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Alors que d’autres pays bonifient leur offre de services, le Canada augmente son nombre de fonctionnaires : sénateur Colin Deacon

Un clavier blanc et argent sur lequel se trouvent deux touches spéciales : une touche carrée arborant le drapeau du Canada et une touche rectangulaire sur laquelle on peut lire le mot « services ».

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Les gouvernements du monde entier augmentent leur offre de services numériques à une vitesse vertigineuse. Pour leur part, les administrations municipales, provinciales, territoriales et fédérales du Canada ont accueilli 202 000 fonctionnaires supplémentaires uniquement l’année dernière. Le nombre d’employés fédéraux par tranche de 1 000 Canadiens n’a jamais été aussi élevé depuis 30 ans.

Il y a environ 30 ans, les appareils photo étaient encombrants, couteux et ne pouvaient stocker qu’un maximum de 36 photos. Aujourd’hui, les appareils photo sont intégrés à des téléphones intelligents et permettent d’immortaliser, de sauvegarder et de transmettre facilement des milliers d’images. La population canadienne a aussi beaucoup changé au cours des 30 dernières années. Nous passons aujourd’hui plus de six heures en ligne chaque jour. Les outils numériques nous aident à planifier nos déplacements, à faire livrer nos repas, à programmer nos journées et à nous mettre en contact avec le monde qui nous entoure.

Le numérique est maintenant la norme pour tout, sauf pour la prestation de services gouvernementaux au Canada.

Pourtant, les systèmes numériques sont moins couteux et offrent beaucoup plus de possibilités. Ils ont aussi la faveur des citoyens. En effet, en 2021, alors que moins de 25 % des services du gouvernement fédéral étaient accessibles en ligne, 81 % des citoyens ont choisi l’option numérique lorsqu’elle leur était offerte. Si le fossé numérique vous inquiète, pensez au simple fait que lorsque davantage de personnes utiliseront une solution virtuelle, les fonctionnaires auront plus de temps pour aider ceux qui ne se servent pas des outils en ligne.

Les Canadiens ne savent pas à quel point ils sont désavantagés. L’Ukraine a mis en place une plateforme numérique nationale appelée Diia dont l’utilité est si grande que des licences ont été obtenues par d’autres pays. L’Ukraine a réalisé cet exploit tout en livrant une guerre pour défendre sa propre existence. Dans son budget de 2024, le gouvernement du Canada a annoncé la création d’un portail d’authentification unique pour les services gouvernementaux et le versement de 3 milliards de dollars supplémentaires pour moderniser les régimes de gestion de l’assurance-emploi et de la sécurité de la vieillesse précisément au moment où ces derniers atteignent eux-mêmes l’âge de la retraite au Canada.

Ces mesures ne suffiront pas à nous faire remonter dans le classement des gouvernements numériques des Nations Unies : nous sommes passés de la troisième à la 32e place non pas parce que nous avons régressé, mais parce que le reste du monde nous a devancés.

Le fait de négliger les technologies de l’information dans le secteur public constitue également un risque pour la sécurité. Les ennemis numériques diffusent de la désinformation pour diviser les voisins, piratent des infrastructures critiques obsolètes, escroquent les plus vulnérables et érodent la confiance dans nos systèmes financiers. L’intelligence artificielle générative contribue à aggraver la situation.

Certes, il faudra réaliser des investissements importants pour rattraper les autres pays du G20, mais l’embauche d’un nombre jamais vu de fonctionnaires représente aussi des couts exorbitants et permanents. Pour changer de cap, nous devons nous engager à :

  • Faire des compétences numériques une exigence pour obtenir une promotion au sein du gouvernement. Comment pourrons-nous avancer si nos dirigeants n’ont pas les compétences, l’expérience et la confiance nécessaires pour garantir la prestation de services efficaces?
  • Réaliser rapidement des gains simples et utiles. Les grands projets sont beaucoup plus susceptibles d’échouer que les petits. Démontrons que nous sommes capables de produire rapidement des résultats concrets pour rétablir la confiance. La mise en œuvre rapide de la Prestation canadienne d’urgence du Canada est la preuve que nous sommes capables d’obtenir des résultats concrets en temps voulu.
  • Créer une interface gouvernementale unique. La conception des services doit être axée sur les besoins des citoyens et non sur les responsabilités des ministères. Voilà une leçon que 31 pays ont déjà mise en pratique.
  • Modifier les comportements des citoyens et du gouvernement. Toute la population canadienne devra réapprendre à interagir avec le gouvernement grâce aux nouveaux outils qui seront mis en ligne. Le jeu en vaut la chandelle : en Estonie, l’adoption d’une simple règle — le gouvernement ne peut pas demander qu’on lui fournisse les mêmes renseignements plus d’une fois — a permis de réduire la paperasse à l’échelle du secteur public.
  • Faire preuve de transparence en ce qui concerne les dépenses, les échéanciers et le rendement. Il est clair que nous investissons beaucoup trop dans la transformation et que nous ne recevons pas assez en retour. Pourtant, personne n’a une idée précise des couts. Désormais, chaque initiative doit commencer par une définition claire de ce qui constitue un succès. Ensuite, des indicateurs simples doivent être rendus publics tout au long du processus de mise en œuvre.
  • Laisser les leaders accomplir le travail difficile. Il ne saurait y avoir de responsabilités en l’absence d’autorité. Si l’on confie à quelqu’un la tâche d’apporter des changements difficiles, voire impopulaires, il est indispensable de lui accorder le pouvoir, les ressources et la flexibilité nécessaires pour fournir des services axés sur les citoyens. Il s’agit de la seule méthode efficace pour donner aux talents numériques les plus compétents le désir de travailler pour le secteur public.
  • Créer et réutiliser des modules standards. Il faut créer des « modules de construction » logiciels standards afin d’accélérer et de faciliter la mise au point de services et d’en renforcer la sécurité, puis insister pour que tous les ministères les adoptent. Il serait judicieux de geler les budgets des organisations qui refuseront de se conformer à cette méthode.

En 1993, dans son discours de démission, l’ancien premier ministre Brian Mulroney a fait la déclaration suivante : « Qu’on soit d’accord ou non avec nos solutions, personne ne peut nous accuser d’avoir voulu échapper à nos responsabilités en esquivant les questions les plus controversées de notre temps. »

Nous avons esquivé le plus grand changement des méthodes gouvernementales de notre époque. C’est la puissance numérique de chaque pays qui permettra de déterminer lesquels seront les plus prospères au cours du siècle à venir. Si nous voulons être du nombre, il faut être à l’avant-garde du numérique.

L’heure est venue de nous lancer.

Le sénateur Colin Deacon représente la Nouvelle-Écosse au Sénat.

Cet article a été publié le 6 mai 2024 dans le Hill Times (en anglais seulement).

Les gouvernements du monde entier augmentent leur offre de services numériques à une vitesse vertigineuse. Pour leur part, les administrations municipales, provinciales, territoriales et fédérales du Canada ont accueilli 202 000 fonctionnaires supplémentaires uniquement l’année dernière. Le nombre d’employés fédéraux par tranche de 1 000 Canadiens n’a jamais été aussi élevé depuis 30 ans.

Il y a environ 30 ans, les appareils photo étaient encombrants, couteux et ne pouvaient stocker qu’un maximum de 36 photos. Aujourd’hui, les appareils photo sont intégrés à des téléphones intelligents et permettent d’immortaliser, de sauvegarder et de transmettre facilement des milliers d’images. La population canadienne a aussi beaucoup changé au cours des 30 dernières années. Nous passons aujourd’hui plus de six heures en ligne chaque jour. Les outils numériques nous aident à planifier nos déplacements, à faire livrer nos repas, à programmer nos journées et à nous mettre en contact avec le monde qui nous entoure.

Le numérique est maintenant la norme pour tout, sauf pour la prestation de services gouvernementaux au Canada.

Pourtant, les systèmes numériques sont moins couteux et offrent beaucoup plus de possibilités. Ils ont aussi la faveur des citoyens. En effet, en 2021, alors que moins de 25 % des services du gouvernement fédéral étaient accessibles en ligne, 81 % des citoyens ont choisi l’option numérique lorsqu’elle leur était offerte. Si le fossé numérique vous inquiète, pensez au simple fait que lorsque davantage de personnes utiliseront une solution virtuelle, les fonctionnaires auront plus de temps pour aider ceux qui ne se servent pas des outils en ligne.

Les Canadiens ne savent pas à quel point ils sont désavantagés. L’Ukraine a mis en place une plateforme numérique nationale appelée Diia dont l’utilité est si grande que des licences ont été obtenues par d’autres pays. L’Ukraine a réalisé cet exploit tout en livrant une guerre pour défendre sa propre existence. Dans son budget de 2024, le gouvernement du Canada a annoncé la création d’un portail d’authentification unique pour les services gouvernementaux et le versement de 3 milliards de dollars supplémentaires pour moderniser les régimes de gestion de l’assurance-emploi et de la sécurité de la vieillesse précisément au moment où ces derniers atteignent eux-mêmes l’âge de la retraite au Canada.

Ces mesures ne suffiront pas à nous faire remonter dans le classement des gouvernements numériques des Nations Unies : nous sommes passés de la troisième à la 32e place non pas parce que nous avons régressé, mais parce que le reste du monde nous a devancés.

Le fait de négliger les technologies de l’information dans le secteur public constitue également un risque pour la sécurité. Les ennemis numériques diffusent de la désinformation pour diviser les voisins, piratent des infrastructures critiques obsolètes, escroquent les plus vulnérables et érodent la confiance dans nos systèmes financiers. L’intelligence artificielle générative contribue à aggraver la situation.

Certes, il faudra réaliser des investissements importants pour rattraper les autres pays du G20, mais l’embauche d’un nombre jamais vu de fonctionnaires représente aussi des couts exorbitants et permanents. Pour changer de cap, nous devons nous engager à :

  • Faire des compétences numériques une exigence pour obtenir une promotion au sein du gouvernement. Comment pourrons-nous avancer si nos dirigeants n’ont pas les compétences, l’expérience et la confiance nécessaires pour garantir la prestation de services efficaces?
  • Réaliser rapidement des gains simples et utiles. Les grands projets sont beaucoup plus susceptibles d’échouer que les petits. Démontrons que nous sommes capables de produire rapidement des résultats concrets pour rétablir la confiance. La mise en œuvre rapide de la Prestation canadienne d’urgence du Canada est la preuve que nous sommes capables d’obtenir des résultats concrets en temps voulu.
  • Créer une interface gouvernementale unique. La conception des services doit être axée sur les besoins des citoyens et non sur les responsabilités des ministères. Voilà une leçon que 31 pays ont déjà mise en pratique.
  • Modifier les comportements des citoyens et du gouvernement. Toute la population canadienne devra réapprendre à interagir avec le gouvernement grâce aux nouveaux outils qui seront mis en ligne. Le jeu en vaut la chandelle : en Estonie, l’adoption d’une simple règle — le gouvernement ne peut pas demander qu’on lui fournisse les mêmes renseignements plus d’une fois — a permis de réduire la paperasse à l’échelle du secteur public.
  • Faire preuve de transparence en ce qui concerne les dépenses, les échéanciers et le rendement. Il est clair que nous investissons beaucoup trop dans la transformation et que nous ne recevons pas assez en retour. Pourtant, personne n’a une idée précise des couts. Désormais, chaque initiative doit commencer par une définition claire de ce qui constitue un succès. Ensuite, des indicateurs simples doivent être rendus publics tout au long du processus de mise en œuvre.
  • Laisser les leaders accomplir le travail difficile. Il ne saurait y avoir de responsabilités en l’absence d’autorité. Si l’on confie à quelqu’un la tâche d’apporter des changements difficiles, voire impopulaires, il est indispensable de lui accorder le pouvoir, les ressources et la flexibilité nécessaires pour fournir des services axés sur les citoyens. Il s’agit de la seule méthode efficace pour donner aux talents numériques les plus compétents le désir de travailler pour le secteur public.
  • Créer et réutiliser des modules standards. Il faut créer des « modules de construction » logiciels standards afin d’accélérer et de faciliter la mise au point de services et d’en renforcer la sécurité, puis insister pour que tous les ministères les adoptent. Il serait judicieux de geler les budgets des organisations qui refuseront de se conformer à cette méthode.

En 1993, dans son discours de démission, l’ancien premier ministre Brian Mulroney a fait la déclaration suivante : « Qu’on soit d’accord ou non avec nos solutions, personne ne peut nous accuser d’avoir voulu échapper à nos responsabilités en esquivant les questions les plus controversées de notre temps. »

Nous avons esquivé le plus grand changement des méthodes gouvernementales de notre époque. C’est la puissance numérique de chaque pays qui permettra de déterminer lesquels seront les plus prospères au cours du siècle à venir. Si nous voulons être du nombre, il faut être à l’avant-garde du numérique.

L’heure est venue de nous lancer.

Le sénateur Colin Deacon représente la Nouvelle-Écosse au Sénat.

Cet article a été publié le 6 mai 2024 dans le Hill Times (en anglais seulement).

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