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Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule 9 - Témoignages


Ottawa, le jeudi 6 février 1997

Le comité sénatorial de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles auquel a été renvoyé le projet de loi C-29 régissant le commerce interprovincial et l'importation à des fins commerciales de certaines substances à base de manganèse, se réunit aujourd'hui à 9 h 10 pour examiner la teneur du projet de loi.

Le sénateur Ron Ghitter (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Honorables sénateurs, nous avons aujourd'hui un panel composé de représentants de Santé Canada et de Transports Canada. Nous commencerons par Santé Canada. Les membres du comité poseront leurs questions après l'exposé de chacun des ministères.

Allez-y.

M. Daniel Krewski, directeur intérimaire, Bureau des dangers des produits chimiques, Santé Canada: Monsieur le président, je suis le directeur intérimaire du Bureau des dangers des produits chimiques de la Direction de l'hygiène du milieu de Santé Canada. Je suis spécialisé dans le domaine de l'évaluation des risques pour la santé et j'ai siégé à des comités nationaux et internationaux chargés d'étudier les risques pour la santé de divers polluants environnementaux. Plus récemment, j'ai été affecté au comité sur les pesticides dans l'alimentation des nourrissons et des enfants de la National Academy of Sciences des États-Unis, dont les travaux, de nature scientifique, portaient sur les risques pour la santé et sur les questions de réglementation qui en résultent, situation quelque peu analogue à celle qui entoure le MMT.

Je tiens d'abord à souligner que le ministre de la Santé appuie le projet de loi qui vise à interdire la vente et le commerce interprovincial de l'additif pour essence appelé MMT. En effet, nous avons appris que le manganèse provenant du MMT pouvait provoquer une panne des systèmes de diagnostic actuellement installés à bord de certains nouveaux véhicules pour contrôler la combustion et réduire les émissions des automobiles. Une telle panne pourrait donner lieu à la libération accrue dans l'atmosphère de divers produits de combustion, comme des oxydes d'azote, des hydrocarbures dont le benzène, et le monoxyde de carbone, bien que l'information sur les changements exacts qui se produiront soit contradictoire.

Or, la pollution de l'air, plus particulièrement celle qui est due à l'ozone et à divers types de particules, a déjà sur la santé des effets nuisibles qui se traduisent par une hausse du nombre des hospitalisations dans les principales villes canadiennes. Les émissions des véhicules sont en grande partie à l'origine de cette pollution de l'air dans de nombreuses régions du pays. Toute mesure visant à réduire les émissions des véhicules mérite donc d'être appuyée.

Comme beaucoup d'entre vous le savent, en décembre 1994, Santé Canada a réalisé une évaluation des risques portant particulièrement sur les effets sur la santé du manganèse produit par la combustion du MMT. Dans cette évaluation, on concluait principalement que les émissions de manganèse à partir du MMT étaient peu susceptibles de menacer la santé des différents groupes de la population.

Les concentrations moyennes de manganèse dans l'air ambiant des régions urbaines étaient inférieures à la moitié d'une concentration de référence de 0,1 microgramme par mètre cube. Des estimations de l'exposition des humains basées sur les résultats de cette surveillance ont montré que dans le cas de 98-99 p. 100 de la population, l'exposition était inférieure à la valeur de référence. Dans le rapport, on n'a pas cherché à évaluer l'effet du MMT sur les autres émissions des véhicules liées à la combustion, au sujet duquel l'information est très rare, ni à examiner les effets de substituts potentiels du MMT sur les émissions. Ces derniers font l'objet d'évaluations à long terme, à la fois par Santé Canada et par Environnement Canada.

Par ailleurs, il n'est pas du ressort de Santé Canada de vérifier si le MMT endommage l'équipement anti-pollution des voitures. Les questions de cette nature sont laissées aux agents d'Environnement Canada qui ont les compétences nécessaires pour porter de tels jugements.

Aucune nouvelle réglementation visant à limiter les émissions des voitures ne pourra être mise en place tant que la question du MMT ne sera pas résolue. Bien que les effets précis de l'élimination du MMT sur les émissions soient incertains, le gouvernement a décidé qu'il était temps d'adopter une attitude proactive et préventive, celle d'éliminer graduellement les additifs de MMT.

L'évaluation des risques entreprise par Santé Canada a permis d'examiner les données existant sur la neurotoxicité du manganèse inhalé chez les humains et les animaux et, à partir de cela, en incorporant certains facteurs d'incertitude, on a sélectionné la concentration de référence de 0,1 microgramme par mètre cube. On a en effet jugé que c'était un niveau d'exposition ne présentant pas de risques neurologiques trop importants quel que soit le groupe d'âge de la population.

Notons que les niveaux de manganèse les plus bas liés à des problèmes neurologiques ont été constatés chez des travailleurs exposés au manganèse dans leur métier et qui, par rapport au reste de la population, sont relativement en bonne santé. Ces niveaux étaient plusieurs centaines de fois supérieurs à la concentration de référence. Aussi a-t-il fallu appliquer des facteurs élevés d'incertitude pour assurer la protection de groupes de population plus prédisposés. Bien que d'autres questions de santé, telles que les problèmes respiratoires, aient été liées à l'exposition professionnelle au manganèse, les effets neurologiques sont les plus sensibles, et un critère tiré de ces effets pourrait également s'appliquer à d'autres considérations de santé.

La concentration de manganèse dans l'air est habituellement dans les villes d'environ 40 p. 100 supérieure à la concentration de référence, même sans source de combustion de MMT, étant donné que le manganèse est un composant normal et assez abondant de la saleté et de la poussière qui est incorporé dans le ciment et d'autres matériaux de construction. L'usure, plus la rentrée de poussière dans l'air due à l'activité humaine garantit que les concentrations de manganèse dans l'atmosphère sont plus fortes dans les villes que dans les régions non urbaines. Il y a aussi des sources artificielles telles que la sidérurgie et la fonderie. L'acier contient 1 p. 100 de manganèse.

L'exposition au manganèse contenu dans l'atmosphère a été calculée pour cinq groupes d'âge dans deux villes canadiennes sans source artificielle importante autre que le MMT, et dans deux villes affligées de pollution industrielle au manganèse... dans ce cas, venant d'aciéries. L'exposition a été calculée à partir des résultats donnés par les appareils de contrôle en considérant dans chaque ville la plus forte concentration moyenne de manganèse afin de présenter le pire scénario et elle a été ajustée en fonction de l'exposition personnelle. Les chiffres ont été comparés ensuite à la concentration de référence que nous avions calculée.

L'exposition personnelle de 98 à 99 p. 100 de la population, tous groupes d'âge confondus, s'est révélée inférieure à la concentration de référence dans les deux villes où la principale source artificielle de pollution était le MMT, à savoir Montréal, au Québec, et Saint John, au Nouveau-Brunswick. On a ainsi conclu que parce que l'exposition était trop faible, le MMT ne risquait pas beaucoup de présenter un risque pour la santé. Ceci a été confirmé par d'autres renseignements indiquant que les concentrations atmosphériques de manganèse dans ces villes n'avaient pas augmenté entre 1986 et 1992, alors que les ventes de MMT avaient presque doublé.

Comme pour la plupart des évaluations de risque, on s'est montré très prudent, tant pour déterminer la concentration toxicologique de référence que pour l'évaluation de l'exposition. Une concentration de référence très prudente de 0,1 microgramme par mètre cube d'air a ainsi été retenue, en tenant compte de l'atomicité du manganèse résultant de la combustion de MMT, de la toxicité accrue du manganèse inhalé par rapport au manganèse ingéré et des différences et de la prédisposition de la population selon, par exemple, l'âge.

L'Organisation mondiale de la santé, dans une évaluation toute récente des mêmes données, a sélectionné une concentration de référence un peu plus forte de 0,15 microgramme par mètre cube pour établir ses lignes directrices concernant la qualité de l'air. Ceci nous confirme que nos critères de référence sont très prudents.

En ce qui concerne l'exposition, le rapport a considéré le pire scénario, comme je l'ai déjà dit. Les concentrations extérieures ambiantes ne reflètent pas forcément l'exposition des gens qui ont des activités différentes et ne passent pas le même temps à l'intérieur ou à se déplacer d'un endroit à l'autre. Étant donné que nous n'avions pas les données personnelles concernant l'exposition pour un échantillonnage représentatif assez important de la population canadienne, nous avons utilisé les données tirées d'un échantillonnage représentatif de la région de Los Angeles aux États-Unis afin d'évaluer l'exposition personnelle à l'extrémité supérieure de la courbe de l'exposition, à partir des données de contrôle canadiennes plutôt que des données de base du modèle américain. Les conclusions préliminaires d'une étude importante sur l'exposition personnelle à Toronto, étude qui se termine mais qui n'a pas encore été publiée, semblent valider l'évaluation de Santé Canada, selon laquelle la grande majorité de la population est exposée à des concentrations de manganèse très faibles, qui sont dans 99 p. 100 des cas inférieures au taux de concentration de référence.

Une bonne partie de notre opposition au MMT pour motifs de santé est fondée sur la crainte que le manganèse du MMT soit comparable au plomb que contenait l'essence dans les années 70 et les années 80. Il y a toutefois plusieurs différences critiques. Le plomb est toxique à tous les taux de concentration alors que le manganèse est, en petite quantité, un élément essentiel aux cellules de notre corps. Le plomb est toxique par ingestion et par inhalation alors que le manganèse n'est pas toxique par ingestion, même en quantité assez importante. L'exposition au plomb des jeunes enfants était en grande partie un effet secondaire de la contamination par la saleté et la poussière ingérées en quantité suffisante pour faire monter les taux sanguins dans ce groupe d'âge.

Enfin, le plomb est ajouté à l'essence dans des proportions environ 16 fois supérieures à la quantité d'additif au manganèse, ce qui donnait des concentrations atmosphériques de plomb supérieures et des dépôts au sol supérieurs. Néanmoins, face à la gravité des effets, et à certaines des incertitudes inhérentes à toute évaluation de risque, il semble normal d'invoquer le principe de prudence en examinant les options de réglementation visant à limiter l'exposition à cette substance.

En conclusion, je dirai que l'évaluation de Santé Canada, fondée sur une évaluation prudente des données scientifiques, conclut que les risques pour la santé liés aux émissions de manganèse résultant de l'utilisation du MMT dans l'essence canadienne sont négligeables. Toutefois, nous n'avons pas, pour cette évaluation, considéré l'effet du MMT sur d'autres émissions provenant de la combustion.

Les émissions d'automobile réglementées par la loi sur la sécurité des véhicules automobiles, inclut les oxydes d'azote, les oxydes de carbone et les hydrocarbures. Les particules ne sont réglementées que pour les véhicules lourds au diesel mais elles peuvent être des produits secondaires d'émissions primaires, tout comme l'ozone. Les émissions non réglementées incluent l'oxyde de carbone, les composés souffrés, le formaldéhyde et les composés organiques volatiles, tels que le benzène. Tout ceci, ainsi que d'autres polluants atmosphériques résultant de la combustion, pourraient augmenter si l'on maintient le MMT. Plusieurs d'entre eux, tels que les particules, l'ozone et peut-être l'oxyde de carbone, ont été liés à un taux de mortalité et à une hospitalisation accrue dans trois continents, et notamment dans plusieurs villes canadiennes. Ces résultats indiquent que toutes les mesures possibles doivent être prises pour réduire la pollution atmosphérique. Toute mesure, telle que ce projet de loi, qui vise en fait à réduire les émissions des véhicules, doit donc être soutenue.

Le président: Merci de votre exposé, monsieur.

Le sénateur Kenny: Ai-je bien compris que vous disiez que vous n'avez pas considéré dans votre étude les effets du MMT sur le système de diagnostic intégré?

M. Krewski: En effet.

Le sénateur Kenny: Le ministère a-t-il un avis sur l'augmentation éventuelle d'émissions des véhicules en cas de panne de ce système?

M. Krewski: Nos collègues d'Environnement Canada nous ont dit que si ce système venait à tomber en panne, cela pourrait augmenter les émissions d'oxydes d'azote, d'hydrocarbures, et cetera.

Le sénateur Kenny: Tout bien considéré, votre ministère et vous-même, personnellement, êtes-vous favorables à l'adoption de ce projet de loi?

M. Krewski: Oui.

Le sénateur Kenny: Merci.

Le sénateur Taylor: Avez-vous un avis sur les substituts du MMT, tels que le MTBE, l'éthanol et le méthanol?

M. Krewski: Le MTBE a été évalué en 1992 et il a été considéré, en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, comme une substance prioritaire; à l'époque, il avait été déclaré non toxique, ni pour la santé ni pour l'environnement. D'autres données sur le MTBE sont sorties depuis lors, et nous travaillons actuellement avec les responsables du Programme international sur la sécurité des produits chimiques afin de réviser notre évaluation du MTBE. Une réunion du groupe international d'experts est prévue en mars, et nous espérons ainsi parvenir à une conclusion.

Le sénateur Taylor: Et pour ce qui est de l'éthanol et du méthanol?

M. Krewski: On évalue continuellement l'éthanol. Peut-être que Mme Wood, pourrait nous dire où l'on en est.

Mme Grace Wood, évaluateur, Section de la pollution de l'air, Division de la surveillance et des critères, Bureau des dangers des produits chimiques, Santé Canada: Nous ne nous inquiétons pas de l'éthanol en soi. Ce qui nous inquiète, ce sont les aldéhydes de l'éthanol et du méthanol. Nous sommes en train d'évaluer l'effet de l'addition d'éthanol et de méthanol sur les aldéhydes en particulier, et sur d'autres choses.

Le sénateur Taylor: Si j'ai bien compris, vous n'avez pas relevé de concentration de manganèse dans l'atmosphère. Toutefois, y a-t-il un danger pour les mécaniciens, par exemple, qui travaillent à proximité de fortes concentrations de manganèse enfermées dans des filtres?

Mme Wood: Cela ne présente pas de danger.

Le sénateur Taylor: Le manganèse s'accumule-t-il dans le corps tel que le mercure ou le plomb?

Mme Wood: Non.

Le sénateur Taylor: Nous avons appris ces deux derniers jours que le manganèse est ajouté en quantité pouvant aller de 8 milligrammes par litre à 18 milligrammes par litre. Lorsque vous avez fait vos tests, saviez-vous combien de milligrammes par litre il y avait dans l'essence?

Mme Wood: Oui, nous avions un taux moyen. Je crois que c'était environ 10 milligrammes.

Le sénateur Taylor: Avez-vous pu voir si le maximum de 18 milligrammes représentait une différence?

Mme Wood: Non, parce que nous savions que dans les deux villes où nous avons effectué ces tests, l'essence en contenait environ 10 milligrammes.

Le sénateur Taylor: L'essence que l'on achète au Canada, contient de 8 à 18 milligrammes de manganèse par litre. Si vos échantillons ne contenaient que 8 milligrammes par litre, c'est-à-dire la moitié du maximum, vos résultats ne sont peut-être pas exacts.

M. Krewski: Dans l'évaluation effectuée par le ministère en vue d'obtenir les estimations les plus exactes possible d'exposition, nous avons utilisé un taux moyen de manganèse pour le MMT contenu dans l'essence, taux qui correspondait à la moyenne à l'époque. Si l'on passe de 10 à 18, on augmente l'exposition des humains.

Il ne faut pas oublier non plus que l'on a fait certaines suppositions assez prudentes dans deux domaines qui pourraient suffire à compenser cela. D'une part, nous avons utilisé le pire scénario de contrôle ambiant dans les villes canadiennes, et nous avons évalué la concentration de manganèse dans l'atmosphère. D'autre part, nous avons utilisé les points toxicologiques les plus sensibles, lorsque nous avons fixé la concentration de référence. Je ne pense donc pas, qu'un facteur de 18, plutôt que 10, serait critique dans cette évaluation.

Le sénateur Taylor: Il semble assez clair que l'utilisation du MMT réduit l'oxyde d'azote, mais accroît les émissions d'hydrocarbures. Avez-vous effectué des études permettant de déterminer les effets de l'augmentation d'émissions d'hydrocarbures, quand on utilise du MMT, puisque cela diminue les oxydes d'azote, mais accroît les émissions d'hydrocarbures?

M. Krewski: Le ministère de la Santé n'a pas fait d'étude permettant de savoir ce que serait la différence dans les émissions si l'on modifiait l'utilisation des MMT. Nous avons prouvé dans d'autres études de ces polluants traditionnels, que, si les émissions augmentent du fait d'une panne dans le système de diagnostic intégré due aux MMT et que cela augmentait les autres polluants traditionnels, cela provoquerait vraisemblablement une augmentation des dangers pour la santé de la population.

Le sénateur Taylor: Une augmentation des émissions d'hydrocarbures ne serait pas recommandée, n'est-ce pas?

M. Krewski: En effet.

Le sénateur Bosa: Quand le ministère de la Santé a-t-il appris que le MMT pourrait être une substance nocive?

M. Krewski: Nous n'avons pas conclu que le MMT en soi, ni le manganèse émis du fait du MMT, est nocif. Les problèmes sont les autres polluants qui sortiraient des gaz d'échappement si le système de diagnostic intégré des automobiles devait tomber en panne.

Le sénateur Bosa: Quand le ministère a-t-il commencé à surveiller le MMT?

M. Krewski: Le ministère a terminé cette évaluation en 1994.

Mme Wood: C'est la quatrième évaluation entreprise par le ministère. La première a eu lieu en 1978, année où l'on n'utilisait pas beaucoup le MMT, tout en prévoyant qu'il serait utilisé.

Le sénateur Bosa: Avez-vous étudié précisément les effets du MMT dans l'atmosphère?

Mme Wood: Oui.

Le sénateur Bosa: Et vous surveillez constamment non seulement le MMT mais d'autres substances?

Mme Wood: Non. Nous n'avons pas contrôlé. C'est Environnement Canada qui le fait; nous considérons les répercussions sur la santé.

Le sénateur Bosa: Il n'y a donc rien qui prouve que le MMT soit nocif en soi?

Mme Wood: Non.

M. Krewski: C'est purement la conclusion de l'évaluation la plus récente de Santé Canada en 1994.

Le sénateur Whelan: Cela ressemble beaucoup à ce que l'on entendait dire lorsque l'on a commencé d'utiliser le plomb. Rien n'avait prouvé que cela serait nocif, et cetera. C'est pourquoi je m'inquiète des contradictions que je perçois entre ce que vous dites et ce que je lis dans ce document. J'en ai parlé à beaucoup de chercheurs dans les universités, qui travaillent là-dessus. Chacun s'inquiète du fait que nous utilisons ce produit sans en savoir plus.

À la page 2 de votre document, vous dites qu'il y a une possibilité d'exposition au MMT durant le processus de production et durant le mélange et le transfert de MMT. Vous parlez des gens qui travaillent dans de telles usines. Vous dites, d'autre part, que puisque le MMT est très toxique, les fabricants recommandent de prendre des précautions très strictes à ces différentes étapes.

Mme Wood: C'est exact. Le MMT lui-même est très toxique.

Le sénateur Whelan: Un docteur m'a dit qu'il était plus dangereux de se laver les mains à l'essence, ce que nous faisions souvent, nous agriculteurs, que de se les laver avec un insecticide ou un pesticide quelconque.

Mme Wood: C'est plus dangereux parce que l'essence elle-même est toxique. D'abord, je ne recommanderais à personne de se laver les mains à l'essence. Si quelqu'un le fait, toutefois, le plomb tétraéthylique est beaucoup plus dangereux pour lui que le manganèse, dont il n'y a qu'une concentration infime.

Le sénateur Whelan: Monsieur le président, on ne nous a jamais dit de prendre des précautions. Nous faisions tout le travail mécanique à la ferme. On ne nous a jamais indiqué, par exemple, qu'il ne fallait pas se laver les mains à l'essence.

Je passe maintenant à un autre produit chimique qu'on nous disait parfaitement inoffensif, à savoir le DDT. Nous avons appris des années plus tard que c'était une des pires choses auxquelles ait été exposé l'homme.

J'ai donc certaines réserves assez sérieuses quand Santé Canada semble nous dire: «Il y en a un petit peu, mais nous ne pensons pas que ce soit suffisant pour faire mal». Vous dites, d'un côté, que vous êtes favorables à un projet de loi, et de l'autre qu'il ne faut pas s'inquiéter.

M. Krewski: Pouvons-nous faire la distinction entre le MMT lui-même et le manganèse, qui résulte de la combustion du MMT? Il est certain que le MMT lui-même est fortement toxique. La plupart des observations que nous avons faites tout à l'heure portait sur les émissions de manganèse et l'exposition de la population canadienne au manganèse. Dans ce cas, d'après nos évaluations, il est clair que les risques que représente le manganèse ne sont pas grand pour la population.

Le sénateur Whelan: C'est ce qu'on a dit à propos du plomb en 1984.

Mme Wood: C'est ce que l'on disait jusqu'en 1980 à peu près. Il y a eu une grande bagarre avec le plomb.

Le sénateur Whelan: Mais on a eu tort de dire cela jusqu'en 1980.

M. Krewski: Je vous ai signalé certaines des grosses différences entre le plomb et le manganèse. Absorbé en petites quantités, le manganèse est un élément essentiel pour notre corps. Ce n'est pas le cas du plomb. Les données toxicologiques sur le plomb indiquent qu'il provoque des effets neurologiques même dans le cas de très faibles expositions, alors que les données que nous avons sur le manganèse ne l'indiquent pas. Il y a de grosses différences dans les profils toxicologiques du plomb et du manganèse.

Le sénateur Whelan: les docteurs auxquels j'ai parlé ont insisté sur le fait que le manganèse était l'une des pires choses pour ses effets sur le cerveau; et apparemment, par exemple, les mines de manganèse au Chili représentent un danger terrible pour la santé. Les mineurs sont plus exposés, bien sûr, mais comme le Chili a une mauvaise législation ou n'a pas du tout de loi pour protéger les travailleurs, un pourcentage élevé de personnes souffrent de lésions cérébrales.

M. Krewski: S'il y a un niveau élevé d'exposition, c'est vrai.

Le sénateur Whelan: Vous dites que si nous en ajoutons un peu à l'environnement, cela ne nous fera pas de mal; c'est cela?

M. Krewski: La notion essentielle, ici, c'est que pour un agent toxique tel que le manganèse, il est tout à fait probable qu'il existe un niveau d'exposition suffisamment bas, qui ne présente pas de danger sérieux. Notamment parce que le corps renferme de petites quantités de manganèse.

Vous avez également posé la question du MMT. Je veux qu'il soit bien clair que nous faisons une distinction entre le manganèse et le MMT parce que le MMT est fortement toxique et que ce n'était pas l'objet essentiel de l'évaluation que nous faisions.

Le président: Quel rôle jouez-vous lorsque votre ministère étudie des sujets comme le manganèse dans ce contexte?

M. Krewski: L'évaluation de la toxicité des produits chimiques fait partie de la mission de base de Santé Canada. Je suis actuellement responsable du Bureau des dangers des produits chimiques. L'essentiel de notre travail consiste à évaluer en détail les risques présentés par toutes sortes de produits chimiques en matière de sécurité. Ce travail est effectué en vertu de la Loi canadienne de protection de l'environnement. Nous étudions les polluants atmosphériques. Nous participons à la définition d'objectifs nationaux concernant la qualité de l'air ambiant. Nous collaborons à la fixation de normes de sécurité pour les produits chimiques présents dans l'eau potable et à la définition d'objectifs de qualité concernant l'eau potable. Nous travaillons également sur d'autres sujets d'ordre professionnel et environnemental.

Dans chaque évaluation, nous nous efforçons d'étudier toutes les données pertinentes disponibles, c'est-à-dire les données de laboratoire sur la toxicité du produit et les données épidémiologiques sur les populations humaines qui y sont exposées, de façon à en venir à la meilleure conclusion d'ensemble quant aux risques ou à l'innocuité de chaque produit sur lequel nous travaillons.

Le président: Je crois savoir que c'est ce que vous avez fait à quatre reprises en ce qui concerne le manganèse en tant qu'additif dans le MMT.

M. Krewski: C'est exact.

Le président: À chacune des évaluations effectuées entre 1978 et 1994, vous en êtes venus aux mêmes conclusions, n'est-ce pas?

M. Krewski: C'est exact.

Le président: Je suppose que vous n'avez pas étudié les effets du MMT sur les systèmes de diagnostic des voitures, car ce sujet relève de la responsabilité d'Environnement Canada, n'est-ce pas?

M. Krewski: Nous n'avons aucune expertise dans ce genre d'évaluation.

Le président: C'est à Environnement Canada, je suppose, qu'on trouve ce genre d'expertise.

M. Krewski: Oui.

Le président: J'ai ici un document qui a été publié, je crois, en novembre 1992 par la Direction générale de la protection de la santé. Il est intitulé «Questions: le MMT - additif pour essence». Je suppose que votre ministère publie fréquemment des documents de ce genre.

M. Krewski: Ces documents sont publiés selon les besoins lorsque nous souhaitons informer le public sur un sujet particulier.

Le président: C'est votre façon d'informer les Canadiens sur les sujets d'actualité. Celui-ci est intitulé «Le MMT - additif pour essence». Dans le document, vous posez des questions et vous donnez des réponses. La première question de ce document est la suivante:

Le manganèse présent dans le MMT risque-t-il de causer les mêmes problèmes de santé que le plomb?

Vous répondez:

Non. Bien que le plomb et le manganèse soient tous deux des métaux lourds, ils présentent des différences importantes.

Le manganèse est un élément nutritif indispensable; l'organisme en a besoin pour rester en bonne santé. En revanche, on ne connaît aucun effet bénéfique au plomb. Par ailleurs, le manganèse est un élément beaucoup plus abondant; c'est le douzième élément sur la terre par ordre d'abondance.

Est-ce que vous répondriez la même chose aujourd'hui qu'en 1992?

M. Krewski: Oui. Je crois que plusieurs des éléments figuraient dans ma déclaration préliminaire, monsieur le président.

Le président: Dans ce document, vous parlez ensuite du MMT et des problèmes de santé des Canadiens, et vous dites:

D'après les preuves actuelles, les experts de Santé et Bien-Être social Canada peuvent dire que le risque du manganèse provenant du MMT pour la santé humaine est extrêmement faible. Il y a manifestement une marge considérable de sécurité entre l'absorption actuelle de manganèse provenant du MMT et les plus faibles concentrations de manganèse dans l'atmosphère qui aient des effets connus sur la santé.

Dans le même document, on trouve encore ceci:

Ce n'est que dans les installations industrielles, comme certaines mines et certaines installations métallurgiques, que la concentration de manganèse est suffisamment élevée pour avoir des effets toxiques. Les sources industrielles, comme les fonderies et les aciéries [...]

C'est le cas, je suppose, dans les régions de Hamilton et de Windsor...

sont à l'origine d'à peu près 90 p. 100 du manganèse dans l'atmosphère.

Êtes-vous toujours du même avis?

M. Krewski: Effectivement, ces faits sont toujours valides.

Le président: On lit ensuite ceci:

Ce danger n'existe pas dans le cas du manganèse: il y a toujours eu beaucoup plus de manganèse que de plomb dans le sol, plus que les dépôts qui résulteraient éventuellement de l'utilisation du MMT... et les enfants n'en ont subi aucun effet délétère.

Est-ce encore votre avis aujourd'hui?

M. Krewski: Oui.

Le président: La deuxième question est la suivante:

Le manganèse peut-il être toxique?

Voici votre réponse:

Oui, comme de nombreuses substances utiles, le manganèse peut être toxique s'il est absorbé en quantités suffisamment importantes. Ce n'est que dans des installations industrielles comme certaines mines ou affineries que les concentrations de manganèse sont suffisamment élevées pour avoir des effets toxiques.

Est-ce toujours ce que vous pensez aujourd'hui?

M. Krewski: Oui.

Le président: Ensuite, on trouve la question suivante:

Le manganèse est-il plus toxique à respirer qu'à ingérer?

Votre réponse est:

Non.

Est-ce que vous répondez toujours de la même façon aujourd'hui?

Mme Wood: Je pense qu'il faudrait changer la réponse et dire «oui».

Le président: Pouvez-vous nous expliquer cela, s'il vous plaît?

Mme Wood: Le manganèse que l'on respire est absorbé dans une plus grande proportion que celui qu'on ingère. Le manganèse ingéré est absorbé en moyenne dans une proportion de 3 p. 100, tandis que le manganèse respiré peut être absorbé à 60 p. 100.

Le président: Merci. Question suivante:

Pourquoi le MMT n'est-il pas utilisé aux États-Unis?

On trouve une description et, à la fin, l'indication suivante:

L'EPA reconnaît cependant que le MMT réduit fortement les émissions d'oxyde nitreux qui sont à l'origine du smog. On remarquera que les concentrations de manganèse sont à peu près les mêmes dans les villes américaines et dans les villes canadiennes, soit 0,03 ou 0,04 microgramme par mètre cube, malgré la différence dans l'utilisation du MMT entre le Canada et les États-Unis.

Êtes-vous toujours du même avis?

Mme Wood: Oui.

Le président: D'après votre ministère, même si le MMT est utilisé au Canada alors qu'il ne l'est pas aux États-Unis, les quantités de manganèse présentes dans les villes aux États-Unis et au Canada sont à peu près les mêmes et ne nuisent pas à la santé des Américains ni des Canadiens; est-ce bien cela?

M. Krewski: Je pense que c'est un bon résumé.

Le sénateur Taylor: Le manganèse et le MMT sont deux substances différentes. Celui qui manipule un lingot de manganèse n'a rien à craindre, alors que celui qui se trempe les mains dans du MMT risque de graves ennuis.

Peut-il y avoir dans les systèmes d'échappement des voitures des fuites de gaz qui libéreraient du MMT non consommé dans l'atmosphère? Nous savons que le MMT est consommé et que le manganèse en tant que sous-produit disparaît. Il n'y a donc pas de danger. Cependant, le MMT non consommé ou non brûlé présente-t-il un danger lorsqu'il est libéré par le tuyau d'échappement? Après tout, aucun système n'est efficace à 100 p. 100.

Mme Wood: Les fuites sont très rares, apparemment.

Le sénateur Taylor: Avez-vous étudié le manganèse présent dans l'atmosphère, ou le MMT présent dans l'atmosphère?

Mme Wood: Nous avons étudié spécifiquement le MMT présent dans l'atmosphère. D'autres que nous l'ont fait également, et ils n'en ont pas trouvé très souvent. À l'occasion, on peut en trouver dans un garage fermé d'où il ne peut pas s'échapper. Mais le MMT a une demi-vie d'environ 8 secondes, ce qui favorise sa dispersion dans l'atmosphère.

Le sénateur Taylor: Autrement dit, des voitures qui arrivent en ville par une matinée de grand froid et dont le carburant n'est pas intégralement brûlé, ne libèrent pas suffisamment de MMT dans l'atmosphère, même en cinq secondes. C'est pourtant très long lorsqu'on a le nez dans les gaz d'échappement. N'y a-t-il aucun danger? Avez-vous fait des tests à ce sujet?

Mme Wood: Non, nous ne faisons pas ce genre de test.

Le sénateur Taylor: Êtes-vous certain qu'il n'y a pas à s'en préoccuper?

Mme Wood: D'après les résultats négatifs des tests faits par d'autres, je ne pense pas qu'il y ait grand-chose à craindre.

Le sénateur Comeau: Je crois savoir que Santé Canada étudie les polluants atmosphériques dans un certain nombre de villes canadiennes. Ce que l'on craint à propos du MMT, ce sont les polluants atmosphériques résultant des systèmes d'allumage calaminés. Est-ce que Sydney fait partie des villes étudiées, étant donné qu'elle figure parmi les régions canadiennes où l'on travaille beaucoup les métaux lourds.

M. Krewski: Avant de répondre, je voudrais vous signaler que ce n'est pas Santé Canada qui fait l'étude des villes canadiennes, c'est Environnement Canada. Nous travaillons en collaboration très étroite avec ce ministère, car nous utilisons les données de ses études dans nos travaux sur les effets éventuels de la pollution atmosphérique sur la santé.

Nous avons étudié l'effet de la pollution sur la santé dans 16 zones urbaines du pays, et nous avons constaté une corrélation entre les principaux polluants atmosphériques comme l'ozone, les sulfates ou les substances particulaires, et l'augmentation des hospitalisations en urgence pour des maladies cardiorespiratoires graves. On a observé le même résultat dans plusieurs zones urbaines au Canada ainsi qu'à l'étranger.

Ce que je peux vous dire de ce programme de surveillance est fondé sur l'information que nous recevons d'Environnement Canada. Je sais que des observations sont faites à Sydney. Je ne peux pas actuellement vous parler en connaissance de cause des polluants qu'on y a trouvés ni de la durée des observations, mais vous devriez pouvoir obtenir de l'information auprès du Réseau national de surveillance de la pollution atmosphérique par l'intermédiaire d'Environnement Canada.

Le président: Vous avez mentionné le cas des aciéries. Puis-je en déduire qu'une ville comme Hamilton a sans doute un des niveaux les plus élevés de manganèse au Canada?

M. Krewski: Oui. Hamilton et Sault Ste. Marie, où l'on trouve d'importantes sources artificielles qui libèrent du manganèse dans l'atmosphère, indépendamment des véhicules, ont des niveaux élevés de manganèse. D'après nos données, près de la moitié des habitants de ces villes sont exposés à un niveau supérieur au niveau de référence de 0,1 microgramme par mètre cube.

Le président: À Hamilton, est-on au-dessus du niveau toléré de manganèse?

Mme Wood: Oui.

M. Krewski: Cependant, cette concentration n'est pas due aux émissions des véhicules; elle est due au manganèse provenant de l'activité industrielle, notamment des laminoirs.

Le président: Ce manganèse provient-il essentiellement de la sidérurgie?

M. Krewski: Oui, c'est exact.

Le président: Quelle mesure prend-t-on à ce sujet? C'est peut-être dans ce domaine, plutôt que dans celui du MMT, qu'il faudrait légiférer.

M. Krewski: Je crois que l'industrie sidérurgique fait tout son possible pour contrôler les émissions, mais je ne pense pas qu'on ait encore adopté de règlement concernant ce secteur.

Le président: Est-ce que Santé Canada a fait des mises en garde concernant la situation d'Hamilton? Y a-t-il eu des brochures comme celles-ci sur Hamilton?

M. Krewski: Je ne pense pas.

Le président: Nous poserons la question aux gens d'Environnement Canada lorsqu'ils reviendront.

Le sénateur Kenny: Nous pourrions faire une mise en garde dès aujourd'hui, sous forme de bulletin de nouvelles.

Je voudrais revenir sur le sujet initial. Santé Canada n'a fait aucune étude concernant les effets éventuels du manganèse sur le fonctionnement des systèmes de diagnostic des automobiles.

M. Krewski: Nous n'avons pas fait d'étude de ce genre.

Le sénateur Kenny: Pensez-vous que si ces systèmes tombent en panne, ils puissent en résulter une pollution plus grave?

M. Krewski: Les experts d'Environnement Canada nous disent qu'en cas de mauvais fonctionnement de ces systèmes, les véhicules peuvent libérer davantage de polluants traditionnels. Ce serait donc une hypothèse plausible, et si elle se concrétise, nous considérons que toute augmentation des émissions de polluants traditionnels peut présenter un risque pour la santé.

Le sénateur Kenny: Compte tenu de toute l'information dont vous disposez, est-ce que vous êtes favorable à cette mesure législative?

M. Krewski: Oui.

Le sénateur Bosa: Ma question fera peut-être apparaître un conflit d'intérêts, mais je vis à Etobicoke, et je voudrais savoir comment se place cette ville dans votre étude?

Mme Wood: Vous n'avez rien à craindre.

Le sénateur Whelan: Ce rapport est intéressant. Cependant, votre terminologie laisse le profane un peu perplexe. Vous dites des choses inquiétantes concernant le MMT et les dangers qu'il pourrait présenter, mais en définitive, vous dites que contrairement aux émissions industrielles qui sont localisées, les émissions des véhicules à moteur sont généralisées dans l'environnement et risquent donc d'aggraver davantage l'exposition de la population au manganèse que ne l'indiquent les données de l'inventaire des émissions.

M. Krewski: Oui.

Le sénateur Whelan: Vous êtes d'accord? C'est vous qui avez fait cette déclaration, vous pensez donc qu'on devrait s'en inquiéter davantage.

Mme Wood: Il faut certainement rester vigilant.

Le sénateur Whelan: Vous dites à propos de la toxicité du manganèse:

On a remarqué que l'exposition à des quantités excessives de manganèse affecte différents systèmes organiques, notamment le système respiratoire, le système cardiaque, le système reproducteur et le système nerveux central. Ce dernier semble être le plus atteint, car les effets négatifs se manifestent à des concentrations plus faibles que pour la plupart des autres systèmes, y compris le système reproducteur. Bien que les poumons soient également très atteints chez les personnes exposées à de la poussière de manganèse, cette étude se limite aux effets du manganèse sur le système nerveux central, qui peuvent être plus graves que les effets sur le poumon, et qui risquent également de se manifester à un niveau d'exposition plus faible.

Donc, lorsqu'un appareil tombe en panne sur une voiture, le système d'échappement risque de libérer des substances dangereuses. C'est ce genre de panne qui préoccupe beaucoup d'entre nous.

Je ne rappellerai pas mes propos concernant une personne que je connais très bien et qui travaille en permanence sur ce genre de système. Un médecin m'a dit que les mécaniciens qui réparent les systèmes d'échappement devraient porter des masques et des vêtements spéciaux de façon à ne pas inhaler de manganèse. Tous les médecins qui ont étudié ce sujet donnent l'impression d'être plus catégoriques que vous quant aux dangers que présente cette substance.

M. Krewski: Comme vous l'avez signalé, le rapport met avant tout l'accent sur l'exposition de l'ensemble de la population. Il fait remarquer que, compte tenu des possibilités d'une forte exposition, étant donné que les véhicules automobiles sont présents partout dans l'environnement, chacun d'entre nous peut être exposé à de plus fortes émissions provenant des voitures. Dans le domaine professionnel, le nombre des personnes travaillant dans un environnement plus dangereux est plus limité.

L'exposition professionnelle peut être atténuée par de bonnes habitudes d'hygiène industrielle. L'évaluation de Mme Wood n'indique pas que l'exposition professionnelle pose des risques plus sérieux que l'exposition de l'ensemble de la population.

Le sénateur Whelan: Êtes-vous déjà allé dans un atelier de pose de silencieux?

M. Krewski: J'ai dû faire changer un silencieux à quelques reprises, effectivement.

Le sénateur Whelan: Avez-vous remarqué ce qui se passe lorsqu'on frappe un silencieux avec un marteau et qu'il tombe en morceaux? Ceux qui font ça ne portent pas de masque.

Le président: Sénateur, nous sommes très en retard. D'autres sénateurs attendent pour poser des questions.

Le sénateur Whelan: Je vous trouve un peu contrariant, monsieur le président. J'ai présidé moi-même des séances plus importantes et plus longues que celles-ci. Il ne me reste qu'une question. Sans même me regarder, vous me coupez à nouveau la parole et vous dites qu'il faut passer à la suite. Vous lisez tout un document qui ne nous a pas été distribué. Je n'ai qu'une autre question à poser. Je voudrais savoir si les témoins ont visité l'usine qui produit du MMT.

Le président: Je prends note de votre protestation, sénateur Whelan.

Le sénateur Cochrane: Comme l'a dit mon ami le sénateur Taylor, un système n'est jamais sûr à 100 p. 100. Lundi dernier, nous avons entendu parler d'une étude sur les teintures capillaires qui affecteraient la fertilité, la respiration et le système nerveux central. Voilà ce que je voulais dire.

Le président: Le sénateur Whelan a une autre question.

Le sénateur Whelan: Avez-vous déjà visité une usine qui produit du MMT?

M. Krewski: Non.

Mme Wood: Moi non plus. En ce qui concerne les garagistes, nous avons financé une étude effectuée à Montréal, qui a établi les taux d'exposition des mécaniciens qui réparent des voitures, notamment des systèmes d'échappement. Le taux d'exposition est deux fois plus élevé que celui du Montréalais moyen, mais il est toujours en deçà, c'est-à-dire à 70 ou 80 p. 100, de la concentration de référence.

Le président: Merci.

Nous passons maintenant à Transports Canada.

Mme Nicole Pageot, directrice générale, Sécurité et réglementation automobiles, Transports Canada: Nous sommes fort honorés de l'occasion qui nous est donnée aujourd'hui de vous parler de la limitation des émissions des véhicules automobiles. Je vous décrirai en particulier les activités passées, actuelles et futures de Transports Canada en ce domaine important et expliquerai brièvement comment les propriétés des carburants et leur composition peuvent affecter la performance d'un véhicule automobile en matière d'émission et sa conformité avec les normes d'émission de Transports Canada.

Les émissions en provenance des véhicules automobiles contribuent pour une bonne part à la pollution atmosphérique. Les émissions et leurs produits de réaction ont des effets nocifs sur l'environnement et sur la santé de l'être humain car ils sont responsables de la couche d'ozone troposphérique, des pluies acides et des changements climatiques et ils exposent les Canadiennes et les Canadiens à toute une variété de substances toxiques.

La Loi sur la sécurité automobile est une loi régissant la fabrication et l'importation des véhicules et équipements automobiles en vue de limiter les risques de mort et de dommages corporels, matériels et environnementaux. C'est elle qui confère au gouvernement fédéral le pouvoir législatif d'établir des normes en vue de limiter les émissions des véhicules. En 1995, d'importantes modifications ont été apportées à la version originale de cette loi en vue de raffermir et d'améliorer la capacité du gouvernement à limiter les émissions des véhicules.

Depuis 1971, la Direction générale de la sécurité routière et de la réglementation automobile de Transports Canada a progressivement imposé des normes plus strictes sur les émissions des véhicules routiers aux termes de la Loi sur la sécurité automobile pour tenter de parer aux problèmes d'environnement causés par les émissions.

Les normes en vigueur limitent la pollution causée par les gaz d'échappement, les gaz d'évaporation et les gaz de carter des véhicules légers, des camionnettes et des véhicules lourds à moteur à essence et à moteur diesel. Pour ce qui est des gaz d'échappement, que l'on désigne couramment sous l'appellation d'émissions d'échappement, des seuils maximums ont été fixés en ce qui concerne les hydrocarbures, l'oxyde de carbone, les oxydes d'azote, les particules et l'opacité des émissions de fumée des moteurs diesels. Ces seuils maximums désignent les émissions mesurées dans le cadre d'essais précis et détaillés qui utilisent les carburants prescrits par les règlements qui s'appliquent. En outre, le respect de ces normes est fonction d'un certain kilométrage accumulé par les véhicules. Par exemple, pour les voitures de tourisme, cette accumulation est fixée à 80 000 kilomètres.

Les fabricants et les importateurs de véhicules sont tenus de se conformer aux normes d'émission de Transports Canada pour pouvoir importer des véhicules neufs au Canada ou en assurer le transport interprovincial. En général, les normes sur la limitation des émissions adoptées par Transports Canada sont fonction des performances des véhicules. Cela confère aux fabricants le maximum de flexibilité pour se conformer à ces normes en plus de les inciter à innover sur le plan technique pour élaborer des stratégies de conformité. Pour s'assurer que les véhicules automobiles vendus au Canada sont conformes aux normes d'émission fédérales, chaque année, Transports Canada se porte acquéreur d'un échantillon représentatif de véhicules de l'année automobile en cours qu'il soumet à des essais en utilisant les méthodes d'essai et les carburants prescrits. De plus, Transports Canada vérifie les dossiers de certification des entreprises et inspecte régulièrement les composants d'où proviennent les émissions des véhicules. Toute défectuosité qui ressort de ce programme de contrôle fait alors l'objet d'une enquête de la part des gens de Transports Canada qui, au besoin, prennent des mesures pour que ces défectuosités soient corrigées.

L'industrie automobile a réussi à se conformer aux normes d'émissions prescrites en équipant ses véhicules de dispositifs de plus en plus sophistiqués qui visent à améliorer l'efficacité de la combustion et de l'après-traitement des gaz d'échappement. Par exemple, grâce au resserrement des normes, et à l'amélioration des technologies qui va de pair, on a réussi à réduire de 98 p. 100 les émissions en provenance des voitures de tourisme par rapport à l'époque d'avant l'imposition de ces normes.

J'aimerais vous en dire plus sur l'établissement des normes et la consultation avec d'autres parties. Même si Transports Canada est investi du pouvoir législatif de promulguer les normes sur les émissions des véhicules automobiles, plusieurs autres ministères fédéraux jouent un rôle appréciable en la matière et contribuent au processus qui consiste à établir les normes qui conviennent le mieux au Canada. On vous en a déjà cité certains, mais voici d'une manière générale les ministères qui participent à ce processus:

Transports Canada promulgue les normes nationales sur les émissions pour les véhicules neufs en vertu des pouvoirs qui lui sont conférés par la Loi sur la sécurité automobile.

Environnement Canada aide à l'élaboration des politiques relatives à l'environnement et procède à des études d'impact environnemental à l'appui de la réglementation des émissions des véhicules automobiles. Ce ministère réglemente également la qualité nationale des carburants en vertu des pouvoirs qui lui sont conférés par la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, en partie pour assurer la compatibilité des véhicules et des carburants.

Santé Canada fournit des renseignements sur les effets des divers éléments constitutifs des émissions et de leurs produits de réaction sur la santé de l'être humain.

Ressources naturelles Canada, fournit des renseignements sur les répercussions des nouvelles normes sur l'offre, la demande et la qualité des carburants ainsi que sur l'industrie qui les produit.

Industrie Canada fournit des renseignements sur l'impact des nouvelles normes sur l'industrie canadienne, sur l'emploi et sur les accords commerciaux.

Outre le gouvernement fédéral, un échantillon très représentatif de la société canadienne a des points de vue bien arrêtés sur certaines questions d'environnement, notamment sur les émissions des véhicules automobiles. Mentionnons, entre autres, les gouvernements provinciaux, particulièrement sous l'égide du Conseil canadien des ministres de l'Environnement, le CCME, diverses entreprises, des groupes d'écologistes, des groupes de santé publique, des groupes de consommateurs et des syndicats. Grâce aux consultations interministérielles et publiques, les nouvelles normes d'émission prodiguées par Transports Canada, symbolisent une sorte d'accord unanime entre tous les ministères fédéraux concernés et elles tiennent compte des remarques formulées par les provinces, divers groupes du secteur privé, des organismes et le public.

Le programme de limitation des émissions des véhicules automobiles de Transports Canada a permis de sensiblement réduire les émissions des véhicules routiers en services en dépit d'une augmentation du nombre de véhicules-kilomètres parcourus et de la taille du parc automobile. Les prévisions indiquent généralement que les émissions de polluants réglementés du parc canadien de véhicules routiers en service devraient baisser entre 1995 et 2005. Toutefois, ces mêmes prévisions incitent à croire que si l'on ne prend pas d'autres mesures pour réduire les émissions en provenance des véhicules neufs, les émissions du parc de véhicules en service augmenteront entre 2005 et 2020, à mesure qu'augmenteront le nombre de véhicules et le nombre de kilomètres parcourus.

En novembre 1994, le Conseil canadien des ministres de l'Environnement a mis sur pied le Groupe d'étude sur les véhicules et les carburants moins polluants, pour tenir compte du fait que les véhicules automobiles continuent d'être une importante source de pollution atmosphérique au Canada. Ce groupe d'études a été chargé de proposer des options et des recommandations au Conseil des ministres au sujet des nouvelles normes régissant les émissions des véhicules et des exigences relatives à la composition des nouveaux carburants.

À l'issue des consultations qu'il a tenues avec un groupe consultatif spécialement créé et composé de représentants de l'industrie automobile et pétrolière, d'organismes environnementaux et de santé, le groupe d'étude a publié son rapport final. Le 23 octobre 1995, le CCME a avalisé le rapport du groupe d'étude et souscrit à ses recommandations.

Pour ce qui est des normes d'émission des véhicules automobile, le CCME recommandait que Transports Canada actualise immédiatement son règlement sur les émissions, pris en vertu de la Loi sur la sécurité automobile afin de l'harmoniser avec les normes fédérales en vigueur aux États-Unis en application de la Clean Air Act. Le groupe de travail a également recommandé l'adoption de normes canadiennes sur les véhicules moins polluants à compter de l'année automobile 2001.

En 1996, Transports Canada a pris des initiatives en vue de donner suite aux recommandations du CCME. Pour ce qui est de la recommandation à plus court terme du CCME, Transports Canada a proposé l'adoption de normes plus strictes sur la certification et les émissions des véhicules en service, soient les véhicules légers, les camionnettes, les véhicules lourds et les motocyclettes en vue de les harmoniser avec celles du programme fédéral américain. Ce projet de réglementation a été publié dans la partie I de la Gazette du Canada le 8 juin 1996. Les normes proposées devraient entrer en vigueur à compter de l'année automobile 1998. Les modifications auront pour effet de resserrer la limitation des gaz d'échappement et des gaz d'évaporation en réduisant les seuils maximums autorisés et, dans le cas des camionnettes, en portant de 80 000 kilomètres à 160 000 kilomètres, le délai d'utilisation après lequel une compagnie doit démontrer qu'elle se conforme aux normes. Les modifications proposées auront pour autre effet d'introduire de nouvelles exigences visant à contrôler les émissions qui surviennent durant le ravitaillement d'un véhicule en carburant et d'obliger les fabricants à équiper les véhicules neufs d'ordinateurs diagnostiques de bord afin de surveiller le fonctionnement des systèmes d'émission et d'alerter les conducteurs en cas de mauvais fonctionnement.

En vertu des modifications proposées, les motocyclettes de même que les véhicules fonctionnant au méthanol, au gaz de pétrole liquéfié et au gaz naturel seront eux aussi assujettis à des seuils d'émissions. Cette proposition stipule également que les fabricants devront continuer de certifier que tout véhicule neuf est bien conforme aux normes d'émissions avant que celui-ci puisse être importé ou faire l'objet d'un transport interprovincial. En outre, cette modification obligera chaque fabricant à s'assurer que ses véhicules, lorsqu'ils sont correctement entretenus sont conformes aux normes d'émission durant toute leur vie utile.

Avec ces changements, le programme d'essais de vérification de Transports Canada se déplacera des véhicules neufs vers les véhicules en service. Du point de vue de la conformité, cela soulignera toute l'importance qu'il y a à s'assurer que les carburants commerciaux sont compatibles avec les technologies de limitation des émissions.

Enfin, pour ce qui est de la recommandation du CCME sur les normes d'émissions à plus long terme, Transports Canada a engagé un processus public en vue d'élaborer des normes sur les véhicules moins polluants, qui entreront en vigueur avec l'année automobile 2001, et ce, par le biais d'un avis publié dans la partie I de la Gazette du Canada le 21 décembre 1996.

Lorsqu'il a créé le Groupe d'étude sur les véhicules et les carburants moins polluants, le CCME a implicitement reconnu qu'il fallait considérer les véhicules et les carburants comme un seul et même système dans l'élaboration des politiques et des programmes visant à réduire les émissions des véhicules et à améliorer la qualité de l'air. Un carburant peut affecter la performance d'un véhicule automobile en matière d'émissions de deux façons. Premièrement, le carburant ou ses sous-produits de combustion peuvent endommager de manière permanente et irréversible certaines pièces du système d'émission d'un véhicule, comme les bougies, le détecteur d'oxygène, le convertisseur catalytique ou d'autres dispositifs analogues. Lorsqu'un véhicule est exposé à ce type d'effets, il peut ne plus être conforme aux normes nationales sur les émissions des véhicules en service s'il est testé selon les procédures et le carburant prescrits.

Deuxièmement, la composition d'un carburant peut avoir un effet direct sur les émissions. Lorsqu'on modifie les paramètres d'un carburant, il risque de se produire des changements significatifs et instantanés dans les émissions du véhicule sans que cela affecte le système d'émissions du véhicule. Étant donné que les systèmes d'émissions ne sont pas touchés par ce type de modification du carburant, cela n'a aucun effet sur la conformité du véhicule avec les normes en vigueur. Il n'en demeure pas moins que l'on peut envisager de modifier la composition de carburant pour atténuer les problèmes de qualité de l'air, particulièrement dans certaines régions.

Le groupe d'étude du CCME reconnaît que certains changements devront être apportés aux carburants canadiens pour assurer leur compatibilité avec les technologies qui seront introduites au Canada pour rendre les véhicules conformes aux normes prescrites. Dans le cas du carburant diesel, le groupe d'étude recommande qu'Environnement Canada dirige l'élaboration et la mise en application d'une norme nationale sur le carburant diesel à faible teneur en souffre pour assurer le bon fonctionnement des catalyseurs améliorés qui équiperont les véhicules diesel à compter de l'année automobile 1998. Le 28 septembre 1996, Environnement Canada a publié un projet de règlement sur le carburant diesel à faible teneur en souffre dans la partie I de la Gazette du Canada, et je crois savoir que ce ministère travaille ferme pour mettre la dernière touche à ce règlement.

Pour ce qui est de l'essence, le groupe d'étude du CCME est au courant des préoccupations soulevées par la compatibilité des véhicules de l'année automobile 1998 avec les carburants renfermant du MMT. Toutefois, étant donné que la Loi sur les additifs à base de manganèse, le projet de loi C-29, a déjà été déposée devant le Parlement, le groupe d'étude n'a pas examiné la question du maintien de cet additif dans l'essence canadienne.

En conclusion, je dirais que Transports Canada juge indispensable que les technologies modernes et perfectionnées de limitation des émissions des véhicules soient complétées par des carburants commerciaux compatibles. De la sorte, il sera possible d'assainir les véhicules pour continuer de répondre aux voeux des Canadiennes et des Canadiens en matière de protection de l'environnement. À la suite d'un long processus de consultation avec les intervenants du milieu, le gouvernement a déterminé que le projet de loi C-29 était nécessaire pour protéger la santé des Canadiennes et des Canadiens contre les effets pervers possibles du MMT sur les systèmes de limitation des émissions des véhicules et, ultimement, sur les émissions en provenance des véhicules automobiles. C'est pourquoi Transports Canada appuie le projet de loi C-29.

Voilà qui met fin à mon exposé. Nous sommes prêts à répondre à vos questions.

Le sénateur Kenny: En ce qui concerne la dernière partie de votre témoignage sur les propositions du Conseil canadien des ministres de l'Environnement, vous avez dit, si j'ai bien compris, que les ministres provinciaux et le ministre fédéral ont fait au ministère des Transports les recommandations suivantes: tout d'abord, il faut que tous les véhicules soient équipés d'un ordinateur diagnostic de bord, deuxièmement, il faudrait augmenter les normes et, troisièmement, si ce n'est déjà fait, il faudrait faire des recommandations concernant le MMT.

Mme Pageot: Le Conseil des ministres de l'Environnement a constitué le groupe de travail dont j'ai parlé, qui comptait de nombreux représentants. Effectivement, le Conseil des ministres de l'Environnement a recommandé à Transports Canada de mettre à jour les normes sur les émissions de façon à les harmoniser avec les normes américaines, qui exigent un ordinateur diagnostique de bord dans les nouvelles voitures.

Pour ce qui est de votre seconde question, le groupe de travail a aussi recommandé que Transports Canada propose pour l'année 2001 des normes rigoureuses relatives aux émissions. Le groupe de travail n'a cependant pas fait de recommandations au sujet du MMT parce que, comme je l'ai dit, un projet de loi s'y rapportant avait déjà été présenté à la Chambre.

Le sénateur Kenny: La Loi sur la sécurité des véhicules automobiles vous habilite à réglementer les véhicules qui sont transportés d'une province à l'autre, n'est-ce pas? Elle vous confère donc des pouvoirs interprovinciaux?

Mme Pageot: Oui. La loi nous a habilités à réglementer la fabrication et l'importation des véhicules automobiles.

Le sénateur Kenny: La loi s'apparente donc à cet égard à celle dont nous sommes saisis pour ce qui est de l'importation et du transport de MMT d'une province à l'autre?

M. Lui Hrobelsky, chef, Division de l'énergie et de la pollution, Transports Canada: Oui, à cet égard.

Le sénateur Kenny: Pour ce qui est des normes fondées sur le rendement, dont vous vous servez pour évaluer les véhicules, combien de temps faudrait-il, à votre avis, pour mettre au point un test qui permettrait d'établir s'il faut attribuer l'augmentation des émissions au fait que le MMT a encrassé le système de diagnostic intégré? Combien de temps vous faudra-t-il pour concevoir un système qui vous permettrait de renseigner le public canadien sur cette question?

M. Hrobelsky: Nous pensons qu'il nous faudrait environ un an pour mettre au point un programme crédible permettant de répondre aux questions que vous vous posez et de dissiper les incertitudes au sujet du MMT. Il faut que les véhicules aient parcouru au moins 160 000 kilomètres pour que nous puissions en tirer l'information que nous cherchons. Les nouvelles normes que nous proposons ne pourront être vérifiées que sur les véhicules ayant ce kilométrage. Même si l'on conduisait un véhicule 20 heures par jour à la vitesse de 80 kilomètres l'heure, il faudrait 100 jours ou le tiers d'une année pour atteindre le kilométrage requis. Il faudrait ajouter à cela le temps voulu pour concevoir un programme ayant une valeur statistique, procéder à des tests pour déterminer les émissions à intervalles réguliers, soit tous les 10 000 ou 15 000 kilomètres, effectuer l'entretien voulu de ces véhicules, comme la vidange d'huile, obtenir les résultats, les analyser et rédiger un rapport. Voilà pourquoi nous pensons qu'il nous faudrait plus d'une année pour mener à bien cette tâche d'envergure.

Le sénateur Kenny: J'aimerais vous poser une petite question technique à ce sujet. Tous ceux qui nous ont parlé jusqu'ici de ce genre de test ont insisté sur le nombre de kilomètres requis. S'agit-il vraiment simplement de faire parcourir 180 000 kilomètres à un véhicule ou doit-on plutôt faire démarrer régulièrement le moteur pour reproduire les conditions de conduite normale? Lorsqu'on conduit une voiture, on la fait démarrer et on l'arrête régulièrement et on la conduit lorsqu'il fait froid et aussi lorsqu'il fait chaud. Vous suffit-il vraiment pour obtenir des renseignements adéquats de faire parcourir 180 000 kilomètres d'affilée à une voiture?

M. Hrobelsky: C'est en effet plus compliqué que cela. Il ne s'agit pas de faire en sorte que les véhicules automobiles répondent aux nouvelles normes lorsqu'ils sont testés en laboratoire, mais qu'ils y répondent lorsqu'ils sont soumis à des conditions de conduite normale. On veut que les voitures particulières ayant parcouru 160 000 kilomètres répondent toujours à ces normes. Quant aux gros camions de transport, le kilométrage a été fixé à 494 000 kilomètres.

Par conséquent, il s'agit de mettre à l'épreuve les véhicules automobiles dans des conditions qui se rapprochent des conditions normales. Il ne s'agit donc pas de conduire une voiture pendant 24 heures à une vitesse constante. Comme on le fait tous les jours, on fera démarrer la voiture parfois lorsque le moteur est froid et parfois lorsqu'il est chaud. Nous essaierons de reproduire les conditions d'utilisation le plus exactement possible.

Le sénateur Kenny: Pourriez-vous concevoir ce genre de programme de tests ou devriez-vous le faire en collaboration avec les fabricants d'automobile, les raffineurs et les producteurs d'additifs?

M. Hrobelsky: Nous ne pourrions certainement pas concevoir ce programme nous-mêmes parce que nous n'avons pas les fonds voulus. Nous comptons normalement sur le concours des industries réglementées. Nous ne voyons pas d'inconvénient à ce que cette collaboration passe par la conception de programmes de tests ou par l'évaluation des résultats de ces tests. Nous obtenons d'ordinaire ce genre de données de l'industrie.

Le sénateur Kenny: Le test que vous avez décrit au comité est celui que vous mettriez au point si vous le faisiez vous-même, mais vous n'avez pas tenu compte du temps qu'il faudrait à l'industrie automobile pour s'entendre avec les fabricants d'huile à moteur ni le temps qu'il faudrait aux fabricants des huiles à moteur pour s'entendre avec les fabricants d'automobile et enfin le temps qu'il faudrait à ceux-ci pour s'entendre avec les représentants de la société Ethyl.

M. Hrobelsky: Ce genre de processus est complexe comme c'est le cas pour la plupart des industries réglementées.

Le sénateur Kenny: Je ne vous demanderai pas de prédire combien de temps cela prendrait parce que ce ne serait pas juste que je le fasse.

Lorsque Transports Canada met à l'essai les nouveaux véhicules qu'il achète chaque année, de quel type de carburant se sert-il, et ce carburant contient-il du MMT?

M. Hrobelsky: Le carburant que nous utilisons ne contient pas de MMT. Nous utilisons pour les tests le même carburant que la Environmental Protection Agency des États-Unis.

Le sénateur Kenny: Pourquoi n'utilisez-vous pas un carburant contenant du MMT?

M. Hrobelsky: Pour plusieurs raisons. La décision de ne pas utiliser ce type de carburant a été prise à la fin des années 80, lorsque nous avons décidé de changer les normes sur les émissions. Depuis le milieu des années 80, Transports Canada harmonise les normes relatives aux émissions des véhicules automobiles avec celles qui sont adoptées aux États-Unis. Nous l'avons fait pour plusieurs raisons. Premièrement, nous tenons compte ainsi de l'intégration de l'industrie automobile en Amérique du Nord. Les mêmes produits se vendent au Canada et aux États-Unis. L'adoption par les fabricants d'automobiles de normes communes leur permettait de faire des économies qui profitent aux consommateurs.

L'harmonisation du programme de tests permet aussi aux Canadiens de profiter de la technologie la plus moderne en ce qui touche le contrôle des émissions. Nous avons eu accès à cette technologie à un prix dérisoire grâce à notre collaboration avec les États-Unis.

Voilà donc pourquoi il nous a fallu aussi harmoniser nos programmes de tests ainsi que les carburants utilisés dans le cadre de ces tests. Si nous ne l'avions pas fait, nous n'aurions pas pu avoir les mêmes normes qu'aux États-Unis. En outre, les fabricants d'automobiles auraient été soumis à deux systèmes d'accréditation, ce qui aurait annulé les économies découlant du processus d'harmonisation.

Avant de choisir le même carburant pour nos tests, nous avons évalué l'incidence de l'inclusion du MMT dans le carburant. Nous avons jugé à cette époque que l'inclusion du MMT dans le carburant n'avait pas une grande incidence sur les tests, compte tenu du niveau des émissions de l'époque.

Le sénateur Kenny: Compte tenu de l'importance de l'harmonisation de nos normes avec celles des États-Unis, et étant donné le fait que certains États américains permettent maintenant la vente de carburants contenant du MMT, votre ministère est-il d'avis qu'il devrait maintenant tester les véhicules utilisant ce carburant au Canada?

M. Hrobelsky: Compte tenu de ce que vous avez appris à ce sujet au cours des derniers jours, vous vous rendez compte qu'il est difficile de savoir exactement ce qui se passe à ce sujet aux États-Unis. Nous savons qu'un grand nombre de grandes sociétés de raffinage du pétrole ont dit qu'elles ne comptaient pas utiliser du MMT. Nous savons notamment que l'État de la Californie et de nombreux autres États exigent l'utilisation de l'essence reformulée. La loi interdit donc l'utilisation du MMT dans le tiers du marché américain. Les renseignements dont nous disposons indiquent que ce produit est peu ou pas utilisé dans le reste des États-Unis.

Compte tenu des renseignements dont nous disposons, lesquels ne sont ni idéaux ni complets, le MMT serait encore peu utilisé aux États-Unis. Par conséquent, il n'est pas nécessaire de modifier notre politique en ce qui touche l'utilisation pour nos tests de carburants contenant du MMT.

[Français]

Le sénateur Hervieux-Payette: On a parlé antérieurement du plomb, on parle, dans le futur, du souffre. Sur la question du MMT, est-ce que les tests ou la procédure habituellement retenue pour arriver à une décision de bannir l'usage d'un produit ou d'en limiter ou d'en réglementer l'usage, sont toujours les mêmes? Est-ce que vous avez un protocole, qui est identique dans tous les cas, des substances qui entrent dans la composition des carburants? On m'a dit que pour le plomb, il avait une procédure qui avait été suivie. On nous a dit que pour le souffre, c'était la même procédure ou à peu près, et que dans le cas du MMT on a suivi une autre procédure. Est-ce que c'est vrai? Si oui, pourquoi?

[Traduction]

M. Hrobelsky: L'évaluation de l'incidence de chaque composante du carburant sur les émissions des véhicules ou sur les systèmes de contrôle de ces émissions est fonction de la composante en question. Les procédures permettant d'évaluer cette incidence sont semblables à certains égards, étant donné que les véhicules doivent en bout de ligne répondre aux normes établies par Transports Canada. Il peut cependant être nécessaire de modifier ces procédures ou le type de tests qui sont effectuées, en fonction de la composante du carburant qui nous intéresse.

J'aimerais cependant signaler le fait que c'est Environnement Canada et non pas Transports Canada qui est chargé d'établir des règlements relatifs à la qualité des carburants. Il incombe donc à Environnement Canada d'évaluer ces carburants avec l'aide évidemment d'autres ministères.

Le sénateur Hervieux-Payette: Oui. Santé Canada, Transports Canada et Environnement Canada ont tous voix au chapitre, mais qui est chargé de coordonner les efforts déployés dans ce domaine par les trois ministères?

M. Hrobelsky: Outre ces trois ministères, d'autres ministères collaborent au processus. C'est normalement le ministère qui possède les pouvoirs législatifs qui joue le rôle de chef de file. Dans le cas de la réglementation des carburants, ce sera Environnement Canada. Je ne parlerai pas trop au nom d'Environnement Canada parce que je sais que les représentants de ce ministère ont déjà comparu devant vous et qu'ils comparaîtront de nouveau. Ce ministère mène auprès des intervenants des consultations officielles auxquelles participent les autres ministères qui s'intéressent à la question. Il consulte aussi les intervenants non gouvernementaux ainsi que les représentants de l'industrie des carburants. La procédure suivie est bien établie et le Conseil canadien des ministres de l'Environnement participe parfois aussi au processus selon la question à l'étude.

Le sénateur Hervieux-Payette: Si je comprends bien, c'est Environnement Canada qui est le maître d'oeuvre pour ce qui est de l'évaluation des composantes des carburants, alors que c'est votre ministère qui est le maître d'oeuvre pour ce qui est de l'évaluation du rendement des voitures et des autres types de véhicule. C'est votre ministère qui effectue les tests, qui établit les normes et qui fixe les exigences de rendement des différentes composantes des voitures.

M. Hrobelsky: C'est juste. Aux termes de la Loi sur la sécurité des véhicules automobiles, c'est notre ministère qui établit les normes pour ce qui est du niveau d'émissions des nouveaux véhicules automobiles au Canada. En vertu de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, c'est Environnement Canada qui établit la réglementation en ce qui touche la qualité des carburants.

Le sénateur Hervieux-Payette: Vous avez dit que vous ne saviez pas ce qu'il en était au sujet du carburant aux États-Unis. Existe-t-il cependant des normes internationales pour ce qui est des véhicules eux-mêmes? Si certaines pièces automobiles risquent d'être endommagées par l'utilisation de certains additifs dans les carburants, votre ministère effectuera-t-il chaque année des tests sur les voitures américaines, canadiennes et européennes à ce sujet? Mme Pageot a dit que vous achetez des voitures et que vous leur faites subir des tests. Mettez-vous à l'essai toutes les marques de voitures?

Mme Pageot: La Loi sur la sécurité des véhicules automobiles nous permet d'établir des normes canadiennes en matière d'émissions, mais nous harmonisons ces normes avec les normes américaines, étant donné qu'il y a un marché nord-américain d'automobiles. Nous réglementons la fabrication et l'importation des nouveaux véhicules. Pour évaluer la sécurité ou le niveau d'émissions des voitures, nous achetons un nombre représentatif de véhicules offerts sur le marché et nous les mettons à l'essai. Nous ne mettons pas à l'essai tous les modèles ni tous les types de véhicules. Nous procédons de cette façon pour évaluer tant la sécurité que le niveau des émissions. Au début de l'année, nous choisissons un échantillon représentatif du parc automobile et nous testons ces véhicules. Comme il s'agit de véhicules qui sont fabriqués, vendus et importés au Canada, l'échantillon comprend des voitures de les toutes marques et de tous les modèles.

Le sénateur Hervieux-Payette: Je ne connais pas très bien la situation en Europe. J'ai l'impression que la plupart des voitures européennes utilisent toujours un carburant contenant du plomb.

M. Hrobelsky: On trouve peut-être encore du plomb dans le carburant qu'utilisent les voitures en Europe de l'Est, mais pas dans les pays de la CEE.

Le sénateur Hervieux-Payette: Quel additif trouve-t-on dans le carburant utilisé en Europe?

M. Hrobelsky: Ce n'est ni du plomb ni du MMT. Tout dépend donc de chaque pays.

Le sénateur Hervieux-Payette: N'existe-t-il pas une norme pour l'ensemble des pays de l'Union européenne?

M. Hrobelsky: Je n'en connais pas. Il y en a peut-être, mais je ne la connais pas.

Le sénateur Hervieux-Payette: Nous discutons de l'incidence sur les pièces automobiles de l'utilisation de carburants contenant certains additifs. Les Canadiens achètent des voitures européennes ainsi que des voitures japonaises.

Mme Pageot: Permettez-moi de donner une précision. Toutes les voitures qui sont fabriquées pour être vendues au Canada doivent répondre aux normes canadiennes et non pas aux normes européennes. Tout véhicule devant être vendu ou devant être importé au Canada, doit répondre aux normes canadiennes en matière de sécurité et d'émissions. Autrement, ils ne peuvent pas être vendus au Canada.

M. Hrobelsky: Dans bien des cas, il ne sert à rien de comparer le Canada aux pays européens parce que le Canada ainsi que les États-Unis ont joué un rôle de chef de file dans le domaine de la conception des dispositifs de contrôle des émissions. Les normes nord-américaines sont donc plus rigoureuses que les normes européennes. Une voiture qui répond aux normes européennes ne répondrait pas nécessairement à nos normes.

Mme Pageot: Nous estimons que nos normes en matière d'émissions ainsi que les normes américaines sont les plus rigoureuses au monde.

[Français]

Le sénateur Hervieux-Payette: Ma dernière question sera pour vous madame Pageot. Malgré vos témoignages, je n'ai pas vu une préoccupation majeure à savoir que l'utilisation de l'essence avec le MMT causait des dommages significatifs aux équipements à l'intérieur. Votre collègue a parlé du millage pour lequel vous faites vos tests, évidemment si l'on conduit à l'extrême sur une période très courte, on va avoir des émissions, peut-être, et des dommages. Mais telle que nos voitures nord-américaines sont construites, est-ce qu'il y a plus de danger et plus de problèmes pour les voitures fabriquées il y a 5 ou 10 ans versus les voitures fabriquées en 1996? Est-ce qu'il y a des différences en terme d'équipement? Est-ce qu'il y a une amélioration d'autant plus que le MMT est là depuis longtemps? Est-ce qu'on a vu l'évolution? Est-ce que l'on a amélioré la situation versus il y a 5 ans ou 10 ans ou si l'on a les mêmes équipements qui, on nous dit, subissent des dommages qui, en fin de compte, entraîneraient une mauvaise lecture? Est-ce que ces dommages ont été perçus au début et n'ont pas été corrigés ou si ces dommages persistent mais n'étaient pas assez graves pour que vous interveniez vous-même en tant que représentants du ministère des Transports, en disant que cet équipement ne fonctionne pas de façon correcte et en exigeant qu'il soit modifié pour qu'il donne une performance sans déficience?

[Traduction]

Mme Pageot: Il existe une différence en ce qui concerne les dispositifs installés sur certains modèles récents et les dispositifs qui seraient requis en vertu des nouvelles normes touchant les émissions.

Nous nous inquiétons tout particulièrement de l'incidence du MMT sur le système de diagnostic intégré. Ce dispositif n'existe pas sur les véhicules vieux de 10 ans. L'amélioration des dispositifs installés à bord des véhicules suscite certaines préoccupations. Les fabricants de véhicules estiment que l'utilisation du MMT dans l'essence risque de détériorer le système de diagnostic intégré exigé par la réglementation.

Le sénateur Hervieux-Payette: Ne pourrait-on pas modifier le dispositif? N'est-il pas possible de modifier ce dispositif pour qu'il ne puisse être endommagé par le MMT?

M. Hrobelsky: Le problème, c'est qu'on ne pourra sans doute pas le faire en temps voulu. Les nouvelles normes doivent s'appliquer aux modèles de 1998. Comme l'un des témoins de l'industrie automobile l'a fait remarquer, certains modèles de 1998 commenceront à être en vente dès la semaine prochaine. Il n'est donc pas possible aux fabricants de modifier ces dispositifs aussi rapidement. Il faudra leur donner suffisamment de temps pour le faire.

Il y a dix ans, on tolérait le MMT. Aujourd'hui, les normes sont beaucoup plus rigoureuses et nous nous attendons à ce que les véhicules répondent à ces normes deux fois plus longtemps et pour un kilométrage deux fois plus élevé, et ce, dans des conditions d'utilisation normale et non pas dans des conditions de laboratoire. Voilà ce qui a changé par rapport au passé. Nos exigences sont aujourd'hui beaucoup plus élevées. Ce que nous tolérions il y a 10 ans n'est plus tolérable aujourd'hui.

Le sénateur Taylor: Au premier paragraphe de la page 5 de votre document on lit ceci:

Par exemple, grâce au resserrement des normes et à l'amélioration des technologies, qui va de pair, on a réussi à réduire de 98 p. 100 les émissions en provenance des voitures de tourisme par rapport à l'époque d'avant l'imposition de ces normes.

Que peut-on attribuer à l'amélioration de la conception des voitures et que peut-on attribuer à l'amélioration des carburants?

M. Hrobelsky: Je crois qu'on peut presque tout attribuer à l'amélioration de la conception des véhicules.

Le sénateur Taylor: Je crois que vous avez raison, mais je voulais vous l'entendre dire. Autrement dit, au cours des dix dernières années, l'amélioration des normes touchant les émissions a presque exclusivement été le fruit des mesures prises par les fabricants d'automobiles. Le carburant, lui, n'a presque pas changé.

Jusqu'ici, c'est aux fabricants ou aux vendeurs d'automobiles qu'on a imposé des amendes si un véhicule ne répondait pas aux normes touchant les émissions. Il semblerait que les fabricants ne peuvent pas vendre des véhicules au Canada qui ne répondent pas aux normes touchant les émissions.

Y a-t-il une loi régissant les carburants? Tous les carburants peuvent-ils être vendus sur le marché, sauf le plomb tétraéthylène?

Mme Pageot: La loi que nous sommes chargés d'appliquer réglemente la fabrication et l'importation des véhicules.

M. Hrobelsky: C'est une question qu'il faudrait poser aux représentants d'Environnement Canada.

Comme vous l'avez signalé, la quantité de plomb que contient l'essence est actuellement réglementée. La qualité du carburant vendu au Canada répond dans une grande mesure aux exigences établies par l'Office des normes générales du Canada à l'issue d'un processus consensuel auquel participent l'industrie de l'automobile, l'industrie pétrolière ainsi que les consommateurs. Les normes de l'ONGC ne sont pas nécessairement inscrites dans les lois canadiennes. Cinq provinces seulement ont adopté les normes de l'ONGC.

Compte tenu de la façon dont fonctionne l'industrie pétrolière avec ses ententes d'échange, il n'est pas anormal que ce soit le cas.

Le sénateur Taylor: Autrement dit, c'est à l'acheteur de faire preuve de discernement lorsqu'il achète du carburant, car la réglementation ne le protège qu'en ce qui touche le véhicule lui-même.

M. Hrobelsky: L'acheteur est protégé dans la moitié des provinces, soit celles qui ont adopté les normes de l'Office des normes générales du Canada.

Le sénateur Taylor: Si ce projet de loi n'est pas adopté, que ferez-vous pour ce qui est des modèles de 1998?

Mme Pageot: Le temps presse. Il nous faudra prendre une décision sur ce que nous allons faire. Nous retarderons peut-être la promulgation de nos normes. Nous estimons qu'il faut régler le problème du carburant pour que nous puissions mettre la dernière main aux normes touchant les émissions.

Le sénateur Taylor: Vous êtes donc convaincu que vous ne pourrez pas appliquer les normes touchant les émissions si ce projet de loi n'est pas adopté?

M. Hrobelsky: Le ministère a proposé des normes plus rigoureuses en juin de 1996. Ces normes n'ont pas été adoptées parce que le ministère est d'avis qu'il faut d'abord régler la question du MMT.

Si ce projet de loi n'est pas adopté, ce sont les normes établies en 1988 qui continueront de s'appliquer. Nous nous retrouverions dix ans en arrière pour ce qui est du contrôle des émissions. Il est difficile de dire ce que cela signifierait en pratique. Cela dépendra en grande partie de ce que les fabricants de véhicules décident de faire. Ils vous ont dit qu'ils s'inquiètent suffisamment de l'incidence des carburants sur les véhicules qu'ils produisent pour songer -- et certains le font déjà -- à mettre en service les dispositifs de contrôle des émissions au Canada. La loi leur permettra de le faire pourvu qu'ils respectent les normes de 1988, ce qu'ils peuvent faire facilement.

Nous en sommes à un point critique pour ce qui est du contrôle des émissions des véhicules. La réaction de l'industrie dépendra des messages que lui envoie le gouvernement.

À l'heure actuelle, une grande proportion des nouveaux véhicules répondent aux nouvelles normes, qui ne sont cependant pas obligatoires. Les dispositifs de contrôle des émissions sont en place et fonctionnent, mais, si c'est le cas, c'est parce que les fabricants croyaient que les normes que nous avons proposées pour 1998 seraient adoptées. Ils comptaient sur la disponibilité de certains carburants. Si la situation à cet égard change, nous pouvons nous attendre à ce qu'ils changent leurs stratégies en ce qui touche les véhicules qu'ils vendent ici. Si les fabricants estiment que c'est nécessaire, il est probable qu'ils modifieront leurs véhicules pour qu'ils ne répondent qu'aux normes établies en 1988.

Le sénateur Landry: Peut-être pourrais-je donner l'exemple de ce qui s'est produit dans l'une de nos usines l'autre jour. Il y avait un malentendu au sujet du volume de la radio. Certains pensaient que le volume était trop fort et d'autres non. Voici ce que j'ai dit la seconde fois: «La seule solution, c'est d'interdire complètement la radio.»

Je crois que nous convenons tous que le MMT est dangereux pour la santé et que nous essayons donc de trouver une solution au problème du contrôle des émissions. Ce que nous essayons de faire est presque impossible. Les règlements peuvent être aussi stricts qu'ils le veulent, mais combien de véhicules circulent aujourd'hui sur les autoroutes malgré le fait que leurs pots d'échappement sont en mauvais état? La force d'une chaîne dépend de la force de son maillon le plus faible. À titre d'exemple, je dirais que je connais beaucoup de pêcheurs dont les bateaux ont des pots d'échappement défectueux. Les gaz d'échappement parviennent aux pêcheurs lorsque le bateau est en marche. De deux à cinq pêcheurs travaillent toute la journée à l'arrière du bateau et respirent ces émissions. Si l'essence ne contenait pas de MMT, ils n'en inhaleraient pas. Tant que l'essence contiendra du MMT, il est toujours possible que ce gaz s'échappe d'un tuyau d'échappement endommagé ou qui fonctionne mal. À mon avis, il serait plus prudent de bannir le MMT.

Mme Pageot: Sénateur Landry, vous avez raison de signaler que si les véhicules sont mal entretenus ou que si les normes ne sont pas appliquées, des situations comme celles que vous décrivez risquent de se produire. Le règlement que nous proposons comporte cependant un programme d'application des normes, d'enregistrement et d'inspection.

Le sénateur Adams: Vous avez dit que vous effectuiez des tests sur des véhicules fabriqués notamment par GM, Chrysler, Ford, Toyota, Nissan, Volvo. Tous ces véhicules comportent-ils le même type de mécanisme de contrôle de la pollution?

M. Hrobelsky: De façon générale oui. Le dispositif est cependant peut-être utilisé différemment selon les sociétés et selon les modèles. De façon générale, il est cependant le même. Il y a un moteur. Il y a aussi des détecteurs d'oxygène. Il y a le convertisseur catalytique et le mécanisme de recirculation des gaz d'échappement. Les pièces de base sont habituellement les mêmes.

Le sénateur Adams: Les différents modèles équipés de ce système fonctionnent-ils de la même façon?

M. Hrobelsky: Oui. Nous établissons une norme à laquelle doivent se conformer tous les modèles d'un fabricant. Ils sont tous évalués de la même façon. Tous les fabricants utilisent plus ou moins les mêmes dispositifs.

Mme Pageot: Je vous signale que le programme est volontaire au Canada. Les fabricants doivent attester eux-mêmes que leurs véhicules répondent à toutes les normes de sécurité, y compris les normes touchant les émissions.

Le sénateur Adams: Vous êtes approuvés par le CSC et vous effectuez les tests. Approuvez-vous toujours les systèmes même s'ils sont normalisés avant de les mettre à l'essai. Qu'adviendra-t-il des nouveaux modèles après 1998? Autrement dit, ce dispositif sera-t-il installé à bord de ces modèles?

Mme Pageot: Les normes proposées exigent que les véhicules soient équipés de systèmes de diagnostic intégrés à compter de 1998.

Le sénateur Adams: Savez-vous cependant comment fonctionnera ce dispositif? Il existe une norme, mais vous n'avez pas mis à l'essai ce dispositif.

M. Hrobelsky: C'est juste. Parfois la technologie doit s'adapter aux normes. Dans certains cas, si on ne donne pas au fabricant suffisamment de temps pour s'adapter, les normes sont adoptées avant même que la technologie n'existe. Ce n'est pas vraiment le cas pour ce qui est de normes de 1998. Les voitures de cette année sont déjà prêtes. Nous savons quel sera le dispositif dont elles seront équipées. Ces voitures seront sur le marché la semaine prochaine.

Quant aux normes qui s'appliqueront en l'an 2001, la technologie correspondante n'existe pas encore. Les véhicules de l'an 2001 pollueront beaucoup moins que les véhicules de 1998. Certains véhicules ne pollueront pas du tout. La technologie correspondante n'existe cependant pas encore. À mesure que nous avançons vers l'an 2001, il nous faudra évaluer l'état de la technologie, décider si elle peut être adoptée et établir, par exemple, quelle incidence cette technologie aura sur le carburant utilisé par les véhicules automobiles. Il nous faut essayer de coordonner tout cela.

Le sénateur Adams: Vous avez mentionné que vous aviez constitué un groupe de travail. Est-ce un groupe du secteur privé ou de Transports Canada?

Mme Pageot: Le groupe de travail dont nous avons parlé a été mis sur pied en 1994. Il était composé de représentants du gouvernement fédéral, de l'industrie et des associations de la santé. Il a été mandaté par le Conseil des sous-ministres de l'environnement.

Le sénateur Adams: A-t-il fait une étude sur la qualité de l'air ou s'est-il intéressé aux fabricants? Qu'y avait-il dans ce rapport?

M. Hrobelsky: Le groupe de travail était chargé de faire des recommandations au Conseil canadien des ministres de l'Environnement en vue de l'adoption de nouvelles normes nationales pour les automobiles et autres véhicules. Il a également formulé des recommandations sur les initiatives régionales qui pouvaient être prises pour remédier aux problèmes locaux touchant la qualité de l'air. Il s'est penché sur toutes ces questions.

Le président: Toutes ces questions sont importantes, chers collègues, mais nous avons une heure de retard sur notre horaire. Je ne suis pas intervenu parce que c'était des questions très importantes, mais il ne faudrait pas oublier l'heure. C'est certainement un domaine qui intéresse beaucoup les sénateurs et qu'il faudrait explorer à fond.

Le sénateur Hays: Ma question concerne le groupe de travail du CCME. Je suppose qu'il compte des représentants de toutes les provinces.

M. Hrobelsky: Oui.

Le sénateur Hays: Il ne s'est pas intéressé à la question du manganèse-MMT à cause du projet de loi C-29 ou du projet de loi qui l'a précédé. J'ai relu les lettres des gouvernements de plusieurs provinces, et surtout celle de l'Alberta, que je vais vous citer. Le premier ministre de l'Alberta a en effet écrit ceci au gouvernement:

Il n'est pas évident que la suppression du MMT de l'essence aura des effets positifs sur l'environnement. L'interdiction du MMT va probablement augmenter les émissions au lieu de les réduire.

Cela correspond-il à ce qu'a dit le représentant de l'Alberta au groupe de travail, s'il y en avait un, ou encore celui de la Saskatchewan ou ceux des autres provinces? Se peut-il que le gouvernement ne soit pas nécessairement d'accord avec la bureaucratie? Pourriez-vous nous en dire plus?

À ce propos, l'ICPP nous a dit également que l'interdiction du MMT entraînerait une augmentation de 8 p. 100 des émissions d'oxydes d'azote. Peut-être pourriez-vous répondre aussi à cela.

M. Hrobelsky: Pour ce qui est du CCME et de la place occupée par le MMT, c'est une question de processus. Le groupe de travail ne s'est pas lancé dans un examen approfondi du MMT, parce que le projet de loi avait déjà été présenté à la Chambre des communes. Cette tâche ne lui revenait pas. Cet examen n'a pas été fait pour une question de processus.

Le sénateur Hays: Pensez-vous que le gouvernement de l'Alberta a supposé que cette mesure serait rejetée ou adoptée lorsqu'il s'est abstenu d'en faire mention lors des discussions du groupe de travail?

M. Hrobelsky: Je ne peux pas répondre à sa place. Le groupe de travail a reconnu que le MMT posait un problème qu'il fallait régler et il en a donc fait mention. Je suppose toutefois que cette question ne l'a pas vraiment préoccupé. Un processus parallèle avait été enclenché pour la résoudre et c'est pourquoi il ne s'en est pas mêlé.

Pour ce qui est des répercussions environnementales du MMT et de son élimination, je dirai que, là encore, on manque de certitude. On s'entend généralement pour dire que le MMT entraîne une réduction appréciable des émissions de NOx. Il semble, par ailleurs, qu'il n'y ait pas d'impact sur les émissions de monoxydes de carbone. Il faut toutefois tenir compte du fait que ces conclusions se fondent sur des niveaux de MMT qui ne correspondent pas à ceux qui sont utilisés au Canada. Les conséquences nettes sur l'environnement sont incertaines. D'un autre côté, certains craignent que le contrôle des émissions ne fonctionne pas et que la quantité de polluants réglementés augmente. C'est une question de jugement. Les données disponibles ne permettent pas de tirer une conclusion définitive, dans un sens ou dans l'autre.

Le sénateur Whelan: À la page 5 de votre mémoire, sous le titre: «L'établissement de normes: la consultation d'autres parties», vous dites:

Même si Transports Canada est investi du pouvoir législatif de promulguer les normes sur les émissions des véhicules automobiles [...]

Avez-vous ce pouvoir pour l'ensemble du Canada?

Mme Pageot: Oui.

Le sénateur Whelan: À la page suivante, vous mentionnez qu'un échantillon très représentatif de la société canadienne a des points de vue bien arrêtés sur certaines questions d'environnement, notamment sur les émissions des véhicules automobiles, et vous indiquez que cela comprend les gouvernements provinciaux. De qui s'agit-il exactement? Est-ce des représentants du secteur des ministères provinciaux des Transports qui s'intéressent à l'environnement?

Mme Pageot: Transports Canada est investi par la Loi sur la sécurité automobile du pouvoir de réglementer les émissions. Pour ce faire, nous consultons divers ministères fédéraux. Nous consultons également l'industrie, les provinces et les autres organisations.

Il s'agit d'un échantillon très représentatif de la société canadienne. Lorsque nous voulons établir un règlement, même si nous en avons le pouvoir législatif, nous tenons toujours de vastes consultations.

Le sénateur Whelan: Vous agissez conformément à la Constitution. Je suppose que les groupes que vous mentionnez sont d'accord avec les normes établies.

Mme Pageot: Dans ce document et dans mon exposé, j'ai essayé de préciser, pour la gouverne du comité, quelles sont les diverses instances et les divers pouvoirs législatifs qui interviennent dans la réglementation des émissions, par rapport à la réglementation du carburant, par exemple.

Le sénateur Whelan: À la page 10, vous dites ceci:

Du point de vue de la conformité, cela soulignera toute l'importance qu'il y a à assurer que les carburants commerciaux sont compatibles avec les technologies de limitation des émissions.

Cela veut dire que les provinces ont, conformément à la Constitution, accepté que les véhicules soient équipés de cette technologie. Je pousse peut-être trop loin le raisonnement, mais cela veut dire qu'elles conviennent également que le carburant doit permettre à cet équipement de bien fonctionner.

Mme Pageot: Nous parlons ici de la conformité avec les règlements de Transports Canada.

Le sénateur Whelan: Je le sais.

M. Hrobelsky: Vous avez raison. En faisant des recommandations au CCME, les ministres de l'Environnement provinciaux et fédéral ont reconnu que le carburant et les véhicules allaient de pair et que, s'ils voulaient les normes d'émissions très strictes qu'ils avaient demandé à Transports Canada d'adopter, ils avaient l'obligation de faire en sorte que les carburants s'y prêtent.

Tel a été le principe accepté. Le groupe de travail s'est penché sur les véhicules et les carburants en se basant sur ce principe. On a reconnu qu'il fallait examiner les deux éléments ensemble et non pas séparément, comme par le passé.

Le sénateur Comeau: Les règlements exigeant que les fabricants d'automobiles produisent de nouveaux dispositifs de contrôle de la combustion et des émissions ont fait en sorte que l'ajout de MMT dans l'essence ne permet aux véhicules de fonctionner comme il faut. C'est là le noeud du problème. Le MMT nuit au bon fonctionnement du système de diagnostic intégré.

M. Hrobelsky: C'est ce qu'on affirme.

Le sénateur Comeau: Quel était le but de la réglementation initiale, objectif qui a amené les fabricants d'automobiles à modifier leurs systèmes de diagnostic intégrés? Bien entendu, il y a eu un règlement de Transports Canada, mais quel était le but de ce règlement?

M. Hrobelsky: Le but était de protéger l'environnement et la santé des Canadiens.

Le sénateur Comeau: De quelle façon l'a-t-il atteint?

M. Hrobelsky: Le règlement?

Le sénateur Comeau: Oui.

M. Hrobelsky: En veillant à ce que les progrès réalisés sur le plan de la réduction des émissions se poursuivent jusqu'au prochain siècle.

Le transport routier est le facteur qui contribue le plus à la pollution atmosphérique au Canada. Nous avons réussi à réduire de façon spectaculaire les émissions des véhicules... jusqu'à 98 p. 100 pour les automobiles, par exemple. Grâce à ces initiatives, le secteur du transport a contribué à réduire la pression atmosphérique plus que tout autre secteur de l'industrie du pays.

Malgré cela, nous savons que nous restons une source de pollution importante. D'après les données, à moins de prendre de nouvelles initiatives, la pollution provenant des véhicules de transport augmentera au début du siècle prochain, surtout en raison de l'augmentation du parc qui suivra la croissance démographique, mais aussi parce que ces véhicules seront davantage utilisés.

Le sénateur Comeau: À un moment donné, les fabricants d'automobiles, ont dit: «Pour respecter vos normes, nous devons inclure ce nouveau système informatique dans nos véhicules, mais nous ne pourrons plus utiliser le MMT parce qu'il encrasserait nos dispositifs».

M. Hrobelsky: C'est nous qui avons demandé l'utilisation de cet équipement. Ce n'est pas l'industrie.

Le sénateur Comeau: En effet. Elle a dû suivre les règlements établis par le gouvernement.

M. Hrobelsky: Les fabricants ont estimé que, pour doter les véhicules du système de diagnostic intégré et pour répondre aux normes d'émissions, il fallait éliminer le MMT. Telle était leur position.

Le sénateur Comeau: Le nouveau système installé dans les modèles de 1998 réduira énormément le grand nombre de polluants qui sont toujours rejetés dans l'atmosphère.

M. Hrobelsky: Nous allons réduire énormément les 2 p. 100 de la pollution que nous continuons de pourchasser, en effet.

Le sénateur Comeau: Qu'adviendra-t-il des modèles de 1998 avec l'élimination du MMT? Pour tous les modèles antérieurs, ceux qui sont les plus nombreux sur la route, l'élimination du MMT aura-t-elle des conséquences négatives?

M. Hrobelsky: Son élimination n'aura pas d'effet sur le fonctionnement ou la durabilité de ces véhicules, non.

Le sénateur Comeau: Cela va-t-il augmenter l'émission de polluants qui ne seraient pas là si le MMT était présent?

M. Hrobelsky: C'est ce que prétend le secteur pétrolier.

Le sénateur Comeau: Il se peut que la majorité des véhicules qui sont actuellement sur la route -- je ne me risquerai même pas à citer un pourcentage -- utilisent de l'essence qui risque de diffuser toutes sortes de polluants dans l'air.

M. Hrobelsky: C'est une question d'opinion.

Le sénateur Comeau: On nous demande d'adopter une loi qui n'est qu'une question d'opinion? Je ne suis qu'un gars de la campagne.

M. Hrobelsky: Moi aussi. Si cette question était si simple, nous ne serions sans doute pas là. Le secteur pétrolier dit que si l'on supprime le MMT, les émissions d'oxydes d'azote augmenteront. Les fabricants d'automobiles, disent que si on garde le MMT, on va encrasser les bougies et les convertisseurs catalytiques, ce qui augmentera les émissions. Qui croire? Là est la question.

Le sénateur Comeau: Monsieur le président, nous avons peut-être besoin d'un détecteur de mensonge. On nous demande de porter un jugement sur des questions extrêmement complexes.

M. Hrobelsky: J'avoue que cela n'a rien d'habituel pour ce qui est des émissions des véhicules à moteur. Ce sont là des questions très complexes et de nature multidisciplinaire. Cela met en cause non seulement les véhicules, les huiles, les carburants et les moteurs, mais aussi la chimie atmosphérique. Les sciences de la santé ont également leur rôle à jouer.

Le sénateur Comeau: Je le comprends. On nous demande de porter un jugement sur ces questions.

M. Hrobelsky: Nous ne sommes jamais aussi intelligents que nous le souhaiterions pour pouvoir répondre à ces questions sans l'ombre d'un doute. La réglementation des véhicules à moteur oblige à porter des jugements et c'est ce qui se passe depuis 25 ans.

Cela prouve que le jugement a produit de bons résultats. Les émissions des véhicules à moteur ont diminué, au Canada, de 98 p. 100 par rapport à ce qu'elles étaient par le passé. La réduction de la pollution émanant des véhicules est plus importante qu'elle ne l'a été dans tout autre secteur. Ce phénomène a contribué à l'amélioration de la qualité de l'air et de la santé des Canadiens. Il s'agit de porter un jugement une fois de plus. Nous l'avons déjà fait par le passé.

Le sénateur Comeau: Nous nous occupons du MMT cette année. Que ferons-nous l'année prochaine? Allons-nous proposer une nouvelle loi pour éliminer d'autres éléments dangereux de l'essence? Ne faudrait-il pas le faire tout de suite? Au lieu de procéder graduellement, ne faudrait-il pas présenter un projet de loi omnibus, qui supprimerait toutes les sources de pollution atmosphérique?

M. Hrobelsky: De nombreuses substances présentes dans le carburant nous préoccupent. Il y a le MMT, il y a le souffre présent dans l'essence et le diesel, il y a le benzène et le toluène.

Le sénateur Comeau: Pourquoi ne pas tous les examiner maintenant?

M. Hrobelsky: C'est ce que nous faisons. Il s'agit de voir comment nous allons procéder. Nous avons choisi la voie qui nous semblait la plus appropriée.

Le président: Merci de votre témoignage.

Les témoins suivants représentent Pollution Probe et l'Association canadienne des troubles d'apprentissage, et je vais leur demander de prendre la parole.

Mme Jill McDowell, membre, Pollution Probe: Je suis heureuse de vous présenter l'énoncé de principes de Pollution Probe concernant le projet de loi C-29, Loi régissant le commerce interprovincial et l'importation à des fins commerciales de certaines substances à base de manganèse.

Ken Ogilvie, directeur général de Pollution Probe, n'a pas pu venir aujourd'hui et c'est pourquoi je vais vous présenter sa déclaration en son nom.

Pollution appuie le projet de loi C-29 et prie le Sénat de l'adopter avec célérité. Nous avons acquis beaucoup de connaissances et d'expérience sur les causes des problèmes environnementaux affectant la santé et sur leurs solutions depuis 1972, année de la tenue de la conférence de Stockholm sur l'environnement humain.

Des progrès énormes ont été réalisés au chapitre de la lutte contre les polluants conventionnels, notamment ceux provenant des émissions d'anhydride sulfureux, d'oxyde de carbone et d'oxyde d'azote dans l'atmosphère. On est également mieux en mesure de circonscrire les effets de certaines substances, notamment de nombreux composés organiques à l'état de trace et beaucoup de métaux lourds, quoique les progrès enregistrés sur ces fronts soient plus difficiles à évaluer, compte tenu de la nature scientifique complexe de ces produits et des incertitudes au sujet de leurs effets sur la santé et l'environnement.

Face à ces incertitudes, on a mis au point des pratiques et des principes environnementaux internationaux pour protéger la population et l'environnement des méfaits imprévus de ces substances. Le principe de précaution a notamment été endossé par de nombreuses nations réunies en 1992 au Sommet de Rio, auquel ont participé la plupart des chefs d'État du monde entier. Résultat: les politiques et les programmes mis de l'avant dans les secteurs public et privé ont fait de la prévention de la pollution une priorité.

Le Canada a joué un rôle de chef de file au chapitre de l'élaboration de tels principes et pratiques environnementaux à l'échelle internationale, en les concrétisant dans des lois comme la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, dans les énoncés de principes du gouvernement et dans les allocutions ministérielles. Le ministre fédéral de l'Environnement a une obligation envers la population et la communauté internationale: donner un sens concret au principe de précaution au nom du gouvernement canadien.

Depuis cinq ans, Pollution Probe a consacré le plus clair de son temps au «smog» urbain et à ses effets sur la santé humaine. La fondation a consacré beaucoup d'efforts au secteur des transports, notamment à l'automobile. Le compte rendu de la conférence que nous avons tenue en avril 1996 au sujet des transports, de la qualité de l'air et de la santé, analyse en profondeur les effets de la brume sur la santé et le rôle des transports. Pollution Probe tient, depuis 1993, une campagne annuelle visant l'assainissement de l'air, qui vise à inciter la population à opter pour des modes de transport moins nocifs pour l'environnement et à entretenir et à conduire les véhicules de manière qu'ils polluent le moins possible. Pollution Probe, de concert avec le secteur de l'automobile, les producteurs pétroliers et d'autres intervenants importants, estime que la réduction des émissions, avec un bon rapport coût-efficacité, passe par une intégration comprenant les moyens technologiques, les carburants et le sens des responsabilités. Le secteur de l'automobile doit découvrir des techniques plus salubres, les producteurs de pétrole et de carburant doivent de leur côté, trouver des carburants qui polluent moins, pendant que les particuliers doivent entretenir leurs véhicules de manière à les maintenir dans des conditions optimales. Il sera ainsi possible de réduire les milliers de tonnes de polluants nocifs présents dans l'air et, par ricochet, de jouir de bienfaits sur le plan de la santé, et de réaliser des économies du fait que les coûts des soins de santé et autres seront moins élevés.

Pollution Probe s'est intéressée à la question du MMT parce que le secteur de l'automobile a recueilli des éléments probants établissant que cette substance nuisait aux dispositifs antipollution des véhicules, et parce que des groupes crédibles du secteur de la santé ont dit craindre qu'un accroissement des inhalations de manganèse par suite de la combustion du MMT puisse être nocif pour les enfants et les aînés. Il ne faudrait pas écarter les risques que le MMT pourrait faire courir aux systèmes antipollution, vu les effets négatifs importants du «smog» sur la santé. De plus, dans son évaluation des risques, Santé Canada n'a pas tenu suffisamment compte des préoccupations des chercheurs, des groupes et des bureaux de la santé. Pollution Probe croit qu'il n'y a pas de solution simple pour démêler les données divergentes au sujet des effets du manganèse sur les systèmes antipollution et sur la santé. Entre temps, la population continue d'être exposée au manganèse, alors qu'il existe des succédanés qui permettraient d'enlever le MMT de l'essence à un coût raisonnable en comparaison des risques pour la santé.

Il n'y a aucun doute qu'une fraction importante du manganèse provenant de la combustion du MMT que l'on trouve dans l'essence est émise par les tuyaux d'échappement des automobiles; cela représente 15 à 30 p. 100 selon le rapport d'Ethyl Corporation intitulé «MMT and Public Health: Separating Fact from Fiction».

Dans son évaluation des risques, de 1995, des produits de combustion du MMT présent dans l'essence, Santé Canada a noté que les concentrations ambiantes de manganèse inhalable dans les villes canadiennes étaient inchangées ou avaient diminué entre 1986 et 1992. Cependant, le rapport publié récemment par le ministère ontarien de l'Environnement et de l'Énergie au sujet de la situation de l'air, de l'eau et des déchets en 1992 signale:

Que les concentrations ambiantes de plomb avaient diminué, mais que celles provenant d'un autre métal, le manganèse, avaient augmenté. Le manganèse a été utilisé comme substitut du plomb dans l'essence sans plomb. Les concentrations annuelles moyennes de manganèse ont augmenté de façon continue tout au cours des années 80, au point d'avoir pratiquement doublé à la fin de cette décennie. Même si le manganèse sert aussi à des activités industrielles, son utilisation récente comme substitut du plomb dans l'essence explique vraisemblablement la hausse des concentrations.

Pollution Probe s'interroge encore plus sur la justesse de l'évaluation des risques de Santé Canada, vu les conclusions apparemment différentes du ministère ontarien de l'Environnement et de l'Énergie.

De l'avis de Pollution Probe, les données recueillies au sujet des effets du MMT sur la santé ne permettent pas d'établir de façon concluante que les risques sont acceptables pour les Canadiens. De plus, il semble assez évident que le MMT nuit aux systèmes antipollution des automobiles. La population n'est donc pas certaine d'être bien protégée face au «smog» ou au manganèse. Le MMT a été utilisé de façon intensive au Canada depuis presque 20 ans, et de grandes quantités de manganèse inhalable sont émises sans interruption dans des villes densément peuplées du pays.

Pollution Probe estime que le débat autour du MMT dans l'essence a duré assez longtemps et que ce ne sont pas des études supplémentaires qui viendront régler les problèmes. Si le MMT continue d'être autorisé comme additif dans l'essence et qu'on constate un jour qu'il affecte la santé, qui sera tenu responsable? Il ne faut plus que la population serve de pion dans ce débat. À juste titre donc, le Parlement fédéral a pris la décision politique d'agir.

Le Sénat devrait appuyer le projet de loi C-29, de façon à démontrer que les intérêts de la population et la qualité de l'environnement constituent des considérations de premier plan. L'adoption du projet évitera de répéter la tragédie pour la santé humaine du plomb dans l'essence, et on enverra un signal clair à la communauté internationale, à savoir que le Canada met en pratique les principes environnementaux qu'il a élaborés en travaillant avec acharnement dans le but de protéger la population et l'environnement partout sur la planète Terre.

Pollution Probe prie donc instamment le Sénat d'entériner le projet de loi C-29 avec célérité.

Nous vous remercions de nous avoir invités à comparaître devant le comité permanent.

Le président: Je vais demander aux représentants de Troubles d'apprentissage -- Association canadienne, de bien vouloir nous faire leur exposé, après quoi nous pourrons poser des questions à l'un ou l'autre de ces groupes.

La parole est à vous.

Mme Barbara McElgunn, agente de liaison avec les services de santé, Association canadienne des troubles d'apprentissage: Monsieur le président, honorables sénateurs, je vais me reporter à mon mémoire, mais mes observations en dépasseront le cadre, car je voudrais commenter ce que vous avez entendu hier et aujourd'hui.

L'Association canadienne des troubles d'apprentissage est un organisme bénévole national qui compte des associations affiliées dans chaque province et territoire et qui est voué à l'amélioration de l'évolution des 10 à 15 p. 100 de Canadiens qui souffrent de troubles d'apprentissage d'origine neurologique. Notre association appuie la recherche sur les causes des troubles d'apprentissage qui visent à en améliorer le diagnostic, le traitement et la prévention, et elle en diffuse les résultats.

Si nous comparaissons aujourd'hui, c'est pour parler d'une question très importante pour notre association, tous les Canadiens ainsi que les associations provinciales affiliées. Comme nous sommes un groupe de défense des enfants et des adultes souffrant de troubles d'apprentissage, notre mémoire porte sur les risques que le MMT représente pour le développement neurologique, mais nous convenons qu'il existe d'autres bonnes raisons d'appuyer cette mesure, comme nous l'avons entendu dire ce matin et hier. À ce propos, je voudrais faire quelques observations au sujet des longues discussions qui se sont déroulées hier.

Hier, Ethyl a répété à plusieurs reprises que l'EPA conclurait que le MMT n'abîme pas les véhicules ou les systèmes d'émission des véhicules, d'après les tests effectués sur divers types de véhicules, à la suite de la décision rendue en vertu du Clean Air Act. C'est vrai, mais je crois qu'il faut se reporter au compte rendu de cette décision que donne le Federal Register, car ce qu'on y dit est intéressant. J'en ai des copies pour les sénateurs. Je les distribuerai plus tard.

Les résultats de la première série de tests examinés ici (tests de modèle 1988 accompagnant la demande d'Ethyl en 1990) sont, de toutes les données produites par le requérant, celles qui traduisent la plus forte augmentation des émissions causées par le MMT (environ 0,02 gm/mi), mais ces augmentations étaient très insuffisantes pour permettre de les considérer comme un facteur causal ou contributif (3 modèles de véhicules sur 8 ont échoué au test pour les hydrocarbures et 4 sur 8 au test pour le gaz carbonique, alors qu'il faut que 7 modèles sur 8 dépassent les niveaux de pollution permis pour qu'on considère que l'additif ne répond pas aux normes).

Cela laissait entendre que les automobiles et les modèles qui ont été soumis au test fonctionnaient à la perfection, mais ce n'était sans doute pas le cas.

[...] l'agence considère néanmoins que ces tests actuels et les critères qu'ils appliquent sont périmés.

Cependant, en vertu de ces pouvoirs, l'agence a déclaré que les véhicules avaient tous subi ce test avec succès. Je crois qu'il est important de le souligner. D'autres éléments de ce document présentent également de l'intérêt.

Je voudrais également parler du témoignage qu'Ethyl a présenté hier lorsqu'elle a laissé entendre que l'EPA pourrait interdire le MMT à tout moment si elle se souciait de la santé publique. C'est précisément ce que l'EPA a tenté de faire, mais Ethyl l'a traînée devant les tribunaux et elle a perdu sa cause par une faible marge. Les tribunaux lui ont lié les mains. Ils ont estimé que la loi n'autorisait pas l'EPA à interdire un additif uniquement pour des questions de santé.

Nous avons également la copie de cette décision.

C'était très clair lorsque les juges ont déclaré que l'alinéa 211f)(4) ordonnait à l'administrateur d'examiner les effets des nouveaux additifs uniquement en fonction des normes d'émissions. Le tribunal a estimé que l'EPA avait eu tort de tenir compte des effets du MMT sur la santé pour décider d'accorder ou non à Ethyl une dispense pour son additif. Par conséquent, l'EPA a perdu sa cause pour cette raison et non pas parce que ces données concernant la santé manquaient de poids. L'EPA s'est efforcée, pendant une vingtaine d'années, d'empêcher que le MMT soit ajouté à l'essence aux États-Unis et elle se trouve maintenant forcée de céder, mais les tests se poursuivent et la situation pourrait changer de nouveau.

Je tenais à préciser ces deux choses avant de faire part de nos préoccupations particulières, qui sont dues au fait que les enfants sont habituellement plus sensibles que les adultes aux substances toxiques auxquels ils sont exposés et que le cerveau en développement est un des organes touchés par les substances neurotoxiques comme le manganèse et ses composés.

Au début des années 80, nous avons appris les effets subtils, mais graves sur le cerveau des enfants, de l'exposition à de faibles doses de plomb, effets qui avaient une influence néfaste sur leur développement mental, notamment sur leur QI et leur aptitude à apprendre et à être attentif. Dès 1982, notre association a fait activement campagne au Canada pour que le plomb soit retiré de l'essence, ce qui a été fait en 1990. Vous pouvez constater combien de temps il a fallu attendre en invoquant les problèmes de santé. Il a fallu près de dix ans.

Au début de ce processus, le docteur Gesser, un toxicologue de l'Université du Manitoba, a signalé les dangers de l'utilisation du MMT pour remplacer le plomb tétraéthylique dans l'essence, dans une lettre au magazine Macleans où il signalait que les aérosols contenant des oxydes de manganèse n'avaient jamais été soumis à des tests exhaustifs et qu'on n'avait jamais établi à quel niveau d'exposition ils sont sécuritaires. Cela est toujours vrai, et la raison en est que l'Environmental Protection Agency a rejeté la demande de la Société Ethyl Corporation qui voulait être autorisée à commercialiser le MMT. Cependant, comme je l'ai dit, la Cour d'appel fédérale l'a ensuite obligée à donner cette autorisation, jugeant que l'EPA n'avait pas le pouvoir, en vertu de la loi, d'interdire l'utilisation d'un additif de l'essence pour des raisons de santé publique.

En 1993, notre association a soumis au gouvernement fédéral un mémoire énonçant ses craintes au sujet de l'emploi du MMT, comme additif de l'essence. Nous avons contesté son utilisation parce qu'aucune étude de toxicité démontrant son innocuité n'avait été faite, et nous avons cité les rapports de recherche qui existaient déjà sur la toxicité du manganèse pour le système nerveux en développement. Le manganèse est neurotoxique pour les organismes jeunes et ce, à des concentrations auxquelles il ne l'est pas pour des organismes adultes. Il traverse facilement le placenta. Son absorption est élevée au début de la vie, et on peut en trouver une part significative dans le cerveau. Dans une étude du ministère de la Santé, Grace Wood mentionnait que, chez les nourrissons, l'absorption et l'accumulation de manganèse étaient dix fois plus élevées que chez les adultes.

Contrairement au manganèse ingéré ou manganèse qui entre dans le régime alimentaire, le manganèse inhalé est absorbé en plus grande quantité par le sang et est transporté directement au cerveau. Le Dr Krewski, de Santé Canada, a fait justement remarquer que le ministère avait l'intention de changer son fusil d'épaule en ce qui concerne le MMT.

Le cerveau est évidemment le site principal de la neurotoxicité. L'une des principales caractéristiques de la toxicité du manganèse est son effet sur la dopamine, un neuromédiateur chimique essentiel du cerveau. La maladie de Parkinson, qui est causée par une carence en dopamine dans certaines parties du cerveau, affecte la parole et le mouvement. Le manganisme, ou l'intoxication par le manganèse à ses premiers stades, produit des troubles psychologiques -- et personne à ce stade-là ne se rend compte qu'il s'agit de toxicité du manganèse -- a des effets sur le comportement neurologique et, enfin, cause un désordre semblable à celui qui caractérise la maladie de Parkinson. La forme trivalente du manganèse, qui est produite par l'utilisation du MMT, pourrait avoir un effet plus marqué sur la dopamine que sa forme bivalente, que l'on trouve dans les aliments et qui entraîne la mort des cellules si elle est absorbée à forte dose, et elle est dangereuse aux premières phases du développement du cerveau ou au cours du vieillissement. C'est d'ailleurs une question qui préoccupe le Dr John Donaldson, qui est un des spécialistes sur la toxicité du manganèse, et sur laquelle il a fait des recherches.

En août 1996, l'American Academy of Pediatrics révélait un rapport entre trois gènes spécifiques associés à la dopamine et divers désordres, dont la maladie de Tourette, le trouble d'hyperactivité avec déficit de l'attention (THADA), le trouble des conduites et le bégaiement. Le rapport signale qu'une fois rompu l'équilibre dopamine-sérotonine du neuromédiateur, le dysfonctionnement du cerveau qui s'ensuit peut entraîner une vaste gamme de troubles du comportement dont les plus marqués sont le THADA, le bégaiement, l'attitude de défi et les tics nerveux. Depuis quelque temps maintenant, on traite le THADA avec la ritaline, ou chlorhydrate de méthylphénidate, un médicament qui fournit de la dopamine, ce qui avalise la conclusion selon laquelle les systèmes dopaminergiques du cerveau jouent un rôle dans ces troubles fréquents chez les enfants et j'ajouterai que c'est quelque chose de tragique.

Ces nouvelles données sont révélatrices, car il est reconnu que le manganèse perturbe ces systèmes neurochimiques, surtout chez les jeunes animaux utilisés en recherche et qu'il a des effets importants sur le comportement, surtout ceux qui ont une composante d'activité. Il se peut qu'il n'existe pas de seuil sous lequel des substances neurotoxiques comme le plomb et le manganèse sont inoffensives. On n'en sait rien. Aucune étude n'a été effectuée. Les enfants qui ne mangent pas à leur faim, malheureusement de plus en plus nombreux, sont plus vulnérables au manganèse. Des études ont révélé la présence de fortes concentrations de manganèse dans les cheveux d'enfants hyperactifs et de criminels violents.

Plusieurs chercheurs qui ont étudié les effets du manganèse sur la chimie du cerveau et sur le comportement se sont dits préoccupés par son utilisation généralisée et très répandue comme additif de l'essence. Je mentionne quelques cas. Vous entendrez le Dr Mergler le 11 février, je crois. C'est l'une des principales autorités dans le domaine de la toxicité du manganèse.

En 1978, Santé Canada a publié un rapport intitulé «Méthylcyclopentadiényl manganèse tricarbonyle (MMT): Évaluation des implications de son utilisation comme additif de l'essence pour la santé humaine» dans lequel on peut lire ce qui suit.

[...] nous ne savons rien des effets que l'exposition chronique à de faibles concentrations de manganèse peut avoir sur des groupes spécifiques, comme les femmes enceintes, les enfants et les personnes souffrant de maladies respiratoires.

Les auteurs de ce rapport recommandaient de recueillir des données sur les réactions à différentes doses afin de déterminer les effets de l'inhalation du manganèse sur des groupes à risque spécifiques, comme les femmes enceintes, les enfants en bas âge et les personnes souffrant de maladies respiratoires. En d'autres termes, ils admettaient qu'on ne peut évaluer correctement le risque que présente cette substance sans des renseignements sur sa toxicité. Comme nous l'avons déjà signalé, les études propres à fournir ces données n'ont pas été faites, et c'est l'absence de ces renseignements d'une importance cruciale qui a amené l'administratrice de l'EPA, Carol Browner, Ph. D., à déclarer que l'on ne devait pas se servir de la population américaine comme cobayes pour vérifier l'innocuité du MMT.

Comme on vous l'a dit ce matin, Santé Canada a conclu en 1995 que le MMT ne présentait pas de risque pour la santé, mais beaucoup de particuliers et d'organismes soutiennent qu'on ne peut tirer de pareille conclusion en l'absence de données valables sur la toxicité du produit. Plus de quarante organismes et scientifiques, tant américains que canadiens, sont contre l'utilisation du MMT dans l'essence en raison des risques qu'il représente pour la santé. On y trouve l'American Psychological Association, l'American Parkinson Foundation et l'Institut canadien de la santé infantile.

Le gouvernement fédéral a adopté un projet de loi interdisant d'utiliser le MMT dans l'essence pour prévenir les avaries des dispositifs de contrôle des émissions des voitures, lesquelles contribueraient à un appauvrissement de la qualité de l'air et aux maladies qui y sont associées. Il ne fait aucun doute que la qualité de l'air de nombreux centres urbains du Canada a des répercussions sur la santé des Canadiens.

C'est pour toutes ces raisons que Troubles d'apprentissage -- Association canadienne demande instamment au Sénat d'adopter le projet de loi C-29 dans les meilleures conditions.

Le sénateur Kenny: L'un des problèmes réels qui se posent à nous en tant que législateurs, c'est que nous avons entendu de nombreuses heures de témoignages contradictoires des représentants de grandes sociétés automobiles et de grandes sociétés pétrolières. Vos deux organismes ne semblent pas avoir de liens avec le secteur automobile ou le secteur pétrolier, ce qui vous permet sans doute de nous offrir une perspective indépendante, uniquement axée sur la santé et le bien-être des Canadiens.

Vous avez entendu les témoignages des deux côtés. Pour quelle raison avez-vous aussi clairement pris position en faveur des sociétés automobiles, ou plus précisément contre les sociétés pétrolières?

Mme McDowell: À l'heure actuelle, le débat fait rage. Diverses études ont été effectuées de bonne foi par le secteur automobile, par l'industrie pétrolière et par la Ethyl Corporation. Nous ne sommes pas des experts techniques; nous ne sommes pas des experts en matière de santé. Cependant, lorsqu'il est question de la santé des enfants, et des risques potentiels qu'ils courent, nous devons pécher par excès de prudence et adhérer au principe de précaution. Nous estimons que ce n'est pas à la population d'assumer la responsabilité de résoudre ces conflits. Il nous apparaît tout à fait logique que la politique gouvernementale prenne la forme du projet de loi C-29.

Mme McElgunn: C'est une question à laquelle il est difficile de répondre. C'est sans doute une question de jugement. Je me demande pourquoi tous les fabricants d'automobiles ont cette conviction? Qu'ont-ils à gagner? Pourquoi affirmeraient-ils que les dispositifs antipollution ont des problèmes si ce n'était pas le cas? En toute logique, ils n'ont rien à gagner à livrer ce combat avec autant de vigueur et de ténacité et à parler d'une même voix. J'ai tendance à croire que leurs propos sont fondés. Nous les considérons comme nos alliés parce que nous visons le même objectif, sans pour autant appuyer nécessairement leur position. Ce sont nos alliés parce qu'ils souhaitent que l'essence au Canada ne contienne pas de MMT.

Le sénateur Kenny: Vous avez parlé du principe de précaution. Êtes-vous surtout préoccupés par les émissions de manganèse causées par le MMT ou par les déficiences du système de diagnostic intégré, qui risque de causer davantage de pollution?

Mme McElgunn: Les deux, mais nous nous préoccupons sans doute davantage des émissions de manganèse de type tétra libérées par le tuyau d'échappement. Cependant, cela ne veut pas dire que les autres types d'émissions ne constituent pas également une menace et il conviendrait de veiller à ce que les enfants n'y soient pas exposés. Ils vivent beaucoup plus près du sol que nous, ce qui les amène sans doute à en absorber une dose plus considérable. En outre, ils sont plus petits.

On s'est demandé si cette forme de manganèse risque d'être encore plus toxique. Cela serait notre principale préoccupation.

Mme McDowell: Pollution Probe s'inquiète de ces deux aspects. D'une part, les experts en matière de santé sont engagés dans un débat sur l'effet potentiel d'une faible exposition à long terme au MMT et, d'autre part, deux grandes industries s'interrogent sur l'incidence du MMT sur les systèmes de diagnostic intégré. Oui, nous nous préoccupons de ces deux aspects.

Pollution Probe a consacré beaucoup de temps à étudier l'effet de l'ozone de la basse atmosphère sur la santé humaine. Nous savons que dans certains endroits au pays, les niveaux de smog et d'ozone atmosphérique dépassent les normes que le gouvernement considère comme sécuritaires. Nous savons également que 15 p. 100 de toutes les maladies respiratoires infantiles en Ontario sont attribuables à la piètre qualité de l'air. Dans la grande région métropolitaine, une personne par jour meurt à cause du niveau élevé de la pollution. Nous avons en main ces faits et ces études. Nous savons que la réduction des précurseurs qui causent le smog dépend, en partie, de l'application de normes strictes relativement aux émissions d'automobiles et du fonctionnement adéquat de la technologie. Nous sommes également au fait qu'il existe à l'heure actuelle un débat au sujet de l'incidence du MMT sur cette technologie.

Nous avons des discussions et des divergences d'opinions sur une question qui pourrait avoir un effet dévastateur sur les enfants. Nous prenons donc ce dossier très au sérieux et ses deux aspects nous préoccupent.

Le sénateur Kenny: Vous n'avez ni l'un ni l'autre mentionné la Ethyl Corporation. Avez-vous déjà eu affaire à cette société au sujet d'autres questions? Avez-vous des commentaires que vous voudriez nous communiquer au sujet de cette société et de ses produits?

Mme McElgunn: J'ai eu à traiter abondamment avec la Ethyl Corporation au sujet du problème du plomb, car je me suis intéressée de près à ce dossier dès 1982. En l'occurrence, j'ai une impression de déjà vu. Il s'agit d'un adversaire qui, sans être malveillant, n'en est pas moins coriace. Ses représentants défendent leur industrie. Comme tous ceux d'entre nous qui souhaitent protéger certaines choses, nous sommes disposés à faire ce que nous devons et ce que nous pouvons faire pour y arriver. Néanmoins, il semble cette fois-ci que nous soyons déjà passés par là.

Mme McDowell: Ken Ogilvie, notre directeur général, serait sans doute mieux en mesure de répondre à cette question. Personnellement, je n'ai jamais eu de contact ou de rapport avec la Ethyl Corporation. Cela dit, je sais que deux représentants de cette société ont rencontré M. Ogilvie la semaine dernière et qu'ils ont eu avec lui une réunion de deux heures sur cette question.

Mme McElgunn: Nous avons aussi rencontré des représentants de la Ethyl Corporation à Toronto au sujet de la nouvelle étude sur l'exposition personnelle. Ils nous en ont aimablement expliqué la teneur.

Le sénateur Kenny: Cette rencontre vous a-t-elle réconforté?

Mme McElgunn: Je pense qu'il faudra attendre. Comme M. Langham l'a dit, il s'agit de données préliminaires. Il faut voir comment elles se présentent au bout du compte. L'étude semble avoir été bien menée. Ses auteurs ayant vraiment fait le tour de la question et mis les points sur les i.

Lorsqu'on examine des études de population, il faudrait pouvoir s'attacher au groupe qui risque le plus d'être exposé. Parfois, on atténue les expositions possibles lorsqu'on examine des villes et des banlieues et qu'on fait une moyenne. Nous souhaiterions que cela s'applique aux personnes qui vivent au centre des villes, là où la circulation est très dense, pour voir ce à quoi ils sont véritablement exposés. Ces données vont sans doute ressortir de l'analyse finale, mais cela prendra un certain temps.

Le sénateur Whelan: Combien de membres comptent vos organismes respectifs?

Mme McElgunn: Nous avons environ 10 000 membres dans tout le Canada.

Mme McDowell: Nous avons environ 25 000 membres et quelque 40 000 donneurs.

Le sénateur Whelan: Employez-vous des lobbyistes professionnels?

Mme McElgunn: Il n'y a que moi, pour peu que l'on puisse dire que je suis une «professionnelle».

Le sénateur Whelan: Voilà qui est rafraîchissant.

À la page 2 de votre mémoire, vous dites que le manganèse est neurotoxique pour les organismes jeunes, et ce, à des concentrations auxquelles il ne l'est pas pour des organismes adultes, et qu'il traverse facilement le placenta. Vous ajoutez: «son absorption est élevé au début de la vie, et on peut en trouver une part significative dans le cerveau». Cependant, on nous a dit hier, ou peut-être bien ce matin, que le manganèse n'était pas absorbé dans le système.

Mme McElgunn: Ce n'est pas vraiment le cas. Si vous consultez l'analyse de risques de Santé Canada, que j'ai lue dans le train en venant ici hier, on y signale que l'absorption et la rétention de manganèse dans les organismes infantiles est dix fois plus élevée que dans les organismes adultes. D'autres études montrent la même chose.

Les jeunes organismes n'ont pas les systèmes biologiques voulus pour détoxiquer des substances comme le manganèse. En outre, leur barrière hémato-encéphalique est immature et incomplète. Il n'y a rien qui empêche le manganèse d'accéder au cerveau, surtout au cours de la phase de développement prénatale, qui est caractérisée par une croissance rapide du cerveau. Prenons le cas des femmes enceintes exposées au manganèse dans l'air. Le manganèse peut accéder au foetus et atteindre directement le cerveau du foetus, car il n'y a aucune barrière qui l'en empêche. Les foetus n'ont pas de mécanisme de détoxication du foie et du rein. Nous nous préoccupons surtout des expositions prénatales et des expositions au début de la vie des enfants en raison de leur petite taille et de leur moindre capacité de détoxiquer les substances qu'ils reçoivent systémiquement.

Le sénateur Whelan: Mais il y a dû y avoir des études suivies là où vous avez trouvé votre documentation.

Mme McElgunn: La plupart des études ont été effectuées avec des modèles animaux, dont certaines sur des primates, qui représentent le niveau le plus élevé des animaux. Sur le plan de l'éthique ou de la morale, les scientifiques ne peuvent faire absorber des doses aux femmes enceintes ou aux enfants pour voir ce qui arrivera, c'est ce qui explique que l'on doive recourir à des données sur les animaux. La plupart du temps, ces données animales concordent avec les données humaines, même pour ce qui est de l'effet sur le comportement neurologique des adultes. Le transfert dans le placenta a été relevé à la suite d'une étude sur des primates. C'est également à la suite d'une étude menée sur des primates que l'on a constaté la présence significative de manganèse dans le cerveau.

Le sénateur Whelan: À la page 4 de votre mémoire, vous dites: «En 1995, Santé Canada a conclu que le MMT ne présentait pas de risques pour la santé». Vous n'êtes pas d'accord avec cette affirmation et vous citez le fait que de nombreux autres organismes -- c'est-à-dire plus de 40 p. 100 des associations de scientifiques aux États-Unis et au Canada -- s'opposent à l'utilisation du MMT. Vous avez accordé plus de poids à leur mémoire qu'à celui de Santé Canada. Moi aussi, d'ailleurs.

Mme McElgunn: Le mémoire de Santé Canada est bien fait, mais ses auteurs arrivent à une conclusion différente en se fondant sur les mêmes données. C'est bien beau d'avoir des données, mais il faut aussi porter un jugement.

La distinction, c'est qu'ils ont utilisé un coefficient d'incertitude de 300, alors que l'EPA a utilisé un facteur d'incertitude de 1 000 pour protéger les enfants et contrer les expositions chroniques. Aux États-Unis, la concentration de référence est de moitié inférieure à celle de Santé Canada. Mais cela ne fait pas tellement de différence.

Ce qui nous dérange dans l'analyse de Santé Canada, c'est que nous ne pensons pas que l'on puisse établir un coefficient fondé sur des données obtenues auprès de travailleurs adultes en bonne santé. Les enfants ne sont pas des adultes miniatures. Il y a une différence non seulement quantitative, mais qualitative dans la façon dont ils réagissent aux substances toxiques. On ne peut pas affirmer, par exemple, qu'un enfant représente un dixième de la taille d'un adulte et que, par conséquent, le fait de diviser par 10 assurera une protection aux enfants. Nous avons besoin de données toxicologiques car on ne sait pas par où commencer. Il se pourrait qu'une concentration d'un dixième, d'un millième ou d'un dix millième soit sécuritaire pour les enfants. Voilà où nous divergeons d'opinion avec l'évaluation de Santé Canada. Nous ne pensons pas que ses auteurs auraient dû tirer cette conclusion en l'absence de données toxicologiques suffisantes.

Le sénateur Whelan: Pollution Probe affirme:

Le «principe de précaution» a notamment été endossé par de nombreuses nations réunies en 1992 au Sommet de Rio, auquel ont participé la plupart des chefs d'État du monde entier. Résultat: les politiques et les programmes mis de l'avant dans les secteurs public et privé ont fait de la prévention de la pollution une priorité.

Le Canada a joué un rôle de chef de file au chapitre de l'élaboration de tels principes et pratiques environnementaux à l'échelle internationale, en les concrétisant dans des lois comme la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, dans les énoncés de principes du gouvernement et dans les allocutions ministérielles.

Avez-vous trouvé encourageante la déclaration qu'a faite le gouvernement du Canada en 1992? À l'époque, ce n'était pas un gouvernement libéral, mais conservateur, qui était au pouvoir. On a l'impression que vous avez été grandement encouragés par cette déclaration de 1992. Vous affirmez dans votre mémoire que le Canada a été un chef de file dans l'élaboration de ces principes environnementaux internationaux.

Avez-vous un commentaire à faire à ce sujet?

Mme McDowell: Non, pas vraiment.

Le sénateur Whelan: Votre directeur général aurait certainement quelque chose à dire, sinon il n'aurait pas rédigé cela.

Mme McDowell: C'est avec plaisir que je vous ferai parvenir la réponse à cette question.

Le sénateur Adams: En ce qui a trait aux troubles d'apprentissage des enfants, sont-ils uniquement causés par le MMT?

Mme McElgunn: Vous voulez savoir de quels produits chimiques on devrait se méfier en raison de leurs effets neurotoxiques sur les enfants. Très peu d'efforts ont été déployés pour examiner l'aspect santé dans le cadre des évaluations de sécurité effectuées par Santé Canada ou par d'autres organismes dans le monde. La U.S. Environmental Protection Agency commence à exiger des données pour les pesticides. Il existe un groupe important de produits chimiques dont nous craignons les effets et les expositions neurotoxiques car ils sont conçus pour s'attaquer au système nerveux des parasites. Le deuxième groupe est constitué de métaux lourds. Le manganèse entre dans cette catégorie. Nous ne pouvons pas tester les 60 000 à 80 000 produits chimiques vendus dans le commerce. Cependant, il y a des grappes prioritaires de produits chimiques qui, selon les scientifiques, nécessiteraient ce genre d'évaluation. Le manganèse entrerait dans l'une de ces catégories puisque c'est un métal lourd et qu'il est relié à d'autres métaux lourds comme le plomb, le mercure et l'aluminium, qui sont tous des substances neurotoxiques connues. Tout le monde sait que le manganèse est une substance neurotoxique, sauf qu'on n'a pas effectué d'essais pour constater ses effets sur les jeunes cerveaux.

Le sénateur Adams: Vos chiffres englobent-ils les nouveaux venus au Canada? Certains immigrants avaient peut-être ces problèmes avant d'arriver ici.

Mme McElgunn: Je pense que l'on soumet les immigrants à des tests pour déceler diverses maladies. Nos chiffres englobent tous les citoyens canadiens, immigrants ou non.

Le sénateur Adams: Avez-vous trouvé des traces de la maladie de Parkinson avant 1900?

Mme McElgunn: Je l'ignore, mais tout le monde est d'accord pour dire que les cas de maladie de Parkinson, et de maladie d'Alzheimer, sont à la hausse.

Le sénateur Landry: Dans les années 40, lorsque General Motors a lancé le premier climatiseur, la prise d'air était très proche des feux de position. Si vous étiez coincé dans la circulation, votre automobile se remplissait des vapeurs provenant des pots d'échappement des autres voitures. Il était impossible de respirer dans ces voitures. Il fallait ouvrir les fenêtres. C'est ce qui m'a appris à reconnaître l'odeur des vapeurs d'échappement. L'année d'après, la compagnie a installé la prise d'air sous le pare-brise. Une expérience comme celle-là vous permet de comprendre à quel point ces vapeurs peuvent être nocives.

Le sénateur Cochrane: J'aimerais poser une question à la représentante de Pollution Probe au sujet du document qui nous a été présenté.

À la page 2, vous dites:

Entre-temps, la population continue d'être exposée au manganèse, alors qu'il existe des succédanés [...]

Par quoi voudriez-vous remplacer le MMT?

Mme McDowell: Nous n'avons pas fait suffisamment de recherches pour être en mesure de préférer une autre substance au MMT. Je sais qu'il existe des succédanés, comme l'éthanol, dont on affirme qu'il est moins préjudiciable à l'environnement que le MMT. À cet égard, je devrai vous envoyer cette information ultérieurement. Je n'ai pas en main les recherches voulues. Cela dit, l'éthanol est une substance qui vient à l'esprit.

Le sénateur Cochrane: À la dernière page de votre mémoire, vous affirmez:

De l'avis de Pollution Probe, les données recueillies au sujet des effets du MMT sur la santé ne permettent pas d'établir de façon concluante que les risques sont acceptables pour les Canadiens. De plus, il semble assez évident que le MMT nuit aux systèmes antipollution des automobiles. La population n'est donc pas certaine d'être bien protégée [...]

Si tel est votre avis, il me semble que vous ne devriez pas souhaiter l'adoption de cette mesure. Ne voudriez-vous pas qu'Environnement Canada ou une autre entité se livre à davantage d'essais?

Mme McDowell: Ce contaminant est dans notre environnement depuis 20 ans maintenant. Après cinq, quinze ou vingt ans d'essais, nous serons peut-être en mesure d'établir une corrélation absolue entre les dommages neurologiques chez l'humain et l'exposition chronique à de faibles concentrations de manganèse. Cela serait indéniablement un jour sombre pour l'humanité. Selon notre point de vue, il n'est pas nécessaire d'attendre ces études. Adopter une attitude attentiste est dangereux et risqué pour la santé humaine. Le problème semble attribuable aux effets d'une exposition chronique à de faibles concentrations de manganèse. Comment s'y prendre pour prouver cela?

Le sénateur Cochrane: Les représentants de Transports Canada nous ont dit ce matin que 2 p. 100 seulement des polluants étaient issus des véhicules automobiles.

Mme McDowell: Avec les dispositifs antipollution.

Le sénateur Cochrane: Ma question s'adresse à la représentante de Troubles d'apprentissage -- Association canadienne. Comme vous le savez, les niveaux élevés d'exposition recensés dans le cerveau des enfants, sont attribuables à de nombreux facteurs. Tous les jours, en entend parler d'autres facteurs. Cette semaine encore, nous avons appris qu'un autre facteur responsable de ces problèmes est la teinture pour cheveux. Le mois prochain, nous apprendrons sans doute, l'existence d'un autre problème. Comment contrôler tout cela? Pensez-vous que la teinture pour cheveux est aussi nocive que le MMT ou le manganèse?

Mme McElgunn: Ce qui importe, c'est d'éviter de tomber dans le piège des «deux maux», comme je l'appelle, qui fait que, parce qu'un facteur est plus problématique qu'un autre, nous oublions ce dernier pour s'attacher uniquement au premier. Nous sommes en présence d'une substance qui suscite des préoccupations. Nous savons qu'il y a des conflits et beaucoup d'incertitudes. Nous savons que le MMT est transporté à bord d'un véhicule, ce qui l'amène à être disséminé dans toute la population. Comme quelqu'un l'a dit hier, il n'y a pas de meilleur moyen de libérer un polluant dans l'atmosphère générale que de le mettre dans l'essence.

Le problème de la teinture pour cheveux est important, mais c'est un autre problème. Dans la même veine, je me demande pourquoi les produits de beauté ne sont pas assujettis à des essais de toxicité. À mon avis, il faudrait analyser soigneusement les produits dont nous enduisons notre peau ou nos cheveux. Or, on ne le fait pas à l'heure actuelle.

Le sénateur Kinsella: Pollution Probe ou l'Association canadienne des troubles d'apprentissage se préoccupent-t-ils du niveau élevé de manganèse dans l'air ambiant des localités de Hamilton et de Sault Ste. Marie?

Mme McElgunn: Je n'ai appris que récemment, la forte teneur en manganèse dans l'air ambiant de Sault Ste. Marie et de Hamilton. Nous allons assurément communiquer avec le ministère de l'Environnement de l'Ontario à cet égard, par l'entremise de notre association ontarienne. Ces niveaux sont tout à fait inacceptables.

En outre, la teneur en manganèse de l'air ambiant en Ontario est extrêmement élevé. Je pense qu'il s'agit de 2,5 microgrammes par mètre cube, comparativement à la norme de 0,1 de Santé Canada. C'est donc beaucoup trop élevé.

Nous allons présenter des instances au gouvernement de l'Ontario à ce sujet par l'intermédiaire de notre association provinciale.

Le sénateur Kinsella: Avez-vous des données relatives à l'incidence des troubles d'apprentissage dans la population de ces deux localités, qui montreraient un lien de cause à effet avec le taux élevé de manganèse dans l'environnement?

Mme McElgunn: C'est une question intéressante, et je pense qu'on devrait examiner cela.

Le sénateur Kinsella: Il n'existe donc pas de données.

Mme McElgunn: Non.

Le président: Vos deux organismes apportent une précieuse contribution à notre pays. Je tiens à vous remercier d'être venus comparaître pour nous communiquer votre opinion.

Je demanderais maintenant aux représentants de l'Association canadienne des automobilistes de présenter leur mémoire.

M. David Leonhardt, gestionnaire des Relations publiques et gouvernementales, Association canadienne des automobilistes: Tout d'abord, je voudrais vous rappeler que l'Association canadienne des automobilistes est une fédération de clubs automobiles. Nous représentons des automobilistes, et non des fabricants d'automobiles, des concessionnaires ou des travailleurs du secteur de l'automobile. Notre association se compose de gens comme vous et moi qui conduisons des automobiles. À ce titre, nous venons ici en tant que consommateurs.

Je crois savoir que depuis quelques jours, nous avons entendu un grand nombre d'exposés techniques, bourrés de termes techniques, de pourcentages et de seuils. Notre exposé ne sera pas comme cela. Il portera sur l'incidence du MMT dans la vie courante, pour les conducteurs de véhicules et les véhicules eux-mêmes.

Comme bon nombre d'entre vous le savent sans doute, nous avons déjà pris position dans d'autres dossiers, concernant l'essence, notamment au sujet de la Loi relative aux normes de consommation de carburant des véhicules automobiles. Nous avons déjà demandé à plusieurs premiers ministres de signer sur la ligne pointillée et de faire en sorte que cette mesure entre en vigueur. Nous avons également collaboré avec le comité au sujet de la mesure que vous avez parrainée il y a deux ans, sur les carburants de remplacement, et nous avions appuyé sans réserve vos efforts dans ce domaine.

Nous sommes ici, comme c'est souvent le cas, pour représenter un certain nombre d'intérêts contradictoires des automobilistes. Nos sondages rapportent qu'ils souhaitent conduire des véhicules plus propres. Parallèlement, le coût lié à la conduite automobile, continue d'augmenter. Les automobilistes recherchent des solutions qui ne se traduiront pas par une augmentation considérable de leurs coûts. Nous pensons que le projet de loi C-29 est l'une de ces solutions.

Vous avez déjà entendu des témoins de l'industrie pétrolière, qui, d'après le quotidien The Globe and Mail, auraient dit que l'application de cette mesure, coûterait 70 millions par an. Si l'on traduit cela en coût au litre, cela représente un sixième de cent le litre. Il y a lieu de se demander si cela ferait une différence pour le consommateur quand on sait que leur coût d'entretien pourrait s'en trouver diminué.

Avant d'évoquer les raisons pour lesquelles l'ACA a décidé d'appuyer le projet C-29, je précise que nous ne considérons pas qu'il s'agit d'une question facile à trancher. Nous utilisons une expression un peu plus forte que celle que l'on a entendu tout à l'heure, soit «mesure de précaution». Il y a une preuve abondante -- et nous ne devrions pas laisser entendre qu'il ne s'agit pas de preuve -- qui a été présentée au comité. Peut-être qu'elle n'est pas entièrement concluante, mais la plupart de ses éléments vont dans le même sens, et nous considérons qu'elle a passablement de poids. Des arguments convaincants portent à croire que le MMT a ou pourrait avoir des effets néfastes. Nous nous inquiétons surtout des effets sur les systèmes antipollution des véhicules, étant donné que ces dispositifs déterminent dans quelle mesure l'utilisation du véhicule créera de la pollution.

Le convertisseur catalytique est la première ligne de défense contre la pollution. On m'a dit que le comité avait certaines connaissances quant à la façon dont fonctionne un convertisseur catalytique, mais je pense qu'il vaut la peine d'y revenir. Ce convertisseur est un peu comme un nid d'abeille. Il peut sembler petit. Mais à l'intérieur, la surface est plus grande que la pièce dans laquelle nous sommes. Pourquoi cette surface? C'est qu'au moment où les vapeurs d'échappement passent par le convertisseur catalytique, il se produit une réaction chimique entre la surface et les vapeurs d'échappement, qui supprime certains polluants -- comme les représentants de Transports Canada l'ont dit plus tôt, dans une proportion de 98 p. 100 environ dans certains cas de polluants -- qui causent le smog et les maladies respiratoires.

Le MMT contient du manganèse, qui est un métal lourd. Il laisse des dépôts sur un certain nombre de pièces du système automobile, y compris les convertisseurs catalytiques. La surface doit interagir avec les gaz d'échappement, et une couche de métal lourd se dépose, empêchant la réaction chimique. À cause de ces dépôts, le convertisseur catalytique, la première ligne de défense contre la pollution automobile, se dégradera probablement beaucoup plus rapidement que s'il n'y avait pas cette couche de métal.

Deuxièmement, nous nous préoccupons des capteurs d'oxygène. Ce sont les deux sujets de préoccupation que nous mentionnerons ici, mais il y en a sans doute d'autres. Dans le véhicule que vous conduisez maintenant, qu'il s'agisse d'une Taurus ou d'une Camry, il y a plus de puissance informatique qu'à bord de la première fusée lancée dans l'espace. Les automobiles ne sont plus des mécaniques. On ne les conduit plus comme des machines agricoles. L'ordinateur gère tout, et l'ordinateur obtient son information sur la façon de tout faire fonctionner convenablement grâce à un certain nombre d'intrants.

Les capteurs d'oxygène, sont l'un des intrants les plus importants. À l'origine, leur objectif principal était de déterminer combien d'oxygène se trouvait dans le mélange carburant-oxygène que brûlait le moteur. Selon une idée fausse très répandue, le moteur brûle l'essence que vous mettez dans votre réservoir. Ce n'est pas le cas. Il brûle un mélange d'essence et d'oxygène. Lorsque ce mélange est idéal, la voiture fonctionne de façon très efficiente. Si le moteur fonctionne avec efficience, il utilisera moins de carburant. Selon toute vraisemblance, cela signifie aussi moins d'entretien.

Cependant, si ces capteurs d'oxygène sont couverts par la couche de métal lourd, issu du manganèse, de mauvais signaux peuvent être envoyés à l'ordinateur de bord. La mauvaise quantité d'air sera intégrée au carburant que consomme votre moteur, ce qui l'empêchera de fonctionner avec efficience. En effet, il brûlera davantage de carburant. Au bout du compte, cela pénalise à la fois les automobilistes et l'environnement. Un moteur qui ne fonctionne pas avec efficience, risque d'exiger davantage d'entretien.

Comme on vous l'a expliqué, les capteurs d'oxygène ont un effet sur les systèmes de diagnostique installés dans les voitures connus sous le nom de OBD-II. Ce sont des systèmes exigés par la loi américaine et qui seront probablement obligatoires au Canada si le manganèse dans l'essence est supprimé. Nous nous inquiétons des fausses alertes qui risquent d'être transmises à l'ordinateur par la couche de manganèse qui recouvre les capteurs d'oxygène. La raison d'être du système OBD-II, c'est le clignotant sur le tableau de bord qui s'allume en cas de panne de l'équipement d'émission. C'est un signal qu'il faut amener la voiture au garage.

Il peut y avoir une panne. Certains essais démontrent que parfois le message n'est pas transmis. Si cela se produit, cela veut dire qu'on prive les Canadiens de l'efficacité du système OBD-II. Cette technologie de protection de l'environnement qui est disponible dans les voitures américaines ne sera pas offerte aux Canadiens. Cela nous inquiète en tant que représentants d'automobilistes.

Nous nous inquiétons encore plus des fausses alertes, ces cas où la lumière commence à clignoter quand il n'y a pas de panne. Cela pourrait provoquer divers scénarios.

D'abord, les consommateurs en auront peut-être assez d'amener leurs voitures au garage pour apprendre qu'il n'y a pas de problème, que c'est un mauvais fonctionnement du système. Ils peuvent ensuite débrancher le système, ce qui aurait pour effet de nous priver de cette technologie favorable à l'environnement et dont disposent les Américains. Ou bien ils vont peut-être faire tomber leur exaspération sur les fabricants de voiture en se demandant pourquoi Ford ou Honda ne peuvent pas construire une auto convenable sans ces défaillances techniques et ils vont peut-être aller ailleurs. Ce n'est pas juste ni pour le fabricant ni pour l'automobiliste qui, exaspéré par cette situation, ne fera pas confiance à cette technologie écologique.

Autre possibilité, quand ils amènent leur voiture parce que le système d'alarme clignote: le garagiste pourrait commencer des réparations qui sont totalement inutiles. Selon que ces réparations sont visées par la garantie ou non, c'est l'automobiliste ou bien le fabricant qui paye. Quoi qu'il en soit, en fin de compte, c'est le consommateur qui paye. La dernière possibilité, c'est que les fabricants essaient d'éviter de perdre des clients et de payer pour des réparations inutiles couvertes par la garantie en cessant d'offrir cette technologie aux Canadiens.

En fin de compte, si le MMT reste dans l'essence, nous sommes convaincus que nous serons privés de cette technologie écologique d'une façon ou d'une autre, par des règlements ou par la pratique, que ce soit d'une façon directe, ou d'une manière détournée en débranchant le système.

Nous avons voulu également présenter un point de vue réaliste sur la situation. Vous avez entendu bien des parties dont certaines ont des intérêts à protéger et d'autre pas, comme on l'a observé. Nous savons quel est l'intérêt d'Ethyl. Il s'agit du marché principal pour son produit principal, le MMT. Du moins dans les pays développés. Pour eux, c'est d'une importance capitale, et que le MMT soit néfaste ou non, ils vont s'opposer au projet de loi C-29. L'industrie pétrolière ne voudra pas se rééquiper. Si cela va coûter de l'argent, elle va manifester son opposition. Elle est manifestement intéressée dans cette affaire.

Parmi ceux qui défendent l'autre point de vue dans ce débat, il est évident que l'industrie automobile a un intérêt direct ici. Elle pourrait perdre des clients à cause des fausses alertes causées par son système OBD si le MMT se trouve dans l'essence. S'il n'y a pas de MMT dans l'essence, elle ne doit pas s'en inquiéter. Les coûts énormes des réparations couvertes par la garantie, encore une fois si le MMT reste dans l'essence, représentent pour l'industrie automobile un intérêt direct. Sans le MMT, elle n'est pas confrontée à ce problème.

Nous ne pourrions pas trouver une seule raison pour expliquer l'opposition de l'industrie automobile à cette mesure si le produit n'était pas néfaste. Ce n'est peut-être pas une raison scientifique mais c'est simplement un indicateur de plus comme les photos et les pièces de voiture que nous avons vu couvertes de manganèse rouge.

Et pour conclure, j'aimerais lire une citation du rapport sur l'état de l'environnement de l'Ontario qui vient d'être publié:

Si les concentrations ambiantes de plomb ont diminué, celles d'un autre métal, le manganèse, ont augmenté. Le manganèse a servi de substitut au plomb dans l'essence sans plomb. Les concentrations annuelles en moyenne de manganèse ont augmenté sans arrêt au cours des années 1980. De sorte qu'à la fin de la décennie, elles étaient deux fois plus élevées qu'au début.

Malgré les fautes de grammaire qui comporte le texte anglais de cette citation, elle provient d'un rapport de l'Ontario. Il s'agit d'un autre indicateur ou d'une preuve supplémentaire qu'il y a quelque chose qui se passe, dont nous devrions nous inquiéter.

J'utiliserais un mot un peu plus fort que «précaution». Il n'incombe pas à l'Association canadienne des automobiles d'en décider; c'est à vous de décider. Si vous décidez de ne pas interdire le MMT, dans 20 ans, vous pousserez peut-être un soupir de soulagement collectif, ou bien vous seriez peut-être confrontés par des témoins, obligés de présenter des excuses pour les dommages causés et obligés de décider ensuite d'interdire le MMT.

Le mot «précaution» est peut-être bon, mais il pourrait être un peu plus fort. Les risques sont bien équilibrés. On devrait enlever le MMT du carburant. On n'aurait peut-être pas dû l'ajouter au carburant avant de prouver qu'il n'était pas nocif. Il est assez clair que le MMT est nocif pour l'environnement, et peut-être pour la santé humaine, et en plus, il endommage les automobiles.

Le sénateur Whelan: Votre association compte combien de membres au Canada?

M. Leonhardt: Elle compte 3,8 millions de membres dans toutes les provinces.

Le sénateur Whelan: Vous leur avez envoyé à tous un dépliant sur le MMT?

M. Leonhardt: Nous n'avons pas posé de questions précises sur le MMT. C'est une question complexe et technique. Nous avons posé des questions plus générales: jusqu'à quel point est-il important de conduire des véhicules moins polluants? Est-ce que les carburants de remplacement vous intéressent? Êtes-vous prêts à payer ces carburants de remplacement? Êtes-vous prêts à payer des taxes parce que les véhicules polluent? On nous a répondu que non. Êtes-vous prêts à payer pour réduire la pollution provenant d'automobiles? Ils sont prêts à le faire, et s'y intéressent. Êtes-vous prêts à payer des montants élevés? Peut-être que non. Êtes-vous prêts à payer des modifications peu coûteuses? Absolument.

Le sénateur Whelan: Recevez-vous beaucoup d'appels au sujet des lumières du tableau de bord qui clignotent? Est-ce que les automobilistes garent leur voiture, téléphonent au club automobile et attendent deux heures? Je suis membre d'un club automobile depuis 35 ans.

M. Leonhardt: Dans la vie de tous les jours, ce n'est pas encore un problème parce qu'on commence à installer ces systèmes technologiques dans les véhicules. Plusieurs nouveaux véhicules vendus aux États-Unis auront cette lumière. Ici, la lumière dans le même véhicule aura été débranchée parce que les fabricants d'automobiles ne sont pas prêts à perdre leurs clients à cause de fausses alertes, ni à payer les réparations sous garantie.

Le sénateur Adams: Les mécaniciens sont-ils capables de suivre l'évolution des nouveaux modèles? À l'époque, les réparations ne posaient pas de problème. Maintenant, tout est informatisé. J'ai déjà dû retourner deux fois au garage parce qu'on ne trouvait pas le problème au début.

Est-ce que votre association est au courant de ce que font les mécaniciens pour suivre l'évolution de tous les nouveaux produits sur le marché?

M. Leonhardt: On ne les appelle plus des mécaniciens, mais plutôt des techniciens.

Le sénateur Adams: Il y a tellement de nouveautés à l'heure actuelle. Comment est-ce que le technicien peut savoir ce qui est à l'origine du problème?

M. Leonhardt: C'est évidemment une préoccupation. Dans 10 ou 20 ans, y aura-t-il assez de techniciens compétents? Ce n'est plus un métier pour les gens peu scolarisés. Si quelqu'un veut devenir technicien de l'automobile, il doit avoir d'assez bonnes connaissances techniques et il doit avoir au moins des connaissances de base en informatique.

Le concept environnemental d'un système de diagnostic intégré a été ajouté pour OBD-II la deuxième génération de ces systèmes. Il faisait également partie de la première génération, ce qui permettait aux mécaniciens de brancher des équipements au garage et de diagnostiquer les problèmes. Je ne sais pas jusqu'à quel point ce système est fiable. Je n'ai pas les compétences techniques pour en parler.

Le sénateur Adams: Il y a diverses conditions météorologiques au Canada. Je conduis une Crown Victoria. Il y a environ deux semaines, la température a baissé à moins 35 degrés. La lumière indiquant qu'il fallait vérifier le moteur s'est allumée. Je me suis arrêté plus tard et j'ai redémarré, mais la lumière ne s'est pas rallumée. Est-ce que c'était à cause du froid?

Le président: Il faudrait poser cette question au beau-fils du sénateur Whelan.

Le sénateur Bosa: L'exposé a été si complet et si concis que je n'ai pas de question. J'aimerais féliciter M. Leonhardt et Mme Meister pour leur exposé.

M. Leonhardt: Merci.

Le président: Merci beaucoup d'être venus.

Nous allons maintenant poursuivre nos travaux à huis clos.

Le comité poursuit ses travaux à huis clos.


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