Aller au contenu
NFFN - Comité permanent

Finances nationales


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES FINANCES NATIONALES

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le lundi 1er mars 2021

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit par vidéoconférence aujourd’hui, à 13 heures (HE), afin d’étudier le Budget supplémentaire des dépenses (C) pour l’exercice se terminant le 31 mars 2021.

Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Honorables sénateurs, avant de commencer notre réunion, j’aimerais vous rappeler, à vous et aux témoins, de mettre votre microphone en sourdine en tout temps, à moins que la présidence ne vous nomme.

Si vous éprouvez des difficultés techniques et, en particulier, si elles sont liées à l’interprétation, veuillez les signaler à la présidence ou à la greffière du comité, et nous nous efforcerons de résoudre le problème. Si vous rencontrez d’autres difficultés techniques, veuillez communiquer avec le Centre de services de la DSI en composant le numéro d’assistance technique fourni.

L’utilisation de plateformes en ligne ne garantit pas la confidentialité des entretiens ni l’absence d’écoute clandestine. Par conséquent, tous les participants doivent être conscients de ces contraintes et limiter la divulgation éventuelle d’informations de nature délicate, privée ou privilégiée liées au Sénat, au cours des réunions du comité. Les participants doivent savoir qu’ils doivent participer aux réunions dans un lieu privé et être attentifs à leur environnement.

Nous allons maintenant amorcer la partie officielle de notre séance.

Je m’appelle Percy Mockler. Je suis sénateur du Nouveau-Brunswick, et je préside le Comité des finances nationales. J’aimerais maintenant vous présenter les membres du comité qui participent à la réunion : le sénateur Dagenais, la sénatrice M. Deacon, la sénatrice Duncan, le sénateur Forest, le sénateur Klyne, le sénateur Loffreda, la sénatrice Marshall, la sénatrice Moncion, la sénatrice Pate, le sénateur Richards et le sénateur Smith. Je souhaite la bienvenue à chacun de vous, ainsi qu’aux téléspectateurs qui pourraient nous regarder partout au pays sur le site Web sencanada.ca.

Honorables sénateurs, nous poursuivons aujourd’hui notre étude des dépenses énoncées dans le Budget supplémentaire des dépenses (C) pour l’exercice se terminant le 31 mars 2021, qui a été renvoyé au comité par le Sénat du Canada le 16 février 2021.

[Français]

Pour notre premier groupe de témoins, nous accueillons M. Yves Giroux, directeur parlementaire du budget. Il est accompagné de Mme Xiaoyi Yan, directrice, Analyse des budgets, de M. Jason Stanton, analyste principal, et de Mme Jill Giswold, analyste.

[Traduction]

Je vous souhaite tous la bienvenue, et je vous remercie d’avoir accepté notre invitation. Comme toujours, monsieur Giroux, je vous suis reconnaissant de votre disponibilité et de celle de votre équipe.

À ce stade, je vais demander à M. Giroux de faire sa déclaration, puis nous passerons aux questions des sénateurs. Monsieur Giroux, la parole est à vous.

[Français]

Yves Giroux, directeur parlementaire du budget, Bureau du directeur parlementaire du budget : Honorables sénateurs et sénatrices, je vous remercie de m’avoir invité à témoigner aujourd’hui. Mon équipe et moi sommes heureux de discuter de notre analyse du Budget supplémentaire des dépenses (C) présenté par le gouvernement pour l’exercice 2020-2021, qui a été publiée le 24 février dernier.

Aujourd’hui, je suis accompagné de Xiaoyi Yan, directrice, Analyse des budgets, et des analystes qui ont participé à la rédaction du rapport sur le Budget supplémentaire des dépenses (C), Jill Giswold, analyste, et Jason Stanton, analyste principal. Le troisième et dernier Budget supplémentaire des dépenses (C) du gouvernement pour l’exercice 2020-2021 fait état d’un montant supplémentaire de 8 milliards de dollars en autorisations budgétaires. Les autorisations votées, lesquelles nécessitent l’approbation du Parlement, totalisent 13,4 milliards de dollars. Les autorisations législatives pour lesquelles le gouvernement a déjà obtenu l’autorisation de dépenser du Parlement enregistrent une diminution totale de 5,4 milliards de dollars.

[Traduction]

En raison de la pandémie mondiale, le nombre d’autorisations demandées par le gouvernement a considérablement augmenté au cours de l’exercice financier 2020-2021. Dans le présent Budget supplémentaire des dépenses, les mesures liées à la COVID-19 représentent 9,9 des 13,4 milliards de dollars en autorisations, lesquelles requièrent l’approbation du Parlement.

Dans nos précédents rapports, nous avons soulevé plusieurs questions clés se rapportant aux défis auxquels les parlementaires font face dans leur rôle essentiel en matière d’examen des dépenses du gouvernement et d’optimisation des ressources pendant la pandémie. Bien que le Secrétariat du Conseil du Trésor ait fourni des renseignements additionnels dans le présent Budget supplémentaire des dépenses qui répondent à quelques-unes des questions susmentionnées, certaines questions nécessitent encore des éclaircissements. Des préoccupations existent toujours en ce qui a trait à la fréquence à laquelle le gouvernement fournit une liste à jour des mesures liées à la COVID-19 dans un document central (hormis le processus du Budget des dépenses), de même qu’en ce qui concerne le manque de cohérence dans l’approche utilisée pour rendre publiques les données réelles sur les dépenses associées à la COVID-19.

Dans le but de relever ces défis, nous avons élaboré un cadre de surveillance pour aider les parlementaires à suivre toutes les annonces et dépenses du gouvernement liées à la COVID-19. J’aimerais souligner que, pour arriver à créer cet outil de suivi, nous avons simplement affecté deux analystes à la tâche; le gouvernement pourrait facilement faire la même chose s’il le souhaitait.

Nous serons heureux de répondre à toutes vos questions sur notre analyse du Budget supplémentaire des dépenses (C) du gouvernement ou sur les autres travaux du directeur parlementaire du budget.

Merci, monsieur le président.

Le président : Je vous remercie, monsieur Giroux, de votre déclaration et de vos observations. Nous allons maintenant passer aux questions. Chers sénateurs, pendant la comparution de ce groupe de témoins, chacun de vous interviendra pendant un maximum de sept minutes. Par conséquent, je vous prie de poser vos questions de façon directe. De plus, je demande aux témoins de bien vouloir répondre de façon concise. La greffière vous fera un signe de la main pour vous indiquer que le temps de parole est écoulé et que nous allons passer au sénateur suivant.

La sénatrice Marshall : Monsieur Giroux, je vous remercie, vous et vos fonctionnaires, de votre présence aujourd’hui.

Au cours de votre déclaration préliminaire, vous avez parlé du manque de renseignements sur les programmes liés à la COVID-19 qui ont été mis à la disposition du public. Je sais que vous fournissez des informations sur votre site Web, mais pourriez-vous préciser exactement les renseignements qui n’ont pas été rendus publics? Car ce sont les mêmes informations auxquelles les sénateurs essaient d’avoir accès afin de suivre les dépenses du gouvernement. Certains d’entre nous ont du mal à le faire, alors j’aimerais savoir si vous avez repéré des problèmes semblables à ceux que j’ai rencontrés.

M. Giroux : Merci, madame la sénatrice.

Les problèmes que nous soulevons en ce qui concerne la disponibilité des informations sont liés au fait qu’il n’y a pas un seul endroit ou un seul document qui présente les dépenses actualisées pratiquement en temps réel. Vous vous souvenez peut-être que tout au long de la pandémie, jusqu’au début du mois d’août, le gouvernement a fourni une estimation actualisée des dépenses effectuées jusqu’à ce moment-là pour pratiquement toutes les mesures de dépenses liées à la COVID-19. Cette estimation a été fournie au Comité des finances de la Chambre des communes. Au moment de la prorogation, cela a cessé, et cette reddition de comptes n’a pas recommencé.

Si certains ministères sont passés maîtres dans l’art de fournir des mises à jour régulières sur les dépenses engagées pour financer des mesures liées à la COVID-19 — par exemple, les mises à jour effectuées par Emploi et Développement social Canada au sujet de la PCU —, d’autres ministères ne fournissent pas de mises à jour aussi régulières. Il n’y a pas de guichet unique pour prendre connaissance des dépenses actualisées, comme on s’y attendrait normalement. Cela pose des difficultés en raison des nombreux programmes de dépenses qui ont été lancés depuis le mois de mars de l’année dernière.

La sénatrice Marshall : Merci beaucoup. Nous avons du mal à obtenir des informations, mais vous en fournissez sur votre site Web. Avez-vous également des problèmes ou des difficultés à obtenir les renseignements dont vous avez besoin pour les transmettre à des personnes comme nous?

M. Giroux : En général, non. Il s’est parfois avéré difficile d’obtenir des informations de grande qualité, ce qui a nécessité des discussions avec certains ministères.

Je voudrais cependant signaler que, dans le cas d’un nombre restreint de ministères, il s’est avéré un peu plus difficile d’obtenir des informations actualisées et régulières. Je pense notamment à Services aux Autochtones Canada. Innovation, Sciences et Développement économique Canada est également un ministère où il s’est avéré un peu plus difficile d’obtenir des renseignements, ainsi qu’auprès de certains secteurs très particuliers du portefeuille de la santé. En ce qui concerne le portefeuille de la santé, j’éprouve un peu plus de sympathie parce qu’ils jouent un rôle de premier plan dans la lutte contre la pandémie, mais pour ce qui est de Services aux Autochtones Canada et d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada, ce n’est pas aussi facile à comprendre.

La sénatrice Marshall : D’accord. Merci. Dans le Budget supplémentaire des dépenses (C), il y a un rapprochement entre les chiffres de ce budget et les chiffres de l’Énoncé économique de l’automne. C’est présenté comme un rapprochement au début du document.

Pensez-vous que cette présentation est adéquate, ou pensez-vous que le Conseil du Trésor aurait pu mieux présenter ce rapprochement? Je pensais moi-même qu’au sein des ministères concernés — dans ces pages —..., mais je remarque que vous n’avez pas formulé d’observations sur la façon dont ils ont présenté ces renseignements. Je pense que 140 milliards de dollars, ou un montant d’environ cet ordre, figurent dans le rapprochement. Pourriez-vous nous dire si c’est une façon adéquate de présenter ces informations?

M. Giroux : C’est une observation intéressante, car c’est beaucoup mieux que c’était avant. Sans un tel rapprochement, il peut parfois être très difficile pour les parlementaires — et encore plus pour les Canadiens — de comprendre la teneur du Budget supplémentaire des dépenses et son lien avec un budget ou un énoncé économique de l’automne. C’est donc une amélioration notable par rapport à la situation qui prévalait avant la publication d’un tel rapprochement.

Cela étant dit, je suis certain que le Secrétariat du Conseil du Trésor serait disposé à accueillir des suggestions pour rendre le tableau encore plus utile maintenant qu’il a fait ce premier pas. Il serait certainement très utile pour ceux qui — comme vous, sénateurs — examinent en détail les dépenses de ce niveau de fournir un peu ou beaucoup plus de détails. Je proposerais donc au SCT d’agir de la sorte et de fournir un peu plus d’information quand il vous permet de faire des rapprochements.

La sénatrice Marshall : Je vous remercie beaucoup.

J’ai une autre question. Vous n’avez peut-être pas le temps d’y répondre, mais je la poserai quand même.

Vous avez publié un rapport distinct sur le Compte des opérations de l’assurance-emploi, y indiquant que le gouvernement fournit habituellement des renseignements dans son Énoncé économique de l’automne ou dans le budget, mais qu’il ne l’a pas fait cette fois-ci. Vous vous êtes donc penchés sur la question, avez formulé quelques hypothèses et avez élaboré deux scénarios. Pourriez-vous expliquer les préoccupations que vous exprimez dans ce rapport au sujet du Compte des opérations de l’assurance-emploi?

M. Giroux : Oui, sénatrice. Ce qui me pose problème avec ce compte, c’est qu’en raison de la situation économique et du fait que le gouvernement s’est engagé à geler les cotisations d’assurance-emploi pour les deux prochaines années, le Compte des opérations de l’assurance-emploi risque d’enregistrer un profond déficit au cours des deux prochaines années. Ainsi, en vertu de la loi actuelle, ces cotisations devront augmenter substantiellement jusqu’au maximum prévu par la loi pour les deux prochaines années. C’est probablement la raison pour laquelle le gouvernement n’a pas fourni autant de renseignements qu’il aurait pu le faire dans l’Énoncé économique de l’automne au sujet du Compte des opérations de l’assurance-emploi. Pour éviter un déficit ou rétablir l’équilibre, il faudra augmenter substantiellement les cotisations d’assurance-emploi.

La sénatrice Marshall : Je vous remercie.

[Français]

Le sénateur Forest : Merci, monsieur Giroux, à vous et à toute votre équipe pour l’éclairage que vous apportez sur une situation financière fort complexe. Vous nous indiquez où il y a eu des améliorations notables quant à la possibilité d’avoir des redditions de comptes en ce qui a trait aux différents programmes spéciaux mis en place en raison de la pandémie de COVID-19. J’avais interpellé, au printemps et à l’automne, le ministre Morneau et la ministre Freeland au sujet de l’atteinte des objectifs. Chaque programme spécial avait des objectifs clairs visant à offrir de l’aide, soit sous forme de PCU ou de subventions salariales. J’ai été fort préoccupé par une situation entourant les subventions salariales, où d’une part, des entreprises publiques touchaient des montants fort importants d’aide, comme des subventions salariales, et d’autre part, augmentaient les dividendes pour leurs actionnaires. Dans le cadre de l’évaluation faite des chiffres absolus, sommes-nous en mesure de bien évaluer l’efficience de nos programmes et l’impact que les programmes ont eu sur le plan des objectifs? Je donne l’exemple des subventions pour l’aide à maintenir l’employabilité : d’une part, on dégage des sommes nettes pour les verser ensuite en dividendes. Je ne pense pas qu’on ait atteint la cible initiale du programme.

M. Giroux : C’est une question intéressante, monsieur le sénateur. Quand le gouvernement a lancé la majorité de ces programmes, je crois que son objectif n’était pas nécessairement l’efficacité de chacun des programmes, mais plutôt de fournir une aide immédiate à ceux et celles qui en avaient besoin, y compris les entreprises. Le fait qu’il n’y avait pas beaucoup de suivis préoccupait bien des gens, dont moi, si l’on pense par exemple à la PCU — la seule exigence pour recevoir la PCU étant d’avoir un NAS et un numéro de compte bancaire. Il y avait très peu de vérifications, puisque celles-ci devaient être faites par la suite. Cela a donné lieu à des situations, dans le cas de la PCU, où des gens qui n’y avaient évidemment pas droit l’ont demandée et obtenue. Dans le cas des subventions salariales, elles ont été versées à des entreprises qui ont utilisé ces sommes en bonne partie pour continuer de payer les salaires de leurs employés et de verser des dividendes. L’atteinte des objectifs est difficile à déterminer, car cela dépend de ceux à qui vous parlez. Les représentants du gouvernement diront que les objectifs ont été atteints, parce que les gens ont continué de recevoir un revenu disponible assez élevé. Par contre, si l’on parle à des gens qui sont un peu plus soucieux d’une administration très rigoureuse des programmes, ils pourraient dire que cela laisse à désirer, en raison d’événements comme ceux que vous avez mentionnés. Cela dit, la vérificatrice générale et son équipe seront plus en mesure de déterminer si les programmes ont été bien administrés et s’ils ont atteint leur cible sur les plans de la saine administration et de la saine gestion des fonds publics. Je suis convaincu que la vérificatrice générale passera beaucoup de temps à étudier l’administration de ces programmes.

Le sénateur Forest : Effectivement, il faut saluer la rapidité de la mise en place de ces programmes, puis l’ensemble de l’organisation et des sommes, en ce qui concerne le Québec, et le pourcentage important de l’aide reçue directement par les Canadiens et les Canadiennes. Ce qui me préoccupe, c’est que depuis, il s’est quand même écoulé 10 mois. Éventuellement, comme il s’agit de fonds publics et compte tenu de la responsabilité et de la reddition de comptes qu’on doit effectuer auprès des Canadiens et Canadiennes, il m’apparaît important qu’on puisse colmater les brèches et s’assurer que l’ensemble des gens qui en ont réellement besoin puissent avoir accès à ces sommes, car ce ne sont pas des sommes illimitées. Dans le cas de ceux pour qui ces sommes sont superflues, il faudrait qu’on puisse réajuster le tir. Actuellement, on ne semble pas avoir ce souci de réajuster le tir en ce qui a trait à certains programmes tels que la PCU ou le programme de subvention salariale.

M. Giroux : Vous soulevez de bons points, monsieur le sénateur. En tant que contribuable, je crois que cela suscite des interrogations. Dans un reportage à la télévision de Radio-Canada, hier soir, on apprenait que l’ancien président de Cinar, Ronald Weinberg, a touché la PCU alors qu’il construisait un hôtel luxueux au Panama. Ce genre de chose soulève des doutes quant à la rigueur de l’administration de certains programmes et quant au potentiel de récupération de sommes versées indûment à des gens qui profitent de la pandémie pour obtenir des prestations auxquelles ils n’ont pas droit.

Cette question relève plutôt de la vérificatrice générale et des ministères responsables de l’administration de ces programmes. Toutefois, en tant que contribuable, j’ose espérer qu’il y aura des efforts de récupération, de vérification et de recouvrement des sommes versées en trop, à la suite de demandes faites de façon mal intentionnée ou frauduleuse.

Le sénateur Forest : La semaine dernière, des représentants de Finances Canada ont comparu devant le comité.

En ce qui a trait à la Banque de l’infrastructure du Canada, le financement passe par le ministère des Finances, ce qui n’est pas le cas pour la plupart des autres ministères et organismes de ce genre. On m’a expliqué que, jusqu’à maintenant, cela améliorait l’efficacité du transfert des fonds, mais c’est quelque chose que je comprends mal.

Avez-vous vérifié cette particularité de la Banque de l’infrastructure du Canada, à savoir que la capitalisation des sommes passe par Finances Canada, au gré de l’évolution des projets?

M. Giroux : Nous nous sommes penchés sur cette question il y a plusieurs mois, lorsqu’on a analysé une série de sociétés d’État et leur mode de financement. À ce moment-là, on avait estimé que les frais d’exploitation de la Banque de l’infrastructure du Canada étaient plutôt élevés comparativement aux sommes déboursées.

Nous ne nous sommes pas penchés spécifiquement sur le mécanisme de financement, selon lequel les fonds passent par le ministère des Finances, mais on pourrait le faire si le comité le désire.

Le sénateur Forest : Il serait intéressant de voir l’efficacité de cette particularité. Merci.

[Traduction]

Le sénateur Klyne : Je remercie le groupe de témoins qui comparaît aujourd’hui. Je voulais commencer en félicitant le directeur parlementaire du budget des efforts qu’il déploie pour fournir les renseignements inestimables et neutres dont les parlementaires ont besoin pour accomplir leur travail et garder la population canadienne informée. Je vous en remercie beaucoup.

Si le temps me le permet, j’ai deux questions à poser. La première concerne les rapports constants que le directeur parlementaire du budget prépare sur les considérations économiques et financières dans la foulée de l’achat du pipeline Trans Mountain. Il y est indiqué que l’affaire continue de sembler rentable, selon l’incidence du taux d’utilisation et de la politique en matière de changement climatique. À cet égard, pourriez-vous fournir au comité votre point de vue ou une recommandation sur la manière dont le gouvernement pourrait atténuer le risque de voir s’éroder une position qui semble rentable?

M. Giroux : Je vous remercie de la question, sénateur. Je n’ai pas pour mandat de formuler des recommandations au gouvernement. Je fournis de l’information aux parlementaires comme vous. Cependant, compte tenu de leur nature, certaines de nos observations peuvent facilement être considérées comme la bonne chose à faire.

Dans le cas du pipeline Trans Mountain, nous avons indiqué que la rentabilité du pipeline ne dépendra pas, en grande partie, directement du prix du pétrole, mais des contrats que le propriétaire du pipeline pourra conclure. Si le prix du pétrole augmente, la production fera probablement de même, bien entendu. Si le prix du pétrole décroît, la production pourrait alors diminuer, selon d’autres facteurs influençant le marché pétrolier, bien sûr.

Pour réduire le risque, on pourrait, par exemple, vendre le pipeline si le gouvernement juge qu’il peut obtenir un prix qui en justifierait la vente au secteur privé. Pour le gouvernement, l’aliénation de l’actif constituerait manifestement la meilleure manière d’atténuer le risque pour les contribuables. Il pourrait devoir vendre à un moment où il dirait adieu aux profits qu’il ferait s’il conservait l’actif plus longtemps. Il est toujours possible qu’avec le recul, les choses soient plus claires, mais si l’objectif consiste à réduire le risque pour le gouvernement, on peut y parvenir en vendant l’actif à un acheteur du secteur privé qui se montrerait disposé à l’acheter à un prix qui convient au gouvernement.

Le sénateur Klyne : Mon autre question porte sur le travail que vous avez réalisé sur les besoins en matière de logement des Autochtones vivant en milieu urbain, rural et nordique, au terme duquel vous avez signalé qu’il manque 636 millions de dollars par an pour assurer un logement convenable. J’ai quelques questions à ce propos. J’aimerais que vous précisiez en quoi consiste le « logement convenable ». Je suis certain que ce n’est rien d’opulent et qu’il s’agit d’un logement de base de la taille que vous avez utilisée ou de celle pouvant convenir à une famille.

Avez-vous recueilli des données par catégorie, groupe démographique, niveau économique, revenu des ménages ou éducation? À ce sujet, je me demande si, en fait, vous avez subdivisé certaines données.

Quand vous parlez du logement pour les Autochtones vivant en milieu urbain, rural et nordique, excluez-vous ou distinguez-vous les Autochtones qui vivent hors réserve, dans des régions urbaines ou rurales dans le cadre de cette enquête ou de ce rapport sur le logement?

M. Giroux : Je vous remercie, sénateur. La définition de « convenable » que nous avons utilisée est celle de la Société canadienne d’hypothèques et de logement, laquelle indique qu’il s’agit d’un logement ayant un nombre suffisant de pièces pour le nombre de personnes que comprend le ménage, et ne nécessitant pas de réparations majeures. Il pourrait nécessiter des réparations mineures, mais le besoin d’effectuer des réparations majeures suffit à en faire un logement inadéquat.

Par exemple, s’il y a de la moisissure ou si l’électricité ou la plomberie ont besoin de rénovations importantes, le logement est inadéquat. De même, si le nombre de pièces est insuffisant, le logement est surpeuplé et est donc inadéquat.

Vous avez également demandé s’il y a des indicateurs par revenu ou d’autres formes de subdivision. Dans le rapport — que je ne connais pas par cœur —, je pense que nous présentons les données par revenu et par nombre de personnes formant le ménage. Je ne suis pas entièrement certain des catégories, car je dois me souvenir d’un certain nombre de rapports. Je n’ai pas tous les détails en main; je vous répondrai donc ultérieurement.

Enfin, votre dernière question concerne les Autochtones vivant à l’extérieur et à l’intérieur des réserves. Quand nous avons examiné les besoins des Autochtones en matière de logement, nous avons exclu les personnes qui vivent dans les réserves, mais inclus celles qui vivent en dehors des réserves, dans les milieux urbains et ruraux. Le rapport englobe tous les Autochtones vivant hors réserve.

Le sénateur Klyne : J’ai une brève question. Les Autochtones vivant hors réserve, dont vous venez de parler, étaient-ils surreprésentés?

M. Giroux : Oui. Par rapport à la population en général, les Autochtones vivant hors réserve sont surreprésentés au chapitre du logement inadéquat ou inabordable, ou — pire encore — les deux. Le problème est particulièrement criant dans les grands ménages, soit ceux qui comptent de nombreux membres, comme plus de quatre ou cinq par ménage. Ces ménages risquent encore plus de vivre dans un logement inabordable ou inadéquat.

Le sénateur Klyne : Je vous remercie.

Le sénateur Richards : Je vous remercie, monsieur Giroux, de témoigner. Le sénateur Klyne a posé mes deux questions et l’a probablement fait mieux que je l’aurais pu. Je vous poserai donc simplement une question à portée très générale que je viens d’écrire. Peut-être pouvez-vous me fournir quelques indications à ce sujet.

Les dépenses que la pandémie a entraînées nuisent-elles à l’avancement d’autres grands projets qui étaient en cours avant la pandémie, dans les domaines de la construction navale, des infrastructures ou de l’achat d’aéronefs, par exemple? Si c’est le cas, comment ces répercussions se manifestent-elles de façon générale?

Au cours des derniers jours, nous avons appris que la construction navale accuse un retard considérable et que la situation perdurera pendant des années. Je me demande si vous pourriez traiter de la question.

M. Giroux : Je vous remercie, sénateur. C’est une question fort intéressante, que je n’ai pas examinée en détail. Cependant, lors de la préparation de plusieurs de nos rapports, il nous est clairement apparu que les ministères ont une capacité réduite d’entreprendre ou de poursuivre des projets d’envergure. C’était particulièrement vrai en mars, avril et mai 2020. Je ne suis toutefois pas sûr que la pandémie soit le principal facteur qui nuise au projet de navire de combat de surface canadien, ou NCSC, par exemple, ou si quelque chose d’autre a changé dans les caractéristiques des navires.

Voilà pour le NCSC. Je sais que divers projets d’infrastructure ont dû cesser leurs activités aux quatre coins du pays pour des questions de santé publique, particulièrement pendant le premier et le deuxième trimestres de 2020. Cependant, outre ces informations générales, je ne connais pas de grands projets d’approvisionnement gouvernementaux ou d’autres contrats ou projets qui seraient en retard, à part ceux que le grand public connaîtrait. Par exemple, les projets de construction de logement entrepris par des gouvernements du pays ont probablement connu des retards en avril ou en mai 2020 quand les restrictions sanitaires sont entrées en vigueur. Quant aux activités gouvernementales comme telles, je soupçonne que l’accès à l’information a été mis en veilleuse pendant plusieurs semaines, voire des mois, car les fonctionnaires ne pouvaient pas travailler. Il en va probablement de même pour le processus d’immigration et le système d’immigration en général. Les missions à l’étranger ont fermé ou ont considérablement réduit leurs activités, et le traitement des dossiers a également été ralenti en raison des restrictions sanitaires.

Je sais que ce n’est pas une réponse très détaillée, mais malheureusement, c’est probablement la meilleure que je puisse fournir au comité à ce moment-ci.

Le sénateur Richards : Je poursuivrai brièvement sur le même sujet, monsieur Giroux. Nous achetons les plans de nos navires de surface, n’est-ce pas? Nous ne les dessinons pas nous-mêmes. Nous coupons l’acier et construisons les navires dans nos chantiers navals, mais les plans viennent d’autres pays, n’est-ce pas?

M. Giroux : Il est vrai que nous achetons les plans auprès d’autres pays ou d’autres entreprises qui ont déjà construit des navires eux-mêmes, mais nous devons les adapter aux exigences de la marine. Nous ne les prenons pas littéralement tels quels et nous inscrivons ensuite le nom du navire sur la coque. D’après ce que je comprends, du moins, nous devons apporter plusieurs modifications et adaptations aux navires. Même si nous achetions auprès d’autres marines des navires qui sont déjà à l’eau, ils devraient être modifiés dans une certaine mesure pour tenir compte de l’équipement précis dont la Marine royale canadienne a besoin. Ce n’est pas du « copier-coller ». Il faut adapter et modifier les plans des navires initiaux.

Le sénateur Richards : Je vous remercie. C’est bon à savoir.

[Français]

Le sénateur Loffreda : Merci, monsieur Giroux, d’être avec nous.

[Traduction]

Je remercie les témoins de comparaître. Monsieur Giroux, dans les projections économiques que contient votre Rapport sur la viabilité financière de 2020, vous prévoyez une croissance annuelle de 1,7 % du PIB réel à long terme au Canada. Vous ajoutez que vos hypothèses à long terme demeurent inchangées au sujet de l’inflation.

Au regard des tendances économiques actuelles, des niveaux des dépenses gouvernementales en Amérique du Nord — et pas seulement au Canada — et de l’augmentation des économies des ménages canadiens, considérez-vous toujours que l’inflation restera aux niveaux actuels ou est-ce que la différence entre la croissance du PIB et l’inflation se détériorera davantage? Habituellement, nous visons une croissance du PIB de 3 % et une inflation de 2 %. Je crains que l’écart ne rétrécisse. Plus particulièrement, si l’inflation augmente, nous savons tous l’incidence que cela aura sur les taux d’intérêt, les frais de service de la dette et l’aptitude à assurer le service de la dette. Pensez-vous que nous devrions émettre plus d’obligations à long terme?

M. Giroux : C’est littéralement une question à 1 milliard de dollars. Quand nous avons publié la mise à jour du Rapport sur la viabilité financière, ou RVF, nous avons maintenu nos hypothèses quant à la croissance à long terme du PIB — qui est de 1,7 %, comme vous l’avez souligné —, ainsi que nos projections à long terme au chapitre de l’inflation. Quand nous avons publié le RVF, nous ne craignions pas tant une reprise de l’inflation qu’une déflation, puisque nous observions des diminutions de prix dans certains secteurs déprimés de l’économie.

Ces craintes ne se sont pas concrétisées et, de toute évidence, il n’y a pas eu de déflation généralisée. Même au cours des derniers jours, on a entendu parler du risque que l’inflation reparte à la hausse. Si cela devait arriver et que l’inflation reprend, nous mettrions à jour notre Rapport sur la viabilité financière. Nous n’en sommes pas encore là, toutefois. Si cela devait survenir, les taux d’intérêt augmenteraient manifestement à court terme et cela aurait une incidence néfaste sur les finances du gouvernement.

En ce qui concerne votre question à savoir si le gouvernement aurait dû s’endetter davantage en émettant des obligations à long terme — puisque je crois comprendre que c’est le sens de votre question —, je pense personnellement que le gouvernement aurait dû tenter de miser le plus possible sur les obligations à long terme. Quand les taux d’intérêt sont très faibles, ils risquent d’augmenter au cours des 10, 20 ou 30 années suivantes. De façon générale, il vaut beaucoup mieux bloquer sa dette aussi longtemps que possible quand les taux d’intérêt sont faibles.

Cependant, le problème avec cette stratégie, c’est que la demande en obligations à très long terme est limitée, car les agents économiques — ou prêteurs — savent ou soupçonnent que les taux d’intérêt pourraient augmenter sur 30 ans si c’est le genre d’obligations qui nous intéresse.

À mon avis, le gouvernement ferait beaucoup mieux d’emprunter le plus possible avec des obligations à long terme, dans la mesure où la prime qu’il devra payer n’annule pas les économies qu’il pourrait réaliser à long terme. C’est une science, qui comporte toutefois plusieurs inconnus, notamment le comportement des taux d’intérêt à long terme. Si quelqu’un savait avec certitude ce qu’il adviendra de ces taux, cette personne ne serait pas ici. Elle croulerait sous la richesse et n’aurait pas à travailler. Mais personne ne peut prévoir les fluctuations des taux d’intérêt avec beaucoup de justesse. Dans les circonstances actuelles, toutefois, le gouvernement devrait certainement regarder à long terme.

Le sénateur Loffreda : Je vous remercie de cette réponse. J’ai une autre brève question sur un sujet que j’ai rapidement abordé précédemment. Monsieur Giroux, j’ai lu le billet que vous avez publié sur votre blogue le 26 janvier 2021. J’en ai parlé au cours de séances précédentes, mais je voudrais approfondir la question. J’ai vu qu’il y a plus d’obligations à long terme, comme je l’ai indiqué plus tôt. J’ai vu les pourcentages. Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet? Je ne veux pas passer trop de temps sur cette question. Je pense que c’était une sage décision.

En outre, pour ce qui est de la prévisibilité des frais de service de la dette — puisque plus nous avons d’obligations à long terme, plus les choses sont prévisibles —, on se préoccupe considérablement des niveaux d’endettement et on en discute beaucoup.

À l’heure actuelle, cette année, les dépenses du gouvernement sont élevées pour de bonnes raisons. Je ne les remets pas en question et je ne m’y oppose pas. Le gouvernement prend des mesures adéquates, mais ses dépenses sont élevées en raison de la pandémie. Cela étant dit, si nous examinons les frais de service de la dette et l’aptitude à assurer le service de la dette à titre de pourcentage des dépenses du gouvernement, en faisant abstraction des années de pandémie, quel pourcentage des dépenses gouvernementales les frais de service de la dette représenteraient-ils historiquement? Je sais que les taux d’intérêt sont à un creux sans précédent, mais dans l’avenir, après la pandémie, quand les dépenses reviendront à des niveaux normaux de 300 ou 350 milliards de dollars, quel sera le pourcentage des frais de service de la dette, selon vos prévisions? La dette est-elle réellement viable à ces niveaux? Je lis partout que c’est le cas, mais je voudrais que vous nous en disiez plus à ce sujet. Je vous remercie.

M. Giroux : Merci, monsieur le sénateur. J’aurais probablement besoin d’une heure pour répondre pleinement à votre question. Je vais essayer de le faire en peu de temps.

Les frais de service de la dette dépendent de deux choses : le niveau de la dette et les taux d’intérêt. Le niveau de la dette a augmenté drastiquement, tandis que les taux d’intérêt ont grandement diminué. C’est ce qui rend la dette acceptable ou abordable, mais si les taux d’intérêt devaient grimper rapidement, cela entraînerait des conséquences sur les autres dépenses gouvernementales. Il faudrait faire des compromis difficiles à cet égard.

Le sénateur Loffreda : Nous pourrions peut-être obtenir ces chiffres plus tard ou dans une prochaine réunion. Merci beaucoup. Je vous remercie de nous accorder de votre temps pour aborder cette question importante.

Le président : Monsieur Giroux, avant de passer la parole au sénateur Smith, pourriez-vous nous fournir une réponse écrite complète à la question du sénateur Loffreda?

M. Giroux : Bien sûr, monsieur le président.

Le président : Savez-vous quand vous pourrez nous la fournir? Au cours des prochains jours, peut-être?

M. Giroux : Je crois que nous pourrons vous transmettre une réponse d’ici quelques jours, selon l’ampleur de la réponse demandée par le comité.

Le président : Merci beaucoup, monsieur Giroux.

[Français]

Le sénateur Smith : Merci, monsieur Giroux, de participer à nos débats d’aujourd’hui.

[Traduction]

J’aimerais revenir aux commentaires et aux questions de la sénatrice Marshall. Dans votre rapport sur le Budget supplémentaire des dépenses, on mentionne un document ou une base de données centralisée, qui présenterait toutes les mesures de dépenses ainsi qu’une description connexe. Ainsi, la transparence relative aux dépenses publiques serait accrue, selon vous.

Pourriez-vous nous dire comment vous envisagez ce document public? Quels renseignements devrait-il contenir?

M. Giroux : Je crois que le gouvernement dresse déjà une liste exhaustive de toutes les mesures associées à la COVID-19 et de la provenance des autorisations de dépenses, qu’il s’agisse d’une loi distincte, du Budget principal des dépenses ou des divers budgets supplémentaires des dépenses. Il tient aussi compte du montant total, mais pas des montants dépensés à ce jour. Je crois que c’est le cœur du problème. Les parlementaires et les Canadiens doivent connaître les montants dépensés à ce jour.

Le gouvernement publie ce type d’information pour certains programmes très populaires, comme la PCU et ses successeurs, mais pas pour la majorité de ses programmes. Ainsi, les Canadiens et les parlementaires ne savent pas exactement quels programmes sont sur la bonne voie pour respecter les dépenses prévues, lesquels ont été plus populaires que prévu ou encore quels sont ceux qui ont moins bien fonctionné que prévu, ce qui permettrait aux parlementaires et au gouvernement de modifier les programmes pour veiller à ce qu’ils répondent aux besoins qu’ils devaient combler.

Je crois que les parlementaires et les Canadiens profiteraient de ces renseignements et de ces documents.

Le sénateur Smith : Monsieur Giroux, il faut donc se demander comment faire pour influer sur le Parlement et le gouvernement afin d’assurer une pleine participation à cette planification dont vous parlez. Est-ce réaliste ou est-ce simplement la façon dont les gouvernements fonctionnent?

M. Giroux : Je crois que c’est tout à fait réaliste. Comme je l’ai dit dans mon discours préliminaire, nous pouvons vous fournir à vous, et à tous les Canadiens, des renseignements exhaustifs sur les dépenses gouvernementales associées à la COVID. Nos deux analystes sont avec nous aujourd’hui : Jill Giswold et Jason Stanton; ils pourront vous fournir une liste exhaustive fondée sur les renseignements gouvernementaux. Ils ne peuvent pas présenter une mise à jour hebdomadaire, par exemple, parce qu’ils ne sont que deux et qu’il faudrait que les ministères nous transmettent cette information chaque semaine. Toutefois, le gouvernement et ses centaines de milliers de fonctionnaires pourraient le faire.

Le sénateur Smith : Votre rapport sur le Budget supplémentaire des dépenses montre que malgré le blocage d’affectations au cours des dernières années, les sommes non utilisées ont grandement augmenté. Monsieur Giroux, pourriez-vous expliquer au comité vos constatations à ce sujet? Avez-vous été en mesure d’expliquer la raison d’une telle augmentation des dépenses approuvées qui ne sont pas dépensées? Est-ce que le gouvernement communique l’information de manière transparente à cet égard? Devrions-nous être inquiets?

M. Giroux : Je vais demander à M. Stanton de répondre à la question, puisqu’il suit la situation de près.

Jason Stanton, analyste principal, Bureau du directeur parlementaire du budget : Je vous remercie pour votre question. Les affectations bloquées sont des autorisations approuvées que bloque le Conseil du Trésor puisqu’elles ne seront pas dépensées au cours de l’année.

De façon générale, on peut présumer que le montant des affectations bloquées et non dépensées correspondra aux fonds non utilisés pour l’année en cours. En se fondant sur le Budget supplémentaire des dépenses des cinq dernières années, on a constaté qu’il n’y avait pas vraiment de lien entre les affectations bloquées et les fonds non utilisés.

Il est donc quelque peu difficile de prendre ce qui est présenté dans le Budget supplémentaire des dépenses pour tenter de désigner les fonds qui ne seront pas utilisés. Comme vous l’avez constaté, une augmentation des affectations bloquées n’entraînera pas une augmentation proportionnelle des fonds non utilisés.

Le sénateur Smith : L’exemple de la Défense nationale est parfait à cet égard. À l’époque, je me souviens que les fonds pour les projets n’étaient pas tous utilisés. On demandait toujours quand l’argent serait dépensé, mais on n’obtenait jamais de réponse claire. J’essaie de comprendre ce qu’il y a derrière la non-utilisation des fonds et la fin des projets. C’est une question de transparence, en quelque sorte, mais surtout de planification efficace. Avez-vous des commentaires à ce sujet? Je crois que la Défense nationale en est le parfait exemple.

M. Giroux : Oui, monsieur le sénateur. Je peux peut-être vous aider. La non-utilisation des fonds n’est pas nécessairement une mauvaise chose. Comme vous l’avez souligné, elle peut être un signe d’un manque de planification si, par exemple, les fonds d’un même projet ne sont pas utilisés, année après année.

C’est ce qui arrive souvent avec les programmes d’infrastructures : il faut reporter des milliards de dollars à une autre année. C’est un signe que le gouvernement a été très ambitieux dans la planification de ses dépenses ou que la planification ne s’est pas passée comme prévu.

D’un autre côté, en tant que contribuable, j’aime mieux voir un gouvernement ne pas utiliser des fonds que d’être témoin de la « folie du mois de mars ». À mon avis, il est bien plus grave de dépenser pour dépenser à la fin de l’exercice pour être certain de ne pas avoir de fonds inutilisés.

Ainsi, la non-utilisation des fonds présente des avantages et des inconvénients, mais de façon générale, un bon gestionnaire vise la plus petite péremption possible par l’entremise d’une bonne planification, plutôt que de se lancer dans les dépenses folles au mois de mars.

Le sénateur Smith : Merci, monsieur Giroux.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Bonjour, monsieur Giroux. Je voudrais revenir sur la réponse que vous avez donnée au sénateur Loffreda. Quel serait le niveau d’inflation qui viendrait toucher sérieusement les finances du gouvernement, et quelles seraient les conséquences à court terme, pour les Canadiens, d’une telle inflation?

M. Giroux : Vous avez des questions très difficiles pour moi, messieurs et mesdames les sénateurs et sénatrices. Pour ce qui est du niveau d’inflation qui toucherait les dépenses du gouvernement, je ne peux pas répondre avec un chiffre précis parce que, si la Banque du Canada, qui est responsable de la cible d’inflation, détermine que, par exemple, à partir de demain ou dans un an, sa cible d’inflation change, la politique monétaire et la politique budgétaire vont s’y adapter. Donc ce qui est difficile, c’est que la cible d’inflation soit dépassée.

Par exemple, si la Banque du Canada maintient sa cible d’inflation autour de 2 % et qu’on a une inflation largement au-dessus de ce chiffre, cela aura des effets négatifs sur le gouvernement en raison de taux d’intérêt qui vont augmenter et des attentes en matière d’inflation qui risquent de s’élever de façon importante. Il n’y a pas un chiffre précis d’inflation; c’est plutôt la divergence entre l’inflation actuelle, ou l’inflation à court terme, et la cible qui compte.

Donc, si l’inflation est cohérente avec la cible, il n’y a pas vraiment de problème majeur. Mais si l’inflation est vraiment différente de sa cible, alors c’est un problème parce que cela veut dire que la Banque du Canada doit serrer la vis pour ramener l’inflation près de sa cible.

Le sénateur Dagenais : Merci pour cette réponse. Je veux maintenant revenir à votre rapport. Vous vous penchez sur l’accès au logement pour les Autochtones. J’aimerais aller un peu plus loin que le sénateur Klyne. Au-delà de la qualité des logements, en quoi l’aide gouvernementale peut-elle se comparer à celle qui est offerte aux Canadiens à faible revenu?

M. Giroux : C’est aussi une bonne question. Je vais citer des chiffres de mémoire. Dans le rapport sur le logement pour les Autochtones, on trouve que les personnes autochtones hors réserve sont significativement plus susceptibles d’avoir un logement qui ne leur convient pas, donc un logement inadéquat ou qui n’est pas abordable.

On a aussi mis en parallèle l’aide gouvernementale pour le logement en général ainsi que pour l’itinérance, et on a déterminé la proportion de cette aide qui est donnée à des clientèles autochtones; or, on trouve que les montants alloués au logement autochtone sont plutôt faibles comparativement aux besoins de ces clientèles.

Ce qu’on trouve dans le rapport, c’est qu’il y a place à une amélioration considérable de la part des gouvernements — pas juste du gouvernement fédéral — afin de mieux cibler les programmes pour mieux répondre aux besoins de la clientèle autochtone, pour qui la probabilité de se trouver dans une situation où elle a accès à des logements trop chers et encore inadéquats est plus élevée.

Le sénateur Dagenais : J’ai une troisième et dernière question. C’est au sujet de la Banque de l’infrastructure du Canada, dont vous dites parfois que les mesures ne sont pas nécessairement liées à la COVID-19. On dit que le gouvernement ajoute 2,3 milliards de dollars en dépenses supplémentaires pour les infrastructures. Est-ce que cette somme était nécessaire à ce moment-ci? Quel suivi pouvez-vous faire quant aux projets et aux décaissements de la Banque de l’infrastructure du Canada?

M. Giroux : La pertinence des investissements découle d’un jugement qui est très subjectif. Mon jugement ne serait probablement pas meilleur que celui de quelqu’un d’autre, à moins que l’on trouve quelque chose d’épouvantable. Les récents investissements de la Banque de l’infrastructure du Canada, les 2,3 milliards auxquels vous faites allusion, constituent une question sur laquelle on ne s’est pas penché.

Donc, si le comité le désire, nous pourrions certainement considérer les investissements récents de la Banque de l’infrastructure du Canada ainsi que les décaissements, la rapidité des décaissements et les partenariats dans lesquels la Banque de l’infrastructure s’est lancée. Ce n’est pas quelque chose que nous avons considéré récemment, mais comme je l’ai mentionné, si le comité le désire, nous pourrions nous y attarder.

Le sénateur Dagenais : Merci, monsieur Giroux.

[Traduction]

La sénatrice Pate : Merci, monsieur Giroux, à vous et à votre équipe pour l’excellent travail que vous faites en notre nom et au nom de tous les Canadiens.

Ma première question porte sur le soutien financier offert au secteur pétrolier et à ses travailleurs. Le Budget supplémentaire des dépenses prévoit un paiement de 320 millions de dollars du ministère des Finances vers la province de Terre-Neuve-et-Labrador pour « [...] soutenir les travailleurs du secteur de l’énergie extracôtière ». Le 25 septembre, le gouvernement fédéral a octroyé 320 millions de dollars à ce secteur en vue d’apporter des améliorations en matière de sécurité, d’entretenir et d’améliorer les installations existantes et de favoriser la recherche et le développement. Lors de l’annonce de ce financement, le président-directeur général de l’association de l’industrie pétrolière et gazière s’est dit heureux de constater que ce financement de plusieurs centaines de millions de dollars n’était assorti à presque aucune condition.

C’est une énorme somme d’argent, il me semble, et je me demande si votre bureau sait quels paramètres utilise le gouvernement fédéral pour veiller à ce que ces fonds soient octroyés pour lutter contre la COVID, pour atteindre certains des objectifs définis, comme la réduction des gaz à effet de serre et la sécurité accrue des travailleurs. Lorsque l’industrie se réjouit parce qu’il s’agit d’un financement « sans condition », est-ce que cela signifie qu’il n’y a pas d’exigences qui y sont rattachées? Si tel est le cas, quels sont les paramètres utilisés? Si vous pouviez nous fournir quelques détails à ce sujet, nous vous en serions reconnaissants. Merci beaucoup.

M. Giroux : Je vais probablement vous fournir une réponse insatisfaisante, parce que je n’ai pas ces détails pour le moment. Si je me souviens bien, nous avons envoyé une demande d’information au ministère des Finances récemment, ou nous allons le faire bientôt. Je crois que Mme Giswold ou M. Stanton peuvent vous dire où en est cette demande. Mais je ne me souviens pas avoir obtenu cette information.

La sénatrice Pate : Ce serait très utile d’obtenir cette information afin que nous puissions savoir s’il s’agit d’une initiative d’aide sociale ou si les entreprises doivent respecter certaines exigences dans le cadre de ces accords de financement.

Ma deuxième question a trait aux commentaires que vous avez faits précédemment devant le comité au sujet de la nécessité d’un revenu viable garanti. Selon vous, les coûts associés à la PCU auraient été beaucoup moins importants si nous avions en place un tel revenu garanti lorsque la pandémie a frappé. Avez-vous étudié de plus près ces possibilités d’économies et les initiatives qui pourraient être mises en place pour veiller à ce que l’aide automatique requise pour ces types d’urgences soit disponible, et la façon dont elles pourraient améliorer la stabilité des Canadiens pour l’avenir?

M. Giroux : Merci, madame la sénatrice. Nous avons reçu plusieurs questions au sujet du revenu minimum garanti — qui est parfois appelé autrement —, notamment de la part de votre collègue, le sénateur Woo, qui nous a demandé d’établir le coût associé au revenu minimum garanti au moment où la PCU a été mise en place. Nous avons constaté que le coût varierait de manière importante selon les paramètres du revenu minimum garanti, notamment en ce qui a trait à la récupération fiscale. Mais il est évident qu’un tel revenu aurait réduit les coûts associés à la PCU de manière significative. L’importance de cette réduction varie selon les paramètres associés au revenu minimum garanti, bien sûr, mais on peut les adapter facilement, selon les programmes stratégiques en place. Il reviendrait au gouvernement de décider si le coût associé à la PCU serait considérablement inférieur ou légèrement inférieur. Tout dépend de la conception du programme. Nous avons reçu d’autres questions de la part des députés et nous allons présenter une mise à jour de la ventilation des coûts associés à une nouvelle conception du revenu minimum garanti au cours des prochaines semaines. Il s’agit d’un travail continu.

En ce qui a trait au caractère souhaitable du revenu minimum garanti, je dirais que c’est une question stratégique et qu’il revient aux décideurs comme vous et comme les députés de la Chambre de débattre de la question et de prendre une décision.

Mon rôle consiste à vous fournir des renseignements au besoin et à vous aider, et je suis très heureux de le faire. Je vais laisser le soin aux gens plus sages, comme vous, de décider si une telle solution est souhaitable.

La sénatrice Pate : Nous savons que, selon les chiffres et le seuil de faible revenu utilisés, 1 Canadien sur 10 ou 1 Canadien sur 7 n’a reçu aucune forme d’aide au cours de cette période. Savez-vous combien de personnes parmi celles-ci sont racialisées — et Autochtones, de façon particulière — et quelles autres formes de soutien ont été récupérées par les provinces après l’obtention de la PCU? Selon l’information qui nous a été transmise, bon nombre de personnes qui recevaient des indemnités d’invalidité ou des prestations d’aide sociale qui se sont prévalues de la PCU ont vu leur prestation récupérée par les provinces.

M. Giroux : Madame la sénatrice, cette information ne s’est pas rendue à mon bureau. En ce qui a trait à la PCU et à son incidence sur les personnes racialisées ou qui recevaient d’autres types de prestations, je crois que nous n’avons pas suffisamment de données sur les origines ethniques, par exemple, pour vous donner une réponse. Si Mme Yan, Mme Giswold ou M. Stanton ont plus de renseignements à cet égard, je leur demanderais de nous en faire part, mais je crois que nous n’avons pas suffisamment de données en fonction de la race, par exemple.

La sénatrice M. Deacon : Je vous remercie de votre présence aujourd’hui. J’ai toujours hâte de vous recevoir, vous et les membres de votre personnel, aux réunions du comité.

Comme d’autres, ce qui me préoccupe, c’est la transparence relative aux dépenses du gouvernement. Dans votre plus récent rapport, vous accordez une meilleure note au gouvernement pour sa transparence, mais vous soulignez plusieurs problèmes qui perdurent et dont vous avez parlé plus tôt. À l’heure actuelle, je dirais que ce qui compte le plus, c’est de faire sortir les fonds. Toutefois, lorsque la pandémie connaîtra une accalmie et que nous pourrons reprendre notre souffle, nous voudrons savoir où sont allés les fonds et comment ils ont été dépensés.

Alors que nous nous éloignons de plus en plus du moment où les décisions ont été prises, est-ce qu’il sera plus difficile de procéder à une vérification complète des dépenses associées à la pandémie? Est-ce qu’on pourra creuser cette information plus tard? Est-ce que nous allons perdre notre capacité à réunir ces renseignements au fil du temps ou est-ce que nous pourrons miser sur le travail que fait le personnel de votre bureau pour garder une trace écrite, que nous pourrons consulter plus tard, lorsque nous ferons le bilan des dépenses?

M. Giroux : Merci, madame la sénatrice. C’est une question très importante, que je me suis souvent posée : à quel point dresserons-nous le bilan de toutes ces dépenses?

Pour les gens qui ne savent pas quelle est la différence entre mon rôle et celui d’autres institutions gouvernementales, je résume souvent le mandat de mon bureau de la façon suivante : mon bureau examine le coût des propositions ou le coût futur des programmes existants, tandis que le vérificateur général analyse ce qui est arrivé dans le passé, les bons coups comme les mauvais coups.

La vérificatrice générale est probablement mieux outillée que moi pour procéder à la vérification des programmes, pour cibler les erreurs et pour déterminer si l’argent a été dépensé de manière efficace, puisque son équipe est beaucoup plus imposante que la mienne. Je suis certain qu’elle entreprendra un examen des divers programmes sous peu, si ce n’est déjà fait. Elle devra toutefois faire un choix dans les programmes à examiner de plus près.

En ce qui a trait à mon mandat, aux finances du gouvernement et aux prévisions budgétaires, soyez assurée : je prends vraiment plaisir à faire ce travail et je continuerai de répondre à vos besoins selon les paramètres de mon mandat. Si le comité ou les sénateurs souhaitent que j’étudie une question en particulier, je serai heureux de le faire, avec l’aide de mon équipe.

La sénatrice M. Deacon : Je vous remercie. J’en apprends davantage, au fil des années, des mois, sur votre rôle et celui de la vérificatrice générale. J’essaie de trouver la limite entre ces deux rôles pour m’assurer que nous obtenions les meilleures données possible.

Ma prochaine question concerne la transition de la PCU à l’assurance-emploi, dont nous nous souvenons tous, et qui est dans la foulée d’une question posée par la sénatrice Marshall plus tôt cet après-midi.

À l’automne, le gouvernement a mis fin aux paiements de la PCU, mais pour compenser, il a assoupli les restrictions sur l’admissibilité à l’assurance-emploi. Comme indiqué dans votre rapport sur l’Énoncé économique de l’automne, le Compte des opérations de l’assurance-emploi est en voie d’afficher un manque à gagner de 52 milliards de dollars d’ici la fin de 2024. Vous ajoutez, dans ce rapport, qu’en vertu de la Loi sur l’assurance-emploi, le gouvernement doit fixer les taux de cotisation à l’assurance-emploi de façon à générer suffisamment de recettes pour que, à la fin d’une période de sept ans, les recettes de l’assurance-emploi soient égales aux dépenses liées à l’assurance-emploi. En vertu de la loi, chaque dollar versé par l’assurance-emploi doit être récupéré par l’intermédiaire des cotisations dans les sept ans.

Depuis que le gouvernement a fait la transition de la PCU à l’assurance-emploi, cela fournit-il, à tout le moins, une limite ou des paramètres quelconques pour l’un des plus importants programmes de relance de la pandémie de façon à nous donner le genre de point d’ancrage fiscal que nous recherchons? Je m’interroge sur l’ampleur du transfert de la PCU à l’assurance-emploi. Cette limite de sept ans nous offre peut-être certains paramètres, au moins, pour une bonne partie du programme de relance du gouvernement, à savoir les paiements aux Canadiens sans emploi. Pourriez-vous nous donner votre avis à ce sujet?

M. Giroux : C’est une question très intéressante, sénatrice. Comme vous l’avez souligné, la transition de la PCU à l’assurance-emploi entraîne d’importants déficits, dans un avenir prévisible, pour le compte de l’assurance-emploi. Cela signifie aussi qu’en vertu de la loi actuelle, tout déficit important du compte d’assurance-emploi doit être remboursé au fil du temps par l’augmentation des cotisations des employés et des employeurs au régime. Cette transition a pour effet, toutes choses étant égales par ailleurs, que ceux d’entre nous qui paient des cotisations d’assurance-emploi — employés ou employeurs — auront des cotisations d’AE considérablement plus élevées pendant plusieurs années à venir. Nous devrons payer des cotisations d’assurance-emploi nettement plus élevées pendant longtemps.

Il n’en demeure pas moins que le programme fiscal actuel du gouvernement ou son processus de budgétisation ne comprend pas de point d’ancrage fiscal. L’un des avantages de la transition de la PCU à l’assurance-emploi, c’est que le programme d’AE comprend un mécanisme éprouvé d’enquête et de recouvrement de sommes obtenues frauduleusement. Le programme a une équipe d’enquêteurs; la direction de l’assurance-emploi d’EDSC et de Service Canada a un programme d’enquête. Les fonctionnaires peuvent faire enquête sur les fraudes soupçonnées, et il s’agit probablement d’un des principaux avantages de la transition de la PCU à l’assurance-emploi.

La sénatrice M. Deacon : Merci.

[Français]

Le président : Sénatrice Moncion, merci d’avoir accepté d’être parmi nous aujourd’hui.

La sénatrice Moncion : Cela me fait plaisir de revenir au Comité sénatorial permanent des finances nationales, surtout pour entendre M. Giroux. Je le trouve toujours extrêmement intéressant. J’ai une remarque à faire par rapport au dernier commentaire que vous venez de faire en réponse à la question de la sénatrice Deacon. Je trouve que le gouvernement fédéral a trouvé une façon intelligente de renflouer le compte de l’assurance-emploi sans que cela paraisse trop.

J’aimerais que vous nous parliez du processus, lorsque vous préparez toute la documentation et les chiffres que vous compilez, entourant les plans de déploiement qui accompagnent les sommes demandées. Quel genre d’accès avez-vous aux chiffres présentés et aux échéanciers qui accompagnent les demandes de fonds?

M. Giroux : Est-ce que vous faites référence à un point en particulier ou votre question est-elle générale, madame la sénatrice? Merci pour vos bons compliments!

La sénatrice Moncion : Prenons, par exemple, l’argent qui est affecté au secteur de l’habitation pour les Autochtones, soit 636 millions de dollars. Vous avez évalué ce montant en fonction du plan urbain, du plan rural, des réserves, etc., mais pour qu’un montant comme 636 millions de dollars vous soit présenté, il faut que cela s’appuie sur quelque chose. Voilà le renseignement que j’aimerais obtenir : à quels chiffres avez-vous accès et y a-t-il des échéanciers associés à ces sommes?

M. Giroux : C’est une bonne question. En général, lorsqu’on a un rapport à faire, on demandera le plus de renseignements pertinents possible au ministère ou à l’organisme responsable et s’il y en a plusieurs, on étend le filet pour poser des questions et obtenir des détails de la part des organismes responsables. On essaie d’obtenir le plus de détails pertinents possible concernant les échéanciers prévus, les débours de fonds, les objectifs du programme; si cela exige d’avoir recours à des partenaires, on essaiera de s’informer auprès des partenaires et de connaître le genre de partenariats qui ont été signés. Dans le cas du logement autochtone, on pose des questions à la Société canadienne d’hypothèques et de logement et à Services aux Autochtones Canada pour obtenir le plus de détails possible.

Si les détails ne sont pas tous accessibles, nous ferons alors des hypothèses en nous appuyant sur des programmes semblables dans d’autres administrations ou encore dans d’autres pays. En général, lorsque c’est le cas, on indique que les données s’appuient sur des hypothèses ou sur l’expérience d’autres administrations. Les renseignements ne sont pas toujours accessibles au public, même une fois qu’ils nous sont transmis, et il y a des cas où des ministères nous demandent de regarder les renseignements détaillés en toute confidentialité. C’est souvent le cas avec les projets de la Défense nationale, pour des raisons de sécurité nationale, ou encore pour des raisons de concurrence commerciale, ou de secrets commerciaux, lorsque cela touche des entités du secteur privé, où il y a des obligations contractuelles. Dans ces cas-là, on ne divulguera pas les renseignements lorsqu’ils nous seront demandés, mais on va publier le résultat de ces détails ou de nos calculs. Donc, dans la plupart des cas, oui, nous avons accès à des détails beaucoup plus précis que ce qui apparaît dans nos rapports. Lorsque c’est possible, on peut rendre ces détails accessibles aux personnes qui s’y intéressent, à moins qu’il y ait des contraintes de confidentialité imposées par les gens ou les entités qui nous ont fourni les données.

La sénatrice Moncion : Merci. Quelle est votre responsabilité en ce qui a trait à la reddition de comptes?

M. Giroux : En ce qui a trait à la reddition de comptes de ces entités, il ne s’agit pas de notre responsabilité première; donc si des choses sont évidentes, en tant qu’agents du Parlement, nous les signalons. C’est ce qu’on a fait, par exemple, en matière d’infrastructure, lorsque l’on a montré que le profil des dépenses ne reflétait pas exactement la réalité; il y a toujours une modification. On espère toujours que dans les années à venir, le déploiement sera plus rapide. On a signalé à plusieurs reprises que c’est toujours ce que le gouvernement espère, donc le gouvernement vit souvent d’espoir beaucoup plus que de faits. La reddition de comptes en tant que telle est plutôt du ressort du Conseil du Trésor ou de la vérificatrice générale, mais lorsqu’on voit des choses qui se répètent, on le signale. Par exemple, récemment, lorsqu’on a publié un rapport sur le projet des navires de combat, on a signalé que les coûts sont uniquement à la hausse chaque fois qu’on les regarde.

La sénatrice Moncion : Vous utilisez la reddition de comptes pour déterminer s’il y a eu des surplus à la fin — reddition de comptes n’est peut-être pas le bon terme—, mais pour établir, à la fin de l’année, si les dépenses sont dépassées ou si les surplus sont générés par des dépenses non effectuées. J’attendais une réponse plutôt dans ce sens, mais vous m’avez donné l’information que je cherchais.

Je voudrais que vous me parliez des prêts étudiants. On parle de la radiation, qui représente une somme importante, mais vous parlez aussi dans votre rapport de nouveaux programmes. Pourriez-vous parler justement des succès attendus des nouveaux programmes, parce que vous avez mentionné des taux d’intérêt et la probabilité que les sommes soient davantage remboursées qu’elles ne le sont actuellement, selon les programmes en vigueur?

M. Giroux : Il s’agit d’une question intéressante sur laquelle nous nous sommes penchés. En raison des allégements, des différents programmes de congé de taux d’intérêt et de congés de remboursement à la suite de la pandémie, on s’attend à ce qu’il y ait une baisse des défauts de paiement et des radiations pour mauvaises créances dans l’ensemble du Programme canadien de bourses et prêts aux étudiants. Par contre, la situation économique s’est détériorée pour les étudiants — peut-être en raison d’un peu moins de travail à temps partiel — et cela peut être plus difficile pour les nouveaux diplômés de se trouver un emploi comparativement à ce qui était le cas avant la pandémie. Donc, voilà deux effets qui peuvent s’annuler l’un l’autre. Nous ne sommes pas certains de celui dont l’effet va prédominer pour le Programme canadien de bourses et prêts aux étudiants, mais grâce à ces allégements, on pourrait s’attendre à une baisse du taux de faillites ou de prêts en souffrance. Dans les prévisions du Programme canadien de bourses et prêts aux étudiants, on ne voit pas de baisse marquée du taux de radiation pour mauvaise créance et mon temps est écoulé, malheureusement.

La sénatrice Moncion : Merci.

[Traduction]

La sénatrice Duncan : Merci beaucoup aux témoins qui comparaissent devant nous aujourd’hui.

En tant que membre du Comité des finances nationales et en tant que Canadienne, je suis vraiment reconnaissante des efforts du Bureau du directeur parlementaire du budget pour la préparation de ces rapports. Ils sont très complets et utiles. Ce sont des rapports très importants non seulement pour informer les sénateurs et les parlementaires, mais pour sensibiliser et informer les Canadiens.

Je crains que les commentaires contenus dans le rapport n’entraînent des malentendus et puissent être utilisés, en particulier en période électorale. Je pense qu’ils doivent traiter davantage de la nature du fédéralisme et des accords de financement fédéraux-provinciaux, en particulier.

En examinant les rapports, en particulier le Rapport sur la viabilité financière de 2020, j’ai trouvé qu’il était très difficile d’établir des liens pour les trois territoires. La formule de financement des territoires, les accords fiscaux avec le gouvernement fédéral, par exemple, ont commencé en 1985, avant la création du Nunavut. Les trois territoires sont très différents; nos populations sont différentes. Les Autochtones forment environ 86 % de la population du Nunavut, contre seulement 25 % au Yukon. Nous sommes à des stades très différents quant au transfert du contrôle des terres, des eaux et des ressources par le gouvernement fédéral.

Toutefois, le rapport se concentre sur la viabilité financière des trois territoires et ne reconnaît pas que les accords de financement contribuent aussi à l’édification de la nation. Voilà où je veux en venir. J’aimerais attirer l’attention de votre bureau là-dessus et savoir si les trois territoires pourraient être traités de façon distincte en fonction de cela.

En outre, pendant la pandémie, nous avons subi des changements profonds dans divers domaines, ouvrant ainsi la voie à des changements par rapport aux décisions stratégiques et à l’élaboration de politiques pouvant découler des informations que vous présentez. J’aimerais m’attarder brièvement sur les transferts en santé. Par exemple, on indique dans le Rapport sur la viabilité financière de 2020 que les dépenses en santé varient selon les provinces et les territoires : 6,7 % du PIB en Alberta et 13,2 % dans les territoires. Ces données ne reflètent pas l’absence d’établissements de soins de longue durée financés par le secteur privé dans les territoires, par exemple.

Il conviendrait, pour certaines données, d’inclure ou de mettre en évidence ces informations sur les décisions stratégiques dans le rapport, par exemple sous forme de note de bas de page. Les changements, dans le contexte de la pandémie, et vous l’avez noté dans le dernier rapport... Nous supposons que la pandémie de COVID-19 n’aura pas d’incidence sur les tendances démographiques à long terme du Canada. Cette hypothèse est-elle toujours d’actualité, étant donné les décès enregistrés au pays dans les établissements de soins de longue durée et les décès liés à la crise des opioïdes? Le Bureau du directeur parlementaire du budget considère-t-il toujours que les tendances démographiques à long terme du Canada demeureront inchangées?

M. Giroux : Merci, sénatrice. Je suis heureux que vous ayez examiné le Rapport sur la viabilité financière et je suis très heureux que vous ayez souligné les problèmes relatifs aux territoires.

Lorsque nous avons rédigé le Rapport sur la viabilité financière, ou RVF, nous voulions traiter les trois territoires séparément. Nous avons toutefois constaté que nous manquions de données détaillées pour le faire de façon représentative pour chacun des trois territoires. Nous avons donc décidé de regrouper les trois territoires afin de donner une idée des problèmes auxquels chaque territoire est confronté.

Comme vous l’avez souligné, cela ne reflète pas avec précision la situation propre à chacun des trois territoires. Dans mes fonctions précédentes, j’étais responsable des relations fédérales-provinciales-territoriales et j’ai eu des discussions avec des représentants des trois territoires. Je pouvais certainement constater qu’ils sont à des stades très différents de... Je ne parlerais pas de stades de développement, mais ils ont des défis différents. Certes, nous indiquons dans le rapport que les finances des trois territoires ne sont pas viables, mais cela pourrait changer assez rapidement. Étant donné leur petite taille — en population —, l’inversion de cette tendance tient à peu de choses, par exemple, pour qu’ils deviennent soudainement viables. Le développement économique pourrait être très rapide, ce qui modifierait très rapidement notre évaluation pour un territoire, deux territoires ou les trois.

Voilà pourquoi notre RVF, comme nous l’appelons, ne doit pas être pris au pied de la lettre en ce qui concerne les territoires, car leur situation pourrait changer rapidement étant donné la petite taille de leur économie et de leur population par rapport au reste du pays. Voilà ce que je dirais au sujet des territoires. En outre, la formule de financement des territoires pourrait changer, et un changement relativement mineur pourrait avoir une incidence considérable sur la viabilité budgétaire à long terme des territoires. C’est ce que j’aimerais dire concernant la situation financière à long terme des territoires. Comme vous l’avez souligné, ils ont des défis différents. Il n’y a pas d’établissements de soins de longue durée financés par le secteur privé, ce qui est un fait, et il existe divers autres facteurs qui distinguent les territoires. Voilà pourquoi il est injuste de comparer leur viabilité financière à celle des administrations plus importantes du Sud.

Concernant les répercussions de la COVID-19 et de la crise des opioïdes sur les tendances démographiques, il est un peu tôt pour le savoir, car la pandémie n’est pas terminée, et la crise des opioïdes n’est certainement pas terminée non plus, malheureusement. Cependant, c’est un aspect qui pourrait influencer les tendances démographiques à long terme. L’autre grande inconnue, c’est de savoir quelles seront les conséquences à long terme sur l’immigration de la pandémie et des restrictions frontalières connexes. La pandémie et ses ravages, surtout chez les personnes âgées, auront aussi un effet important sur la démographie à long terme du Canada. De plus, comme je l’ai indiqué, la crise des opioïdes est loin d’être terminée.

Cela dit, nous utilisons les hypothèses démographiques de Statistique Canada. Donc, si Statistique Canada modifie ses hypothèses démographiques, nous modifierons les nôtres aussi, et cela se reflétera dans le Rapport sur la viabilité financière. La greffière me fait signe de la main, ce qui signifie, sénatrice, que mon temps est malheureusement écoulé.

Le président : Monsieur Giroux, si vous voulez apporter un complément de réponse à la dernière question de la sénatrice Duncan, n’hésitez pas.

Comme nous arrivons à la fin du temps qui nous est imparti, j’aurais une question pour M. Giroux, si mes collègues le permettent.

Monsieur Giroux, je sais que vous avez abordé brièvement le sujet, et j’ai lu quelques articles à ce sujet ces deux derniers mois. Dans l’Énoncé économique de l’automne publié à l’intention des parlementaires, vous avez conclu que, selon les indicateurs du gouvernement relatifs au marché du travail — il s’agit de l’Énoncé économique de l’automne 2020 —, l’ampleur et le moment des mesures de stimulation budgétaire planifiées pourraient être mal ajustés, et vous ajoutez que si l’objectif est un retour rapide du marché du travail aux niveaux antérieurs à la pandémie, un plan de relance à plus petite échelle pourrait être concentré sur une période plus courte que la fenêtre de trois ans proposée.

Sur quoi vous êtes-vous fondés pour déterminer qu’un plan de relance à plus petite échelle sur une période plus courte serait préférable au plan de relance sur trois ans proposé?

M. Giroux : Merci, sénateur. Je pensais que vous alliez me demander ce que cela signifie, mais je suis heureux que vous me demandiez sur quoi nous nous sommes fondés.

Selon les prévisions économiques et financières de notre bureau et celles de nombreux autres prévisionnistes du secteur privé, on s’attend à ce que sans programme de stimulation fiscale, le marché du travail puisse retourner aux niveaux antérieurs à la pandémie d’ici le milieu de 2022. Nous sommes d’avis qu’il serait probablement avantageux de mettre en place un plan de relance économique plus tôt et qu’il ne serait peut-être pas nécessaire qu’il dure trois ans si l’objectif est de retourner aux taux d’emploi et de chômage ou au nombre total d’heures travaillées antérieurs à la pandémie, par exemple.

Toutefois, si l’objectif est un changement d’orientation ou des rajustements à l’économie, par exemple en favorisant une économie plus verte, c’est une autre affaire. Mais si l’objectif est simplement un retour aux indicateurs du marché du travail antérieurs à la pandémie, le montant de 70 à 100 milliards de dollars sur trois ans pourrait être trop élevé et pourrait arriver trop tard. Voilà ce que nous avons voulu dire dans notre commentaire sur l’Énoncé économique de l’automne.

Le président : Cela m’amène à poser une deuxième question. La mise en œuvre d’un plan de relance à plus petite échelle sur une période plus courte réduirait-elle la nécessité d’un plan de relance à long terme?

M. Giroux : C’est très probable, sénateur. Un plan de relance lancé plus tôt et plus court, et aussi de moins de 70 à 100 milliards de dollars, pourrait être suffisant pour revenir aux niveaux antérieurs à la pandémie au chapitre de l’emploi, des heures travaillées dans l’économie et du taux de chômage ou d’activité, selon l’évolution de la situation, en particulier au sud de la frontière. Toutefois, cela pourrait bien être suffisant. De plus, comme je l’ai indiqué, si l’objectif est de le faire et d’apporter d’importants changements structurels à l’économie, c’est une autre histoire. Le gouvernement a l’entière prérogative de faire des investissements pour apporter des changements structurels à l’économie, mais comme je l’ai dit, si l’objectif est uniquement de revenir au niveau d’emploi antérieur à la pandémie, un plan de stimulation à plus petite échelle et de plus courte durée pourrait très bien suffire.

Le président : Monsieur Giroux, c’est là-dessus que se termine la première partie de la réunion. Je vous remercie beaucoup de votre leadership et de celui de votre équipe. Vous êtes toujours prêts à comparaître au Comité sénatorial permanent des finances nationales lorsque nous vous invitons. Je vous remercie. Je sais que nous avons des objectifs communs : transparence, reddition de comptes, prévisibilité et fiabilité des données présentées aux Canadiens.

Nous accueillons maintenant notre deuxième groupe de témoins.

Nous accueillons M. Philippe Thompson, de Services aux Autochtones Canada, ou SAC. M. Thompson est dirigeant principal des finances, des résultats et de l’exécution.

M. Thompson est accompagné des personnes suivantes : Mme Jennifer Esdaile, directrice, Gestion stratégique de l’eau; M. Keith Conn, sous-ministre adjoint principal intérimaire; M. Nelson Barbosa, directeur principal, Secteur des opérations régionales, Direction de la réforme des services en logement et infrastructure; M. James Sutherland, sous-ministre adjoint par intérim, Direction générale de la réforme des services aux enfants et aux familles; M. David Peckham, sous-ministre adjoint par intérim, Secteur des programmes et partenariats en matière d’éducation et de développement social; Mme Jessica Sultan, directrice générale, Direction générale des possibilités économiques et commerciales, Terres et développement économique.

Bienvenue à tous et merci d’avoir accepté notre invitation.

Monsieur Thompson, la parole est à vous.

[Français]

Philippe Thompson, dirigeant principal des finances, des résultats et de l’exécution, Services aux Autochtones Canada : Monsieur le président, honorables sénateurs, je vous remercie de m’avoir invité à discuter du Budget supplémentaire des dépenses (C) 2020-2021 de Services aux Autochtones Canada. Je tiens aussi à mentionner que le Parlement du Canada est situé sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin.

[Traduction]

Je suis accompagné aujourd’hui de M. Keith Conn, sous-ministre adjoint principal intérimaire de la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits; M. James Sutherland, sous-ministre adjoint par intérim de la Direction générale de la réforme des services aux enfants et aux familles; M. David Peckham, sous-ministre adjoint par intérim du Secteur des programmes et partenariats en matière d’éducation et de développement social; Mme Jessica Sultan, directrice générale de la Direction générale des possibilités économiques et commerciales, Terres et développement économique; M. Nelson Barbosa, directeur principal, Secteur des opérations régionales, Direction de la réforme des services en logement et infrastructure; Mme Jennifer Esdaile, directrice de la Gestion stratégique de l’eau.

J’aimerais prendre quelques minutes pour vous présenter une mise à jour sur l’évolution de la pandémie de COVID-19 dans les collectivités autochtones.

En date du 26 février, nous avons connaissance de 1 523 cas actifs de COVID-19 dans les communautés des Premières Nations vivant dans les réserves, pour un total de 21 405 cas confirmés. Le nombre de personnes qui se sont rétablies est de 19 656. Il y a eu 226 décès, malheureusement.

Au Nunavut, on compte 26 cas actifs; 329 personnes se sont rétablies. Parallèlement, la vaccination est commencée dans plus de 480 communautés des Premières Nations et des Inuits. Plus de 113 179 doses ont été administrées, soit 30 doses pour 100 adultes.

La vaccination est essentielle pour enrayer la propagation de la COVID-19 et nous aider à retrouver une vie normale.

[Français]

Le ministère travaille en étroite collaboration avec l’Agence de la santé publique du Canada, d’autres ministères du gouvernement du Canada et les gouvernements provinciaux et territoriaux, ainsi qu’avec des partenaires autochtones pour protéger la santé et la sécurité des peuples autochtones. Il s’agit notamment d’aider les partenaires autochtones à répondre aux menaces pour la santé publique.

Je vais maintenant passer au sujet de la réunion d’aujourd’hui : la présentation du Budget supplémentaire des dépenses (C) de 2020-2021, de Services aux Autochtones Canada. Pour que le ministère puisse continuer à réagir à la pandémie et soutenir les travaux en cours, le Budget supplémentaire des dépenses (C) de 2020-2021 prévoit une augmentation nette de 1,5 milliard de dollars, ce qui porte le montant des autorisations totales pour 2020-2021 à plus de 17,8 milliards de dollars.

[Traduction]

La somme de 1,5 milliard de dollars inclut 65,3 millions de dollars en dépenses de fonctionnement au crédit 1, de 16,6 millions de dollars en dépenses d’immobilisations au crédit 5 et de 1,5 milliard de dollars en subventions et contributions au crédit 10.

À la suite de l’abrogation de la Loi sur les paiements relatifs aux événements de santé publique d’intérêt national, SAC demande le montant non dépensé au 31 décembre 2020, en tant que crédits votés dans le cadre du Budget supplémentaire des dépenses (C) pour poursuivre ces initiatives avec un ajustement négatif correspondant dans le financement prévu par la loi.

Sur le montant total, la somme de 1,1 milliard de dollars est consacrée à diverses initiatives liées à la COVID-19, et 400 millions de dollars sont destinés à d’autres initiatives clés telles que l’amélioration de l’accès à de l’eau potable propre et salubre dans les collectivités des Premières Nations.

Le Budget supplémentaire des dépenses comprend les initiatives liées à la COVID-19 suivantes : 528,9 millions de dollars pour soutenir les infrastructures sanitaires de pointe, la capacité de pointe en soins infirmiers primaires et les interventions en santé publique dans les collectivités autochtones; 380 millions de dollars en financement additionnel pour le Fonds de soutien aux communautés autochtones; 63,9 `millions de dollars pour les soins de soutien aux collectivités autochtones; et 58 millions de dollars pour les entreprises des collectivités autochtones.

De plus, SAC demande également les éléments majeurs suivants : 151,5 millions de dollars pour améliorer l’accès à de l’eau potable salubre et propre dans les collectivités des Premières Nations; 74 millions de dollars pour soutenir la mise en œuvre d’une Loi sur les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuits et des Métis et la réforme en cours du programme des Services à l’enfance et à la famille des Premières Nations; 67 millions de dollars pour rembourser les fournisseurs de services de gestion des urgences des Premières Nations pour les interventions dans les réserves et les activités de rétablissement; 47,2 millions de dollars pour renforcer la capacité de gouvernance et faire progresser la réforme de la relation financière; et 29,7 millions de dollars pour mettre fin à la violence contre les femmes et les filles autochtones, ainsi que pour offrir des services de santé mentale.

[Français]

De plus, le Budget supplémentaire des dépenses tient compte de divers transferts de fonds entre Services aux Autochtones Canada et d’autres ministères, le plus important étant un transfert de 30 millions de dollars provenant du ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire pour aider à améliorer l’accès à la nourriture et accroître l’approvisionnement alimentaire des Autochtones.

Monsieur le président, en ces temps difficiles, le ministère est plus résolu que jamais à veiller à ce que les besoins des Autochtones soient entendus et comblés.

J’espère avoir le plaisir de discuter avec vous de tous les aspects de ce Budget des dépenses, et nous sommes à votre disposition pour répondre à vos questions concernant ma présentation.

Merci beaucoup.

Le président : Merci, monsieur Thompson, de votre présentation et de votre déclaration.

[Traduction]

Honorables sénateurs, je voudrais vous informer à nouveau que nous avons un temps de parole maximal de sept minutes par sénateur. Par conséquent, posez votre question directement aux témoins, et les témoins doivent répondre de manière concise. Pour l’instant, la greffière continuera à faire signe de la main lorsque les sept minutes sont écoulées.

La sénatrice Marshall : Merci beaucoup à tous les témoins d’être ici aujourd’hui.

Le financement que vous demandez, la somme de 1,5 milliard de dollars, est réparti sur plusieurs pages. Il y a donc plusieurs secteurs où l’on réclame un financement accru. Mais je suis retournée voir votre rapport sur les résultats ministériels qui a été publié en décembre dernier, et lorsque je les compare à ceux d’autres organismes et ministères, vos rapports sur les résultats ministériels semblent révéler que vous êtes au bas de l’échelle. Par exemple, vous avez fixé 61 objectifs, et vous avez déclaré que 6 de ces 61 objectifs, soit environ 10 %, ont été atteints, tandis que la moyenne parmi les organismes est de 48 %. Je pourrais passer en revue les quatre catégories et arriver à la même conclusion.

Pouvez-vous me dire, de manière générale, pourquoi les rapports ministériels sur le rendement indiquent que vous êtes au bas de l’échelle? Il semble que vous ayez quelques difficultés à ce niveau, alors j’aimerais que vous commenciez par cette question.

M. Thompson : Merci beaucoup, madame la sénatrice, de la question. Comme vous le savez, nous avons la politique sur les résultats du gouvernement du Canada qui demande à chaque ministère d’élaborer un cadre des résultats du ministère. Puisque le ministère a été créé récemment en 2017, il a dû créer un cadre des résultats du ministère complètement nouveau. Et dans un esprit de réconciliation, nous élaborons également les mesures de rendement en collaboration avec nos partenaires autochtones. Ce travail demande du temps.

Lorsque nous avons créé le nouveau cadre des résultats du ministère, nous avons utilisé certaines des mesures d’information sur le rendement qui étaient disponibles, mais nous avons dû fixer de nouveaux objectifs. Vous remarquerez donc, par l’entremise du rapport ministériel, que bon nombre de ces objectifs sont soit en négociation en ce moment, soit en train d’être établis conjointement avec les collectivités autochtones, ou encore que nous avons fixé des objectifs dont la mesure est également prévue pour une date ultérieure. Cela explique pourquoi nous avons actuellement de nombreuses mesures de rendement à établir ou que nous attendons toujours pour obtenir la mesure appropriée.

La sénatrice Marshall : Pendant que vous parlez, je regarde mes chiffres, et je vois que juste avec ce que vous avez indiqué comme étant à réaliser, et vous devez obtenir les données, la moitié des 61 objectifs sont dans la catégorie « à réaliser ». Et juste en regardant les détails, je constate que certains des indicateurs des années cibles sont comme 2023, 2025, 2028 et 2030. Et puis, pour certains, il n’y a pas d’objectifs pour 5 des 30.

Pour ce qui est des dépenses du ministère, nous parlons de près de 18 milliards de dollars, et pour certains de ces indicateurs — vous n’en avez que 61 pour un grand ministère —, vous dites que l’année cible est 2030. Il semble juste que, en tant que parlementaires, nous essayons de voir où l’argent est dépensé et ce que vous faites avec cet argent. Si vous ne nous le dites pas avant 2030, nous serons mis au défi tout comme vous.

M. Thompson : Merci beaucoup de la question. Nous sommes toujours en train de rendre compte du rapport ministériel sur les résultats que nous obtenons. Nous utilisons un certain nombre de mesures. Mais en ce qui concerne les paramètres ministériels définis dans le cadre de la politique sur les résultats, nous sommes l’un des rares ministères à s’être engagés à élaborer conjointement des cibles avec des partenaires autochtones. Chacun des programmes doit travailler avec les partenaires autochtones pour convenir de la mesure de rendement appropriée et de l’objectif à atteindre. Nous devons également nous assurer que nous disposons de bonnes données de base pour fixer la cible. C’est le genre de défis que ce nouveau...

La sénatrice Marshall : Nous avons perdu la connexion. Je peux poursuivre avec ma prochaine question, monsieur le président.

Je remarque qu’il y a 5,5 millions de dollars. C’est peut-être un crédit législatif, mais c’est pour la collecte et l’échange de données sur les Autochtones. Est-ce l’un des problèmes? Jusqu’à présent, on nous a parlé de la difficulté d’obtenir les données, et vous avez besoin de ces données à long terme. Cet argent servira-t-il à cela?

Keith Conn, sous-ministre adjoint principal intérimaire, Services aux Autochtones Canada : Oui. Je vais essayer de répondre. Merci de la question, sénatrice. Voici comment je comprends cette somme de 5,5 millions de dollars. Nous avons beaucoup de lacunes et de problèmes en matière de données. Nous avons beaucoup de travail à faire avec nos partenaires, les provinces et les territoires, pour explorer les possibilités d’ententes d’échange de données. Dans le domaine de la santé, nous savons que les provinces et les territoires recueillent beaucoup de données sur les populations autochtones, mais nous devons déterminer comment nous pouvons examiner les possibilités d’ententes d’échange de données. Ce n’est là qu’un aspect de la collecte et de l’échange des renseignements et de l’établissement d’une sorte de point de référence à l’échelle nationale.

La sénatrice Marshall : Donc, quand je regarde 30 sur les 61, il y en a un qui n’a pas d’année ou de mois cible ou quoi que ce soit. On voit le pourcentage d’enfants qui sont placés chez un membre de la famille; je pense que ce n’est pas une donnée compliquée. Pourquoi ces données ne seraient-elles pas disponibles?

M. Conn : Je vais laisser le soin à mon collègue, M. Sutherland, de répondre. J’ai une réponse, mais ce n’est pas mon champ d’expertise.

Le président : Monsieur Sutherland, on ne vous entend pas.

Monsieur Conn, vous avez dit que vous aviez une observation à faire?

M. Conn : J’ai une observation, et James Sutherland peut me corriger pour faire suite à ce que je vais dire.

Je comprends que c’est une question difficile, certainement. C’est un combat que nous menons. Lorsque nous regardons les enfants pris en charge par des membres de la famille, nous avons deux situations différentes. Dans certains cas, le gouvernement provincial, selon l’instance, fournit des services aux enfants et aux familles. Dans d’autres cas, nous avons des organisations de services à l’enfance et à la famille dirigées par des Autochtones et des Premières Nations. Nous avons beaucoup de mal à suivre ces données en particulier. C’est l’une des possibilités que nous voulons explorer avec nos partenaires. Il y a toute une myriade complexe de sources, mais nous avons également différents systèmes de suivi d’une instance à l’autre, comme je l’ai dit. Il s’agit d’essayer de trouver un terrain d’entente concernant ces services particuliers pour les enfants.

M. Sutherland opine du bonnet, un peu.

La sénatrice Marshall : Il n’y a que 61 indicateurs de rendement. Je pense vraiment que le ministère devrait y consacrer plus d’efforts. Je vous remercie.

M. Conn : Nous sommes d’accord.

La sénatrice Marshall : On me l’a dit.

La sénatrice Pate : La somme additionnelle de 1,5 milliard de dollars que Services aux Autochtones, SAC, a demandé prévoit environ 525 millions de dollars ou plus pour continuer les interventions en matière de santé publique dans les collectivités autochtones. L’une des réalités, comme nous l’avons vu tout au long de la pandémie, c’est que les communautés pauvres et racialisées ont été touchées de manière disproportionnée par la COVID-19. En Ontario, par exemple, elles sont confrontées à un risque d’hospitalisation quatre fois plus élevé et à un risque de décès deux fois plus élevé.

Je m’interroge sur deux points. Avez-vous surveillé ou avez-vous des données sur les effets que les soutiens directs au revenu comme la PCU et la Prestation canadienne de la relance économique ont eus sur les Autochtones dans les réserves et hors réserve? Qui a pu y avoir accès?

De plus, à la lumière de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, pour établir un revenu de subsistance garanti, avez-vous examiné, en particulier pendant cette période, comment cela aurait pu atténuer le préjudice économique causé par la COVID-19 pour les populations autochtones plus particulièrement?

Le président : Monsieur Conn, pouvez-vous nous diriger vers les autres témoins, ou pouvez-vous répondre?

M. Conn : Je n’ai pas une réponse immédiate concernant les répercussions de la PCU quant aux avantages pour les Autochtones dans les réserves et hors réserve, mais je sais que les gens y ont activement accès, d’après mes lectures. Je vais devoir vous revenir avec une réponse, sénatrice, quant aux répercussions détaillées de la manière dont la PCU a aidé les populations ou leur a nui.

Le président : Monsieur Conn, si vous pouviez nous fournir ces renseignements dans les plus brefs délais, nous vous en serions reconnaissants.

M. Conn : Certainement.

La sénatrice Pate : J’aimerais également savoir si vous avez accès au nombre de personnes qui sont autochtones, qui vivent dans les réserves et à l’extérieur de celles-ci et qui vivent sous le seuil de la pauvreté — tant le seuil de faible revenu que les divers seuils de pauvreté établis dans les provinces et les territoires.

M. Thompson : Merci beaucoup. Je suis vraiment désolé pour le problème technique.

En ce qui concerne le soutien au revenu, c’est une question sur laquelle mon collègue David Peckham du secteur des programmes d’éducation et de développement social aurait, je pense, des renseignements supplémentaires. Je vais céder la parole à M. Peckham pour voir s’il a d’autres renseignements à fournir à ce sujet.

David Peckham, sous-ministre adjoint par intérim, Secteur des programmes et partenariats en matière d’éducation et de développement social, Services aux Autochtones Canada : En réponse à la question, l’un des soutiens que nous fournissons est une aide supplémentaire au revenu dans les réserves. Des paiements additionnels ont été versés aux demandeurs d’aide au revenu.

Mme Fortin : Je suis désolée de vous interrompre, monsieur Peckham. La qualité du son n’est pas suffisamment bonne pour l’interprétation. Je pense que c’est la connexion Internet.

Le président : Si c’est le cas, monsieur Thompson, pourriez-vous répondre à cette question ou y réfléchir et nous revenir avec une réponse?

M. Thompson : Je peux dire, en ce qui concerne le programme d’aide au revenu, qu’un financement supplémentaire a été prévu pour le programme de lutte contre la COVID. Le montant était de 262,8 millions de dollars en vertu de la Loi sur les paiements relatifs aux événements de santé publique d’intérêt national. Cela porte le budget total de cette année à 1,1 milliard de dollars pour l’aide sociale.

Je n’ai pas de mesures précises concernant le nombre de personnes qui vivent dans la pauvreté. C’est un point sur lequel mon collègue du programme serait en mesure de fournir des renseignements supplémentaires. Mais il est certain que des investissements ont été faits. Il a été reconnu que les personnes qui vivent dans la pauvreté étaient les plus touchées par la pandémie, et c’est pourquoi des fonds supplémentaires ont été accordés — pour veiller à ce qu’elles soient soutenues pendant la pandémie.

La sénatrice Pate : Quelles mesures le ministère a-t-il prises pour envisager la mise en œuvre d’un revenu de subsistance garanti conformément à la recommandation de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées?

M. Thompson : Là encore, c’est une question à laquelle les responsables du programme seraient mieux à même de répondre. Il n’y avait pas de financement dans le Budget supplémentaire des dépenses qui était prévu précisément pour cette initiative. C’est, bien entendu, un facteur qui est toujours pris en considération par mes collègues qui œuvrent dans le programme, mais je ne peux pas parler d’investissements qui ont été faits précisément pour cette initiative.

La sénatrice Pate : Je veux seulement avoir une précision : aucun n’a été examiné en particulier à la lumière des préjudices économiques causés par la COVID-19 dans les collectivités autochtones?

M. Thompson : À l’heure actuelle, en ce qui concerne la COVID, nous réagissions à la pandémie à l’aide des programmes en place. Bien sûr, des discussions sont en cours, mais nous avons dû réagir avec les autorités et les programmes que nous avions en place, et c’était la meilleure façon pour nous de soutenir les collectivités.

Le président : Merci, monsieur Thompson.

Le sénateur Klyne : Bienvenue à notre groupe d’invités. Je veux vous remercier de vos remarques liminaires, notamment en ce qui concerne l’établissement des priorités en réponse à la COVID-19.

Le gouvernement fédéral, par l’entremise de SAC, investit des sommes importantes pour combler les lacunes en matière d’avis d’ébullition de l’eau, de crise du logement et de niveau d’éducation faible, et il est évident que ces lacunes sont comblées. Cependant, nous devons accélérer le processus et éliminer complètement les écarts, ce qui contribuerait à résoudre les problèmes liés aux gangs et à la drogue, qui mènent souvent à la violence conjugale et générationnelle, et à la surreprésentation dans les établissements correctionnels.

Des montants importants sont également envisagés pour la construction d’infrastructures communautaires qui fournissent des services adéquats ou au moins les éléments de base concernant les plans de traitement des effluents, les plans de traitement des eaux usées, davantage d’écoles et de salles de classe, des soins de santé adéquats, des établissements de soins de longue durée et de soins pour personnes âgées, ainsi que des établissements culturels et récréatifs. Intuitivement, une part importante de ces grandes sommes concernera les bâtiments résidentiels, institutionnels et commerciaux, les constructions industrielles spécialisées, les infrastructures et les constructions lourdes.

Il me semble qu’il y a là une occasion socioéconomique, et ma question est la suivante : parmi tous les postes budgétaires que la sénatrice Marshall a relevés, vos estimations et votre budget prennent-ils en considération l’investissement dans le capital humain, les gens qui ont des compétences spécialisées et des formations sur le terrain permettant d’atteindre un potentiel de revenus significatifs et supérieurs à la moyenne?

M. Thompson : En ce qui concerne le renforcement des compétences, nous travaillons en étroite collaboration avec EDSC, si bien que des initiatives sont en jeu. Nous soutenons également, par l’entremise d’activités de développement économique, les collectivités afin de renforcer leurs capacités pour qu’elles soient en mesure d’être compétitives sur le marché du travail.

Je ne sais pas si mon collègue de Terres et développement économique est maintenant connecté et peut contribuer à la conversation. Je m’adresserais à Mme Sultan; sinon, David Peckham peut également fournir plus de renseignements en ce qui concerne l’éducation.

M. Peckham : Merci.

L’un des volets du programme d’aide au revenu est également des soutiens fournis pour permettre aux demandeurs d’aide au revenu d’accéder à l’emploi et à la formation. Ainsi, en plus de ce que M. Thompson a mentionné, à savoir le travail d’EDSC sur les compétences autochtones, nous fournissons également ce service aux personnes qui bénéficient de l’aide au revenu.

Le sénateur Klyne : Il y a évidemment beaucoup de travaux de construction en cours dans les secteurs industriels, commerciaux et résidentiels. Qui passe ces contrats? Sont-ils accordés à des intermédiaires ou à des tiers? Font-ils l’objet de soumissions ou de devis? Ces chantiers offrent-ils des occasions de formation professionnelle?

M. Thompson : Le ministère a réalisé des investissements importants dans les réseaux d’approvisionnement en eau. Ma collègue Jennifer Esdaile, qui est responsable de la Gestion stratégique de l’eau, devrait pouvoir vous donner plus de renseignements sur la gestion de ces contrats.

Jennifer Esdaile, directrice, Gestion stratégique de l’eau, Services aux Autochtones Canada : Je vous remercie de votre question. Je peux vous parler de la politique d’appel d’offres pour les infrastructures des réserves que nous avons mise en place.

Les Premières Nations sont propriétaires de leurs infrastructures. Les installations d’approvisionnement en eau et de traitement des eaux usées relèvent de mes responsabilités. Les Autochtones sont responsables de la planification, de la conception, de l’approvisionnement, de la construction, de l’exploitation et de l’entretien des infrastructures sur les réserves. Services aux Autochtones Canada fournit aux Premières Nations le financement et les conseils dont elles ont besoin pour ces volets ainsi que pour la mise en service de ces systèmes et de toute autre infrastructure sur réserve.

La Politique d’appel d’offres pour les projets d’immobilisations des Premières Nations dans les réserves financés par le gouvernement fédéral est entrée en vigueur en 1998. Selon cette politique, les projets d’immobilisations où les travaux de construction sont de plus de 500 000 $ et qui sont financés en totalité ou en partie par le gouvernement fédéral doivent faire l’objet d’un appel d’offres ouvert ou être annoncés publiquement afin de permettre aux entrepreneurs intéressés de soumissionner. La valeur optimale, c’est le prix acceptable le plus bas, qui peut également comprendre des exigences particulières sur le contenu local que l’entrepreneur ou le fournisseur s’engage à respecter lors de l’exécution du contrat, et toute autre disposition que les Premières Nations jugent nécessaire à l’exécution des travaux.

Je ne peux rien vous dire au sujet d’une formation professionnelle qui serait réalisée conjointement au processus d’appel d’offres.

Le sénateur Klyne : Très bien. Je m’adresserai peut-être plus tard aux représentants du ministère pour leur poser des questions sur l’évolution de la crise du logement, y compris sur les plans connexes, et sur d’autres occasions qui se présentent du côté résidentiel. Je vous remercie.

Le sénateur Richards : J’ai envoyé un message à la sénatrice Duncan pour lui demander si elle voulait utiliser mon temps. Puisqu’elle est la prochaine intervenante, je vais lui céder la parole, et je parlerai peut-être à la fin de la réunion. Je vous remercie.

La sénatrice Duncan : Je vous remercie infiniment, sénateur Richards. Je suis désolée de ne pas avoir vu votre message. Merci de me donner l’occasion de poser une question.

En vertu de la Constitution, le Canada est en quelque sorte responsable de la santé des Premières Nations. Certains affirment en effet que le pays est la 14e province à la table dans ce dossier. Les provinces et les territoires ont différentes méthodes pour gérer la santé des Autochtones et les coûts de la prestation des services. Par exemple, les déplacements liés à des soins médicaux sont monnaie courante dans le Nord. Ainsi, le gouvernement du Yukon facturerait au Canada les déplacements des Premières Nations relatifs à la santé. La sénatrice Anderson a parlé des services de santé non assurés.

Je m’échine à trouver une consolidation de l’ensemble du financement des soins de santé à Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada, ainsi qu’à Services aux Autochtones Canada. Ces données sont-elles consolidées? Dans le cas contraire, puis-je demander aux ministères de fournir, dans leur budget et selon les montants choisis, une ventilation par province et par territoire des dépenses associées à ces fonds? Par exemple, nous avons souvent vu des allusions aux installations du Nunavut, ainsi que des montants différents pour des Premières Nations, sans toutefois que leur emplacement ne soit précisé.

J’ai donc deux questions : les renseignements sur les dépenses en santé sont-ils consolidés? Est-il possible de fournir une ventilation des endroits où les fonds demandés sont dépensés du côté de Services aux Autochtones Canada et des autres ministères?

M. Thompson : Je vous remercie infiniment de la question, madame la sénatrice. Grâce au cadre redditionnel du gouvernement canadien, nous sommes en mesure de fournir ce genre d’information en toute transparence. De plus, le système ministériel assure un suivi des données financières par province et de différentes façons. Ces renseignements devraient être disponibles.

Je vais laisser mon collègue Keith Conn vous donner plus d’informations en réponse à votre question.

M. Conn : Je vous remercie de votre question, madame la sénatrice. Services aux Autochtones Canada sait précisément quelles dépenses se rapportent aux populations autochtones que nous représentons — il s’agit surtout des Premières Nations et des Inuits du pays.

Ce qui est difficile à comprendre, c’est le montant que les provinces et les territoires dépensent pour les populations autochtones, étant donné que la plupart des administrations ne compilent pas ces chiffres à l’aide d’un identifiant ethnique dans leur système de santé.

Je demande également à la sénatrice d’être indulgente, car nous avons toujours soutenu que la santé est une responsabilité commune. Il est vrai que la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits de Services aux Autochtones Canada fournit des soins de santé primaires à environ 51 collectivités éloignées et isolées au pays. Ce sont bien sûr les provinces qui gèrent le réseau de santé. Les hôpitaux et les services médicaux relèvent des provinces. Nous faisons de notre mieux pour coordonner le tout, y compris les services de santé mentale et l’accès aux services de santé spécialisés pour les milieux isolés qui sont uniquement accessibles par voie aérienne. Il serait intéressant de regrouper les dépenses réelles de chaque province et territoire.

Nous pourrons vous faire parvenir des rapports très détaillés de nos dépenses fédérales relatives à la santé des Premières Nations et des Inuits. Nous vous enverrons la réponse, si c’est possible.

La sénatrice Duncan : Toujours sur le même sujet, le témoin a dit que des renseignements pourraient nous être envoyés. Pourraient-ils être remis dès que possible au comité par écrit?

Le témoin a précisé que son équipe sera assurément en mesure d’établir les montants qui ont été dépensés dans tout le pays pour la santé des Premières Nations et des Autochtones. Je vais employer le mot « Autochtone ». Serait-il également possible d’établir une distinction entre les dépenses dans les réserves et celles à l’extérieur des réserves? Statistique Canada recueille des chiffres sur la population des Premières Nations, des Autochtones et des Inuits au pays. S’ils pouvaient être recoupés avec ces renseignements, cela nous aiderait à déterminer si l’argent est dépensé en toute transparence, et à connaître les endroits où les besoins sont les plus criants.

Je m’inquiète par exemple de la population autochtone qui vit dans les centres urbains et de son accès aux soins de santé. Pourrions-nous avoir ces données? Je vous remercie.

Le président : Monsieur Thompson, pourriez-vous s’il vous plaît donner suite à la demande de la sénatrice?

M. Thompson : Tout à fait, monsieur le président. Nous vous remettrons les renseignements dont nous disposons sur les dépenses fédérales. Je crois savoir que les données sur les populations en milieu urbain sont un peu plus difficiles à recueillir, car je pense que la majeure partie de ces Autochtones utilisent le régime provincial. Nous verrons quelles données nous pouvons vous fournir, et nous indiquerons clairement ce que les chiffres comprennent ou non, à partir de ce qui est disponible.

Le président : Pour ce qui est de votre extrapolation et de vos graphiques, pourriez-vous faire de même pour les Autochtones qui vivent dans les réserves et hors réserve au pays?

M. Thompson : Nous ferons de notre mieux avec les données qui sont accessibles dans nos systèmes financiers, et nous indiquerons clairement ce qui en est inclus et exclu.

Le président : Comme vous le savez, nous prévoyons déposer notre rapport en mars. À quel moment pouvons-nous espérer recevoir ces chiffres?

M. Thompson : Ce ne devrait pas être trop long. Il faudra quelques jours pour réunir les données et nous assurer d’avoir les compétences voulues.

Le président : Je vous remercie.

Le sénateur Loffreda : Je remercie les témoins d’être avec nous aujourd’hui.

Nous avons tous entendu parler de l’importance de notre économie numérique, qui connaît une croissance en raison de la pandémie. Nous savons également que l’accès à Internet haute vitesse à large bande dans les collectivités éloignées, rurales et nordiques est un enjeu majeur.

Cet écueil a-t-il empêché les entreprises gérées par des Autochtones de transférer leurs activités en ligne? Dans quelle mesure, le cas échéant?

Par ailleurs, dans l’optique de faire connaître des pratiques exemplaires, pouvez-vous nous donner des exemples d’entreprises qui ont joint le marché numérique pendant la pandémie et qui ont réussi leur transition vers l’économie en ligne? Y a-t-il des solutions à ce problème pour l’avenir?

M. Thompson : Je vous remercie infiniment de la question, monsieur le sénateur. Nous travaillons en étroite collaboration avec nos collègues d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada pour le déploiement des services à large bande dans tout le pays. Le ministère s’est fixé des objectifs très ambitieux dans le but que tous les Canadiens soient branchés au réseau. Il s’agit vraiment d’un partenariat.

Pour ce qui est des défis que les entreprises doivent relever sur le plan commercial, je vais demander à Jessica Sultan de vous donner plus de renseignements là-dessus.

Jessica Sultan, directrice générale, Direction générale des possibilités économiques et commerciales, Terres et développement économique, Services aux Autochtones Canada : Je vous remercie infiniment. Je m’appelle Jessica Sultan, et je suis la directrice générale responsable des possibilités économiques et commerciales dans le secteur Terres et développement économique de Services aux Autochtones Canada.

Je vous remercie de votre question. Au cours des derniers mois — voire de la dernière année, pour être honnête —, nous avons préparé des sondages en collaboration avec deux grandes organisations, le Conseil canadien pour le commerce autochtone et l’Association nationale des sociétés autochtones de financement, ou ANSAF. Nous avons travaillé auprès d’entreprises autochtones pour connaître exactement le genre d’information à demander.

Par exemple, une enquête a été réalisée sur les entreprises qui ont produit de l’équipement de protection individuel, ou EPI. En revanche, les autres sondages ne sont ni au point ni prêts à être lancés. J’imagine que nous aurons l’information dans les mois à venir, mais je ne peux pas vous la donner pour l’instant.

Le sénateur Loffreda : Je vous remercie. Services aux Autochtones Canada dispose de 58 millions de dollars pour atténuer les répercussions économiques que subissent les entreprises autochtones non admissibles aux mesures de soutien générales liées à la COVID. Nous connaissons tous l’importance du facteur temps pour la réception des prestations. Parfois, c’est la différence entre un commerce qui reste ouvert ou qui ferme ses portes. Je m’intéresse aux lacunes à ce chapitre, que nous pourrions combler à l’avenir. La première question qui me vient à l’esprit est la suivante : pourquoi les mesures de soutien générales n’incluaient-elles pas ces entreprises? Pourquoi n’y étaient-elles pas admissibles d’emblée? Que peut-on faire pour combler ces lacunes à l’avenir? Je vous remercie de votre réponse.

Mme Sultan : Merci. Je vais encore répondre.

Services aux Autochtones Canada est tout à fait conscient que les entreprises autochtones peuvent rencontrer des défis uniques et être touchées de manière disproportionnée par la pandémie. Par conséquent, des sommes importantes ont été distribuées.

En avril 2020, un montant total de 306,8 millions de dollars a été annoncé pour aider les entreprises autochtones à surmonter les difficultés attribuables à la pandémie. En outre, le 11 juin, une somme supplémentaire de 117 millions de dollars a été allouée pour aider les collectivités autochtones à mieux soutenir les entreprises et les économies locales, et un fonds de relance de 16 millions de dollars a été prévu expressément pour aider l’industrie touristique autochtone.

Services aux Autochtones Canada demeure déterminé à aider les entreprises à traverser la pandémie et à se rétablir. Les fonds sont distribués comme prévu et dans les délais impartis, et ils devraient avoir été distribués d’ici la fin de l’exercice.

Le sénateur Loffreda : En général, quel a été l’effet de la pandémie sur les entreprises dirigées par des Autochtones? Ont-elles pu y survivre? Ont-elles été nombreuses à devoir fermer définitivement? Avons-nous des résultats préliminaires? Quelles entreprises ont été le plus durement touchées? À l’avenir, que pouvons-nous suggérer ou conseiller au gouvernement pour assurer la survie de ces entreprises?

M. Thompson : Encore une fois, c’est Mme Sultan qui pourra répondre à la question.

Mme Sultan : Comme dans le cas des enquêtes que nous finalisons en collaboration avec divers partenaires autochtones, les questions que vous soulevez sont très intéressantes et sont actuellement à l’étude.

À la lumière de mon expérience auprès des grands secteurs du milieu des affaires autochtone, je m’attends à ce que le tourisme autochtone soit une des industries les plus touchées. Dans les mois à venir, je pense que nous aurons des renseignements plus concrets sur l’ensemble des entreprises autochtones, que nous pourrons vous transmettre.

Le sénateur Loffreda : Je vous remercie. Si vous pouviez ultérieurement nous envoyer les données par écrit, ce serait fort apprécié.

Le sénateur Smith : Récemment, la vérificatrice générale a déclaré que le gouvernement fédéral ne respectera pas son engagement à lever tous les avis d’ébullition de l’eau ce mois-ci. Elle a affirmé être elle-même consternée et inquiète puisqu’une telle situation ne devrait pas être acceptable en 2021.

J’ai une question fort simple. Après des années d’engagements et d’argent promis, pourquoi sommes-nous encore loin de répondre à ce besoin humain fondamental de nos peuples autochtones? Quels problèmes empêchent votre ministère de lever ces avis d’ébullition de l’eau?

Permettez-moi d’apporter une nuance. Lorsque j’étais le président du Comité des finances il y a quatre ou cinq ans, nous avons eu la même discussion. En somme, je veux comprendre pourquoi nous sommes incapables d’appliquer efficacement les mesures. Est-ce que quelqu’un peut éclairer ma lanterne?

M. Thompson : Je vous remercie pour cette question, monsieur le sénateur. Nous avons un plan très ambitieux en ce qui concerne l’eau des collectivités. Il nécessite une coordination poussée dans tout le pays. Bien sûr, la pandémie a eu une grande incidence sur la capacité du ministère à atteindre son objectif.

D’autres investissements sont prévus pour l’eau dans le Budget supplémentaire des dépenses. Une somme additionnelle de 151,5 millions de dollars est injectée dans le programme pour nous assurer d’atteindre plus rapidement les résultats escomptés. Je vais laisser ma collègue Jennifer Esdaile, qui est responsable du programme de l’eau, vous donner une réponse plus détaillée.

Mme Esdaile : Je vous remercie de la question. Tout d’abord, je voudrais souligner notre bon travail et nos réalisations des dernières années. Nous avons investi de l’argent pour soutenir 657 projets d’approvisionnement en eau et de traitement des eaux usées. De ce nombre, il y a 98 nouvelles usines de traitement des eaux usées et nouveaux étangs d’épuration, et 418 projets visant à rénover ou à moderniser des infrastructures en place. Nous avons levé 99 avis concernant la qualité de l’eau potable à long terme dans les réserves et empêché 175 autres réserves d’être frappées d’un avis à long terme.

Lever les avis concernant la qualité de l’eau potable à long terme est complexe. Les solutions au problème d’eau potable dans les Premières Nations sont propres à chaque situation, et nous travaillons en étroite collaboration avec la population pour trouver celles qui conviennent le mieux. La décision d’adopter une solution donnée incombe à juste titre aux dirigeants autochtones. C’est complexe, et les projets permettant de lever les avis peuvent prendre des années à réaliser. Ils comprennent les études de faisabilité, les travaux de conception du nouveau système, la construction de nouvelles infrastructures et l’amélioration de la formation et de la surveillance.

Les projets d’infrastructure peuvent être retardés pour toutes sortes de raisons. Par exemple, la réparation d’une installation de traitement des eaux dans une collectivité éloignée, où le transport des matériaux de construction dépend des routes d’hiver, peut être repoussée d’un an si la saison des routes d’hiver est raccourcie en raison des changements climatiques. D’autres projets sont aussi retardés en raison des conditions du marché.

Le sénateur Smith : Je ne veux pas vous interrompre, mais on nous rebat les oreilles avec les mêmes réponses depuis des années. C’est comme si vous lisiez un texte. Cela ne me pose aucun problème.

L’enjeu ici se rapporte à la coordination avec les différentes collectivités. Nous comprenons qu’elles sont dispersées dans tout le pays, mais vous parlez d’un ministère auquel le gouvernement fédéral confie jusqu’à 18 milliards de dollars par année. J’ai du mal à saisir pourquoi nous recevons depuis des années et des années les mêmes réponses stéréotypées tirées d’un texte.

Avons-nous une infrastructure de gestion entre le ministère et les différentes collectivités? Je conviens qu’il s’agit d’un problème colossal et majeur en raison de la dispersion des localités au pays. Avons-nous la capacité de régler le problème? Ne dites pas que vous avez levé 100 avis lorsqu’il y en a 50 de plus.

Nous sommes sensibles aux défis que vous rencontrez, mais comment allons-nous gérer le dossier et obtenir des résultats pour éviter que les peuples autochtones n’aient le même problème d’ici 5 ou 10 ans, mais à des endroits différents? Comment allons-nous résoudre le problème?

Mme Esdaile : Encore une fois, je vous remercie de cette précision. Je peux vous dire que des travaux sont en cours dans toutes les collectivités visées par un avis concernant la qualité de l’eau potable à long terme. Il y a un plan d’action pour résoudre ce problème. Nous avons lancé des projets dans chacune des 39 collectivités pour remédier aux avis qui sont toujours en vigueur, et nous nous sommes engagés à mettre en place des solutions à long terme là où nous avons des solutions provisoires, afin de fournir de l’eau potable à ces collectivités plus rapidement.

Des travaux sont donc en cours. Je tiens à répéter qu’il existe un plan pour remédier à chacun des avis concernant la qualité de l’eau potable à long terme qui sont actuellement en vigueur.

Le président : Madame Esdaile, à titre de président du comité, je sais qu’il ne fait aucun doute qu’à un certain moment de chaque année, selon les budgets que nous examinons, comme l’a dit le sénateur Smith, depuis 5, 10 ou 20 ans — il ne fait aucun doute, donc, que vous déposez un rapport dans lequel vous abordez la question du calendrier de l’infrastructure et le respect de son budget.

Pourriez-vous fournir à notre comité, par l’entremise de notre greffière, certains renseignements? Pour l’année en question, à savoir 2021, existe-t-il un rapport qui permettrait aux parlementaires de vérifier le nombre de projets en cours pendant l’année? Nous pourrions le confirmer, car nous sommes les mêmes parlementaires qui ont déposé les rapports sur les budgets de 2019 et de 2020.

Le sénateur Smith : Monsieur le président, puis-je ajouter quelque chose? Je n’essaie pas de vous interrompre, mais nous avons déjà entendu les mêmes commentaires. J’aimerais seulement faire valoir que je ne pense pas qu’il soit bon pour notre institution que le ministère nous dise de regarder toutes les bonnes choses qui ont été accomplies. Là n’est pas la question. Nous reconnaissons que les ministères ont fait de bonnes choses, mais le fait est qu’il reste un problème majeur à résoudre. Comment allons-nous résoudre ce problème?

Chaque année, monsieur le président, nous recevons la liste de tous les projets qui ont été réalisés. Mais cela ne suffit pas, car il en reste beaucoup d’autres.

Le président : Je vous remercie, sénateur Smith. Monsieur Thompson et madame Esdaile, vous êtes des professionnels. Nous souhaitons seulement obtenir quelques documents qui permettraient aux parlementaires d’analyser simultanément l’infrastructure, les avis d’ébullition de l’eau et d’autres facteurs. Je crois que vous avez pu constater que ce sujet passionne le sénateur Smith. Monsieur Thompson, nous vous serions reconnaissants de nous donner un aperçu de ce qui a été réalisé avec le budget en question — c’est-à-dire le budget de 2021 — et de ce qu’on envisage maintenant dans le cadre du Budget supplémentaire des dépenses (C) pour l’année budgétaire 2021. Nous n’avons pas reçu un tel aperçu pour le budget de 2019 ou celui de 2020.

Nous demandons simplement des renseignements supplémentaires qui nous permettront, à titre de parlementaires et à titre de membres du Comité sénatorial permanent des finances nationales, de formuler d’autres recommandations. Nous demandons cela à tous les ministères. Nous ne vous prenons pas à partie. S’il vous plaît, je ne veux pas d’un débat avec les sénateurs. Une question a été posée. Nous souhaitons tout simplement avoir une réponse. Est-ce que vous êtes d’accord, monsieur Thompson?

M. Thompson : Certainement, monsieur le président. Je vous remercie beaucoup de votre question. Je tiens également à remercier le sénateur Smith de sa question, car elle concerne un enjeu extrêmement important pour le ministère. C’est une priorité absolue de notre organisme. Nous publions de plus en plus de renseignements en ligne, et nous les mettons à la disposition de tous les Canadiens, afin qu’ils puissent suivre les progrès réalisés. En outre, cet enjeu sera une priorité permanente pour le ministère. Comme vous le savez, dans le cas de l’eau potable, il faut exploiter et entretenir les installations nécessaires. Il ne s’agit pas seulement de lever l’avis sur la qualité de l’eau potable; il faut également s’assurer que les problèmes ne reviennent pas. Cela nécessitera une formation, un entretien et des investissements permanents. Nous vous fournirons les renseignements que vous demandez, afin que vous disposiez du tableau le plus complet possible de la situation.

Le président : N’hésitez pas, si vous le souhaitez, à demander au Comité sénatorial permanent des finances nationales de se réunir plus longtemps avec vos représentants pour obtenir un compte rendu de la situation. Je peux vous dire, à titre de président, que nous répondrons certainement à une telle demande.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Ma question s’adresse à M. Thompson.

Ma question va faire ressortir les difficultés que nous avons à suivre la trace de l’argent qui est versé aux peuples autochtones pour faire face à la pandémie.

Dans le Budget supplémentaire des dépenses, un montant de 900 millions de dollars est attribué à deux postes : la poursuite des interventions de santé publique et le Fonds de soutien aux communautés autochtones. Un peu plus loin, je vois 63 millions de dollars pour les mesures de soutien, 58 millions de dollars pour la santé mentale, 58 millions de dollars pour l’augmentation des coûts en santé et un autre million de dollars pour améliorer les mesures de santé.

Pourquoi y a-t-il autant de dépenses pour des choses aussi semblables? Comment les fonctionnaires et les peuples autochtones font-ils pour savoir à quel poste budgétaire correspond telle ou telle dépense? On dirait que tout se ressemble.

M. Thompson : Merci, sénateur Dagenais, de cette excellente question. En tant que dirigeant principal des finances, c’est une question qui me tient beaucoup à cœur.

C’est difficile de suivre l’information financière à travers le cycle des dépenses naturel du gouvernement. La pandémie n’a évidemment pas suivi le cours du budget, le cycle naturel.

Le ministère devait avoir accès à des fonds très rapidement au début de l’année pour pouvoir répondre aux divers besoins. Si vous vous le rappelez, il y a un an — pour certains, cela a paru plus long —, on ne savait pas nécessairement dès le départ pendant combien de temps et à quelle ampleur on serait confronté à la pandémie.

Le ministère a géré par période. Des investissements de fonds ont été faits dès le début de l’année financière et le gouvernement avait mis en place une autorité législative, qui nous permettait d’avoir accès à un vote central au Secrétariat du Conseil du Trésor pour avoir accès aux sommes d’argent dont on avait besoin pour être en mesure de répondre aux besoins, tant du côté de la santé publique que du développement économique, dont le Fonds de soutien aux communautés autochtones, comme vous l’avez mentionné.

Au fur et à mesure que l’année avançait, il y avait des besoins additionnels. La pandémie s’étirait. Il y avait des défis supplémentaires auxquels nous devions faire face. On a fait des demandes supplémentaires de budget et ces sommes d’argent sont soit allées dans les crédits législatifs, soit arrivées par les budgets supplémentaires des dépenses. Les crédits législatifs ont pris fin le 31 décembre. Il y avait encore des fonds disponibles, qui avaient été mis en place dans le crédit législatif. Pour ne pas perdre ces sommes d’argent, le ministère a fait une soustraction de ce qui restait dans le crédit législatif, et c’est ce que vous retrouvez aujourd’hui dans le Budget supplémentaire des dépenses (C).

Voilà le défi qu’il faut relever.

Nous avons l’information. Je peux fournir au comité une liste complète des investissements par poste d’activité. Cela vous apportera une plus grande précision, pour savoir quelle somme a été attribuée cette année et à quel poste budgétaire. Cela devrait vous apporter les précisions que vous cherchez, mais je suis tout à fait d’accord avec vous : le cycle budgétaire est difficile à suivre.

Le sénateur Dagenais : Est-ce qu’on peut espérer — j’imagine que la pandémie finira par s’atténuer — qu’à l’avenir, les postes budgétaires seront mieux précisés ou moins similaires?

M. Thompson : Personnellement, je peux vous donner l’information exacte, à savoir combien d’argent a été investi en santé, et en aide aux revenus et au développement économique. Le poste qui est un peu plus vague est le Fonds de soutien aux communautés autochtones, dont les crédits de 1,06 milliard de dollars ont été alloués à la grandeur du pays pour les communautés. Cela demandera plus de temps pour vous décrire exactement la façon dont ces sommes d’argent ont été dépensées, parce qu’on avait accordé une plus grande flexibilité aux communautés. Selon l’expérience du ministère, lorsqu’on permet aux communautés autochtones de prendre elles-mêmes leurs décisions, on obtient de meilleurs résultats que lorsque les fonctionnaires fédéraux dictent la marche à suivre.

Pour ce qui est du Fonds de soutien aux communautés autochtones, on a accordé plus de flexibilité, et c’est ce qui a contribué aux résultats qu’on voit. Les communautés ont été sous-représentées pour ce qui est des cas de COVID et des décès liés à la COVID, par opposition aux cas de H1N1, où il y avait une surreprésentation des communautés autochtones. Donc, cette approche a démontré ses avantages; on peut vous dire qu’un montant de 1,065 milliard de dollars a été investi dans le Fonds de soutien aux communautés autochtones et les dépenses admissibles pour les communautés dans le cadre de cette enveloppe. J’ai aussi les détails en ce qui a trait à la santé, au développement économique et à tous les différents postes. Donc, on pourra fournir l’information au comité.

Le sénateur Dagenais : Quand vous dites que les résultats sont plus clairs si cela est soumis à la décision des communautés autochtones, je comprends qu’en retour, elles effectuent la reddition de comptes pour vous montrer comment l’argent a été dépensé?

M. Thompson : Les sommes d’argent ont été attribuées par l’entremise de nos véhicules existants de paiement de contribution, au moyen des modalités existantes de nos programmes. Il y a aussi une reddition de comptes. Cela dit, on a réduit l’exercice de reddition de comptes cette année pour donner plus de flexibilité. Toutefois, une reddition de comptes doit manifestement être effectuée, ce qui permettra de rendre compte de l’argent dépensé.

Le sénateur Dagenais : Merci, monsieur Thompson.

Le président : Avant de donner la parole au sénateur Forest, j’aimerais faire un suivi à propos de cette même question. Monsieur Thompson, le directeur parlementaire du budget a comparu avant votre groupe. Je ne veux pas interpréter ses propos, mais je vous inviterais à prendre connaissance d’un commentaire qu’il a fait à propos de votre ministère. Cela nous permettrait de mettre les points sur les i et les barres sur les t. C’est important pour chacun de nos ministères et pour les parlementaires, au moment du dépôt de notre budget, de se rappeler que nous avons les mêmes objectifs : la transparence, la reddition de comptes, la responsabilité, la prévisibilité et la fiabilité.

À titre de président du Comité sénatorial permanent des finances nationales, je vous invite à prendre connaissance des commentaires du groupe de témoins précédent, particulièrement ceux de M. Giroux.

Le sénateur Forest : J’aimerais faire un commentaire général. Je ne sais pas s’il y a une symbolique associée aux problèmes techniques que nous éprouvons et au témoignage des gens de Services aux Autochtones Canada.

Le 22 février dernier, Le Devoir a publié un article très intéressant concernant la grande question de l’eau potable au sein des communautés autochtones. Les conclusions de cet article nous amènent à constater que 20 % des usines de traitement de l’eau n’atteindraient pas leur cycle de vie complet, car les populations autochtones n’ont pas les moyens de faire une maintenance adéquate pour que ces usines fonctionnent de façon efficace.

Nous avons certaines belles usines de traitement d’eau potable qui tournent sans filtre, donc qui ne traitent pas l’eau.

La semaine dernière, la vérificatrice générale a constaté que Services aux Autochtones Canada n’a pas modifié la formule de financement du fonctionnement et de l’entretien des réseaux d’alimentation en eau des Premières Nations depuis sa création, il y a 30 ans.

Actuellement, la formule de financement repose sur des salaires qui sont ridiculement bas, ce qui contribuerait au problème de maintien en poste d’opérateurs qualifiés de réseaux d’alimentation en eau.

En réponse au rapport de la vérificatrice générale, Services aux Autochtones Canada dit vouloir continuer de collaborer avec les partenaires des Premières Nations pour veiller à l’obtention d’un financement suffisant pour assurer le fonctionnement et l’entretien des réseaux d’eau potable et de traitement des eaux usées et pour modifier les politiques connexes.

Concrètement, quel est l’état d’avancement de cette collaboration? Il est évident que si on considère le grand défi en matière de ressources humaines — des échelles et une structure salariale datant de 30 ans —, on peut comprendre qu’au-delà du financement des techniques de maintenance et de la mise à niveau, il y a également l’enjeu de la conservation de ressources de qualité.

J’aimerais savoir où en sont ces négociations avec les partenaires. Qu’est-ce qui est envisagé pour remédier au problème de maintenance technique et de conservation des ressources de qualité pour exploiter ces infrastructures qui sont vitales pour nos communautés autochtones?

M. Thompson : Sénateur, je vous remercie de votre question. Comme nous l’avons mentionné plus tôt, dans le Budget supplémentaire des dépenses (C) de cette année, nous disposons d’une somme de 151,5 millions de dollars qui est directement consacrée à ces questions de fonctionnement et d’entretien.

De plus, il y a des budgets qui ont été votés pour l’an prochain par rapport à ces activités. Le gouvernement travaille sur une stratégie à plus long terme, mais il y a du financement dans le budget actuel qui nous permet justement de répondre à ces enjeux liés au fonctionnement et à l’entretien de ces systèmes d’eau potable.

Mme Esdaile pourra vous donner plus d’informations en ce qui concerne le programme d’eau.

Le sénateur Forest : Comment la somme de 151 millions de dollars est-elle ventilée? Quelles sommes sont consacrées à l’entretien et à la maintenance en matière de ressources humaines?

M. Thompson : D’après ce que je comprends, les sommes que l’on trouve dans le Budget supplémentaire des dépenses (C) de cette année sont entièrement consacrées au fonctionnement et à l’entretien. Mme Esdaile peut peut-être fournir plus d’informations.

[Traduction]

Mme Esdaile : Je vous remercie beaucoup de votre question. Comme il a été mentionné, le nouveau financement signifie que 100 % des coûts d’exploitation et d’entretien liés au traitement de l’eau et des eaux usées seront couverts en fonction de la formule de financement actuel. Il s’agit d’une augmentation par rapport à la proportion de 80 % que nous financions auparavant. Nous nous attendons à ce que ce financement permette aux Premières Nations de mieux entretenir, à long terme, les quelque 1 200 systèmes d’approvisionnement en eau et de traitement des eaux usées qui se trouvent dans les réserves.

Plus précisément, nous nous attendons à ce que ce financement permette aux Premières Nations d’améliorer le salaire des opérateurs de réseaux d’eau et de retenir les opérateurs qualifiés dans leurs collectivités, de former de nouveaux opérateurs pour renforcer la capacité d’entretien des réseaux d’eau, d’améliorer ou de maintenir les cotes d’état des actifs et d’assurer un cycle de vie plus long pour les actifs liés à l’eau.

Parallèlement à la mise en œuvre de nouveaux investissements dans l’exploitation et l’entretien, nous travaillons avec l’Assemblée des Premières Nations à l’élaboration conjointe d’un nouveau cadre stratégique d’exploitation et d’entretien. Des travaux préliminaires ont permis de déterminer que l’exploitation et l’entretien des systèmes ne doivent pas être considérés séparément et qu’ils doivent faire partie de la planification de la gestion des actifs, en plus de déterminer leurs coûts réels.

Les Premières Nations ont montré leur appui à l’égard d’une planification de la gestion des actifs qui reflète mieux les besoins en matière de financement pour l’exploitation et l’entretien et qui permet une planification stratégique et une prise de décision au sujet des besoins en matière de financement.

Nous nous attendons à ce que cette approche assure la durabilité des systèmes à plus long terme et qu’elle tienne compte des salaires des opérateurs, un dossier sur lequel nous continuons de travailler en partenariat avec les Premières Nations.

[Français]

Le président : D’autres questions?

Le sénateur Forest : En conclusion, les sommes qui figurent au Budget supplémentaire des dépenses (C) permettront de bonifier les échelles salariales et de couvrir de 80 à 100 % des coûts de fonctionnement et d’entretien. Est-ce exact?

M. Thompson : C’est exact, monsieur le sénateur.

Le président : Merci beaucoup, monsieur Thompson.

[Traduction]

La sénatrice M. Deacon : J’aimerais remercier tous les membres de l’équipe d’être ici aujourd’hui. L’une de mes questions devait concerner un domaine dont nous avons déjà beaucoup parlé, selon moi, cet après-midi, à savoir l’eau potable et les avis concernant la qualité de l’eau. Bien entendu, je ne vais pas répéter mes questions sur ce sujet. Je tiens seulement à le mentionner, parce que je pense que les membres du Comité sénatorial permanent des finances nationales ont exprimé haut et fort que c’est un enjeu qu’ils souhaitent être en mesure de régler. Ma question a été abordée, et je tente de mieux comprendre à quoi les 151 millions de dollars vont servir. Vous avez parlé des enjeux liés à l’exploitation et à l’entretien, et j’attends avec impatience d’en savoir un peu plus sur ce sujet, en particulier grâce à votre rapport. Je vous remercie.

J’aimerais aborder un sujet un peu différent, c’est-à-dire les 31 millions de dollars destinés à mettre fin à la violence faite aux femmes et aux filles, ainsi qu’à fournir des services de santé mentale. L’une des conséquences les moins évoquées de la pandémie actuelle est l’augmentation de la violence familiale à l’échelle du pays. Dans le cadre de notre discussion d’aujourd’hui, j’aimerais savoir si cette tendance inquiétante a connu une hausse similaire dans nos collectivités autochtones, s’il existe des données à cet égard et si vous avez une idée des effets potentiels à long terme de cette situation. Plus important encore, j’aimerais que vous nous expliquiez comment cet argent sera dépensé, non seulement pour fournir un abri sûr aux personnes qui en ont besoin à court terme, mais aussi pour réduire, minimiser et éliminer ce problème à long terme. Je vous remercie.

M. Thompson : Je vous remercie, sénatrice, de votre question. Le montant de 29,7 millions de dollars prévu dans ce budget vise à répondre aux recommandations du rapport final de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, intitulé Réclamer notre pouvoir et notre place. Ces fonds serviront à financer des services de soutiens culturels et émotionnels dans les collectivités, l’accès à des services en matière de santé mentale pour les personnes touchées par la situation des femmes et des filles autochtones disparues et assassinées et la Convention de règlement relative aux externats indiens fédéraux.

Je demanderais maintenant à mon collègue, M. Keith Conn, de vous fournir des renseignements plus détaillés sur les programmes qui seront mis en œuvre grâce à ce financement.

M. Conn : Nous avons effectivement versé 82 millions de dollars à des organismes et à des collectivités pour soutenir la capacité d’appoint en matière de bien-être et de soutien mental. Je pense que je demanderais à mon collègue, M. David Peckham, de répondre à la question sur l’initiative sur la violence fondée sur le sexe, car il connaît mieux ce dossier, surtout en ce qui concerne les investissements actuels et les investissements potentiels à venir.

M. Peckham : Je vous remercie. J’espère que vous m’entendez mieux maintenant.

Le président : Nous éprouvons toujours des difficultés, monsieur Peckham. Monsieur Thompson, vous pourriez peut-être vous occuper de la question et nous envoyer la réponse par écrit, s’il vous plaît.

M. Thompson : Certainement. Je m’en occupe.

Le président : Je vous remercie.

La sénatrice M. Deacon : Je vous remercie. J’ai hâte de recevoir la réponse. Mon autre question concerne les vaccins. En effet, vous avez mentionné, plus tôt dans votre exposé, que vous aviez fait des progrès en ce qui concerne la vaccination de nos communautés autochtones dans les réserves. Je ne me souviens pas des chiffres exacts, mais je pense que c’est nettement supérieur à la moyenne nationale. Bon nombre de nos collectivités des Premières Nations se trouvent dans des zones rurales difficiles d’accès, ce qui, j’imagine, a représenté un défi pour la chaîne du froid nécessaire aux vaccins de Moderna et de Pfizer.

Étant donné que le vaccin d’AstraZeneca requiert seulement une réfrigération normale, cela aidera-t-il vos collectivités à accélérer le rythme de la vaccination?

M. Thompson : Je vous remercie beaucoup, sénatrice, de votre question. Encore une fois, je demanderais à M. Keith Conn de vous donner de plus amples renseignements sur la distribution des vaccins.

M. Conn : Je vous remercie de votre question, sénatrice. Selon nos experts en santé publique, nous devrions observer une augmentation importante des taux de vaccination dans tout le pays avec l’approbation des nouveaux vaccins dans le système.

Nous avons pu distribuer le vaccin de Moderna par l’intermédiaire des autorités provinciales et territoriales, mais pas celui de Pfizer. Le vaccin de Pfizer devrait être livré dans un environnement urbain très stable, mais le vaccin de Moderna a certainement été distribué de manière efficace dans les collectivités autochtones d’un bout à l’autre du pays. Nous nous attendons à une augmentation importante du nombre de doses de vaccins qui seront offertes dans les semaines et les mois à venir, et nous devrions observer une hausse importante des taux de vaccination à l’échelle du pays, non seulement dans les collectivités rurales, isolées et uniquement accessibles par avion, mais aussi dans le contexte urbain. Il y a donc d’autres nouvelles à venir à ce sujet.

La sénatrice M. Deacon : Je vous remercie.

[Français]

La sénatrice Moncion : Pourriez-vous nous parler des plans qui accompagnent les demandes de fonds, c’est-à-dire le genre de planification stratégique et les plans de déploiement associés aux différents programmes et aux suivis que vous faites des sommes et de la reddition de comptes, à partir du moment où vous établissez les sommes jusqu’au moment où vous allez chercher les résultats des sommes par rapport aux projets?

M. Thompson : Merci de votre question. Évidemment, il y a une analyse des besoins très poussée qui est faite par les différents secteurs de l’organisation relativement aux programmes actuels et à leur compréhension, et au travail qu’on fait en collaboration avec les communautés autochtones. Comme vous le savez, nous avons une importante présence régionale. Notre collaboration est établie avec les communautés depuis très longtemps. Beaucoup d’engagements ont été pris auprès des communautés autochtones pour déterminer quels étaient les besoins.

Certains de nos programmes ont des formules qui rendent l’évaluation plus facile et les programmes actuels comportent des points de référence quant aux annonces qui seront faites par le gouvernement fédéral. De notre côté, nous procédons à une analyse pour déterminer de quelle façon cela touche les communautés autochtones et s’il y a des écarts. Nous avons parlé plus tôt du développement économique. On savait que les réductions ou les crédits d’impôt, par exemple, ne s’appliquaient pas à certaines entreprises, il fallait donc imposer une mesure supplémentaire. Une analyse comparative avec des programmes annoncés dans d’autres ministères est effectuée. Il y a donc une grande collaboration entre les différents ministères fédéraux, avec les provinces dans le cas des soins de santé et avec les communautés autochtones pour déterminer très clairement quelles seront les interventions.

On utilise les modalités actuelles de nos programmes pour exécuter les programmes. Les modalités sont donc très particulières quant à ce qui est admissible et ce qui ne l’est pas en matière de dépenses. Un suivi par la reddition de comptes est aussi effectué pour les actions qui sont prises, et nous utilisons les systèmes de reddition de comptes habituels du ministère pour suivre les paiements et les résultats et rendre compte des résultats.

Cette année, certaines actions ont été plus réactives. Nous n’avons pu consacrer trop de temps à la planification. Dans une année typique, on planifie des mois à l’avance. Dans ce cas-ci, un certain degré de réactivité a été nécessaire, mais cela n’empêche pas qu’en ce qui a trait au suivi de l’argent, tous les systèmes sont en place pour faire en sorte que nous puissions faire un suivi approprié et rendre compte du rendement de chacun des programmes.

Comme je le mentionnais en réponse à une question précédente, nous n’avons pas fait de planification à très long terme cette année. On a fait preuve d’une grande agilité à l’échelle de l’organisation pour débloquer des fonds, en suivre les effets et réagir très rapidement pour obtenir des fonds supplémentaires. Pour les soins de santé, nous avions obtenu 280 millions de dollars; pour les six premiers mois de l’année, on a pu suivre le rendement et, dans le budget actuel, il y avait 528,9 millions de dollars de plus. On a pu se fonder sur le résultat des 280,5 millions de dollars et utiliser cette information pour être en mesure de faire des prévisions. Nous avons fait la même chose avec le Fonds de soutien aux communautés autochtones : nous avons eu trois vagues de 300 millions de dollars et une quatrième vague de 380 millions de dollars parce qu’on faisait un suivi de chaque étape ou tranche et qu’on utilisait le cycle des dépenses pour réagir et accorder les montants appropriés.

La sénatrice Moncion : Merci. Ma deuxième question est plus générale.

Au Canada, il y a environ 655 conseils de bande qui représentent 1,4 million d’Autochtones, et nous savons que ce ne sont pas toutes les réserves qui ne fonctionnent pas bien. Une grosse partie d’entre elles fonctionnent très bien, sont autonomes et ne dépendent pas autant de Services aux Autochtones Canada.

J’aimerais savoir si l’on pourrait avoir accès aux divisions statistiques qui existent entre les réserves qui fonctionnent moins bien par rapport à celles qui fonctionnent très bien, et voir de quelle façon sont distribués les fonds au Canada dans les différentes réserves.

Je sais, par exemple, que les réserves du Nord sont beaucoup plus exigeantes que celles qui sont plus près des régions urbaines. Je sais aussi que les réserves situées près des régions urbaines ont accès aux services qui sont déjà disponibles dans les communautés.

Cela serait très intéressant de voir la distribution des fonds et le poids relatif des différentes réserves les unes par rapport aux autres. Ces renseignements pourraient-ils être transmis aux sénateurs?

M. Thompson : Merci de la question. Je mentionnais le Fonds de soutien aux communautés autochtones, par exemple, dans le cadre duquel nous avions utilisé les facteurs d’éloignement, ainsi qu’une note qui permet de déterminer les capacités de ces communautés. Ces critères avaient également été utilisés pour déterminer la façon dont les sommes sont distribuées. Or, bon nombre de nos programmes fonctionnent avec de telles formules. Nous serons donc en mesure de vous fournir l’information sur les capacités des communautés, les facteurs d’éloignement et la répartition des dépenses du ministère par communauté.

[Traduction]

Le sénateur Richards : J’aimerais remercier les témoins de comparaître aujourd’hui. Ma question fait suite à celle de la sénatrice Moncion. J’aimerais m’informer sur les réserves elles-mêmes et connaître le montant alloué au logement non seulement dans le Budget supplémentaire des dépenses (C), mais aussi dans le Budget principal des dépenses d’une année pour le logement dans les réserves d’un bout à l’autre du Canada. Je me souviens avoir vu, il y a quelques semaines à peine, une jeune femme mettre une couverture sur une fenêtre fissurée dans un logement d’une réserve pour protéger ses enfants d’une tempête de neige. De nos jours, ce n’est plus une façon de vivre. J’ai grandi dans une région où il y avait beaucoup de pauvreté, tant chez les Premières Nations que chez les Blancs, et ce n’est pas une façon de vivre pour qui que ce soit.

J’aimerais donc connaître la reddition de comptes effectuée en ce qui concerne les fonds alloués aux réserves, et j’aimerais que vous me donniez quelques renseignements à ce sujet. M. Thompson pourrait peut-être répondre brièvement à cette question. Je vous remercie.

M. Thompson : Je vous remercie de votre question, sénateur. L’exemple que vous donnez est, bien entendu, inacceptable pour toute personne vivant au Canada. Comme vous le savez, les besoins sont bien plus importants que les fonds disponibles. Les collectivités autochtones ont de grands besoins en matière de logement, et le ministère doit continuer à investir dans le logement.

Si je comprends bien votre question, vous me demandez de fournir des renseignements, par l’entremise du Budget principal des dépenses, sur l’affectation des fonds. Si j’ai bien compris, ce sont des renseignements que nous pouvons certainement fournir au comité.

Le président : Avant d’ajourner la réunion, monsieur Thompson, j’aimerais seulement vous rappeler qu’un autre membre du comité — je crois que c’était la sénatrice Duncan — a demandé le même type de ventilation que le sénateur Richards, c’est-à-dire une ventilation dans les réserves et à l’extérieur des réserves à l’échelle du Canada. Est-ce possible?

M. Thompson : Oui, c’est certainement possible.

Le président : Monsieur Thompson, je vous remercie sincèrement, vous et les membres de votre équipe, d’avoir comparu aujourd’hui. Nous avons certainement hâte de recevoir vos réponses par l’entremise de la greffière.

Avant d’ajourner la réunion, j’aimerais rappeler aux honorables sénateurs et à nos téléspectateurs que notre prochaine réunion se déroulera le vendredi 5 mars, à 10 heures (HNE).

(La séance est levée.)

Haut de page