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NFFN - Comité permanent

Finances nationales


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES FINANCES NATIONALES

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le mardi 1er décembre 2020

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd’hui, à 12 h 30 (ET), par vidéoconférence, pour étudier le Budget des dépenses (B) présenté au Parlement du Canada pour l’exercice se terminant le 31 mars 2021.

Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Honorables sénateurs, je m’appelle Percy Mockler, sénateur du Nouveau-Brunswick, et je suis président du comité.

[Traduction]

Je voudrais profiter de l’occasion pour présenter les membres du comité qui participent à la séance : les sénateurs Boehm, Dagenais, Deacon (Ontario), Duncan, Forest, Galvez, Klyne, Loffreda, Marshall, Richards, Smith et Pate.

Je vous souhaite la bienvenue à vous ainsi qu’à tous les téléspectateurs qui nous écoutent au pays.

Nous poursuivons aujourd’hui notre étude sur les dépenses prévues dans le Budget principal des dépenses et le Budget supplémentaire des dépenses (B) pour l’exercice se terminant le 31 mars 2021, que le Sénat du Canada a renvoyé à notre comité le 18 novembre 2020.

[Français]

Pour notre premier groupe de témoins, nous accueillons le président du Conseil du Trésor du Canada, l’honorable Jean-Yves Duclos. Il est accompagné de M. Glenn Purves, secrétaire adjoint, Secteur de la gestion des dépenses, Mme Karen Cahill, secrétaire adjointe et dirigeante principale des finances, Mme Sandra Hassan, sous-ministre adjointe, Conditions d’emploi et relations de travail, ainsi que Mme Kathleen Owens, contrôleure générale adjointe, Secteur des services acquis et des actifs.

[Traduction]

Je souhaite la bienvenue à tous les témoins. Encore une fois, monsieur le ministre, il est remarquable que vous trouviez du temps pour notre comité. On m’a d’ailleurs informé que vous aviez une déclaration. Nous allons vous écouter, après quoi les sénateurs poseront leurs questions.

[Français]

Monsieur le ministre, la parole est à vous.

L’honorable Jean-Yves Duclos, c.p., député, président du Conseil du Trésor : Tout d’abord, je tiens à vous remercier de cette belle et importante invitation à comparaître devant vous pour discuter du Budget supplémentaire des dépenses (B) et du Budget principal des dépenses.

[Traduction]

Monsieur le président, les Canadiens et les parlementaires qui les représentent ont le droit de savoir comment les fonds publics sont dépensés, et de demander des comptes au gouvernement. Ce principe sous-tend notre gestion des dépenses du gouvernement.

Le Budget supplémentaire des dépenses (B) de 2020-2021 présente l’information sur les besoins de dépenses qui n’étaient pas suffisamment définis pour être inclus dans le Budget principal des dépenses, ou qui ont été précisés par la suite pour tenir compte de l’évolution de certains programmes et services. Comme c’était le cas avec le Budget supplémentaire des dépenses (A), que vous avez étudié plus tôt cette année, le Budget supplémentaire des dépenses (B) continue de rendre compte des dépenses autorisées en vertu de la Loi concernant certaines mesures en réponse à la COVID-19, assurant ainsi la transparence et la responsabilité dans l’utilisation des fonds publics pour fournir des programmes et des services aux Canadiens et Canadiennes.

Comme vous pouvez l’imaginer, la plupart des dépenses prévues dans ce budget des dépenses sont destinées aux mesures d’intervention du gouvernement à l’égard des répercussions sanitaires, sociales et économiques de la pandémie sur la population canadienne. Ce budget présente un total de 79,2 milliards de dollars de dépenses budgétaires, dont 20,9 milliards de dollars doivent être votés par le Parlement, y compris par le Sénat, et 58,3 milliards de dollars de dépenses statutaires prévues. De ces montants, environ 15 milliards de dollars — soit 74 % — des besoins votés et 57 milliards de dollars — soit 96 % — des prévisions législatives supplémentaires sont destinés aux interventions d’urgence et aux mesures économiques du gouvernement en réponse à la COVID-19.

Si je peux donner quelques exemples rapides, les dépenses votées dans ce budget pour les interventions d’urgence et les mesures économiques en réponse à la COVID-19 comprennent : 5,4 milliards de dollars pour la recherche médicale et la mise au point de vaccins; 2,2 milliards de dollars pour l’achat d’équipement de protection individuelle ainsi que de fournitures et d’équipement médicaux; et 2,4 milliards de dollars visant à soutenir les petites et moyennes entreprises, à compléter les salaires des travailleurs critiques et à aider les provinces et les territoires pour la relance sécuritaire de leur économie et le retour à l’école. En outre, le Secrétariat du Conseil du Trésor recevra 585 millions de dollars pour les régimes et programmes d’assurance de la fonction publique.

Je voudrais maintenant parler brièvement du Budget principal des dépenses de 2020-2021.

[Français]

Monsieur le président, je voudrais parler brièvement du Budget principal des dépenses.

Le Budget principal des dépenses de 2020-2021 a d’abord été déposé à la Chambre des communes en février dernier. Il a été déposé à nouveau le 30 septembre dernier afin de poursuivre son étude lors de cette nouvelle session parlementaire.

Ce Budget principal des dépenses donne un aperçu détaillé d’un montant total de 125,1 milliards de dollars au titre des dépenses budgétaires votées et de 87,2 millions de dollars au titre des dépenses non budgétaires.

Je voudrais faire remarquer au Comité sénatorial permanent des finances nationales que le niveau des dépenses budgétaires votées est inférieur d’environ un demi-milliard de dollars à ce qui a été présenté dans le Budget principal des dépenses de l’an dernier, en 2019-2020.

Ce Budget principal des dépenses comprend également des renseignements sur des dépenses législatives budgétaires de 179,5 milliards de dollars et des dépenses législatives non budgétaires de 3,0 milliards de dollars.

Ces dernières, comme on le précise dans les documents que vous avez reçus, comprennent des éléments comme les prêts, les investissements et les avances.

Les membres du Comité sénatorial permanent des finances nationales constateront également dans leur étude du Budget principal des dépenses que le plan de dépenses du gouvernement est étroitement aligné sur les priorités que les Canadiens ont exprimées.

Les dépenses prévues comprennent également 750 millions de dollars pour le crédit 5 du Conseil du Trésor relatif aux éventualités du gouvernement, ce qui sert à payer des dépenses diverses, urgentes ou imprévues qui n’ont pas autrement été prévues dans les autorisations de dépenses approuvées par les crédits ministériels.

En conclusion, monsieur le président, notre gouvernement doit s’assurer que tous les Canadiens et les Canadiennes ont le soutien dont ils ont besoin durant la pandémie de COVID-19, et il doit également promouvoir la reprise économique et la prospérité pour l’avenir de notre pays.

Pour ce faire, nous investissons dans les soins de santé critiques et nous appuyons la relance sécuritaire de notre économie. Nos plans de dépenses aideront notre pays et nos citoyens à sortir plus forts et plus unis de la crise.

Je vous remercie encore une fois de m’avoir invité à comparaître devant vous aujourd’hui. Mes collègues, les hauts fonctionnaires, et moi serions enchantés de répondre dès maintenant aux questions des membres du comité.

Le président : Merci beaucoup, monsieur le ministre.

[Traduction]

Nous allons maintenant passer aux questions. Mesdames et messieurs les sénateurs, si nous nous limitons à quatre minutes pour ce tour-ci, chacun aura la chance de poser une question. Veuillez donc poser des questions directes. J’invite aussi les témoins à répondre avec concision. Je suivrai les indications de la greffière, qui fera un signe de la main lorsque le temps sera écoulé.

La sénatrice Marshall : Je remercie le ministre et ses accompagnateurs d’être avec nous aujourd’hui.

Ma question porte expressément sur le Budget supplémentaire des dépenses (B) et sur les programmes liés à la COVID-19. Je voudrais d’abord dire que le document sur le Budget supplémentaire des dépenses (B) était facile à lire, mais qu’il ne contenait pas tous les renseignements dont nous avions besoin. Je voudrais passer en revue quelques éléments sur lesquels je n’ai rien trouvé dans le document.

La Prestation canadienne d’urgence indique des dépenses prévues pouvant atteindre 88 milliards de dollars jusqu’à la fin septembre. Or, le montant du programme de l’assurance-emploi qui la replacera ne se trouve pas dans le Budget supplémentaire des dépenses (B). Dans le cas de la Subvention salariale d’urgence du Canada qui a été modifiée dans le projet de loi C-9, je sais que 44 milliards de dollars ont été dépensés selon la dernière revue financière, mais il n’y a rien là-dessus dans le Budget supplémentaire des dépenses (B).

Pour ce qui est de la Subvention d’urgence du Canada pour le loyer — également visée par le projet de loi C-9 récemment adopté —, le ministre a indiqué que les sommes en cause seraient légèrement supérieures à 2 milliards de dollars, ce qui va nous amener près de la fin décembre. Il n’y a rien non plus dans ce budget des dépenses concernant le programme précédent de subvention pour le loyer. Par ailleurs, des sociétés d’État ont fourni une grande quantité de liquidités aux entreprises canadiennes. C’est le cas par exemple de Financement agricole Canada, de la Banque de développement du Canada et d’Exportation et développement Canada. D’après les chiffres les plus récents, ces montants totaliseraient un peu plus de 2 milliards de dollars, et il a fallu consulter les estimations du directeur parlementaire du budget pour en avoir le cœur net. J’aurais bien d’autres exemples à vous donner encore.

Nous avons devant nous le Budget supplémentaire des dépenses (B) où nous pouvons trouver certains renseignements, mais pas toute l’information dont nous avons besoin pour faire notre travail. Vous avez indiqué dans vos observations préliminaires que vous nous fournissiez ces renseignements pour que nous puissions demander des comptes au gouvernement. Quand pouvons-nous nous attendre à être en mesure de consulter un document budgétaire exhaustif incluant des données sur tous les programmes de lutte contre la pandémie?

M. Duclos : Merci, sénatrice Marshall. Ce sont de très bonnes questions. Je vais vous répondre brièvement avant de laisser Glenn Purves vous fournir de plus amples détails.

Il faut d’abord préciser que deux méthodes comptables différentes sont utilisées ici. Les documents du ministère des Finances sont fondés sur des chiffres découlant d’une comptabilité d’exercice alors que les budgets des dépenses sont établis en fonction d’une comptabilité de caisse.

En outre, il y a certains types de dépenses, comme les subventions salariales et les sommes versées dans le cadre de l’assurance-emploi, qui ne sont pas incluses dans les budgets des dépenses pour les raisons que M. Purves va maintenant vous exposer.

La sénatrice Marshall : Puis-je faire une remarque avant de laisser M. Purves répondre? Parmi les problèmes avec lesquels nous devons composer pour pouvoir faire un suivi des dépenses et établir la concordance avec le budget, monsieur le ministre, il y a le fait que l’exercice nous oblige à consulter des lois, des déclarations ministérielles, la revue financière et les rapports du directeur parlementaire du budget. Nous devons chercher des renseignements dans tous ces documents. Le gouvernement devrait nous permettre de les trouver en un seul endroit.

M. Glenn Purves, secrétaire adjoint, Secteur de la gestion des dépenses, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada : Merci, sénatrice. Ce sont effectivement d’excellentes questions.

Permettez-moi d’apporter d’abord une précision. Les budgets des dépenses doivent porter uniquement — et c’est le cas depuis des décennies — sur les organisations tributaires d’affectations budgétaires qui ont accès aux fonds du Trésor. Les mesures d’ordre fiscal et celles qui touchent l’assurance-emploi ne sont pas prises en compte dans les budgets des dépenses.

Je veux revenir à votre souhait quant à un guichet unique d’information. Si l’on considère les budgets des dépenses établis jusqu’à maintenant, y compris le Budget supplémentaire (B) et tout ce qui était prévu dans le Budget supplémentaire (A) ainsi que dans le Budget principal des dépenses, nous faisons état de montants totalisant 475 milliards de dollars autant pour les crédits législatifs que pour les crédits votés. C’est une partie du total de 640 milliards de dollars que le ministère des Finances a prévu dans l’Énoncé économique de l’automne, mais cela ne comprend pas...

La sénatrice Marshall : C’est justement le problème; c’est seulement partiel. Vous êtes en train de nous dire qu’il y a d’importantes sommes d’argent qui ne figurent même pas dans le budget des dépenses. Nous examinons ce budget, et nous avons seulement droit à 75 % du tableau global. C’est ça qui est problématique.

M. Purves : Pour que les choses soient bien claires, la portée des budgets des dépenses n’a jamais dépassé les organisations tributaires d’affectations budgétaires qui ont accès aux fonds du Trésor. Il est toutefois possible, comme nous l’avons déjà fait, de fournir les liens vers les programmes supplémentaires dépassant le cadre de ces budgets des dépenses pour présenter ce tableau global dans l’InfoBase. Vous auriez ainsi accès à toute l’information au même endroit.

La sénatrice Marshall : Nous parlons ici de programmes de lutte contre la COVID-19 qui remontent à peine à neuf mois en arrière, si bien que ces considérations historiques n’entrent pas en jeu.

[Français]

Le sénateur Forest : Monsieur le ministre, merci à vous et à votre équipe d’être parmi nous ce midi.

Depuis que l’on examine les programmes liés à la COVID-19 et les mesures que vous avez rapidement mises sur pied, ainsi que d’autres mesures qui sont réclamées, on a beaucoup parlé de la nécessité d’adopter un programme ou un plan sectoriel afin d’aider les secteurs qui sont en grande difficulté. Je pense par exemple au tourisme, à l’hôtellerie et à la restauration.

Hier, j’étais dans un hôtel et on me disait que le taux d’occupation était inférieur à 3 ou 4 %. L’Association hôtelière de la région de Québec, région que vous connaissez très bien, réclame une aide directe afin que les hôtels puissent traverser l’hiver et la période difficile qui s’en vient. Les deux tiers des établissements à Québec ne croient pas être en mesure de survivre au-delà de six mois.

Vous avez annoncé hier un programme de prêts dont les modalités seront à déterminer. On espère que ces modalités seront déterminées le plus rapidement possible, parce que ces gens attendent cette annonce comme un cadeau de Noël.

Pourquoi le gouvernement a-t-il choisi de créer un programme de prêts, même si les taux sont au plus bas, et n’a-t-il pas plutôt promis d’accorder une aide directe à ces petites entreprises qui forment, à la limite, tout le tissu des infrastructures d’hébergement dans le domaine touristique au Québec?

M. Duclos : Merci de votre question, sénateur Forest. Comme vous l’avez dit, dans ma circonscription en particulier, les difficultés se voient de manière désolante dans les secteurs de la restauration, de l’hôtellerie, du tourisme, de l’événementiel, des arts et spectacles et du transport. Tout cela bouleverse non seulement les entreprises, et les PME encore davantage, mais aussi tous les travailleurs qui aiment occuper des emplois dans ces industries, des industries de service qui sont tournées vers les autres et qui, pour des raisons qui sont tout à fait indépendantes de leur contrôle et dont ils ne sont pas responsables, subissent les foudres de la COVID-19.

Dans certains médias, on met beaucoup l’accent sur les prêts qui peuvent atteindre jusqu’à un million de dollars — et qui sont garantis, en passant, parce qu’un des problèmes, c’est que ces entreprises ont de la difficulté à obtenir des prêts auprès des banques, parce que les prêts ne sont pas garantis. Le gouvernement du Canada les garantit à des conditions très favorables, comme vous l’avez dit.

Il y a également la Subvention salariale d’urgence du Canada, qui accorde aux entreprises une subvention à la hauteur de 75 % du salaire précédant la crise pour chaque employé. Il y a donc les salaires, et il y a aussi le programme de remboursement des frais de loyer, y compris les taxes municipales, qui va jusqu’à 90 %. On parle ici de 90 % des frais fixes, loyer et taxes, qui sont remboursés pour les entreprises qui sont pour la plupart fermées, y compris beaucoup de restaurants et de bars.

On peut également compter sur les prêts pour les petites entreprises, qui peuvent aller jusqu’à 60 000 $, des prêts garantis par ailleurs. Une portion de cette somme, soit 20 000 $, n’est pas remboursable. En plus de cela, il y a de l’aide plus directe qui va continuer d’être offerte à ces secteurs qui ont été durement affectés, comme vous l’avez dit, sénateur Forest. Certaines de ces mesures proviennent effectivement de prêts intéressants et facilement accessibles, mais aussi de l’aide directe.

Je termine en disant que, sur les 380 milliards de dollars d’aide directe aux entreprises et aux travailleurs, une proportion de 84 % provient du gouvernement canadien. C’est très bien ainsi, puisque c’est le gouvernement canadien qui a la capacité fiscale et financière requise pour appuyer tous ces gens.

Le sénateur Forest : Si le temps me le permet, monsieur le président, j’aurais deux souhaits à faire.

Monsieur le ministre, tout en étant très conscient de la volonté que vous montrez d’aider ces gens, il faudra que la mise en place des programmes se fasse rapidement et qu’il y ait une meilleure communication, parce que beaucoup de ces petites entreprises n’ont pas nécessairement le personnel nécessaire au plan administratif, par exemple...

Vous avez énuméré une panoplie de mesures qui permettront aux entreprises d’aller chercher l’aide à laquelle elles ont réellement droit.

[Traduction]

Le sénateur Klyne : Je remercie le ministre de s’être joint à nous, et je souhaite la bienvenue à ses collaborateurs.

Le budget des dépenses prévoit 20 millions de dollars pour l’initiative de modernisation des applications. Je ne peux qu’imaginer que c’est un projet très complexe qui nécessite un équilibre entre les pressions accrues qui sont exercées pour limiter les coûts tout en servant un nombre croissant de personnes et la gestion d’une quantité de plus en plus importante de données tout en protégeant et en éliminant de vieilles applications. Il reste que je comprends parfaitement que le gouvernement doit moderniser et développer des applications qui répondent aux besoins croissants d’aujourd’hui dans une société numérique.

J’ai cinq questions, mais je vous prie de fournir le plus de renseignements possible au comité. Vous pouvez les transmettre par écrit si vous le voulez.

Pouvez-vous donner au comité une idée de l’ampleur de cette modernisation, y compris le budget total de l’initiative, le montant dépensé à ce jour, la façon dont l’appel d’offres est mené pour choisir un fournisseur et le nom du principal fournisseur? À quel moment la modernisation sera-t-elle terminée? Enfin, y a-t-il des leçons tirées de Phénix qui sont appliquées dans ces démarches?

M. Duclos : Merci, sénateur, de poser cette série d’excellentes questions. Je vais donner une réponse initiale pour ensuite laisser Mme Karen Cahill donner plus de détails.

Premièrement, pour ce qui est de la technologie, vous avez entièrement raison. Nous devons moderniser le fonctionnement du gouvernement du Canada. Certaines leçons tirées de la COVID-19 se sont révélées particulièrement utiles. Pour peut-être terminer sur une note d’espoir avant de céder la parole à Mme Cahill, je dirai que, par exemple, l’accès à distance pour faciliter le télétravail s’est amélioré. La capacité nécessaire pour faciliter le recours à la technologie et les connexions a augmenté de 72 % en l’espace de quelques semaines ou de quelques mois seulement.

Le nombre de minutes de téléconférence à la disposition des fonctionnaires est passé de 1,6 million à plus de 5 millions par jour, encore une fois en l’espace de quelques semaines ou de quelques mois seulement. Les avancées technologiques peuvent être très rapides, mais il faut aussi procéder adéquatement et de manière sécuritaire.

Sur ce, je vais céder la parole à Mme Cahill pour qu’elle donne plus de précisions.

Karen Cahill, secrétaire adjointe et dirigeante principale des finances, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada : La modernisation des applications profitera à plusieurs ministères. Pour répondre à votre première question, 20 millions de dollars seront dépensés en 2020-2021, et nous ajoutons un autre montant de 20 millions.

J’aimerais préciser que ce n’est pas de l’argent que le Conseil du Trésor dépensera en tant que ministère. C’est de l’argent qui sera transféré à d’autres ministères pour moderniser leurs applications et passer à une infrastructure de pointe, qu’il s’agisse des centres de données de pointe de Services partagés Canada ou de l’environnement infonuagique.

À ce jour, nous avons modernisé environ 5 000 applications à l’échelle du gouvernement du Canada. La prochaine version de Phénix fait partie d’un projet totalement à part. L’initiative vise à moderniser des applications existantes qui ont été déclarées désuètes ou qui doivent être modernisées en vue d’être transférées vers la nouvelle infrastructure. Nos collègues de Services partagés Canada pourraient probablement vous donner plus de détails, mais c’est une initiative conjointe entre le Bureau du dirigeant principal de l’information et Services partagés Canada.

Le sénateur Richards : Ma question est très précise. Je me demande où en est maintenant Phénix. Ma belle-sœur travaillait dans le service en question, et elle écrivait ses estimations et ses calculs à la main étant donné que les ordinateurs ne fonctionnaient pas. Même si elle a un quotient intellectuel de 153, c’était très difficile pour elle. Vous donnez 19 millions de dollars pour stabiliser Phénix. Je me demande ce que le montant donnera au fil des ans.

M. Duclos : Merci, sénateur. Je vais céder la parole, dans un instant, à Mme Cahill pour qu’elle donne encore une fois plus de détails. Nous avons encore beaucoup de pain sur la planche, comme vous le dira Mme Cahill. Nous avons fait des progrès importants et encourageants ces derniers temps. Nous passons aussi, comme vous le savez, au système de prochaine génération, qui sera mieux adapté à la réalité et aux besoins de la fonction publique. Je sais que Mme Cahill peut en dire davantage à ce sujet.

Mme Cahill : Nous continuons de nous occuper de Phénix. Il y a encore beaucoup de travail à faire pour stabiliser l’application avant de pouvoir tout faire passer au système de prochaine génération qui sera mis en place dans quelques années. Il faut notamment se pencher sur les systèmes opérationnels, nettoyer les données et s’assurer que les ministères ont en place les ressources et les politiques nécessaires pour passer facilement et sans heurts à l’application de prochaine génération, lorsqu’elle entrera en vigueur. Nous continuons donc de travailler avec acharnement pour stabiliser Phénix. C’est notre dirigeant principal de l’information qui fait le travail avec les ministères, ainsi que Services publics et Approvisionnement Canada, qui est aussi un acteur important dans cette initiative.

Le sénateur Richards : J’ai une dernière question brève. Pensez-vous qu’il faudra attendre des mois ou des années avant que ce soit fait, avant que les choses soient réglées?

Mme Cahill : Il faudrait poser la question à Services publics et Approvisionnement Canada. Ce que je peux vous dire, c’est que nous progressons, et nous faisons des plans. Services partagés Canada, qui dirige la mise en place de l’application de prochaine génération, travaille aussi à un projet pilote de prochaine génération avec Patrimoine canadien. Nous pourrons donc, à mesure que nous progressons, fournir plus d’information au comité.

Le sénateur Richards : Merci.

Le sénateur Smith : Dans votre réponse à la sénatrice Marshall, vous avez dit que les différences comptables entre le ministère des Finances et le Conseil du Trésor font partie des raisons qui expliquent pourquoi il est difficile de faire correspondre les programmes de dépenses aux autorisations de dépenses. Compte tenu des niveaux de dépenses sans précédent, du budget des dépenses aux mesures législatives d’urgence, que fait votre ministère pour assurer la cohésion et l’harmonisation entre les ministères fédéraux en matière de dépenses et d’établissement de rapports, pour que nous puissions mieux suivre les dépenses en tant que parlementaires?

M. Duclos : Merci. Je peux ensuite demander à M. Purves de fournir de plus amples détails.

Ce sont des méthodes comptables professionnelles et répandues dans le monde. La pratique de la comptabilité de caisse parallèlement à la comptabilité d’exercice est largement reconnue et utilisée dans le monde entier par des gouvernements et des entreprises privées. Lorsque M. Purves a parlé de crédits, il pensait surtout à la comptabilité de caisse, et lorsque le ministère des Finances parle de comptabilité d’exercice, il tient compte du cadre budgétaire, comme le font également les entreprises.

Cela dit, à propos des dépenses budgétaires et des dépenses d’assurance-emploi qui ne figurent pas dans le budget des dépenses, je vais encore une fois céder la parole à M. Purves qui pourra peut-être mieux expliquer la situation.

M. Purves : Merci. M. Duclos a expliqué avec éloquence la différence entre la comptabilité d’exercice et la comptabilité de caisse. Il y a essentiellement trois distinctions entre l’énoncé économique de l’automne présenté par le ministère des Finances et notre Budget supplémentaire des dépenses (B).

Premièrement, de toute évidence, il faut tenir compte du moment où ils sont déposés. L’énoncé économique de l’automne a été présenté presque deux mois après la préparation du Budget supplémentaire des dépenses (B). Par conséquent, des choses comme la Prestation canadienne de la relance économique, de nouvelles décisions et nouvelles estimations des dépenses législatives se trouvent dans l’énoncé économique de l’automne, y compris tous les budgets.

Deuxièmement, bien entendu, il y a la différence de portée que j’ai mentionnée en discutant avec la sénatrice Marshall. La Subvention salariale d’urgence du Canada, l’assurance-emploi et l’Allocation canadienne pour enfants — des choses du domaine des dépenses budgétaires par le truchement de la Loi de l’impôt sur le revenu, ou de la Loi sur l’assurance-emploi en puisant dans le Compte des opérations de l’assurance-emploi — sont des mesures distinctes du budget des dépenses, qui met l’accent sur les crédits provenant du Trésor.

Au bout du compte, il existe un moyen de tenir compte du tableau d’ensemble d’un point de vue financier. C’est dans l’énoncé économique de l’automne, qui englobe donc tout ce qui se trouve dans le Budget supplémentaire des dépenses (B) et plus encore. Il offre une multitude de détails selon la méthode de la comptabilité d’exercice qui tient également compte de la comptabilité de caisse. Je pense que c’est le point de vue que la sénatrice Marshall cherchait. Nous pouvons aussi procéder à une certaine réconciliation au moyen de l’InfoBase du GC, et votre comité a toujours fourni dans le passé des pistes très utiles en vue d’améliorer cette perspective.

Le sénateur Smith : Lorsque nous avons entendu hier notre ministre des Finances parler de la situation financière et des protections budgétaires, j’ai essayé de comprendre l’équilibre que le Conseil du Trésor peut trouver pour nous transmettre l’information. Si vous voulez bien, monsieur le ministre, je vous serais reconnaissant de nous parler des protections et des cibles budgétaires. Pouvez-vous nous dire à quel endroit cela nous mènera dans six à douze mois?

M. Duclos : Je peux certainement témoigner de l’importance, comme ma collègue, la ministre Freeland, l’a indiqué à tout le monde hier, de mettre l’accent sur l’urgence de la situation actuelle, tout en veillant à ce que nos investissements soient rigoureux et transparents, et qu’ils nous aident tous à traverser la pandémie. Je pense que vous voudrez revenir aux nombreux renseignements présentés hier dans l’énoncé économique de l’automne et dans les autres outils que M. Purves a mentionnés rapidement.

[Français]

Le président : Merci, monsieur le ministre.

Le sénateur Loffreda : Merci, monsieur le ministre Duclos, d’être parmi nous aujourd’hui. C’est une question un peu plus complexe, mais la planification est très importante. Comme on dit, on ne peut jamais commencer assez tôt à planifier. Le gouvernement a-t-il commencé à réévaluer son portefeuille immobilier? La gestion et l’entretien de tous ces sites coûtent des milliards de dollars par année. On le voit dans vos estimations pour ce qui est des coûts liés à la modernisation et à la technologie. À mon avis, les gens continueront à faire du télétravail. Cela deviendra la norme. On va laisser vacants une panoplie de bureaux à travers le pays. Est-ce qu’on devrait commencer à envisager de se départir de certains biens immobiliers? On parle beaucoup de ressources financières ces jours-ci. Cela nous aiderait à reconstituer nos ressources financières.

M. Duclos : Merci beaucoup, sénateur Loffreda, de nous poser cette question qui nous préoccupe depuis un certain temps. Même avant la pandémie, on savait que la gestion d’un patrimoine immobilier aussi considérable devait être améliorée. La pandémie nous a donné des pistes de réflexion additionnelles. Cela mènera à des actions concrètes au sortir de la pandémie.

J’aimerais mentionner deux choses : tout cela est lié à d’autres programmes. Vous l’avez très bien dit, la question de la souplesse est importante, et la productivité des travailleurs dans la fonction publique peut — mais pas nécessairement — être améliorée grâce à une plus grande souplesse en ce qui a trait au télétravail. Il faut faire attention par contre, car ce ne sont pas tous les travailleurs de la fonction publique qui se sentent à l’aise dans le télétravail. Il y a toutes sortes de raisons qui peuvent militer pour un maintien du travail dans les bureaux. L’autre chose, c’est l’empreinte environnementale de ces immeubles, la consommation d’énergie et, évidemment, les efforts d’entretien qu’il faut faire et qui comportent des coûts environnementaux. Finalement, j’aimerais vous lancer une invitation, sénateur Loffreda, ainsi qu’à tous les autres sénateurs. N’hésitez pas à me faire part, directement ou d’une autre manière, de tout conseil ou de toute idée que vous pourriez avoir sur ce gros dossier que nous voulons mener à bien sur l’usage approprié de ce patrimoine immobilier sur les plans économique, social et environnemental, à court terme et à plus long terme.

Le sénateur Loffreda : Merci. Ai-je le temps de poser une autre question?

Le président : Oui.

Le sénateur Loffreda : Je pose une question rapide. La diversité a énormément souffert pendant cette pandémie. Elle est pourtant fort importante pour notre économie. C’était une priorité dans votre plan ministériel de 2020-2021. Est-ce que vous prévoyez une accélération de ce plan, à cause de la pandémie et parce que la diversité est si importante pour notre économie, en ce qui a trait à la fonction publique et à tout ce qui touche le gouvernement?

M. Duclos : La réponse est oui pour les informations et les indicateurs qu’on doit utiliser, les cibles qu’on doit atteindre, ainsi que les capacités de travailler en mode collaboratif avec les personnes qui représentent la diversité de toutes sortes de manières. Ces personnes aimeraient non seulement jouer un rôle plus solide au sein de la fonction publique, mais elles ont aussi une voix forte à faire entendre, tout cela évidemment dans un contexte permettant que le gouvernement du Canada soit encore mieux adapté à la réalité diverse des Canadiens et, par conséquent, mieux en mesure de refléter cette diversité au sein de la fonction publique.

Le sénateur Dagenais : Hier, je me suis confiné trois heures dans une salle du Sénat pour lire l’énoncé économique. Comme plusieurs analystes, j’ai remarqué qu’il y avait beaucoup de paroles, mais moins de précisions sur plusieurs dossiers majeurs du gouvernement. À titre de sénateur de la région de Montréal, je vais vous parler du dossier d’Aéroports de Montréal (ADM), qui a annoncé ne plus avoir les moyens de construire la station du futur train d’accès. On parle d’un engagement de 600 millions de dollars de la part d’ADM, ce qui est majeur pour le développement économique de Montréal. Aéroports de Montréal perd 15 millions de dollars par mois depuis le début de la pandémie. Est-ce qu’Ottawa s’engagera formellement à payer pour la construction de la station de l’aéroport? Dans l’affirmative, où est l’argent dans l’énoncé économique d’hier, où j’ai vu une enveloppe de 500 millions de dollars pour tous les aéroports canadiens sur une période de six ans, alors que la facture sera de 600 millions de dollars à Montréal?

M. Duclos : La question m’interpelle beaucoup. Dans ma région de Québec, comme vous le savez, le gouvernement du Canada s’est engagé clairement à améliorer l’infrastructure de transport collectif. Vous savez aussi que le programme du gouvernement actuel en matière de transport collectif est le plus ambitieux de toute l’histoire du pays. Vous avez tout à fait raison de dire que raccorder de grands aéroports comme celui de Montréal au centre-ville est absolument essentiel et indispensable. Partout ailleurs au Canada et dans le monde, les grands aéroports comme l’aéroport de Montréal sont connectés de manière fiable et efficace au centre-ville. Il faut absolument que cela se fasse. Nous ne sommes pas les seuls à le croire, la Ville de Montréal le croit aussi. En fait, nous croyons que le gouvernement du Québec voudra s’associer à ce projet, car tous les Québécois en profiteront, et pas seulement ceux qui vivent près de l’aéroport; tout le monde profitera de cet investissement important.

Le sénateur Dagenais : Rapidement, évidemment, je veux vous parler de l’aide aux compagnies aériennes. Je pense que cela se trouve à la page 36 de l’énoncé politique. On sait que la plupart des grands pays ont aidé leurs compagnies aériennes. Cependant, hier, j’ai remarqué qu’on s’attardait plutôt sur un processus mystérieux. J’ai posé des questions et on m’a dit que c’était confidentiel. Je ne sais pas où se dirige le gouvernement. Il faut penser aussi au remboursement des billets des Canadiens, qui sont des contribuables. On parle d’un processus. Je vous avoue que, si j’étais président du Conseil du Trésor, je trouverais inquiétant de faire des prévisions budgétaires sur les processus. J’aimerais que vous nous parliez de l’aide qui sera apportée aux compagnies aériennes, et plus précisément du remboursement des personnes qui ont acheté des billets.

M. Duclos : Vous avez bien noté, sénateur Dagenais, que la condition selon laquelle il était primordial de rembourser les billets était claire. Le ministre Garneau — et je vous invite à lui parler, car il en aurait beaucoup à vous dire — a dit clairement qu’il s’agissait d’une condition sine qua non. Il a dit aussi une autre chose importante, soit qu’au Canada il y a des mesures qu’on ne retrouve pas ailleurs dans le monde, qui ont été très importantes pour l’industrie aérienne, comme la Subvention salariale d’urgence du Canada. Un montant d’environ 1,3 milliard de dollars en subventions salariales a été remis aux grandes entreprises aériennes, ce qui est très bien, car cela leur a permis de soutenir l’embauche et de verser des salaires à des dizaines de milliers de travailleurs, dont plusieurs dans la grande région de Montréal.

Le président : Merci, monsieur le ministre.

[Traduction]

La sénatrice Galvez : Merci beaucoup, monsieur le ministre, d’être parmi nous cet après-midi. Je vous félicite de votre Stratégie pour un gouvernement vert : une directive du gouvernement du Canada, que j’ai lue avec plaisir en décembre dernier. Votre ministère, le Conseil du Trésor, a le mandat d’écologiser le Parlement et d’accroître la transparence. Vous pouvez peut-être me répondre par écrit ou de vive voix.

Des institutions comme la GRC, Parcs Canada, l’ARC et Agriculture et Agroalimentaire Canada ont reçu beaucoup d’argent. J’aimerais savoir s’il y a des conditions à respecter par rapport aux objectifs climatiques liés à ces transferts. Je suis surtout curieuse en ce qui a trait au Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques de 2016, dans lequel les deux aspirations ont été exprimées. Au cours des quatre dernières années, votre ministère s’est-il servi du cadre au moment de distribuer des fonds? Merci.

M. Duclos : Merci, sénatrice Galvez. Il est toujours formidable d’entendre votre point de vue sur ce programme novateur de protection de l’environnement, mais il est tout aussi important de protéger la santé des gens. De toute évidence, la salubrité des milieux naturels contribue à la santé des gens.

Je vous remercie d’avoir mentionné la stratégie pour un gouvernement vert. Comme vous l’avez compris, c’est absolument essentiel étant donné que le gouvernement du Canada doit aussi faire preuve de leadership dans la lutte contre les changements climatiques et leurs conséquences en prenant des mesures d’atténuation.

Les changements climatiques, tout comme la lutte pour un environnement sain, sont omniprésents dans les évaluations que nous faisons de différentes politiques et de différents programmes, par l’entremise du Cabinet et de toutes sortes de procédures que le Secrétariat du Conseil du Trésor utilise pour surveiller, évaluer et faire respecter les programmes et les politiques mis en œuvre par d’autres ministères.

C’est donc partout, et il faut que cela le soit, car les changements climatiques sont le plus grand défi à relever pour assurer la survie de l’humanité.

La sénatrice M. Deacon : Merci d’être parmi nous cet après-midi. Je pense que le bémol à beaucoup de nos questions, c’est qu’il faut absolument reconnaître le changement de cap, le travail et la réponse que la COVID a imposés au sein de votre équipe. Je sais que nous essayons de creuser un peu plus creux avec certaines de nos questions, mais je vous remercie du travail accompli pour procéder et faire la transition rapidement.

L’une des choses que je voulais vous demander aujourd’hui se rapporte à ce que j’ai remarqué dans la Stratégie pour un gouvernement vert publiée il y a quelques semaines, à savoir que le gouvernement cherche à faire du télétravail une option plus permanente dans la fonction publique.

Je me demande si, pour nos besoins, le travail a commencé. Y a-t-il une analyse préliminaire ou des prévisions des coûts et des avantages que présenterait une stratégie de télétravail pour une partie assez considérable de la fonction publique? Le cas échéant, a-t-on des chiffres sur les coûts et le projet initial? Je pense aux services de conférence, aux appareils nécessaires et à l’installation à domicile, entre autres choses. Ma question a un deuxième volet, mais je voulais d’abord vous demander cela, compte tenu des défis que vous avez dû relever.

M. Duclos : Merci, sénatrice. Tout d’abord, sur le plan technologique, et j’en ai parlé rapidement plus tôt, au cours des derniers mois, aussi difficile — parfois très difficile — que la vie professionnelle et personnelle des fonctionnaires a pu être, des changements importants ont fait en sorte qu’il est maintenant possible et, dans tous les cas, productif, de faire du télétravail. La technologie a évolué très rapidement.

Cela dit, j’ajouterais aussi le bémol auquel j’ai fait brièvement allusion plus tôt, à savoir que les circonstances professionnelles et personnelles des fonctionnaires varient beaucoup. Nous devons faire preuve du plus grand respect lorsque nous abordons la question. Oui, le télétravail a des coûts et des avantages, mais ils varient grandement. Nous devons collaborer étroitement avec ces fonctionnaires ainsi qu’avec leurs agents et leurs syndicats, pour procéder de la bonne façon.

En procédant de la bonne façon, grâce aux leçons apprises au cours des dernières semaines et des derniers mois, je crois que le monde sera différent après la COVID-19 et que le télétravail profitera à tout le monde, mais il faut que ce soit fait d’une manière très souple, très ciblée et très respectueuse.

La sénatrice M. Deacon : Merci. Je suppose qu’au moment de prendre ce virage, il sera certainement possible de faire des téléchargements relativement à des espaces, à des terres et à des actifs, mais nous allons voir.

Je vais passer à ma prochaine question. Selon votre lettre de mandat, votre équipe et vous devez travailler avec d’autres ministres pour augmenter le nombre de femmes occupant des postes décisionnels de haut niveau partout dans l’appareil gouvernemental, notamment dans les organismes centraux et dans nos services de sécurité.

Une fois de plus, je sais que la pandémie a perturbé nos meilleurs plans, mais je me demande si vous pourriez nous donner des chiffres ou d’autres renseignements sur ce projet pour que nous puissions nous faire une idée de la situation actuelle.

M. Duclos : Merci beaucoup. Je sais qu’il y a peu de temps pour répondre, et j’inviterais donc Mme Sandra Hassan, si elle le peut, à donner des détails sur ce programme et le succès que nous commençons à avoir.

Sandra Hassan, sous-ministre adjointe, Conditions d’emploi et relations de travail, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada : Merci. Nous n’avons pas encore atteint la parité en fonction des estimations de la disponibilité au sein de la population active pour les groupes visés par l’équité en matière d’emploi, mais nous faisons des progrès, et grâce à la gestion délibérée des talents, des cadres issus de la diversité sont sélectionnés en vue de nominations par le gouverneur en conseil, par exemple à des postes de sous-ministre adjoint, puisque c’est le groupe de relève pour pourvoir des postes de niveau supérieur.

De plus, le greffier du Conseil privé a récemment énoncé pour tous les sous-ministres des engagements en matière de diversité et d’inclusion, ce qui accroîtra la représentation grâce à la promotion et au recrutement.

Le sénateur Boehm : Il fait bon de vous voir, monsieur le ministre. Merci de vous être joint à nous.

La semaine dernière, j’ai rencontré les gens de la Fédération de la police nationale, qui représente plus de 20 000 agents de la GRC partout au pays. L’un de leurs gros problèmes est la dotation de postes d’un bout à l’autre du pays, au moment où le taux d’occupation a diminué d’environ 12 % à cause des salaires plus intéressants à l’échelle locale.

Deuxièmement, l’arme de poing qu’ils portent est vieille de 25 ans. Certaines pièces ne sont plus fabriquées comme il se doit, et le taux de défaillance de l’arme est de 20 %.

Il y a aussi la question des caméras corporelles. Tout cela nécessite des fonds supplémentaires. Je sais que la question du salaire doit probablement faire l’objet d’une sorte de négociation collective, mais est-ce une chose sur laquelle on se penche sérieusement dans le contexte du budget des dépenses?

M. Duclos : Je suis moi aussi très heureux de vous revoir, sénateur Boehm, bien que dans un contexte différent de celui où nous nous sommes croisés la dernière fois, dans Charlevoix, il y a quelque temps.

Je demanderai à Mme Hassan de vous parler dans un instant de l’avancement des négociations collectives, qui comme vous l’avez dit, portent notamment sur les salaires.

De manière plus générale, comme vous l’aurez remarqué au cours des dernières semaines et des derniers mois, nous travaillons très fort avec la GRC pour en faire un meilleur organisme pour servir les Canadiens dans toute leur diversité en rendant cette diversité plus visible à la GRC, afin d’assurer la sécurité de la population et de lui inspirer confiance. C’est un programme ambitieux aux dimensions multiples. Malheureusement, je n’ai pas assez de temps pour vous les décrire en détail, donc je céderai immédiatement la parole à Mme Hassan, pour qu’elle réponde à votre question sur les négociations collectives.

Mme Hassan : Je vous remercie de votre question, sénateur. Elle tombe à point, puisque nous sommes en pleine négociation, cette semaine, avec la Fédération de la police nationale. Celle-ci négocie actuellement sa première convention collective. Comme vous l’avez deviné, la question des salaires fera partie des discussions. Il y a beaucoup d’autres enjeux qui feront l’objet de discussions en vue de cette première convention collective, comme l’équipement et la sécurité, mais j’aurai besoin de l’aide de mon collègue, Glenn Purves, pour répondre à votre question sur les coûts.

M. Purves : Je pense qu’il est encore très tôt pour bien en évaluer les coûts. Nous travaillons, bien sûr, avec Mme Hassan sur tous ces fronts, pour nous assurer d’être au diapason et pour que les chiffres concordent lorsque viendra le temps d’adopter un budget, en temps et lieu.

Le président : Merci.

La sénatrice Duncan : Je vous remercie, monsieur le ministre, comme je remercie les fonctionnaires d’être ici aujourd’hui. J’aimerais vous poser mes questions, puis vous inviter à y répondre par écrit, pour nous laisser le temps d’en entendre d’autres.

Premièrement, j’aimerais, comme certains de mes collègues avant moi, remercier les fonctionnaires des efforts herculéens qu’ils ont déployés en réponse à la pandémie, pour répondre aux besoins des Canadiens, particulièrement les efforts du personnel de l’Agence du revenu du Canada.

Je comprends les contraintes que présente le travail à domicile sur les plans de la sécurité et de la gestion et j’aimerais en parler brièvement. Cependant, il comporte aussi des avantages pour le gouvernement dans son ensemble. Certains de mes collègues ont mentionné la question de l’immobilier, par exemple. Quand nous décidons de ne pas conserver certains bâtiments, les petites villes en souffrent ou peuvent en souffrir. Quand nous voyageons moins, les lignes aériennes y perdent aussi au change.

Y a-t-il une personne, au Conseil du Trésor ou ailleurs au gouvernement, qui est chargée d’évaluer les économies réalisées et les conséquences inattendues de la situation, un peu comme l’a fait, il y a une quarantaine d’années, le Groupe de travail chargé de l’examen des programmes? Y a-t-il une personne responsable d’évaluer les économies et les conséquences inattendues de tout cela pour le gouvernement?

J’aimerais également avoir un peu d’information sur les plus de 585 millions de dollars octroyés aux régimes et programmes d’assurances de la fonction publique. Je comprends que ce serait là l’un des coûts du régime. Pourrais-je connaître les détails des régimes et programmes ciblés ici? Quels sont les coûts qui ont augmenté pour les employés? Ils ne sont sûrement pas inclus dans cette somme, mais je présume que la situation occasionne des coûts supplémentaires aux employés. Y a-t-il une évaluation du régime qui se fait? Quelle information recevons-nous du régime pour justifier cette demande de hausse des primes et quels sont les programmes concernés? Quelles sont les questions d’invalidité prises en compte ou quelles leçons tirons-nous de cette augmentation des coûts du régime?

[Français]

Le président : Monsieur le ministre, vous avez sûrement entendu la sénatrice vous dire que vous pouviez aussi répondre par écrit. Avez-vous des commentaires à faire avant que l’on cède la parole à une autre sénatrice?

[Traduction]

M. Duclos : C’est ce que nous ferons, sénatrice Duncan. Je vous remercie de vos bons mots sur les fonctionnaires. Il est toujours important de rappeler l’importance de leur travail.

Concernant les économies réalisées et la personne chargée d’évaluer les effets du télétravail, je demanderai au secrétariat de vous répondre pour alimenter les réflexions de l’ensemble des sénateurs sur le télétravail et l’avenir du parc immobilier, en particulier.

Si nous n’avons pas le temps de répondre maintenant à votre question sur les coûts et les effets de la situation sur le régime d’assurances de la fonction publique, je peux demander au secrétariat de vous fournir également une réponse écrite à ce sujet.

Le président : Est-ce que cela vous convient, sénatrice Duncan?

La sénatrice Duncan : Tout à fait. Merci beaucoup.

Le président : Avant de donner la parole à la sénatrice Pate, qui vient de se joindre à nous, j’ai une question à poser au ministre.

[Français]

Monsieur Duclos, le pourcentage de personnes seules qui ont besoin de l’aide d’une banque alimentaire a presque doublé depuis les 20 dernières années. Dans la population canadienne en général, cela représente environ 4 millions de personnes. J’ai examiné attentivement les différents programmes qui ont été créés et annoncés. Par contre, il y a un groupe de personnes...

[Traduction]

Entre 1,4 et 1,5 million de Canadiens célibataires de moins de 65 ans vivent près ou en dessous du seuil de la pauvreté au Canada. Bon nombre d’entre eux sont sans emploi ou sous-employés, ils n’ont pas assez à manger, sont en mauvaise santé, isolés et même itinérants. Cependant, les mesures d’aide destinées aux célibataires vivant dans la pauvreté sont considérablement moins généreuses que celles s’adressant aux familles.

La question que je souhaite vous poser, monsieur le ministre, est la suivante : que fait le gouvernement pour aider ces 1,4 million de Canadiens, environ, qui vivent dans une extrême pauvreté, avec moins de 10 000 $ par année?

[Français]

M. Duclos : Merci beaucoup de le dire avec tant d’éloquence et de sentiment. On voit bien que cela vous préoccupe, et cela me préoccupe également. Les banques alimentaires, on l’a vu au cours des derniers mois, les gens n’y vont pas avec plaisir, mais parce que c’est la dernière solution, la dernière chose qui reste. C’est pour cela que des programmes ont été mis en place — et ils n’étaient pas parfaits, mais aucun ne l’est —, comme la PCU, qui a aidé 8,9 millions de Canadiens à mettre de la nourriture sur la table pour les enfants et les aînés en particulier. Il s’agit de 8,9 millions de personnes qui n’ont peut-être pas eu besoin de se rendre dans une banque alimentaire. Sur la question de l’Allocation canadienne pour enfants, le vingtième jour de chaque mois, cette allocation réduit la pauvreté des enfants de 40 %. Cette mesure est en place depuis juillet 2016 et elle a un impact considérable non seulement sur les familles à faible revenu, mais aussi sur les familles de la classe moyenne, pour qui c’est aussi très difficile.

[Traduction]

Ce groupe de personnes souvent oubliées, dont beaucoup vivent dans la pauvreté, le groupe des célibataires de 55 à 65 ans, constitue une population vulnérable pour toutes sortes de raisons. Ces personnes vivent souvent avec des handicaps ou n’ont ni les compétences ni l’expérience requises pour intégrer le marché du travail. Elles sont laissées pour compte et vivent souvent dans la pauvreté. C’est parce qu’elles n’ont pas encore droit à la Sécurité de la vieillesse.

Lorsqu’elles atteignent 65 ans, le gouvernement fédéral entre en jeu, et leur niveau de pauvreté diminue d’environ 30 %, mais avant cela, elles dépendent souvent de l’aide sociale offerte par les provinces et les territoires et comme vous le savez, cette aide est souvent insuffisante.

Le président : Merci.

La sénatrice Pate : Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre bon travail et de votre compétence depuis que vous êtes ministre et avant.

Comme vous l’avez souligné hier dans l’énoncé économique de l’automne, ce sont les personnes les plus marginalisées économiquement qui subissent le plus fortement les conséquences de la COVID-19 sur le plan de la santé et le plan économique, et la situation met en lumière des inégalités systémiques qui ne font que s’accentuer.

Comme de plus en plus de groupes et de personnes, y compris ce comité, la Chambre de commerce du Canada et la Banque du Canada le soulignent, il pourrait être très pertinent et rentable d’établir un revenu de base viable garanti pour assurer la relance économique dont nous avons tant besoin et protéger la population contre toutes les conséquences économiques dont le sénateur Mockler vient de nous parler. Cela pourrait aussi nous aider à répondre aux urgences futures et aider les gens à se sortir de la pauvreté une bonne fois pour toutes. Nous savons que les derniers mois ont mis vivement en lumière les coûts humains, financiers et sociaux de la pauvreté et des inégalités au Canada.

Voici la question que je souhaite vous poser, monsieur le ministre : quelles mesures le gouvernement prendra-t-il pour lutter contre cette oppression économique et ces inégalités constantes? Il pourrait établir des normes nationales afin de jeter les assises d’un revenu viable garanti avant le prochain budget. Quelles mesures prend-il pour y parvenir avec ses homologues autochtones, provinciaux et territoriaux?

Merci, monsieur le ministre, et merci à mes collègues.

M. Duclos : Je vous remercie, sénatrice Pate, de cette question très avisée et pleine d’empathie.

Les inégalités systémiques qui existaient avant la crise sont devenues des vulnérabilités systémiques pendant la crise. Une société où les inégalités abondent est une société qui sera exposée à de grandes vulnérabilités en temps de crise, comme nous l’avons vu tant sur le plan de la santé que sur le plan économique au cours des derniers mois, et vous l’avez très bien souligné, sénatrice Pate.

Si je peux commencer tout de suite à répondre à votre question sur le revenu viable garanti, l’ACE, soit l’Allocation canadienne pour enfants, est un revenu minimal garanti et une aide souple, facile à administrer et plus généreuse pour ceux et celles ayant le plus besoin d’aide; j’ai déjà mentionné la réduction de 40 % de la pauvreté chez les enfants tous les mois. La Sécurité de la vieillesse et le Supplément de revenu garanti fournissent aussi un revenu minimal garanti aux Canadiens de plus de 65 ans depuis des dizaines d’années.

Nous avons déjà annoncé, comme le premier ministre l’a clairement énoncé dans le discours du Trône, que nous réformerons le régime de l’assurance-emploi pour corriger des lacunes évidentes du système qui poussent les gens dans le piège de la pauvreté ou de la vulnérabilité. Nous avons commencé à le faire grâce à la PCU, à laquelle se sont ajoutées la Prestation canadienne de la relance économique et des améliorations au régime d’assurance-emploi. Il reste beaucoup à faire. Nous savons que nous pouvons compter sur vous, sénatrice Pate, de même que sur vos collègues du Sénat, pour nous aider à trouver et à mettre en place la bonne formule.

[Français]

Le président : Merci beaucoup, monsieur le ministre. C’est la fin de la réunion. Avant de partir, si vous avez des commentaires à faire pour conclure, nous vous écoutons.

M. Duclos : Mes commentaires seront brefs. Merci beaucoup de faire tout ce que vous faites en temps normal, mesdames et messieurs les sénateurs et sénatrices. Vous jouez un rôle de sages qui vient compléter le rôle des élus à la Chambre des communes. Je vous encourage à poursuivre votre bon travail. Vous êtes des gens très solides et crédibles. Je vous invite à continuer de nous nourrir de vos idées et de vos conseils, de parler à des gens comme moi ainsi qu’à mes collègues qui gèrent d’autres portefeuilles. Continuez sur cette lancée. Vous connaissez les meilleures chaînes de communication. Continuez à faire cet excellent travail et à le faire valoir auprès des élus de la Chambre des communes.

Le président : Merci beaucoup à vous, monsieur le ministre, et à votre équipe.

[Traduction]

Honorables sénateurs, notre prochaine séance est prévue pour le lundi 7 décembre, à 11 heures (HNE). La greffière vous fera parvenir tous les détails. Sur ce, monsieur le ministre, mesdames et messieurs les fonctionnaires et les honorables sénateurs, je vous remercie encore une fois.

(La séance est levée.)

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