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Délibérations du comité sénatorial spécial sur la
Loi antiterroriste

Fascicule 1 - Témoignages du 14 février 2005 (séance de l'après-midi)


OTTAWA, le lundi 14 février 2005

Le Comité sénatorial spécial sur la Loi antiterroriste se réunit ce jour à 12 h 45 pour procéder à l'examen approfondi des dispositions et de l'application de la Loi antiterroriste (L.C. 2001, ch. 41).

Le sénateur Joyce Fairbairn (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente Honorables sénateurs, nous sommes prêts à poursuivre notre examen du projet de loi C-36, Loi antiterroriste. Nous avons commencé nos travaux ce matin en accueillant l'honorable Ann McLellan, vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile. Ses engagements en Chambre l'ont empêché de rester des nôtres cet après-midi, mais nous avons la chance d'accueillir deux hauts fonctionnaires de son ministère qui l'accompagnaient ce matin, j'ai cité Paul Kennedy, sous-ministre adjoint principal, et Bill Pentney, sous-procureur général adjoint. Je rappelle à mes collègues que nous avons beaucoup de travail à accomplir cet après-midi et je leur demanderai donc d'être le plus concis possible dans leurs questions. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir pu rester des nôtres; nous espérons avoir terminé aux environs de 14 h, si nous savons tous être précis et concis. Monsieur Kennedy, voulez-vous dire quelques mots pour lancer le débat de cet après-midi?

M. Paul Kennedy, sous-ministre adjoint principal, Sécurité publique et Protection civile Canada : Si vous le voulez, je pourrais revenir sur la question qui a été posée avant la pause pour vous permettre d'utiliser au mieux votre temps.

La présidente Excellent. Vous pourriez peut-être répéter cette question.

M. Kennedy Oui, je crois qu'il était question des statistiques sur la saisie des fonds liés à des activités terroristes. Il existe trois listes en fonction des trois régimes différents que je ne peux dissocier, mais ces trois régimes ont pour effet de nous conférer un pouvoir de saisie et, selon le cas, un pouvoir de confiscation. Pour l'instant, nous avons saisi 114 000 $ au Canada en vertu de ce régime. À l'échelle mondiale, on parle d'environ 100 millions de dollars américains. Certains veulent que l'on applique un régime mondial pour bloquer les mouvements de fonds.

L'autre information qui pourrait vous intéresser est la suivante. Le CANAFE, Centre d'analyse des opérations et des déclarations financières du Canada, qui dépend du ministère de la Défense nationale, a récemment émis un rapport selon lequel quelque 70 millions de dollars de transactions, jugées suspectes par le Centre, auraient eu lieu au Canada. Les transactions suspectes ne portent pas forcément sur de l'argent illégal, mais c'est une information que le CANAFE communique à la GRC et au SCRS pour que ces deux organismes prennent les mesures appropriées. Voilà le contexte dans lequel le tout s'inscrit.

Certains d'entre vous connaissent peut-être les dispositions relatives à la saisie et à la confiscation des produits du crime. Nous allons désormais traiter les activités terroristes à part. Habituellement, quand on parle de saisir les profits d'organisations criminelles, il s'agit d'une richesse accumulée. Pour l'instant, on se situe entre les 50 et 70 millions de dollars, mais je n'ai pas consulté les statistiques récentes à ce sujet. Cet argent est différent de celui que nous saisissons en regard d'activités terroristes, parce que les terroristes veulent financer leurs activités tandis que les criminels veulent recueillir les dividendes du trafic de la drogue et d'autres activités illégales. Pour vous donner une idée de la somme dont nous parlons ici, je crois avoir vu quelque part que les attentats contre le World Trade Centre ont coûté environ 400 000 $ aux terroristes. Ils cherchent donc de l'argent pour financer leurs activités.

L'honorable Joseph A. Day : Savez-vous si des organismes de bienfaisance ont été radiés et si des fonds ont été saisis? Que se passe-t-il le cas échéant?

M. Kennedy : Non, nous n'avons pas eu l'occasion d'appliquer ce qu'était alors la disposition de la partie 6 du projet de loi relativement aux organismes de bienfaisance. Je dois vous dire, cependant, que l'Agence du revenu et les autres organismes d'exécution de la loi s'échangent ce genre de renseignements pour s'entraider dans leur travail. Nous avons toujours estimé — et j'ai dit la même chose quand j'ai comparu devant le Comité des finances et le sous-comité du Comité de la justice de la Chambre — qu'il faut combattre le détournement des œuvres de bienfaisance. Autrement dit, une fois que les terroristes savent que nous avons bloqué cette possibilité, ils s'essaient ailleurs. Ce que nous craignions, c'est que les gens infiltrent ces organismes de charité et détournent de l'argent. Une fois que nous avons eu la capacité d'identifier ce genre d'activités, cette formule n'était plus aussi intéressante pour les terroristes. En outre, ceux qui voulaient obtenir le statut d'œuvre de bienfaisance ont renoncé. Nous avons dit, d'entrée de jeu, que nous ne voulions pas porter tort aux œuvres à caractère philanthropique, que nous voulions conduire une action préventive pour protéger les organismes de bienfaisance et empêcher toute personne malintentionnée de pénétrer ce secteur. Je crois, à cet égard, que la loi a donné de bons résultats.

L'honorable Serge Joyal : Toujours sur la même question, je me demande si ces dispositions ne soulèvent pas des problèmes par rapport à la Charte. Quand vous renversez le fardeau de la preuve sur quelqu'un qui doit prouver d'où vient l'argent, ne vous trouvez-vous pas, de façon pratique, à présumer que cette personne l'a obtenu illégalement? Ne pensez-vous pas que cela risque de donner lieu à y des contestations en vertu de la Charte et que c'est d'ailleurs ce qui se passe actuellement devant un tribunal de Toronto?

M. Kennedy : Il n'y a pas d'inversion du fardeau de la preuve en vertu de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité, pas plus pour ce qui est des activités terroristes que pour les activités du crime organisé. Certains pays, comme l'Irlande, ont cette disposition du renversement du fardeau de la preuve. Je crois qu'un des partis en Chambre a récemment recommandé que l'on adopte une telle disposition au Canada. Chez nous, si vous possédez quelque chose, on suppose que le titre de propriété est valable. Il incombe donc à la Couronne de prouver que l'argent est vicié.

Le sénateur Joyal : Je n'ai pas les détails de l'affaire, mais j'ai récemment lu dans la presse l'histoire d'un citoyen canadien qui a franchi la frontière en transportant plus de 10 000 $ sur lui et qui a dû justifier d'où venait l'argent. Autrement dit, le simple fait que quelqu'un ait plus de 10 000 $ en sa possession amène les autorités à penser que cet argent a été acquis illégalement.

M. Kennedy : Vous venez de mettre le doigt sur un problème. Il existe une obligation de déclarer, obligation qui rejoint l'intention de la loi. Celle-ci existe depuis longtemps aux États-Unis. Si vous sortez plus de 10 000 $ du pays, vous devez le déclarer aux autorités. Je pense que, dans la situation que vous avez décrite, la personne n'a pas déclaré qu'elle transportait une importante somme d'argent et cette somme a été saisie. Il existe une obligation positive d'informer les autorités quand on sort de grosses sommes du pays. Dans ce cas, la personne n'a pas fait cette déclaration et elle s'est placée en contravention de la loi.

Le sénateur Joyal : Certes, mais la loi porte atteinte à la Charte. C'est ce que je veux faire ressortir ici. Autrement dit, le simple fait que vous transportiez plus de 10 000 $ en liquide fait automatiquement de vous un suspect.

M. Kennedy : Non, parce qu'il faut partir du principe que vous êtes tenu de déclarer que vous transportez une telle somme. Cette loi a été adoptée pour les transferts importants de liquide. C'est le défi auquel sont confrontés les criminels qui veulent blanchir des fonds, ils veulent les réinjecter légitimement dans la société, pouvoir leur faire franchir les frontières. En vertu de la loi, les responsables de compte dans les banques sont tenus de relever toute transaction douteuse et d'en faire part aux autorités. Les personnes qui veulent éviter tout soupçon lors de transferts interbancaires amassent donc de grandes quantités de liquide. Or, il leur faut ensuite réinjecter cet argent dans le système et leur problème consiste alors à passer d'un pays à l'autre, à franchir les frontières. Nous voulons que les gens déclarent les importantes sommes d'argent qu'ils transportent d'un pays à l'autre. Il y a eu des cas où des personnes ont été prises avec des sacs de hockey plein d'argent, et vous pourriez obtenir ce genre d'information auprès du CANAFE et de la GRC Un petit sac de la taille d'un pain, remplit de billets peut valoir plus d'un million. L'objectif est donc de bloquer les mouvements transfrontières d'argent illicite. Si vous avez 11 000 $ sur vous et que vous franchissez la frontière, si vous remplissez le formulaire de déclaration, vous n'aurez pas de problème parce que vous vous serez plié à l'exigence de déclaration.

Le sénateur Joyal : Je ne veux pas que nous parlions de politique. Je vais vous dire que, dès qu'on transporte plus de 10 000 $, les voyants passent au rouge et il faut tout justifier. Nous vivons dans un monde où nous ne pouvons pas nous permettre de fermer les yeux sur cette réalité. Ce que je veux dire, c'est que les gens qui refusent de faire ce genre de déclaration contestent les dispositions en question en vertu de la Charte. C'est ce que je voulais faire savoir aujourd'hui et c'est pour cela que j'ai posé cette question.

M. Kennedy : Cela ne me surprend pas. À l'étape de la préparation du projet de loi C-36, nous avons examiné les mécanismes existants et nous nous sommes dit qu'en plus de surveiller les transactions interbancaires structurées, il fallait analyser le contexte dans lequel est utilisé l'argent qui sert à financer le terrorisme et communiquer ce genre de données au commissaire de la GRC et au directeur du Service de renseignement.

Le sénateur Joyal : Ce que je veux dire, pour mémoire, c'est qu'il existe une mentalité selon laquelle, si vous n'avez rien à déclarer vous devriez pouvoir tout dire. Évidemment, si vous êtes un honnête citoyen, vous n'avez pas besoin de la loi, vous la respectez a priori. Il est évident que nous voulons mettre la main sur celui qui s'est procuré de l'argent illégalement mais, ce faisant, nous faisons passer chaque citoyen à la loupe. Voilà le genre de déséquilibre dont nous parlions et qu'il convient de revoir.

M. Kennedy : Nous pourrons vous obtenir davantage de détails à ce sujet. Je pense que ce dont vous parlez découle d'une obligation imposée par le groupe d'action financière qui est d'arrêter ce genre de flux monétaire. Nous pourrions vous dresser un petit historique. Je pense que vous venez de décrire un phénomène mondial.

Le sénateur Joyal : Le problème, c'est que les frontières étant surveillées de près, ce à propos de quoi, j'espère, que nous pourrons poser des questions plus tard, toute autre loi applicable au Canada revêt dès lors un caractère interventionniste et des lois que nous ne considérions pas avant comme étant contraires aux droits garantis par la Charte nous paraissent aujourd'hui comme telles parce qu'elles ne favorisent pas un juste équilibre dans la façon dont elles sont appliquées.

Le sénateur Lynch-Staunton : Je vais commencer par un nouveau sujet après quoi, si nous en avons le temps, je reviendrai à la question des certificats de sécurité, parce que j'aimerais obtenir une clarification.

Comme la ministre a accepté que nous sortions des cadres du projet de loi C-36 pour couvrir tous les aspects de la sécurité et du terrorisme, pourriez-vous nous dire s'il existe des listes de passagers embarqués, autrement dit des listes donnant les noms des passagers et d'autres renseignements, pour tous les vols en provenance ou à destination du Canada et, si oui, qu'en fait-on?

M. Kennedy : En fait, il s'agit plutôt de listes de « passagers défaillants ». Nous n'avons pas ce genre d'instrument au Canada, mais nous appliquons une procédure d'échange d'informations entre organismes d'exécution de la loi, soit l'Agence des services frontaliers du Canada, le SCRS et la GRC. Cette information porte sur toutes les personnes susceptibles de constituer une menace. La menace à la sécurité du Canada pourrait venir d'une personne qui fait l'objet d'un mandat d'arrêt international émis par Interpol ou d'un mandat national. Cette information est communiquée à l'ASFC qui, comme vous le savez, est aussi l'organisme chargé de l'immigration et des douanes. L'ASFC peut aviser le ministre des Transports et son délégué qui disposent des pouvoirs nécessaires pour empêcher la personne d'embarquer à bord d'un avion.

Les Américains utilisent des listes de « passagers défaillants » dont vous parliez. Nous n'en avons pas, mais nous pouvons identifier les passagers qui nous intéressent et les empêcher d'embarquer à bord d'un avion.

Le sénateur Lynch-Staunton : Est-ce vrai que, quand on achète un billet d'avion, la compagnie doit fournir certaines informations personnelles vous concernant?

M. Kennedy : Vous voulez sans doute parler de ce qui est prévu dans la Loi sur la sûreté publique, le projet de loi C- 7. Cette disposition a été adoptée, mais elle n'est pas encore entrée en vigueur. D'après ce texte de loi, l'information recueillie auprès des passagers doit être vérifiée par rapport à celle contenue dans des banques de données.

Le sénateur Lynch-Staunton : Cette loi n'est pas encore entrée en vigueur ou est-ce la machinerie qui n'a pas encore été mise en place?

M. Kennedy : Non.

Le sénateur Lynch-Staunton : Cela veut-il dire que les autorités américaines ne disposent d'aucune information sur les voyageurs canadiens qui vont aux États-Unis?

M. Bill Pentney, sous-ministre adjoint général, Citoyenneté, immigration et sécurité publique, Ministère de la Justice Canada : Nous communiquons des informations préalables sur les voyageurs.

Le sénateur Lynch-Staunton : Que fournit-on et à qui?

M. Pentney : Il s'agit d'une liste d'informations en vertu de ce régime. Ce sont des informations types que nous transmettons au sujet des passagers, les informations préalables sur les voyageurs.

Le sénateur Lynch-Staunton : Communique-t-on plus que le nom, l'adresse et la destination? Inclut-on des renseignements personnels?

M. Pentney : Il s'agit d'une série d'informations préétablies.

Le sénateur Lynch-Staunton : Est-ce détaillé?

M. Pentney : Raisonnablement.

M. Kennedy : Pour préciser les choses aux fins de la retranscription, je dois dire que le projet de loi C-7 permet au ministre des Transports d'émettre le genre de liste que vous avez décrite et de la communiquer aux compagnies aériennes mais, à ma connaissance, cela ne s'est pas encore fait. La procédure que nous avons en place nous permet de traiter des cas individuels, mais les mécanismes dont vous parlez et le degré d'élaboration auquel vous faites allusion n'existent pas encore.

Le sénateur Lynch-Staunton : Je vais reformuler ma question. Quand je prends l'avion pour aller à New York, quelle information me concernant est communiquée aux autorités américaines, communication que je pourrais considérer d'indiscrète parce qu'elle porte sur des renseignements privés qui ne sont peut-être même pas pertinents? Veulent-ils connaître ma religion?

M. Kennedy : Sénateur, l'un de mes collaborateurs, M. Christian Roy, vient de se joindre à moi. Il fait partie de notre équipe de conseillers juridiques et il va pouvoir vous donner plus de détails à ce sujet.

M. Christian Roy, conseiller, Services juridiques, Sécurité publique et Protection civile Canada : À l'heure actuelle, les compagnies aériennes qui se rendent aux États-Unis doivent communiquer des renseignements sur les passagers qu'elles transportent à ce qui s'appelait avant le commissaire aux douanes des États-Unis. Je ne sais pas comment cet organisme s'appelle aujourd'hui. Quoi qu'il en soit, c'est le transporteur mais pas le gouvernement du Canada qui est tenu de communiquer cette information. Le transporteur doit transmettre l'information en question aux autorités américaines.

Le sénateur Lynch-Staunton : Savez-vous de quelle information il s'agit?

Nouvel intervenant : Je ne connais pas le détail de cette information, mais je pense que ce doit être la même chose que ce que nous appelons au Canada l'API — l'information préalable sur les voyageurs — qui ne sont ni plus ni moins que des renseignements de base, de même que le dossier du passager, autrement appelé PNR. À l'heure actuelle, les compagnies divulguent, sur demande, les informations préalables sur les voyageurs, informations qui sont extraites du dossier des passagers; il s'agit d'une liste détaillée d'éléments incluant le siège, la méthode de paiement et les autres destinations éventuelles au pays.

M. Pentney : Nous serons heureux de vous fournir le détail des informations actuellement communiquées en vertu de l'API et du PNR. Je suis désolé de ne pas m'être muni de ces renseignements.

Le sénateur Lynch-Staunton Il s'agit de l'information que les transporteurs fournissaient à ce qui s'appelait avant le commissaire aux douanes des États-Unis mais qui est devenu depuis le Homeland Security ou un service qui relève de ce nouveau ministère. J'apprécierais beaucoup que vous nous fournissiez ces renseignements. Merci.

Le sénateur Andreychuk : Je suis confus. J'avais cru comprendre que le gouvernement du Canada ou les transporteurs aériens communiquaient des information de base aux États-Unis et j'aurais aimé savoir ce qu'étaient ces informations, mais que le projet de loi C-7 allait nous obliger ou plus exactement nous autoriser — je ne me souviens plus exactement ce que l'on disait — de communiquer des informations aux autorités américaines au sujet des voyageurs venant du Canada par avion. Je crois savoir qu'avant, cette communication était discrétionnaire mais qu'il existait une entente entre les États-Unis et le Canada et que les passagers prenant des vols canadiens fournissaient des informations qui étaient communiquées aux autorités américaines.

C'est ce que j'ai retenu du témoignage que nous avons entendu quand nous avons étudié ce projet de loi. Je me trompe? Le projet de loi C-7 permet-il de communiquer de nouvelles informations aux autorités américaines, informations qui ne seraient pas recueillies autrement?

M. Roy : Rien dans le projet de loi C-7 permet au commissaire de la GRC ni au directeur du SCRS d'exiger des renseignements sur les passagers et de les faire parvenir globalement aux États-Unis ou à d'autres gouvernements. Il serait possible de communiquer des informations, mais cela doit se faire dans les limites strictes de la loi. Ces limites sont clairement énoncées et la communication d'informations est très restreinte. Il existe des sauvegardes, comme celles qui exigent la création d'un dossier ou de documents de vérification dès que des informations sont divulguées.

Une disposition permet de communiquer des informations à des organismes gouvernementaux étrangers dans les cas concernant la santé et la sécurité. Par exemple, si un agent de la GRC ou un agent désigné du SCRS reçoit d'un transporteur aérien des informations concernant un passager et qu'à partir de l'analyse qu'il en fait, il a des raisons de croire qu'il doit communiquer cette information parce qu'il a conclu à l'existence d'une menace pour la vie, la santé ou la sécurité des personnes ou la sécurité des transports, la loi lui permet de transmettre l'information en question à un organisme extérieur. Il peut s'agir d'un organisme gouvernemental ou d'une autorité aéroportuaire. La loi dit simplement « toute personne » et cela s'applique à toutes les situations d'urgence où il y a un risque pour la vie.

Le sénateur Andreychuk : À moins que ma mémoire ne fasse complètement défaut, dans le projet de loi C-7, il incombait à Air Canada, par exemple, de recueillir ce genre de données et de les transmettre, tel que convenu, aux États-Unis ou à d'autres pays. Toutefois, ces données pourraient ne concerner que ma vie au Canada. Je me rappelle ce témoignage. Monsieur Kennedy, vous étiez là pour une partie mais pas tout.

M. Kennedy : Non, on m'a, Dieu merci! épargné le projet de loi C-7.

Le sénateur Fraser : Madame la présidente, j'étais là pour le projet de loi C-7, comme le sénateur Andreychuk. D'autres projets de loi complexes m'occupent depuis lors et j'ai un peu perdu le souvenir des détails, mais je me souviens que, à l'époque, la Bibliothèque du Parlement avait préparé un document très utile, document qu'il faudrait ressortir et remettre au comité parce qu'il s'inscrit dans le cadre de tout le système que nous examinons à présent.

Le sénateur Joyal : Une disposition du projet de loi C-7 prévoit que, si l'on est reconnu coupable d'une infraction au criminel punissable de plus de cinq ans d'emprisonnement, tout le dossier est accessible. Nous avons eu toute une discussion à ce sujet, parce que le Code criminel énumère toute une série d'infractions punissables de plus de cinq ans d'emprisonnement qui n'ont rien à voir avec la sécurité aérienne ou, comme le témoin le disait, avec les situations d'urgence. Il ne fait aucun doute qu'au cours des dernières années, le franchissement de la frontière pour les Canadiens est devenu de plus en plus difficile. Si vous avez un dossier criminel, vous êtes automatiquement refoulé à la frontière. Tout pays peut refuser l'accès de son territoire à qui bon lui semble, mais il appartient au Canada de garantir la liberté de circulation à ses citoyens. La liberté de circulation est un droit que confère la Charte. Il appartient à notre pays de garantir aussi les droits à la vie privée des Canadiens.

Il faut réaliser un équilibre entre la liberté de circulation, le droit à la vie privée et le devoir de communiquer des informations aux autorités américaines qui vont refouler systématiquement des Canadiens à la frontière parce qu'ils ont eu des déboires avec la loi au Canada. Cela n'a rien à voir avec la sécurité ni avec les situations d'urgence. C'est un élément important dans l'approche globale que nous voulons adopter en matière de sécurité au Canada.

Différents éléments interviennent mais, au bout du compte, quand vous examinez l'ensemble de la situation et que vous vous demandez où l'on se trouve aujourd'hui par rapport à notre situation d'avant, il ne fait aucun doute que les Canadiens sont soumis à un examen beaucoup plus rigoureux aujourd'hui qu'auparavant.

M. Kennedy : Je ne sais pas si c'était une question à laquelle je dois répondre.

Le sénateur Joyal : Ma question, la voici : pourriez-vous examiner les dispositions du projet de loi C-7 et nous dire quel genre d'informations vous communiquez aux autorités américaines relativement aux Canadiens ayant des dossiers criminels? C'est assez clair maintenant?

Le sénateur Andreychuk : Il y a d'autres problèmes que ceux concernant la santé et la sécurité. La portée de la loi était bien plus importante que cela.

La présidente : C'est une question intéressante. Après la séance d'aujourd'hui, nous pourrions peut-être organiser une présentation à ce sujet pour une prochaine fois. Je suis certaine que les fonctionnaires vont nous aider et que nous pourrons faire venir les personnes idoines. Nous pourrions ainsi peut-être mieux répondre à nos préoccupations qu'à l'occasion d'échanges comme cette discussion.

Le sénateur Lynch-Staunton : Entre-temps, on nous a proposé des renseignements de fond.

M. Kennedy : Oui, sénateur, pour faire un suivi, parce que c'est un domaine complexe et cloisonné. Nous allons essayer d'obtenir quelque chose par écrit et vous désigner des fonctionnaires qui pourront vous expliquer la procédure actuelle.

Le sénateur Joyal : Le témoin vient de mentionner quelque chose de très important en parlant de cloisonnement. Nous essayons, quant à nous, d'analyser la chose en bloc. J'ai l'impression que la situation a changé et pas forcément pour le mieux.

Il appartient aux membres de ce comité de combattre tout ce qu'il y a de négatif là-dedans, mais je crois comprendre que les témoins, qui sont des experts du domaine, traitent de ces questions quotidiennement et ont une idée de l'impact des divers textes de loi sur les droits et libertés des Canadiens. C'est ce dont nous parlons. Voilà pourquoi nous sommes ici. Nous essayons de comprendre.

J'espère que les témoins comprendront que nous avons besoin de leur appui.

M. Kennedy : Je le comprends.

La présidente : Nous avons saisi le message, sénateur Joyal. Je suis sûre que nous allons organiser une séance pour parler plus précisément de cette question.

Le sénateur Fraser : Sur un autre sujet, messieurs, j'ai une question à vous poser qui va trahir mon ignorance crasse de la façon dont notre appareil judiciaire et notre système de police fonctionnent au Canada. Je veux parler des conditions d'arrestation et de l'arrestation à titre préventif traitées dans les rapports du ministre de la Sécurité publique et du Procureur général. Dans le rapport de la GRC et dans celui du Service du procureur général, on dit qu'il ne s'est rien passé et donc qu'il n'y a pas lieu de faire rapport.

Pour que je comprenne bien la façon dont fonctionne ce système, pourriez-vous me dire si quelqu'un, à l'échelon provincial, peut se prévaloir de cette disposition contenue dans le projet de loi C-36?

M. Kennedy : Oui, il s'agit d'une disposition du Code criminel qui peut bien sûr être appliquée par des agents de police municipaux ou provinciaux.

C'est actuellement possible, mais la GRC travaille plutôt en collaboration avec les autres corps policiers. Nous comptons quatre Équipes intégrées de la sécurité nationale, EISN, composées de représentants de gouvernements provinciaux et municipaux. Ces équipes sont situées à Montréal, Ottawa, Toronto et Vancouver.

À ma connaissance, les procureurs généraux provinciaux ont la même obligation de déclarer que ces pouvoirs n'ont pas été employés.

Le sénateur Fraser : Quoi qu'il en soit, nous ne sommes pas au courant, parce que rien ne leur impose de faire rapport, n'est-ce pas?

M. Kennedy : L'exigence de faire rapport est la même pour tous. À ma connaissance, les procureurs généraux provinciaux sont tenus à la même obligation, mais cela n'a pas été appliqué.

Le sénateur Fraser : Peut-on, dans une loi fédérale, obliger un ministre provincial à prendre des mesures?

M. Pentney : Oui, quand c'est une question de compétence partagée.

Le sénateur Fraser : Nous pouvons le faire! Donc, nous pouvons affirmer sans trop risquer de nous tromper que cette disposition n'a pas été appliquée. Ce n'est pas simplement parce qu'elle échappe à la compétence fédérale, n'est-ce pas?

M. Kennedy : Non, mais les rapports dont vous parlez traitent des activités de la GRC et du service des procureurs fédéraux. Toutefois, la GRC, joue également le rôle de police provinciale dans huit provinces et trois territoires et elle est présente dans plus de 200 municipalités.

Le sénateur Fraser : Il y a aussi la Sûreté de l'Ontario et la Sûreté du Québec qui, à elles deux, couvrent un vaste territoire.

M. Kennedy : On vient de me dire que les provinces ont préparé leurs rapports et que nous pourrions vous le faire parvenir.

Le sénateur Fraser : Je vous en prie.

Le sénateur Stratton : Je veux revenir aux remarques de la ministre qui disait que la loi est plus ou moins équilibrée. Je suis relativement d'accord avec elle, mais j'ai du mal à comprendre que vous puissiez parvenir à la perfection la toute première fois dans un dossier aussi complexe que celui-ci. Pourriez-vous nous donner un aperçu des modifications que vous avez apportées et de celles que vous envisagez, parce que j'imagine qu'il s'agit d'un document qui, dans une grande mesure, va continuer d'évoluer. C'est sûrement le cas. Cela nous rappellera que nous ne sommes pas dans le royaume de la perfection.

M. Kennedy : Je peux vous en parler un peu, mais nous aimerions que le ministre de la Justice le fasse ou, si cela vous convient, nous pourrions aussi organiser un panel qui pourrait vous donner plus de détails. Quoi qu'il en soit, pour tirer le meilleur de la journée, je vais expliciter certaines des remarques de la ministre.

La loi a été déposée en octobre et adoptée en décembre, mais le travail de fond s'est effectué bien avant. On serait tenté de l'examiner en fonction des événements du 11 septembre et de supposer qu'on s'est précipité pour la produire — et effectivement nous avons travaillé d'arrache-pied — mais en vérité, nous travaillions sur des éléments de ce texte bien avant qu'il ne soit déposé. La ministre a franchement mentionné que des conventions de l'ONU et certains protocoles remontent à 1998. Le Canada a participé aux discussions de l'ONU sur la façon dont il fallait élaborer une telle loi, parce que nous sommes membres de cette organisation. Nous avons investi un certain capital intellectuel dans le document de l'ONU. En outre, le Canada est signataire de tous ces documents de l'ONU et il les a tous ratifiés sauf deux. Nous en avons repris l'esprit dans les lois nationales que nous avons ratifiées. D'ailleurs, nous avons fait ce travail en totalité. À l'évidence, lors des discussions avec l'ONU, le Canada avait l'intention d'intégrer ces textes internationaux dans ses propres lois.

Par ailleurs, cela fait plusieurs années que nous avons commencé à travailler sur la modification de la Loi sur les secrets officiels. Vous vous rappellerez sans doute qu'il a été question, dans le Discours du Trône de 1980, de moderniser cette loi. Cette mesure remonte essentiellement à la fin des années 1890. elle a été légèrement modifiée entre les deux guerres mondiales et il était temps de l'actualiser. J'ai participé à plus de 100 réunions pour ce travail. Après que j'ai quitté le ministère pour passer à celui du Solliciteur général, mes collègues ont poursuivi cette entreprise. Ainsi, bien avant le 11 septembre 2001, nous avions déjà fait beaucoup de travail sur cette mesure.

Pour ce qui est des dispositions concernant les organismes de bienfaisance, j'ai témoigné devant le Comité sénatorial permanent sur les finances nationales à l'occasion du débat sur l'annulation de l'inscription des organismes de bienfaisance. Cette loi avait été déjà renvoyée en Chambre. La plupart des commentaires qui visaient à améliorer cette mesure à l'époque ont été regroupés et ont donné lieu à la partie 6 du projet de loi C-36 au lendemain du 11 septembre. Nous avons entendu beaucoup de réactions de la part des communautés ethniques qui voulaient de l'on définisse le terrorisme et tout cela a eu une incidence sur la rédaction des autres dispositions.

Par ailleurs, le gouvernement a étudié un deuxième projet de loi qui concernait le crime organisé. Il avait un lien direct avec ce que nous faisions à l'époque, parce que le terrorisme et le crime organisé sont très semblables en ce sens que l'on a affaire à des institutions qui survivent à ceux qui les composent. Ainsi, on peut appliquer les mêmes tactiques pour s'attaquer au crime organisé et pour s'attaquer au terrorisme.

Le projet de loi C-24 — que le Sénat, si je ne m'abuse, a adopté à peu près à la même époque — et ce projet de loi ont été adoptés en 2001. Leurs libellés sont à peu près semblables. Les tactiques destinées à combattre le crime organisé ont été adaptées à la lutte contre le terrorisme. Nous avons alors pris acte de la nécessité d'adopter des tactiques à long terme pour lutter contre le crime organisé. Plutôt que de miser sur des mandats d'écoute de 60 jours, il faut miser sur des mandats d'une année. Les mêmes dispositions étaient nécessaires pour le terrorisme. La possibilité de mettre des communications sur écoute pendant toute une année est en rapport avec la dynamique des groupes criminels ou terroristes.

Il y a une différence, cependant, c'est que nous avons une liste. Normalement, nous ne dressons pas de liste, mais c'est ce que fait l'ONU par le biais de son règlement. Ce changement est relativement important et il s'inscrit en réponse au cri lancé — je pense qu'on peut parler de cri — par divers groupes qui voulaient savoir ce qui est bon et ce qui est mauvais. Il y a eu tout le débat sur les définitions de « combattant pour la liberté » et de « terroriste » et sur la différence entre les deux. Comme je l'ai dit, à cette époque, nous avions recensé plus de 192 définitions du terrorisme.

La disposition concernant la participation à une activité criminelle, par exemple, avait une portée assez importante. Elle insistait sur la notion de prévention. La ministre et d'autres vous diront qu'il ne sert à rien, dans le cas du terrorisme, d'inculper quelqu'un après les faits. D'ailleurs, aucun terroriste n'a survécu aux événements du 11 septembre. Les listes, en revanche, permettent de miser sur la prévention.

À l'époque, un instructeur avait enseigné à des terroristes comment piloter un 747, sans pour autant apprendre à décoller ni à atterrir. Eh bien, nous en avons fait une exigence. Avant, pour que quelqu'un soit associé à une activité terroriste, il fallait qu'il soit parfaitement au courant de ce qui se tramait. Ainsi, je pouvais savoir que mon collègue de bureau était membre d'une organisation terroriste, mais tant que je n'avais pas le détail de ses activités, j'étais protégé. C'était là une faille importante dans laquelle on pu s'engouffrer de nombreuses personnes qui ont pu poursuivre leurs activités pro-terroristes et échapper à toute répercussion sur le plan pénal. Cela, nous l'avons réglé avec la loi.

Il y a également la disposition qui concerne l'arrestation à titre préventif. Ce n'est pas exactement la même chose, mais elle est fondée sur le modèle de l'obligation de ne pas troubler la paix publique applicable, par exemple, dans les cas de violence maritale. L'autre disposition est celle de l'audience d'investigation. Il est actuellement possible, en vertu de différentes lois — je crois qu'il s'agit de la Loi sur la concurrence et de la Loi de l'impôt sur le revenu — de contraindre quelqu'un à témoigner. Il existe des mesures qui permettent de protéger le droit de ne pas s'incriminer, pour que les preuves ne soient pas utilisées contre vous, mais il y a tout de même une obligation de témoigner. Le véhicule de l'aide légale mutuelle a été modifié à cette fin. Si un pays étranger veut qu'une personne vivant au Canada vienne témoigner, ce pays peut, en vertu d'un accord d'assistance légale mutuelle, venir au Canada, demander que l'intéressé témoigne et recueillir son témoignage sous serment devant un juge canadien. Il semblait logique que nous ayons les mêmes possibilités à l'étranger. Les États-Unis ont ce qu'on appelle le « Grand Jury » ou chambre de mise en accusation, mais nous n'avons pas ce genre de procédure ici.

Un grand nombre des dispositions reprennent ce qui avait été fait pour lutter contre le crime organisé ou elles sont destinées à répondre aux exigences de l'assistance légale mutuelle ou d'autres dispositions, ou alors elles suivent les modifications apportées à d'autres lois comme la Loi sur les secrets officiels en vigueur depuis des années, ou la Loi sur les organismes de bienfaisance qu'étudiait un autre comité. Tous ces documents ont été regroupés pour constituer les six parties du projet de loi C-36.

M. Pentney : Très brièvement, je voudrais vous parler de cela sous un angle légèrement différent. Vous vouliez savoir si nous avions une idée du genre de modifications apportées ou envisagées. Eh bien, les rapports précisent bien que cette loi n'a pas beaucoup été utilisée. Nous devrions nous en réjouir, d'un côté, mais d'un autre, cela veut dire que le gouvernement n'est pas en train de proposer des modifications précises à cette loi.

Le contexte d'application de la loi, en ce qui concerne la menace et le risque, et ce que le gouvernement a fait pour promouvoir la protection de la sécurité nationale ont été changés. Nous disposons à présent d'une politique nationale pour la sécurité. Nous avons aussi l'Agence des services frontaliers du Canada. Plusieurs mesures ont été adoptées pour améliorer la sécurité aux frontières et favoriser la liberté avec laquelle les gens franchissent la frontière et la vitesse à laquelle ils le font. Votre comité en entendra sans doute davantage parler dans le cadre de ses travaux. Plusieurs modifications ont été apportées pour rendre la politique et les pratiques opérationnelles. Ainsi, il existe aujourd'hui le Centre intégré d'évaluation de la menace. Des améliorations ont été apportées aux méthodes de communication de l'information. Toutefois, à ce stade, le gouvernement n'est pas prêt à se présenter devant ce comité pour lui proposer des recommandations d'amendements au Code criminel. Cela ne veut pas dire que rien n'a changé. Nous avons beaucoup fait en marge du projet de loi C-36 pour améliorer le cadre de la sécurité nationale mais, à ce stade, nous n'avons aucune recommandation particulière à formuler. Il existe des domaines de la sécurité nationale qui échappent à la portée du projet de loi C-36 et qui font l'objet d'un examen continu. Toutefois, pour ce qui est du projet de loi C-36 lui-même, nous n'envisageons actuellement de soumettre aucune recommandation d'amendement.

Le sénateur Lynch-Staunton : Des modifications seraient-elles apportées ailleurs?

M. Pentney : L'examen est permanent. Il a été question de la décision de la Chambre des lords. Le gouvernement doit réfléchir à la situation délicate à laquelle il est confronté, par exemple dans le cas de personnes dont nous aurions demandé l'expulsion du Canada si nous en avions eu l'occasion.

Nous avons maintenant la possibilité de refouler les personnes ayant commis des crimes graves, des actes terroristes ou des crimes de guerre, et nous nous en prévalons. L'Agence des services frontaliers recueille activement des informations et les communique pour essayer d'empêcher l'entrée au Canada à cette catégorie de personnes.

Une fois qu'elles sont ici, au Canada, il est difficile d'agir et c'est pour cela que nous avons eu recours aux certificats de sécurité à quelques reprises. Quoi qu'il en soit, il faut toujours se demander quelle est la meilleure formule à appliquer en fonction de la situation.

Les ministères fédéraux sont confrontés à d'autres situations qui touchent à la sécurité. Le fonctionnement habituel du gouvernement du Canada fait l'objet d'un examen permanent, notamment pour déterminer s'il existe, ailleurs, des outils qui permettraient de régler les questions touchant à la sécurité nationale. En cours de route, on se rend compte que le gouvernement va devoir déterminer si d'autres étapes s'imposent.

Le sénateur Stratton : Cela m'intrigue. Vous nous dites que le projet de loi C-36 ne va pas changer les choses, qu'il y a d'autres aspects sur lesquels vous êtes intervenus ou que vous êtes en train de modifier à cause de la menace terroriste.

M. Pentney : Oui, cela fait l'objet d'un examen continu.

La présidente : Chers collègues, nos hauts fonctionnaires sont prêts à rester parmi nous jusqu'à 14 h et le sénateur Jaffer voudrait poser des questions. Nous passerons ensuite à une seconde série de questions et je donnerai la parole au sénateur Lynch-Staunton, au sénateur Andreychuk et au sénateur Joyal.

Le sénateur Jaffer : Merci beaucoup. D'après ce que le sénateur Andreychuk vient de dire, quand nous avons tenu nos audiences sur le projet de loi C-7, l'une des choses qui nous a interpellés c'est que le gouvernement était autorisé à communiquer des informations à des pays étrangers. Cela nous inquiétait beaucoup. Pourriez-vous nous apporter quelques précisions à ce sujet?

J'aimerais aussi obtenir une réponse à cette question que j'ai posée à la ministre au sujet du vandalisme. Vous avez dit que la modification de la loi était quelque chose de très fluide. Avez-vous pensé à la question des édifices religieux qui ont été vandalisés, comme les mosquées, les églises et les synagogues? Quelles autres sanctions sont prévues pour cela?

M. Kennedy : Il vaudrait mieux que vous posiez cette question au ministre de la Justice quand il témoignera devant vous, car il s'agit de son domaine de compétence.

Le sénateur Jaffer : Pour ce qui est de la définition d'activités terroristes, nous savons que la Loi antiterroriste ne vise pas à définir le terrorisme, mais qu'elle ajoute une définition des activités terroristes au Code criminel.

Dans la définition d'activités terroristes, il est question de « tout acte ou omission commis en totalité ou en partie pour des fins politiques, religieuses ou idéologiques ». Je suis préoccupé par le fait que vous ayez ajouté le mot « religieux » à cette définition. Des groupes religieux m'en ont d'ailleurs parlé. Cela est très préoccupant et j'aimerais comprendre pourquoi vous voudriez tout de même, après avoir entendu tout ce dont il a été question au sujet du profilage, conserver le mot « religion » dans la définition.

M. Kennedy : Dans ses remarques — je pense que cela apparaît dans les retranscriptions des audiences des deux chambres, sans doute à l'époque où le projet de loi C-36 a été proposé — la ministre a indiqué que l'intention visée était de limiter les mots destinés à proscrire le terrorisme. Comme vous le savez sans doute, nous essayons de mener une action cohérente à l'échelle internationale avec les pays qui ont des vues similaires aux nôtres, pays qui sont susceptibles de nous donner des exemples utiles de lois semblables. Je crois savoir qu'il existe des dispositions semblables en Australie et en Nouvelle-Zélande et sans doute aussi au Royaume-Uni. Certaines mesures législatives comportent de tels éléments de base et certaines sont allées plus loin et stipulent les groupes visés.

C'était pour cette raison à l'époque. Il faudrait que nous revenions en arrière pour voir si l'on a pleinement débattu la question. La définition a été soumise à des débats vigoureux à l'époque, quand le projet de loi est passé en Chambre. Le libellé qui en a découlé satisfaisait tout le monde.

Le libellé de la définition d'accompagnement a précisé davantage les choses, je regarde ici l'article qui dit : « Il est entendu que l'expression d'une pensée, d'une croyance ou d'une opinion de nature politique, religieuse ou idéologique n'est visée à l'alinéa b) de la définition de « activité terroriste » au paragraphe (1) que si elle constitue un acte — action ou omission — répondant aux critères de cet alinéa, » ce qui désigne très clairement toute personne voulant recourir à la violence ou menaçant de recourir à la violence contre des personnes ou des biens dans le dessein d'intimider la population en général ou de contraindre le gouvernement.

Je n'adhère à aucune définition en particulier, car ce n'est pas mon travail. Pour l'instant, nous avons 192 définitions et il en existe peut-être plus de 200. Il y a peut-être plusieurs façons d'analyser la chose et d'en arriver à divers modèles, mais c'est là où nous en sommes pour l'instant.

Vous avez parlé d'une préoccupation fondamentale, qui est la perception des communautés religieuses, communautés qui peuvent changer n'importe quand. La ministre en a parlé; à un moment donné, il s'agissait de la communauté sikh qui percevait mal ces définitions. Il y a également eu des phénomènes historiques. La loi se veut neutre. Certains pourraient dire que Timothy McVey a été inspiré par une vision chrétienne extrémiste.

Nous avons l'intention de faire en sorte que cette loi soit la plus neutre possible, que tous les Canadiens puissent se rallier à elle, s'exprimer en son nom et dire qu'ils l'appuient, notamment pour contribuer à protéger les communautés religieuses.

M. Pentney : Il est important pour le comité et pour l'ensemble des Canadiens de bien comprendre que ces mots-là ne sont pas destinés à prendre à partie des groupes religieux ou tout autre groupe d'ailleurs. Il s'agit d'imposer une limitation. Ce n'est que dans le cas d'actes qui pourraient propager la violence, par exemple, que la définition d'activité terroriste du Code criminel s'appliquerait.

Malheureusement, si on limitait la définition d'activités terroristes dans le Code criminel aux seuls actes politiques, afin de poursuivre quelqu'un au pénal pour un acte terroriste sur lequel tout le monde s'entendrait, il faudrait que l'acte en question ait obéi à un motif politique.

La définition a donc été élargie et précisée pour bien indiquer que la loi ne vise aucune communauté religieuse, mais que les fanatiques religieux ou politiques et toute autre personne qui menacent la société par des actes de violence généralisés sont visés par la définition du Code criminel. Il aurait été utile de mieux faire connaître cela et de le communiquer plus largement.

Cependant, si seuls les actes politiques étaient visés dans la définition du Code criminel, nous risquerions de nous trouver face à des gens qui, ayant fait sauter un bâtiment, nous diraient qu'il ne s'agissait pas d'un acte criminel, mais d'un acte religieux, idéologique ou autres. Le Code essaie de réaliser un équilibre entre ce que nous pourrions appeler des actes terroristes à caractère consensuel commis par un groupe plutôt que de viser certaines communautés en les étiquetant d'une façon ou d'une autre. C'est l'équilibre que nous avons essayé de réaliser dans cette définition.

Je suis d'accord avec ce que dit M. Kennedy, nous espérons que nous allons continuer à débattre, à ce comité ou à un comité de la Chambre, pour savoir si cette définition est la plus appropriée. Il en a beaucoup été question dans les premières discussions. Je pense que votre comité doit décider si, sachant ce que nous savons maintenant — trois ans après le 11 septembre, après avoir vu ce qui est arrivé au monde, après avoir évalué les menaces et les risques auxquels nous sommes confrontés — si cet outil, qui fait partie d'une trousse beaucoup plus importante dont dispose le gouvernement, est suffisant pour pénaliser les comportements que nous jugeons être des comportements criminels. Pouvons-nous penser à des situations plausibles auxquelles cette loi s'appliquerait?

Voilà les questions auxquelles nous devons répondre à l'examen de cette loi, au jour d'aujourd'hui. À partir de cette définition, nous devons nous demander si nous voulons que nos tribunaux s'empêtrent dans des questions touchant aux définitions. C'est précisément ce que nous avons essayé d'éviter avec ce libellé et cette définition.

La présidente : Merci beaucoup. Nous allons passer au second tour de questions.

Le sénateur Lynch-Staunton : J'aimerais revenir sur la question des certificats de sécurité. Ce matin, la ministre m'a donné l'impression que les tribunaux avaient tranché sur la constitutionnalité du processus. Or, je ne pense pas que tel ait été le cas. Je crois comprendre, et je serais heureuse que vous me corrigiez éventuellement, que la Cour suprême a rendu une décision sur la déportation vers des pays où l'on sait que la torture est pratiquée et elle a ajouté que la déportation ne pourrait intervenir que dans des circonstances exceptionnelles, sans définir pour autant ce qu'elle entend par « circonstances exceptionnelles ». Je ne pense pas que la Cour suprême ait porté un jugement sur les autres aspects des certificats.

M. Pentney : Dans une cause antérieure, la cause Chiarelli, la Cour suprême a statué sur la question de la communication d'informations, des limites à imposer à cette communication et elle a avalisé ce qui se faisait. La Cour d'appel fédérale a récemment émis deux décisions qui ont confirmé la constitutionnalité et l'équité du processus, je parle ici d'équité en droit administratif.

Le sénateur Lynch-Staunton : Il y a eu deux décisions de la Cour fédérale. Ont-elles fait l'objet d'un appel?

M. Pentney : Pas à ce que je sache, mais ce pourrait être le cas plus tard.

Le sénateur Lynch-Staunton : Quoi qu'il en soit, dans le cas de Mahjoub, le gouvernement insiste pour le renvoyer en Égypte, même s'il sait qu'il pourrait y être torturé. Après avoir rendu sa décision, il n'y a pas si longtemps, le gouvernement a dit qu'il pourrait être torturé et l'avocat de la défense a affirmé qu'il le serait, mais les deux parties ont admis que le risque était tout de même assez grand. Le gouvernement parle d'une possibilité et l'avocat d`une certitude.

Pour nous arrêter un peu sur cet aspect, ne pensez-vous pas que le Canada s'inscrit ainsi en violation de certaines conventions internationales parce qu'il risque de déporter des personnes dans un pays où il est presque certain qu'elles vont être soumises à la torture ou du moins dans un pays où la torture se pratique et où elle peut être pratiquée sur les personnes déportées?

M. Kennedy : J'espère tout d'abord que vous comprendrez que je ne peux pas faire de commentaire sur des causes qui se trouvent devant les tribunaux et je tiens à ce que mes propos soient interprétés dans ce sens.

S'agissant de la menace de torture, il est vrai que la plupart des individus qui peuvent constituer une menace terroriste viennent de parties du monde où la vie n'est malheureusement pas aussi douce qu'ici. Le gouvernement du Canada a pour pratique, dans le cas d'un ressortissant étranger, d'intervenir auprès de son gouvernement pour obtenir l'assurance que la personne ne sera pas soumise à la torture et que ses droits seront respectés.

Dans l'arrêt Suresh, où une allégation semblable avait été soulevée, la Cour suprême du Canada a indiqué qu'il était du ressort du gouvernement, dans les cas exceptionnels, de déporter une personne, même si celle-ci risque d'être torturée, au nom de l'obligation corollaire qui est d'assurer la sécurité des Canadiens. Je tiens, cependant, à insister sur le fait que le gouvernement du Canada a pour pratique bien établie d'obtenir des pays vers qui il déporte certaines personnes la garantie que de telles choses ne se produiront pas.

L'autre réalité, c'est que ces pays doivent collaborer à l'échelle internationale pour combattre ce qui constitue très clairement un problème mondial de terrorisme. La réalité, c'est qu'il serait contraire aux intérêts de tout pays de s'aliéner des partenaires internationaux en faisant quelque chose qui pourrait le gêner ou l'embarrasser, par exemple en maltraitant la personne déportée.

Nous n'avons jamais entendu parler de qui que ce soit qui ait été soumis à la torture, mais nous prendrions une telle chose très au sérieux et c'est pour cela que nous demandons aux gouvernements étrangers de nous garantir que ce genre de chose ne se passera pas. Si cela arrivait, nous conclurions des ententes pour traiter avec le pays concerné dans l'avenir relativement à la communication d'informations et à des choses du genre. Il en va de l'intérêt de ces pays de se comporter pour le mieux.

Le sénateur Lynch-Staunton : Quand le gouvernement dit que quelqu'un constitue une menace et qu'il faut donc le déporter, la démonstration de cette menace ne repose que sur des preuves sélectionnées par le gouvernement, sans que l'accusé ait un droit de réponse.

M. Pentney : Ce n'est pas le cas, sénateur. La personne qui fait l'objet d'un certificat de sécurité a tout à fait le droit de réagir et, dans plusieurs cas récents, les individus concernés ont pris position et ont déposé leurs preuves. Dans plusieurs cas, les juges réclament spécifiquement des preuves sur le temps que les individus ont passé en Afghanistan entre 1991 et 1994, sur leur association avec des personnes citées, preuves qui doivent directement les concerner, après quoi l'individu a la possibilité de déposer sa preuve, de témoigner ou de faire venir d'autres témoins pour répondre aux accusations ou pour déposer d'autres preuves et contre-interroger les témoins du gouvernement.

Nous sommes dans une situation délicate sur ce plan. Vous avez entendu parler des catégories de personnes qui pourraient être sujettes à cette procédure. Celles qui ont commis des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité, des crimes organisés et des actes terroristes et nous avons ainsi eu 28 ou 29 cas du genre depuis 1991, soit moins de deux par an.

L'État est tenu d'établir le bien-fondé de sa cause. Un dossier est préparé et il est communiqué à deux ministres qui doivent les signer. Dès que leurs signatures sont apposées, toutes les informations sont automatiquement transmises à un juge. Celui-ci les examine et prépare un synopsis de toute la preuve pouvant être divulguée à l'autre partie en n'excluant que celle qui pourrait porter atteinte à la sécurité nationale, c'est-à-dire tout ce qui permettrait de connaître l'identité d'une source, les techniques employées ou l'identité des tiers. Quoi qu'il en soit, une fois que cette information est protégée, le fond du dossier est communiqué à l'autre partie et cela c'est le juge qui en décide.

L'autre partie dispose donc de tout ce dossier pour savoir ce qu'on lui reproche. C'est à partir de cela qu'elle peut contre-examiner les témoins du gouvernement. La seule chose, c'est qu'elles ne peuvent aller chercher des informations qui pourraient porter atteinte à la sécurité nationale, mais elles connaissent tout de même l'allégation sur le fond.

Ce modèle est envisagé à l'échelle internationale et, si je me souviens bien, la Cour européenne des droits de l'homme a jugé que ce régime est acceptable parce qu'il réalise un équilibre entre la nécessité d'offrir à toute personne un procès juste et équitable et la nécessité de l'État de protéger ces informations. Si nous n'avions pas disposé de cet outil, nous aurions dû dévoiler des sources d'information ou les techniques utilisées. Nous aurions outillé les organisations terroristes en leur communiquant cette information, en leur disant qui sont nos sources, quelles techniques nous employons et avec qui nous collaborons, ce qui les aurait renforcés.

Si tel avait été le cas, nous n'aurions pas voulu dévoiler cette preuve dans une audience publique, parce que nous aurions porté atteinte à notre capacité de nous protéger contre des activités terroristes futures, ce qui veut dire que nous n'aurions monté aucun dossier contre qui que ce soit et que nous n'aurions rien pu faire contre d'éventuels coupables. Tout réside donc dans l'équilibre. Nous avons essayé d'appliquer un processus qui constitue un équilibre entre deux intérêts concurrents.

La déportation d'individus vers leur pays soulève un autre problème dont la Cour suprême a d'ailleurs reconnu la nature dans l'arrêt Suresh. Que faire en présence d'individus dont on a de bonnes raisons de croire qu'ils sont membres d'Al-Qaeda et qui ont déterminé que le Canada serait une de leurs cibles? Que faire si on ne peut pas les déporter? Les relâcher dans la société canadienne qui est la cible même de leurs activités terroristes? Voilà le dilemme.

Le sénateur Lynch-Staunton : Vous connaissez la position du juge Hugessen à ce sujet. Je crois que le juge Lufty s'est également exprimé, tout comme un autre juge. Je suis sûr que leur position est gênante, mais qu'il faut la respecter. Voici ce que le juge Hugessen a déclaré dans un article paru dans le Ottawa Citizen du 12 décembre 2004 :

Nous n'aimons pas n'avoir le point de vue que d'une des deux parties. Nous détestons d'avoir à décider quel genre de renseignements à caractère délicat il est possible ou nécessaire de communiquer à l'autre partie [...] Autrement dit, nous avons grandement besoin de notre bonne vielle « doudou » que sont les procédures de confrontation avec lesquelles nous avons tous grandi.

M. Kennedy : Je crois que la Cour d'appel fédérale a récemment indiqué que, toute aussi difficile et inconfortable puisse être cette procédure, elle est constitutionnelle et les juges doivent la respecter et ils sont en fait en mesure de le faire.

M. Pentney : Dans une décision plus récente, la Cour d'appel fédérale consacre quelques paragraphes à décrire le genre d'enquête qui se déroule huis clos. Il s'agit d'une audience en deux phases. D'abord, devant le juge. C'est ce dont le juge Hugessen parlait. En général, les juges entendent à huis clos les témoins du SCRS. Sans divulguer pour autant des secrets d'alcôve, mais pour m'être entretenu avec certaines personnes qui ont participé à ce genre de procédure, je peux vous dire qu'elles sont passées à mal par le juge. Ce n'est pas une promenade de santé, parce que le juge est tout à fait conscient de ses responsabilités. Dans un récent jugement, un juge de la Cour fédérale parle du caractère inquisiteur de la procédure, comme le disait M. Kennedy.

Le synopsis dressé par le juge renferme le plus grand nombre d'informations possible à communiquer à la personne visée par le certificat et le juge décide ensuite s'il était raisonnable d'émettre un tel certificat pour commencer. Si, d'après la preuve déposée par le gouvernement à huis clos et lors des audiences publiques d'après la preuve déposée par la personne visée par le certificat, le juge conclut que ce certificat n'était pas raisonnable, tout s'arrête là. L'individu n'est plus sujet au certificat. Ce n'est que si le juge estime le certificat raisonnable qu'il répond à la deuxième question consistant à savoir si le ministre a ou non agi de façon raisonnable en signant le certificat et en concluant que la personne concernée constitue une menace pour la sécurité du Canada, qu'il est nécessaire de le déporter, afin de protéger la sécurité du Canada, au risque que lui-même ait à faire face à certaines menaces.

Voilà l'équilibre délicat dont M. Kennedy parle, équilibre que nous confère la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. C'est un équilibre très difficile à réaliser, question avec laquelle les Britanniques sont actuellement aux prises. La décision de la Chambre des lords a fait l'objet d'un renvoi. Que faire? Je pense que d'autres pays sont aux prises avec les mêmes problèmes que nous.

Le sénateur Lynch-Staunton : Je comprends bien tout cela et j'ai hâte de recevoir les informations que vous pourrez nous faire parvenir.

La présidente : Chers collègues, je vous serais reconnaissante d'être les plus concis possible pour que nous puissions clore cette séance et permettre à nos témoins de reprendre leur travail. Nous avons nous-mêmes des choses à faire de notre côté.

Le sénateur Lynch-Staunton : Ils font actuellement leur travail et ils le font très bien.

Le sénateur Andreychuk : Ce dont vous venez de parler ne fait-il pas partie du dilemme? Nous sommes en train de créer un système au Canada. Toute personne a le droit de réagir aux accusations dont elle fait l'objet. C'est cela qui démarque tellement notre système des autres qui appartiennent au passé.

Vous avez dit qu'il fallait réaliser l'équilibre entre la sécurité nationale et le droit de se défendre. Comme nous l'avons vu avec l'affaire Arar, ce peut être très difficile. Les gens ne savent pas forcément ce qu'on leur reproche. Si l'on ne connaît que la moitié des preuves, on peut toujours essayer de se défendre d'une certaine façon pour découvrir, en cours de route, que la preuve voulait dire quelque chose de légèrement différent. Finalement, on est pris au piège et l'on ne peut pas dévoiler toute la preuve.

Ne pensez-vous pas que pour résoudre une partie du dilemme, il faudrait permettre un examen complet du processus? Nous avons entendu des représentants de la GRC se plaindre auprès de la commission qu'ils ne maîtrisent pas entièrement toute cette partie. Le SCRS, le CIRC, qui est le Centre canadien des ressources du renseignement, ne maîtrisent pas parfaitement tout cela, pas plus que le Parlement d'ailleurs.

Comme nous l'avons découvert dans la cause Arar il existe des désaccords légitimes à propos de ce que sont les intérêts nationaux et la sécurité nationale. Dans cette cause, le juge dit qu'il faut dévoiler cela et qu'une fois la preuve des deux parties soupesée, le public a le droit a le droit de savoir. De son côté, le gouvernement dit que tel n'est pas le cas, qu'il ne veut pas divulguer sa preuve. C'est un cul-de-sac et il faut trouver une solution. Les deux parties défendent leurs propres intérêts. Le gouvernement bâtit un dossier et la défense aussi. Je suis certain que l'on pourrait trouver un système quelconque pour chapeauter tout cela.

M. Kennedy : Je pourrais peut-être un peu vous parler de cela, parce qu'il y a beaucoup de problèmes actuellement.

Vous avez parlé de la cause Arar dont est actuellement saisie la Cour fédérale. Pour placer les choses en contexte, il faut dire que l'article 38 de la Loi sur la preuve au Canada est conçue pour permettre la tenue d'un procès ou d'une audition quelconque et pour préciser ce qui doit être divulgué ou pas en cas de désaccord entre les parties. Le cas échéant, la cause se retrouve devant un juge de la Cour fédérale et son jugement peut faire l'objet d'un appel. C'est ainsi que les choses sont actuellement prévues.

Cette disposition a été modifiée dans le projet de loi C-36, pour devenir une mesure positive. Avant le projet de loi C-36, si la Couronne s'objectait en vertu de l'article 38, cela avait l'effet d'une bombe nucléaire. C'était tout ou rien. La disposition a donc été modifiée pour permettre au juge de produire un sommaire judiciaire pour éviter la situation du tout au rien. Il est maintenant prévu qu'un juge de la Cour fédérale soit saisi du dossier, celui-ci pouvant décréter qu'il est possible de divulguer davantage de preuves, selon la façon dont les documents vont être censurés et dont l'information va être présentée. C'est actuellement un plus pour ceux qui veulent accéder à des informations concernant la sécurité nationale, parce que cette disposition allège la censure et permet une meilleure divulgation tout en protégeant les éléments essentiels qui préoccupent l'État.

Il ne faut pas, non plus, oublier qu'il existe une différence par rapport à la personne accusée d'une infraction pénale en vertu du Code criminel et qui fait face à une période d'incarcération et à la stigmatisation qui l'accompagne; vous êtes criminel et c'est indéniable. Avec le terrorisme, nous n'avons pas affaire à des cas au pénal. Nous avons à faire à des gens qui ne sont pas des citoyens canadiens mais qui résident chez nous et dont nous avons des raisons de croire qu'ils sont des terroristes, qu'ils ont mené des activités terroristes, qu'ils commettent ou vont commettre des actes terroristes. Ces personnes n'ont pas les mêmes droits qu'un citoyen canadien. Elles n'ont pas le droit de venir au Canada. Il ne s'agit pas de Canadiens. On ne peut pas adapter le régime de droit administratif pour reconnaître des droits différents et concurrents. Voilà pourquoi nous avons adopté le régime actuel. Il s'agit d'un régime de droit administratif et non d'un régime de droit pénal.

La personne se retrouve en état d'arrestation ici, parce qu'elle veut rester au Canada. Son objectif, c'est de rester ici. Elle dit qu'elle ne veut pas être déportée, qu'elle veut rester au Canada. Nous l'incarcérons parce que nous avons des motifs raisonnables de croire qu'elle participe ou participera à des activités terroristes et que, tant qu'elle est en territoire canadien, nous ne voulons pas qu'elle constitue une menace pour la population. Si la personne est prête à rentrer dans son pays, elle est libre de le faire. Si elle est incarcérée, c'est qu'elle a décidé de ne pas le faire. Elle veut demeurer ici, au Canada. Il y a donc une différence entre la procédure au pénal et la procédure administrative, parce que dans un cas on est accusé en vertu du droit pénal et que l'on se retrouve en prison et que, dans l'autre, la personne désire rester ici et recourir aux outils légaux dont elle dispose pour ne pas être déportée. Voilà la différence.

Le sénateur Andreychuk : Si vous me le permettez, ce n'est pas ce que je voulais dire. Je pense que nous sommes en présence d'un élément de justice naturelle et que nous sommes tenus de rendre justice à ceux qui viennent au Canada et dont beaucoup ont déjà passé 20 ans chez nous. Je suis les questions de déportation et de dénationalisation et comme nous avons fait passer énormément de choses du droit administratif au droit criminel, je vais vous poser ma deuxième question.

N'est-il pas temps de nous demander si nous ne nous sommes pas trop écartés de ce qui est acceptable? Vous parliez des six piliers ou des six parties du projet de loi C-36. Lors de ces audiences ou à l'occasion d'une loi subséquente, on nous avait dit qu'un grand nombre de ces dispositions avaient été réclamées par les policiers travaillant dans divers domaines, comme dans le domaine du criminel ou de la déportation, parce qu'ils jugeaient cela nécessaire. À la façon dont le gouvernement de l'époque avait perçu la situation, il avait jugé que le public n'était pas très chaud pour cela. Quand la Loi sur le crime organisé a été adoptée, nous avons franchi un grand pas et nous en franchissons un autre aujourd'hui avec la Loi antiterroriste. Toutes les lignes directrices que nous avons appliquées pour les questions de justice ont été déplacées dans ces deux cas. N'est-il pas temps de se demander si nous avons fait ce qu'il fallait et de déterminer si, au nom de la lutte contre le terrorisme, nous n'utilisons pas ces outils, comme vous les appeler, pour recueillir des informations à d'autres fins sur les citoyens et si nous n'avons pas en fait déplacé un peu trop les limites, par exemple dans le cas des activités criminelles? C'est un débat d'ordre philosophique.

M. Kennedy : Je dois vous dire, comme cela a été dit ce matin, que les certificats de sécurité ne font pas partie du projet de loi C-36, mais j'ai pris acte de votre intérêt quand on vous a dit que ce régime qui est en place, que je viens juste de vous décrire, est antérieur aux événements du 11 septembre. Je crois qu'il remonte à 1978, et qu'il est lié à des événements de l'époque. Il a été ensuite modifié en 1991, 10 ans avant les événements du 11 septembre, parce que le monde était déjà confronté à la menace terroriste.

La question de savoir si la question de la preuve recueillie à huis clos, ex parte, auxquelles les deux parties n'ont pas également accès, a été réglée par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Chiarelli. Nous cherchons, en tant qu'avocats, à rendre la chose publique la plus humaine possible, mais il arrive un stade où, si l'on est transparent, on n'utilise pas les instruments dont on dispose. Si l'on utilise l'instrument, on ne parvient pas à expulser un terroriste ou une personne que l'on croit être terroriste. Nous ne pourrions pas prendre cette mesure préventive. Malheureusement, nos choix sont aussi tranchés.

Nous sommes ici dans un débat tout à fait différent qui ne découle pas des événements du 11 septembre, mais de la question de savoir comment utiliser des preuves dans une audience administrative pour déporter une personne dont on soupçonne qu'elle participe à des activités terroristes ou à des activités du crime organisé, si l'on est obligé de divulguer une information classifiée? D'ailleurs, la cause Chiarelli est une cause au pénal. Ce sont les mêmes problèmes qui se posent au sujet des sources employées dans les causes au criminel. Pour ce qui est des activités terroristes, nous avons à faire à des groupes qui auraient tué 100 000 personnes, 50 000 ou 60 000 au cours de leur histoire. La protection de l'information n'est donc pas une petite affaire dans ce cas.

M. Pentney : Ne sommes-nous pas allés trop loin par rapport au principe de base? Je pense que, ce matin, la ministre a indiqué que le débat parlementaire autour du projet de loi C-36 avait surtout porté sur les valeurs et les principes et que d'importants changements avaient été faits. Je pense qu'il incombe à votre comité de décider si, à la lumière de la menace et du risque actuels, d'autres changements s'imposent ou pas. Nombre de nos principes fondamentaux se retrouvent dans cette loi, dans toute la mesure du possible. La loi ne confère pas à l'exécutif de pouvoirs particuliers qui échapperaient au contrôle judiciaire. Cette loi n'est pas venue chambarder notre système juridique. Elle se fonde sur les cadres législatifs actuels qui, comme le disait M. Kennedy, ont été appliqués au crime organisé, par exemple. Quand cela convenait, nous avons pris une partie de ces mesures pour les appliquer au terrorisme.

Depuis que notre pays existe, il est voué à la paix, à l'ordre et au bon gouvernement. L'article 7 de la Charte présente la sécurité des personnes comme une valeur fondamentale. Nous ne sommes pas disposés, au Canada, à renoncer à notre droit de vivre en liberté et en toute sécurité. La menace à laquelle nous sommes confrontés a été cristallisée par les événements du 11 septembre. Le 11 septembre n'a pas été le seul événement du genre, mais il nous a cruellement rappelé la nature de la menace qui pèse contre nous. Il est possible que nous devions nous pencher, une fois de plus, sur la menace actuelle et anticipée et décider comment nous allons affirmer nos principes et nos valeurs.

Le projet de loi C-36 contient des dispositions relatives à la lutte contre la haine. Nous avons organisé une table ronde interculturelle et avons essayé de garantir la surveillance judiciaire. Dans le projet de loi C-36 et dans les activités qui y sont liées, nous n'avons pas renoncé, loin s'en faut, aux valeurs fondamentales des Canadiens. La question qui se pose à votre comité et à la Chambre consiste à déterminer si, compte tenu des menaces et des risques actuels, nos valeurs sont suffisamment protégées, notamment la valeur que nous accordons à la vie et à une société sûre et libre. D'aucuns ont reconnu qu'il est difficile de répondre à cette question. Eh bien, voilà une merveilleuse occasion pour votre comité de prendre la mesure de la situation; nous ne devons pas le faire en dehors de toute référence, mais dans le contexte de la menace actuelle. Je pense que nous devons être prudents et comprendre dans quelle mesure les valeurs fondamentales ont changé. Les travaux effectués sur la portée et l'ampleur de la menace font état de plusieurs préoccupations à cet égard, mais personne n'a dit que nos valeurs en ont été bousculées. La question est de savoir si nous ne sommes pas allés trop loin. Eh bien, s'il s'agit-là d'une question très valable, on ne peut y répondre simplement en se demandant si nous avons eu trop recours à la loi. Nous devons plutôt nous demander s'il n'existe pas actuellement un contexte où il y a lieu d'utiliser la loi. Si c'est le cas, je pense que nous devons nous demander si les outils dont nous nous sommes dotés grâce à cette loi et à d'autres moyens sont appropriés.

Quelques changements sont survenus sur le plan des valeurs fondamentales. Cette loi traite d'un nouveau type d'activité et d'un nouveau type de menace. Elle établit des pouvoirs d'application plutôt extraordinaires et il est clair qu'ils n'ont pas été largement appliqués, ce dont il y a lieu de se réjouir. Dans notre analyse de ces pouvoirs, nous devons nous demander s'il peut y avoir des circonstances dans lesquelles nous pourrions les utiliser.

M. Kennedy : Le préambule de la loi constitue, pour nous tous, un guide utile. Ce que je veux dire, c'est qu'il est logique et qu'il explique le bien fondé de cette vision. Il s'agit d'un préambule assez long et donc plutôt unique, parce que les préambules sont généralement courts. Il énonce les répercussions essentielles sur les citoyens, ce qui nous préoccupe; tous les Canadiens ont le droit de vivre en paix, en liberté et en sécurité. Il est question de cela et du respect ainsi que de la promotion des valeurs exprimées dans la Charte des droits et libertés. Il est question de tous ces principes. Est-ce que l'un de ces principes est moins vrai aujourd'hui? Est-ce que cette loi les enfreint? Il s'agit d'une accise sur laquelle nous pouvons nous appuyer.

La présidente : Merci beaucoup.

Le sénateur Joyal : Qui, chez vous, est chargé de vérifier si principes énoncés dans la Charte sont respectés, au quotidien, quand vous formulez des politiques, des programmes ou que vous interprétez des lois? Qui s'occupe de cela chez vous?

M. Kennedy : Vous vous rappellerez peut-être qu'on a reproché à la loi de se soustraire à la Charte. Quand nous rédigeons une loi, les rédacteurs argumentent avec nos spécialistes de la protection des renseignements personnels et nos spécialistes de la Charte. Comme vous le savez, le ministre de la Justice doit confirmer que la loi est conforme à la Charte avant qu'elle soit soumise à un débat au Cabinet et déposée en Chambre. C'est une partie du travail que nous faisons.

La Charte comporte deux aspects : d'abord, les lois elles-mêmes et, par ailleurs, l'exécution ou l'application de ces lois. S'il y a abus, c'est comme pour une fouille ou une saisie. Chaque service concerné, qu'il s'agisse du SCRS ou de la GRC, dispose d'une unité de service juridique. Quand les politiques sont formulées, elles sont examinées en fonction de ce qui est raisonnable, proportionné, équilibré et ainsi de suite. C'est ainsi que cela fonctionne dans la fonction publique au Canada. Cela fait partie de notre mode de raisonnement.

Le sénateur Joyal : Nous le savons. Mais chez vous, dans votre service, qui s'en occupe? En ce qui a trait à vos priorités et initiatives, qui est responsable de veiller au respect de la Charte? Je sais bien que la GRC a son conseiller juridique. Je sais que le ministère de la Justice doit certifier que la loi est conforme à la Charte. Il n'est pas ici question d'adopter une loi. Nous avons déjà le projet de loi C-36. Je veux savoir qui surveille l'application de la Charte dans votre fonctionnement quotidien.

M. Kennedy : Cela fait partie de notre travail. Tout ce que nous examinons, nous le faisons sous l'angle de la Charte. C'est acquis. Nous avons notre service juridique. Nous avons nos avocats. Il y a également les avocats du ministère de la Justice qui nous conseillent. Si un mandat ou une activité de ce genre ou si le service du renseignement prend une décision concernant telle ou telle activité, mon personnel s'y arrête. En cas de problème, j'en suis informé. Toute demande de mandat est soumise à mon service juridique. J'examine la question personnellement, comme le sous- ministre et le ministre. Mes gens siègent à tous les comités de rédaction des politiques. Après le 11 septembre, nous avons émis d'autres directives ministérielles à l'intention de la GRC, parce que celle-ci allait devoir jouer un rôle accru dans ce domaine. Ces directives ressemblent à celles que nous avons émises pour le SCRS dans le cas des institutions religieuses et des institutions d'enseignement dites sensibles. Une partie de notre travail consiste à veiller à ce que la loi est correctement appliquée, pas uniquement pour ce qui est de la loi, mais aussi pour l'intervention des autres acteurs.

Pour ce qui est du renseignement, le SCRS s'en occupe et il dispose de pouvoirs exceptionnels. L'inspecteur général, qui est les yeux et les oreilles du ministre, veille de façon indépendante à l'application des politiques et il formule des recommandations à cet égard. Pour ce qui est de l'élaboration des politiques, nous avons un comité qui relève de la commission de police. Et puis, il y a bien sûr les tribunaux. Il existe donc tout un appareil qui fait que nous disposons des sécurités appropriées pour éviter que les choses ne dérapent. Nous n'avons pas intérêt à ce que les choses dérapent.

Le sénateur Joyal : Quand nous avons effectué l'étude préalable de ce projet de loi, nous avons recommandé l'adoption, dans cette mesure, d'un mécanisme permanent de surveillance parlementaire. Quand nous aurons terminé notre travail sur l'article du projet de loi qui nous vaut de nous réunir aujourd'hui, nous ne disposerons plus d'aucun autre mécanisme pour effectuer notre travail ou pour évaluer les changements et pour voir comment nos valeurs sont interprétées dans le contexte de la menace actuelle et future. J'estime que c'est là quelque chose de fondamental pour ce comité. Je suis satisfait des recommandations qui ont été formulées il y a trois ans au sujet du mécanisme de surveillance parlementaire. C'est tout aussi important aujourd'hui qu'à l'époque. Nous devrions nous attaquer à cela dans le contexte de ce que nous avons fait auparavant.

La présidente : Je suis sûre qu'à la faveur de nos audiences, toutes ces questions reviendront dans nos discussions.

Je tiens, une fois de plus, à vous remercier d'être restés, messieurs. Nous venons d'avoir un début extraordinaire pour notre comité. Nous avons eu l'occasion d'entendre certains points de vue très arrêtés sur des aspects importants de ce projet de loi. Il existe certainement des éléments, en marge de ce projet de loi qui, que nous le voulions ou non, prêtent à discussion, mais quoi qu'il en soit tout cela représente un excellent début en ce qui me concerne. Nous allons continuer. Ne vous étonnez pas si nous vous demandons de revenir nous voir pour une autre séance. Merci de votre attention et de votre patience. Vous pouvez maintenant reprendre chacun votre travail.

M. Pentney : Je tiens à vous redire que nous sommes tout à fait disposés à prêter main forte au comité à la façon dont il le jugera utile. Si nous pouvons vous aider à vous procurer d'autres renseignements ou à désigner d'autres fonctionnaires qui pourront venir témoigner devant vous, nous serons heureux de le faire.

La présidente : Je n'ai pas dûment suspendu l'audience.

Le sénateur Stratton : Très brièvement, parce que c'est important. Vous nous avez été très utile. Vous nous avez clairement dit que le projet de loi C-36 ne sera pas encore modifié, mais vous avez également déclaré que des modifications étaient envisagées par ailleurs. Pour placer le projet de loi C-36 en contexte, pendant que nous l'étudions, ne pensez-vous pas qu'il serait important que nous sachions ce qui se passe dans tout ce dossier de la lutte contre le terrorisme? Afin de pouvoir bien placer le projet de loi C-36 en contexte, nous devons comprendre ce qui se fait ailleurs. Je crois que ce serait très utile.

La présidente : Sénateur Stratton, êtes-vous en train de suggérer que notre comité devrait entreprendre l'examen de ces autres questions, dans le cadre de son mandat?

Le sénateur Stratton : Oui.

La présidente : Eh bien c'est ce que nous allons commencer à faire pour le reste de l'après-midi et j'ai pris bonne note de votre question.

Merci beaucoup.

Le comité poursuit ses travaux à huis clos.


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