Aller au contenu
SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule 18 - Témoignages pour la séance du 20 juin 2000


OTTAWA, le mardi 20 juin 2000

Le comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd'hui à 17 h 03 pour faire l'examen du projet de loi C-12, Loi modifiant la partie II du Code canadien du travail portant sur la santé et la sécurité au travail, apportant des modifications matérielles à la partie I du Code canadien du travail et modifiant d'autres lois en conséquence.

Le sénateur Michael Kirby (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Nos témoins, aujourd'hui, sont la ministre du Travail, l'honorable Claudette Bradshaw, et plusieurs de ses collaborateurs.

La ministre souffre d'une otite, et elle devra, pour cette raison, se rendre en voiture à Moncton ce soir, au lieu de prendre l'avion, pour rencontrer le premier ministre du Nouveau-Brunswick demain. J'espère que nous saurons être raisonnablement expéditifs avec nos questions.

Madame la ministre, je vous remercie d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer. Je vous laisse la parole.

L'honorable Claudette Bradshaw, ministre du Travail: Avant de commencer, je tiens à vous remercier de votre compréhension et pour avoir accepté d'avancer notre rencontre à ce soir, au lieu de demain. Je vous en suis très reconnaissante.

Honorables sénateurs, je suis très heureuse de vous parler aujourd'hui du projet de loi C-12 modifiant la partie II du Code canadien du travail. Lorsque nous discuterons de ces modifications qui influeront sur la santé et la sécurité des employés, il serait bon de nous rappeler qu'«il vaut mieux prévenir que guérir».

Vous savez tous certainement qu'en médecine, par exemple, on met de plus en plus l'accent sur la prévention. Avec les régimes alimentaires et l'exercice, entre autres, les médecins cherchent à prévenir certaines maladies avant qu'elles n'apparaissent, plutôt que de consacrer de précieuses ressources au traitement de maux qui auraient pu être évités. De même, l'un des principes fondamentaux des modifications du projet de loi est la reconnaissance que la prévention est la clé de la santé et de la sécurité au travail.

[Français]

Au cours du débat sur ce projet de loi, on vous a donné ou on vous donnera diverses statistiques sur les accidents et les maladies du travail. Il vaut la peine de les répéter. Dans la sphère de compétence fédérale, chaque année, en moyenne, environ 55 000 employés sont victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles et 36 employés décèdent au travail.

Par exemple, au Nouveau-Brunswick, un employé s'est tué en tombant d'un toit qu'il inspectait. En Ontario, un conducteur de grue a été écrasé quand la grue qu'il conduisait s'est renversée sur lui. Au Québec, un débardeur a été coincé entre deux rouleaux d'acier pendant le déchargement d'un navire. Et je pourrais vous citer d'autres exemples.

Les accidents mortels sont les plus tragiques, mais il y en a des milliers d'autres dont les victimes gardent des séquelles. Chaque accident, mortel ou non, affecte plusieurs autres personnes, les enfants, le conjoint, les parents, les amis et les collègues.

D'où l'étude aujourd'hui du projet de loi C-12. Tous les changements que nous proposons s'inspirent du désir du gouvernement du Canada de réduire à zéro le nombre de décès, d'accidents et de maladies liés au travail.

[Traduction]

Vous savez peut-être que ce projet de loi est le fruit d'un nombre incalculable d'heures de discussion entre le gouvernement, les syndicats et les entreprises, au cours desquelles on a étudié des centaines de propositions et réalisé un consensus sur un bon nombre de propositions importantes. Cela montre bien que la nature du projet de loi à l'étude a nettement favorisé la coopération. En effet, quand des vies humaines sont en jeu, les gens sont prêts à mettre leurs divergences idéologiques de côté pour travailler pour le bien commun.

Bien des changements proposés aujourd'hui s'appuient sur cet esprit de collaboration, car la meilleure façon de prévenir les accidents et la maladie liés au travail est d'éduquer les employés et de les faire participer.

Ce nouveau projet de loi encouragera une plus grande prise de conscience de la part des employés et leur participation aux questions de santé et de sécurité.

Premièrement, il stipule que les employeurs devront élaborer des programmes de formation et de prévention en matière de santé et de sécurité au travail. Il élargit considérablement les pouvoirs et les obligations des comités de santé et de sécurité actuels, pour leur permettre, entre autres, de collaborer avec les employeurs à élaborer ces programmes et à en contrôler l'application.

Deuxièmement, les employeurs devront identifier et évaluer les substances dangereuses présentes dans le lieu de travail. Ils devront aussi partager l'information à ce sujet avec les comités, pour leur permettre d'évaluer plus rapidement le degré d'exposition des employés à ces substances. Les comités pourront aussi consulter les rapports, les études et les analyses de l'État et de l'employeur qui ont un rapport avec la santé et la sécurité au travail.

En outre, les employeurs qui ont 300 employés ou plus devront former des comités d'orientation en matière de santé et de sécurité, ce qui assurera encore mieux la prévention. Ainsi, les questions de santé et de sécurité seront traitées d'une façon plus uniforme dans les entreprises dont les installations ne sont pas concentrées en un seul endroit.

[Français]

Après consultation des parties intéressées, des règlements pourront être élaborés, entre autres, en matière d'ergonomie, comme le stipule les modifications. Nous sommes tous conscients des énormes changements qui se produisent dans le monde du travail. L'automatisation et la prolifération des ordinateurs favorisent les microtraumatismes répétés, comme le syndrome du tunnel carpien. La multiplication de ce genre d'accidents a attiré récemment l'attention sur l'ergonomie, même si cette science existe depuis des dizaines d'années.

Ce projet de loi favorise aussi la prévention en ce qui concerne les femmes enceintes et allaitantes. En effet, il ajoute au code un article indépendant des dispositions relatives au refus de travailler en cas de danger, qui leur assure une protection additionnelle. Voyons cet article de plus près.

Auparavant, il n'était pas question des femmes enceintes ou allaitantes dans la partie II du code. Alors, quand elles avaient des raisons de croire que leur travail pouvait nuire à leur santé ou à celle du f<#0139>tus ou de l'enfant qu'elles allaitaient, elles devaient attendre d'obtenir un certificat médical, au risque de nuire entre-temps à sa santé ou à celle du f<#0139>tus ou de l'enfant qu'elles allaitaient.

Les dispositions actuelles de la partie III du Code canadien du travail, qui porte sur les normes du travail, leur offre une protection limitée. Elle peuvent demander que leur employeur modifie leurs tâches ou leur en donne d'autres, si possible, pendant un certain temps. Elles doivent obtenir un certificat médical indiquant la durée de la période de risque et les activités ou les situations à éviter.

Aux termes du projet de loi, elle peuvent maintenant cesser d'effectuer une tâche qu'elles jugent risquée, ceci avec plein salaire et avantages, jusqu'à ce qu'elles aient consulté leur médecin, étant entendu qu'elles le feront le plus tôt possible. Leur employeur peut entre-temps les réaffecter à un autre travail ou endroit sécuritaires.

[Traduction]

Ce n'étaient là que quelques exemples de la façon dont les modifications proposées au projet de loi C-12 contribueront à prévenir la maladie et les accidents liés au travail. Évidemment, les agents de santé et de sécurité du gouvernement continueront d'inspecter les lieux de travail, d'enquêter sur les infractions, d'imposer des mesures correctrices aux contrevenants et, au besoin, de recommander des poursuites et des amendes dont le montant, en passant, sera considérablement augmenté.

Même si les règles ou les systèmes que nous mettons en place étaient parfaits, les êtres humains et le milieu dans lequel nous tous évoluent ne le sont pas. C'est pourquoi nous devons rester vigilants. Nous pouvons prendre des mesures rigoureuses pour prévenir, éduquer, superviser, contrôler et analyser. Nous pouvons réduire considérablement le nombre de maladies et d'accidents liés au travail, comme nous le faisons depuis 20 ans. Cependant, lorsque rien n'y fait, nous sommes prêts à punir les irresponsables, comme nous l'avons toujours fait, par exemple en augmentant considérablement les amendes pour ceux qui refusent systématiquement de se conformer aux instructions des agents de santé et de sécurité.

Honorables sénateurs, nous serions heureux de poursuivre les délibérations, mais nous espérons que les divergences de vues sur les questions de détail pourront être réglées rapidement. Je sais que nous sommes tous d'accord sur les principes fondamentaux de ce projet de loi, parce qu'il vise à protéger la vie des employés canadiens, à laquelle nous attachons tous le plus grand prix.

Le président: Avant de laisser le sénateur Kinsella entamer la période de questions, j'aimerais demander à l'un de vos collaborateurs d'élucider un problème qui a suscité quelque confusion parmi les membres du comité. Cela concerne la réponse de votre prédécesseur, le ministre MacAulay, sur la question du langage non sexiste dans la partie I, à l'époque où le comité discutait du projet de loi, il y a quelque temps. Nous nous demandons encore si le problème a été résolu. Quelqu'un pourrait-il nous dire exactement où cela en est actuellement, à ce sujet particulier?

Mme Bradshaw: M. Gerry Blanchard pourra vous répondre, mais avant cela, je tiens à vous remercier d'avoir soulevé la question de la partie I avec nous. Comme vous pourrez le constater, mes collaborateurs ont beaucoup fait pour résoudre le problème de la partie I de manière à ce qu'il ne se répète pas dans la partie II.

M. Gerry J. Blanchard, directeur général, Opérations du travail, Programme du travail, Administration centrale, Développement des ressources humaines Canada: Tout d'abord, je tiens à préciser que la partie II est conforme à toutes les normes relatives au langage non sexiste. Dans la partie I, il est vrai qu'il fallait corriger des passages spécifiques pour pouvoir réaliser cet objectif. Cela a pu se faire en recourant aux dispositions que renferme la Loi corrective. Elle a reçu la sanction royale le 17 juin 1999. C'était dans le but de corriger le problème de langage sexiste à la Partie I. Cependant, une erreur de rédaction s'est glissée dans deux paragraphes, ce qui a fait que la version anglaise de cette révision ne disait pas la même chose que la version française, et il fallait encore apporter des corrections. C'est la partie qui, techniquement, est corrigée dans la partie II du code. Ce n'est que cette section qui avait besoin d'être corrigée.

Avec les amendements techniques qui ont été apportés à la fin de la section, le projet de loi sera intégralement rédigé en langage non sexiste -- les parties I et II du Code canadien du travail. Tout a été corrigé.

Le président: Monsieur MacAulay a pris un engagement lorsqu'il a comparu devant le comité le 17 juin 1998, lorsqu'il a dit «Je veux explorer davantage ce point et je cherche, avec mes collègues, des façons d'adresser ce problème sans pour autant reprendre les discussions sur le fond de la Partie I du Code». Par «ce problème», on entend le problème du langage non sexiste. Il a ensuite ajouté: «Je prévois présenter les modifications à la partie II du Code plus tard cette année, ce qui me permettrait alors de traiter de ce point». Cela fait déjà deux ans, mais nous y voilà tout de même. Il a ensuite fait certaines observations à ce sujet. Ce que vous dites, c'est qu'avec la promulgation de la Loi corrective il y a un an et les changements qui sont devant nous aujourd'hui, l'ensemble de la loi respecte maintenant les règles du langage non sexiste?

M. Blanchard: C'est cela. La Loi corrective a été l'instrument qui nous a permis de réaliser cet objectif. Deux des paragraphes renfermaient une erreur de rédaction sans gravité, qui a été corrigée à l'occasion des amendements techniques.

Le président: J'étais embrouillé, parce que je n'ai pas vu les changements qui ont été apportés à la Loi corrective; ils n'ont pas encore été intégrés dans la version révisée du Code.

M. Blanchard: C'est vrai. Si c'est cette partie du Code que vous regardiez, elle n'a pas encore été révisée.

Le président: C'est bien vrai. C'est ce que je faisais.

Le sénateur Kinsella: J'aimerais vous faire remarquer que vous êtes en bonne compagnie. Il y a cinq sénateurs du Nouveau-Brunswick autour de la table, soit les sénateurs Bryden, Robertson, Cohen, DeWare et moi-même. Au Nouveau-Brunswick, nous sommes tout à fait conscients du fait qu'en vous présentant devant un comité comme le comité sénatorial permanent des affaires sociales, vous êtes en mesure de largement nous orienter et nous instruire. Nous apprécions tous le travail phénoménal que vous avez fait dans votre communauté et que vous continuez de faire, maintenant que vous faites partie du gouvernement.

Je suis satisfait du rapport qu'ont présenté vos collaborateurs. La codification administrative que j'ai est datée du 1er janvier 1999.

Le président: C'est aussi ce que j'avais. C'est cela qui m'a embrouillé.

Le sénateur Kinsella: Peut-être pouvons-nous obtenir conseil. Est-ce qu'il y a une nouvelle codification administrative? Est-ce que ce que vous dites, c'est que le Code est maintenant, intégralement, rédigé dans un langage non sexiste?

M. Blanchard: Les exemplaires que vous avez de la partie II le sont. Je ne suis pas expert juridique, mais à ce que j'ai compris, ce sera corrigé. C'est fait périodiquement. Cependant, entre temps, la partie I du Code comporte toujours un langage sexiste, mais il est neutralisé par la Loi corrective.

Le sénateur Kinsella: L'une des raisons pour lesquelles nous n'étions pas d'accord et que nous soulignions l'importance de rédiger ce Code dans un langage non sexiste est son objectif pédagogique. Le Code canadien du travail est utilisé, n'est-ce pas, par toutes les organisations syndicales du pays qui relèvent de l'autorité fédérale? Au contraire d'autres lois que seuls les avocats consultent, les organisations syndicales et leurs dirigeants ont des exemplaires de ce document.

Est-ce qu'une codification administrative sera rédigée, que vous commencerez à distribuer avec les amendements au projet de loi C-12?

Mme Bradshaw: Oui. Nous veillerons à ce que vous en ayez un exemplaire dès qu'il sera disponible. Encore une fois, je tiens à vous remercier d'avoir porté cela à notre attention.

Le sénateur Kinsella: Madame la ministre, est-ce que votre ministère produit aussi un condensé du Code, ou une version dont le langage soit un peu plus convivial? Autrement dit, un document qui n'est pas le document légal officiel, mais quelque chose de plus simple, sous forme de brochure?

Le sénateur DeWare: En langage non-spécialiste?

Le sénateur Kinsella: Est-ce que le ministère produit ce genre de document?

M. Warren Edmonson, sous-ministre adjoint, Programme du travail, Administration centrale, Développement des ressources humaines Canada: Nous produisons effectivement des documents en langage plus convivial pour aider les gens qui participent à l'administration de la partie II du Code canadien du travail. Avec ces amendements, cependant, nous devrons revoir le contenu de notre trousse d'outils pour nous assurer que tous les amendements que renferme ce projet de loi sont intégrés à un nouveau programme.

Si nous avons les ressources nécessaires -- et j'espère que nous les trouverons, quelque part -- nous voudrions pouvoir faire une tournée de présentation dans tout le pays à l'intention de nos partenaires patronaux et syndicaux, pour leur expliquer les dispositions de ce projet de loi et les objectifs, en particulier, des amendements, pour qu'ils puissent comprendre ce que nous espérons réaliser.

Le sénateur Kinsella: Environ combien de conseils, de commissions ou de comités devez-vous mettre sur pied, en vertu du Code canadien du travail? Il y en a pas mal, n'est-ce pas?

M. Edmonson: Je dirais environ une demi-douzaine.

Le sénateur Kinsella: Le plus important étant...

Mme Bradshaw: La Commission des relations de travail du Canada.

Le sénateur Kinsella: En vertu de la loi qui est proposée, une commission doit se consacrer à la sécurité au travail. Le comité aurait-il pu recevoir une liste de toutes ces commissions, avec les noms des personnes qui y siègent et la durée de leur mandat?

Mme Bradshaw: Nous pouvons vous la fournir.

Le sénateur Robertson: Merci, madame la ministre, d'être venue cet après-midi. J'aimerais vous poser quelques questions sur la violence dans le milieu de travail. À ce que je comprends, bien que les participants au processus de consultation sont arrivés à la conclusion que le projet de loi devrait renfermer un règlement visant un programme de prévention de la violence dans le milieu de travail, ma collègue, le sénateur DeWare, a fait remarquer dans son allocution que le projet de loi ne contient rien d'explicite à cet effet. De plus, j'apprends que le projet de loi n'est pas aussi ferme que certaines dispositions que contiennent les lois de la Saskatchewan et de la Colombie-Britannique. Nous tous, ici, avons entendu des histoires et lu des articles dans les journaux sur des incidents graves de violence dans le milieu de travail; pour vous donner un exemple, la malheureuse fusillade dans un garage d'autobus ici, à Ottawa, nous vient immédiatement à l'esprit. J'appelle cela le syndrome du fier-à-bras de la cours d'école. De temps en temps, il y a quelqu'un pour constamment ridiculiser quelqu'un d'autre, être grossier, méchant ou cruel à son égard sous prétexte de sa race, de sa couleur ou d'un handicap. Les professeurs n'enseignent rien sur les tensions accumulées. Nous le savons, parfois, elles mènent à des situations de violence.

Pourriez-vous m'aider à comprendre la nature et l'envergure du problème au Canada? Même si ce projet de loi ne relève que de l'autorité fédérale, quel est le degré de gravité de la violence dans le milieu de travail au Canada?

J'ai plusieurs questions à vous poser. Peut-être devrais-je les poser, puis vous pourrez répondre à toutes ensemble.

Madame la ministre, pourriez-vous me fournir des statistiques qui m'aideraient à comprendre la portée du problème? Quelles sont les infractions les plus courantes dans le milieu de travail? Je ne doute pas que vous ayez des statistiques sur ce genre de choses. Est-ce que ce sont les employés mécontents qui s'attaquent à leurs patrons, ou le genre de cruautés dont j'ai parlé? Qu'est-ce que c'est? Est-ce qu'il y a un secteur de l'industrie qui est, plus que les autres, sujet à la violence dans le milieu de travail? Comment finissent ces situations de violence? Est-ce que c'est devant les tribunaux? Qu'est-ce qui se passe en général? Est-ce qu'il y a un problème de manque de signalement de ces situations?

Estimez-vous que les dispositions relatives à la violence dans le milieu de travail que comporte le projet de loi vont assez loin ou sont suffisantes pour bien subir le passage du temps? Nous savons tous que le Code du travail n'est pas souvent reformulé. Nous savons aussi que certaines administrations ont de l'avance sur le gouvernement. Qui sait quand le code sera réouvert? J'aimerais avoir des réponses à mes préoccupations et à mes questions, si vous avez cette information, parce que je ne sais pas comment vous pourrez renforcer les mesures sans les prévoir dans la loi, ou encore quand cette loi pourra être raffermie. Ce n'est pas tous les ans ou tous les deux ans que nous mettons cette loi au point. C'est tout pour mes observations générales, mes questions et mes préoccupations.

Mme Bradshaw: Le sénateur DeWare et vous-même savez certainement le travail que j'ai fait et ce que je pense de la violence, quelle qu'elle soit. Ceci dit, l'une des possibilités uniques que nous avons, en tant que ministre du Travail et dans le cadre du programme du travail, c'est que presque tout ce que nous faisons, nous le faisons à trois, c'est-à-dire toujours avec le groupe des employés et employeurs. Je peux vous assurer que nous avons un groupe de travail qui travaille maintenant sur la prévention et la violence. Il est en train de formuler des règlements.

Normalement, ce processus prend environ trois ans, lorsqu'on a des statistiques. Si on n'en a pas, il faut les trouver. C'est pourquoi il est intéressant de travailler avec le mouvement syndical et les employeurs, parce que c'est très éducatif pour tout le monde. Nous discutons avec eux.

Je ne peux pas vous dire si nous avons des statistiques, particulièrement, sur les sujets dont vous avez parlés. Par contre, je sais que le CTC a fait beaucoup de recherches là-dessus. Peut-être pourrions-nous obtenir leurs statistiques pour vous. C'est pourquoi nous les avons invités à participer avec nous à la formulation des règlements. C'est aussi pourquoi l'employeur et nous-mêmes participons aux discussions sur les règlements relativement à la violence et à la prévention. Nous espérons très bientôt créer un groupe de travail sur la nouvelle question des l'ergonomie. Je peux vous assurer que le groupe travaille déjà sur la réglementation.

Le sénateur Robertson: Pourriez-vous nous fournir des exemplaires de cette réglementation dès qu'elle sera prête?

Mme Bradshaw: Certainement. Il y a autre chose, au sujet de la santé et de la sécurité; nous célébrons notre centenaire cette année. En septembre, nous organisons une conférence pour nos jeunes. Nous trouvons important, à l'occasion de notre centième anniversaire, d'unir nos jeunes. Nous avons travaillé avec les syndicats et les employeurs, mais nous croyons fermement qu'il nous faut unir les jeunes et les renseigner sur les questions de santé et de sécurité, sur leurs droits, sur la violence et la prévention de la violence dans le milieu de travail. Nous essaierons de faire participer des jeunes à cette conférence, pour discuter de ces questions avec eux.

Le sénateur Robertson: Est-ce que ce sont des jeunes en milieu de travail?

Mme Bradshaw: Oui.

Le sénateur Robertson: Avez-vous déjà déterminé le groupe d'âge visé?

Mme Bradshaw: Nous en discutons encore.

M. Edmonson: Ce serait les jeunes d'environ 18 ans.

Mme Bradshaw: Il importe que nous commencions à travailler avec nos jeunes pour qu'ils soient au courant de tout cela. Ils seront probablement âgés d'environ 18 ans.

Le sénateur Robertson: Je suis heureuse que vous le fassiez. Je suis toujours d'avis que le gouvernement fédéral devrait être à l'avant-garde plutôt qu'à la traîne des provinces.

Le sénateur DeWare: Madame le ministre, je tiens à vous complimenter pour le projet de loi. Il est très bien fait. Le Nouveau-Brunswick a eu le privilège d'être la première à mettre sur pied une commission de la santé et la sécurité, entre 1978 et 1980. À l'époque, il nous a fallu faire les démarches que vous faites maintenant pour être sûrs de ce que nous faisions en matière de sécurité. Je reconnais le but que vous visez. Je suis consciente de l'importance de la sécurité dans le milieu de travail. Je me rappelle avoir sillonné la province pour vérifier toutes les compagnies, comme Irving, les chantiers navals, et tout cela. Après un bout de temps, certaines affichaient une plaque où on pouvait lire «121 jours sans accident», qui montrait l'orgueil qu'elles en tiraient et l'importance qu'a acquis aux yeux des employés de ces compagnies le fait de passer toute une journée sans qu'il y ait d'accident. Peut-être devriez-vous faire le même genre de promotion un de ces jours.

D'abord, il y a les comités qui ont été créés dans le milieu de travail. Vous avez un agent des appels, et aussi un agent de la santé et de la sécurité, des représentants de la santé et de la sécurité, un comité chargé des politiques et un agent régional de la santé et de la sécurité. Vous leur avez donné, avec ce projet de loi, beaucoup de latitude pour s'acquitter de leurs fonctions, ce qui est important, aussi. On ne peut pas faire son travail si on n'a pas de mordant, et ce projet de loi leur en a donné. Le temps perdu, ce sont des revenus perdus, tant pour l'employé que pour l'employeur, et aussi sur le plan de la santé.

J'ai trouvé intéressant de vous entendre parler d'ergonomie, aussi, et je me demande où vous en êtes dans le domaine. Les Américains ont déposé, en 1999, une proposition à grande échelle à ce sujet. Tout cela se fera avec la réglementation, n'est-ce pas? Quand pensez-vous, au plus tôt, être en mesure de commencer à mettre ces mesures en oeuvre?

Mme Bradshaw: Nous envisageons en ce moment de mettre sur pied un groupe de travail. Nous voulons largement consulter sur la question. Nous savons qu'il faut une réglementation. Soyez assurée que nous y travaillons.

Le sénateur DeWare: Le personnel médical de votre service d'indemnisation des travailleurs peut certainement vous donner un gros coup de main là-dessus, parce qu'il est difficile de déterminer, dans un milieu de travail, qui a un mal de dos et qui n'en a pas, et pourquoi. C'est très difficile.

Mme Bradshaw: Je ne peux pas encore vous parler d'échéancier, parce que de nombreuses consultations devront avoir lieu avant que nous puissions créer le groupe de travail. Dès que nos consultations seront terminées, nous mettrons un groupe de travail sur pied et nous formulerons les règlements.

Le sénateur DeWare: C'est ressorti des discussions de votre groupe de consultation. Est-ce qu'il en a beaucoup été discuté?

Mme Bradshaw: Vous pouvez imaginer que le mouvement syndical est très pressé de nous voir créer le groupe de travail.

Le sénateur DeWare: J'apprécie les efforts qui ont été déployés dans le domaine. Je remarque aussi que vos amendes sont assez lourdes, mais ainsi, vous vous assurez que les compagnies observeront les règles de sécurité.

Mme Bradshaw: Rien que du côté de la santé et de la sécurité, le Canada a perdu 10 milliards de dollars l'année dernière. Souvent, lorsqu'il est question de santé et de sécurité, le public a l'impression que c'est un autre problème qui relève des syndicats. Ce n'est pas le cas. Ici, l'employeur tient tout autant que l'employé à la santé et à la sécurité dans le milieu de travail. Dans un pays comme le nôtre, 10 milliards de dollars, cela touche aussi l'employeur.

Le sénateur DeWare: Je suis heureuse des efforts que vous avez déployés. Je suis impatiente de recevoir l'information que le comité a demandée.

[Français]

Le sénateur Pépin: Lorsqu'on lit le projet de loi, on constate qu'il y a une protection spéciale pour les femmes enceintes et celles qui allaitent leur enfant. On dit qu'elles doivent consulter leur médecin, qui est généralement un obstétricien. Qui va désigner le médecin? Est-ce l'employeur? Est-ce le comité?

Également, on sait que les obstétriciens connaissent les milieux de travail, mais ils n'en sont pas des spécialistes. Est-ce qu'on les obligera à consulter quelqu'un et est-ce qu'on devrait exiger qu'ils aient une connaissance importante du milieu de travail?

Mme Bradshaw: C'est l'employée qui va choisir le médecin, ce n'est pas son employeur. Son médecin connaît sa condition.

Le sénateur Pépin: Cette personne doit tout de même connaître le milieu dans lequel elle travaille?

Mme Bradshaw: Si son médecin le désire, il peut la référer à un spécialiste. Cependant, cela peut être son propre médecin.

Le sénateur Pépin: Je veux bien me faire l'avocat du diable. On dit que la femme enceinte ou qui allaite doit consulter son médecin pour déterminer s'il y a un risque. Cependant, qu'arrive-t-il si elle manque à cette obligation et qu'elle a un problème avec son bébé? Est-ce elle qui en portera la responsabilité?

Mme Bradshaw: C'est une des raisons pour lesquelles on dit qu'elle pourrait consulter son propre médecin. Habituellement, les femmes enceintes ou qui allaitent ont un médecin.

Le sénateur Pépin: Parfait. Dans le projet de loi, on parle de la violence en milieu de travail. Je pense qu'il y a une ou deux provinces, soit la Saskatchewan et la Colombie-Britannique, qui ont déjà une loi à cet égard. Au niveau du gouvernement fédéral, je pense que ce n'est pas modifié dans la partie II du Code canadien du travail. Ne pourrait-on pas profiter de l'occasion pour essayer d'élargir la portée du projet de loi et prendre l'exemple de ces deux provinces?

Mme Bradshaw: Chacune des provinces a sa propre loi. En tant que ministre fédéral, il faut mettre des lois en place pour tout le pays.

Le sénateur Pépin: C'est un bon projet de loi. Je me permets aussi un petit commentaire. Quelqu'un a demandé plus tôt d'avoir la liste des bureaux de direction. Tout ce que j'espère, c'est qu'il y a autant de femmes que d'hommes qui siègent sur ces bureaux de direction. Également, ce projet de loi est bon pour les femmes qui vont travailler. Je fais un v<#0139>u, c'est qu'un jour un projet de loi semblable considère des garderies en milieu de travail.

Mme Bradshaw: Donnez-nous le temps, sénateur Pépin.

Le sénateur Pépin: Oui, je suis d'accord.

[Traduction]

Le président: Pour terminer, j'aimerais vous poser une question qui ne se rapporte pas au projet de loi, mais qui me préoccupe, et peut-être vos collaborateurs auront-ils des observations à formuler à ce sujet.

L'on constate, particulièrement aux États-Unis, une tendance croissante à obliger les employés qui occupent des postes jugés dangereux à subir des tests de dépistage de la consommation de drogue et d'alcool. Je crois que c'est l'une des obligations imposées maintenant aux États-Unis aux chauffeurs de camion sur de longues distances, aux employés des centrales nucléaires, et cetera. Jusqu'ici, je n'ai constaté aucune tendance favorable à ce genre de politique publique au Canada, parce que nous sommes portés à beaucoup plus protéger la vie privée et à considérer les tests obligatoires comme une chose «inacceptable au Canada». Est-ce qu'il en est question? Entrevoit-on d'avoir ce genre de politique ici? Pourriez-vous nous dire un peu ce qui en est?

Mme Bradshaw: Au Canada, il y a la Charte des droits et libertés.

Le président: C'est juste, mais y a-t-il une théorie générale de droit selon laquelle, dans certains métiers, les tests obligatoires qui sont jugés de l'intérêt de la sécurité publique sont illégaux?

Mme Bradshaw: Tout ce que nous faisons, dans le programme syndical, nous le faisons avec les employés et les employeurs. Quand ils s'assoient ensemble pour négocier une convention collective, par exemple, si c'est un sujet de préoccupation, il y aurait certainement moyen de mettre quelque chose en place.

M. Edmonson: Il me semble que ce que nous a dit le ministère de la Justice jusqu'ici, c'est que la Charte y intervient.

Le président: Aux États-Unis, c'est de plus en plus répandu. Je n'ai pas compris si le problème venait de la Charte ou s'il y a d'autres motifs qui s'y opposent.

M. Edmonson: Il y avait un problème avec Transports Canada il y a quelques années. Non seulement certains employés ne tenaient-ils pas à commencer ce genre de pratiques, et même aussi certains employeurs, mais il y avait les obstacles que posait la Charte. Cela pourrait expliquer encore pourquoi la question n'est pas allée plus loin.

Le sénateur DeWare: Le sénateur Kinsella m'a demandé de vous dire qu'il a examiné votre site Web, sur la partie I, qu'il trouve que l'ancien site Web n'est toujours pas rédigé en langage non sexiste et qu'il vous faudra le changer quand la loi sera entrée en vigueur.

Mme Bradshaw: Nous sommes tout à fait d'accord avec cela. Nous le ferons.

Le président: Madame la ministre, je vous remercie, ainsi que vos collaborateurs, d'être venus.

Mme Bradshaw: Je ne rencontre pas le premier ministre demain, mais jeudi. Je voulais le préciser aux fins du compte rendu.

Le président: Je vous remercie.

La séance est levée.


Haut de page