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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones

Fascicule 10 - Témoignages pour la séance du matin


OTTAWA, le mardi 17 octobre 2000

Le Comité sénatorial permanent sur les peuples autochtones se réunit aujourd'hui, à 9 heures, pour examiner le projet de loi C-14, la Loi concernant l'accord conclu avec la Nation crie de Norway House sur le règlement de questions liées à la submersion de terres et concernant la création de réserves au Manitoba.

Le sénateur Thelma J. Chalifoux (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente: Honorables sénateurs, avant de donner la parole à nos témoins, nous devons régler une question importante, soit l'élection de notre vice-président ou vice-présidente.

Le sénateur Andreychuk: Je propose la candidature du sénateur Cochrane.

La présidente: Sénateur, acceptez-vous cette nomination?

Le sénateur Cochrane: Oui, je l'accepte.

La présidente: Y a-t-il d'autres candidatures? Puisqu'il n'y en a pas, je vous fais mes félicitations, sénateur. Je sais que vous accomplirez de grandes choses avec cette équipe.

Avant de laisser la parole à nos témoins, j'aimerais informer les honorables sénateurs qu'à la suite de la présentation du ministère, nous aurons une vidéoconférence avec un groupe de Winnipeg -- ce qui explique la présence de tous les appareils.

Je voudrais souhaiter la bienvenue aux représentants du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien qui sont avec nous aujourd'hui, M. Austin, Mme Jackson et M. Kitchen. Je vous laisse la parole.

M. Bill Austin, sous-ministre adjoint, Revendications et gouvernement indien, Affaires indiennes et du Nord canadien: Honorables sénateurs, je suis heureux d'être ici aujourd'hui pour vous parler du projet de loi C-14, à savoir la Loi sur la mise en oeuvre des mesures concernant le règlement de revendications au Manitoba. C'est un projet de loi de nature administrative, mais il aura une incidence importante sur près de 30 Premières nations du Manitoba et sur le règlement de leurs revendications. Plutôt que de parler des aspects techniques, je vais essayer plutôt de vous faire comprendre ce que le projet de loi signifie pour les personnes concernées.

Le projet de loi est en deux parties. La première traite de la Nation crie de Norway House et de son accord de mise en oeuvre principale de 1997. Cet accord prévoit pour la collectivité une indemnité et un ensemble d'avantages destinés à compléter ceux obtenus en vertu de la Convention sur la submersion de terres du Nord du Manitoba, conclue en 1977. Avec cet accord, la Première nation est munie des moyens qui lui permettront de retrouver une vie normale et de rebâtir sa collectivité après les répercussions néfastes qu'a eue sur elle la réalisation d'un projet de développement hydroélectrique au cours des années 70.

La première partie du projet de loi C-14 contribuera pour beaucoup au succès de cet accord. Ses dispositions permettront au groupe de Norway House de déterminer lui-même la meilleure façon d'utiliser les terres en fief simple et les sommes obtenues en vertu du règlement et qui sont gérées respectivement au moyen d'une société foncière et d'une fiducie. Sans les dispositions contenues dans la partie 1, on risquerait que ces terres en fief simple et au moins certaines catégories de fonds reçus en vertu de l'accord soient considérées comme visées par la Loi sur les Indiens et assujetties à l'administration du ministère des Affaires indiennes, ce qui n'est pas l'intention des parties à l'accord.

Je tiens à assurer le comité que nous avons prévu les mécanismes pertinents dans le cadre de l'accord pour assurer une reddition des comptes appropriée aux membres de la Première nation de la gestion de ces terres en fief simple et des fonds obtenus dans le cadre du règlement.

La Partie 1 assure aussi une utilisation optimale des mécanismes de règlement contenus dans l'accord de mise en oeuvre principal, ce qui comprend l'arbitrage selon la loi provinciale pour toutes les parties, y compris le Canada. Les mécanismes de règlement des différends prévus dans l'accord sont plus efficaces et tiennent davantage compte de la situation locale que ceux de la Convention sur la submersion de terres du Nord du Manitoba.

Nous avons déjà constaté que les sommes de règlement fournies au fonds de fiducie du groupe portent fruit pour la collectivité de Norway House. Jusqu'à maintenant, un centre communautaire, un centre récréatif, des programmes sociaux et 105 emplois ont été créés. Ces avantages ne pourront que se multiplier lorsque la Première nation pourra gérer directement le produit des fonds de règlement relatifs à ses terres en fief simple et les mécanismes de règlement des différends.

Les honorables sénateurs connaissent peut-être déjà des dispositions semblables à celles que contient la partie 1 du projet de loi C-14. Le Parlement a déjà adopté en effet, à trois reprises, des lois semblables pour trois autres des cinq Premières nations visées par la Convention sur la submersion de terres du Nord du Manitoba. Il s'agit des lois sur la submersion de terres visant la Première nation crie de Split Lake et les Premières nations de York Factory et de Nelson House.

J'aimerais maintenant passer à la partie 2 du projet de loi, qui porte sur tous les règlements de revendication au Manitoba -- ceux déjà conclus et ceux à venir -- en vertu desquels le Canada s'engage à mettre de côté des terres à titre de réserves. Afin d'assurer une liberté maximale de choix, en particulier pour les règlements futurs, les Premières nations auraient le choix d'adhérer ou non aux dispositions de la Partie 2.

La Partie 2 permettra de raccourcir le processus d'approbation de terres destinées à recevoir le statut de terres de réserve en vertu de règlements de revendications au Manitoba, en habilitant les Premières nations visées à préserver les droits existants et à profiter des possibilités de développement économique sur ces mêmes terres pendant le processus de création d'une réserve. Les Premières nations du Manitoba et les tiers concernés pourront en effet conclure des ententes exécutoires sur la façon de préserver les intérêts existants sur les terres qu'une Première nation a choisies, avant même que la réserve soit créée. Une Première nation ne peut tout simplement pas exercer un tel pouvoir actuellement en vertu de la Loi sur les Indiens car, en vertu de celle-ci, une Première nation ne peut grever des terres par des intérêts qu'une fois qu'elles ont été mises de côté à titre de terres de réserve.

Les dispositions contenues dans la Partie 2 assureront une transition sans heurt des intérêts de tiers aux intérêts sur les terres de réserve, en assurant une certitude légale aussi bien à ces tiers qu'aux Premières nations. Les Premières nations pourront aussi accorder des intérêts là où il n'en existe pas encore, ce qui leur permettra de saisir les opportunités économiques pendant que se déroule le processus de création de la réserve.

De plus, la Partie 2 habilite le ministre à conférer le statut de terre de réserve à des terres dans le cadre de la création de réserves en vertu de règlements de revendications au Manitoba, pouvoir qui relève présentement du gouverneur en conseil. Ces engagements liés à l'agrandissement de réserves portent actuellement sur une superficie de plus de 1,3 million d'acres, en vertu de divers règlements de revendications au Manitoba -- 1,1 million d'acres s'appliquant au seul Accord-cadre sur les droits fonciers issus de traités au Manitoba. Ces engagements ne pourront toutefois être réalisés en une seule étape. Les Premières nations procéderont plutôt à des sélections successives de terres, dont chacune sera visée par son propre décret de création de réserves, lorsque toutes les conditions seront remplies -- en ce qui concerne l'environnement, les intérêts de tiers, et cetera. Sans ce pouvoir ministériel de création de réserves, le processus actuel d'adoption des décrets sera littéralement inondé de demandes administratives de décrets pour l'octroi du statut de réserve à des terres.

En terminant, j'aimerais souligner à nouveau que cette loi aidera, non pas une seule Première nation, mais un grand nombre de Premières nations du Manitoba, aussi bien celles qui ont déjà obtenu des règlements que celles qui seront appelées à en conclure. Cette loi leur permettra de prendre des décisions au sujet du produit de leurs règlements et des terres visées par ces règlements afin de s'assurer un meilleur avenir sur le plan économique. Les Premières nations du Manitoba ont indiqué que 80 p. 100 de leurs terres seront affectées au développement économique. Dans beaucoup de cas, des négociations avec des promoteurs sont déjà en cours, et plus de 400 000 acres de terres ont déjà été désignés.

Les Premières nations du Manitoba attendent l'adoption de cette loi pour conclure des ententes au sujet d'initiatives économiques qui seront un facteur clé de la véritable valeur qu'auront leurs nouvelles terres de réserve pour leur collectivité. Elles nous ont d'ailleurs dit de façon non équivoque qu'elles sont impatientes de voir cette loi adoptée. Sans cette loi, elles risqueraient de perdre de précieuses opportunités.

Honorables sénateurs, je vous remercie de l'occasion que vous m'avez fournie de m'adresser au comité au sujet de cet important texte de loi. Mes collègues et moi-même répondrons maintenant avec plaisir à vos questions.

La présidente: J'aimerais vous faire remarquer qu'il manque la page 7 à la version anglaise du mémoire.

M. Austin: Nous allons y remédier et nous nous veillerons à ce que le comité reçoive une copie intégrale de l'exposé.

Le sénateur Watt: Veuillez m'excuser si je ne comprends pas tout à fait le projet de loi, mais je n'ai pas eu l'occasion de l'examiner en profondeur. Néanmoins, je vois certaines similitudes avec des accords antérieurs dans la façon dont il est conçu. Plusieurs parties participent à l'accord -- non seulement le gouvernement, mais aussi les promoteurs comme la Régie de l'hydroélectricité du Manitoba.

Tout d'abord, j'aimerais avoir une idée précise du nombre de personnes qui sont directement touchées par ceci. Lorsque vous parlez de liberté de choix d'adhérer ou non aux dispositions, combien de personnes sont concernées?

M. Austin: La Nation de Norway House que concerne la partie 1 du projet de loi, qui est d'ailleurs semblable aux trois autres accords qui ont été conclus, a plus de 5 000 membres, dont environ 3 700 vivent sur la réserve. Cependant, tous les membres des Premières nations du Manitoba seraient surtout touchés par la deuxième partie du projet de loi.

Je vais maintenant laisser la parole à mon collègue, M. Gord Kitchen. Il pourra vous donner une idée plus précise du nombre de membres des Premières nations qui vivent dans les réserves.

M. Gord Kitchen, directeur, Mise en oeuvre des ententes sur les revendications, Affaires indiennes et du Nord canadien: Je n'ai pas de total, mais je peux vous dire qu'il y a 27 Premières nations qui jouissent de droits fonciers reconnus par traité, et leur population varie entre 200 et 2 500 membres. Je vais trouver les chiffres exacts pour vous.

M. Austin: Il y a potentiellement 62 Premières nations au Manitoba. Nous pouvons certainement obtenir les chiffres exacts si vous voulez, sur le nombre de membres qui vivent dans les réserves et hors d'elles.

Le sénateur Watt: Ce texte de loi qui est proposé vise spécifiquement la Nation crie de Norway House.

M. Austin: Oui, la première partie.

Le sénateur Watt: Cependant, le projet de loi ne se limite pas à ce peuple-là seulement puisqu'à la deuxième partie, vous avez prévu que d'autres puissent choisir d'y adhérer.

M. Austin: Oui, c'est bien cela.

Le sénateur Watt: Et pourquoi donc? Pourquoi préparez-vous le terrain pour de futures revendications potentielles?

M. Austin: Il y a deux parties à ce texte, qui est un projet de loi omnibus. Il concerne particulièrement, comme vous l'avez souligné, la Nation crie de Norway House, mais il facilite aussi le développement économique dans le traitement des terres, à la partie 2, pour toutes les Premières nations. Par conséquent, c'est un bon moyen, d'après nous, de mettre de l'avant des mesures législatives efficaces.

Le sénateur Watt: Je suis curieux de savoir comment est conçue la loi proposée parce que c'est la première de son genre que je vois depuis mon arrivée au Sénat. On dirait plus des instructions aux Autochtones pour qu'ils embarquent, et le projet de loi donne l'impression, dans sa deuxième partie, que les nations autochtones n'étaient pas vraiment représentées. Où étaient-elles lorsqu'on préparait le terrain pour la ronde suivante de négociations, pour les nouveaux venus? Je trouve ceci très curieux.

Pourquoi le gouvernement semble-t-il adopter une attitude de générosité en invitant les Premières nations à «embarquer»? Sont-elles prêtes à embarquer? Je ne vois pas vraiment le raisonnement derrière tout cela. Je comprends que le développement économique est un aspect. Est-ce que c'est que le ministère juge qu'il doit régler maintenant les revendications qui ne sont pas encore réglées? Est-ce que c'est à cause des politiques en vigueur actuellement à ce propos?

M. Kitchen: La Partie 2 du projet de loi est venue la Loi sur la mise en oeuvre de mesures concernant le règlement de revendications au Manitoba, qui a été négociée pour le compte de 19 Premières nations à ce moment-là, une négociation en masse, si on veut. Pendant ces négociations, la question a été soulevée de la difficulté de composer avec les intérêts des tiers et du processus lui-même. Par conséquent, les parties ont convenu que l'État recommanderait une loi pour régler ce problème. C'est de là que vient le projet de loi.

Nous avons 19 Premières nations qui jouissent de droits fonciers reconnus par traité dans cette entente. Sept autres sont couvertes par des ententes antérieures. Nous ne pouvons pas les exclure, pas plus qu'aucune revendication spécifique connexe. C'est lié spécifiquement aux accords de règlement des revendications, qu'ils soient en vigueur actuellement ou conclus dans l'avenir.

On estimait que c'était à la Première nation de décider si elle voulait ou non agir en vertu des règlements et politiques actuels. Par contre, si elles préfèrent cette voie-ci parce qu'elle est plus avantageuse pour elles, elles sont libres de l'adopter. Au lieu que ce soit le gouvernement qui leur impose quelque chose, c'est aux Premières nations de faire un choix.

M. Austin: L'élément commun est la réalisation des engagements actuels du gouvernement et de ses obligations à l'égard de plusieurs Premières nations du Manitoba découlant de la Convention sur la submersion de terres du Nord du Manitoba, ce qui est plus dans la Partie 1, de même que divers accords de règlement des revendications territoriales ou d'autres revendications spécifiques qui pourraient être présentées ultérieurement. Ainsi ces obligations sont-elles comblées de façon globale.

Le sénateur Watt: Je ne suis pas tout à fait satisfait des réponses que je reçois. Je vois aussi en ce projet de loi une première étape -- le même genre de loi pourrait facilement s'appliquer à d'autres provinces. Est-ce que le ministère verrait en ceci un précédent établi dans une province, qui pourrait s'appliquer à d'autres provinces?

M. Kitchen: Le raisonnement qui sous-tend le projet de loi vise principalement à traiter des intérêts des tierces parties, ce qui est, on le sait, l'enjeu national. Le projet de loi est structuré de telle manière à permettre que cela continue. Je ne pourrais pas dire s'il devrait s'appliquer à l'échelle nationale ou non.

Le sénateur Christensen: Nous allons certainement entendre le témoignage de personnes qui représentent les intérêts des tierces parties. Lesquels de ces intérêts sont touchés dans ces régions par le projet de loi C-14? Quel processus de consultation a été appliqué, et dans quelle mesure ont-ils participé à l'élaboration de ce projet de loi?

M. Austin: Je crois que les intérêts potentiels des tiers sont très variés, que ce soit la servitude d'hydroélectricité ou des terres pour le développement économique, d'autres servitudes, et cetera, ou la mise de côté de terres. C'est assez vaste. Il y a eu des échanges et des discussions entre les Premières nations et les tiers.

M. Kitchen: Les intérêts des tiers actuels dépendent de l'emplacement des terres et des caractéristiques de celles-ci. Nous avons mis de côté les terres pour les réserves dans le nord du Manitoba, et nous avons réglé certains intérêts de tiers. Ceux-ci portaient sur le développement hydroélectrique ou le dégagement des routes en hiver pour permettre aux gens de circuler. À l'échelle de la province, ce peut être à peu près n'importe quoi -- par exemple, l'accès à un endroit particulier du territoire. Tout est possible, et il faut pouvoir en traiter dans le processus.

Le sénateur Christensen: Avec ces règlements, est-ce qu'il y aurait des terres actuelles qui seraient tenues en fief simple?

M. Kitchen: En vertu de l'Accord-cadre il y a six bandes, et trois autres qui peuvent acquérir des terres au lieu de choisir des terres provinciales transférées au fédéral tout simplement parce qu'il n'y avait pas assez de terres de la Couronne dans leur région. Les terres seraient transigées de vendeur consentant à acheteur consentant. Les terres seraient détenues en fief simple jusqu'au jour où elles seraient converties en terres de réserve.

M. Austin: L'accent est sur le fait que c'est une transaction entre acheteur consentant et vendeur consentant.

Le sénateur Cochrane: Est-ce qu'il n'aurait pas mieux valu que ces deux parties constituent deux textes de loi distincts?

M. Austin: Comme j'ai essayé de l'expliquer, dans l'ensemble, le gouvernement essaie de respecter ses engagements actuels. Il y en a plusieurs. Certains sont prévus par la Convention sur la submersion de terres du nord du Manitoba et d'autres découlent de l'Accord sur les droits fonciers issus de traités. Norway House, par exemple, bénéficiera des deux parties de la loi. Nous essayons déjà depuis quelque temps, comme vous le savez, de résoudre les problèmes de la Convention sur la submersion de terres du nord du Manitoba.

Tout d'abord, nous avons essayé d'agir pour les cinq Premières nations collectivement, mais nous avons compris que cela ne fonctionnerait pas. Nous avons proposé des textes pour chacune. Nous en avons fait trois et celui-ci est le quatrième. Ce sont des accords distincts de ce point de vue aussi.

Une fois que nous avons une entente de mise en oeuvre, nous la mettons de l'avant à la première occasion qui se présente plutôt que de demander aux gens d'attendre. En combinant tout cela dans les Parties 1 et 2, l'on s'efforce de faciliter le règlement de ce que veulent les Premières nations et de créer ces débouchés économiques dont elles souhaitent tirer parti.

Le sénateur Cochrane: Il me semble que ce serait tout aussi réalisable séparément. Je pense que ces groupes auraient encore une incidence positive si c'était fait à part.

Cinq Premières nations ont été touchées par la submersion des terres du nord du Manitoba. Celle-ci est la quatrième, comme vous l'avez souligné, dont il est traité dans un texte de loi. La dernière Première nation, celle de Cross Lake, refuse, n'est-ce pas de conclure un accord de mise en oeuvre?

M. Austin: Oui, je crois que vous avez raison. Nous travaillons encore avec Cross Lake pour régler le problème et mettre en oeuvre la Convention sur la submersion de terres du nord du Manitoba avec cette Première nation. Elle pourrait bénéficier des avantages que présente cette convention.

Le sénateur Cochrane: Pouvez-vous me dire pourquoi ils refusent cette entente? Pourquoi croit-il que l'entente initiale offre de meilleures possibilités d'en arriver à un règlement acceptable?

M. Austin: Sénateur, avec tout le respect que je vous dois, je ne suis pas sûr d'être à la hauteur de la tâche pour vous parler de leurs préoccupations. Je crois qu'il serait plus juste de leur poser la question. Nous avons assurément tenté de collaborer avec eux et nous continuons de le faire. Cependant, nous n'avons pu en venir à une entente pour l'instant.

Le sénateur Cochrane: D'après les discussions que vous avez eues avec eux, vous devez connaître leurs réserves.

Le sénateur Watts: Nous devrions peut-être leur poser la question.

M. Austin: Je crois que c'est de cela dont il s'agit, sénateur.

Le sénateur Watts: Nous pourrions les convoquer comme témoins. Nous avons une semaine.

Le sénateur Cochrane: Vous préféreriez ne pas nous donner d'autres précisions quant aux raisons de leur refus?

Mme Sandy Jackson, chef intérimaire, Unité de revendications, Affaires intergouvernementales/Politique des opérations, région du Manitoba, Affaires indiennes et du Nord: Il est injuste de nous demander d'expliquer les raisons invoquées par la Nation de Cross Lake. J'aimerais dire, toutefois, que nous respectons sa décision. Nous maintenons notre collaboration.

Elle nous a demandé de mettre en oeuvre les dispositions de la convention initiale sur la submersion de terres du nord du Manitoba parce que c'est la voie qu'ils veulent suivre. Pour respecter cette décision, nous avons tenté de mettre en oeuvre les dispositions initiales de l'entente avec la Nation de Cross Lake. Le processus suit son cours. L'année prochaine ou l'année qui suit la nation pourrait décider que l'accord de mise en oeuvre est une solution qui l'intéresse. L'accord de mise en oeuvre est une option qui s'offre encore à la nation.

Les options sont là. La Nation de Cross Lake a décidé pour l'instant de s'en tenir à la convention initiale sur la submersion de terres du nord du Manitoba. Nous respecterons cette décision et nous travaillerons de concert avec elle pour la mettre en oeuvre la convention en respectant les conditions initiales.

Le sénateur Cochrane: Merci. Mon intention n'était pas de vous faire dire quoi que ce soit en dehors des discussions que vous avez eues.

La partie 2 du projet de loi simplifiera le processus de mise de côté de terres à l'avenir. L'autorité sera conférée au ministre plutôt que de recourir au un décret du gouverneur en conseil, si je ne m'abuse.

M. Austin: C'est exact.

Le sénateur Cochrane: Je crois comprendre que cela va accélérer le processus. Quelles sont les répercussions pour ce qui est d'un examen ultérieur par le Parlement de ces décisions et actions?

M. Kitchen: Les ententes sont approuvées par le Cabinet à un certain moment. Par exemple, l'Accord cadre sur les droits fonciers issus des traités a été approuvé par le Cabinet et a passé au travers de ce processus. Le Canada a déjà accepté d'ajouter ces nouvelles terres de réserve. D'après le projet de loi une fois que l'accord a reçu l'aval du ministère, c'est terminé. Le ministre sera fondé de pouvoir alors qu'auparavant ce pouvoir relevait du gouverneur en conseil. Je crois que l'expression est «prérogative royale». Cela a été fait parce que la Loi sur les Indiens ne dit pas qui est habilité à créer une réserve. Cela s'est toujours fait de cette manière. Tout ce qu'on vise par là, c'est de simplifier un processus que nous avons accepté. Les détails de chaque ajout de terres sont précisés dans les dispositions avec tous nos règlements et politiques.

Le sénateur Sibbeston: La seule expérience que j'ai en ce qui a trait à une entente avec les Premières nations, c'est l'accord Nisga'a. Lorsque nous avons étudié cette question, les chefs Nisga'a se sont beaucoup investis dans la défense de leur cause.

Je suis curieux de savoir quelle est la position adoptée par les Premières nations là-dessus. Je ne sais pas si le fait d'entendre des représentants du ministère rend justice à la question. Où sont la Nation crie de Norway House et les autres Premières nations qui sont touchées par cette mesure législative?

La présidente: Elles nous ont fait parvenir des lettres d'appui. En outre, nous entendrons ces gens par vidéoconférence.

Le sénateur Sibbeston: Pourquoi ne sont-elles pas ici alors que cela revêt tant d'importance pour elles? Pourquoi la Nation crie de Norway House et d'autres Premières nations qui sont touchées par cette mesure législative ne sont-elles pas ici aujourd'hui pour défendre cette mesure législative à la place de représentants du ministère? Je suis curieux. Je veux savoir.

Le sénateur Watts: Dites-vous qu'ils n'ont pas assez faim?

Le sénateur Sibbeston: Je ne sais pas. Ma seule expérience remonte à l'étude du projet de loi sur l'Accord Nisga'a. Lorsque nous avons traité de cette question, les chefs Nisga'a sont venus ici pour défendre leur cause. Ce processus me semble tout à fait différent. Je ne suis pas satisfait d'entendre les représentants du ministère parce que je ne crois pas qu'ils s'y connaissent beaucoup en la matière. Je ne pense pas qu'ils ont répondu adéquatement aux questions qui leur ont été posées. Je ne crois pas que ce sont les meilleurs porte-parole en ce qui a trait à cette question.

La présidente: Nous avons communiqué avec les Premières nations et, plutôt que de se rendre à Ottawa, elles ont préféré témoigner par vidéoconférence. Elles traitent avec le ministère depuis cinq ans et demi. Elles ont comparu devant le comité de la Chambre des communes. Elles estiment n'avoir plus rien à ajouter. Nous leur avons donné offert de venir comparaître devant le comité, mais elles ont préféré le faire par vidéoconférence.

Nous avons demandé à des représentants du ministère de comparaître aujourd'hui pour nous faire part de leur point de vue, comme nous le faisons habituellement. Les représentants du ministère qui sont ici ont suivi le dossier de très près au fil des ans.

Madame Jackson, vous voudriez peut-être nous dire quelques mots sur votre participation.

Mme Jackson: Je travaille avec les cinq Premières nations auxquelles s'applique la Convention sur la submersion de terres du nord du Manitoba depuis 1990. Nous avons eu de nombreuses discussions à cet égard.

Ce projet de loi n'a rien à voir avec le projet de loi sur l'accord Nisga'a qui porte sur l'autonomie gouvernementale. Le projet de loi que nous étudions traite de changements administratifs pour faciliter, dans le cas de la partie 1, la mise en oeuvre de mesures concernant l'accord conclu avec la Nation crie de Norway House. Ce projet de loi est vraiment de nature administrative ce qui explique la présence ici de représentants du ministère. Les changements que nous comptons apporter ont des répercussions sur les politiques que nous avons en place au ministère.

Le sénateur Johnson: En 1997, la Nation de Norway House a tenu un référendum sur la question. La majorité de ceux qui ont voté ont voté en faveur de la question qui ne date pas d'hier. Nous avons entendu des représentants de la nation lorsque nous avons étudié le projet de loi C-56. La question a été discutée à fond avec des représentants de la Nation de Norway House. Je leur ai aussi parlé en fin de semaine. Nous essayons simplement d'en assurer la mise en oeuvre maintenant.

Le sénateur Sibbeston: Par conséquent, le projet de loi que nous avons devant nous concerne uniquement les terres qui ont été inondées et l'accord conclu avec la Nation crie de Norway House sur le règlement de questions liées à la submersion de terres. Le projet de loi ne comporte pas de revendications territoriales globales ou d'ententes d'autonomie gouvernementale, si je comprends bien.

Mme Jackson: La partie 1 du projet de loi vise à faciliter la mise en oeuvre de certaines parties seulement de l'accord. Elle ne porte pas sur l'accord complet. Celui-ci a déjà été mis en oeuvre. Cette mesure législative vise à régler deux ou trois questions administratives. La Partie 2 est une partie distincte du projet de loi.

Le sénateur Andreychuk: Les projets de loi concernant les inondations nous sont toujours présentés la dernière semaine d'une législature. Depuis sept ans que je suis ici, je trouve qu'il est arrivé souvent que des projets de loi concernant les Autochtones soient expédiés en vitesse la dernière semaine. Nos priorités sont mal établies.

Je conviens avec vous que la première partie du projet de loi porte sur un accord négocié dont nous aurions dû procéder à la mise en oeuvre il y a longtemps. Je n'y vois aucun problème. Cependant, en ce qui concerne la deuxième partie du projet de loi, des mesures d'ordre administratif à ce qu'on dit, contient vraiment beaucoup d'éléments importants. À l'avenir, si un projet de loi relatif à des inondations contient des questions de fond, nous devrions demander à ce qu'il soit scindé.

Le cadre pour toutes les autres réserves est intégré dans cette mesure législative. Cela dit, dois-je croire que tous les groupes qui seront touchés ou pourraient être touchés par la deuxième partie du projet de loi ont en fait été consultés et sont d'accord avec ce processus? Si ce n'est pas le cas, ont-ils toujours le choix de passer par un cadre différent dans leurs négociations ou seront-ils liés par celui-ci?

M. Kitchen: La Partie 2 de la loi proposée est fondée sur une revendication, donc elle n'entre en jeu que lorsque la revendication est réglée.

Le sénateur Andreychuk: Voici où je veux en venir: si une Première nation fait une revendication, elle doit suivre un processus qui est décrit dans la loi proposée; cependant, si la réserve et la bande décident de donner une autre orientation à leur revendication, sont-ils maintenant tenus d'adhérer à cette structure seulement, ou ont-ils encore d'autres choix?

M. Kitchen: Ils ne sont tenus à rien. Il y a un processus existant.

Le sénateur Andreychuk: Un accord-cadre global?

M. Kitchen: Non, c'est le processus prévu dans la Loi sur les Indiens. Le projet de loi que nous avons ici restructure en partie le processus actuel. Cependant, une Première nation a le choix d'appliquer les nouvelles mesures législatives -- autrement dit, elle choisit d'adhérer à la nouvelle loi. Autrement, elle fonctionne selon le système actuel. Si elle veut appliquer les nouvelles mesures législatives, elle fait le choix d'y adhérer; elle n'y est absolument pas obligée.

Le sénateur Andreychuk: C'est présenté comme un projet de loi habilitant; est-ce que ce serait une description assez juste?

M. Kitchen: Oui, il s'y trouve les dispositions de la Loi sur les Indiens actuelle et ses règlements, ainsi que les politiques sur les ajouts, tout y est.

Le sénateur Andreychuk: Je ne sais plus très bien quel témoin a dit que l'on tentait de s'assurer que les fonds et les structures de responsabilité ne soient pas sous le régime de la Loi sur les Indiens mais de cette loi qui est proposée, et que vous avez fait ceci dans le but de contourner -- si c'est le terme qui convient -- la Loi sur les Indiens.

M. Austin: La reddition des comptes est un aspect très important. Des fiducies ont été créées en vertu des accords de mise en oeuvre et prévoient le cadre ou le régime de responsabilité relativement aux fonds et aux terres. Elles constituent un mécanisme très important, qui permet à la Première nation -- dans ce cas-ci à Norway House et à ses membres -- d'appliquer un régime de responsabilité qui couvre tous ses membres. Il y a plusieurs administrateurs, par exemple, qui sont désignés, certains au moyen d'élections et d'autres par désignation. Il y a une banque qui participe à titre d'administrateur. Un solide cadre de reddition des comptes est prévu pour la gestion, par exemple, des fonds qui seront versés dans cette fiducie.

Le sénateur Andreychuk: À ce que j'ai compris, l'objet de ce projet de loi qui est proposé est de faire assumer l'obligation de rendre compte par le peuple autochtone, qu'il puisse intervenir et qu'il assume une responsabilité plus directe, et par conséquent vous tentez, si je peux dire, de contourner la Loi sur les Indiens ou d'insérer une autre structure que le processus de supervision qu'elle contient?

Mme Jackson: Nous tentons d'obtenir une dérogation à la Loi sur les Indiens relativement aux sommes découlant des règlements. Il y a une part de l'argent du règlement des revendications de Norway House qui, à notre avis, revient aux Indiens, et selon la Loi sur les Indiens, ces sommes seraient versées au Canada, puis nous les administrerions pour le compte des Premières nations.

Dans le cadre des négociations, la Première nation a exprimé l'avis qu'elle est capable d'administrer les sommes des règlements elle-même, de composer avec elles et de prendre des décisions à leur sujet sans que le ministère agisse comme son gardien. C'est un pas vers l'autonomie gouvernementale et la Première nation a clairement exprimé la volonté qu'il en soit ainsi. Nous tentons d'obtenir une dérogation aux dispositions de la Loi sur les Indiens qui concernent l'argent des Indiens et nous nous assurons que les fonds du règlement des revendications, les responsabilités, comme le disait M. Austin, soient assumés par le peuple de Norway House. C'est ce que nous tentons d'obtenir.

Le sénateur Andreychuk: Pourriez-vous expliquer la Partie 2, puisque vos observations étaient surtout axées sur la Partie 1?

Mme Jackson: Mes observations concernent la Partie 1.

Le sénateur Andreychuk: Comment la Partie 2 s'applique-t-elle à une exemption et comment a-t-elle préséance sur la Loi sur les Indiens?

M. Kitchen: La Partie 2 prévoit certains versements faits directement à la Première nation et ces fonds sont administrés par la Première nation conformément aux modalités d'une fiducie. Le Canada ne figure pas parmi les administrateurs de cette fiducie. Ses administrateurs sont des membres de la bande qui sont nommés et élus, et il y a un administrateur indépendant, souvent une institution financière choisie par la bande, mais l'argent est versé directement à la Première nation. Certaines Premières nations reçoivent aussi de l'argent pour acheter des terres, comme je l'ai dit plus tôt. Les fonds sont dans un autre compte de fiducie mais sont gérés par les administrateurs. Ils doivent rendre compte de leurs activités chaque année aux membres de la Première nation en faisant effectuer une vérification indépendante, comme pour tout autre genre de fonds.

Le sénateur Andreychuk: J'essaye de m'assurer de la légalité de tout cela. La Loi sur les Indiens prévoit des fonctions de supervision pour le gouvernement fédéral. Vous dites, et je suis d'accord, qu'il faut s'éloigner de ce genre de structure, plus faire participer les Autochtones. Qu'y a-t-il, dans la Partie 2, pour m'assurer que vous pouvez y parvenir et qu'il n'y aura pas, plus tard, d'affirmations que la Loi sur les Indiens a préséance sur cette structure? Qu'est-ce qui annihile les responsabilités prévues dans la Loi sur les Indiens?

M. Kitchen: En vertu de la Partie 2, aucune exemption n'est demandée relativement aux sommes dont il est question dans la Loi sur les Indiens. Elles sont versées normalement, comme le financement sous forme de contribution qui est versé aux Premières nations.

Mme Jackson: Nous parlons ici de deux différents types d'ententes, et l'exemption des dispositions de la Loi sur les Indiens qui concernent l'argent des Indiens ne s'applique qu'à la Partie 1 et qu'à l'entente de règlement des revendications de Norway House.

Le sénateur Andreychuk: Je le comprends bien, mais je ne saisis pas la deuxième partie parce que l'accord n'est pas assez explicite pour qu'on puisse voir comment cela fonctionnera. Nous parlons ici d'ententes de règlements de revendication. Vous dites que les fonds circuleront de la façon habituelle. Je suis confuse. J'aimerais m'assurer que ce que vous faites se tient et a la capacité légale de faire front aux attaques.

M. Austin: En vertu de la politique du gouvernement en matière de revendications particulières, laquelle a préséance sur les droits fonciers issus de traités et autres revendications spécifiques, les fonds sont généralement versés aux Premières nations dans un compte en fiducie contrôlé de façon responsable. C'est bien ce dont il s'agit ici. Le gouvernement du Canada recourt généralement au mécanisme fiduciaire dans le règlement de ses engagements courants. Nous n'avons pas appliqué, à ce que je sache, la Loi sur les Indiens et les dispositions de la Loi sur les Indiens relatives à l'argent des Indiens parce que, dans le règlement de ces engagements, ceci n'est pas vu comme le genre d'activité qui avait été prévue lorsque la Loi sur les Indiens avait été formulée.

Le sénateur Andreychuk: Vous envisagez une revendication que le gouvernement fédéral règle et paie conformément à la politique, mais cela ne réduit pas les obligations et les responsabilités prévues par la Loi sur les Indiens. Est-ce bien ce que vous dites?

M. Austin: Oui.

Le sénateur Andreychuk: J'aimerais savoir s'ils ont reçu un certificat de conformité à la Charte des droits et libertés. Est-ce que cette loi qui est proposée est conforme à la politique standard? Le ministre devrait être ici pour nous dire si, en fait, ce projet de loi qui est proposé a été examiné à la lumière de la Charte et si un certificat a été émis.

M. Austin: Puis-je fournir une réponse au comité ultérieurement à ce sujet, je vous prie?

Le sénateur Rompkey: J'aimerais poser une question d'ordre général pour ma propre gouverne. Peut-être d'autres en connaissent-ils la réponse.

Cet arrangement devait être considéré comme un traité en vertu de l'article 35, je crois.

Le sénateur Watt: Le paragraphe 35(4).

Le sénateur Rompkey: Pourriez-vous entrer un peu dans le détail? Lorsque la Chambre des communes examinait le projet de loi, les Cris de Norway House ont déclaré qu'à ce qu'ils avaient compris, l'accord était un traité selon la description qu'en fait l'article 35. Le ministre des Affaires indiennes de l'époque l'a confirmé, ainsi que Matthew Coon Come, qui était alors le grand chef des Cris du Québec.

J'aimerais savoir quelle est la position du gouvernement? La Convention sur la submersion de terres du Nord a le statut de traité, en vertu de l'article 35; n'est-ce pas?

Mme Jackson: Il y a eu beaucoup de discussions sur le statut de la Convention sur la submersion de terres du Nord du Manitoba. Lorsque nous avons entamé les négociations avec Norway House et les autres Premières nations avec lesquelles nous avions des accords de mise en oeuvre, nous avons fini par convenir avec les Premières nations de ne pas débattre du statut de la convention, s'il s'agit ou non d'un traité. Ce qui nous occupait, c'était le respect des engagements du Canada, de la Régie de l'hydroélectricité du Manitoba et du gouvernement du Manitoba. Il y a eu un débat sur la nature de la convention. Nous avons décidé de mettre la question de côté et de nous concentrer sur la mise en oeuvre de cette entente.

Le sénateur Rompkey: J'essaie d'en venir aux droits fondamentaux. Y a-t-il eu des traités antérieurs?

M. Jackson: Oui, il y en a eus. Ces Premières nations font l'objet du Traité 5.

Le sénateur Rompkey: Toutes ces Premières nations ont des traités antérieurs?

Mme Jackson: Oui, c'est un fait. L'accord de compensation a été signé en 1977. À l'époque où il était négocié, si on en lit l'historique, rien n'indiquait...

Le sénateur Rompkey: J'essaie d'en venir à cet historique. Pourriez-vous me dire brièvement quand ces traités ont été signés?

Mme Jackson: Je ne peux pas vous dire quand ils ont été signés, mais c'est le Traité 5. La Convention sur la submersion des terres du Nord du Manitoba a été signée en novembre 1977.

Le sénateur Rompkey: Cette convention découle des traités antérieurs. L'obligation en principe figurait dans les traités antérieurs avec le gouvernement du Canada.

Mme Jackson: La Convention sur la submersion des terres du Nord porte sur le développement hydroélectrique dans le nord du Manitoba et la compensation pour ce développement. Le Traité 5 est un accord entre le Canada et les Premières nations relativement à plusieurs questions de traité. La Convention sur la submersion des terres du Nord ne découle pas nécessairement du Traité 5. Cependant, il est reconnu dans la Convention sur la submersion de terres du Nord que les Premières nations sont protégées par le Traité 5. Un lien est fait avec le Traité 5.

Le sénateur Rompkey: Bien que ce ne soit pas un traité conformément à l'article 35, les autres traités, eux, y sont conformes.

Mme Jackson: Il y a reconnaissance. Dans l'accord de mise en oeuvre, il y a une disposition selon laquelle les droits des Autochtones et les droits issus des traités ne sont pas touchés par cet accord. Par conséquent, nous ne changeons rien ni ne faisons rien. Nous nous assurons que la protection reste.

Le sénateur Johnson: J'aimerais poser une question. Combien de temps cela a-t-il pris? Pendant combien de temps avons-nous tenté d'instaurer l'autonomie gouvernementale au Manitoba, avec la Nation de Norway House et les autres? Je sais, d'après mes conversations avec le chef Ron Evans que cela a eu une incidence.

M. Austin: L'incidence est plutôt indirecte parce que le développement économique du territoire est ralenti, et cetera. Sur ce plan, il est vrai que plusieurs mesures sont prévues pour permettre aux Premières nations de devenir plus autonomes, plus solides sur le plan économique et qu'elles puissent progresser avec leurs méthodes de régie, leurs cadres de travail, et cetera.

Le sénateur Johnson: L'impression règne au Manitoba que ça a plutôt fait obstacle aux progrès dans ce domaine. J'aimerais que le comité en soit conscient.

[Français]

Le sénateur Gill: Dans la deuxième partie de l'entente, on dit que le ministre est habilité à accorder un statut de réserve à du terrain de la Couronne. C'est inhabituel. En fait, c'est une entente spécifique au Manitoba parce qu'ailleurs au Canada, on doit obtenir l'autorisation de la province et l'autorisation du gouverneur en conseil.

On dit que c'est le ministre des Affaires indiennes qui va accorder le statut. Au Manitoba, est-ce c'est la deuxième partie de l'entente qui s'applique? Je présume que vous avez accolé une entente sur Norway House à la deuxième partie qui veut que Norway House ait du terrain d'ajouté à sa réserve actuelle ou à sa communauté.

M. Austin: Je crois que vous avez raison.

[Traduction]

M. Austin: M. Kitchen pourrait expliquer ce manque de certitude, qui est important. C'est lié à certains pouvoirs donnés en vertu de la Loi sur les Indiens.

M. Kitchen: Dans de nombreux cas, la Première nation a choisi un bout de territoire dans une perspective de développement économique, pour lequel il lui faudra un partenaire. Selon la Loi sur les Indiens actuelle, la Première nation doit désigner ces terres pour la location ou conclure cette entente de partenariat. Ils règlent ça par vote collectif. Ils adoptent une résolution au conseil de bande, puis ils demandent au Canada de dresser les documents. Ils ne peuvent faire ceci que lorsque le territoire a le statut de réserve. Ils se retrouvent dans une situation où ils ont négocié une entente avec leur partenaire, mais ils ne peuvent accepter de présenter la proposition à leurs membres que lorsque le territoire est devenu une réserve.

Cette loi-ci leur permettrait de passer par ce processus d'approbation avant que le territoire devienne une réserve. La prise d'effet aurait lieu à l'instant même où le territoire recevrait son titre de réserve. Ainsi y a-t-il certitude. Il y a beaucoup de tiers qui ne veulent pas conclure d'entente sans pouvoir avoir de garantie.

[Français]

Le sénateur Gill: J'ai l'impression que l'essentiel de l'entente est de mettre de l'avant les possibilités d'agrandissement des communautés. J'ai l'impression que le Manitoba va dans ce sens, contrairement à la plupart des autres provinces, où pour toutes sortes de raisons, les gens ne veulent pas agrandir les communautés autochtones.

Au Manitoba, vous arrivez à une entente et cela aura certainement un impact sur l'ensemble du Canada. D'après mes connaissances, la majorité des communautés autochtones voudraient voir un agrandissement à leurs communautés à travers le pays. J'ai l'impression qu'il y aura une implication de la part des communautés. Êtes-vous du même avis?

[Traduction]

M. Austin: Il est important de souligner que ce projet de loi démontre que le Canada s'efforce de s'acquitter de ses obligations. Nous essayons d'établir un cadre de travail qui permette le développement économique et le progrès vers l'autonomie gouvernementale ou une activité économique plus grande, et de nous assurer pour tous les Canadiens que cela n'aura d'incidence que sur le Manitoba, et uniquement sur le Manitoba.

Nous essayons de mettre ce cadre en place non seulement pour les membres des Premières nations qui vivent dans les réserves, mais aussi pour les Manitobains qui pourraient avoir des intérêts ou des activités économiques qu'ils souhaiteraient réaliser avec des partenaires des Premières nations ou d'autres personnes.

La présidente: J'aimerais remercier les témoins d'être venus aujourd'hui. Tout ceci a été très intéressant et instructif. Si nous avons besoin de vous rappeler plus tard aujourd'hui, serez-vous disponibles?

M. Austin: Nous nous rendrons disponibles.

La présidente: Le comité va suspendre ses travaux pour se préparer à la vidéoconférence.

La séance est suspendue.

La séance reprend.

La présidente: Honorables sénateurs, j'aimerais savoir ce que vous penseriez d'obtenir l'autorisation de siéger de nouveau à 15 heures. Ainsi les techniciens auront-ils le temps de préparer la vidéoconférence de manière à ce que nous puissions entendre le restant de nos témoins, qui prendront environ une heure et demie pour faire leur présentation et répondre à nos questions.

Qui est en faveur d'une reprise de la séance ici à 15 heures? Sénatrice Andreychuk, êtes-vous d'accord?

Le sénateur Andreychuk: Oui.

Le sénateur Watt: Je suis tout à fait d'accord pour siéger cet après-midi. Il y a une question que j'aimerais soulever, après la séance de questions des témoins de ce matin. Je me demande si nous devrions prendre une décision administrative pour déterminer qui nous entendrons?

La présidente: Nous avons déjà notre liste de témoins. Leurs noms figurent à l'ordre du jour.

Le sénateur Watt: Avons-nous l'intention d'inviter des gens qui n'ont pas encore été pris en compte?

La présidente: Les deux premiers témoins sont des membres de la Nation crie de Norway House, M. Bryan Hart et M. Leonard McKay. Ils souhaitent exprimer une opinion dissidente. Ils ont des questions au sujet du projet de loi. Les deux autres témoins, M. Fred Muskego et M. Robert Roddick, du Conseil de bande de la Nation crie de Norway House, sont favorables au projet de loi. Par conséquent, nous avons les deux côtés et nous entendrons témoigner sur les deux côtés de la médaille du projet de loi.

Le sénateur Watt: Nous n'avons que cette semaine, alors.

Le sénateur Andreychuk: En êtes-vous sûr? Pouvons-nous en être sûrs?

La présidente: Si les honorables sénateurs sont d'accord, nous levons la séance et nous nous retrouverons à 15 heures dans cette pièce-ci.

La séance est levée.


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