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Président du Sénat

Décision du Président – Question de privilège - Divulgation du rapport du vérificateur général


Honorables sénateurs,

Je suis prêt à me prononcer sur la question de privilège soulevée par l’honorable sénatrice Hervieux-Payette le 8 décembre 2015. Elle se plaignait de la fuite alléguée de renseignements contenus dans le rapport du vérificateur général sur les dépenses des sénateurs avant son dépôt dans cette Chambre. La sénatrice avait d’abord soulevé une question de privilège le 9 juin 2015, qui a été jugée fondée à première vue. La question a ensuite été renvoyée pour examen au Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement. Cependant, le comité n’avait pas présenté de rapport sur le sujet avant la dissolution de la 41e législature.

Ce n’est pas la première fois qu’une question de privilège soulevée à une session antérieure le soit de nouveau à la nouvelle session et, conformément aux usages dans de tels cas, j’ai examiné tous les arguments soulevés.

Comme les sénateurs le savent, le rapport déposé le 9 juin 2015 découlait d’une vérification effectuée à la demande du Sénat, qui s’attendait à ce qu’il soit remis au Président et déposé au Sénat avant d’être rendu public. Ce rapport ressemble donc beaucoup à un rapport de comité : le Sénat devant être le premier à connaître le résultat des travaux demandés.

Les fuites sont, comme nous le savons tous, survenues pendant la première semaine de juin 2015. Elles violaient le cadre confidentiel dans lequel la vérification était effectuée. Je tiens aussi à signaler que les fuites ont placé de nombreux sénateurs dans une situation très délicate, devant répondre à des questions sur les détails d’un document qui n’avait pas encore été déposé au Sénat et qui n’avait pas été rendu public. Ce n’était pas correct.

Pour être traitée selon les dispositions particulières du chapitre 13 du Règlement, la question de privilège doit remplir les quatre critères énoncés à l’article 13-2(1).

Premièrement, elle « est soulevée à la première occasion ». Comme je l’ai mentionné le 8 décembre 2015, dans ma décision sur un recours au Règlement, notre Règlement et nos usages ne prévoient pas le rétablissement automatique des questions de privilège à la session suivante. Elles doivent être soulevées à nouveau à la nouvelle session. Les deux premiers jours de séance de la 42e législature, les 3 et 4 décembre, ont été consacrés aux cérémonies et procédures traditionnelles de l’ouverture d’une nouvelle législature. Par conséquent, la sénatrice Hervieux-Payette a respecté le processus, dans sa forme actuelle, et a agi le plus rapidement possible.

Je tiens à signaler de nouveau, cependant, que si les honorables sénateurs estiment qu’il pourrait exister un processus de traitement des questions de privilège en suspens qui soit meilleur et plus efficace, il leur appartient d’établir un autre mécanisme. Cela pourrait sans doute se faire au moyen d’une recommandation du comité du Règlement. Il revient aux honorables sénateurs d’apporter les changements voulus.

Selon le deuxième critère, la question de privilège « se rapporte directement aux privilèges du Sénat, d’un de ses comités ou d’un sénateur ». Comme il a déjà été expliqué, la vérification a été effectuée à la demande du Sénat, qui s’attendait à recevoir en premier le rapport en découlant. Il faut également noter que les fuites concernaient un rapport contenant des renseignements de nature délicate sur chacun des sénateurs. Tout comme le Sénat considère que la fuite de rapports de comité est une question grave, je crois que la fuite de ce rapport de vérification remplit le deuxième critère.

Troisièmement, la question de privilège « vise à corriger une atteinte grave et sérieuse ». Dans ce cas-ci, la réponse découle de celle donnée à la deuxième question. Le Sénat aurait dû recevoir en premier le rapport de vérification; le troisième critère est donc rempli.

Enfin, la question de privilège « cherche à obtenir une réparation que le Sénat est habilité à accorder et qui ne peut vraisemblablement être obtenue par aucune autre procédure parlementaire ». La sénatrice Hervieux-Payette a indiqué qu’elle était prête à proposer une motion appropriée et, vu les graves conséquences de ces fuites, cette façon de procéder est raisonnable.

À ce stade du processus, le Président décide si la question de privilège semble avoir un fondement raisonnable à première vue. Le sénateur qui a soulevé la question a ainsi la possibilité de proposer une motion, sur laquelle le Sénat lui-même se prononcera.

Le 5 juin 2015, vers la fin de la législature précédente, il a été établi que la question de privilège liée aux fuites du rapport concerné était fondée à première vue. Je suis d’avis que, pour les raisons que je viens d’énoncer, il est raisonnable de craindre que les fuites entourant la divulgation du rapport de vérification aient pu porter atteinte aux privilèges et aux droits du Sénat en tant qu’institution et à ceux de chaque sénateur. Par conséquent, j’en arrive à la même conclusion qu’en juin dernier. La question de privilège est jugée fondée à première vue et, conformément à l’article 13-6(1), la sénatrice Hervieux-Payette peut proposer sa motion maintenant. Le débat, cependant, ne commencera qu’à 20 heures ou lorsque l’ordre du jour aura été épuisé, selon la première éventualité.

 

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