ce que je considère être une initiative importante?

Monsieur le président, il faudrait examiner ce projet de loi de manière ordonnée et dans le meilleur intérêt de nos peuples autochtones. C'est pourquoi nous sommes ici. Si notre présence est due à des intérêts sectaires, disons-le franchement. Ce n'est en tout cas pas mon cas. Je suis ici strictement en vue de régler cette question.

Monsieur le président, nous avons travaillé ensemble à d'autres dossiers. Vous savez que je suis sincère, car j'essaie certes de mettre les intérêts sectaires de côté dès que j'entre dans la salle de ce comité-ci.

Je vous prie instamment, monsieur le président, d'examiner attentivement cette affaire. Ces autochtones aimeraient que le projet de loi à l'étude soit adopté au plus tôt. Il est question de neuf bandes, c'est-à-dire de 7 000 à 9 000 personnes. Il est impératif que nous respections les demandes faites par les chefs de ces neuf bandes et que nous réglions la question au plus tôt.

Le sénateur Chalifoux: Monsieur le président, j'aimerais d'abord savoir d'où vient ce nombre de 7 000 à 9 000 personnes habitant sur les neuf réserves, parce qu'il y en a 49 d'inscrites dans la bande de Sawridge. Le gouvernement de l'Alberta a évalué à environ 9 000 le nombre d'autochtones, métis compris, qui vivent dans tout le nord de l'Alberta.

De plus, je n'ai pas lu attentivement le projet de loi. Toutefois, j'ai reçu de nombreuses lettres de femmes autochtones et j'en ai rencontré beaucoup. Le projet de loi les préoccupe vivement parce qu'il ne leur confère aucun statut.

Je n'aime pas parler en mal d'un mort, mais le sénateur Twinn était contre l'idée de permettre aux membres de la bande qui ont perdu leur statut parce qu'elles ont épousé des non-membres de revenir sur la réserve. C'est bien connu.

Le projet de loi ne prévoit rien pour les femmes. En cas de divorce, c'est à l'homme que reviennent d'office les terres, les biens et les enfants. C'est leur plus vive préoccupation au sujet du projet de loi.

Nous savons tous que le ministère des Affaires indiennes a toujours eu une attitude paternaliste. Je suis entièrement pour l'autonomie gouvernementale des autochtones et j'en ai été une chaude partisane tout au long des années. Toutefois, il n'est pas question ici simplement de la bande de Sawridge ou du Lesser Slave Lake Regional Council; la mesure vise tous les autochtones du Canada.

Le projet de loi n'a pas été débattu au sein d'une autre collectivité autochtone ou par un autre peuple. C'est une autre de mes préoccupations.

Je sais que la bureaucratie au ministère des Affaires indiennes est affreuse. J'en ai moi-même fait l'expérience depuis que je suis au Sénat et je suis loin d'être impressionnée. C'est ainsi depuis des années. Cependant, j'estime que le ministre actuel a au moins commencé à remettre en partie les rênes à certaines bandes indiennes du pays.

J'aimerais que les autochtones en débattent entre eux. Pourquoi des non-autochtones prendraient-ils des décisions au sujet d'une loi qui n'a pas été débattue par les peuples autochtones du pays?

Le sénateur Austin: Monsieur le président, en ce qui concerne les grands principes guidant les travaux du comité, nous nous sommes entendus pour nous consacrer à l'autonomie gouvernementale. Nous souhaitons aller de l'avant et élaborer les principes d'autonomie gouvernementale qui définiront les rapports entre le Canada et les provinces, d'une part, et les diverses collectivités autochtones, d'autre part.

Comme le savent les honorables sénateurs, il existe toute une gamme d'opinions au sujet de l'autonomie gouvernementale dans les plus de 500 bandes réparties un peu partout au Canada. On ne s'entend même pas sur la souveraineté des bandes, que revendiquent certaines bandes de l'Alberta et de la Saskatchewan, et sur les rapports entre toutes ces questions. Le sénateur Chalifoux a décrit d'autres préoccupations.

La question est de savoir comment poursuivre le débat sur l'autonomie gouvernementale des autochtones. Notre président a décrit un processus qui nous permettrait d'examiner ces questions, de dialoguer avec le milieu autochtone, comme l'a ditle sénateur Chalifoux, et d'en apprendre davantage sur ce qui est possible, dans les faits.

En toute franchise, le projet de loi représente une tentative en vue de faire cheminer rapidement une idée qui, bien qu'elle ait absorbé beaucoup de temps, mérite d'être examinée avec mesure.

La façon dont nous gouvernons, c'est le gouvernement qui joue le rôle de négociateur et qui présente ses conclusions au Parlement du Canada. Bien que le Parlement puisse certes décider de court-circuiter le rôle de l'exécutif, j'ose dire aux collègues qui aimeraient aller de l'avant avec ce projet de loi qu'il ne produira rien d'autre que de la controverse et qu'il jettera de l'huile sur le feu si nous poursuivons dans cette voie.

Je suis conscient qu'il n'y a pas d'intérêt sectaire ici, et j'accepte ce qu'a dit le sénateur St. Germain à ce sujet. C'est simplement que les opinions divergent quant à la rapidité avec laquelle il faudrait aller de l'avant avec ce genre de mesure. Toutefois, sénateur St. Germain, l'épineuse question des conséquences demeure entière.

Si vous souhaitez atteindre les objectifs énoncés dans le projet de loi à l'examen, j'estime que le processus proposé par le président, soit d'examiner toute la question de l'autonomie gouvernementale, est la bonne façon de s'y prendre. Il faudrait que le projet de loi demeure au Feuilleton pour que nous puissions l'examiner dans le cadre de ce processus. De la sorte, le comité se prononcerait dans les six premiers mois de la nouvelle année. D'ici là, on aura peut-être réussi à dégager un consensus qui ferait progresser réellement la réalisation des objectifs que nous avons tous à coeur en termes d'autonomie gouvernementale des autochtones.

Si l'on cherche à faire adopter le projet de loi coûte que coûte, je crois qu'il sera rejeté au Sénat, si ce n'est par le comité. Il est certain qu'il sera voué à l'échec à l'autre endroit. Ce sera un recul en termes des relations entre le peuple du Canada et les peuples autochtones. Je ne crois pas qu'ils méritent cela. J'estime qu'on peut adopter le projet de loi avec quelques amendements, une fois l'étude terminée.

Plusieurs questions controversées sont en jeu ici, y compris le principe de la primauté du droit. Le projet de loi représente une dérogation à l'accord conclu avec les Nishgas à cet égard. C'est une question cruciale.

Honorables sénateurs, vous avez le choix. Vous pouvez choisir de laisser le projet de loi en suspens, d'y travailler collectivement et de proposer des amendements une fois l'étude terminée ou bien vous pouvez faire des pressions, le voir rejeter et créer chez un certain nombre de personnes visées un sentiment de déception et de désillusion et engendrer encore plus de rancoeur à l'égard du gouvernement et du Parlement du Canada.

Le sénateur Berntson: Monsieur le président, les mesures proposées dans le projet de loi ne sont pas nouvelles. Le projet de loi circule depuis environ huit mois. Ceux qui l'ont précédé ont été sur le métier pendant très longtemps.

Si j'ai bien compris, en octobre 1990 ou 1991, le Canada a approuvé la rédaction et l'élaboration d'un texte qui cadrerait avec le modèle proposé par le Slave Lake Regional Council, qui est le point de départ de toute cette initiative. Parce qu'il existe tant de modèles d'autonomie gouvernementale, il raisonnait qu'il fallait trouver un modèle générique et adopter une loi habilitante à laquelle pourraient avoir recours les Premières nations admissibles, c'est-à-dire celles qui respectaient toutes les exigences mentionnées par le sénateur Austin, entre autres.

Nous sommes la troisième législature à être saisie d'un projet de loi presque identique. Durant les deux législatures précédentes, nous avons entendu des témoins de tout le pays. Ainsi, des porte-parole des Premières nations qui appuyaient la mesure ont témoigné avec beaucoup d'enthousiasme. Je ne laisse pas entendre que toutes les collectivités autochtones accordent tout leur appui à cette mesure; ce n'est pas le cas.

Je ne me prétends pas un expert de la rédaction ni de l'effet qu'a un projet de loi sur un autre. Toutefois, si j'en crois ce que j'entends, l'une des principales préoccupations suscitées par le projet de loi est l'impact qu'il aura sur le projet de loi C-31. On me dit aussi, cependant, que le projet de loi n'a absolument aucun impact sur le projet de loi C-31. Durant les législatures antérieures, on a fourni la réponse à la plupart de ces questions, et tous en avaient été satisfaits.

À mesure qu'évolue le monde, des nouveaux arrivent au comité. Il faut du temps pour se familiariser avec toute la documentation qui a été accumulée au cours des années. Je ne vois pas quel grand conflit il y a à faire les deux à la fois, c'est-à-dire à exécuter la grande étude et à examiner le projet de loi.

L'accord avec les Nishgas a été signé et exécuté pendant notre étude sur l'autonomie gouvernementale. Il existe de nombreux autres modèles d'autonomie gouvernementale, et celui-ci n'en est qu'un autre qui a fait l'objet de beaucoup de débats et auxquels on a manifesté beaucoup d'appui. Je suis d'accord avec le dicton chinois selon lequel il faut se dépêcher en prenant son temps. Si nous allons si vite que certains se hérissent, ce sera contreproductif. Il faudrait selon moi traiter le projet de loi distinctement de la grande étude que nous avons entreprise. En fait, il faudrait poursuivre, mais sans le faire à toute vapeur. Si nous n'accomplissons rien d'autre, nous obtiendrons au moins que la Chambre débatte des questions d'autonomie gouvernementale et du projet de loi C-31. Le projet de loi ne sera pas adopté si ces questions ne sont pas réglées.

Débattons-en! Entendons les témoins! Si le projet de loi n'obtient pas d'appuis, ainsi soit-il! Certains d'entre nous sont très confiants, d'autres pas.

Quoi qu'il en soit, il faudra répondre aux questions posées parle sénateur Chalifoux, entre autres, avant de pouvoir l'adopter. Mettons-nous donc à la recherche de ces réponses. Un bon point de départ serait de lire toute la documentation accumulée durant les deux législatures précédentes.

Le sénateur Chalifoux: J'ai recueilli de nombreux appuis pour une loi à ce sujet; cependant, je crois que le projet de loi est prématuré. J'ai présenté un rapport aux sénateurs et au ministre des Affaires indiennes en provenance d'autochtones qui habitent dans la partie nord-est de l'Alberta. Ils estiment qu'ils ne sont pas encore prêts à se gouverner eux-mêmes. Ils souhaitent accéder à l'autonomie un jour, mais ils ne sont pas encore prêts. Voilà ce qui me préoccupe.

Si nous faisons l'étude et que le projet de loi en représente une composante importante, nous aurons un cadre qui nous permettra de vraiment examiner la loi attentivement.

J'ai rencontré des femmes, non seulement des femmes visées par le projet de loi C-31, mais aussi des chefs et d'autres conseillères politiques des réserves. Elles m'ont appelée. Elles aussi ont de graves préoccupations au sujet du projet de loi actuel. Il faudrait qu'elles aient l'occasion d'en débattre, ce qu'elles n'ont pas pu faire jusqu'ici.

Le comité pourrait dire qu'il a entendu beaucoup de témoins ici. Je suis navrée, mais j'ignore qui ils étaient. Les personnes auxquelles j'ai parlé, et il y en a eu beaucoup, étaient préoccupées par le fait qu'elles n'avaient pas été consultées. Elles me demandent constamment pourquoi d'autres qu'elles devraient débattre d'un projet de loi qui influe sur leur vie, leurs enfants et leur avenir à elles. Cela me préoccupe. Si nous examinons le projet de loi dans le cadre de notre étude, il en ressortira bien meilleur et il mettra en place un bien meilleur cadre.

[Français]

Le sénateur Gill: Mon intervention se fera de façon non partisane. Si j'ai bien compris la discussion, on veut faire de ce projet de loi S-14, une étude en parallèle avec ce qui est en train de se faire au comité des affaires autochtones actuellement. Les gens qui doivent transiger sur les affaires autochtones trouvent cela très compliqué. Il y a une raison pour cela: les gens qui devront subir ou qui auront à appliquer ces projets de loi, ne sont pas présents lorsque nous en discutons. Autrement dit, et mon expérience me l'a toujours dit, on fabrique des choses pour des gens à qui cela ne correspond pas. On fait des chemises et des souliers pour des gens qui auront à les vêtir et ils ne sont pas à leur pointure. Cela va toujours continuer comme cela.

J'ai été nommé par M. Chrétien pour représenter les gens de chez nous. Par contre, je considère que les leaders autochtones qui sont en place actuellement, représentent vraiment les populations autochtones et ces gens devraient être impliqués. Actuellement, un processus a été amorcé avec le comité des affaires autochtones où on essaie d'impliquer, autour d'une table ronde, les leaders autochtones. C'est une bonne décision qui mènera à des solutions possibles.

On devrait inviter de plus en plus les leaders autochtones et essayer de prendre des décisions à la lumière des discussions que l'on aura avec ces gens. Je ne sais pas ce que l'on veut faire ici, mais je vais appuyer toutes les démarches qui seront faites en collaboration avec les représentants autochtones. Si l'on veut gagner du temps, si l'on veut faire des choses utiles et que cela réponde aux besoins des autochtones, il faut s'assurer de la présence des leaders autochtones dans nos démarches, dans nos délibérations, et ce, toujours dans la mesure du possible. Je sais qu'il y a une structure légale au Sénat et à la Chambre des communes, mais il y a moyen de faire des choses pour impliquer ces gens.

[Traduction]

Le sénateur St. Germain: Je respecte l'expérience du sénateur Gill et le travail qu'il a effectué par le passé.

Le sénateur Austin a dit que nous essayons de faire adopter ce projet de loi à la hâte. Cette question traîne depuis une éternité. Nous avons espéré qu'elle se règle toute seule. On nous a demandé d'étudier le projet de loi et c'est la responsabilité de notre comité de le faire.

Le sénateur Chalifoux a soulevé divers problèmes dont je ne remets pas en question la légitimité. Faisons comparaître des témoins, des gens qui sont contre.

Dans le cas de l'autonomie gouvernementale, je ne pense pas que la situation des Nishgas se compare à celle des Micmacs. Il y a des points communs, mais les deux situations sont différentes. Si on me disait que la région du Lesser Slave Lake devrait commencer immédiatement des négociations sur l'autonomie gouvernementale ailleurs, ce serait une possibilité, mais personne ne le propose.

Les peuples autochtones veulent l'autonomie gouvernementale. Toutes les bandes indiennes le disent. J'ai de la documentation ici que tous les chefs ont signée. Le sénateur Chalifoux prétend qu'ils ne veulent pas l'autonomie gouvernementale. Nous ne forçons personne à agir contre son gré. Ils peuvent s'engager dans cette voie s'ils le veulent. Il s'agit d'une loi habilitante qu'ils pourraient appliquer si elle était adoptée.

Personne ne demande que le projet de loi soit adopté dans sa forme actuelle, même si certains d'entre nous le voudraient bien. On peut y apporter des amendements. C'est tergiverser que de prétendre que le projet de loi compromettrait l'étude. Les négociations des Nishgas vont de l'avant et d'autres négociations se déroulent rondement dans ma province. Vous le savez, sénateur Austin.

Notre étude peut nous servir si nous adoptons une approche constructive. Je crois que c'est plus constructif que négatif. Nous voyons tous le monde sous un angle différent. Malgré tout le respect que je vous dois, sénateur Austin, je pense que vous l'envisagez sous un mauvais angle.

Le sénateur Austin: Nous nous entendons sur trois points et nous divergeons d'opinions sur un. Les sénateurs Berntson, Gill et Chalifoux ont tous parlé de faire une étude «en parallèle», ou employé une expression semblable.

Je n'ai pas d'objection à étudier en parallèle le projet de loi et l'autonomie gouvernementale des autochtones. Nous pouvons interroger les témoins sur les dispositions du projet de loi et sur les questions d'autonomie gouvernementale qui nous préoccupent.

Nous pouvons examiner le projet de loi. Cependant, on ne peut pas passer sous silence le fait que le projet de loi essaie de clore une négociation insatisfaisante avec le gouvernement du Canada.

Dans tous les autres traités dont vous parlez, le gouvernement et la bande en sont venus à un accord. Pour le gouvernement, le projet de loi en question est un arrangement convenu avec la bande, ce qui n'est pas le cas ici. Les négociations ne sont pas réglées entre ces bandes et le gouvernement. On essaie de pousser le gouvernement à modifier sa position. C'est légitime. Je n'ai pas d'objection si j'approuve les raisons pour lesquelles on veut pousser le gouvernement à le faire. Or, je ne sais pas si je les approuve dans ce cas-ci.

Ce projet de loi soulève des problèmes qui me préoccupent. Je m'inquiète surtout des liens prévus dans le projet de loi entre les pouvoirs du Parlement et ceux de la bande. Il y a aussi des problèmes liés au statut. Le sénateur Chalifoux en a parlé dans le cas des femmes. La question des droits se pose aussi. Ce sont là des préoccupations très importantes.

Dans beaucoup de milieux autochtones de l'Alberta, on formule des critiques au sujet des droits, ainsi que de la nature fermée de deux ou trois bandes et de la fonction gouvernementale telle qu'elle existe actuellement. Adopter un projet de loi dans lequel le Parlement confirme cette situation serait une source d'inquiétude pour de nombreux intéressés.

Je ne veux pas discuter des conditions parce qu'il en sera question au cours des témoignages, et que c'est un sujet sur lequel le comité devra se prononcer.

Je propose que le comité étudie la question de l'autonomie gouvernementale et les dispositions du projet de loi S-14 en même temps, au moment opportun. Quand il faudra discuter de sujets particuliers au projet de loi S-14, nous pourrions le faire au cours d'une réunion distincte, et nous devrions commencer à examiner les deux questions ensemble. Convenons d'une date à laquelle le comité doit avoir terminé ses audiences sur le projet de loi S-14, comme le 30 mai. Cette date vous conviendrait-elle?

Le sénateur Tkachuk: J'aimerais poser une question au sénateur Austin. Proposez-vous que l'étude se fasse en parallèle ou côte à côte? J'aurais une objection à ce qu'elle fasse partie de l'autre étude parce que le Sénat a chargé le comité d'entreprendre l'étude du projet de loi S-14. Il le lui a demandé à la fin de mars, il y a huit mois.

Quand nous en avons discuté la première fois en avril, j'étais d'accord avec le sénateur Watt pour que l'étude se fasse en parallèle, en même temps que l'étude sur l'autonomie gouvernementale. Le problème est que c'est déjà le 1er décembre. Le comité n'a ni étudié l'autonomie gouvernementale ni le projet de loi. Voilà ce qui me préoccupe.

Monsieur le président, j'aimerais discuter de certains des sujets qui ont été relevés.

Le sénateur St. Germain a tout à fait raison. Le projet de loi ne force personne à faire quoi ce que soit. C'est une loi habilitante.

Sénateur Austin, nous sommes en désaccord sur la façon dont l'autonomie gouvernementale doit se réaliser au Canada. J'ai toujours eu l'impression que le Parlement détenait l'autorité suprême. J'ai peut-être tort, mais j'ai toujours pensé que c'est au Parlement qu'il appartenait de se prononcer sur certaines de ces questions. Le Parlement n'a jamais discuté de l'autonomie gouvernementale.

Nous sommes des parlementaires. Comme sénateur, je ne crois pas représenter uniquement les Blancs. Je suis sûr que les députés de ma province pensent la même chose. Ils représentent l'ensemble des habitants de la province de la Saskatchewan, ce qui comprend les autochtones, les métis et les non-autochtones. Nous avons une responsabilité en tant que parlementaires. C'est cet aspect du projet de loi qui a suscité mon intérêt.

Je ne viens pas de l'Alberta. Le sénateur Twinn était mon ami et j'ai accepté de prendre l'initiative parce que je pense qu'il est important que le Parlement oriente le gouvernement à ce sujet et que j'estime qu'il est néfaste de ne pas le faire. À mon avis, ce qui se passe en Colombie-Britannique avec les Nishgas montre que le Parlement n'a pas les choses en main. Les deux parties négocient un accord en secret. On le rend public en indiquant que nous devons l'approuver, sinon nous sommes racistes.

Ce n'est pas une façon d'agir au Canada. Nous devrions avoir un cadre de travail, et le gouvernement devrait avoir certaines directives sur la façon de négocier un accord d'autonomie gouvernementale qui respecte nos obligations envers les peuples autochtones du Canada. Je pense que la plupart des parlementaires pensent que nous avons cette obligation.

Je me souviens de l'étude que nous avons faite sur le projet de loi sur le Yukon. Nous avons entendu des témoignages de beaucoup de gens de ce territoire qui ne l'approuvaient pas. C'est ce qui arrive. La majorité des gens y étaient favorables, mais certains ne l'étaient pas et ils sont venus nous le dire.

Ce n'est pas inusité. J'ai entendu parler du projet de loi C-31 des millions de fois, mais personne ne m'a dit où était le problème. C'est quelque chose que les témoignages pourraient faire ressortir. Nous devrions discuter du projet de loi C-31 et de son lien avec ce projet de loi. Nous devrions discuter des questions en suspens. Nous tenons un débat qui devrait être celui du Parlement. Nous n'avons même pas étudié le projet de loi mais nous nous prononçons sur ce qu'il renferme.

On conteste aussi la nature fermée du projet de loi dans le sens il essaie d'accélérer le processus. Sénateur Austin, je m'occupe de cette question depuis quatre ans. Je veux qu'on finisse l'étude. On peut sûrement la finir et la soumettre à la discussion du Sénat. Si, dans leur bon jugement, les sénateurs pensent que le projet de loi n'est pas acceptable, ils ont le droit de le rejeter. Ils ont au moins le droit de se prononcer. Le comité aussi.

Je ne demande pas d'accélérer les choses. Je ne demande pas qu'on termine l'étude d'ici une ou deux semaines. Je demande qu'on effectue cette étude, qu'on la commence et qu'on la finisse un moment donné. C'est tout. Comme je suis le sénateur qui a présenté ce projet de loi, un projet de loi que le Sénat nous a renvoyé, je pense avoir le droit de formuler cette demande.

Monsieur le président, comme vous le savez, je suis un homme très patient. Il y a huit mois que nous avons été saisis de la question. Nous n'avons rien dit de mal. Nous avons eu des discussions intéressantes sur le sujet. J'essaie d'être aussi constructif que je le peux. Je suis simplement contrarié. J'aimerais bien qu'on commence à travailler. Je ne demande pas de savoir quand l'étude va se terminer. Je demande que nous commencions, que nous entendions des témoins, que nous discutions du projet de loi et que nous fassions ce que le sénat nous a demandé de faire. Je demande que le comité entreprenne son étude. J'aimerais savoir à quelle date nous pourrions commencer ou du moins quelle semaine.

Le président: Honorables sénateurs, je tiens à dire que je veux continuer à engager des discussions constructives avec vous en toute amitié. Si nous pouvons régler certains problèmes, et je crois que nous sommes tout à fait en mesure de trouver des solutions, c'est ce que j'entends faire.

Le sénateur Tkachuk: Très bien, parce que je vous ai observé au cours des réunions sur l'autonomie gouvernementale et vous êtes bien la dernière personne avec laquelle je veux être en conflit.

Le président: Je n'ai pas l'intention de me quereller non plus.

Je connais le point de vue des deux parties. Je comprends le point de vue du sénateur Austin, ainsi que celui du sénateur Tkachuk et de ses collaborateurs, celui du sénateur Gill et celui du sénateur Chalifoux.

Je n'entrerai pas dans les détails du projet de loi; on le fera plus tard. Sur le plan de la procédure, je crains avoir des problèmes, non seulement avec le parti ministériel, mais aussi avec les chefs autochtones. Il faut se rappeler que la façon dont nous avons structuré notre comité est différente de la façon dont les autres comités sont structurés, et je crois que nous avons toujours convenu entre nous que nous pouvions utiliser une autre formule que les audiences publiques.

Je suis très rassuré par le fait que vous voulez mettre cette question à l'épreuve. Quand on veut mettre une question à l'épreuve, les leaders autochtones et les leaders nationaux doivent intervenir et participer directement au résultat. Nous avons créé une table ronde spécialement pour qu'il y ait un dialogue et un débat avec les sénateurs.

Si j'ai bien compris le sénateur Tkachuk, vous voudriez contourner le mécanisme pour accélérer l'adoption du projet de loi parce qu'il traîne depuis longtemps. Je comprends et je vous approuve à ce sujet. Je crois que nous devrions convoquer des témoins et tenir des audiences publiques le plus tôt possible. Je n'ai aucune objection. Je l'indique aussi dans la lettre. Nous pouvons commencer n'importe quand. Toutefois, si le projet de loi d'initiative parlementaire est rejeté et que nous établissons un autre processus complètement indépendant du comité, nous ne pourrons pas y revenir.

Je me demande s'il n'est pas possible d'en arriver à un compromis. Nous pourrions profiter de ce projet de loi pour faire une mise à l'épreuve. Nous pourrions en débattre avec les chefs et voir si c'est l'un des modèles qu'ils envisageaient. Nous pouvons discuter du projet de loi. Vous pouvez nous dire comment vous concevez le fonctionnement de cette loi d'autorisation.

Nous pouvons nous entendre pour faire venir les témoins au plus tôt et pour étudier le projet de loi en parallèle. Toutefois, je ne tiens pas à contourner la table ronde sur la régie. D'une façon ou d'une autre, c'est là qu'il faudra que tout cela aboutisse.

Si, après la table ronde, les sénateurs qui débattent des questions jugent opportun d'aller de l'avant avec le projet de loi parce qu'il ne se dégage vraiment pas de consensus, nous pourrons alors décider d'aller de l'avant et de l'adopter. Pour l'instant, toutefois, le projet de loi demeure une question à étudier, même s'il s'agit d'une question de fond, à la table ronde. Pouvons-nous entendre sur cela?

Le sénateur Tkachuk: Qu'est-ce qu'une table ronde? Je ne suis pas sûr de comprendre. Je ne suis pas membre du comité. Qu'entendez-vous par table ronde?

Le président: La table ronde permet aux chefs autochtones de débattre avec les sénateurs et d'aborder certaines questions précises qui pourraient être restrictives ou qu'il faudrait faire connaître. Elle nous permet de mieux cerner les questions particulières qu'ils aimeraient aborder. Les audiences publiques feront ressortir une foule d'éléments.

Le sénateur Austin: Sous la direction du sénateur Watt, le comité a élaboré un processus grâce auquel les chefs autochtones rencontreront les membres du comité d'égal à égal pour discuter de questions comme l'autonomie gouvernementale. En fait, ils s'assoiront ici à nos côtés pour entendre les témoins. Cela ne signifie pas qu'ils sont sénateurs ou membres du comité. Ils seront des participants égaux au dialogue. En bout de ligne, bien sûr, c'est le comité qui siège pour prendre les décisions.

Si j'ai bien compris la suggestion faite par le sénateur Watt, les témoignages au sujet du projet de loi C-14 seraient également entendus dans ce contexte. Ai-je bien résumé la situation?

Le président: Vous l'avez expliquée d'une certaine manière, effectivement.

Le sénateur St. Germain: Ils ne peuvent pas étudier un projet de loi qui a été renvoyé au comité. Ils pourraient comparaître en tant que témoins, mais je ne crois pas que le projet de loi, en vertu de notre processus législatif, puisse être soumis à une table ronde. La table ronde vise à étudier le principe de l'autonomie gouvernementale.

Le sénateur Austin: Les deux processus se dérouleraient en parallèle. Beaucoup de témoignages viendraient des discussions à la table ronde, mais lorsque nous débattrons du projet de loi, seuls les membres du comité seront autorisés à le faire.

Le sénateur Tkachuk: Que ferez-vous du projet de loi visant l'accord avec les Nishgas?

Le sénateur Austin: Ce projet de loi nous sera renvoyé sous forme de projet de loi émanant du gouvernement ou de motion. Je ne suis pas certain.

Le sénateur St. Germain: Quelle est la différence? Il faudra bien en traiter.

Le sénateur Austin: S'il s'agit du processus législatif, seuls les sénateurs peuvent y prendre part. S'il s'agit d'une étude, nous pouvons lui donner la forme que nous souhaitons.

Le sénateur St. Germain: C'est juste. Essentiellement, le projet de loi C-14 franchit actuellement les étapes du processus législatif. Le projet de loi concernant les Nishgas nous sera également renvoyé dans le cadre du processus législatif, non pas en tant que sujet d'étude. C'est tout à fait différent.

Je suis d'accord avec le sénateur Gill lorsqu'il dit vouloir que les chefs autochtones comparaissent comme témoins au sujet du projet de loi C-14. S'ils s'adonnent à être ici au même moment et que nous en traitons en leur présence, soit.

Toutefois, nous ne pouvons pas soumettre le projet de loi S-14 à une table ronde, pas plus que nous pourrions le faire pour l'accord avec les Nishgas. Je ne dis pas qu'il n'en sera pas du tout question à la table ronde, mais il faudra qu'il s'agisse d'un processus distinct et vraiment parallèle, plutôt qu'intégré.

Le sénateur Tkachuk nous a indiqué comment commencer l'étude. Le sénateur Austin nous a indiqué comment la finir. Ce sont de bonnes idées. Il faudrait que nous l'entreprenions aussi vite que peut l'organiser le président. Nous pourrions peut-être avoir fini d'ici le 30 avril.

Le sénateur Tkachuk: Si l'on y met fin le 30 mai, juin pose problème. À ce moment-là, vous n'auriez peut-être plus le temps d'en débattre à la Chambre du Sénat.

Le sénateur Austin: Je ne vois pas la différence. Le sénateur St. Germain a dit que les points soulevés par le projet de loi peuvent être discutés à la table ronde.

Le sénateur Tkachuk: Naturellement. Pourquoi pas?

Le sénateur Austin: Il faut avoir un processus distinct, cependant, quand nous en arrivons à l'étude article par article du projet de loi. Nous ne pouvons pas y inclure des gens de l'extérieur. Dans notre régime parlementaire, seuls les sénateurs peuvent y participer. Cela pose-t-il un problème?

Le président: Non.

Le sénateur Berntson: Nous avions une définition extrêmement souple du mot «parallèle» il y a quelques minutes. Vous parlez maintenant d'un processus «parallèle» pour désigner un processus distinct et sans aucun lien, plutôt que d'un processus qui se déroulerait en même temps que l'étude. Cela ne me cause pas de difficulté.

Le sénateur Austin: L'autonomie gouvernementale comprendra toutes les questions que soulève le projet de loi. Nous pouvons en discuter à la table ronde avec nos collègues autochtones, mais il faudrait aussi en faire une étude distincte dans le cadre de laquelle nous entendrons des témoins sur le projet de loi S-14. Il y aura deux processus. Je ne crois pas que le président y soit opposé.

Le président: Je ne le suis pas. Toutefois, quand l'étude prendra fin, quand nous en aurons vraiment fini avec le projet de loi S-14, on continue de s'attendre que nous en traitions séparément et que nous le renvoyions au Sénat. De là, il ira à la Chambre des communes. Ce problème persiste.

Le sénateur Austin: C'est une mesure législative. En fin de compte, il faut en traiter comme tel. Si le fond du projet de loi ne nous plaît pas, nous ne l'appuierons pas.

Le sénateur St. Germain: Vous en avez le droit.

Le président: Voyons le bon côté. Si des amendements précis au projet de loi s'imposent, nous pourrons en discuter.

Le sénateur Tkachuk: C'est juste.

Le sénateur Austin: Certains d'entre nous proposeront peut-être des amendements. Je suis certain que le sénateur Chalifoux en aura à proposer.

Le président: Nous avons ensuite l'obligation de le renvoyer au Sénat.

Le sénateur Austin: Le sénateur Tkachuk a affirmé qu'il était ouvert à l'idée de débattre d'amendements au projet de loi.

Le sénateur Tkachuk: J'y suis toujours ouvert. J'ai de la difficulté à concevoir qu'on ne propose pas à tout le moins, si l'on ne les adopte pas, des amendements au projet de loi.

Le sénateur St. Germain: Je crois que notre délai devrait être le 30 avril. Cela nous donne tout le mois de mars et le mois d'avril pour étudier le projet de loi.

Le président: Combien faudra-t-il de séances pour entendre vos témoins?

Le sénateur Tkachuk: Cela dépendra en réalité du comité et des questions qui n'auront pas été réglées. Si nous entendons les témoins et que vous avez d'autres questions à leur poser, nous pouvons toujours les réinviter. Ils ont demandé que nous leur donnions un avis de deux semaines. Si vous payez les billets d'avion, vous souhaiterez probablement économiser de l'argent en réservant les sièges plus de deux semaines à l'avance. Ils ont tous leurs propres engagements et des emplois. Ils préfèrent donc être avisés d'avance.

Le président: La question n'est pas nouvelle. Nous avons déjà tenu des audiences à ce sujet et nous avons entendu des témoins. J'essaie d'organiser un calendrier réaliste, plutôt que de procéder à la pièce comme c'est le cas actuellement, méthode qui ne donne pas de très bons résultats. Je proposerai un calendrier à notre caucus. Nous y apporterons les dernières retouches, puis nous le ferons imprimer sous forme de grille.

Pour ce qui est du calendrier projeté des audiences sur l'autonomie gouvernementale, y compris la table ronde sur la régie, nous avons prévu, provisoirement, de tenir la table ronde le 23 février. En y mettant de la bonne volonté, croyez-vous possible de faire le tour de cette question durant les quatre semaines de février?

Le sénateur Tkachuk: C'est tout à fait possible, si nous avons un calendrier et que nous organisons la comparution des témoins.

Le président: Nous examinerons le fond, plutôt que d'analyser le texte ou de faire une étude article par article, avec les dirigeants autochtones, après quoi le projet de loi reviendra au comité.

Le sénateur St. Germain: Le processus est fondé davantage sur l'avis de membres commele sénateur Chalifoux. Elle souhaite entendre des témoins. Pour notre part, les témoins que nous souhaitons entendre sont des gens comme les rédacteurs du projet de loi, de manière à ce que nous puissions en faire l'examen article par article. Ces personnes sont disposées à venir témoigner. Elles demandent qu'on les avise deux semaines à l'avance et elles seront ici.

Le sénateur Chalifoux, le sénateur Gill ou un autre sénateur souhaitera peut-être entendre plus de témoins ou estimera peut-être que plus de témoins devraient être présents. Cela pourrait alourdir votre programme. Toutefois, ceux qui proposent le projet de loi sont disposés à en faciliter l'examen article par article et à appuyer le projet de loi tel quel.

Le sénateur Chalifoux: Vous parlez des personnes de Slave Lake?

Le sénateur St. Germain: Exact.

Le sénateur Chalifoux: Nous souhaitons aussi entendre des femmes, qui sont vivement préoccupées par le projet de loi. Plusieurs chefs sont très inquiets. Ils devraient avoir le droit de prendre la parole.

Le sénateur Tkachuk: Parlez-vous des chefs du Lesser Slave Lake Band Council?

Le sénateur Chalifoux: À vous d'en décider.

Le sénateur Tkachuk: Nous les avons déjà entendus. Ils sont venus et ils ont témoigné. S'il y a d'autres chefs au pays qui souhaitent prendre la parole au sujet du projet de loi, qu'ils le fassent.

Le sénateur Chalifoux: Le projet de loi ne vise pas que le Regional Council of Slave Lake; il touche tout le monde.

Le sénateur Tkachuk: Seulement s'ils décident d'adopter le modèle.

Le sénateur Chalifoux: Ils ne comprennent pas cela.

Le sénateur Austin: Quand vous établissez un modèle, vous changez toute la toile de fond qui sert aux négociations.

Le sénateur Gill: C'est un point important. Il ne faudrait pas empêcher les personnes d'assister aux audiences. À titre d'exemple, le projet de loi dit que la Loi canadienne sur les droits de la personne ne s'applique pas aux mesures qui pourraient être prises sous le régime de cette loi. Cela s'applique à tout le monde. Tout dépend de la façon dont vous voulez vous y prendre.

Le sénateur Tkachuk: C'est la façon dont on procède actuellement. L'idée vient de la Loi sur les Indiens. La Loi sur les droits de la personne ne s'applique pas en vertu de la Loi sur les Indiens. C'est donc le statu quo.

Le sénateur Gill: Toutefois, il ne faudrait pas empêcher ces gens de venir en parler.

Le sénateur Tkachuk: On ne fait que reprendre un principe inscrit dans la Loi sur les Indiens.

Le président: Pouvons-nous en revenir au calendrier? La date du 23 février est un peu trop rapprochée et celle du 30 avril, un peu trop éloignée. Que diriez-vous du mois de mars?

Le sénateur Austin: Je ne crois pas que vous puissiez entendre les personnes qui souhaitent témoigner au sujet du projet de loi aussi rapidement. Plusieurs personnes sont très inquiètes des répercussions qu'aura le projet de loi sur ceux qu'il exclue.

Le sénateur Tkachuk: Le greffier peut peut-être nous dire si nous avons reçu des lettres d'éventuels témoins. Un de ces intéressés a-t-il écrit pour demander à témoigner?

M. T<#00F5>nu Onu, greffier du comité: La seule liste de témoins que j'ai est celle que vous avez proposée. Jusqu'ici, aucun autre groupe n'a communiqué avec moi.

Le sénateur Chalifoux: Je n'ai pas présenté de liste parce que le projet de loi, que cela nous plaise ou non, n'a pas fait l'objet de beaucoup de publicité au sein des collectivités autochtones. Tout n'est que rumeurs et sous-entendus. Voilà le genre d'appel que je reçois.

Le sénateur Tkachuk: J'ai envoyé un exemplaire du projet de loi à toutes les bandes du pays en 1994.

Le sénateur Chalifoux: Il y a 633 bandes. C'était en 1994. Beaucoup de chefs et de conseillers ont changé depuis lors.

Le sénateur Tkachuk: Je ne tiens pas à en discuter. Par contre, je tiens à déclarer officiellement que nous avons vraiment cherché à distribuer le projet de loi à toutes les bandes du pays. Nous en avons aussi distribué un exemplaire à chaque journal autochtone.

Le sénateur Mahovlich: Chaque bande a-t-elle un chef?

Le sénateur Chalifoux: Oui. Ce serait la même chose, si vous étiez en Allemagne. Chaque groupe ethnique d'Allemagne a son propre conseil.

Le sénateur Mahovlich: Pouvons-nous entendre 633 chefs et avoir terminé en avril?

Le sénateur Chalifoux: Non, non.

Le sénateur Mahovlich: N'y a-t-il pas un seul chef qui représente tous les autochtones?

Le sénateur Chalifoux: Non, parce qu'au Canada, il y trois nations autochtones différentes. Cela reviendrait à me demander si tous les Ukrainiens n'ont pas un seul représentant au pays. La réponse est «non».

Le sénateur Andreychuk: Ils n'en ont pas un seul, mais leur nombre est inférieur à 600 par contre.

Le sénateur Austin: Il en a été question l'autre jour dans un article paru dans le Globe and Mail.

Le sénateur Tkachuk: Fixer l'échéance à la fin de février n'exige pas l'adoption d'une motion.

Le président: J'aimerais me faire une idée.

Le sénateur Tkachuk: Si plus de témoins écrivent au greffier et que nous souhaitons reculer l'échéance, je n'y vois pas de mal.

Le sénateur Austin: Pourquoi ne pas fixer l'échéance au 30 mars? Si nous ne nous fixons pas une date limite, cela pourrait se prolonger indéfiniment.

Le président: Il est question de mener en parallèle l'étude du projet de loi et l'autre étude. Il faut tenir compte du facteur temps, sans quoi il ne nous en restera plus. J'essaie de tout résumer pour que nous puissions au moins essayer d'atteindre nos objectifs. Si vous souhaitez fixer une date finale et si le 31 mars ne pose pas de problème, ce serait ma préférence. Je crois que nous avons réussi à nous entendre.

Des voix: D'accord.

Le sénateur Tkachuk: Je vous remercie, monsieur le président et chers collègues.

Le président: Sénateur Tkachuk, lorsque j'aurai déposé le calendrier sur lequel nous nous serons entendus au sein de notre caucus et s'il est acceptable, vous pourrez dire à vos gens que nous prévoyons tenir les audiences en février. Nous ne savons pas encore si le Sénat siégera le 2 février ou le 9. Nous y reviendrons plus tard. Nous vous le laisserons savoir. Dites à vos gens que nous sommes prêts à les entendre le plus tôt possible.

Le sénateur Tkachuk: Je leur dirai de se préparer pour le 1er février et que nous saurons la date exacte dès que nous aurons ajourné.

Le sénateur Austin: Je propose que nous prévoyions commencer les audiences durant la première semaine de février. J'ignore si le Sénat siégera à ce moment-là, mais nous pouvons tout de même prévoir deux ou trois journées d'audiences pour se mettre dans le bain et aller de l'avant.

Le sénateur Tkachuk: Cela me convient.

Le président: Nous y reviendrons.

Le sénateur Andreychuk: Nous menons actuellement une étude très coûteuse. J'espère que nous respecterons les échéances la concernant -- ainsi que celle-ci -- parce qu'il reste beaucoup de travail à faire.

Le sénateur Austin: C'est ce dont nous avons discuté tout au long de la réunion.

Le sénateur Andreychuk: Sommes-nous en train de dire que le projet de loi aura la priorité?

Le sénateur Austin: Non, il sera étudié en parallèle.

Le sénateur Andreychuk: Sommes-nous en train de créer un problème?

Le président: Nous savons qu'il s'agit d'un compromis.

Nous allons poursuivre notre séance à huis clos afin de traiter de certaines autres questions.

Le comité poursuit sa séance à huis clos.


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