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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones

Fascicule 10 - Témoignages pour la séance de l'après-midi


OTTAWA, le mardi 17 octobre 2000

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, auquel a été renvoyé le projet de loi C-14, Loi concernant l'accord conclu avec la Nation crie de Norway House sur le règlement des questions liées à la submersion de terres et concernant la création de réserves au Manitoba, se réunit aujourd'hui, à 16 h 35, pour en étudier la teneur.

Le sénateur Thelma J. Chalifoux (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente: Veuillez commencer, monsieur Hart.

M. Bryan Hart, membre de la Nation crie de Norway House: Madame la présidente, je suis heureux de comparaître devant votre comité aujourd'hui. J'ai témoigné devant le Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord en mars 1998, quand le comité a examiné le projet de loi C-14. Je ne peux pas dire avoir été très satisfait de la façon dont le comité a réagi aux questions ou préoccupations que j'ai soulevées ou à celles soulevées par d'autres qui seraient en désaccord avec ce qui se passe au sujet de la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba et de ce projet de loi. Je ne suis pas trop certain que la réunion d'aujourd'hui fera avancer les choses, du moins comme je le voudrais. Quoi qu'il en soit, je suis heureux de m'adresser à vous aujourd'hui.

Il y a beaucoup à dire au sujet de la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba. Il m'est impossible de rendre compte de tous les détails comme je le voudrais. Je vais donc brosser un tableau très sommaire de ce que la Nation crie de Norway House a vécu pendant un certain nombre d'années et de ce qu'elle a subi de la part du gouvernement du Canada. C'est une explication très simplifiée d'une suite ou d'une série d'événements.

Je pense que tous les sénateurs membres du comité connaissent très mal les enjeux et la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba, et que vous ne savez pas non plus vraiment où se trouve Norway House. Je crois que vous êtes très peu renseignés sur un bon nombre de questions. C'était aussi le cas des membres du Comité permanent de la Chambre des communes.

Je vais vous expliquer de façon claire, simple et concise la dynamique d'un règlement par marchandage. Mon récit s'intitule la destruction d'un traité, et la politique du Canada telle qu'elle est. Il y a 13 étapes que je veux vous exposer. Elles montrent pourquoi, d'après moi, nous en sommes ici aujourd'hui.

Déposséder les Premières nations de leurs terres et de leurs ressources est la première de ces 13 étapes. C'est la politique appliquée par le Canada à l'égard des Indiens depuis le tout début. Le gouvernement du Canada a signé avec les Premières nations un accord qu'il n'a pas l'intention de respecter. La pression de l'opinion publique est la seule raison pour laquelle les accords ont été signés, la seule raison.

En deuxième lieu, une fois que les terres et les ressources ont été saisies au profit de grandes populations non autochtones, vous ne tenez plus compte des obligations et des responsabilités prévues dans l'accord, parce que la pression de l'opinion publique est moins forte. C'est la politique appliquée par le Canada à l'égard des Indiens depuis le tout début. On veut déposséder les Premières nations de leurs terres et de leurs ressources.

Troisièmement, en 1982, il s'est passé quelque chose. On sait que la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba a été signée en 1977. Or, vous savez que l'accord est maintenant protégé par l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982, qui reconnaît et inclut les accords existants, comme la Convention sur l'inondation des terres du Manitoba. On se préoccupe un peu de savoir si l'accord est beaucoup plus concret maintenant qu'au moment de sa signature. Vous devez y porter attention. Parce qu'il vaut beaucoup plus cher maintenant, vous allez devoir l'examiner. Il semblera peut-être que vous allez y donner suite.

Quatrièmement, vous continuez de vous dégagez de vos obligations et de vos responsabilités. Ainsi, les cinq Premières nations cries touchées ne tirent aucun avantage de cet accord. Vous réduisez même les fonds versés normalement pour les programmes dans l'intention d'appauvrir les communautés. La politique de la contrainte ou de la privation continue. Cette situation est mise en évidence en 1985 dans le rapport Nielsen, qui montre que le financement par habitant et les fonds des programmes des bandes ont été considérablement réduits dans le cas de celles qui sont liées par la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba. À peu près 10 000 $ par habitant ont été dépensés dans chacune de ces cinq communautés, par rapport à 25 000 $ dans les cas des autres Premières nations qui ne sont pas liées par la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba.

D'après le rapport du groupe de travail Nielsen, cette situation est conforme à la façon dont le Canada s'occupe des traités. Quand il y a des responsabilités en cause, c'est ce qui se passe, c'est ce que le Canada fait. Je vous exhorte à jeter un coup d'oeil au rapport Nielsen de 1985, qui dit explicitement que le gouvernement du Canada applique une politique de contrainte, d'appauvrissement et de privation à notre égard.

La cinquième étape consiste à diviser pour régner sur les Premières nations en supprimant le financement de base du Comité des inondations dans le Nord, qui défend la position commune des cinq bandes touchées. Les bandes ne s'expriment plus d'une seule voix. Je vous renvoie au témoignage fait devant le Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord, en 1985, quand un projet de loi concernant la Première nation crie de Split Lake a été examiné par la Chambre des communes et le Sénat avant de devenir loi. Après un certain nombre d'années de contrainte et d'appauvrissement, vous avez choisi une des communautés les plus petites et les plus démunies pour employer l'approche du bâton et de la carotte. Vous avez choisi la Nation de Split Lake.

Après avoir connu pendant 10 à 15 ans des politiques fondées sur la contrainte, l'appauvrissement et le non-respect de l'intégrité, de l'esprit et de l'intention des accords, les Premières nations s'impatientent et exigent que leurs dirigeants obtiennent des résultats visibles. Où sont les résultats, se demandent-ils? Les chefs sont élus en partant du principe qu'ils vont finir par obtenir des résultats.

J'aimerais signaler que le rapport de la Commission d'enquête de justice autochtone du Manitoba a conclu que la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba était un traité moderne avec des droits clairs. J'aimerais rappeler le témoignage que Warren Allmand a fait devant le Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord en mars 1988. En tant que ministre responsable des Affaires indiennes et négociateur de la Convention au nom du Canada, il a déclaré qu'il était entendu que la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba était un traité et que ses avantages, ses dispositions et les responsabilités du gouvernement à cet égard seraient maintenues. Je vous renvoie à son témoignage.

Septièmement, vous travaillez avec ces nouveaux dirigeants. Parfois, les dirigeants sont les mêmes parce qu'ils sont réélus. Vous travaillez avec les chefs des Premières nations en prétendant négocier la mise en oeuvre de l'accord. Cependant, vous leur offrez seulement de l'argent, qui sera versé uniquement si l'accord original est remplacé par un accord final qui vous dégage de vos responsabilités. Autrement dit, le message est le suivant: «De l'argent aujourd'hui, pour ne plus avoir de soucis demain. Plus de responsabilités, d'avantages ou d'obligations». On a mené une campagne trompeuse qui s'est poursuivie.

Huitièmement, vous avez offert de l'argent et quelques autres cadeaux aux Premières nations à la condition que cela fasse partie d'un règlement final. C'est prématuré dans le processus de négociations. Cependant, une fois que cet argent est versé et rapidement dépensé, les chefs des Premières nations ne peuvent plus reculer. Le résultat final est connu dès le début. C'est la façon dont les chefs des Premières nations sont traités aujourd'hui par le ministère des Affaires indiennes et du Nord et par le gouvernement du Canada.

Neuvièmement, vous mettez les chefs des Premières nations en confiance et vous vous occupez bien d'eux. Vous pouvez même leur offrir un dîner bien arrosé. Sans le savoir, ils deviennent les nouveaux agents indiens de l'État. Ainsi, vos nouveaux agents vont achever tout le travail qu'il reste à faire.

Dixièmement, les dirigeants présentent seulement un côté de la médaille. Ils financent même la désinformation et la propagande. Vous ne vous préoccupez pas des plaintes des opposants qui écrivent et téléphonent pour dire qu'ils ne peuvent avoir accès aux médias locaux ou s'exprimer sous peine d'être punis. Ils perdent leur emploi et sont victimes d'intimidation. Vous répondez que c'est la rançon de l'autonomie gouvernementale. Il n'y a jamais eu d'intégrité de la part du gouvernement du Canada au sujet de l'autonomie gouvernementale. C'est seulement dans des circonstances comme celles-ci que vous parlez en bien de l'autonomie gouvernementale. On nous offre de nous présenter comme chefs. Pourquoi? Pour que nous puissions être vos représentants? Pour que nous puissions travailler pour le gouvernement du Canada?

Onzièmement, par des avances en argent comptant et d'autres mesures directes et indirectes, vous poussez les nouveaux agents indiens à faire face aux préoccupations grandissantes des communautés. Étant donné que l'accord est protégé par la Constitution, vous convenez qu'il nécessite le consentement informé des membres de la communauté. La décision de renoncer à la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba ne peut être prise seulement par le chef et le conseil. Vous reconnaissez que la communauté devra donner son consentement par la voie d'un référendum officiel pour que la question de la protection constitutionnelle de l'accord soit réglée légalement.

Douzièmement, vous encouragez les chefs des Premières nations à offrir une indemnité de 1 000 $ à chaque homme, femme ou enfant pour que le vote soit favorable. Avec un taux ce chômage de 60, 70 et 80 p. 100 et une énorme dépendance à l'aide sociale, je pense que l'intention est bien claire. Je parle du ministère des Affaires indiennes et du Nord, du gouvernement du Canada.

Treizièmement, vous appuyez les dirigeants le plus possible au cours du processus référendaire pour obtenir les résultats souhaités. Vous organisez un autre référendum si les résultats du premier ne sont pas satisfaisants. En fait, vous changez les règles. Vous assouplissez les conditions la deuxième fois, moins de deux mois après le premier scrutin. Vous faites en sorte qu'il soit plus facile d'obtenir un résultat favorable. Vous supprimez des seuils spéciaux qui étaient jugés importants au début pour veiller à ce que la décision soit claire. Vous baissez les normes pour avoir gain de cause, moins de deux mois après l'échec du premier référendum. C'est ce que le ministère des Affaires indiennes et du Nord a fait. Il s'est occupé de l'opération. Pendant que le référendum s'organisait, le gouvernement fédéral soutenait devant la Cour suprême du Canada, dans la cause de la sécession du Québec, qu'un référendum n'est pas le mécanisme à utiliser pour faire modifier la Constitution. Le gouvernement a parlé des actes répréhensibles commis lors des différents référendums. Il a signalé l'importance de l'équité pour s'assurer que toutes les informations sont transmises aux Québécois, anglophones et francophones. Le Canada a fait valoir des principes rigoureux. Le Canada plaidait la vertu devant la Cour suprême du Canada. Pourtant, au moment où il présentait ses arguments à la Cour suprême du Canada dans l'affaire de la sécession du Québec, il était à Norway House. Il surveillait un deuxième référendum et changeait les règles pour obtenir ce qu'il voulait.

Je vous renvoie au témoignage de Peter Russell. J'imagine que tout le monde a entendu parler de lui. Il a aussi comparu devant le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones en mars 1988. Je vous renvoie aussi à la lettre que M. Jackson a adressée aux représentants du ministère des Affaires indiennes et du Nord. M. McKay a un exemplaire de cette lettre et il peut vous la distribuer. La destruction d'un traité et la politique du Canada -- le traité étant ici la Convention sur l'inondation des terres du Nord du Manitoba et les Autochtones touchés la Nation crie de Norway House -- ne sont pas différentes de tout ce qui s'est passé autrefois et elles ne seront probablement pas différentes de tout ce qui se produira dans l'avenir.

En conclusion, je veux que la Convention sur l'inondation des terres du Nord du Manitoba soit considérée comme un traité. Même si d'éminents juristes et experts d'autres disciplines sont venus dire que la Convention est clairement un traité, le gouvernement prétend que ce n'est pas le cas. Personne ne veut mettre sa réputation en jeu en disant que ce n'en est pas un, parce qu'il ne peut pas le faire. Tout au long du processus, y compris les quelques minutes passées avec le Comité permanent des affaires autochtones en mars 1988 et les quelques minutes passées avec des représentants du ministère des Affaires indiennes il y a quelque temps, personne n'a voulu s'attaquer au problème au grand jour. Et pourtant, on vous demande d'adopter cette mesure rapidement et de ne pas vous occuper de la question des droits issus de traités. On vous demande d'agir rapidement parce que des élections seront déclenchées dimanche et qu'il faut que cette mesure ait force de loi au Canada.

Personne ne veut aborder la question des traités, mais c'est précisément pour en parler que je suis ici. J'aimerais que vous examiniez la question des droits issus de traités qui a toujours été entourée d'un écran de fumée. En terminant, voici deux réflexions et une recommandation. Je me demande d'abord quelle serait la réaction du Canada si Lucien Bouchard prenait le contrôle des médias au Québec et empêchait les anglophones d'exprimer leur opinion en public et de donner une version différente des faits. Que se passerait-il si M. Bouchard offrait à chaque homme, femme et enfant du Québec une somme forfaitaire, disons par exemple 1 000 $, dans l'éventualité d'une réponse affirmative? Quelle serait la position du Canada? Comment le gouvernement fédéral réagirait-il? Comment réagiriez-vous, à titre de sénateurs?

Les droits issus de traités sont fort intéressants. On les considère parfois uniquement comme des questions et des problèmes autochtones. Toutefois, on oublie souvent un élément: tous les Canadiens ont des droits en vertu du Traité 5. Toutes les personnes ici présentes ont des droits en vertu de ce traité. Vous avez le droit de vous établir dans le nord du Manitoba, d'y travailler, d'y acheter une maison et de considérer qu'elle vous appartient. C'est l'avantage de la signature de ce traité. Vous n'avez pas les droits accordés aux Premières nations, mais vous avez d'autres droits découlant du Traité 5. La Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba vous confère également des droits, puisque les ressources hydroélectriques réduisent les coûts d'électricité si vous vivez à Winnipeg. Voilà les droits que vous accorde cette convention. Or, les Canadiens ne semblent même pas savoir qu'ils ont des droits issus de traités.

Je vous demande donc, en tant que membres d'un comité du Sénat: pourquoi les droits conférés aux Canadiens en vertu de traités sont-ils respectés d'emblée alors que ceux des Premières nations doivent constamment être réaffirmés? Si ces traités ne vous confèrent aucun droit, j'ai le regret de vous informer que vous occupez des terres volées, parce que, c'est l'avantage qui vous est consenti en vertu des traités.

Enfin, j'aimerais faire une recommandation. Je ne suis pas ici uniquement pour faire des éclats et m'emporter. Si j'évalue bien l'autorité dont votre comité est investi, vous pouvez renvoyer le projet de loi à la Chambre des communes afin qu'il soit remanié. Je recommande donc le renvoi du projet de loi C-14 à la Chambre pour deux raisons.

En premier lieu, il faut en faire deux projets de loi distincts. La première partie porte sur la question que je viens d'aborder, et la deuxième sur un autre aspect qui ne me pose aucun problème. En fait, ces deux parties ont été réunies afin de provoquer une dissension entre nous. Plusieurs d'entre nous aimeraient que la deuxième partie soit ratifiée parce qu'elle ne pose aucune difficulté. Séparons donc ces deux parties parce qu'elles traitent de deux questions différentes.

En deuxième lieu, il faut ajouter au projet de loi une disposition de protection. L'accord de règlement comporte une clause non dérogatoire extrêmement faible pour ce qui est de la protection des droits issus de traités. Elle dispose simplement qu'aucun élément de cet accord de n'est censé modifier ou remettre en question des droits ancestraux ou issus de traités. Le libellé parle d'intention. Or, il est trop facile de déclarer nous n'avions pas l'intention de le faire, mais nous l'avons fait. Cela ne me satisfait pas et ne peut satisfaire personne ayant soif de justice. Pourquoi ne dit-on pas que les droits des Autochtones issus de traités ne seront pas affectés? Clarifions la situation pour tous les intéressés. C'est fort raisonnable. Je vous demande de retourner le projet de loi C-14 afin qu'on ajoute, à la Partie 1, une disposition non dérogatoire ferme au sujet des traités. Le comité permanent de la Chambre a examiné un projet d'amendement rédigé par un député du Bloc québécois. Cette proposition a fait l'objet d'une motion mais a été rejetée. C'est pourtant une demande simple et raisonnable. Examinons sérieusement la question des traités car elle revêt de l'importance non seulement pour nous mais aussi pour vous, puisque vous avez des droits en vertu de traités.

La présidente: Monsieur McKay, voulez-vous dire quelques mots?

M. Leonard McKay, membre de la Nation crie de Norway House: Je vais essayer d'être bref. Merci de l'occasion que vous m'offrez. J'ai aussi participé aux audiences du comité à Ottawa, en 1998.

Je veux parler de trois sujets: Le référendum, l'environnement et les circonstances. Je vais commencer par l'environnement. Il n'y a pas eu d'étude d'impact effectuée avant l'adoption de l'Accord cadre de mise en oeuvre. Dans cet accord, et d'après ce qui a finalement été accepté, on a changé les données de base de 1977 à 1970. Ce changement dans l'accord cadre a ajouté un pied de plus à la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba, convenue en 1977. Un pied d'eau dans un lac de 300 milles de long est énorme, si on pense à toute l'eau de plus qui pourrait être utilisée par la compagnie d'électricité. Aucune étude d'impact n'a été effectuée pour évaluer le coût de cette modification. C'est crucial, parce que la question de l'environnement n'a jamais été examinée, ni par la Nation de Norway House, ni par les parties. Nous ne les avons jamais vues à Norway House. Je crois que c'est important d'examiner cette question qui aura d'énormes conséquences.

Le niveau d'eau élevé a détruit les terrains des chalets autour du lac Winnipeg. Nous vivons au bout du bassin où l'eau est retenue et utilisée pour la production d'électricité, et cela a donc un impact important. C'est très inquiétant pour ce qui est de l'environnement parce que les données de base ont été changées et que cela a entraîné l'ajout d'un pied d'eau dans le lac Winnipeg au-delà de ce qui a été prévu dans la Convention sur l'inondation des terres du nord de Manitoba.

Pour ce qui est du referendum, je vais rappeler ce qui s'est passé avec les Affaires indiennes. Je soutiens que le ministère était en conflit d'intérêts, et cela pour trois raisons. Premièrement, le MAINC siégeait à la table de négociation; il était représenté par les employés de la région du Manitoba. Deuxièmement, le MAINC organisait le référendum. Comme le premier référendum n'a pas donné les résultats escomptés, Sandy Jackson a écrit au négociateur principal, pour indiquer qu'il était possible de tenir un deuxième référendum si le conseil était d'accord et si les autres parties ne s'y opposaient pas. Mme Jackson, qui est une négociatrice principale, est censée représenter nos intérêts. Troisièmement, les appels devaient être présentés aux Affaires indiennes. Celui qui m'a répondu est John Sinclair, le sous-ministre adjoint chargé des revendications territoriales et de l'administration indienne. Ce sont ces personnes qui ont organisé le référendum, qui ont participé aux négociations et à qui je devais en appeler pour contester le résultat du deuxième référendum parce que j'estimais que les règles avaient changé.

C'est important. J'ai envoyé ma contestation le 26 septembre 1997. La lettre de réponse était datée du 19 novembre. Je ne l'ai reçue par courrier qu'autour du 25 novembre.

Je soulève ces deux questions parce qu'elles son cruciales. La cause a été entendue par le tribunal de septembre à novembre. Le conseil voulait attirer l'attention sur la question. On avait prévu envoyer 10 autobus à la Cour fédérale pour protester si le juge prenait trop de temps.

Le 20 novembre, deux jours après que j'eus reçu la lettre par courrier, des fonds ont été affectés par le Canada pour le paiement intégral par habitant les 15 et 16 décembre. Ce sont les mêmes personnes qui sont censées représenter mes intérêts et les intérêts de mes enfants qui ont distribué l'argent. En même temps, le 17 décembre, John Sinclair a rencontré le chef et des sous-ministres adjoints, des gens haut placés à Ottawa au sujet de l'Accord cadre de mise en oeuvre. C'est à cet homme que j'ai présenté ma contestation.

La question en cri n'a pas été affichée. On ne l'a pas vue. Elle existait peut-être, mais nous ne l'avons pas vue parce qu'elle n'a été affichée nulle part. Ce fut le cas pour le premier et le deuxième référendum. À vrai dire, il n'y a pas eu de question en cri pour le deuxième référendum, même si elle était plus courte. Quand on a demandé aux gens s'ils voulaient un deuxième référendum, on leur a aussi demandé s'ils voulaient de l'argent. C'est pourquoi beaucoup de gens ont signé la pétition demandant de tenir un deuxième référendum; ils voulaient avoir 1 000 $ ou 1 500 $. Noël approchait. J'ai pu prendre connaissance de la question en cri seulement en m'adressant au bureau d'accès à l'information. Je n'y ai trouvé qu'un résumé de la question, non pas la traduction de toute la question.

Les guides qui ont été distribués le 6 juin 1997 indiquent que nos droits issus de traités ne seront pas modifiés par l'Accord cadre de mise en oeuvre. Dans le gros document explicatif de l'accord, il y a une petite phrase qui indique qu'il n'est pas censé toucher aux droits issus de traités. Les gens ont eu l'impression que leurs droits ne seraient pas touchés parce que le guide, qui a été produit aux frais du gouvernement du Canada, l'indiquait. Leurs signatures se trouvent dans ce guide.

Le gouvernement du Canada a indiqué de façon non équivoque qu'il aurait recours à l'arbitrage tant qu'il n'aurait pas obtenu les résultats souhaités. Au cours du deuxième référendum, les portes ont été fermées deux fois. Personne n'était autorisé à entrer. Des gens ont dû attendre une demi-heure. Cela aurait-il été permis au cours d'un référendum tenu par Lucien Bouchard? C'est ce qui s'est produit dans notre cas. Les gens ne pouvaient pas aller voter. Également, beaucoup de gens ont indiqué que les bulletins de vote qu'ils ont déposés dans l'urne étaient numérotés et que ce numéro correspondait à leur nom sur le bulletin. On a promis des montants de 1 000 $ ou 1 500 $ aux personnes âgées de 55 ans et plus à la date de signature si l'accord était ratifié.

Puis il y a eu un étrange rebondissement. Une fois le document signé, les gens ont voulu obtenir l'indemnité promise en décembre 1997, mais on a dit à ceux qui avaient fait une contestation devant le tribunal qu'ils ne recevraient pas d'argent à moins de signer un affidavit préparé par Harvey Secter, qui était censé être un conseiller juridique indépendant pour l'Accord cadre de mise en oeuvre. Pour obtenir leur argent, qui leur était dû depuis le début, les gens ont dû signer un affidavit indiquant qu'ils ne savaient pas ce qui se passait.

Il est également étrange qu'on ait signalé des problèmes avec la liste des électeurs quand le référendum n'a pas donné les résultats escomptés, et que la bande n'a pas contesté cela. De nouvelles règles ont plutôt été établies. La bande n'avait pas le choix de contester, mais elle ne voulait pas le faire, et il aurait été ridicule que le MAINC se conteste lui-même. Au lieu de suivre toutes les étapes de l'instruction d'un appel, le ministère a changé les règles pour pouvoir tenir un deuxième référendum.

Enfin, de 1981 à 1984, il s'est produit certaines choses. J'ai reçu ce document du Bureau d'accès à l'information. La Convention de la Baie James était aussi ambiguë que la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba. Cependant, comme les représentants de la Baie James sont allés rencontrer le comité permanent pour discuter du non-respect de leur accord, le comité a exceptionnellement décidé d'écrire au ministre des Affaires indiennes pour lui demander de mettre en oeuvre l'accord. Le gouvernement était embarrassé. Il ne voulait pas que la situation de la Baie James se reproduise, et il a fait traîner les choses. Le gouvernement a retardé l'accord et a utilisé tous les mécanismes d'arbitrage possibles pour ne pas accorder d'avantages.

Le gouvernement a même voulu inciter l'arbitre à partir en lui offrant les 25 millions de dollars qu'il était prêt à verser aux bandes. Le gouvernement voulait se débarrasser de l'arbitre parce que la question avait des répercussions sur les décisions financières et de politique des ministres et du Parlement. Le gouvernement est censé être notre fiduciaire et il a des obligations contractuelles et légales à notre égard. C'est bien le MAINC qui a fait tout cela. Tout ce que le ministère voulait, c'est conclure un règlement. Il ne voulait rien laisser en suspens.

Ils ont parlé d'avoir des pouvoirs constitutionnels exclusifs sur les droits et les intérêts des Cris. Ils avaient ce pouvoir. Vous ne pouvez pas me dire qu'il n'en a pas été question durant les négociations, car ce serait très étrange. Il est encore plus étrange qu'il n'y ait aucun compte rendu des négociations. J'ai essayé d'obtenir des informations auprès de la compagnie d'électricité, du gouvernement du Manitoba et du gouvernement du Canada. Je me demande si vous trouvez qu'il est normal que les parties qui négocient des documents aussi importants que la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba et l'Accord cadre de mise en oeuvre n'aient pas fait de compte rendu.

Comment en sont-ils arrivés à ces règlements? Comment en sont-ils arrivés à ces chiffres?

Je fais la même recommandation que M. Hart: diviser le projet de loi en deux. L'amendement à l'article 6 que nous avons proposé a été rejeté au moment de l'examen par les Communes il y a un ou deux mois, lorsque le projet de loi C-14 a été adopté à la Chambre. Le Bloc l'a présenté et le gouvernement l'a rejeté.

La présidente: Le sénateur Watt est du Nord québécois.

Le sénateur Watt: J'ai vécu l'expérience de la Convention de la Baie James et du Nord québécois dont vous avez parlé. J'ai vécu également une expérience semblable à celle que vous vivez actuellement et je sais que les efforts déployés pour améliorer les choses et obliger le gouvernement à respecter ses obligations sont un processus qui peut être très difficile.

J'ai beaucoup de questions, mais je vais m'en tenir au point que vous avez soulevé. Vous vous demandez s'il existe un mécanisme de sécurité susceptible de protéger vos droits inhérents. Le fait est que vos droits sont inscrits dans la Constitution à l'article 35, mais selon vous, il faudrait prévoir quelque chose de beaucoup plus précis que ce qui existe actuellement. L'article 35 et ses points connexes, l'article 25, la disposition de non-dérogation, vous protègent tout à fait comme il le faut, je crois, mais tenez-vous à avoir une certitude? Sous-entendez-vous que vous souhaitez une protection certaine, même si vous bénéficiez déjà d'une protection en vertu de la Constitution? Pourriez-vous être un peu plus explicite pour ce qui du genre de libellé que vous seriez prêt à proposer, le cas échéant? Je crois bien qu'il figure dans le texte.

M. Hart: Voudriez-vous que je précise la nécessité d'une disposition de non-dérogation dans le projet de loi lui-même?

Le sénateur Watt: Oui.

M. Hart: Vous avez dit que la Constitution -- l'article 35 -- existe et que l'on pourrait croire qu'il s'agit d'une assurance globale de protection des droits issus de traités et des droits ancestraux. Oui et non et permettez-moi de vous l'expliquer.

Vous pouvez en fait vendre vos droits issus de traités. Une Première nation peut accepter un compromis et vendre ses droits issus de traités, dans la mesure où les membres de la nation en sont informés et donnent leur consentement. Il n'y a rien d'original. Vous ne pouvez pas empêcher quelqu'un de vendre ses droits issus de traités. La question qui se pose est celle du consentement éclairé. Ce qui compte, légalement, c'est que votre consentement soit éclairé lorsque vous vendez vos droits issus de traités. C'est un point très important. Vous pouvez vendre vos droits issus de traités pour un bol de soupe, si c'est ce que vous voulez. C'est une question de consentement éclairé: vous êtes-vous rendu compte de ce que vous faisiez?

Ce que je veux dire, c'est que toute cette question a été présentée de manière inexacte par le gouvernement du Canada dès le début. Nous ne parlons pas des droits issus de traités, affirme le gouvernement. Nous n'allons même pas aborder la question des droits issus de traités. Ce nouvel accord représente beaucoup d'argent et vous voyez des dollars un peu partout. Nous allons l'appeler accord de mise en oeuvre de la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba, mais en fait, cet accord y met un terme; c'est en quelque sorte une convention d'achat. Je peux vous dire que les gens de Norway House ne vendraient pas leurs droits issus de traités qui leur ont été accordés dans le cadre de l'accord cadre de mise en oeuvre, s'ils savaient ce qui est en jeu.

Le nouvel accord comportait cette disposition fort imprécise de non-dérogation stipulant que rien dans cet accord ne modifie les droits ancestraux issus de traités. Cela n'est pas satisfaisant et je ne crois pas que quiconque soit en désaccord avec moi. Cela n'est tout simplement pas satisfaisant.

Il n'y a pas de protection et il semble que, avec notre consentement éclairé, nous avons vendu nos droits issus de traités. Tout ce que nous demandons -- et c'est une demande raisonnable -- c'est que ce projet de loi affirme de façon plus solide que les droits autochtones issus de traités sont protégés. C'est raisonnable.

Nous pouvons vous remettre copie de l'amendement proposé à la Chambre des communes.

Le sénateur Watt: Je pense que nous en avons copie, comme vous. Je l'examine en ce moment même, car je ne l'avais pas reçue auparavant.

La présidente: Nous en avons copie. J'aimerais vous remercier tous les deux d'avoir comparu devant nous et d'avoir supporté les difficultés techniques de ce matin.

M. Hart: Y a-t-il d'autres questions?

La présidente: Non, il n'y en a pas.

M. Hart: Quelqu'un veut-il essayer de répondre à mes questions?

La présidente: Nous allons présenter les questions aux fonctionnaires du ministère lorsque nous les rencontrerons. Il est maintenant 17 h 30 et nous avons d'autres témoins. Merci à vous deux.

M. Fred Muskego, conseiller, Conseil de bande de la Nation crie de Norway House: Merci, honorables sénateurs, de me donner l'occasion de faire mon exposé en tant que conseiller de la Nation crie de Norway House et en tant que membre du conseil d'administration du Comité sur les droits fonciers issus de traités. Nous représentons 19 collectivités au sein de ce conseil et j'ai été élu il y a six mois à ce poste.

Honorables sénateurs, je ne vais pas prendre trop de votre temps, car je ne suis pas ici pour souligner ce qui ne va pas ou pour critiquer cet accord. Nous avons envoyé, en tant que conseil, une lettre que, j'espère, vous avez reçue. Elle est datée d'aujourd'hui. Cette lettre qui appuie le projet de loi C-14 est envoyée par le chef et le conseil. En avez-vous reçue copie?

La présidente: Oui, nous avons ces lettres ici. Nous avons une lettre datée du 3 octobre 2000, du Comité sur les droits fonciers issus de traités, et nous en avons une de la Commission Norway House, du chef et du conseil.

M. Muskego: Je vais faire un bref historique de la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba et du rôle que j'ai joué. J'étais conseiller et avant d'être élu, j'étais l'une des personnes chargées de la mise en oeuvre de la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba. D'après Leonard McKay, mon ami ici présent, cette convention renfermait de bonnes intentions au moment de sa signature, mais il déclare également qu'elle est malgré tout ambiguë. M. McKay et moi-même sommes finalement tombés d'accord sur ce point.

J'ai travaillé sur la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba pendant près de cinq ans, de façon intermittente. J'en ai observé la structure ainsi que le processus des revendications. Au cours de ces cinq années et demie, j'ai vu peu de retombées sur les cinq collectivités, voire pas du tout. À mon avis, cette convention a été profitable pour les avocats et les consultants.

J'ai travaillé directement pour la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba. Je sais exactement combien d'argent a été dépensé pour les avocats et les consultants; je crois que c'était de l'ordre de 3 millions de dollars par année. C'est beaucoup d'argent. Au moment du processus de l'Accord cadre et lorsqu'il a débuté, j'ai observé un changement du contenu -- au plan du processus, de la responsabilité. Tous ces éléments étaient prévus. Nous pensions avoir protégé nos droits issus de traités du mieux possible et je persiste à le croire.

Nos membres participent à la prise de décision relative aux dépenses. Comme vous le savez probablement, notre argent est déposé en fiducie et tout l'argent liquide dont nous disposons, qui provient de l'intérêt et des investissements, représente près de 3 millions de dollars. C'est la raison pour laquelle je tiens à souligner la différence entre la Convention et l'Accord cadre.

Nous recevons près de 3 millions de dollars par année qui proviennent de notre argent déposé en fiducie. Les personnes qui en profitent sont les membres de la Nation crie de Norway House -- pas tous, mais la majorité. Nous en profitons socialement, par l'entremise de programmes; nous en profitons culturellement. Nous organisons tous les ans une course internationale de barges d'York, seule manifestation du genre. Nous finançons également un pow-wow. C'est ce que nous faisons depuis deux ans.

Pour ce qui est de l'infrastructure, nous avons construit une nouvelle église juste à côté de l'ancienne église historique qui va rester là où elle se trouve. Nous faisons des dons à nos quatre dénominations religieuses qui ont du mal à atteindre leurs objectifs sans argent. L'année dernière, chacune d'elle a reçu 20 000 $, je crois, ce qui est utile.

Dans le processus de l'Accord cadre, ce ne sont pas les avocats et les consultants qui récoltent les 3 millions de dollars, ce sont les gens et ce sont eux qui décident de la façon de dépenser l'argent par l'entremise d'un processus d'approbation communautaire. C'est ce que nous faisons tous les automnes et c'est ce que nous allons faire dans les trois prochaines semaines. C'est le changement le plus important que je vois jusqu'ici et c'est la raison pour laquelle j'appuie de façon inconditionnelle l'adoption de ce projet de loi.

J'aimerais aborder la question des paiements par tête. Tout le monde semble s'inquiéter à ce sujet et considère que ces paiements ne servent qu'à acheter des voix. Je siégeais au conseil à ce moment-là, en 1998. Je sais que l'on a parlé ici du chef Ross. À un moment donné, on négociait ce que l'on appelait un règlement global. Nous avions une avance, accordée de bonne foi par le gouvernement fédéral. À ce moment-là, nous avons reçu une avance de 3,3 millions de dollars, sans conditions.

Le quorum des conseillers n'a eu aucune part dans cela; il s'agissait plus ou moins d'un spectacle solo donné par le chef. Nous n'étions pas au courant de ces 3 millions de dollars. Une réunion de bande a été convoquée pour débattre de la question de l'argent -- à ce moment-là, nous n'étions au courant que de la somme de près d'un million de dollars -- et de la façon dont il serait dépensé. Nous avions des plans pour la construction d'habitations, pour l'amélioration de la qualité de vie à Norway House. Nous étions assez nombreux à cette réunion, je crois que nous étions plus de 150 personnes, ce qui est une bonne participation à une réunion de bande de n'importe quelle collectivité.

Lorsque la question des 3,3 millions de dollars a été soulevée, nous avons demandé aux gens s'ils voulaient construire des maisons. Ils se sont déclarés enthousiastes à ce sujet et c'est alors que le chef Ross a voulu s'en attribuer le mérite. Pour abréger une longue histoire, il s'est mis en colère et a quitté la salle. Par la suite, il a dit aux gens que cet argent leur appartenait et qu'ils pouvaient en faire ce qu'ils voulaient. Il a laissé au conseil -- c'est-à-dire nous -- le soin de réagir suite à son commentaire.

Il n'y a rien de plus humain que de vouloir recevoir de l'argent, lorsque quelqu'un parle d'une somme de 3,3 millions de dollars et dit que l'on peut en faire ce que l'on veut. Comme l'ont indiqué les témoins précédents, notre taux de chômage était de 80 ou 85 p. 100 à ce moment-là. Nous avons fait l'objet de pressions et pour protéger nos arrières, avons exigé une pétition signée par 50 p. 100 des gens plus un indiquant qu'ils voulaient cet argent. Nous ne voulions pas savoir comment 100 personnes voulaient dépenser cet argent. Au bout de six heures, 50 p. 100 des gens plus un avaient signé la pétition -- il s'agissait des membres que nous représentions -- sur la façon dont ils voulaient dépenser cet argent. Nous avons ensuite pris une RCB.

Vous pouvez voir qu'une procédure avait été prévue par les chefs en place. Les paiements par tête ont toujours été versés au fil des négociations. Ceux qui nous montrent du doigt et qui nous disent que, à l'instar du gouvernement de l'époque -- c'est mon deuxième mandat -- nous nous en sommes servi pour obtenir des voix affirmatives devraient mieux faire leur travail de préparation. D'après leur exposé, je vois qu'ils savent bien faire la recherche nécessaire.

Il n'y a plus de paiements par tête en vertu de l'Accord cadre. Cela a été expliqué aux gens qui ont compris qu'il s'agissait du dernier paiement par tête. Nous recherchions les meilleurs intérêts de nos enfants et pensions à l'avenir de Norway House. Nous ne voulions pas que les gens demandent chaque année l'intérêt des investissements au lieu d'améliorer l'infrastructure de la collectivité. Nous avons quelques photos de Norway House qui remontent à 10 ans et vous pouvez voir aujourd'hui de grandes améliorations; elles ne sont pas toutes attribuables à l'Accord cadre, mais il a certainement aidé les choses.

En ce qui concerne la question des référendums, je dirais qu'un cadre avait été prévu pour le premier. Nous étions à l'époque 5 500 membres, ce qui était une grande bande. Nous étions tenus de rencontrer ceux qui vivaient hors de la réserve pour les informer de leur droit de vote, or, nos membres sont éparpillés entre la C.B. et la côte Est. Nous le savons bien à cause du financement de l'éducation. Près de 500 personnes vivent à Winnipeg seulement. Je ne cherche pas des excuses, j'explique simplement qu'il est plus difficile pour les grandes bandes que pour les petites d'atteindre le seuil qui avait été imposé pour le premier référendum.

On exigeait que la majorité des membres habitant hors de la réserve votent contre, et il nous était impossible d'atteindre ce seuil. Or, nous ne voulions pas retourner voir le ministère des Affaires indiennes et lui demander de faire en sorte que le seuil soit modifié. Nous avons ensuite reçu une pétition. Je fais allusion ici à la pétition qui traitait des versements par habitant. Nous avons respecté la volonté des membres la Nation crie de Norway House. Nous avions reçu une pétition signée par 50 p. 100 des membres, plus un, de la nation crie, pétition qui demandait la tenue d'un deuxième vote. Nous avons donc respecté la volonté du peuple, et l'accord cadre de mise en oeuvre a été approuvé par 76 p. 100 des membres.

J'aimerais maintenant vous parler de l'accord cadre sur les droits fonciers, car je pense en avoir assez dit sur l'accord cadre de mise en oeuvre. Celui-ci nous a été profitable au cours des deux ou trois dernières années. Certes, il ne permettra pas d'éliminer la pauvreté, mais s'il contribue à la réduire de façon marquante, il aura permis à la Nation crie de Norway House d'atteindre ses objectifs socio-économiques et d'améliorer un peu la situation de ses membres.

Comme je l'ai déjà mentionné, je ne suis pas venu ici pour accuser qui que ce soit. Si cet accord n'avait pas été conclu, la Nation crie de Norway House aurait tout de même réalisé des progrès importants sur le plan économique, grâce à un leadership solide et à de saines pratiques de gestion. Nous avons hérité d'un plan de réduction de la dette il y a huit ans, plan dont l'objectif a été atteint cette année. Nous affichons un surplus de 500 000 $, grâce à de saines pratiques de gestion. De plus, quand les membres font confiance à leurs dirigeants et qu'ils les appuient, des choses positives arrivent, au profit de ceux que nous représentons.

Je vous encourage fortement à adopter ce projet de loi sans délai, parce qu'il a également un impact sur nos droits fonciers issus de traité. Si le projet de loi est adopté, on pourra dire que justice a été faite dans le cas de la Nation crie de Norway House.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Muskego. Ces explications nous aident à comprendre pourquoi vous appuyez le projet de loi. Je suis certaine que cela nous sera utile dans nos délibérations.

Le sénateur Andreychuk: Merci de nous avoir expliqué votre position. Concernant le premier vote que vous avez tenu, qui a fixé les seuils? Ont-ils été fixés en vertu de la constitution de la Nation crie de Norway House ou de la Loi sur les Indiens, ou ont-ils été imposés par le ministère?

M. Muskego: Ils ont été établis en vertu de la Loi sur les Indiens et imposés par le ministère.

Le sénateur Andreychuk: Dans le cas du premier vote?

M. Muskego: Oui.

Le sénateur Andreychuk: En vertu de quelles règles le deuxième vote a-t-il eu lieu? Si votre constitution et la Loi sur les Indiens prévoient déjà une formule à cet égard, il me semble que c'est celle-ci que vous devriez appliquer. Pourquoi a-t-on modifié la formule?

M. Muskego: Si nous avions appliqué la formule établie, nous n'aurions pas atteint le seuil qui avait été fixé. Je pense qu'il nous manquait trois ou cinq voix. Il nous en manquait cinq lors du premier vote. Si on avait utilisé le même seuil au cours du deuxième vote, on l'aurait largement dépassé. Toutefois, la Loi sur les Indiens exige que 50 p. 100 des membres, plus un, donnent leur accord.

Je vais vous expliquer le processus que nous suivons quand nous tenons des référendums ou des votes lors des réunions du conseil de bande. Comme je siégeais au conseil à l'époque où nous avions conclu un accord de financement de remplacement, je suis au courant de certaines choses. L'accord prévoyait le versement d'environ 20 millions de dollars par année à une bande comme la nôtre. Le chef a réuni le conseil, qui comptait 37 représentants de la Nation crie de Norway House. Il fallait obtenir 50 p. 100 des voix, plus une, pour que le vote soit valable. C'est, d'ailleurs, le seuil que nous voulions fixer pour faire approuver l'accord cadre de mise en oeuvre, mais on n'a pas tenu compte de notre requête. Lors du deuxième vote, le chef a dit que, puisque telle était la volonté du peuple, la formule habituelle de 50 p. 100 des voix, plus une, serait retenue.

Comme je le disais, il y avait 37 personnes présentes à la réunion pour discuter de l'accord de financement de remplacement. Sur les 37, 22 étaient en faveur d'un accord de cinq ans. On continue de dénoncer la façon dont les choses ont été faites, mais c'est le processus que les dirigeants ont toujours utilisé. M. McKay y a également pris part.

Le sénateur Andreychuk: Je n'ai toujours pas compris. Est-ce que la formule utilisée pour le premier vote a été établie par le ministère, de concert avec vos membres? Si oui, est-ce que tout le monde était d'accord avec cette formule? Certains témoins ont tenu des propos inquiétants. J'ai entendu dire qu'on avait établi une formule et qu'un vote avait eu lieu. Or, comme le résultat du vote n'a pas été favorable, vous avez changé la formule. Est-ce bien cela?

M. Muskego: Oui, c'est ce qui s'est passé, sauf qu'on a toujours appliqué la règle de 50 p. 100 des voix, plus une.

Le sénateur Andreychuk: Quelle règle a-t-on appliquée lors du premier vote, si ce n'était pas celle de 50 p. 100 des voix, plus une? Quelle formule vous aurait permis d'obtenir des résultats favorables?

M. Muskego: Si je me souviens bien, lors du premier vote, environ 75 p. 100 des membres ont voté oui, sauf qu'il y avait un hic. Il fallait qu'un certain pourcentage des membres de la Nation crie de Norway House vivant à l'extérieur de la réserve votent en faveur. Or, nous n'avons pas atteint ce seuil. Il nous manquait cinq voix. Ne me citez pas, mais l'écart n'était pas très grand.

Le sénateur Andreychuk: Est-ce que les résultats entre le premier et le deuxième vote étaient très différents pour ce qui du nombre de personnes vivant à l'extérieur et à l'intérieur de la réserve qui ont participé au scrutin?

M. Muskego: Non, ils étaient essentiellement les mêmes. Un plus grand nombre de membres vivant à l'intérieur de la réserve ont voté, mais le pourcentage était le même, soit 76 p. 100 en faveur de l'accord de mise en oeuvre.

Le sénateur Andreychuk: Avez-vous rencontré les membres de votre bande qui ne sont pas satisfaits de l'accord? Les avez-vous rencontrés en vue d'essayer de trouver un terrain d'entente?

M. Muskego: Oui. Avant de tenir le référendum, nous avons demandé à M. McKay, qui a participé à certaines de nos réunions, de prendre part au processus afin de veiller à ce que tout le monde soit satisfait des modalités de l'accord cadre de mise en oeuvre. Nous voulions contenter tout le monde. Il a dit qu'il n'a pas pris part au processus, mais ce n'est pas tout à fait vrai, car je lui ai demandé, lors d'une réunion publique, s'il avait des préoccupations à formuler, et si oui, qu'il nous en fasse part. Il n'a rien dit. Nous ne pouvons pas dire que nous n'avons pas essayé, mais la politique étant ce qu'elle est, c'est ainsi que les choses se sont passées. Il ne faut pas chercher à savoir si nous avons eu tort ou raison d'agir ainsi. Il s'agit d'une question politique qui intéresse une collectivité locale.

Le sénateur Andreychuk: On a également laissé entendre, en tout cas à la Chambre des communes, que les modalités de l'accord cadre de mise en oeuvre ne protègent pas les droits issus de traités comme on l'aurait voulu. L'accord précise qu'il n'a pas pour but de modifier les droits, alors que la plupart des autres accords précisent qu'ils ne modifient en rien les droits issus de traités. Est-ce que ce libellé vous inquiète?

M. Muskego: Non. Je faisais partie de l'équipe de négociation, et ce libellé ne me posait aucun problème.

Le sénateur Andreychuk: Avez-vous l'impression que vos droits issus de traités sont bien protégés?

M. Muskego: Oui.

Le sénateur Andreychuk: Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi le libellé de cet accord est différent de celui qui figure dans la plupart des autres ententes conclues au Canada?

M. Muskego: Nous nous sommes posés des questions au sujet de l'intention de l'accord, et je m'en pose encore, mais on nous a dit qu'il visait à protéger nos droits issus de traités.

Le sénateur Andreychuk: Qui vous a dit cela, votre conseil ou le gouvernement?

M. Muskego: Le gouvernement et l'équipe de négociation qui était sur place.

Le sénateur Andreychuk: Étiez-vous accompagné d'un avocat?

M. Muskego: Oui. M. Robert Roddick était notre avocat, ainsi que Hervey Secter, qu'on a mentionné plus tôt.

La présidente: Merci de votre exposé. Il était très instructif.

Si tout le monde est satisfait, nous pouvons régler la question rapidement. Sinon, nous tiendrons une autre réunion.

Le sénateur Andreychuk: Je ne voudrais pas qu'on s'écarte du libellé habituel. Il serait bon que les représentants du ministère nous expliquent la différence.

Le sénateur Watt: Qu'ils nous expliquent pourquoi il est différent des autres?

La présidente: D'après ce que je crois comprendre, la Nation crie de Norway House a approuvé l'accord, tout comme l'ont fait le gouvernement du Manitoba, la société Hydro et le Parlement. L'accord a fait l'objet de discussions approfondies pendant cinq ans et demi.

Le sénateur Andreychuk: Je m'excuse, mais nous faisons partie du Parlement et nous avons une responsabilité fiduciaire à l'égard des Autochtones.

La présidente: Vous n'avez pas à vous excuser. J'en suis consciente. Je faisais allusion à l'autre chambre.

Le sénateur Andreychuk: Nous ne l'avons pas encore approuvé, et cette question me préoccupe.

La présidente: Nous avons le temps d'examiner le projet de loi article par article. Sinon, nous devrons nous réunir à nouveau. Jugez-vous avoir suffisamment de renseignements pour procéder à cet examen?

Le sénateur Johnson: Je pense que oui.

Le sénateur Christensen: Je suis d'accord.

Le sénateur Watt: J'aimerais quand même le savoir, même si nous procédons à un examen article par article du projet de loi.

La présidente: Vous voudriez savoir quoi?

Le sénateur Watt: Pourquoi le libellé de la disposition de non-dérogation est différent de celui qu'on trouve dans les autres projets de loi que nous avons examinés. Il serait bon que le ministère nous fournisse une explication. Nous l'aurons peut-être tout de suite. Il nous est déjà arrivé de noter la même chose dans d'autres projets de loi.

La présidente: Les fonctionnaires vont arriver bientôt. Vous pouvez prendre un jus ou un café en attendant, et ensuite leur poser la question.

Le sénateur Watt: Nous devrions demander au ministère de nous fournir une réponse même si nous procédons à l'examen article par article du projet de loi. Je n'ai pas l'intention de retarder quoi que ce soit.

Le sénateur Pearson: La question ne sera pas réglée même si le comité procède à cet examen. La présidente pourra nous faire part de la réponse que vous attendez dans les dernières observations qu'elle fera avant que le vote n'ait lieu.

La présidente: C'est exact.

Le sénateur Cochrane: Ils doivent également nous confirmer, et ils ont sans doute la réponse, que l'accord est conforme à la Charte, comme vous l'avez demandé ce matin.

La présidente: Nous avons la réponse par écrit. Elle m'a été remise à mon arrivée.

Le sénateur Cochrane: Cette question est donc réglée.

La présidente: Oui.

Le sénateur Pearson: Pendant que nous attendons, j'aimerais poser une question au sénateur Andreychuk. Quand on a fait allusion au libellé, j'ai eu l'impression de l'avoir déjà vu dans plusieurs autres projets de loi.

Le sénateur Andreychuk: On utilise ici les mots «ne vise à». Matthew Coon Come et les avocats ont dit que ces mots n'ont pas le même sens que «s'engager à respecter». Ce qui intéresse les tribunaux, ce n'est pas l'intention, mais ce que vous vous engagez à faire, pas ce que vous avez l'intention de faire. Les tribunaux n'accorderait aucune importance à cet argument. Par conséquent, on se demande s'il s'agit effectivement d'une disposition qui autorise la dérogation, et je trouve étrange qu'ils fassent cela. Pourquoi ont-ils choisi ces mots? Cela a pour effet d'affaiblir l'accord.

Le sénateur Pearson: Je suis certaine d'avoir vu ces mots dans plusieurs autres projets de loi. Je ne me suis même pas posé de questions à ce sujet.

Le sénateur Andreychuk: Le reste du libellé est exactement le même.

Le sénateur Watt: Ces mots n'ont jamais été utilisés dans le passé.

Le sénateur Johnson: Je propose qu'on écoute ce qu'ont à dire les fonctionnaires, et qu'on procède ensuite à l'examen article par article du projet de loi.

Le sénateur Watt: Il y a un autre point que j'aimerais soulever, mais d'ordre plus technique. Il est question, dans le texte, de «ratification». Or, quand ils nous ont présenté leur exposé, ils ont parlé de «référendum».

La présidente: Ils faisaient allusion au référendum qui a eu lieu au sein de la réserve.

Le sénateur Watt: J'ai parcouru le texte et je me suis rendu compte que lorsqu'on y parle de référendum, on parle en fait de ratification et non de référendum.

La présidente: C'est ainsi libellé.

Le sénateur Watt: Cela ne veut pas dire la même chose.

Le sénateur Johnson: On appelle référendum le processus de ratification.

Le sénateur Watt: Un référendum est un processus consultatif.

La présidente: À propos de référendum et de ratification, il est intéressant de noter que les Cris du nord de l'Alberta considèrent un référendum comme un vote. Ils ne comprennent pas ce qu'est la ratification. Lorsque les gens vont voter, ils appellent cela un référendum. C'est ce que j'ai compris.

Le sénateur Gill: C'est du nouveau pour la plupart des peuples autochtones.

Le sénateur Watt: Lorsque nous avons négocié l'accord de la Baie James, je me souviens d'avoir négocié un tel libellé avec le ministre.

La présidente: Selon notre attaché de recherche, le processus de ratification de l'accord de mise en oeuvre principal est énoncé à l'article 14 de cet accord. Il prévoit le processus de référendum. La tenue d'un référendum fait partie de l'accord de mise en oeuvre principal lui-même.

Le sénateur Andreychuk: L'Accord de mise en oeuvre établit-il la formule?

La présidente: Oui.

Le sénateur Andreychuk: De quelle façon la modifie-t-elle, dans ce cas?

La présidente: À dire vrai, cela donne lieu à une interprétation qui se fait au niveau du conseil de bande. Je pense qu'un groupe a jugé que cela changeait les choses et que l'autre groupe était d'avis que non. On lui a demandé ce qu'elle entendait par «formule»? Ils ne veulent pas dire qu'ils ne comprennent pas la formule. Leur langue première est le cri ou le saulteux, ce qui fait une grande différence.

Le sénateur Gill: Ce n'est pas un accord de revendications territoriales globales.

La présidente: Non.

Le sénateur Gill: C'est très différent de ce qui s'est fait auparavant.

Le sénateur Watt: J'en suis conscient.

La présidente: Avant que les fonctionnaires du ministère arrivent, je vous signale que le sénateur Christensen m'a soumis une pétition adressée à l'honorable William Jefferson Clinton, président des États-Unis d'Amérique. Elle se lit ainsi:

Monsieur, nous, les soussignés, vous prions respectueusement de déclarer la plaine côtière du Refuge national de la faune de l'Arctique monument national, en reconnaissance de son rôle crucial en tant que sanctuaire de la harde de caribous de la Porcupine et de nombreuses autres espèces d'animaux sauvages, d'oiseaux et de poissons qui ont besoin de cet endroit spécial pour élever les générations futures pour la plus grande joie de nos propres générations futures.

Le sénateur Christensen: Les Premières nations Old Crow fait circuler des pétitions en ce sens et elles souhaiteraient que nous écrivions une lettre au président avant qu'il quitte ses fonctions, en nous fondant sur cette information.

Le sénateur Pearson: Sur le plan juridique, la réponse est non.

Le sénateur Andreychuk: Nous ne pouvons pas écrire une lettre en tant que comité, mais nous pourrions signer cette pétition individuellement. Je vous suggère de faire ce que je fais chaque fois qu'on me présente des pétitions à caractère international. J'envoie la pétition au bureau de tous les sénateurs et ceux qui veulent la signer peuvent le faire individuellement. Par conséquent, au lieu de la formule «Nous, le comité», on emploie «Nous, les soussignés». À ce moment-là, nous sommes libres d'agir comme bon nous semble.

Le sénateur Pearson: Les comités ne peuvent faire cela.

Mme Joseph: Sur le plan juridique, le comité est autorisé à agir dans le cadre du renvoi sur les parcs étant donné qu'il s'agit d'une préoccupation écologique concernant un parc.

Le sénateur Andreychuk: Je ne crois pas que nous puissions signer une pétition.

Mme Joseph: Non; les Premières nations souhaitent que nous écrivions une lettre.

Le sénateur Pearson: Je consulterais M. O'Brien avant de faire cela. Nous ne pouvons nous ingérer dans les affaires d'un autre pays.

Le sénateur Andreychuk: Dans notre rapport, nous pourrions faire état des répercussions des activités d'un autre pays et proposer des recommandations connexes, mais je pense que vous avez raison. Nous ne pouvons soumettre une pétition à un autre gouvernement. Ainsi le veut la coutume. Nous devrions peut-être obtenir un avis juridique de Gary O'Brien.

La présidente: Nous pouvons maintenant revenir au projet de loi C-14. Nos témoins sont arrivés. Je vous souhaite la bienvenue de nouveau. Deux de nos sénateurs ont des questions.

Le sénateur Andreychuk: Deux questions suscitent quelques difficultés. La première porte sur le vote par ratification. Certains témoins nous ont dit que la formule prévue pour le vote vise à légitimer l'accord intervenu entre le gouvernement fédéral et la Nation crie de Norway House et qu'elle respecte les dispositions de la Loi sur les Indiens, et cetera. Est-ce une description exacte de la façon dont vous déterminez l'électorat pour le vote? Selon eux, cela est assujetti à trois conditions qui, si elles ne sont pas respectées, entraînent de la renégociation de la formule afin d'atteindre un résultat positif, ce qui a été fait à l'occasion d'un deuxième scrutin.

Ma deuxième question porte sur le curieux libellé de l'accord principal au sujet de la dérogation. On y précise que rien dans cet accord ne vise à abroger les droits issus de traités alors que dans la plupart des traités, on dit simplement que rien n'abroge les droits issus de traité, ou quelque chose d'approchant. Pourquoi a-t-on utilisé l'expression «vise à»?

Mme Sandy Jackson, directrice suppléante, Section des revendications, Politique des affaires/opérations intergouvernementales, région du Manitoba, ministère des Affaires indiennes et du Nord: Il y a effectivement eu deux votes de ratification au sujet de l'Accord de mise en oeuvre de Norway House. Je signale que nous n'avons pas de fondement législatif pour ce qui est de la ratification d'accords de cette nature. Le processus de ratification établi dans l'Accord de mise en oeuvre est un accord négocié sur la façon dont nous allons nous y prendre pour obtenir la ratification de la collectivité. Trois critères de ratification étaient prévus dans le premier processus.

Le sénateur Andreychuk: Oui, ils sont énoncés dans nos trousses d'information.

Mme Jackson: Vous voulez savoir pourquoi?

Le sénateur Andreychuk: Il me semble que vous êtes tenus par la Constitution, ou encore la convention ou la négociation, de dire qu'il y aura un processus juste et adéquat en vue de la ratification.

La présidente: Sénateur Andreychuk, il serait bon de laisser la témoin terminer sa déclaration avant de lui poser d'autres questions.

Le sénateur Andreychuk: Je croyais qu'elle avait fini. Je suis désolée. Veuillez continuer.

Mme Jackson: Le processus a été négocié et établi. Vous avez les critères.

Cela se trouve à l'onglet 4 dans votre trousse d'information. La décision de procéder à un deuxième vote de ratification a été prise collectivement par les quatre parties à l'accord, c'est-à-dire Norway House, le ministère des Affaires indiennes et du Nord au nom du Canada, Manitoba Hydro et le gouvernement du Manitoba. Nous avons convenu de tenir un second vote étant donné le soutien obtenu à la suite du premier scrutin.

Une grande majorité des habitants de la collectivité appuyait l'accord, mais il manquait cinq voix pour assurer la ratification. Au cours du premier vote, on exigeait que la totalité des membres votent et qu'une majorité des membres habitant sur la réserve soient favorables à l'accord. En effet, l'incidence principale de l'accord se fera sentir sur la majorité des membres de la communauté résidant dans la réserve. Voilà pourquoi cela a été inclus.

Le deuxième scrutin exigeait une majorité simple, par opposition à la double majorité prévue à l'origine. Le deuxième tour de scrutin exigeait la majorité simple. Notre raisonnement était que le premier vote avait montré qu'il y avait un nombre considérable de partisans de cet accord. Nous voulions ainsi nous assurer que ce soutien existait vraiment. Nous avons atteint tous les objectifs au premier tour, mais cela n'était pas nécessaire étant donné la façon dont les critères étaient énoncés. La collectivité a exprimé un soutien écrasant en faveur de l'accord.

Pour une collectivité de la taille de Norway House, on peut dire qu'il y a eu un bon nombre de votes de ratification. Le degré de participation au vote en vue de ratifier cet accord a été considérable au sein de la collectivité. Les résidents étaient en faveur. Ils savaient que s'ils voulaient que cette entente soit mis en oeuvre, ils devaient se déplacer et voter, surtout qu'ils ne l'avaient pas fait en nombre suffisant lors du premier scrutin. Ils se sont vraiment mobilisés pour appuyer cette entente.

Le sénateur Andreychuk: Ce que je voulais savoir c'est si, à votre avis, le premier scrutin était juste, si les règles étaient adéquates? Dans l'affirmative, a-t-on changé les règles ailleurs?

Mme Jackson: C'était un processus négocié. Que nous ayons ou non changé les règles, le nombre de personnes qui ont voté en faveur de l'entente dépassait les critères que nous avions établis pour le deuxième scrutin. La collectivité a exprimé fortement son soutien.

Était-ce juste? Nous étions d'avis que cela était juste lorsque nous avons pris la décision de convoquer un deuxième scrutin. Nous considérions cela juste car nous savions déjà qu'il y avait un nombre considérable de membres en faveur de l'entente et le deuxième scrutin est venu le confirmer.

Le sénateur Andreychuk: Je n'ai pas fait de calculs, mais lorsque les gens sont venus voter la deuxième fois, leur nombre a-t-il dépassé le critère pour le premier vote?

Mme Jackson: Ils l'ont atteint et dépassé.

M. Austin: En fait, c'était 76 p. 100.

Le sénateur Andreychuk: Je ne voulais pas savoir s'ils avaient respecté les critères du deuxième scrutin, mais si ce deuxième scrutin respectait les exigences du premier.

M. Jackson: Les résidents ont atteint les seuils établis pour le premier scrutin. Ils les ont atteint à l'occasion du deuxième scrutin.

Le sénateur Watt: Y a-t-il eu un faible taux de participation pour le premier scrutin?

Mme Jackson: Non. En fait, le taux de participation était assez élevé.

M. Austin: Je pense que les pourcentages étaient 65,9 et 65,2.

Mme Jackson: Un grand nombre de personnes ont voté. Il le fallait étant donné que le seuil était fixé à 50 plus un. La population se chiffre à 5 000 habitants et au moins les trois quarts d'entre eux avaient le droit de vote. Un grand nombre de membres ont manifesté leur intérêt et sont venus voter.

Le sénateur Pearson: On exigeait 50 p. 100 plus un des électeurs admissibles ou 50 p. 100 plus un des personnes ayant voté?

Mme Jackson: Des électeurs admissibles.

Le sénateur Pearson: C'est tout à fait différent.

Le sénateur Sibbeston: Qu'est-ce qui a cloché au premier scrutin? Qu'est-ce qui explique qu'on n'ait pas atteint les seuils requis à l'occasion du premier scrutin?

Mme Jackson: C'était 50 p. 100 plus un de la totalité des membres résidants sur la réserve et à l'extérieur de la réserve, mais il y avait aussi un critère de 50 p. 100 plus un des électeurs de la collectivité, qui sont les membres habitant la réserve. Il a manqué cinq voix pour obtenir 50 p. 100 plus un des membres résidant dans la réserve.

Le sénateur Christensen: Mais pour ce qui est de la totalité de l'électorat, on atteint le critère voulu, n'est-ce pas?

Mme Jackson: Soixante-neuf pour cent de l'ensemble de l'électorat était en faveur de l'accord.

Le sénateur Andreychuk: Cela représentait 49,79 p. 100 des membres habitant sur la réserve. On a calculé que dans l'ensemble, cela faisait environ 60 p. 100.

Le sénateur Sibbeston: Autrement dit, ce sont les membres non résidents de la réserve qui ont majoritairement appuyé l'accord.

Mme Jackson: C'est difficile à dire à cause des chiffres. Il y a davantage de personnes qui vivent sur la réserve qu'ailleurs.

Le sénateur Sibbeston: Peut-on identifier le vote en fonction des résidents et des non-résidents de la réserve?

Mme Jackson: Non, car on ne peut pas dire qui vit sur la réserve et qui n'y vit pas.

Le sénateur Christensen: Il y a donc eu deux scrutins. Il y a eu le scrutin général et ensuite un autre, pour les membres de la collectivité résidant sur la réserve.

Mme Jackson: Non.

Le sénateur Christensen: Comment a-t-on pu identifier qui habitait sur la réserve et qui n'y habitait pas?

Mme Jackson: Vous avez raison. Il y avait deux listes électorales: l'une pour les résidents de la réserve et l'autre pour les non-résidents.

Le sénateur Christensen: Il y a eu deux scrutins?

Mme Jackson: Il y avait deux listes. C'était la liste électorale.

Le sénateur Christensen: Mais une fois les votes dans la boîte, il est impossible de les différencier.

Mme Jackson: C'est exact.

Le sénateur Christensen: À mesure que les électeurs se présentaient, leur nom était rayé de la liste. Cinq voix manquaient. Je vois.

La présidente: Autre chose?

Le sénateur Andreychuk: Quelle est la réponse à la deuxième question?

M. Austin: Comme vous le savez, cette question portait sur les droits issus de traités et particulièrement sur la clause non dérogatoire. Les droits issus de traités sont protégés aux termes de l'article 35 de la Constitution. Par conséquent, vous avez raison de dire que l'Accord de mise en oeuvre principal et l'Accord TLE renferme une clause dérogatoire.

En outre, je tiens à signaler que le juge Muldoon de la Cour fédérale a affirmé que le libellé de la clause non dérogatoire dans l'Accord de mise en oeuvre principal est suffisant pour protéger les droits issus de traités. Il s'agit là d'une opinion juridique indépendante.

Le sénateur Andreychuk: Dans ce cas?

M. Austin: Précisément dans ce cas.

Mme Jackson: La décision portait précisément sur la clause non dérogatoire figurant dans l'Accord de Norway House. C'est une décision de la Cour fédérale.

Le sénateur Andreychuk: Qui est allé devant la Cour suprême?

Mme Jackson: La délégation de Norway Horse opposée à l'Accord de mise en oeuvre.

Certains des membres de la Première nation ont eu recours à la contestation judiciaire. La Cour fédérale a rendu un arrêt selon lequel le processus employé pour ratifier l'Accord de mise en oeuvre était juste et démocratique. Le juge a également examiné la clause non dérogatoire et a conclu qu'elle était suffisante pour protéger les droits ancestraux et issus de traités de la Première nation de Norway House.

Le sénateur Andreychuk: Avez-vous cette décision?

Mme Jackson: Je n'en ai pas d'exemplaire, mais je pourrais en fournir un.

Le sénateur Andreychuk: J'aimerais en recevoir un exemplaire, pas nécessairement aujourd'hui, mais c'est important que nous y jetions un coup d'oeil.

Quand la décision a-t-elle été rendue? S'agit-il d'une décision récente? Le NPD et le Bloc ont beaucoup insisté sur la nécessité d'amender ce projet de loi à la Chambre des communes, je crois. La décision du tribunal a-t-elle été rendue avant ou après cela?

Mme Jackson: La décision a été rendue en novembre 1997.

Le sénateur Andreychuk: Est-ce qu'on y traitait précisément de l'expression «vise à»?

Mme Jackson: Elle portait sur toute la question de la protection des droits ancestraux et des droits issus de traités.

M. Austin: Un juge indépendant a rendu cette décision.

Le sénateur Watt: Vous devez comprendre pourquoi nous nous inquiétons ici. Si nous devions déterminer dans quelle mesure cette phrase pourrait avoir une incidence sur l'article 35, je dirais qu'elle en affaiblit la portée dans une certaine mesure étant donné que l'expression «vise à» n'est pas un absolu.

Mme Jackson: Non.

Le sénateur Watt: Vous dites non, mais je crois que si nous posions la question à différents juristes, il n'est pas sûr qu'ils seraient du même avis.

Le sénateur Pearson: Cela a été fait.

M. Austin: Je ne sais pas trop comment répondre, sénateur, si ce n'est pour dire, avec tout le respect que je vous dois, que cette question a été soulevée devant la Cour fédérale et qu'un juge a rendu une décision.

Le sénateur Watt: Cela ne correspond pas aux autres mesures législatives. L'utilisation de l'expression «vise à» modifie la dynamique.

M. Austin: Je pense que nous avons utilisé ce libellé dans d'autres accords. Je ne dis pas que nous l'avons fait dans tous, mais dans certains autres. C'est une opinion.

Le sénateur Watt: C'est ça le point.

Le sénateur Sibbeston: L'une des thèses en ce qui a trait à l'effet de l'article 35, c'est qu'il se trouve dans la Constitution et protège les droits ancestraux et les droits issus de traités. Toue le reste est assujetti à cette protection. Il est possible de conclure une entente sans utiliser cette expression mots et la Constitution continuerait de protéger les droits issus de traités.

M. Austin: Je pense que vous avez raison, sénateur.

Le sénateur Watt: Êtes-vous d'accord pour dire qu'il s'agit d'un affaiblissement?

M. Austin: Non.

Le sénateur Andreychuk: Telle n'était pas la position en ce qui a trait à l'Accord nisga'a. Il est possible de négocier vos droits et cela aura un certain effet sur l'article 35.

Du point de vue du libellé, on y gagnerait en clarté en disant que rien dans cette entente ne modifie les droits ancestraux ou les droits issus de traités et cela ne prêterait pas ultérieurement à un débat. C'est-à-dire pour consultation future.

Je présume que le juge a dit dans cette décision que ces mots étaient superflus. Il ne s'est pas appesanti là-dessus. La décision vient juste de m'être remise par l'attaché de recherche qui a toujours une longueur d'avance. Le jugement date du 25 novembre. Au paragraphe 13.3, il y est dit que le tribunal -- le juge en fait -- est convaincu que la disposition respecte l'article 35 et que cela suffit dans les circonstances.

Ainsi, si cela suffit pour Norway House, pourquoi le ministère se sentirait-il mal à l'aise à l'avenir au sujet de l'article 35? N'aurait-il pas été plus clair de dire que rien dans l'entente ne modifie les droits plutôt que d'utiliser l'expression «vise à»? Nous pourrions alors éviter ces constructions d'interprétation et ainsi de suite. C'est une suggestion pour l'avenir.

Il ne s'agit absolument pas d'une élaboration, mais je suppose qu'aucun partie n'a fait appel?

M. Austin: Il y a eu un appel, mais il a été abandonné.

Le sénateur Andreychuk: C'est dommage. Nous aurions pu avoir une décision définitive.

M. Austin: Je pense que c'est une décision définitive.

La présidente: Comme il n'y a pas d'autres questions, je remercie les témoins d'être venus aujourd'hui.

Nous allons maintenant procéder à l'étude article par article du projet de loi. Le comité peut décider de procéder de cette manière ou examiner le projet de loi dans son ensemble.

Le sénateur Pearson: Je propose que le comité adopte le titre, tous les articles et l'annexe du projet de loi C-14.

Le sénateur Johnson: Je seconde la motion.

La présidente: Vous voulez en discuter? Quels sont ceux qui sont en faveur?

Des voix: D'accord.

La présidente: Êtes-vous d'accord pour que je fasse rapport de ce projet de loi -- avec ou sans observations, selon ce que vous souhaitez -- à la prochaine séance du Sénat?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Andreychuk: Si vous le présentez sans observations, alors je vais certainement faire moi-même mes propres observations à l'égard de ces deux points.

La séance est levée.


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