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Délibérations du comité sénatorial spécial sur la
Loi antiterroriste

Fascicule 16 - Témoignages - Séance de la soirée


OTTAWA, le lundi 17 octobre 2005

Le Comité sénatorial spécial sur la Loi antiterroriste se réunit aujourd'hui à 19 h 5 pour procéder à une étude approfondie des dispositions et de l'application de la Loi antiterroriste (L.C. 2001, ch.41).

Le sénateur Joyce Fairbairn (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Honorables sénateurs, il s'agit de la trente-sixième séance avec témoins du Comité sénatorial spécial sur la Loi antiterroriste. Pour nos téléspectateurs, j'aimerais expliquer l'objet de ce comité.

En octobre 2001, en réaction directe aux attaques terroristes de New York, de Washington et de Pennsylvanie et à la demande des Nations Unies, le gouvernement canadien a présenté le projet de loi C-36, la Loi antiterroriste. Étant donné l'urgence de la situation à l'époque, on avait demandé au Parlement d'étudier rapidement ce projet de loi, ce que nous avons accepté de faire. L'échéance pour l'adoption de cette mesure législative avait été fixée à la mi-décembre 2001.

Cependant, certains se sont inquiétés du fait qu'il était difficile d'évaluer convenablement l'impact potentiel de cette loi en si peu de temps. Pour cette raison, on a convenu que trois ans plus tard, le Parlement examinerait les dispositions de la loi et son effet sur les Canadiens, avec le recul et dans un contexte moins chargé émotivement pour la population.

La tenue de ce comité spécial démontre la volonté du Sénat de remplir cette obligation. Quand nous aurons terminé cet examen, nous présenterons un rapport au Sénat exposant chacun des problèmes à résoudre, rapport auquel auront accès le gouvernement canadien et le grand public. La Chambre des communes entreprend la même démarche en ce moment.

Jusqu'à maintenant, le comité a rencontré des ministres et des fonctionnaires du gouvernement, des experts nationaux et internationaux en matière de menace terroriste, des juristes, des gens qui s'occupent de l'application des lois et du recueil de renseignements ainsi que des représentants de groupes communautaires. Nous sommes allés à Washington pour procéder à des échanges de points de vue et nous allons vraisemblablement clore nos audiences en nous entretenant avec des spécialistes de Londres, en Angleterre.

Cette soirée est bien particulière. Nous avons la chance d'avoir parmi nous Anu Bose, la directrice exécutive de l'Organisation nationale des femmes immigrantes et des femmes appartenant à une minorité visible au Canada, ainsi que Marie Chen et Royland Moriah, de l'African Canadian Legal Clinic. Nous sommes heureux de vous accueillir parmi nous.

Comme toujours, chers collègues, j'aimerais que les questions et les réponses soient aussi concises que possible de façon à stimuler le dialogue dans les délais qui nous sont impartis. La séance devrait durer jusqu'à 20 h 30 ou même un peu plus tard, selon l'évolution de la discussion.

Marie Chen, directrice par intérim, Services juridiques, African Canadian Legal Clinic : Honorables sénateurs, nous sommes heureuses de pouvoir intervenir aujourd'hui auprès du comité dans le cadre des travaux importants que vous consacrez à la Loi antiterroriste. Nous avons préparé un document écrit, mais je n'ai pas l'intention de le lire. Il énonce en détail le point de vue de notre clinique sur les conséquences de la Loi antiterroriste.

Dans notre exposé, nous aimerions insister sur plusieurs points et vous donner une idée du point de vue de la Clinique, de son mandat et des raisons qui nous amènent à nous exprimer comme nous le faisons.

Notre mémoire indique que l'African Canadian Legal Clinic est une clinique ontarienne d'aide juridique. Nous relevons du réseau ontarien de l'aide juridique. Notre mandat porte sur le racisme systémique, en particulier sur le racisme anti-Noirs. Nous avons acquis une grande expérience grâce à nos activités de contestation de causes types et dans le domaine de la réforme du droit. En ce qui concerne les causes types, nous avons comparu devant plusieurs juridictions, y compris devant la Cour suprême du Canada, dans des causes où il était question du droit à l'égalité et de dénonciation de la discrimination.

La Clinique travaille dans une optique communautaire. Elle consulte les organismes communautaires et ses membres représentent la communauté afro-canadienne. Nous présentons aujourd'hui un point de vue communautaire, particulièrement celui de la communauté afro-canadienne.

Nous avons l'intention de soulever la question du profilage racial dans le contexte des conséquences de la Loi antiterroriste. Je suis sûre que d'autres organismes qui ont comparu devant ce comité l'ont également soulevée. Nous l'abordons du point de vue des Afro-Canadiens. Nous parlerons également de l'efficacité du profilage racial et de son opportunité par rapport aux objectifs de la Loi antiterroriste ou de tout autre objectif. Si nous en avons le temps, nous aimerions également aborder les dispositions de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés concernant les certificats de sécurité.

La Clinique a une grande expérience du profilage racial. Pour les Afro-Canadiens, cette question n'est pas nouvelle; elle est bien antérieure aux événements du 11 septembre. Nous sommes intervenus dans les principales causes ontariennes où il était question de profilage racial. Par ailleurs, nous avons travaillé avec d'autres organismes et coalitions communautaires sur le profilage racial des Afro-Canadiens, mettant notamment l'accent sur les politiques et la problématique en milieu éducatif.

De façon générale, la Clinique trouve la loi préoccupante. Nous considérons qu'elle confère des pouvoirs très vastes et qu'à long terme, elle va porter atteinte à la démocratie canadienne. Nous aimerions que ce comité formule des recommandations sur les objectifs et les stratégies à long terme de la lutte contre le terrorisme. La Clinique est évidemment d'avis que la sécurité est importante pour la démocratie au Canada mais par ailleurs, elle partage le point de vue du haut commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Louise Arbour, qui affirme qu'à plus long terme, il faut protéger les valeurs démocratiques si l'on veut combattre efficacement le terrorisme.

Comme je l'ai mentionné précédemment, le profilage racial est un problème de longue date pour les Afro- Canadiens. Après le 11 septembre et l'entrée en vigueur de la Loi antiterroriste, on nous a rapporté une recrudescence des perquisitions et des arrestations d'Afro-Canadiens, en particulier aux passages frontaliers. Déjà avant le 11 septembre, c'était un problème. La Clinique a participé à plusieurs initiatives concernant cet aspect de l'action des forces de l'ordre. Actuellement, nous travaillons avec l'Agence des services frontaliers du Canada dans le cadre d'un projet pilote de collecte de données sur les personnes qui font l'objet d'une inspection secondaire.

Nous avons commandé des études, en particulier au professeur Scot Wortley, sur les Afro-Canadiens qui arrivent au Canada. L'étude du professeur Wortley était fondée sur un sondage réalisé en 1998; ses résultats figurent dans notre rapport. Elles montrent que les Afro-Canadiens sont interceptés, fouillés et interrogés par les fonctionnaires des douanes canadiennes de façon disproportionnée.

Le phénomène n'est pas nouveau. Après les événements du 11 septembre, on nous a signalé une recrudescence des arrestations et des fouilles effectuées auprès de membres de la communauté afro-canadienne. Cela ne nous a pas surpris. Nous avons constaté que dans la mesure où les Afro-Canadiens sont considérés comme des suspects habituels — c'est nous qui avons inventé l'expression — l'intensification de la surveillance et le renforcement des pouvoirs en matière de sécurité ont un effet collatéral sur les Afro-Canadiens.

J'estime que l'expérience canadienne est conforme à celle du Royaume-Uni. Ce pays recueille régulièrement des statistiques concernant les arrestations et les fouilles effectuées par la police. Les autorités britanniques ont constaté que dans l'année qui a suivi le 11 septembre 2001, les fouilles effectuées sur des Noirs ont augmenté de 30 p. 100, alors que l'augmentation n'était que de 8 p. 100 pour les Blancs. Cette situation est conforme aux différentes indications reçues par la Clinique.

Nous avons constaté en particulier que certaines communautés sont de plus en plus préoccupées, notamment les Somaliens et les Rastafariens. Les Somaliens sont ciblés parce qu'ils sont musulmans. On estime qu'il y a de 50 000 à 60 000 Somaliens à Toronto. La plupart d'entre eux sont musulmans. Les Rastafariens ont toujours été considérés comme un groupe religieux marginal. On nous signale une augmentation des cas de Rastafariens arrêtés et fouillés à la frontière.

Les Somaliens représentent une proportion importante des musulmans de Toronto. Ils sont presque tous arrivés au Canada en tant que réfugiés ces dernières années. L'Islam joue un rôle essentiel dans leur culture et dans leur façon de vivre. Ils sont victimes de discrimination à cause de leur race, de leur couleur, de leur religion et, souvent, de leur statut de nouveau venu. Chez les Somaliens, on dit, pour décrire cette réalité, que le Somalien a déjà trois prises au départ.

Pour les Somaliennes, c'est quatre prises : elles sont aussi victimes de discrimination en tant que femmes. On nous a parlé de Somaliennes humiliées à un poste frontalier, auxquelles on a demandé d'enlever leur hijab au cours d'une fouille ou qui ont été palpées dans un aéroport. Il convient de remarquer que du fait de la vulnérabilité particulière de cette communauté, les situations de ce genre ont des conséquences supplémentaires.

La lutte antiterroriste est une question transnationale. Ce qui se passe au Royaume-Uni et aux États-Unis a des conséquences ici même, au Canada. Nous craignons que les attentats de juillet 2005 à Londres aggravent la suspicion à l'égard des Somaliens et des autres Afro-Canadiens. C'est effectivement ce qui s'est produit à Londres.

Le journal The Independent signale que dans un récent ordre opérationnel remis à la police britannique des transports, les présumés terroristes étaient spécifiquement identifiés comme étant d'origine asiatique, antillaise et est- africaine. C'est déjà la réalité à Londres et pour nous, ce sera tôt ou tard la réalité au Canada, si ce n'est déjà fait.

Notre problème, c'est l'absence de statistiques. Nous sommes dans l'impasse. Nous savons que cette réalité existe. On nous parle de la multiplication des fouilles et des contrôles, mais nous n'avons rien pour le prouver. C'est pourquoi nous vous demandons d'insister sur la collecte de données. C'est là un rôle important que le gouvernement peut jouer. Et c'est ce que devrait recommander votre comité.

Les dispositions de la Loi antiterroriste sur le financement constituent un autre sujet de préoccupation pour la communauté somalienne. On nous signale que des Somaliens éprouvent des difficultés pour envoyer de l'argent à leurs familles. Comme vous le savez, à cause de la situation qui prévaut en Somalie, les Somaliens doivent faire appel à des modes non conventionnels de transfert de fonds.

On nous a parlé de cas concernant la surveillance et la dénonciation des activités criminelles en vertu de la Loi antiterroriste, où des innocents ont été accusés ou se sont fait dire qu'ils figuraient sur la liste du BSIF et que leur argent était confisqué. Nous ne parlons pas ici de cas qui font les manchettes. Nous parlons de problèmes qui se posent au quotidien. Nous savons que des Somaliens parfaitement innocents se font dire que leur argent ne parviendra pas à leurs familles parce que leur nom figure sur une liste ou parce qu'il ressemble à un nom figurant sur cette liste.

Dans le cas d'une communauté particulièrement vulnérable comme celle des Somaliens, la langue pose problème; les nouveaux venus en tant que réfugiés se heurtent à des difficultés. Ils ont peur. La crainte de la stigmatisation, de se faire qualifier de terroriste, les empêche d'aller plus loin. Ils préfèrent perdre leur argent que d'exercer un recours ou d'essayer de se disculper. Ils battent en retraite. Cette situation a créé un climat de peur qui empêche les Somaliens d'envoyer de l'argent chez eux.

Ce comité doit savoir que le profilage racial ne sert à rien. Il est totalement inefficace, comme le montre parfaitement l'expérience afro-canadienne. Nous avons constaté que le profilage racial dans le cadre de la lutte contre le trafic de drogues n'avait pas fait baisser la criminalité. Nous considérons également que le profilage racial dans le cadre de la Loi antiterroriste et de la lutte contre le terrorisme est incapable de renforcer la sécurité au Canada. Le profilage racial a des effets extrêmement pernicieux tant au niveau individuel que dans l'ensemble de la société. C'est un outil tout à fait inefficace. Il donne des faux positifs aussi bien que des faux négatifs, et pervertit l'action de la police.

On peut s'inspirer de l'expérience afro-canadienne pour montrer l'inefficacité du profilage racial. Si l'on s'arrête à une caractéristique individuelle sans considérer les autres, on ne parviendra pas à résoudre un crime. On ne résoudra pas le problème de la sécurité. En réalité, le profilage racial est extrêmement pernicieux car il stigmatise globalement certaines communautés. Une communauté stigmatisée et considérée comme criminelle s'aliène, retire sa confiance aux institutions gouvernementales et coupe les ponts avec les pouvoirs publics. Le renseignement fiable, qui permet de renforcer la sécurité, ne peut être obtenu lorsque des communautés entières ont peur de s'exprimer, même lorsqu'elles souhaiteraient le faire, estimant qu'elles seront visées de toute façon et que ce qu'elles ont à dire ne sert à rien. L'érosion de la confiance envers les institutions gouvernementales voue à l'échec toute mesure de lutte contre le terrorisme.

Que peut-on y faire? À la page 11 de notre mémoire, nous formulons plusieurs recommandations. Nous nous sommes inspirés de différentes études réalisées en Ontario, en particulier celles de la Commission ontarienne des droits de la personne et de la Commission sur le racisme systémique, qui relève de la justice pénale ontarienne. Ces études montrent que les Afro-Canadiens sont ciblés de façon disproportionnée par la justice pénale.

La Commission ontarienne des droits de la personne a mené une enquête importante sur les conséquences du profilage racial au cours des deux dernières années. Elle n'en conteste pas l'existence. Elle reconnaît le phénomène, à cause de toute l'information qu'elle a recueillie. Elle formule des recommandations et sollicite la réponse des pouvoirs publics. Le rapport est intitulé Un prix à payer. Récemment, la Commission a publié ses directives sur le racisme et la discrimination raciale, où elle insiste de nouveau sur l'importance de la reconnaissance du profilage racial et des efforts des pouvoirs publics pour s'y opposer.

À la page 11, nous affirmons que dans la mesure où plusieurs communautés ont dénoncé le profilage racial devant ce comité, il est temps que le gouvernement fédéral reconnaisse l'existence de ce phénomène. Afin de combattre le profilage racial, nous demandons qu'une disposition interdisant explicitement le profilage racial et déclarant qu'il n'a pas sa place et ne saurait être toléré devrait être ajoutée à la Loi antiterroriste.

Par ailleurs, il est essentiel de mettre en place une procédure de collecte de données non regroupées de nature raciale pour vérifier s'il y a profilage racial. C'est à cette condition que le gouvernement assumera sa responsabilité de veiller à ce que la législation n'ait pas d'effet discriminatoire sur certaines communautés.

Je le répète, tout cela est faisable. Notre clinique collabore déjà avec les fonctionnaires de l'Agence des services frontaliers dans le cadre d'un projet pilote pour recueillir des données non regroupées de nature raciale sur les personnes soumises à des fouilles secondaires. On a fait la même démarche dans plusieurs États des États-Unis pour surveiller l'activité policière et les pratiques des douaniers. Tout cela n'est pas nouveau. Des mesures ont été prises dans d'autres pays, notamment au Royaume-Uni. Compte tenu de l'information déjà portée à la connaissance de ce comité, il devrait faire une recommandation exigeant que ces données soient recueillies.

Nous demandons également la création d'un système public de plaintes. Nous faisons référence au projet de loi d'initiative parlementaire présenté à la Chambre par Mme Libby Davies, le projet de loi C-296, qui vise à éliminer le profilage racial. Ce projet de loi est un bon exemple de la possibilité d'agir au plan législatif pour mettre en place un système de contrôle et d'élimination du profilage racial, auprès duquel les victimes de profilage racial pourront demander réparation.

Je ne sais pas de combien de temps je dispose. On m'a accordé dix minutes. Peut-être les membres du comité préfèrent-ils que du temps soit réservé pour les questions. Je peux m'arrêter maintenant, ou bien continuer sur d'autres thèmes.

La présidente : Pouvez-vous conclure assez rapidement, madame Chen, de façon que nous puissions passer à la suite?

Mme Chen : J'avais l'intention de parler des certificats de sécurité. Je dirai simplement que c'est un aspect important des mesures antiterroristes du Canada. Ces certificats montrent bien qui est ciblé dans cette guerre contre le terrorisme.

À notre connaissance, la Loi antiterroriste a été rarement invoquée. Ce sont les dispositions sur les certificats de sécurité qui figurent dans la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés qui ont été invoquées contre la plupart des individus suspectés de terrorisme, ce qui, à notre avis, soulève des questions d'égalité et de non-discrimination. Ces individus n'ont pas le statut de citoyen. Le non-respect des garanties de procédure inhérent à la formule des certificats de sécurité ainsi que le secret entourant cette procédure, l'impossibilité, pour les personnes suspectées de terrorisme, d'organiser une défense pleine et entière et l'expulsion qui résulte automatiquement des conclusions du juge soulèvent des questions hautement problématiques qui portent atteinte aux droits essentiels garantis par la Charte des droits et libertés. Notre point de vue à ce sujet est énoncé dans notre mémoire.

Je me ferai un plaisir de répondre aux questions.

La présidente : Monsieur Moriah, avez-vous quelque chose à dire ou voulez-vous attendre la période des questions?

Royland Moriah, avocat, Recherches en politiques, African Canadian Legal Clinic : Je vous remercie. Je suis ici pour aider à répondre aux questions.

Anu Bose, directrice générale, Organisation nationale des femmes immigrantes et des femmes appartenant à une minorité visible du Canada : Honorables sénateurs, je constate avec une certaine appréhension que je n'ai pas préparé de version française de mon mémoire.

La présidente : Ce n'est pas grave. Tout est traduit.

Mme Bose : Je ne serai donc pas obligée de vous faire subir mon français.

L'Organisation nationale des femmes immigrantes et des femmes appartenant à une minorité visible au Canada est une organisation à but non lucratif, non partisane et non confessionnelle. Sa mission consiste à assurer l'égalité pour les femmes immigrantes et les femmes appartenant à une minorité visible au sein d'un Canada bilingue. L'un de nos principaux objectifs consiste à défendre la cause des femmes immigrantes et des femmes appartenant à une minorité visible. La présidente du comité se souviendra peut-être que nous avons été l'un des rares groupes de femmes immigrantes à comparaître ici en 2001 lors de l'étude de la Loi antiterroriste qui à l'époque se trouvait à être le projet de loi C-36.

La présidente : Je m'en souviens bien, et c'est la raison pour laquelle nous vous avons demandé de revenir.

Mme Bose : Nous avons été un membre actif de la Coalition pour la surveillance internationale des libertés civiles et nous constatons avec un grand plaisir que les représentants de la Coalition ont également comparu devant vous.

En 2003, notre organisation de même que l'Institut canadien de recherches sur les femmes ont obtenu un contrat dans le cadre du financement de la recherche stratégique accordé par Condition féminine Canada pour étudier les répercussions du Programme canadien de sécurité sur la vie des femmes musulmanes au Canada. Des groupes de consultation ont été constitués en somalien, en arabe, en urdu, en hindi, en anglais et en français; à Toronto, Montréal, Calgary de même qu'à Regina et à Saskatoon. Nous espérons être en mesure de citer les propos de certaines de ces femmes parce que ce ne sont pas des femmes qui ont habituellement accès à des gens comme vous.

Je tiens à déclarer dès le départ que notre organisation condamne toute forme de terrorisme et d'activités terroristes. Nous appuyons toutes les mesures légitimes et appropriées destinées à éliminer le terrorisme. Nous maintenons également la position que nous avons adoptée en 2001, à savoir qu'il faut abroger la Loi antiterroriste.

Nous faisons cette déclaration en sachant qu'un grand nombre de nos membres et de leurs familles sont elles-mêmes victimes de terrorisme et ont trouvé refuge au Canada. Parallèlement, elles sont préoccupées par l'effritement constant de leurs droits et libertés en tant que citoyennes, causé par le glissement fonctionnel du Programme de sécurité du Canada.

Nous sommes fermement convaincues que le droit pénal du Canada représente un mécanisme plus que satisfaisant pour appréhender et juger tout ce qui constitue une menace pour la sécurité de l'État.

Nous avons dit plus tôt que le terme « terrorisme » sur le plan juridique est pratiquement impossible à définir. Aucune loi canadienne ne définit le terrorisme, bien que la Cour suprême du Canada ait tâché de le faire dans l'arrêt Suresh. Selon Roach, la définition prévue par la loi était plus générale que celle que renferment des lois similaires adoptées à l'époque au Royaume-Uni et aux États-Unis et même, sous certains aspects, les règlements promulgués en réaction à la Crise d'octobre 1970.

L'une des questions que nous aimerions aborder aujourd'hui, ce sont les difficultés que présentent les déplacements transfrontaliers. J'aimerais citer directement les propos de certaines femmes.

En décembre 2001, le vice-premier ministre de l'époque, M. Manley, a signé la Déclaration sur la frontière intelligente et le plan d'action en 30 points qui l'accompagnait, destiné à améliorer la sécurité de la frontière commune tout en facilitant la circulation légitime des marchandises et des personnes. Les femmes qui faisaient partie de nos groupes de consultation n'avaient qu'une vague notion de ces règlements. Souvent, elles n'avaient jamais entendu parler de la Déclaration sur la frontière intelligente, mais elles avaient beaucoup à dire à propos des difficultés qu'elles- mêmes et leurs familles ont connues lorsqu'elles se sont rendues aux États-Unis.

Je citerai les propos d'une participante d'un groupe de consultation de Montréal, qui a pris la parole en 2003 :

En avril dernier, c'était la première fois que je voyageais depuis les événements du 11 septembre. Je n'avais jamais eu de difficultés à traverser la frontière avant le 11 septembre [...] Cette fois-ci le train s'est arrêté et les douaniers se sont dirigés vers mon ami et moi et m'ont posé de nombreuses questions lorsqu'ils ont vu mon nom. Ils ont pris nos passeports et ont disparu pendant 20 minutes. Lorsqu'ils sont revenus, ils m'ont dit, « Prenez vos affaires et venez avec nous. » J'étais terrifiée parce que je pensais que je serais détenue [...] C'était comme un cauchemar.

Heureusement, c'était beaucoup de bruit pour rien.

Voici ce qu'a dit une participante de Toronto :

Un jour, j'allais à New York pour une réunion et j'ai raté mon avion parce que j'ai été interrogée pendant trois heures.

Une femme a raconté que son mari a été malmené à l'Aéroport international Pearson. Ils n'ont pas rapporté l'incident par crainte de représailles.

Une membre âgée de notre organisation qui n'est pas musulmane mais qui portait le sari a fait l'objet d'une fouille à nu à l'Aéroport international Pearson alors qu'elle était en transit sur un vol intérieur. Elle n'a jamais obtenu d'explication satisfaisante de la part de l'administration aéroportuaire, étant donné que les services du personnel de sécurité étaient assurés par un entrepreneur de l'extérieur.

L'entente sur la frontière intelligente a rendu les déplacements plus difficiles pour les femmes enceintes ou qui voyagent avec des bébés ou de jeunes enfants ou, comme ma collègue Mme Chen l'a indiqué, qui porte le hijab. La sécurité accrue se traduit par des files d'attente plus longues et souvent des questions indiscrètes.

Ces femmes étaient convaincues qu'elles étaient victimes de profilage racial, même si elles n'ont pas utilisé cette expression, à cause de leur nom, de leur apparence et de leur habillement. Par conséquent, elles ont décidé de restreindre leurs déplacements aux États-Unis et ailleurs. Pour les communautés qui ont fui des conflits armés et des guerres civiles, il s'agit d'une terrible épreuve.

Un grand nombre d'entre elles ont indiqué que les visas de visiteur sont devenus très difficiles à obtenir suite aux événements du 11 septembre et à l'adoption de la Loi antiterroriste. Je cite une fois de plus une participante :

Récemment, il y a à peine trois mois, ma belle-mère a présenté une demande pour venir nous rendre visite, mais les Services d'immigration et de visa du Canada ont indiqué que les documents qu'elle avait présentés n'étaient pas complets. Elle a 70 ans [...] Ce n'est pas une terroriste, elle vient du Pakistan et c'est la raison pour laquelle elle ne peut pas venir ici.

Ma propre sœur, qui est consultante auprès des Nations Unies, s'est vue refuser un visa lorsqu'elle a voulu me rendre visite. Deux mois plus tard, le même représentant du Haut-commissariat du Canada lui a délivré un visa, puisqu'elle venait au Canada dans le cadre d'une délégation officielle, et lui a même souhaité un séjour agréable à Ottawa!

Mme Chen a déjà fait des commentaires à propos du profilage racial, mais ces incidents et beaucoup d'autres nous ont été racontés par les femmes qui ont participé à l'étude. Cela nous amène à croire que le profilage racial est bel et bien une réalité, suite aux événements du 11 septembre.

Un grand nombre des participantes des groupes de consultation ont été traumatisées par la publicité qui a entouré l'Opération Thread, ou comme certains blagueurs l'ont qualifiée, l'Opération Threadbare, à l'été 2003, au cours de laquelle des Pakistanais et des Indiens ont été arrêtés et désignés officiellement par Citoyenneté et Immigration Canada comme présumés terroristes en fonction de motifs dérisoires fondés sur des stéréotypes raciaux. Les accusations ont rapidement été retirées, mais aucune excuse officielle n'a été présentée. Ces allégations non fondées ont causé des torts irréparables à ces hommes. Il était indiscutable qu'un grand nombre d'entre eux seraient persécutés à leur retour dans leur pays d'origine.

Notre organisation considère que l'établissement de profils raciaux est une solution de facilité qui ne peut pas remplacer le recueil de renseignements. L'une des recommandations formulées dans l'étude et qui provient des femmes mêmes, c'est que le ministère de la Justice prenne des mesures pour restreindre sérieusement l'établissement de profils raciaux comme mesure courante de sécurité et reconnaisse que cette mesure a des répercussions énormément nuisibles sur la vie des gens. Notre organisation est d'accord avec cette recommandation.

Dans notre mémoire, nous avons également abordé brièvement la question des certificats de sécurité. Nous appuyons la recommandation formulée par le Conseil canadien pour les réfugiés, selon laquelle il faut restreindre la définition des termes « sécurité » et « inadmissibilité ».

Mon dernier point porte sur les organismes de bienfaisance, les transferts d'argent et la Loi antiterroriste. La Loi antiterroriste a nui aux œuvres de bienfaisance, surtout celles qui travaillent dans des zones dangereuses comme l'Afghanistan, la Somalie, la Palestine, le Sri Lanka et même le Pakistan, et a refroidi leurs donateurs faisant partie de la collectivité musulmane. Si une organisation est désignée en tant qu'« entité inscrite », c'est-à-dire soupçonnée d'être une organisation terroriste, par le gouvernement du Canada, cela est inscrit sur le site Web du gouvernement, et il incombe aux donateurs éventuels de faire une recherche sur le site chaque fois qu'ils souhaitent faire un don.

En vertu de la Loi antiterroriste, il incombe à la personne qui fait un don de charité d'être absolument sûre que ces fonds ne seront pas utilisés à des fins terroristes. Pour certaines femmes, cela équivaut à les priver de leur droit de pratiquer leur religion, parce que les musulmans sont tenus de donner entre 2 et 5 p. 100 de leur revenu aux personnes moins privilégiées qu'eux selon la pratique connue sous le nom de zakat.

Je cite une participante du groupe de consultation à Saskatoon :

À propos des dons, effectivement, je fais très attention aux œuvres de bienfaisance à qui je donne mon argent. Il y a de nombreuses œuvres de charité à qui je ne donne plus d'argent parce que je crains que par la suite je doive en rendre compte parce que vous savez notre religion nous oblige à faire une aumône, la zakat, et cette aumône doit être remise à des musulmans [...]

Notre organisation estime, en fonction d'observations empiriques, que l'existence de la Loi antiterroriste a peut-être nui à la collecte de fonds pour le Sri Lanka et la Somalie, suite au tsunami, et risque de nuire à la collecte de fonds suite aux conséquences du tremblement de terre au Cachemire et au Pakistan. Nous recommandons que par souci d'équité, l'ARC communique ses réserves à une œuvre de charité avant de lui refuser ou de lui retirer son statut d'organisme de bienfaisance et lui fournisse une possibilité raisonnable de faire appel ou de justifier son travail.

Pratiquement aucune des femmes des groupes de consultation n'était au courant de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité, mais elles se sont mises de plus en plus à hésiter à utiliser même Western Union pour envoyer de l'argent à leurs parents âgés dans leur pays d'origine. Il serait intéressant d'étudier si la Loi antiterroriste a effectivement influé sur l'envoi d'argent par le biais de systèmes informels de transfert d'argent. Je cite une participante du même groupe de consultation à Saskatoon :

J'envoie maintenant de l'argent à ma propre famille chez moi, mais je continue de craindre qu'un jour on viendra me voir pour me demander pourquoi j'envoie tant d'argent à [...]?

Certains citoyens du Canada ont l'impression qu'on a peut-être abandonné les droits de la personne pour faire du Canada un endroit plus sûr. Dès 2001, Daniels, Macklem et Roach, trois éminents professeurs de droit, avaient demandé si les pouvoirs accrus que cherchait à obtenir l'État étaient compatibles avec nos traditions et valeurs démocratiques fondamentales et les principes fondamentaux de la règle de droit. Nous invitons instamment les membres du comité et les parlementaires des deux chambres à garder en mémoire cette profonde déclaration lorsqu'ils examineront la Loi antiterroriste et rédigeront leur rapport final. Je vous remercie.

Le sénateur Stratton : Nous vous remercions d'être des nôtres. Je constate que dans le mémoire présenté par l'African Canadian Legal Clinic, et dans une citation de l'Organisation nationale des femmes immigrantes et des femmes appartenant à une minorité visible du Canada, les deux organisations aimeraient que la loi soit abrogée. Est-ce exact? Je vois que vous hochez tous deux la tête.

Je suis porté à être d'accord avec vous pour les raisons que vous avez données, surtout parce que je crois que tout ce qui doit être fait pour protéger notre sécurité existait déjà sous le régime des lois avant la présentation du projet de loi antiterroriste.

Cependant, si nous devons nous en accommoder — et il est peu probable que la loi soit abrogée — nous avons discuté de la possibilité d'y ajouter un article prévoyant une période précise ou une disposition de réexamen. Seriez- vous d'accord avec une telle mesure?

Je n'aime pas tellement les examens. Ils ne sont efficaces que si les résultats sont atteints et que si l'on donne suite de façon satisfaisante aux préoccupations exprimées. Si on ne donne pas suite de façon adéquate à vos préoccupations et à celles exprimées par d'autres personnes, à quoi sert alors d'avoir un examen?

Seriez-vous favorables à une disposition de réexamen? Nous venons de terminer l'examen, le projet de loi existe toujours et la loi sera réexaminée dans trois ans. Seriez-vous favorables à une telle mesure s'il s'agissait d'un examen positif, c'est-à-dire qu'il permette d'obtenir des résultats concrets?

Mme Bose : Sénateur Stratton, nous serions favorables à une disposition de réexamen, et le plus tôt serait le mieux. Notre organisation considère que trois ans, c'est une longue période dans nos vies et dans celle des politiciens élus.

Si la loi n'était pas abrogée, nous serions tout à fait favorables à l'adoption d'un réexamen permanent, peut-être annuel, mais une disposition de réexamen serait la solution idéale.

Mme Chen : Vous avez précisément décrit notre position, en ce sens que nous demandons que l'on recommande l'abrogation de la loi. L'autre solution consisterait à établir un mécanisme de surveillance indépendant.

D'après le travail effectué par votre comité et les témoignages de ceux qui ont comparu devant vous, il est assez évident que cette loi présente de graves problèmes. Certains ont parlé des problèmes de droits de la personne auxquels elle a donné lieu. Le type d'examen proposé n'est pas suffisant. D'autres mesures s'imposent. Aussi important soit-il — et c'est mieux que rien — je crois qu'il faut adopter une approche beaucoup plus formelle qui prévoit des mécanismes permettant aux gens de présenter leurs préoccupations de façon régulière au lieu de dépendre d'un examen tous les trois ans.

Si on prévoit un examen, le plus tôt sera le mieux et il est préférable qu'il ait lieu régulièrement; cependant, nous aimerions qu'un processus plus formel soit établi.

Le sénateur Stratton : Nous pourrions effectuer un examen périodique tous les trois ans mais l'accompagner d'un comité de surveillance indépendant qui exercerait un contrôle de façon courante.

Ma prochaine question porte sur l'établissement de profils raciaux, une question que j'ai beaucoup de difficulté à comprendre. Je sais que cela existe parce que nous avons entendu des ouï-dire à cet effet. La GRC prétend ne pas faire de profilage racial, pourtant les observations empiriques indiquent le contraire.

Ce qui me préoccupe, c'est qu'il s'agit d'une tendance naturelle de la part de ceux qui s'occupent de l'application de la loi. Si des actes terroristes ont été perpétrés par un segment de la société et qu'il s'agit d'un segment identifiable, de façon visible ou autre — et cela semble être régulièrement le cas — comment pouvons-nous logiquement gérer la protection de la société sans que cela soit qualifié de profilage racial?

Je ne crois pas que nous devrions établir des profils raciaux, mais je ne vois pas comment on peut séparer les deux. Si un segment de la société commet des actes terroristes, je ne vois pas comment nous pouvons logiquement appliquer — et j'ai besoin d'aide à cet égard — la loi sans l'établissement de profils raciaux.

Cela signifie que je n'ai pas compris votre explication, madame Chen, sur la façon dont nous pouvons assurer l'application de la loi, en reconnaissant que les actes terroristes sont perpétrés par un segment particulier de la société, sans être accusés de nous livrer à du profilage racial.

Mme Chen : Lorsque vous parlez d'un segment de la société, ce segment, ce ne sont pas des musulmans, des Arabes, des habitants de l'Asie du Sud ou des Somaliens. On ne peut pas faire de déclaration générale qui désigne une collectivité dans son ensemble en fonction des actes commis par une poignée de gens au sein de cette collectivité. C'est l'essence même du profilage racial; des collectivités entières deviennent suspectes à cause des actes d'une poignée de personnes.

Pour les Afro-Canadiens, cela représente un énorme problème. Une poignée de membres de la collectivité commettent des crimes, mais toute la collectivité est ciblée, observée et considérée avec méfiance. Cela est injuste. C'est discriminatoire. C'est la définition du profilage racial : utiliser une caractéristique, que ce soit la race ou la religion, comme prétexte pour déterminer les risques de criminalité ou les menaces à la sécurité, alors qu'il faudrait prendre en compte d'autres facteurs ou d'autres caractéristiques.

Nous ne sommes pas en train de dire qu'il ne faut jamais utiliser ou désigner la race, mais il faut le faire conjointement avec d'autres caractéristiques qui ont un rapport avec le crime ou la menace pour la sécurité en cause. Si quelques membres de la collectivité commettent des crimes ou constituent une menace pour la sécurité, cela ne signifie pas qu'il faut cibler l'ensemble de la collectivité.

Un bon exemple est l'affaire Timothy McVeigh. Avant les événements du 11 septembre, il s'agissait du plus important crime terroriste commis aux États-Unis. Est-ce que l'ensemble de la communauté blanche a été ciblé parce que cet homme était blanc? Non.

Cependant, s'il avait été musulman ou arabe, comme les auteurs des attentats du World Trade Center, la réaction aurait été très différente.

Pour comprendre le profilage racial, l'expérience vécue par les Afro-Canadiens dans le système de justice pénale a indiqué que lorsqu'il existe un pouvoir discrétionnaire et lorsque le racisme est déjà présent et souvent systémique, ce pouvoir discrétionnaire donne lieu à des actes discriminatoires. Cela n'a rien d'étonnant car le racisme est un phénomène inconscient et bien ancré.

La Cour suprême du Canada a indiqué à quel point le racisme était profondément ancré dans notre société, à quel point il était enfoui dans le psychisme humain, comment les gens dans leur vie de tous les jours ne se rendent même pas compte qu'ils font preuve de racisme ou qu'ils appliquent des stéréotypes raciaux.

Nous en avons vu les conséquences, et c'est ce qui importe en matière de droits de la personne. Quand on veut savoir s'il y a ou non profilage racial, l'important n'est pas l'intention, mais les conséquences, car elles personnalisent le phénomène. Il est essentiel de comprendre qu'il s'agit là d'un problème systémique et que des préjugés raciaux interviennent dans le processus décisionnel discrétionnaire d'où procède le profilage racial. Au lieu d'accuser son voisin ou de prétendre qu'il s'agit de cas isolés, considérons que c'est un problème systémique et réglons-le.

Le sénateur Stratton : Voilà ce que je voulais entendre, car pour l'observateur moyen, il est essentiel de bien comprendre ce qu'est le profilage racial et ce qu'il faut faire pour l'éliminer ou l'atténuer. Il est utile que tous les Canadiens aient une bonne compréhension de ce qu'est le profilage racial. Cette compréhension est essentielle.

M. Moriah : Certaines des recommandations évoquées précédemment devraient nous permettre de progresser dans cette direction. Comme on l'a vu aux États-Unis et au Royaume-Uni, il est important de prendre le temps d'étudier le phénomène, de recueillir des preuves statistiques et de surveiller les personnes investies d'un pouvoir discrétionnaire qui peuvent prendre des décisions en fonction de considérations raciales.

Grâce à une recommandation sur le contrôle des pratiques et sur la nécessité de recueillir des données non regroupées, tout le monde pourra constater l'existence du problème, en particulier les personnes investies d'un pouvoir discrétionnaire. Se sachant surveillées, elles y penseront à deux fois avant d'exercer ce pouvoir. De ce point de vue, une telle recommandation serait très utile. La collecte de données statistiques non regroupées est essentielle si l'on veut maîtriser le problème.

Le sénateur Hubley : J'aimerais poursuivre sur le même sujet, à savoir la collecte de renseignements pour montrer aux Canadiens qu'il y a effectivement du profilage racial.

Vous avez parlé des mesures prises au Royaume-Uni, où l'on a pu montrer que le profilage racial avait augmenté de 30 p. 100 après le 11 septembre.

Est-ce que vous savez pourquoi l'information n'est pas recueillie ici? Avez-vous un commentaire à ce propos?

Mme Chen : Grâce aux travaux de la Clinique, nous avons trouvé plusieurs raisons expliquant cette lacune. Elle tient au fait qu'au Canada, on refuse de reconnaître l'existence même du racisme. Chaque fois que nous posons la question, il y a une levée de boucliers. Les gens sont offusqués et disent : « Nous sommes une société multiculturelle. Comment pourrait-il y avoir du racisme ici? »

Nous avons constaté que le multiculturalisme masque le racisme. On nie la réalité à laquelle notre communauté se trouve confrontée. Cette dénégation s'est manifestée dans le débat sur le profilage racial en Ontario et sur les méthodes policières, non pas uniquement chez les autorités policières, mais également parmi les personnalités politiques.

Dans certains milieux, le problème n'est toujours pas reconnu. Nous revenons constamment à la charge avec des récits, des preuves anecdotiques, des études comme celles de la Commission sur le racisme systémique et de la Commission ontarienne des droits de la personne. Nous revenons constamment à la charge, mais à part les travaux de ces deux commissions, rien ne se passe. Tout découle de ce refus de voir les choses en face. Au Canada, les gens ne veulent pas croire que le racisme existe.

Le sénateur Hubley : Les mesures du Royaume-Uni ont-elles été prises à l'initiative du gouvernement?

Mme Chen : Au Royaume-Uni, on a toujours recueilli des données statistiques. Au cours de l'enquête au sujet de Stephen Lawrence, à la suite du meurtre d'un jeune homme, on a constaté un racisme exacerbé parmi les policiers de la métropole. C'est alors qu'on a commencé à dégrouper les données; cela faisait partie des recommandations de la commission d'enquête.

Les autorités policières et le Home Office ont pris la chose très au sérieux. La commission d'enquête a été dotée des fonds nécessaires et s'est engagée à recueillir des données non regroupées de nature raciale. Elle a dressé un portrait très exact du groupe de personnes qui font l'objet d'arrestations et de fouilles au Royaume-Uni; depuis le 11 septembre, ce sont les membres de la communauté musulmane, les gens d'origine arabe ou asiatique ainsi que les Noirs, comme je l'ai montré par les statistiques.

Au Canada, on nous dit qu'il serait illégal et contraire au code des droits de la personne de recueillir des données de nature raciale. C'est faux. La Commission ontarienne des droits de la personne — et j'ai repris dans le mémoire une citation de son rapport — affirme que cette collecte de données sert les objectifs du code des droits de la personne et permet de lutter contre la discrimination en la désignant et en prenant des mesures pour y faire face.

Nous avons effectivement entendu dire qu'on ne peut pas recueillir de données statistiques de nature raciale, car ce serait faire preuve de racisme. Voilà le genre d'obstacles auxquels nous nous sommes heurtés.

M. Moriah : Il est certes important de recueillir des données statistiques pour bien saisir l'ampleur du problème, mais le rapport Payer le prix affirme clairement, comme nous l'indiquons dans notre mémoire, qu'indépendamment de la disponibilité de statistiques concernant l'existence du profilage racial, le fait même que ce profilage racial soit perçu est également important.

Quand on aborde un problème comme celui du terrorisme — ou même de la criminalité, comme on l'a fait dans la communauté afro-canadienne — il importe de veiller aux perceptions dans la collectivité considérée, car elles déterminent la façon dont ses membres vont considérer les institutions publiques.

Il est certes important de disposer de ces statistiques, et nous vous invitons à recommander aux pouvoirs publics de les recueillir, mais il importe tout autant de reconnaître que l'impression d'être traité de façon discriminatoire a une incidence sur la perception des institutions publiques.

Mme Bose : Je pense que Mme Chen a tout dit en termes très clairs.

Le sénateur Mitchell : Je vais poser mes premières questions à Mme Chen et à M. Moriah. Vous présentez à la page 11 une recommandation intéressante concernant la création, dans le cadre de la Loi antiterroriste, d'un organisme indépendant de traitement des plaintes, auquel le public aurait accès.

Premièrement, quelle devrait être la structure de cet organisme? Qui devrait y siéger, comment pourrait-on le rendre accessible à tous les Canadiens? Deuxièmement, comment fonctionnerait-il par rapport aux commissions des droits de la personne?

Mme Chen : Nous avons formulé cette recommandation en fonction de notre expérience des milieux policiers, car le débat sur le profilage racial et sur les voies de recours dont disposent les victimes a débouché sur des propositions concernant un régime public de plaintes. Les gens connaissent la Charte et les procédures en matière de droits de la personne, mais le mécanisme proposé est conçu spécifiquement en fonction du problème qui nous intéresse, en l'occurrence l'attitude de la police.

Après l'entrée en vigueur de la Loi antiterroriste, il nous faut un organisme de traitement des plaintes qui soit lui aussi spécifiquement conçu en fonction du problème à considérer, c'est-à-dire la façon dont les mesures de sécurité sont mises en œuvre par les responsables de la sécurité et de l'application de la loi. Voilà notre point de départ.

En ce qui concerne la structure de l'organisme, le gouvernement ontarien a demandé l'année dernière à l'ancien juge Patrick LeSage d'étudier la constitution d'un organisme indépendant de traitement des plaintes. M. LeSage a présenté cette année son rapport qui a été transmis au gouvernement. Il y est question de l'attitude de la police. On pourrait s'en inspirer pour définir la structure de l'organisme de traitement des plaintes dans le cadre de la Loi antiterroriste.

Le projet de loi d'initiative parlementaire de Mme Libby Davies comporte également des dispositions prévoyant la constitution de ce genre d'organisme de traitement des plaintes. Il prévoit des mesures disciplinaires contre les fonctionnaires trouvés coupables de profilage racial.

Il y a certainement d'autres modèles dont on pourrait s'inspirer, comme le traitement des plaintes contre la police en Ontario et, au niveau fédéral, le projet de loi d'initiative parlementaire de Mme Davies.

On pourra toujours fignoler, mais le principe essentiel, c'est qu'il faut mettre en place un organisme de traitement des plaintes conçu en fonction des besoins de ceux qui subissent les effets de cette loi.

Le sénateur Mitchell : On a vu, dans les deux exposés de ce soir, que les victimes de ce problème ont souvent de la difficulté à faire valoir leur cause. C'était particulièrement clair dans l'exposé de l'Organisation nationale des femmes immigrantes et des femmes appartenant à une minorité visible du Canada.

S'il existait un organisme comme celui-là, quelles mesures pourrait-on prendre pour qu'il soit plus facile ou possible pour les personnes dans ces circonstances de défendre leur cause, de se faire connaître sans crainte de quelconques représailles?

Mme Chen : Nous avons constaté d'après notre expérience des questions de maintien de l'ordre que le même genre de craintes existe, la crainte des représailles de se faire connaître pour déposer une plainte contre une puissante instance de l'État.

Nous avons également constaté que si le système de plaintes est légitime, transparent et véritablement tenu de rendre des comptes, les gens sont beaucoup plus disposés à déposer la plainte, à le faire publiquement et à se faire entendre. Si les gens considèrent qu'ils peuvent être entendus lors d'une audition impartiale, que quelqu'un les écoutera, ils hésiteront moins à déposer une plainte. Cela ne les empêchera pas d'avoir des craintes; pour les personnes qui déposent ces plaintes, cela représente un énorme effort. Selon notre expérience, un grand nombre de personnes ne prennent pas ces choses à la légère; ils savent qu'il s'agit d'un long processus et que l'on attaquera leur crédibilité.

Nous avons constaté que les gens qui considèrent que le tort qu'on leur a causé est tellement grave que s'ils ont l'impression que le système est en mesure de leur donner raison, ils seront prêts à déposer une plainte. Par le passé, nous avons demandé l'appui d'organisations communautaires pour des groupes particulièrement vulnérables comme les femmes et les nouveaux arrivants, lorsqu'il y avait des obstacles linguistiques et des obstacles d'autres types, pour aider ces personnes à présenter leur cas.

Mme Bose : La crainte qu'ils éprouvent s'accompagne aussi de méfiance à l'égard des autorités. Cela est en partie culturel parce que de nombreux immigrants viennent de sociétés cœrcitives où l'on ne fait pas confiance à l'État. Cela dit, depuis les événements du 11 septembre, les immigrants musulmans et arabes qui ont l'air musulmans ont particulièrement l'impression qu'ils ne peuvent pas compter sur l'État canadien pour garantir leurs droits et libertés. C'est beaucoup plus qu'une question de peur; c'est une question de méfiance.

Je suis d'accord avec Mme Chen lorsqu'elle dit que nous devons réduire les obstacles à l'accès. Nous avons besoin de soutien linguistique, pas uniquement au niveau de l'organisme de plaintes, mais de façon générale pour que les immigrants puissent se représenter et que des gens comme moi puissent avoir une retraite agréable.

Notre organisation considère que la surveillance parlementaire exercée par les deux chambres du Parlement est la solution idéale. Tout processus de plaintes indépendant devrait faire appel à une instance de surveillance de la GRC et des services frontaliers. Cette instance devrait avoir les pouvoirs pour enquêter et imposer des sanctions, si nécessaire.

Nous ne tenons pas particulièrement à créer d'autres organismes bureaucratiques. Nous souhaitons que l'on consolide ceux qui existent, mais avant tout, nous souhaitons que nos représentants à la Chambre et les sénateurs aient un pouvoir de surveillance.

Le sénateur Mitchell : Lorsque vous parlez de l'accès à des cours de langue, est-ce que vous parlez de l'anglais comme programme de langue seconde?

Mme Bose : L'anglais et le français comme langue seconde, oui, absolument.

Le sénateur Mitchell : En ce qui concerne la recommandation qui figure à la page 11, qui provient de l'African Canadian Legal Clinic, que le gouvernement fédéral modifie la Loi antiterroriste afin de prévoir une disposition qui interdit le profilage racial et qui indique qu'il faut condamner le profilage racial de la part des instances d'application de la loi et des instances de sécurité, cela me semble relativement simple, de prime abord. Quels sont les arguments que vous avez entendus de la part de ceux qui s'opposent à cette recommandation? Est-ce que nous nous trouverions d'une certaine façon à avouer quelque chose que nous ne voulons pas avouer ou qui, selon certains, n'existe pas? Quels sont les arguments que vous entendez de la part de ceux qui s'opposent à cette recommandation?

Mme Chen : Cela revient à l'argument que j'ai présenté à propos du refus d'admettre la vérité. Il ne fait aucun doute que notre organisation sait que le profilage racial est une réalité. Le fait que l'on hésite même à en parler ou à le reconnaître est en soi un obstacle. C'est la raison pour laquelle la Commission ontarienne des droits de la personne a indiqué dans une recommandation clairement exprimée dans son rapport que la première étape consiste à reconnaître ce fait. On constate une résistance à ajouter dans cette loi une disposition évidente et, qui, à première vue ne pose aucun problème, conforme à notre charte des droits et au code des droits de la personne. Certains considèrent qu'il s'agit d'un exemple de profilage racial à rebours mais nous savons qu'il s'agit d'une réalité. Cela revient au problème de dénégation.

M. Moriah : Je n'ai à ajouter, c'est ce à quoi cela revient. Ma collègue a parlé plus tôt de la question du multiculturalisme et du fait que l'on nie l'existence du racisme dans la société canadienne. La crainte de le reconnaître pourrait en fait poser problème, et certains voient effectivement un lien entre le profilage racial et les stéréotypes, la discrimination et le racisme.

Comme nous l'avons constaté à Toronto, dans divers paliers de gouvernement, dans les institutions avec qui nous traitons de façon régulière à la Clinique, les gens craignent de reconnaître l'existence même du profilage racial. Le mettre par écrit et dire que quelqu'un veut y mettre fin, c'est tout autre chose.

La présidente : J'aimerais faire quelques observations. Je tiens à vous remercier de la discussion de ce soir. Comme nous l'avons entendu autour de la table, mais également des collectivités d'un bout à l'autre du pays, même s'il ne fait aucun doute que le gouvernement fédéral n'a pas de politique de profilage racial, il s'agit de reconnaître que néanmoins ce phénomène existe, c'est la simple réalité. Une fois qu'on le reconnaît, il faut, comme vous en avez discuté et comme nous en avons tous discuté depuis un certain temps avant, la capacité de s'attaquer à la question de front et de déterminer les mécanismes qui peuvent être instaurés pour atténuer ce problème de part et d'autre.

Tout d'abord, je tiens à vous dire que j'obtiendrai le projet de loi d'initiative parlementaire de Libby Davies et je m'assurerai que ce projet de loi et toute discussion qui l'entoure — si on en est à cette étape dans l'autre endroit — soient distribués aux membres du comité.

Après toutes les discussions juridiques que nous avons tenues, cela demeure probablement l'un des aspects les plus difficiles et les plus critiques des questions qui entourent l'application de la loi.

Je vous suis reconnaissante de croire en l'importance de la surveillance parlementaire. Je suis d'accord avec cette proposition, surtout parce que nous avons la possibilité et les outils voulus pour le faire ici, tandis que parfois dans le secteur privé, cela est difficile.

Nous allons étudier attentivement vos réflexions sur l'ensemble de ces aspects. Compte tenu de la variété des témoignages que nous avons entendus, cette question particulière est probablement la plus difficile. Pourtant, si nous arrivons à travailler ensemble, à formuler les choses de manière à créer une réalité où les gens peuvent développer un sentiment de confiance dans leur gouvernement et leurs corps policiers, en ce qui concerne le public, et en particulier dans les collectivités, nous aurons grandement contribué à réduire les niveaux de crainte et de colère qui existent et dont nous sommes conscients.

Une dernière question : lorsque nous avons publié notre rapport en 2001, nous avions formulé certaines recommandations qui nous plaisaient assez. L'une d'entre elles proposait qu'un examen de la loi soit effectué en fait tous les trois ans. C'est ce que nous sommes en train de faire.

Deuxièmement, il était assez évident à l'époque avant que tout système soit mis sur pied, qu'il fallait établir un mécanisme quelconque qui permettrait, avant que tout ceci se fasse, de travailler avec la collectivité par le biais d'une table ronde au niveau fédéral. Cela supposerait de travailler avec la collectivité, avec leurs représentants, et d'établir des liens avec des organisations policières et de sécurité afin d'en arriver à un terrain d'entente.

Il a fallu beaucoup de temps pour mettre sur pied cette table ronde. Lorsque nous avons commencé cet examen il y a un peu plus de trois ans plus tard, en février dernier, cette table ronde avait été constituée une semaine auparavant.

Cependant, laissons cela de côté. Avez-vous eu des liens dans votre travail avec le processus qui est maintenant établi ou les membres de ce comité? Dans l'affirmative, même s'il s'agit d'une initiative relativement récente, pouvez- vous nous indiquer s'il s'agit d'un mécanisme utile et nous proposer des moyens d'en améliorer l'utilité?

Mme Chen : Simplement à titre d'éclaircissement, s'agit-il du comité consultatif, ou de consultations communautaires qui ont eu lieu cette année?

La présidente : Non, il s'agit d'un groupe de personnes à qui on a demandé de participer à un comité, il ne s'agissait pas d'un événement ponctuel. Cela a été mis sur pied au sein du gouvernement. Ça s'appelait la table ronde interculturelle.

Mme Chen : Nous sommes au courant de son existence. Honnêtement, en ce qui concerne la représentation afro- canadienne, il n'y a pas une seule organisation avec laquelle nous avons fait affaire qui représente cette communauté particulière.

D'après ce que nous savons des organismes de lutte contre le racisme et de promotion de l'égalité, la composition de ce comité n'est pas particulièrement représentative. Les gens ne savent pas trop quelle a été l'implication communautaire de ces membres sur le terrain. Je le dis franchement et honnêtement.

Notre organisation a participé à un forum communautaire organisé par le ministère de la Justice. C'est à celui-là que je pensais. Je crois que c'était plus tôt cette année. Ce sont des forums importants et je crois qu'il faut en organiser régulièrement.

Ce que nous trouvons c'est qu'on nous invite à ces réunions, on nous donne la parole, et par la suite nous n'avons aucune idée des résultats. S'il s'agit d'un forum permettant de se défouler, ainsi soit-il. Je crois que les gens s'attendent à un résultat quelconque, ce que nous n'avons pas vu jusqu'à maintenant. Un problème fondamental avec le comité consultatif interculturel a été la représentativité des personnes y siégeant et leur participation ou manque de participation au niveau de la collectivité.

Mme Bose : Madame la présidente, certains parmi nous souffrent de fatigue de consultation.

La présidente : Nous comprenons cela.

Mme Bose : Surtout une petite organisation comme la nôtre. J'ai participé aux consultations du ministre de la Justice et je dirais que c'était une des meilleures. Depuis notre première rencontre pour discuter de ce projet de loi et aujourd'hui, on m'a invitée à d'innombrables consultations à ce sujet et je pars toujours avec un sens de désespoir.

Aussi, en ce qui concerne cette table ronde communautaire, les immigrants et les minorités visibles sont un groupe revêche.

À un moment donné, je ne crois pas qu'on soit toujours d'accord. Nous ne sommes certainement pas tous d'accord quand il s'agit de la Loi antiterroriste.

Cela dit, je dirais très franchement, comme ma collègue, que certains parmi nous ne savent même pas qui sont ces représentants communautaires. Peut-être que le site Web devrait afficher une photographie afin qu'on puisse les reconnaître au passage si jamais on les croise. Nous vous connaissons mieux qu'eux. Cela n'est pas peu dire.

La présidente : Nous essayons.

Mme Bose : Merci.

La présidente : Merci bien. Je soulève la question parce que nous aurons une séance avec le monsieur qui préside cette table ronde. Je crois qu'il est utile d'avoir entendu les vues que vous avez exprimées et que nous avons entendues ailleurs. L'intention était clairement de créer un outil utile et positif, et cela pourrait peut-être encore être le cas. C'est très utile d'avoir cela au procès-verbal. Je vous en remercie.

Je vous remercie d'être venus ce soir et d'avoir exprimé vos préoccupations en ce qui concerne toutes les questions d'ordre technique et juridique dans ce domaine. Vos préoccupations sont très importantes pour nous. Nous y trouverons les solutions au bout du compte. Les solutions ne seront pas trouvées dans des livres; nous ne les trouverons pas autour de cette table. Elles seront trouvées au sein des liens qui pourront être forgés dans votre communauté et avec toutes les communautés, y compris celles du gouvernement et de la police. C'était notre but il y a trois ans. Ça l'est toujours aujourd'hui. Je suis une Écossaise tenace; je ne renonce jamais à l'idée qu'ensemble, nous allons venir à bout de notre objectif et ferons notre possible.

La séance est levée.


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