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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones

Fascicule 16 - Témoignages du 16 mai 2007


OTTAWA, le mercredi 16 mai 2007

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd'hui, à 18 h 30, afin d'étudier, pour en faire rapport, les travaux récents concernant l'eau potable dans les collectivités des Premières nations.

Le sénateur Gerry St. Germain (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Le comité poursuit son étude de rapports portant sur la salubrité de l'eau potable dans les collectivités des Premières nations.

Le comité a entendu le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, le commissaire à l'environnement et au développement durable et le groupe d'experts sur la salubrité de l'eau potable dans les collectivités des Premières nations.

Ce soir, honorables sénateurs, nous avons l'honneur d'accueillir, de l'Assemblée des Premières nations, Earl Commanda, directeur du Secrétariat au logement, et Richard Jock, directeur général, ainsi que Candice Metallic, avocate-conseil.

Je vous souhaite la bienvenue au comité et vous remercie d'avoir pris le temps de comparaître aujourd'hui. En général, nous prévoyons de 10 à 12 minutes par exposé, et les sénateurs posent ensuite des questions.

Madame Metallic, nous pensons tous les deux à ce qui se passe à Ottawa ce soir. J'espère que nous allons tous nous réjouir plus tard des résultats de la grande partie de hockey qui se déroulera en soirée.

Richard Jock, président-directeur général, Assemblée des Premières nations : Je vous remercie de vos aimables observations préliminaires. À notre avis, il importe de s'assurer que toute activité en matière de logement répond directement aux besoins en eau dans les nouveaux logements, faute de quoi ils sont tout à fait inefficaces.

En mai 2006, lorsque Phil Fontaine, chef national de l'Assemblée des Premières nations, ou APN, a annoncé, avec le ministre, la création du groupe d'experts, qui a comparu devant vous antérieurement, il a réaffirmé qu'un plan d'action global des Premières nations reconnaît la nécessité de mettre en place un cadre réglementaire. Nous reconnaissons et comprenons ce besoin.

Toutefois, cette reconnaissance sous-entendait aussi qu'au bout du compte, pour que le plan soit couronné de succès, il faut également reconnaître que les gouvernements des Premières nations ont besoin d'aide technique et financière afin de respecter ces normes.

Les chefs de l'APN, par résolution, et les chefs nationaux ont appuyé le groupe d'experts, car il s'attaquait à une question prioritaire et tellement fondamentale.

Cette priorité a bien entendu été un des résultats de la Conférence des premiers ministres de 2005 et a été mentionnée dans le communiqué et dans ce que l'on appelle l'Accord de Kelowna.

Le rapport a été déposé le 7 décembre 2006, en même temps que le premier rapport d'étape et un plan d'action sur l'eau potable dans les collectivités des Premières nations. Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien a déposé le deuxième rapport d'étape en mars 2007.

En général, je dirais qu'AINC est heureux qu'une des conclusions définitives du rapport était qu'il n'était pas crédible de mettre en place un régime de réglementation sans avoir les capacités adéquates. Le rapport indiquait qu'un investissement dans les réseaux d'alimentation en eau des collectivités des Premières nations est une condition préalable pour satisfaire aux exigences réglementaires.

Cependant, nous croyons comprendre d'après un témoignage antérieur que l'option proposée est d'incorporer la réglementation provinciale dans la présente mesure législative, ainsi que les régimes de réglementation de ces provinces dans la loi fédérale. Nous ne préconisons pas tout à fait cette position.

Nous sommes heureux que M. Prentice, le ministre des Affaires indiennes et du Nord, juge qu'il est totalement inacceptable que 97 collectivités soient considérées à risque élevé et qu'il est en faveur des prochaines étapes visant à réduire de moitié le nombre de ces collectivités cette année. Toutefois, nous souhaitons également que les progrès réalisés dans ces collectivités, tant individuellement que collectivement, soient concrets et continus; ils devraient être mesurables au moyen d'évaluations et être durables, et non pas provisoires ou à court terme.

Nous craignons aussi que certains progrès, ou progrès apparents, pourraient résulter de l'utilisation d'un outil ou d'un moyen d'évaluation différent. Nous avons examiné le mécanisme, soit l'outil d'évaluation des risques des installations, qui permet d'examiner cinq aspects clés du traitement des eaux. À notre avis, cet outil offre aux collectivités des Premières nations des systèmes complets ou partiels, mais il ne tient pas compte des collectivités qui n'ont pas d'installations ou qui dépendent toujours de sources d'eau non traitées ou de puits d'eau privés et de fosses septiques. Le système d'évaluation néglige un nombre considérable de collectivités qui risquent d'être vulnérables.

Par conséquent, nous recommandons notamment que des évaluations techniques détaillées de toutes les installations d'alimentation en eau des collectivités des Premières nations soient une condition fondamentale préalable à la mise en œuvre d'un nouveau régime de réglementation.

À mon avis, cette approche globale est plus systématique qu'un simple examen des installations présentant des risques élevés.

Par ailleurs, nous sommes tout à fait contre l'idée d'accélérer l'adoption d'une loi fédérale sans lancer un processus de consultations. Il serait inopportun d'agir ainsi sans s'engager à créer un régime de réglementation.

Le chef national appuie sans réserve le ministre dans sa décision de mettre en œuvre son plan d'action, et l'Assemblée des Premières nations continuera à exprimer son soutien à la condition qu'on déploie des efforts sincères visant à combler le manque de ressources que j'ai mentionné à propos de l'infrastructure.

Nous croyons que des progrès significatifs et durables seront réalisés s'il y a engagement total à collaborer et à trouver des solutions qui tiennent compte de nos besoins et de nos circonstances actuels, tout en respectant nos droits ancestraux et nos droits issus de traités. À notre avis, l'accord politique entre les Premières nations et la Couronne fédérale portant sur la reconnaissance et la mise en œuvre des gouvernements des Premières nations nous présente un cadre clair pour faire des progrès. Nous croyons aussi qu'il existe un cadre précis qui fait valoir la nécessité d'un dialogue national, de la recherche et de l'expertise, et de l'élaboration concertée de politiques de collaboration.

Ce cadre, que nous avons fourni auparavant et que nous pouvons fournir de nouveau, comprend une liste de caractéristiques nécessaires pour se doter d'une mesure législative efficace. Parmi ces caractéristiques, notons la reconnaissance des gouvernements des Premières nations, qui se rattache à la compétence; des relations financières et une responsabilisation transparentes; le renforcement des capacités; et surtout l'harmonisation de diverses sphères de compétence pour veiller à ce que notre approche globale soit coordonnée.

Nous avons beaucoup insisté sur ce point auprès du groupe d'experts et du gouvernement fédéral. Nous sommes toujours convaincus que cette approche permettra de progresser plus rapidement et d'obtenir de meilleurs résultats.

Dans le cadre du mandat qu'elle a reçu des chefs de l'Assemblée, l'APN continuera à trouver des solutions à long terme qui permettront aux Premières nations d'exercer leur compétence sur la gestion de l'eau et des eaux usées. Bien entendu, des mesures provisoires sont importantes et doivent être prises en considération, mais elles doivent être manifestement temporaires, et il faut déterminer au préalable un processus clair qui permettra aux Premières nations de remplacer les mesures provisoires.

De plus, nous allons bientôt envoyer une lettre au ministère pour lui demander d'examiner un processus qui nous paraît prometteur. Il s'agit d'un processus fédéral d'élaboration de normes dans les collectivités des Premières nations qui serait établi par l'Association canadienne de normalisation, un organisme international reconnu pour l'élaboration et la surveillance de normes.

Nous ne pouvons pas et ne devons pas faire les mêmes erreurs que nous avons commises dans les lois précédentes, ni adopter de solutions rapides, comme celle d'incorporer des règlements provinciaux, car, selon nous, des solutions de ce genre ne permettront pas d'apporter des changements durables. Nous croyons que les changements doivent être faits rapidement, mais de façon prudente et méthodique, avec une vision distincte de l'avenir.

En résumé, nous recommandons trois éléments. Premièrement, nous devons régler les problèmes fondamentaux liés à la capacité des collectivités des Premières nations de réduire les risques et de se préparer à un véritable changement. Dans la mesure du possible, ces mesures doivent prévoir des programmes de formation efficaces dans l'ensemble du pays.

Les deux autres éléments doivent être effectués simultanément. Il s'agit d'élaborer et de mettre en œuvre des normes; cela renforcera la capacité des gouvernements des Premières nations de gérer des systèmes durables et efficaces d'alimentation en eau potable de qualité, et nous avons des précisions à cet égard.

Voilà qui conclut mon exposé, et nous vous invitons à poser des questions ou à faire des observations.

Le président : Merci, monsieur Jock. Vous avez dit que les normes provinciales ne sont pas acceptables. Seraient- elles acceptables provisoirement, en insistant bien sûr qu'elles ne sont que temporaires, afin d'améliorer la situation?

M. Jock : Nous croyons savoir que ces normes n'ont pas été adoptées dans toutes les provinces, donc le simple fait d'adopter des normes provinciales ne permettra pas de réaliser des progrès. Voilà pourquoi nous pensons qu'une approche, comme celle comprenant la participation de l'Association canadienne de normalisation, nous permettrait d'atteindre nos objectifs à l'échelle nationale plus rapidement et de façon uniforme. Plusieurs provinces n'ont pas les mêmes normes, donc je ne vois pas comment l'adoption de normes provinciales accélérerait nécessairement le processus.

Le président : Parlez-vous de normes nationales ou internationales? Où sont-elles établies? Si nous utilisions les normes des provinces qui ont des systèmes acceptables, comment les appliquerions-nous?

Je peux voir comment elles seraient mises en œuvre au niveau provincial, et je ne dis pas que si nous utilisions les normes provinciales, nous devrions continuer à le faire, mais ce serait un point de départ pour accélérer le processus.

Earl Commanda, directeur, Secrétariat au logement, Assemblée des Premières nations : Dans ses accords de contribution avec les collectivités des Premières nations, le gouvernement fédéral utilise un protocole en vertu duquel les recommandations pour la qualité de l'eau potable au Canada sont considérées comme la norme nationale. Ce protocole s'applique autant aux municipalités qu'aux Premières nations.

Quant à l'utilisation des directives nationales sur l'eau potable comme norme, nous aurions cru que les Premières nations auraient établi leurs propres directives il y a bien longtemps, en fonction de la norme nationale.

Le gouvernement fédéral dit qu'il préférerait examiner les normes provinciales. Actuellement, on se demande dans quelles provinces les normes sont les meilleures. Bien sûr, à cause de Walkerton, le protocole reflète les normes provinciales de l'Ontario en matière de conception d'entretien des réseaux d'alimentation en eau. Cette province élabore actuellement sa propre loi concernant l'eau potable saine.

Pour nous, la question n'est pas de savoir quelles normes nous devrions suivre ou si nous devrions adopter des normes provinciales. Nous devrons manifestement faire face à des problèmes entre paliers de gouvernement en acceptant ces normes. Pour nous, ce n'est pas seulement une question de salubrité de l'eau potable, mais aussi de savoir quoi faire des eaux usées et comment protéger les sources d'eau potable qui, bien souvent, sont situées à l'extérieur des réserves des Premières nations.

Beaucoup de questions n'ont pas encore été réglées concernant l'acceptation des normes provinciales.

Le président : Si les municipalités sont régies par une norme nationale, ne devraient-elles pas toutes adopter la même? Il y a des municipalités dans chaque province.

J'essaie de comprendre comment fonctionne ce système de freins et de contrepoids, et s'il en existe un qui soit convenable.

M. Commanda : Bien que l'Ontario se soit dotée de normes et de lois depuis longtemps, cela n'a pas empêché la tragédie de Walkerton. Nous parlons ici de l'application concrète de ces normes. Comment le gouvernement fédéral s'y prendra-t-il? Devrait-il adopter les normes provinciales? Comment gérera-t-il l'instauration de ces normes? Les Premières nations s'opposent vigoureusement à ce qu'un représentant de la province empiète sur leurs compétences et fasse appliquer la loi provinciale. Nos dirigeants ont beaucoup de mal à accepter cette approche et cela constitue une pomme de discorde.

Le sénateur Sibbeston : À certains égards, j'estime que vous avez raison, mais que nous savons mieux quoi faire, en général; on nous recommande de donner aux Premières nations les ressources et la capacité nécessaires pour qu'elles aient de l'eau potable. Cela semble être la solution.

Cela me rend furieux, parce que l'une des premières choses que M. Prentice a dites après avoir été nommé ministre, lorsque certains problèmes, notamment à Kashechewan, ont fait les manchettes, c'est qu'il réglerait la question de l'eau potable dans les collectivités des Premières nations dans l'ensemble du pays. Nous avons un ministre qui semble déterminé et qui veut régler le problème. Nous avons ce rapport d'experts dans lequel on propose de combler l'écart avant de mettre en place des règlements, et maintenant le ministère recommande d'établir en priorité un régime de réglementation. Il me semble que les recommandations du ministère vont à l'encontre de l'opinion des experts et du ministre.

Comment est-ce possible? Comment ces recommandations peuvent-elles tenir, s'il s'agit d'un bon ministère? Si le régime est démocratique, comment les recommandations du ministère peuvent-elles sembler si inappropriées?

Voilà dans quelle situation les Premières nations se trouvent dans notre pays. Nous avons affaire à des bureaucrates qui ont leur propre idée des solutions qui doivent être appliquées pour les membres des Premières nations; c'est là que nous en sommes.

En tant que représentants de l'Assemblée des Premières nations, comment traitez-vous avec le gouvernement? Si nous ne faisons rien, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien mettra en place le processus de réglementation malgré tout. Je me méfie de la proposition du ministère de retarder le processus et de ne rien faire. Soit il n'a pas l'argent nécessaire, soit il craint de l'obtenir, veut retarder la solution et ne pas faire le travail.

La situation justifie que le gouvernement investisse pour améliorer la qualité de l'eau. Ce problème doit être réglé sans attendre; pourtant, selon le ministère, nous devrions laisser traîner les choses et passer des années, peut-être une décennie, à mettre en place une réglementation en matière de qualité de l'eau. Puis, progressivement, on appliquerait les règlements.

Avez-vous des commentaires à ce sujet? Qu'allez-vous faire?

M. Jock : Nous avons certains intérêts en commun. Nous croyons que l'enchaînement des mesures n'est pas adapté à la situation. Nous pouvons avoir les normes les plus rigoureuses qui soient, mais si nous ne les appliquons pas de façon systématique, elles ne serviront à rien.

Avant tout, nous devrons prendre en considération la responsabilité et les répercussions pour les collectivités qui ne respectent pas ces normes, si elles sont adoptées. Quels seront les conséquences? Les collectivités seront-elles responsables des infractions particulières? Le seront-elles des effets sur la santé? Si les collectivités sont incapables de satisfaire à ces normes, il y aura des risques pour elles.

C'est pourquoi nous sommes d'avis qu'un processus de rédaction commune constituerait la meilleure façon d'en arriver à une approche sensée, dans laquelle nos collègues des Premières nations pourraient vraiment s'engager. De notre côté, nous avons un groupe d'experts qui, selon moi, peut élaborer des approches pratiques afin de répondre à ce besoin.

Nous avons les mêmes objectifs, mais nous ne nous entendons pas vraiment sur la façon de les atteindre. Comme le groupe d'experts, nous croyons que le développement des capacités est une condition essentielle.

M. Commanda : De notre point de vue, la question des normes est très importante pour les Premières nations, mais nous sommes aussi d'avis que les ressources permettant de se conformer aux normes acceptées doivent faire partie intégrante du projet.

Le groupe d'experts a recommandé que soient fixées des conditions préalables en ce qui concerne le développement des capacités et les ressources pour corriger les problèmes; et d'ailleurs, dans son rapport, il propose la création d'une commission sur l'eau des Premières nations, pour indiquer aux Premières nations ce qu'elles doivent faire pour améliorer leurs réseaux d'alimentation en eau, et pour dire au gouvernement fédéral quoi faire pour s'assurer que ces mesures seront prises. De ce point de vue, nous avons certainement examiné la totalité du rapport.

Nous sommes surpris que le président du groupe d'experts se soit rangé du côté du gouvernement fédéral pour appuyer une loi qui renvoie aux normes provinciales, car nous pensions que le groupe d'experts favorisait davantage la législation fédérale. Nous avons offert d'entreprendre un processus conjoint, car même si le groupe d'experts n'est pas allé assez loin dans l'examen de la compétence ou du droit coutumier des Premières nations, nous croyons qu'il y avait une possibilité de collaborer avec le gouvernement fédéral, en vue d'élaborer des normes déterminées par les Autochtones qui seraient acceptables et appropriées pour leurs collectivités.

Le sénateur Gill : J'aimerais revenir sur ce que vous avez dit au sujet des normes. La question n'est pas d'accepter des normes fixées par quelqu'un d'autre, mais de déterminer si ces normes conviennent à la réserve et correspondent à ce qu'elle veut, et si elles sont sous contrôle autochtone. C'est la manière dont nous fonctionnerons un jour.

Au début, selon les chiffres que je détiens, on comptait 193 collectivités des Premières nations ayant des réseaux d'eau potable à haut risque. Elles sont maintenant 97. On a déjà commencé à corriger le problème. Est-ce le cas ou pas? Le processus est déjà enclenché pour faire face à la situation. Pouvez-vous accepter les solutions conjointement avec le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, ou voulez-vous encore argumenter au sujet de la façon de résoudre ce problème?

M. Commanda : Le rapport déposé par le gouvernement fédéral, en mars dernier, portait sur la salubrité de l'eau potable, et non sur l'endroit où sont situées les collectivités n'ayant aucun réseau d'alimentation en eau. Où sont celles qui ont un système de traitement des eaux usées ayant aussi besoin d'être réparé? Où sont ces collectivités qui se servent de puits individuels et de fosses septiques, dans la plupart des régions rurales?

Bien que les chiffres aient diminué, nous voyons bien qu'ils ne l'ont sûrement pas fait radicalement, lorsque nous examinons les systèmes de traitement des eaux usées. Dans le rapport, il n'est pas question de s'occuper des puits privés et des fosses septiques. Le gouvernement fédéral estime qu'il s'agit d'une responsabilité individuelle. Nous croyons que l'approche n'est pas assez globale pour être uniquement axée sur la salubrité de l'eau potable.

À notre avis, il est bon d'utiliser ce qu'on appelle une approche à barrières multiples, depuis la source jusqu'au robinet et du robinet jusqu'à la source d'eau potable, mais à cet égard, on semble uniquement préoccupé d'obtenir de l'eau potable saine.

D'après nous, passer de 193 à 97 réserves est appréciable, mais les réseaux d'eau potable à risque moyen pourraient facilement devenir à risque élevé. Actuellement, 25 p. 100 des opérateurs d'installations ont quitté leur emploi pour travailler dans d'autres municipalités ou secteurs d'activités. C'est pourquoi les ressources humaines sont insuffisantes; il faut des années pour former un opérateur de station d'épuration des eaux de niveau 1, 2 ou 3. Le gouvernement fédéral n'accorde pas les sommes nécessaires pour s'assurer que ces personnes restent dans la collectivité pour s'occuper de ces systèmes de traitement des eaux.

Lorsqu'on parle de durabilité, il ne s'agit pas seulement de réparer les installations, mais aussi de donner aux collectivités les fonds nécessaires pour garder les opérateurs qualifiés et les emplois. Cet argent est essentiel pour que le système fonctionne.

Le sénateur Gill : En ce qui concerne l'argent, une réserve reçoit un budget global pour s'occuper de ces affaires. Le ministère des Affaires indiennes et du Nord n'a pas à lui dire où elle doit utiliser cet argent. Il incombe à la réserve de décider comment elle dépensera son argent, et parfois les employés ne sont pas satisfaits de leur salaire. C'est très compliqué. Comment gérez-vous cette situation?

M. Jock : Si les collectivités recevaient de l'argent à un taux de croissance correspondant à ce que les provinces reçoivent, par exemple, et l'avaient ainsi reçu au cours des dix dernières années, oui, je trouverais que ce que vous dites a du sens. Toutefois, la limite imposée au financement d'AINC de 2 p. 100 — qui ne vient pas nécessairement du ministère lui-même — représente finalement une perte de 6 p. 100 en dollars constants, selon nos calculs, compte tenu de l'augmentation de la population et de l'inflation.

Moins de ressources sont consacrées à l'éducation, à la santé et aux services sociaux; en réalité, nous régressons à cause de la diminution du financement, et ce que vous dites devient impossible. On ne peut utiliser des sommes provenant d'autres secteurs, car ceux-ci ne disposent pas de fonds suffisants. C'est pourquoi, dans nos remarques, nous indiquons que la durabilité générale des collectivités des Premières nations passe par la suppression de la limite imposée au financement. Cette limite, en fait, a des conséquences sur tous ces programmes.

Dans les meilleures conditions, les collectivités peuvent effectuer ce genre de réaffectation, mais étant donné la situation du financement des dix dernières années, ce n'est pas possible.

Le sénateur Gill : Bien sûr, comme vous l'avez mentionné, il y a un manque d'argent quelque part. C'est exactement le problème dans les réserves. Elles peuvent investir dans un secteur, si elles ne font rien pour les autres, elles sont encore aux prises avec des problèmes et ne sont pas certaines que c'est la volonté du peuple. Elles essaient de gérer leurs priorités, mais elles manquent d'argent. C'est pourquoi certaines personnes ne connaissant pas la situation disent parfois : « Nous donnons de l'argent aux Autochtones, mais ils l'utilisent à mauvais escient. » Cela ne les concerne pas, mais c'est la situation. C'est la raison pour laquelle il est si difficile de fixer des priorités.

En passant, qui établit les priorités dans le cas des réserves ayant besoin de services? Qui les fixe? Qui détermine que l'argent devrait aller là-bas en premier parce qu'il y a une priorité réelle? Aidez-vous le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien dans ces cas?

M. Commanda : Non, je ne le crois pas.

Le sénateur Gill : Vous ne participez pas?

M. Commanda : Me demandez-vous qui établit les priorités concernant l'argent versé aux collectivités?

Le sénateur Gill : Oui, en premier lieu, qui choisit la réserve où les fonds sont affectés pour résoudre le problème?

M. Commanda : L'eau a été reconnue comme la plus haute priorité dans le système financier du budget fédéral. De notre point de vue, à cause des risques pour la santé et la sécurité, les Premières nations soutiennent qu'elles consacrent 1 milliard de dollars à même leur budget global à cette priorité. En 2003, elles ont reçu un budget supplémentaire de 600 millions de dollars pour s'occuper des réseaux d'alimentation en eau. Ce fonds de 1,6 milliard de dollars s'épuisera à la fin du présent exercice financier. Nous ignorons ce qui se passera au cours des cinq prochaines années sur le plan des fonds supplémentaires.

Sous cet angle, le plafond de 2 p. 100 a un impact réel. Cela signifie que les Premières nations ne dépensent pas d'argent pour les écoles, les routes et les autres priorités. Elles sont obligées de se conformer à la liste des priorités nationales; autrement dit, même si elles peuvent recevoir des fonds pour des dépenses en capital secondaires chaque année de la part du ministère des Affaires indiennes, elles reçoivent des instructions sur la façon de dépenser cet argent selon la grille des priorités nationales. De ce point de vue, il se peut qu'elles aient besoin d'argent pour le logement, mais à cause de la priorité accordée à l'eau, elles sont obligées de consacrer 20 p. 100 des fonds fédéraux qu'elles reçoivent à l'approvisionnement en eau.

Le sénateur Hubley : Quels critères a-t-on utilisé pour cerner les 97 collectivités qui sont toujours considérées à haut risque? Dans quelles conditions pouvons-nous dire qu'une collectivité est à haut risque?

M. Commanda : Le gouvernement fédéral a élaboré l'outil d'évaluation des risques afin d'évaluer les réseaux d'approvisionnement en eau selon un classement. Selon le système de classement, cette évaluation pondérée comprend cinq éléments. Le premier élément est la source d'approvisionnement en eau. L'eau libre est une source d'eau plus risquée qu'un puits foré, car elle présente un plus grand risque de contamination.

Le deuxième élément est la conception. La conception du réseau d'approvisionnement en eau est-elle appropriée pour répondre aux besoins de la collectivité? Dans certains cas, on a laissé entendre que la conception de certains de ces réseaux était trop poussée. Toutefois, dans notre cas, comme ils respectent des normes fédérales plus anciennes, ils ne sont pas conformes aux normes actuelles de la province et des municipalités de l'Ontario. Selon nous, il faut examiner les normes de conception pour la construction de ces réseaux.

Le troisième élément est le fonctionnement en tant que tel. Comment les usines et les installations sont-elles gérées? Qui s'occupe de remplacer une pompe à eau? Qui s'assure de la présence d'un bon mélange de chlore? Ce point est pris en considération dans l'évaluation.

L'autre élément est l'obligation de faire rapport. Est-ce que le chef et le conseil ou est-ce que les responsables de la santé reçoivent régulièrement un rapport à jour sur la qualité de l'eau? Ou ne reçoivent-ils aucun rapport alors que les gens boivent de l'eau contaminée? Ou encore, devrait-on avoir un avis d'ébullition de l'eau? Je crois que c'est un autre élément qui a également été utilisé dans cette évaluation.

Enfin, l'autre élément est l'opérateur.

Si l'on détecte un problème avec l'un ou l'autre de ces cinq éléments d'évaluation du risque, on classe la collectivité dans la catégorie de risque moyen ou de risque élevé. Une collectivité est jugée à faible risque lorsqu'elle satisfait à l'ensemble des cinq conditions.

Les représentants du ministère ont essayé de combiner les avis d'ébullition de l'eau transmis par Santé Canada à leur propre évaluation annuelle. Cependant, cette évaluation n'est pas effectuée par un ingénieur, mais plutôt par un fonctionnaire du ministère qui communique parfois avec la collectivité par téléphone.

Voilà pourquoi nous ne sommes pas heureux de l'outil d'évaluation du risque que le ministère utilise. Même si ces 97 collectivités sont considérées à haut risque, nous demandons que chaque réseau d'approvisionnement en eau soit évalué par un ingénieur.

Le sénateur Hubbley : Nous avons appris de témoins précédents que la consommation d'eau potable à partir de sources naturelles n'est plus reconnue comme un droit. Pour des raisons environnementales et à cause du degré de pollution qui sévit dans notre pays, ce droit n'est plus une option.

Vous avez parlé du droit coutumier. On nous a expliqué que, par le passé, une personne pouvait recueillir de l'eau dans une rivière et l'amener chez lui pour l'utiliser à son gré. Mais ce n'est plus le cas maintenant.

Quel type de droit coutumier existe-t-il maintenant ou quel type de coutumes aimeriez-vous que l'on intègre dans un réseau quelconque d'approvisionnement en eau potable?

Candice Metallic, avocate-conseil, Assemblée des Premières nations : Nous avions essayé de résoudre cette question épineuse lorsque le groupe d'experts l'avait incluse dans son rapport. Le problème avec le droit coutumier, c'est que chaque Première nation a des coutumes, des pratiques et des traditions qui lui sont propres. La façon dont les Premières nations ont abordé les questions liées à l'eau par le passé diffère dans l'ensemble du pays. De plus, ces pratiques, coutumes et lois ont évolué avec le temps.

Mon premier point, c'est que le fait de penser à cette question dans le contexte purement traditionnel ne serait pas nécessairement la meilleure approche parce que nos conditions sont clairement différentes aujourd'hui. La question porte davantage sur la façon dont chaque collectivité exerce sa compétence en matière de réglementation de l'eau, plutôt que sur la façon dont elle aborde spécifiquement la question de l'eau.

Le sénateur Hubley : Vous nous avez donné beaucoup de renseignements sur la nécessité d'un soutien technique. Les réseaux doivent fonctionner et ils doivent être efficaces. L'une des propositions était que les collectivités pourraient peut-être voir s'il est possible de mettre en place un plan de gestion avec des collectivités voisines afin de regrouper ces collectivités dans un seul réseau. Est-ce quelque chose que l'Assemblée des Premières nations endosserait?

M. Commanda : Nous avons examiné des systèmes de gestion. Nos collectivités sont petites et la Colombie- Britannique compte probablement le plus grand nombre de petites collectivités. Le gouvernement fédéral a créé, dans l'ensemble du pays, un système de conseils tribaux. Nous considérons ce conseil tribal comme une unité de service supplémentaire. Lorsque nous parlons de fournir des opérateurs certifiés de stations d'épuration de l'eau, un superviseur des opérateurs de stations actuels ou un système pour surveiller la gestion des réseaux d'alimentation en eau, nous estimons que ce modèle agrégé serait un bon modèle à suivre. Nous appelons cela un modèle pivot.

En ce qui concerne cette approche, le gouvernement fédéral a proposé d'intégrer des tiers chargés de la gestion, des opérateurs certifiés qui ne proviennent pas de la collectivité et de payer leurs services pour superviser le fonctionnement de ces réseaux d'approvisionnement en eau. Il s'agit d'une mesure provisoire qui résout le problème. Mais à long terme, nous voulons que ces collectivités locales soient adéquatement formées pour gérer leurs propres réseaux. Même avec le modèle pivot que nous proposons, nous voulons que les collectivités finissent par assumer cette responsabilité.

Voilà pourquoi nous proposons que le renforcement des capacités soit continu. Dans le Programme de formation itinérante, on a investi beaucoup d'argent pour former des opérateurs de stations d'épuration de l'eau. Dans le cadre de ce programme, nous voulons que les opérateurs assument la responsabilité supplémentaire de la supervision afin de gérer eux-mêmes les réseaux. Nous estimons que cette approche est plus faisable sur le plan financier que le fait de verser plus d'argent à un tiers pour qu'il s'installe dans une collectivité afin de surveiller le réseau d'alimentation en eau.

Le sénateur Watt : J'ai une certaine idée de ce qu'on entend par droit coutumier. J'ai soulevé cette question auprès du soi-disant groupe d'experts lorsqu'il a comparu devant nous l'autre jour. J'ai demandé au groupe s'il avait eu l'occasion de participer ou s'il participait actuellement aux efforts du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien pour concevoir l'instrument de réglementation que le ministère essaie d'établir. Ils ont répondu qu'ils ne participaient pas. Pourquoi pas?

Ma question s'adressait aussi à l'APN. Pourquoi ne participez-vous? Au nom du partenariat, si cela veut dire quelque chose, pourquoi ne pas travailler ensemble et concevoir l'instrument à partir d'un point de vue différent? Vous pouvez également tirer beaucoup de leçons des régimes provinciaux qui s'appliquent déjà dans l'ensemble du pays. Je ne crois pas que ce régime soit totalement négatif. Je crois que vous pouvez tirer des leçons d'un régime, en prendre une partie pour y ajouter les aspects du droit coutumier.

Par « coutumier », on entend la compréhension de la nature, du fonctionnement du réseau hydrographique, de sa circulation et de son interaction avec la planète et l'univers. Vous devez convaincre d'une manière quelconque le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, et probablement le groupe d'experts, qu'ils ont besoin de vous pour concevoir le réseau. Sinon, vous devrez attendre année après année, tourner en rond et avoir sans cesse des désaccords. Je propose à mes collègues que telle devrait être notre recommandation.

Je n'ai pas de questions.

M. Jock : C'est exactement ce que nous avons essayé de souligner, et je vais renforcer ce point. Nous sommes intéressés par des efforts conjoints afin de rédiger une loi efficace. Si les Premières nations participaient directement, alors même la conception de mesures provisoires efficaces ne serait pas hors de question. Le fait de participer à la conception et à la planification de ces réseaux, et peut-être même le fait d'examiner les normes en fonction du financement, constitueraient les ingrédients du succès.

J'appuie votre observation. C'est ce que nous avons essayé de proposer et nous serions heureux d'une telle recommandation.

Mme Metallic : Si vous le permettez, au sujet des normes provinciales, j'ajouterais que dans une certaine mesure, je suis d'accord pour dire qu'on peut tirer des leçons à partir des lois et des règlements provinciaux liés à la réglementation et à la gestion de l'eau. La préoccupation du point de vue des Premières nations, c'est que lorsque nous commençons à appliquer des lois provinciales dans les réserves des Premières nations, nous nous engageons sur une pente glissante. À l'heure actuelle, nous sommes également aux prises avec la question des biens immobiliers matrimoniaux. Il s'agit d'un autre domaine où le gouvernement fédéral juge que la meilleure approche consiste à appliquer des règlements, des lois et des normes provinciaux.

Lorsque nous regardons toutes les diverses initiatives législatives dans le cadre desquelles on envisage d'appliquer des lois et des règlements provinciaux aux terres des Premières nations, cela nous préoccupe beaucoup. Il y a un précédent historique. L'article 88 de la Loi sur les Indiens dit que les lois provinciales d'application générale ne s'appliquent pas aux terres indiennes. Les lois provinciales peuvent s'appliquer aux Indiens, mais pas aux terres elles- mêmes. Cela s'appuie sur un principe historique.

Lorsque les lois provinciales sont imposées de façon déguisée en les incorporant par renvoi, sous des allures de loi fédérale, cela devient inquiétant pour nous. Certaines Premières nations voudraient peut-être se conformer au régime de réglementation provincial parce que cela fonctionne bien dans leur collectivité. Nous ne disons pas que c'est impossible, mais il va de soi que les Premières nations doivent avoir un mot à dire pour déterminer si un régime provincial convient à leur collectivité.

Le sénateur Watt : Je ne dis pas qu'il faut accepter les lois provinciales dans votre réserve. Je parle des outils et des instruments utilisés par le gouvernement provincial; prenez ces outils et ces instruments et intégrez-les dans les vôtres. Je ne suggère pas que vous deviez envisager la possibilité d'amener le gouvernement provinciale à jouer un rôle dans votre vie.

Combinez ces outils à vos pratiques habituelles dans votre réserve. Je suis sûr que votre avocate-conseil en verra la pertinence. C'est bel et bien possible.

Mme Mettalic : Le gouvernement fédéral propose d'adopter des règlements provinciaux au moyen de l'incorporation par renvoi. Voilà la préoccupation.

Le sénateur Watt : Vous parlez de la mainmise des gouvernements provinciaux sur la gestion d'une réserve. Je ne parle pas de cela.

Si vous voulez un contrôle absolu de la gestion des ressources et des règlements de vos réserves, vous devez participer à la conception de cet instrument — avant, pendant et après.

Supposons que vous trouvez un modèle qui est acceptable pour votre collectivité et que vous voulez vraiment. Vous devez quand même faire un pas de plus pour mettre en place les installations. Il se peut que vous envisagiez de confier un contrat à un tiers pour mettre en œuvre ces modèles. Vous aurez ensuite à mettre en place des programmes de formation. Prenez cela en considération.

Le sénateur Sibbeston : Nos représentants de l'Assemblée des Premières nations peuvent-ils parler de la situation générale des Autochtones qui vivent le long des rivières et des lacs? Par le passé, les Autochtones vivaient toujours au bord des rivières et des lacs et les Inuits de l'Arctique, d'où je viens, vivaient au bord de la mer.

D'un point de vue général, le public canadien estime que les peuples autochtones sont souvent touchés par les activités des grands promoteurs, de l'industrie et ainsi de suite, aussi bien en amont que dans la région même. La pollution à laquelle sont confrontées les Premières nations résulte souvent du développement continu de la société.

À certains égards, ce point de vue est juste. À titre d'exemple, dans le Nord de l'Alberta, le projet des sables bitumineux de Fort McMurray est si vaste qu'il utilise beaucoup d'eau dont une partie finit par être retournée dans la rivière. Les gens qui vivent en aval de ce projet seraient touchés de manière défavorable. Ce scénario se répète probablement partout au pays, là où les Premières nations vivent au voisinage des grandes villes ou des usines de fabrication. Avez-vous des observations à ce sujet?

Ce point est crucial, car les Canadiens doivent savoir qu'ils polluent les eaux que boivent les Premières nations. Ils sont en mesure de répondre de manière satisfaisante à leurs besoins en eau, car ils disposent des ressources financières et de la technologie nécessaires. Les Premières nations, quant à elles, sont laissées pour compte et dépendent d'un ministère insensible et parfois inapte à défendre leurs intérêts.

Avez-vous quelque chose à dire à ce sujet? Cela pourrait aider les gens à comprendre votre situation.

M. Commanda : Depuis un certain temps déjà, le Conseil canadien des ministres de l'Environnement envisage la possibilité de modifier la partie de la Loi sur les pêches qui porte sur la protection des sources d'approvisionnement en eau. Du point de vue municipal, les responsables examinent tout pollueur qui nuit à la vie du poisson. Pourtant, lorsqu'il est question des Premières nations, nous ne sommes pas mieux traités que le poisson en ce qui concerne la protection de la qualité des sources d'approvisionnement en eau. Cette approche pourrait bien fonctionner dans le cas d'une municipalité située dans le sud du pays, mais lorsqu'il s'agit des régions isolées du Nord, les normes sont abaissées.

Il n'y a aucune norme rigoureuse en ce qui a trait au traitement des eaux usées et à la protection des sources d'approvisionnement en eau dans le cas des collectivités des Premières nations. Les responsables nous considèrent comme isolés et comme ne faisant pas partie de la société générale. À cet égard, ils ne nous ont pas écoutés lorsque nous leur avons demandé pourquoi ils n'appliquaient pas aux collectivités des Premières nations les mêmes normes rigoureuses utilisées pour la protection du poisson dans l'eau. Nous n'avons eu aucune réponse claire de la part des ministres de l'Environnement lorsque nous leur en avons parlé.

Nous sommes inquiets non seulement de la salubrité de l'eau potable, mais aussi de la façon dont les responsables aborderont le traitement des eaux usées dans la Loi sur les pêches. C'est là le revers de la médaille et l'autre bataille que nous devons livrer en ce qui a trait à la protection des sources d'approvisionnement en dans cette question de la salubrité de l'eau potable.

M. Jock : Un isolement relatif n'est pas nécessairement synonyme de protection. Bon nombre de nos collectivités du Nord présentent un haut degré de contamination par le diesel. C'est un facteur. Beaucoup d'anciennes bases militaires ont jeté une grande partie de leur équipement, ce qui a entraîné des concentrations élevées de BPC. Même les lacs, qui devraient être clairs et propres, sont touchés.

Cette question est importante. Il s'agit d'une question qui a des répercussions très complexes et pas seulement sur la salubrité de l'eau potable.

Le président : De toute évidence, nos collectivités autochtones sont de bien meilleurs gardiens de l'environnement. Les plus grands partisans de l'environnement qui parlent de pollution sont des citadins, alors que les victimes finissent par être les Autochtones.

Savez-vous combien d'argent serait nécessaire pour amener les réseaux d'eau à se conformer aux normes? C'est peut-être injuste de poser cette question. Vous pouvez répondre plus tard si vous le voulez. Il est important de savoir quel est le degré de responsabilité pour pouvoir amener nos Premières nations au niveau des normes qui leur assureraient de l'eau potable salubre.

M. Commanda : Selon notre évaluation approximative, cette somme varie entre 15 et 25 milliards de dollars. En ce qui concerne les chiffres réels, on nous a demandé de rassembler les chiffres sur ce qu'il en coûterait pour réparer le réseau. Combien coûte l'entretien du réseau? Nous sommes intéressées à travailler avec nos collectivités pour trouver des chiffres exacts et fiables sur les coûts liés à l'entretien efficace de leur réseau.

Lorsque nous regardons la somme de 1,6 milliard de dollars, nous avons besoin que ce type d'engagement de la part du gouvernement fédéral se poursuive pour moderniser tous nos réseaux afin qu'ils respectent les normes actuelles, à savoir les normes sur l'eau potable de l'Ontario.

Le président : Je suis désolé de ne pas avoir présenté mes collègues présents ce soir : le sénateur Gill du Québec, le sénateur Watt du Québec, le sénateur Hubley de l'Île-du-Prince-Édouard, et la vice-présidente, le sénateur Sibbeston. Je remercie l'APN et vous, monsieur Jock, président-directeur général, de votre excellent exposé et je remercie les gens qui vous accompagnent, Mme Metallic et M. Commanda.

Nous rédigerons un rapport, et j'espère que celui-ci donnera lieu à certaines des recommandations que vous avez proposées ici ce soir. Votre exposé ne tombera pas dans l'oreille d'un sourd, soyez-en assurés. J'espère que nous pourrons trouver une solution pour remédier à cette situation inacceptable qui existe dans nos collectivités autochtones partout au Canada.

Chers collègues, nous avons un budget concernant l'étude spéciale sur l'eau potable. Il s'agit d'un montant de 2 000 $ pour les services de base. Puis-je avoir une motion pour que ce budget soit adopté? Nous ne sommes pas un comité coûteux. Nous sommes un organisme frugal.

Le sénateur Hubley : J'en fais la motion.

Le président : Avec l'appui du sénateur Gill. Êtes-vous d'accord?

Des voix : D'accord.

Le président : Merci.

Le comité poursuit ses travaux à huit clos.


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