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Délibérations du comité sénatorial permanent des
Banques et du commerce

Fascicule 18 - Témoignages


OTTAWA, le jeudi 22 mars 2007

Le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce se réunit aujourd'hui à 10 h 55 pour examiner le projet de loi dont il est saisi, le projet de loi C-37, Loi modifiant la législation régissant les institutions financières et comportant des mesures connexes et corrélatives.

Le sénateur Jerahmiel S.Grafstein (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Mesdames et messieurs, bienvenue au comité. Notre premier groupe de témoins ce matin est composé de MM. Duff Conacher, John Lawford et Jacques St-Amant. Notre audience est télédiffusée d'un océan à l'autre ainsi que sur Internet, partout dans le monde. Tout ce que nous disons ce matin aura des répercussions à l'échelle du globe.

Nous commençons aujourd'hui une étude importante sur le projet de loi C-37, Loi modifiant la législation régissant les institutions financières et comportant des mesures connexes et corrélatives. Le projet de loi C-37 a été déposé à la Chambre des communes le 27 décembre 2006 et renvoyé à notre comité le 21 mars 2007. Il porte sur des questions diverses, y compris la divulgation de renseignements aux consommateurs, la rationalisation des approbations d'opérations pour certaines institutions, l'imagerie électronique des chèques, les coûts hypothécaires, l'établissement d'associations de coopératives de crédit et l'augmentation du nombre d'experts étrangers au conseil d'administration des institutions financières canadiennes. D'après le ministère des Finances, ce projet de loi fera en sorte que le Canada continuera d'être un leader mondial des services financiers, comme c'est le cas actuellement. En outre, en déposant le projet de loi, le ministre des Finances a déclaré que cette loi contribuera à moderniser nos règlements, à réduire les formalités administratives et à promouvoir les intérêts des consommateurs. Tout cela est très bien, honorables sénateurs.

Les quatre principales lois régissant le secteur des services financiers sont la Loi sur les banques, la Loi sur les sociétés d'assurance, la Loi sur les sociétés de fiducie et de prêts et la Loi sur les associations coopératives de crédit. L'objectif est de permettre aux institutions financières de répondre le plus efficacement possible aux besoins des consommateurs et des entreprises, tout en assurant la sécurité et la solidité du secteur des services financiers. La législation relative aux institutions financières est exigée par les dispositions de temporarisation des lois pertinentes.

Ces dispositions stipulent en effet qu'il faut procéder à tous les cinq ans à l'examen, que nous entreprenons maintenant, des lois régissant les institutions financières fédérales telles que les banques étrangères et les banques nationales, les sociétés de fiducie, les sociétés d'assurance et les associations coopératives de crédit. Le dernier examen législatif a eu lieu en 2001, et la date d'échéance de la législation régissant les institutions financières était le 24 octobre 2006. Dans le plan budgétaire de 2006, le gouvernement fédéral a reporté la date d'échéance au 24 avril 2007. Le comité dispose donc de peu de temps pour procéder à cette étude, un élément de l'examen après cinq ans que doit mener le Parlement.

Il ne reste qu'un mois avant l'échéance du 24 avril et le comité commence donc ses audiences, en écoutant ses premiers témoins sur cet important projet de loi. Avant de vous présenter nos témoins du Centre pour la défense de l'intérêt public, permettez-moi de vous présenter le sénateur Angus, vice-président du comité, le sénateur Meighen, le sénateur Massicotte, le sénateur Eyton, le sénateur Harb, le sénateur Goldstein, le sénateur Ringuette et le sénateur Biron. Monsieur Lawford, vous avez la parole.

John Lawford, avocat, Centre pour la défense de l'intérêt public : Nous sommes ici au nom de la Canadian Consumer Initiative, un regroupement de six organismes de consommateurs : l'Alberta Council on Aging Services, l'Association pour la protection des automobilistes, le Conseil des consommateurs du Canada, Option consommateurs, le Centre pour la défense de l'intérêt public et l'Union des consommateurs. Le CCI représente donc des milliers de consommateurs canadiens de toutes les provinces et divers organismes de protection des consommateurs. Le CCI offre des conseils et de l'aide qui permettent au gouvernement fédéral de protéger les intérêts des consommateurs.

Le CCI comparaît aujourd'hui devant le comité pour lui présenter ses observations sur le projet de loi C-37, du point de vue du consommateur. Nous parlerons des articles du projet de loi qui ont un effet direct sur le consommateur mais nous avons aussi quelques observations sur les lacunes du projet de loi, particulièrement au sujet du cadre de référence pour les paiements électroniques. Si le comité le veut bien, je procéderai article par article.

Parlons d'abord de l'article 27 qui modifie l'article 417 de la Loi sur les banques en faisant passer de 75 p. 100 à 80 p. 100 la valeur maximale de la propriété qui peut être hypothéquée. Les groupes de consommateurs sont déjà fort préoccupés de la croissance soutenue de la dette des consommateurs.

L'augmentation de la valeur de la dette hypothécaire alourdira encore la dette des consommateurs qui achètent leur première maison et qui sont déjà vulnérables aux pressions croissantes du crédit. Nous signalons aussi qu'avec la baisse de la valeur du marché immobilier, la solvabilité des banques elles-mêmes pourrait être compromise. Rappelons l'effondrement du marché du crédit hypothécaire de seconde catégorie aux États-Unis. Il nous semble donc imprudent de hausser cette limite par les temps qui courent.

L'article 31 du projet de loi améliore les exigences relatives aux REER et aux autres produits financiers. Ce genre de divulgation est très positive pour les consommateurs et nous appuyons la divulgation des frais prévue à cet article. Nous présumons que ce sera un précédent, et qu'il y aura d'autres divulgations de frais bancaires.

L'article 32 améliore la divulgation de renseignements aux consommateurs par les banques, dans le cadre des procédures de règlement des plaintes. Il est certainement bon d'exiger que des dépliants soient disponibles dans les succursales, que des renseignements sur Internet ou sur papier soient disponibles pour ceux qui en font la demande, mais cette offre passive de renseignements est insuffisante. Les renseignements sur la procédure de règlement des plaintes doivent être offerts de manière active par la banque, comme c'est le cas pour les exigences de divulgation relatives aux REER, dont on a parlé. Il faudrait particulièrement exiger des banques qu'elles signalent à l'attention du consommateur l'exigence de cette procédure dès que possible, par exemple dès que le consommateur exprime son insatisfaction au sujet de produits ou de services.

L'article 33 précise que les frais exigés par la banque ne peuvent l'être qu'en vertu d'une entente expresse avec le consommateur, ou en vertu d'une ordonnance judiciaire. Encore une fois, c'est une bonne idée, mais cela ne règle aucunement le problème tenant au fait que les banques peuvent fixer des frais unilatéralement dans leurs ententes sur les comptes, et que si le consommateur ne ferme pas son compte, il est réputé avoir accepté ces frais. Nous estimons qu'une meilleure formulation serait d'exiger un préavis, sans quoi les frais ne pourraient être perçus.

L'article 34 est très important à nos yeux. Il permet au gouverneur en conseil de fixer la période maximale de retenue des chèques. La durée de retenue des chèques est une question clé pour les consommateurs et souvent un obstacle aux services bancaires pour les Canadiens à faible revenu. C'est un pas dans la bonne direction, mais rappelons qu'aux États-Unis, ces durées sont fixées par lois et non par règlements, et cela depuis 20 ans.

À l'ère de l'électronique, les chèques sont maintenant traités rapidement et le seront de plus en plus, grâce à la présentation électronique. Les longues retenues de chèques ne semblent plus justifiées. Nous vous demandons donc d'envisager une méthode plus directe, soit la fixation des périodes de retenue des chèques par voie législative. Idéalement, cette question ne devrait pas être réglée par la Loi sur les banques, mais par la Loi canadienne sur les paiements de façon à établir des règles semblables pour toutes les institutions financières au Canada.

La modification à l'article 35 exige une divulgation plus large, sur leur site web, des interdictions relatives aux ventes liées pour les sociétés d'assurances bancaires. Ce qui serait en outre peut-être plus utile, ce serait un avis dans le texte des ententes bancaires, qui serait plus visible pour les consommateurs, au moment opportun.

L'article 36 apporte un petit changement cosmétique aux procédures relatives à la fermeture d'une succursale. Ça aussi, c'est très important pour les groupes de consommateurs. L'ACFC, l'Agence de la consommation en matière financière du Canada, a certains pouvoirs relatifs aux fermetures de succursales, mais ils sont à notre avis insuffisants. Nous pensons en effet qu'il faut les accroître de beaucoup, pour qu'elle puisse exiger que les succursales d'une banque restent ouvertes si un besoin est manifeste, pendant une période donnée.

L'article 398 modifie la Loi sur les lettres de change, pour traiter de la présentation électronique. Les images électroniques de chèques seront désormais aussi valables que les chèques de papier. Nous craignons toutefois que la modification de la définition de la « lettre admissible » fasse en sorte que les chèques ne soient plus définis par le Parlement, mais par les membres de l'Association canadienne des paiements. Nous craignons qu'à l'avenir, les institutions financières par l'intermédiaire de l'ACP définissent les caractéristiques d'un chèque acceptable, sans consultation suffisante des intéressés. Nous estimons que les caractéristiques essentielles d'instruments de paiement importants comme les chèques doivent être déterminées par le Parlement, en prenant en compte les intérêts de tous les intervenants économiques.

Nous nous en voudrions de ne pas signaler au comité ce qui semble être une petite nuance entre les versions anglaise et française de l'article 163.4 de la Loi sur les lettres de change, erreur à laquelle pourrait remédier votre comité.

D'après la version anglaise, un document est présumé être une image officielle, et cette présomption est réfutable si le consommateur apporte une preuve contraire. La version française stipule que le document est réputé être l'image officielle, ce qui le rendrait irréfutable en droit.

Dans le cas de faux chèques, il faut que le consommateur puisse prouver que l'original était un faux, et qu'il n'y ait pas de « legal deeming » pour reprendre le terme de droit en anglais, il ne faut pas que le chèque soit nécessairement présumé authentique.

Je ne sais pas très bien sur quelle ligne ça tombe, mais il s'agirait des lignes 19 et 20 de la page 209 de la version imprimée.

Jacques St-Amant, conseiller juridique, Centre pour la défense de l'intérêt public : C'est à l'article 398 du projet de loi C-37.

M. Lawford : L'article 403 porte sur la Loi sur la Société d'assurance-dépôts du Canada. En vertu de cet article, la SADC pourrait rembourser les dépôts assurés par versement, sans payer d'intérêts aux consommateurs. Nous craignons que le remboursement complet soit par conséquent retardé, du moins en partie. Nous ne comprenons pas pourquoi on priverait les consommateurs des intérêts courus, pour avoir été privés de l'accès à leur argent.

L'article 422 porte sur la Loi canadienne sur les paiements, sur ses règles et ses normes qui sont expressément décrites dans cette modification comme n'étant pas des textes réglementaires au sens de la Loi sur les textes réglementaires. Alors que les règles de l'ACP sont de plus en plus importantes pour donner des droits et des recours aux consommateurs, cette modification ne fait rien pour préciser si les tribunaux doivent prendre en considération ces règles. Au contraire, on tente à confirmer que les tiers, comme les consommateurs et les détaillants, ne peuvent s'appuyer sur ces règles en droit et on réduit ainsi la capacité du Parlement de modifier ces règles.

Au sujet de l'article 430, nous constatons que cette modification ne change pas de façon importante l'exigence selon laquelle l'ACP est tenue par la loi de rendre le texte de ses règlements disponible à ses membres, mais pas au public. Depuis des années, l'ACP a rendu publiques ses règles relatives à la compensation, mais dans l'intérêt de la transparence, cette politique devrait désormais être intégrée à la loi, tout comme celle relative à l'existence d'un comité consultatif d'intervenants, qui a été intégrée au moment du dernier examen législatif.

L'article 435 porte sur les pénalités que peut imposer l'Agence de la consommation en matière financière du Canada. La modification porte la pénalité maximale à 200 000 $ dans le cas d'une institution financière. Il est clair que c'est insuffisant pour ce secteur.

Signalons que dans un autre projet de loi dont le Parlement est saisi, le projet de loi C-41 se rapportant au secteur des télécommunications, des pénalités monétaires administratives de 5 millions de dollars sont envisagées pour des violations aux règles de concurrence dans le secteur des télécommunications. Des pénalités de même ampleur feraient en sorte que le coût à payer quand on se moque de l'autorité de l'Agence serait plus que la simple rançon des affaires.

Bon nombre de questions qui intéressent les consommateurs ne sont pas traitées dans l'examen de la Lois sur les banques, dans ce projet de loi, du moins pas de manière adéquate. Je vous en donne la liste. D'abord, il faut des exigences linguistiques claires au sujet des ententes bancaires et autres documents. Deuxièmement, il faut une divulgation claire et complète des responsabilités imposées à un consommateur en cas de fraude par carte de débit. La fraude relative aux cartes de crédit est un problème croissant. Un examen du processus de plaintes internes et des mécanismes associés à l'ombudsman, de même que l'approbation des politiques bancaires par l'ACFC seraient une amélioration souhaitable. Le projet de loi ne traite pas suffisamment de l'amélioration de la divulgation des coûts d'emprunt. Enfin, le projet de loi est muet quant au cadre législatif complet et axé sur des principes qui est nécessaire pour les paiements électroniques, dont nous avons parlé brièvement au Comité permanent des finances de la Chambre des communes et dont nous reparlerons sans aucun doute à l'avenir. Beaucoup de ces questions étaient soulevées dans le livre blanc du gouvernement précédent, mais nous tenions à les rappeler à l'attention du comité.

Nous espérons vous avoir bien présenté certaines des préoccupations des consommateurs au sujet de ce projet de loi et nous espérons avoir ainsi aidé le comité dans ses délibérations. Nous répondrons volontiers à toutes vos questions.

Le président : Monsieur Conacher, êtes-vous un parent de Charles Conacher?

Duff Conacher, président, Coalition canadienne pour le réinvestissement communautaire : Charles était mon grand- oncle.

Le président : Il était le meilleur ami de feu mon beau-père et je tiens donc à déclarer un confit d'intérêts. Je serai particulièrement indulgent avec vous, monsieur Conacher.

M. Conacher : Merci de cette occasion et de votre générosité exagérée dans les présentations, si ma célébrité est telle que vous le dites, ce n'est qu'un héritage.

La Coalition canadienne pour le réinvestissement communautaire est une coalition d'une centaine d'organismes de partout au Canada qui s'occupent de lutte contre la pauvreté, de développement économique communautaire, de questions de consommation, de groupes syndicaux, de groupes de citoyens et au total, nous comptons trois millions de membres canadiens. Depuis sa création en 1996, la coalition demande une reddition de comptes accrue de la part des banques, dans bien des domaines, au Canada.

Je ne parlerai pas en détail des propositions qui sont dans le mémoire présenté au comité, puisque nous soutenons en général les propositions déjà énoncées par la Canadian Consumer Initiative. La coalition fait les mêmes demandes que la Canadian Consumer Initiative pour ce qui est d'une divulgation accrue, de règles équitables, de mise en application et d'imposition de pénalités.

Dans notre mémoire sur le projet de loi C-8, nous disions essentiellement qu'il comprenait beaucoup de demi- mesures. Malheureusement, les demi-mesures ne sont guère mieux que des demi-vérités. Le projet de loi faisait trop peu pour augmenter la responsabilité des banques et d'autres institutions financières assujetties à la législation fédérale sur les institutions financières. Nous avons donc encore au Canada un système bancaire à deux vitesses, fonction de la prospérité du consommateur. Malheureusement, rien n'a été fait pour que cesse de se creuser le fossé, à cause des demi- mesures prévues dans le projet de loi C-8.

Il y a une question qui mérite à notre avis un examen complet, qui n'a jamais été fait : la tendance à la fermeture de succursales au cours des 15 dernières années. Il n'y a qu'à voir où les succursales ont été fermées, en étudiant bien les marchés locaux à la lumière des principes du droit de la concurrence, et du concept de concentration du pouvoir des succursales et, par voie de conséquence, des institutions financières qui les contrôlent. Pour ce que nous en savons, ces fermetures se sont produites surtout dans les quartiers à faible revenu, tant dans les collectivités rurales qu'urbaines.

Dans son témoignage devant le comité des finances de la Chambre des communes, l'Agence de la consommation en matière financière du Canada a annoncé qu'elle préparait une carte des fermetures de succursales, au moyen de données de Statistique Canada, qui serait affichée sur son site web. Je pense qu'on remonte ainsi 10 ans en arrière. Cela devrait nous donner une idée de là où se sont produites ces fermetures. Il faudrait toutefois examiner de près l'emprise sur le marché des institutions qui sont restées, et les choix qui sont offerts aux consommateurs. S'il n'y a pas de choix, est-ce qu'on abuse des consommateurs? Les règles sont-elles suffisamment fortes pour veiller à ce que les succursales traitent avec équité la clientèle de ces quartiers et des zones rurales?

La coalition croit, essentiellement, que des petits monopoles locaux ont été ainsi créés au Canada, des petits monopoles qui peuvent facilement exploiter les consommateurs qui n'ont pas d'autres choix. Dans ce cas-là aussi, les lois sont pleines d'échappatoires quant à la divulgation, et quant à l'application des règles sur les ententes équitables.

Comme l'a signalé M. Lawford, les pénalités sont dérisoires : après l'augmentation, un maximum de 200 000 $. Je n'ai jamais entendu parler de l'imposition de la pénalité maximale actuelle de 100 000 $ à quelque institution financière que ce soit. Quand les banques ont des revenus supérieurs à 10 milliards chacune, le fait qu'on n'ait jamais infligé la pénalité maximale signifie qu'on n'a pas vraiment appliqué le règlement.

Toute l'histoire de la réglementation nous apprend, surtout pour les grandes organisations qui sont puissantes et lucratives, que s'il y a des échappatoires, peu de chance de se faire prendre et des pénalités assez faibles, les échappatoires serviront. Les institutions feront le calcul : s'il y a une chance sur mille d'être pris, et que la pénalité maximale est de 100 000 $, c'est comme s'il s'agissait d'une pénalité de 100 $. Une pénalité de 100 $ pour une institution qui fait plus de dix milliards de dollars par année, ce n'est rien. Ce n'est même pas la rançon des affaires, surtout lorsque l'institution a des millions de clients et peut facilement ajouter un ou deux dollars à ses frais de service pour récupérer non seulement ce 100 $, mais des millions de dollars par mois. Cela peut se faire très facilement, sans que le consommateur ait quelque recours que ce soit.

Ce qui est incroyable, c'est le retard du Canada par rapport aux États-Unis quand il s'agit de responsabilité des banques. Aux États-Unis, les banques sont exposées à une concurrence vive, même si les fusions l'atténuent. Pour certaines localités, l'emprise sur le marché est très marquée. Pourtant, aux États-Unis, ce qui compte, ce n'est pas le niveau de concurrence, mais le traitement équitable.

Il y a trente ans, on y a adopté le Community Reinvestment Act et d'autres lois qui exigent une divulgation détaillée de l'investissement du crédit de chaque banque et les dossiers de service de chaque succursale, pour chaque quartier, en fonction de la demande par des consommateurs de chaque catégorie. On y fait des examens réguliers de ces données et on apporte des correctifs, surtout en cas de fusion, de prise de contrôle ou d'expansion. En résumé, aux États-Unis, si vous êtes une mauvaise banque, vous ne pourrez pas croître, parce que vous seriez alors une grande banque mauvaise où davantage de clients seraient traités injustement. Nous sommes loin d'avoir pareil régime au Canada, même si nous n'avons que six grandes banques à surveiller, alors qu'il y en a des centaines aux États-Unis.

D'après l'ancien chef de la Federal Trade Commission, Robert Pitofsky, l'emprise sur le marché de nos grandes banques est extraordinaire. À son avis, les profits records des grandes banques canadiennes suffisent à prouver le manque de concurrence dans notre pays.

Que faut-il faire pour que le système soit efficace? Le projet de loi C-8 avait la demi-mesure des déclarations publiques de responsabilité, moins détaillées et analysées que les déclarations exigées aux États-Unis. Aux États-Unis, on donne une cote aux banques, régulièrement, et on exige des mesures correctives. Il nous faut des déclarations publiques de responsabilité plus détaillées. Elles doivent être émises annuellement, doivent être analysées et cotées par le BSIF et l'ACFC, faire l'objet d'audiences publiques comme il y en a aux États-Unis, où les consommateurs et les groupes communautaires peuvent faire part de leurs préoccupations relatives à l'iniquité dans le crédit, l'investissement et les services.

Parlons d'une pénalité qui serait encore plus efficace qu'un alourdissement de la pénalité pécuniaire. Quand on constate qu'une institution enfreint les lois financières fédérales, on devrait lui interdire de faire une offre pour les marchés publics du fédéral qui valent des dizaines de millions de dollars pour des services de cartes de crédit, de dépôts, et cetera. Ce serait une pénalité très efficace.

Au sujet de l'agence de réglementation actuelle, c'est encore une demi-mesure du projet de loi C-8 que la création de l'Agence de la consommation en matière financière du Canada. Cette agence a trop de pouvoirs discrétionnaires lorsqu'il s'agit de tenir secret le nom d'une institution fautive, et en a profité. L'ACFC a procédé en 2003 à une évaluation par client mystère pour vérifier les services de plus de 1 600 succursales bancaires. Elle a constaté que plus de 850 enfreignaient la loi. Aucune de ces succursales des institutions qui les contrôlent n'a été poursuivie ou mise à l'amende. Croyez-le ou non, on a refait l'exercice en 2005, mais sans repasser là où les résultats avaient été les pires en 2003. Il ne s'agit pas d'application efficace de la loi, mais d'indulgence envers les banques. Il faut exiger de l'agence qu'elle donne le nom de toute institution qui enfreint la loi, et cela, pour chaque infraction. Pourquoi? Il faut révéler le nom de l'institution parce que les consommateurs et les investisseurs ont le droit de le connaître. Tout le monde parle d'investissement éthique et responsable et encourage les sociétés à être plus responsables. Ceux qui investissent dans les institutions financière canadiennes ne savent rien de la façon dont elles respectent les lois. L'ombudsman doit être plus indépendant et disposer de pouvoirs exécutoires. Il s'agit de rééquilibrer le marché, en donnant aux consommateurs des pouvoirs égaux à ceux des institutions. Tous ceux qui travaillent pour les consommateurs vous diront qu'il faut travailler sur plusieurs fronts. Je consacre environ un huitième de mon temps à la responsabilité bancaire. Si on additionnait le temps que consacrent tous ceux qui défendent les droits des consommateurs au Canada, ça correspondrait à une personne à temps plein.

Les consommateurs paient pour les 100 lobbyistes à temps plein qui travaillent au nom des banques, des sociétés d'assurance et des fiducies. Ce sont les consommateurs qui paient les 15 millions de dollars consacrés aux annonces télévisées qui leur disent que tout va pour le mieux, que c'est leur argent, que la banque a été bâtie un client à la fois, que tout va bien et que tous sont traités avec équité et pour le mieux. Ce sont les consommateurs qui paient pour tout ça. Comment rééquilibrer le marché, pour qu'il soit plus juste? Il faut que les institutions financières aident le lobby des consommateurs, comme les consommateurs permettent l'existence du lobby des institutions financières. Cela pourrait se faire gratuitement pour les institutions financières. Votre comité, le comité des finances de la Chambre et le Groupe de travail sur les services financiers de 1998 avaient recommandé la méthode du dépliant pour la création de cette organisation. Cette recommandation a été faite en 1998 et près de dix ans plus tard, rien n'a été fait.

L'ACFC a été créée non pas pour défendre les consommateurs, mais comme agence d'application de la loi. Les consommateurs sont laissés à eux-mêmes lorsqu'ils appellent l'agence, mais pas les institutions qui disposent de lobbyistes et d'avocats pour réfuter tout ce que les consommateurs pourraient avoir à dire. Les consommateurs doivent pouvoir s'adresser à un organisme qui dispose de ressources suffisantes, qui est représentatif, et la méthode du dépliant est la voie à suivre. Cette méthode est employée de manière obligatoire dans quatre États américains. Elle provient de l'État de l'Illinois. Les services publics distribuent les dépliants une ou deux fois par année, et non pas tous les mois, avec les factures mensuelles des consommateurs.

Le président : Monsieur Conacher, veuillez présenter le document au greffier, quand vous aurez terminé.

M. Conacher : Dans ce dépliant, on apprend que le secrétaire d'État exige que ce message important au sujet de l'Office des citoyens, le Citizen Board, soit inséré dans l'enveloppe. Il s'agit simplement d'une enveloppe à cacheter, comme les revues canadiennes en employaient pour leurs abonnements. On y décrit le groupe et on invite les consommateurs à en faire partie pour une cotisation annuelle minime. Chaque consommateur reçoit le dépliant, puisque chaque consommateur reçoit une facture. Il n'y a qu'à insérer le chèque dans l'enveloppe, la cacheter et la renvoyer. Si on faisait de même au Canada, plus de 20 millions de clients de banques, de sociétés d'assurance et de fiducies canadiennes recevraient l'avis. Si seulement 1 p. 100 d'entre eux payaient leur cotisation, le groupe serait formé de 200 000 membres. Si la cotisation était établie à 40 $ par année, le groupe disposerait d'un budget de 8 millions de dollars, ce qui rééquilibrerait le marché. En ce moment, le budget cumulatif pour nous tous qui travaillons sur les questions bancaires est probablement de 100 000 $ par année. Ce n'est pas suffisant, devant la centaine de lobbyistes bancaires à temps plein qui ont 15 millions de dollars à dépenser ne serait-ce qu'en publicité télévisée. Cela ne coûterait rien ni au gouvernement, ni aux banques, sociétés d'assurance et fiducies puisque le groupe paierait pour l'impression des dépliants. L'insertion ne coûte rien de plus, une machine n'a qu'à faire une opération supplémentaire pour insérer le dépliant dans l'enveloppe. Déjà, nous recevons par courrier toutes sortes de choses avec nos relevés, nos factures de cartes de crédit et de services publics. De cette manière, le marché serait rééquilibré pour toujours. C'est une solution gratuite pour équilibrer le marché, qui donnerait aux consommateurs un recours financé par eux, géré par eux et destiné uniquement à les servir. Ainsi, si un consommateur avait un problème, l'avocat du groupe appellerait pour lui la succursale bancaire. Le consommateur n'aurait pas à appeler l'ACFC pour se faire dire que la Loi sur les banques ne protège pas les consommateurs dans ce domaine et que son seul recours, c'est l'ombudsman. Qui rémunère l'ombudsman? Ce sont les banques et les sociétés de fiducie. On peut en déduire que l'ombudsman n'a ni l'autonomie, ni le pouvoir exécutoire nécessaire. Il nous faut cette organisation et voilà la façon de la créer. C'est la solution à long terme à de nombreux problèmes relatifs au marché des institutions financières.

Je vous remercie de m'avoir donné cette occasion. Je sais que vous ne pouvez pas amender le projet de loi C-37, mais j'espère que vous entreprendrez une nouvelle étude du secteur. Une telle étude est nécessaire. Il s'est écoulé 10 ans depuis le groupe de travail MacKay. Nous devons mettre fin à un système à deux niveaux qui renferme tellement de brèches et de lacunes dans la divulgation des règles du traitement équitable. Il nous faut une mise en œuvre plus ferme et des pénalités plus sévères. Il nous faut un système efficace de reddition des comptes par les banques, comme les États-Unis l'ont fait il y a 30 ans.

Le président : Monsieur St-Amand, voulez-vous prendre la parole?

M. St-Amant : J'accompagne M. Lawford et je suis disposé à répondre aux questions des sénateurs.

Le président : Les organismes que vous avez mentionnés font partie de notre liste de témoins et nous leur demanderons de répondre à vos préoccupations. Je vous remercie de nous avoir donné ce témoignage stimulant et éclairant. Nous allons lire vos textes avec attention.

Le sénateur Meighen : Je crois que M. Conacher a effleuré ma question quand il a dit qu'à moins de vouloir vivre sans avoir en place une législation sur les banques, ce qui pourrait perturber le marché des capitaux, il serait difficile, étant donné la nécessité que ce projet de loi reçoive la sanction royale d'ici le 24 avril, d'y apporter le moindre amendement.

Je crois avoir entendu le témoin dire qu'à l'exception d'une ou deux améliorations qu'il aimerait voir apporter au projet de loi, il n'y trouve rien de très condamnable. Monsieur Conacher, vous ai-je bien entendu dire que, étant donné les contraintes de temps, un verre à demi ou au quart plein est mieux qu'un verre vide.

Peut-être M. Lawford pourrait-il nous parler du libellé de l'article 398 proposé.

M. Lawford : Nous aurions aimé que le projet de loi renferme davantage de changements structurels. Nous nous rendons compte que nous en sommes à l'étape du processus où nous sommes dans l'impossibilité de le faire, et nous nous sommes donc concentrés sur le texte du projet de loi afin de garantir d'obtenir les meilleurs amendements possibles pour le consommateur. Pour une raison quelconque, nous n'avons pas participé activement aux travaux qui ont débouché sur le projet de loi C-37.

Pour ce qui est du problème technique décelé par M. St-Amant, notre préoccupation à l'égard de l'article 398 proposé est que vous remplacez la jurisprudence et la science par ce qui ressemble à un simple changement. Nous voulions que les consommateurs aient la possibilité de prendre connaissance des documents papier s'ils se trouvent dans une situation où il y a eu contrefaçon ou un problème quelconque. Dans la version française, c'est réputé être un document officiel et il est difficile de s'en sortir. Dans la version anglaise, on dirait qu'il y a une échappatoire parce qu'il est possible de contester la présomption et de convoquer un graphologue expert pour contester l'authenticité de l'écriture. Ensuite, il y a possibilité de faire vérifier le document s'il existe encore. Dans la version française, il y a contradiction.

Le sénateur Meighen : Est-ce l'avantage d'avoir deux langues officielles? Vous pouvez choisir celle qui correspond le mieux à vos besoins.

M. Lawford : Je pense qu'un juge choisirait la version la plus avantageuse pour le consommateur, mais on ne sait jamais.

M. Conacher : C'est dans le cadre du projet de loi et si j'examine le passage pertinent du mémoire de CCI, l'article 34 sur la période maximale de retenue d'un chèque pourrait être modifié de façon à créer une certaine contrainte. C'est seulement un pouvoir réglementaire que l'on crée. On pourrait imposer une certaine contrainte aux pouvoirs de réglementation en disant, par exemple, que le règlement ne doit pas stipuler une période de retenue plus longue que le temps qu'il faut pour compenser le chèque, ce qui limiterait le pouvoir de réglementation.

Le sénateur Meighen : Là-dessus, monsieur Conacher, si je comprends bien, j'ai toujours pensé que la période de retenue aux États-Unis était généralement plus longue qu'au Canada. N'est-ce pas le cas?

M. St-Amant : Ce n'est plus le cas depuis la fin des années 1980. Comme vous le savez, le système bancaire américain est plus compliqué et il y a donc différentes règles.

Quand les chèques sont compensés dans la même région, la règle normale est que dans les deux jours, le montant du chèque doit être disponible et, dans la plupart des cas, un montant de 500 $, je crois, doit être mis à la disposition du consommateur immédiatement.

Le sénateur Meighen : Quand vous dites « la même région », s'agit-il d'une région de la Réserve fédérale?

M. St-Amant : Je le crois. Il faudrait examiner la loi de très près, mais si ma mémoire est fidèle, c'est à l'intérieur d'une région de compensation.

Le sénateur Meighen : Qu'arrive-t-il si ce n'est pas dans la même région de compensation?

M. St-Amant : Dans ce cas, le délai peut atteindre cinq jours. Vous devez tenir compte des cas où un chèque serait, par exemple, déposé à Hawaii et compensé dans les Îles Vierges, et c'est pourquoi les règles américaines sont un peu plus complexes que ce dont nous avons besoin au Canada.

Au Canada, nous avons seulement un article du règlement de l'ACP qui stipule qu'un chèque doit être renvoyé, au maximum, dans les deux jours à partir du moment où il arrive à un point, à la banque de compensation, où il peut être visualisé. Dans bien des cas, il peut s'écouler cinq ou sept jours avant que le chèque revienne, et la règle varie d'une banque à l'autre, selon l'endroit où le chèque est compensé. Nous croyons que le Canada peut faire mieux.

Le sénateur Meighen : La présentation électronique n'aiderait-elle pas à raccourcir le délai?

M. St-Amant : Ça devrait. Quant à savoir si cela se reflétera dans les périodes de retenue exigées par les banques, cela reste à voir. À l'heure actuelle, dans la plupart des cas, le délai est plus court que la politique en vigueur à la banque.

Je songe à la politique de la Banque nationale qui dit que, dans la plupart des cas, on rend les fonds disponibles dans les cinq jours, mais on se réserve le droit de prolonger ce délai, selon les besoins. Je répète qu'à mon avis, le Canada peut faire mieux.

Le sénateur Meighen : Que suggérez-vous comme délai maximum?

M. St-Amant : Dans la plupart des cas, surtout lorsque la présentation du chèque est électronique, on devrait être en mesure de compenser les chèques et de rendre les fonds disponibles en deux jours.

Le sénateur Meighen : Deux jours ouvrables?

M. St-Amant : Oui, et si le secteur peut prouver qu'il lui faut plus de temps, il devrait y avoir une disposition, comme c'est le cas aux États-Unis, exigeant qu'au moins une partie des fonds soit rendue disponible. Cela aiderait les consommateurs à faible revenu qui ont besoin de liquidité et qui pourraient donc faire affaire avec la banque au lieu de s'adresser à une entreprise d'encaissement de chèques.

Le président : Sur ce point, nous avons entendu des témoins à propos d'un autre projet de loi dont notre comité est saisi et qui porte sur les prêts sur salaire. À mon avis, la compensation des chèques est au cœur du problème. Monsieur Conacher, vous signalez que 10 p. 100 des consommateurs n'ont pas accès au système bancaire et doivent utiliser ce système de rechange.

Messieurs Lawford et St-Amant, si vous rédigiez un projet de loi visant à modifier la Loi canadienne sur les paiements, je serais disposé à le présenter à titre de projet de loi d'initiative parlementaire, si je suis convaincu qu'il peut être adopté. Je donne avis à l'association bancaire parce que ses représentants comparaîtront plus tard. Nous avons soulevé ce problème. Dans le projet de loi, on prend des mesures pour améliorer l'efficience de l'imagerie électronique. La question est de savoir si ce sera mis en œuvre assez rapidement pour aider les consommateurs sur ce point précis.

Nous sommes très conscients de ce problème. Si vous pouvez produire une ébauche de projet de loi, nous l'examinerons sérieusement et moi-même et peut-être certains de mes collègues en ferions un projet de loi d'initiative parlementaire visant à faire progresser le secteur.

J'espère que cela vous satisfait.

M. Conacher : Je veux mentionner deux autres dispositions qui sont mises en relief dans le mémoire de CCI et qui relèvent également du cadre établi par le projet de loi. Rien n'empêche le comité et le Sénat de le modifier et de le renvoyer.

Au sujet de l'article 36 et de la fermeture de succursales, il n'y a aucune raison qui empêche de procéder à un examen approfondi et obligatoire, avec divulgation du bilan des profits et pertes de la succursale, même si c'est seulement divulgué à l'ACFC comme mesure intérimaire, quoiqu'il faudrait que ce soit divulgué publiquement pour qu'il y ait examen public complet. Là encore, l'article sur les pénalités se trouve dans ce projet de loi et est tout à fait compatible au pouvoir législatif du comité sénatorial qui peut renforcer la pénalité et renvoyer le tout à la Chambre des communes, et l'on verra bien ce que la Chambre en dira.

Le sénateur Eyton : J'ai une observation complémentaire qui porte sur le délai de compensation et l'expérience au Canada et aux États-Unis. Mon expérience à cet égard est que le délai est beaucoup plus court au Canada qu'aux États-Unis, plus court de plusieurs jours. Il ne s'agit pas d'une transaction compliquée à l'extérieur d'une région ou même à l'intérieur des régions, mais aux États-Unis, je constate que la compensation d'un chèque peut prendre cinq, six ou sept jours.

Mon expérience habituelle en matière de compensation au Canada est qu'il faut peut-être deux ou trois jours, quoique je reconnais que la politique donne aux banques davantage de temps. Sur le plan pratique, le système de compensation tel qu'il existe aujourd'hui — oubliez les améliorations qui pourraient être apportées grâce à l'imagerie électronique des chèques — est meilleur que l'expérience que j'en ai en Europe. Tout au moins dans ce domaine d'activité, nos banques canadiennes se tirent bien d'affaire.

M. Conacher : Je ne mets pas en doute votre expérience, mais le projet de loi C-8 exigeait seulement que les banques divulguent publiquement leur politique en matière de retenue des chèques. Presque invariablement, elles disent que leur politique est une retenue de 10 jours. Une personne à faible revenu, et je ne parle pas seulement des assistés sociaux, qui se fait traiter de cette manière ne s'adresse pas à une banque. Cette personne n'a même pas de compte bancaire. Elle s'adresse plutôt à un comptoir d'encaissement des chèques et se fait escroquer encore plus qu'elle ne le serait par une banque. Le projet de loi C-8 exige seulement d'avoir une politique à cet égard, et ce n'est pas suffisant.

La période de quatre à sept jours fixée dans le projet de loi est excessive. Bien des gens ne peuvent pas passer une semaine entière sans avoir accès à leurs liquidités, pas seulement les assistés sociaux, mais aussi des gens à faible revenu. Votre comité pourrait exiger que la période de retenue ne soit pas plus longue que le temps qu'il faut pour compenser le chèque; autrement, c'est déjà institutionnalisé à cause de la fermeture des succursales et du système à deux niveaux. Vous ne progresserez jamais en direction d'un traitement juste pour tous les Canadiens si vous continuez à permettre qu'on retienne les chèques, car les banques vont utiliser cette possibilité comme obstacle. Les banques ne veulent pas faire affaire avec des gens qui n'ont pas d'argent à investir. Elles ont été protégées contre la concurrence étrangère et intérieure. C'est grâce à cette protection qu'elles sont aussi prospères et rentables. Les banques devraient être tenues de traiter tout le monde équitablement, de permettre à n'importe qui d'ouvrir un compte, et de prêter de l'argent à quiconque est solvable. Elles ne devraient pas pouvoir faire ce qu'elles veulent avec notre argent à n'importe quel prix.

Le sénateur Goldstein : Merci, messieurs, de vos excellents exposés.

Je suis perplexe devant le dépliant que vous proposez d'inclure avec les relevés bancaires ou les relevés de cartes de crédit. Combien d'États aux États-Unis l'exigent, reconnaissant que les banques sont essentiellement réglementées au niveau des États aux États-Unis?

M. Conacher : Cela s'est fait seulement dans le domaine des compagnies de services publics aux États-Unis.

Le sénateur Goldstein : Les banques ne l'ont pas fait du tout?

M. Conacher : Non. Des projets de loi ont été proposés, mais ils n'ont pas été adoptés.

Le sénateur Goldstein : Il n'y a aucun précédent à cet égard en Amérique du Nord?

M. Conacher : Pas dans le secteur bancaire, non, seulement dans le secteur des compagnies de services publics.

Le sénateur Goldstein : Au sujet de la compensation, la Loi canadienne sur les paiements stipule que les lettres de change et les chèques doivent être renvoyés par la banque sur laquelle la traite est tirée au plus tard le lendemain de la présentation à la banque et de l'envoi de l'effet. L'effet lui-même n'est plus présenté. C'est la liste elle-même.

Avec l'imagerie, il serait relativement facile pour les banques d'être « coincées », pour utiliser leur jargon ou perdre tout recours si un chèque est mauvais, contrefait ou mal rédigé. Je croyais que le ministre des Finances s'était engagé à faire en sorte que si le présent projet de loi était adopté, la période de retenue serait limitée à sept jours et serait ensuite limitée davantage à quatre jours au maximum à partir du moment où l'imagerie des chèques devenait la norme, ce qui est dans un avenir pas très éloigné.

Avez-vous des remarques à nous faire à ce sujet? Le délai de quatre jours poserait-il un problème étant donné que ceux qui y sont assujettis sont généralement ceux qui ont le plus besoin d'avoir accès immédiatement à leur argent?

M. St-Amant : La règle en vigueur se trouve en fait énoncée au paragraphe 8(2) de la LCP, et non pas dans la loi en tant que telle.

Si le Règlement qui sera adopté, mais que nous n'avons pas encore vu, fixe un délai maximal de sept jours, qui serait ensuite ramené à quatre jours, ce serait assurément une amélioration par rapport à la situation actuelle.

Le sénateur Goldstein : Vous savez, n'est-ce pas, qu'un engagement en ce sens a été pris?

M. St-Amant : Sauf le respect que je vous dois, cet engagement a-t-il été pris par l'actuel ministre ou par son savant prédécesseur? Je n'en suis pas sûr.

Le sénateur Goldstein : Il en a été question, et les détails ne sont pas importants.

M. St-Amant : Oui, ce serait bien, mais ce serait encore mieux qu'une règle en ce sens soit énoncée dans la loi, car le tout serait ainsi coulé dans le béton.

Le sénateur Goldstein : D'après ce que je comprends, le relèvement du plafond pour les prêts hypothécaires ne va pas à l'encontre de l'intérêt des consommateurs, bien au contraire. Au Canada, le coût du logement est tel que la plupart des gens n'ont pas les moyens de donner une mise de fonds de 25 p. 100, et ramener la mise de fonds de 25 p. 100 à 20 p. 100, comme il est proposé dans le projet de loi, me semble être une mesure dans l'intérêt des consommateurs. Vous semblez dire le contraire.

M. St-Amant : Nous sommes conscients de cet argument. Il n'est certainement pas sans mérite, mais il reste que les groupes consommateurs qui font du counselling budgétaire traitent avec des gens qui sont déjà endettés bien au-delà de leurs moyens. Nous nous inquiétons que l'effet sur le marché ne soit pas celui que nous souhaiterions, mais qu'il soit défavorable pour bon nombre de consommateurs. Nous nous sommes aussi rendu compte que, si le plafond a été relevé, c'est parce qu'il y aurait un avantage pour les banques à ce que les hypothèques s'étendent sur de plus longues périodes, ce qui leur permettrait de se conformer aux normes de fonds propres de Bâle II. Il ne faut pas l'oublier.

Nous aurions voulu que tous les aspects de la question soient examinés de près en collaboration avec toutes les parties intéressées afin d'être sûrs d'atteindre les objectifs visés. Notre inquiétude est que la mesure pourrait en fait conduire à un accroissement du nombre de faillites chez les consommateurs. Nous espérons que ce ne sera pas le cas, mais le risque est là. Comme mon collègue l'a dit tout à l'heure, quand nous voyons ce qui se passe sur le marché des prêts à risque aux États-Unis, nous croyons qu'il y a lieu de s'inquiéter.

Le sénateur Ringuette : Ma première question concerne le fait de passer de 75 p. 100 à 80 p. 100. Pour le Canadien moyen, l'achat d'un logement est son plus important placement; c'est aussi sa dette la plus importante. Nous devons certainement nous pencher sur l'incidence réelle de cette disposition.

Aucun de vous n'a parlé des prêts hypothécaires inversés. J'aimerais vous entendre là-dessus.

M. St-Amant : Disons que nous ne sommes pas sûrs de les aimer, c'est le moins qu'on puisse dire. D'après ce que j'en sais, le marché des prêts hypothécaires inversés n'est pas très important au Québec. Je ne suis pas vraiment en mesure de me prononcer de façon cohérente en me fondant sur l'expérience réelle. Malheureusement, mon expérience se limite au Québec, mais mes collègues pourront peut-être ajouter quelque chose.

M. Lawford : Le comité ne pourra pas en profiter, mais notre groupe, non pas la Canadian Consumer Initiative, mais le Centre pour la défense de l'intérêt public, doit entreprendre une étude sur l'ensemble du marché des prêts à risque pour le Bureau de la consommation. Nous y inclurons une section sur les prêts hypothécaires inversés, mais le rapport ne sera pas prêt à temps pour votre étude. Nous avons déjà fait un rapport, il y a de cela presque 15 ans, je crois, sur l'importance éventuelle de ce marché. Nous avons conclu qu'il pourrait prendre de l'ampleur et que cela ne serait pas quelque chose de bien. Je peux essayer de retrouver le rapport pour le remettre au comité, mais il est déjà pas mal périmé. Nous ne sommes pas en mesure de répondre à cette question à ce moment-ci.

Le sénateur Ringuette : Y a-t-il quelque chose dans le projet de loi au sujet des prêts hypothécaires inversés et du régime bancaire?

M. St-Amand : Non.

Le sénateur Ringuette : Il s'agit pourtant d'une menace croissante.

M. Lawford : Oui.

Le sénateur Harb : Merci de votre exposé. Mes deux collègues ont chacun posé une des questions que je voulais moi- même poser au sujet des 75 p. 100 qui passeraient à 80 p. 100, si bien qu'on pourrait assurer son prêt jusqu'à concurrence de 80 p. 100 plutôt que 75 p. 100. Si nous n'adoptons pas ce changement, pensez-vous que les consommateurs n'iront pas prendre une deuxième hypothèque, voire une troisième hypothèque dans certains cas? Vous semblez finalement vous contredire ici en disant que vous ne voulez pas qu'ils puissent obtenir une première hypothèque pouvant aller jusqu'à 80 p. 100, mais que vous ne voyez pas d'inconvénients à ce qu'ils prennent une deuxième et une troisième hypothèques.

Monsieur Conacher, votre cynisme à l'endroit des banques me laisse un peu perplexe. Sans vouloir entrer dans les détails, j'ai été intrigué de vous entendre dire que la part de marché que détiennent les grandes banques dans la plupart des régions du pays est plus élevée que dans la plupart des pays industrialisés.

Avez-vous fait des études qui vous ont amené à cette conclusion? Pourriez-vous nous donner des informations à l'appui de cette affirmation?

M. Conacher : C'est quelque chose qui est bien documenté, et qui a notamment été documenté par le groupe de travail MacKay qui s'est penché sur la concentration au niveau des trois grandes banques, comparativement aux autres pays de l'OCDE.

Ce qui n'a pas été fait, c'est une étude sur les monopoles locaux qui existent en raison de la commodité de l'accessibilité ainsi que de ce que les consommateurs considèrent comme étant de véritables choix pour eux. En 1998, le Bureau de la concurrence a réalisé une excellente étude sur les fusions bancaires, qui s'articulait surtout autour des conséquences pour les consommateurs. Le Bureau de la concurrence s'est aussi penché sur ce marché, mais il n'a pas examiné l'ensemble du marché parce qu'il se penchait sur certaines propositions de fusions bancaires en particulier.

C'est pourquoi nous réclamons une étude réaliste. Les représentants du secteur bancaire soutiennent que les services offerts par le Groupe PC constituent de la concurrence, mais ces services sont en fait des services de la CIBC. Les banques disent que les services offerts par des institutions comme ING constituent de la concurrence, mais il faut avoir un compte de banque avec une des banques pour pouvoir profiter des services bancaires d'ING. Elles soutiennent que les services offerts par les guichets sans nom ou génériques constituent de la concurrence. Il y a effectivement concurrence au niveau des emplacements, mais ces guichets ne font que faciliter l'accès à des comptes de banque établis. Ces soi-disant concurrents sont dans bien des cas des partenaires. C'est pourquoi il faudrait faire une étude sérieuse de la concurrence sur le marché, tant à l'échelle locale qu'entre les principaux produits et services offerts dans les différentes régions du Canada.

Le sénateur Harb : Ma dernière question concerne votre affirmation selon laquelle les banques canadiennes ne tiennent pas suffisamment compte du principe du quorum pour ce qui est de la reddition de comptes. Ne savez-vous pas que les banques sont la propriété de leurs actionnaires et qu'elles tiennent régulièrement des assemblées? Ne savez- vous pas que les syndicats, les caisses de retraite et les caisses de retraite des enseignants sont aussi des actionnaires des banques et que, chaque année, ces gens ont des assemblées et ont la possibilité, non pas seulement de voter, mais aussi de participer à ces assemblées?

En outre, les banques sont sous réglementation fédérale. Tout organe parlementaire qui a une certaine responsabilité en la matière pourrait, de temps en temps, se pencher sur les questions qui se posent pour ceux qui ont à traiter avec les banques. Nous avons également un organisme fédéral chargé de surveiller les banques.

M. Conacher : Je sais tout cela.

Le sénateur Harb : Ne pensez-vous pas que cela suffit?

M. Conacher : Non. Nous pourrions avoir une longue discussion sur l'état effectif de la démocratie chez les actionnaires au Canada, mais je ne vais pas m'engager dans ce débat-là.

Dans quelque catégorie que ce soit, nous avons de 20 à 30 ans de retard par rapport aux États-Unis en ce qui concerne la responsabilité effective des banques.

Le sénateur Massicotte : La réglementation est importante et la surveillance étatique aussi, mais la mesure la plus importante pour assurer que toutes les parties en cause sont traitées équitablement, c'est la concurrence. Je crois fermement que, quand on a une saine concurrence, le gouvernement n'a pas à intervenir.

Parlons de la concurrence qui existe au Canada. De toute évidence, vous pensez qu'elle n'est pas suffisante, et beaucoup de Canadiens partagent votre avis. Le projet de loi modifie, à deux endroits, la définition des « quasi- banques » et il accroît aussi les normes de fonds propres qui doivent être largement répartis. Ces deux amendements augmentent-ils la concurrence? Font-ils en sorte de faciliter l'arrivée au Canada d'acteurs financiers non canadiens et sont-ils appropriés? S'ils ne le sont pas, que proposeriez-vous pour faire en sorte que nous ayons une véritable concurrence au Canada afin de remédier aux nombreux maux dont vous avez parlé?

M. Conacher : Je ne crois pas qu'il y ait quoi que ce soit que vous puissiez faire qui permettra d'augmenter la concurrence effective, car je suis persuadé — et l'étude en profondeur que le Bureau de la concurrence a faite des fusions bancaires en 1998 l'a bien montré — que les Canadiens tiennent à avoir accès à une gamme complète de services bancaires à une succursale qui est facilement accessible et qui se trouve à proximité de leur lieu de résidence, de leur travail ou de leur école.

Personne ne voudra créer de ces succursales puisque les banques ont déjà la mainmise sur les meilleurs emplacements et que les dépenses d'infrastructure que cela entraînerait sont énormes. Aucune banque étrangère ne l'a fait. La seule qui ait des succursales est la HSBC, et elle a racheté ces succursales à une banque de l'ouest qui n'était plus viable.

Aux termes du projet de loi C-8, les caisses de crédit peuvent dorénavant se mettre ensemble pour former une caisse de crédit régionale, une banque coopérative. Reste à voir si elles le feront, mais 10 d'entre elles auraient pu se mettre ensemble il y a six ans de cela, en vertu du projet de loi C-8, et elles ne l'ont pas fait.

Les modifications qui ont été apportées relativement aux banques étrangères sont pour la plupart malavisées. Les banques étrangères ne sont autorisées à accepter que des dépôts de 150 000 $ ou plus. ING est arrivé sur la scène et a mis sur pied une banque virtuelle. Ainsi, les banques étrangères arrivent à intercepter des tonnes de capitaux de réserve, essentiellement des dépôts, qui seraient allés aux grandes banques, ce qui rend la tâche encore plus difficile à ces grandes banques qui s'efforcent de maintenir un réseau de succursales offrant une gamme complète de services dans tout le pays, services que veulent les Canadiens.

C'est ce qui explique sans doute en partie l'augmentation généralisée des frais bancaires. Les banques s'efforcent de maintenir ce réseau de succursales, mais les banques étrangères, étant donné la règle concernant les dépôts de 150 000 $ et la présence de ING, font leur entrée chez nous sans aucune infrastructure et elles sont donc en mesure d'offrir de meilleurs taux d'intérêt tout en profitant bien sûr de l'existence des banques. Elles prennent la crème de la crème.

Les mesures qui ont été prises jusqu'à maintenant ont été pour la plupart dommageables au consommateur moyen de services bancaires canadiens, en ce sens que les banques canadiennes tentent de s'adapter à cet écrémage, et il n'y a rien d'autre qu'on puisse faire qui pourra effectivement accroître la concurrence. Je suis désolé, mais c'est la réalité d'après moi.

Le sénateur Massicotte : Bien des gens sont d'accord avec vous pour dire qu'il serait très difficile pour un concurrent qui voudrait s'établir au Canada d'assumer les dépenses d'infrastructure nécessaires et que cela nuit à la concurrence.

M. Conacher : Personne ne l'a encore fait.

Le sénateur Massicotte : Vous devez reconnaître tout de même que les derniers amendements avaient été conçus pour accroître la concurrence. Il semble que, depuis deux ou trois ans, il y ait eu un accroissement considérable, mais il arrive un point où, par rapport à ce qu'on espérait voir émerger, la concurrence stagne.

M. Conacher : En effet.

Le sénateur Massicotte : Il y a quelques années de cela, l'Institut C.D. Howe avait dit que, pour contourner le problème que posent les dépenses d'infrastructure, la solution serait que toutes les banques partagent, à un coût raisonnable, le même réseau de communications électroniques. Autrement dit, le consommateur pourrait se présenter à n'importe quel guichet électronique pour retirer de l'argent, et il pourrait y effectuer non pas seulement des opérations simples, mais des opérations bien plus complexes. De toute évidence, les banques sont contre cette solution qui permettrait d'éliminer des obstacles importants. Je ne suis pas aussi pessimiste que vous en ce qui concerne la concurrence à l'échelle tant nationale qu'internationale. C'est ce qui à mon avis incite toutes les autres banques à bien se comporter.

Serait-il utile que nous allions jusqu'à modifier ainsi le réseau de prestation de services?

M. St-Amant : Il faudrait beaucoup de volonté sur la Colline pour que cela se fasse. C'est ce que nous constatons à l'heure actuelle pour ce qui est du débat sur les frais de guichet automatique. Cela n'intéresse aucunement les banques de permettre à d'autres institutions d'avoir accès à leur clientèle, quel que soit le réseau que vous envisagiez de créer.

À l'heure actuelle, les frais de service additionnels empêchent les consommateurs de traiter avec d'autres institutions. Fait intéressant, dans certains pays, on a déjà mis en place le type de réseau de services en commun dont vous parlez. Sur le plan technique, il serait tout à fait possible d'en faire autant au Canada. Manifestement, cela n'intéresse toutefois pas les banques.

J'aimerais revenir à votre première question et à un point qui a été soulevé par le sénateur Harb. En 1998, j'ai dressé une carte du réseau qui existe au Canada, et il y a deux ou trois choses qui en sont ressorties très clairement. Dans les quelque 2 500 localités canadiennes comptant une succursale qui acceptait des dépôts, il y avait tout au plus deux succursales. Le plus souvent, il s'agissait d'une caisse de crédit, d'une caisse populaire et parfois d'une banque. Dans la plupart des localités, le niveau de concentration était très élevé.

La carte montre que les banques ont tendance à se grouper dans certains endroits. Ainsi, dans l'est de la Nouvelle- Écosse, il y a beaucoup de succursales de la Banque Royale et de la Banque de Nouvelle-Écosse, mais il n'y a pratiquement aucune succursale de la CIBC. À Pictou, par exemple, il serait impossible d'ouvrir un compte à la CIBC.

Il y a beaucoup de concentration aux niveaux local et régional, mais comme l'a dit M. Conacher, cela nuit à la concurrence sur le marché. Ce serait bien si les réseaux électroniques pouvaient apporter une solution, mais je ne pense pas que cela puisse se faire dans un avenir rapproché.

Le sénateur Massicotte : Bien des experts en matière de concurrence soutiennent que la concurrence est très vive dans le secteur bancaire des placements car la plupart des entreprises peuvent choisir d'aller faire affaire avec une banque d'investissement aux États-Unis. Les étrangers investissent énormément dans les compagnies de cartes de crédit. Seriez- vous d'accord pour dire que les deux grandes lacunes potentielles de cette concurrence sont les petites entreprises et les particuliers qui ne vivent pas dans des agglomérations urbaines? Seriez-vous d'accord pour dire que ce sont là les deux principales sources d'inquiétude?

M. St-Amant : J'ajouterais les quartiers urbains à faible revenu à la liste des endroits dont les banques sont absentes, mais je suis d'accord avec le résumé que vous faites.

[Français]

Le sénateur Biron : Ma question a déjà été posée par les sénateurs qui m'ont précédé, mais je voudrais revenir quand même sur la question des prêts garantis de 80 p. 100. Évidemment, cela va laisser moins de marge de manœuvre pour l'emprunteur si jamais il venait à rencontrer des difficultés pour contracter une hypothèque de second rang.

Autre chose, en diminuant de 5 p. 100, cela augmentera le crédit et c'est une mesure qui pourrait être inflationniste. Déjà actuellement, il y a une spéculation dans le domaine immobilier. Aux États-Unis, au moment où le prêt est accordé, 50 p. 100 des intérêts peuvent être capitalisés. On voit dans les journaux qu'actuellement aux États-Unis plusieurs prêteurs immobiliers sont en difficulté, mais on disait qu'il n'y avait pas de danger au Canada justement parce qu'on demandait 25 p. 100.

M. St-Amant : Notre appréhension, effectivement, c'est que la question du crédit hypothécaire est complexe. Il est important de l'envisager dans son ensemble. Comme certains de vos collègues et vous-même l'avez noté, il y a toute la question des deuxième et troisième hypothèques, qu'il faut aussi prendre en compte, c'est vrai. Si on simplifie le crédit hypothécaire bancaire, on crée quand même une situation où si une personne est en difficulté avec son créancier principal — la banque —, cette personne perd son domicile. Si jamais — et ce n'est pas impossible, par ailleurs — on se retrouve dans le marché canadien ou dans certains marchés régionaux avec une diminution importante de la valeur des immeubles — ce qui pourrait également se produire, on a eu une bulle immobilière importante mais elle peut éventuellement crever —, et si les banques commencent à devoir reprendre possession de nombreuses résidences parce qu'elles ont consenti des prêts garantis à 80 p. 100, c'est aussi la situation financière de nos banques qui pourrait, à terme, devenir problématique.

Pour des banques régionales, comme la Banque nationale ou la Banque Laurentienne, des difficultés importantes dans le marché résidentiel québécois pourraient avoir des conséquences sérieuses. C'est tout cela qu'il faut prendre en compte avant de décider qu'une augmentation à 80 p. 100 serait la meilleure solution. C'est peut-être la meilleure décision, en bout de course, mais il faut vraiment y réfléchir attentivement avant de conclure que c'est le cas et de prendre en compte les intérêts de tout le monde.

[Traduction]

Le sénateur Eyton : J'ai beaucoup aimé votre exposé, et j'y ai relevé beaucoup de points qui continueront à être valables. Mais j'ai été frappé de constater à quel point vos remarques se fondent sur ce qu'était la réalité bancaire il y a 10 ans. Le secteur bancaire évolue rapidement. Par exemple, les cartes de crédit que nous avons aujourd'hui, où figure le nom du détenteur sans aucune autre forme d'identification ou presque, seront d'après moi chose du passé dans cinq ou dix ans.

Les opérations bancaires au détail se feront pour la plupart sur Internet. Internet permet également de bien vérifier l'identité, grâce à un NIP et à une photo d'identification, ce qui ne serait pas possible autrement. Le service pourrait donc être offert à tous les Canadiens où qu'ils vivent, dans des petites villes ou dans des grands centres urbains. Ainsi, le réseau de succursales dont vous avez parlé et sur lequel vous avez fondé en partie votre analyse était peut-être pertinent autrefois mais il l'est moins aujourd'hui et il ne le sera plus guère dans 10 ans.

La réalité bancaire, dans tous les pays du monde, est en train de changer, et certaines de vos remarques me semblent périmées.

M. St-Amant : Je ne suis pas d'accord. Les banques constatent que le nombre de clients qui font leurs opérations bancaires sur Internet est en train de plafonner. Il continue à augmenter, mais bien moins rapidement qu'il le faisait il y a cinq ans. Les banques constatent en fait que leurs clients, comme nous le leur disons depuis 10 ans, veulent se rendre dans leur succursale pour effectuer leurs opérations bancaires. Fait intéressant, la TD Canada Trust a entrepris une vaste campagne publicitaire qui ne mise aucunement sur les services par Internet. Elle annonce ses heures de service qui sont plus longues que celles de n'importe quelle autre institution financière canadienne. Les institutions financières se rendent compte que leurs consommateurs préfèrent continuer à se rendre dans leur succursale; c'est un fait bien documenté.

Vous n'avez qu'à consulter les derniers rapports annuels des diverses banques pour constater que le nombre de succursales a cessé de diminuer. C'est là un aspect. Deuxièmement, il y a un certain nombre d'opérations qu'on ne peut pas faire sur Internet, ne serait-ce qu'obtenir de l'argent liquide.

Le sénateur Eyton : On peut le faire en une minute.

M. St-Amant : Oui, mais on ne peut pas obtenir d'argent liquide sur l'ordinateur. Cela nous amène à parler des paiements et de l'absence de cadre juridique. Je suis d'accord avec vous pour dire que les banques s'engagent dans cette voie et nous voyons cela d'un bon œil, mais nous sommes persuadés par ailleurs qu'il nous faut un cadre pour que le tout le monde soit bien protégé.

Pour ce qui est de la possibilité de vérifier l'identité des gens de manière sécuritaire sur Internet, si vous trouvez un moyen de faire cela de façon vraiment sécuritaire, en ayant des NIP plus sécuritaires — ils ne le sont pas du tout à l'heure actuelle —, obtenez un brevet et vous deviendrez milliardaire.

Le sénateur Eyton : Je l'ai vu.

Le président : La discussion est intéressante et, de toute évidence, les banquiers réagiront à toutes vos questions.

Je tiens à vous remercier sincèrement d'avoir posé de si nombreuses questions auxquelles les témoins qui comparaîtront devant nous répondront, nous l'espérons, sinon nous les leur poserons.

Il y a deux choses dont j'aimerais parler très brièvement. Notre étude initiale, vous vous en souviendrez, portait sur les consommateurs. Monsieur St-Amant, vous nous avez été très utile pour cette étude. Je n'en suis pas sûr, mais je crois que M. Conacher y avait participé lui aussi.

M. Conacher : Non, je n'avais pas le huitième de mon temps à ce moment-là.

Le président : Quoi qu'il en soit, le témoignage que vous nous avez donné précédemment a été très utile, et cette étude constitue pour nous une référence importante. Nous la poursuivons ici en fait. Nous ne laissons pas de côté la protection des consommateurs. C'est une question qui continue à nous intéresser, comme vous pouvez le constater.

À la suite de votre témoignage et de celui d'autres personnes, beaucoup des modifications que nous avions recommandées dans notre étude ont été mises en œuvre dans l'actuel projet de réforme bancaire, notamment l'idée de faire progresser plus rapidement l'imagerie électronique afin d'améliorer l'efficience, l'accessibilité et les coûts pour les consommateurs.

J'aimerais vous entendre très rapidement sur deux points. Premièrement, les changements que les banques apportent de façon unilatérale à leurs frais de service sont injustes. Dites-nous brièvement comment nous pourrions nous attaquer comme il se doit à cette question. Ce que vous avez recommandé, c'est qu'il y ait un préavis. C'est un peu ce qui se fait quand il y a un changement au cadre réglementaire pour un secteur donné. Il y a au moins un préavis qui est donné du changement, on explique aussi les raisons qui justifient le changement, et c'est seulement après que le changement est mis en œuvre.

Est-ce là ce que vous nous recommandez? Devrions-nous recommander aux banques de faire cela avant qu'elles ne décident de façon unilatérale d'apporter un changement au compte d'un client en augmentant les frais de service, nous recommandez-vous qu'il y ait un délai de préavis? Est-ce là votre recommandation?

M. St-Amant : C'est sûr que cela aiderait. Au moins, les gens seraient informés et auraient plus de temps pour voir ce que d'autres institutions ont à leur offrir; cependant, le problème qui se pose ne concerne pas que le secteur bancaire. Quand un client conclut une entente avec une banque ou avec un fournisseur de services de téléphone cellulaire, et cetera, l'entente précise que le consommateur est lié par les conditions qui y sont énoncées. Le fournisseur peut modifier ses conditions comme bon lui semble.

Le président : Ce n'est pas un contrat.

M. St-Amant : C'est vraiment énervant tout cela. Nous sommes censés avoir un contrat.

Le président : Nous disons qu'il ne s'agit pas d'un contrat, qu'il s'agit en fait d'une forme de contrat, mais pas d'un contrat qui lie les deux parties.

Le deuxième point qui me préoccupe est celui des frais de guichet automatique. J'aimerais vous entendre là-dessus parce que cela soulève toute une multiplicité de questions. Je me sers très souvent de guichets automatiques aux États- Unis; c'est la seule opération mécanique que je peux mener à bien rapidement et de manière efficiente. Je constate que, dans l'ensemble, les frais aux États-Unis sont bien plus élevés qu'au Canada, qu'il s'agisse de guichet sans nom ou de guichet bancaire automatique.

D'après l'autre Chambre, les frais de guichet automatique sont scandaleux au Canada par rapport aux États-Unis. Qu'en pensez-vous?

M. Conacher : Je ne pense pas que cela soit pertinent. Ce qui nous intéresse, c'est ce qu'il en coûte à nos banques pour assurer ces services et ce que nos banques réalisent comme bénéfices. Le seul moyen de répondre à la question serait de faire faire une vérification indépendante qui se pencherait sur tous les frais pour les 15 dernières années, pas seulement sur les frais de guichet automatique.

Le président : Si j'en parle, c'est parce que vous avez dit qu'il y a plus de banques aux États-Unis et qu'il y a donc plus de concurrence, ce qui devrait faire baisser les coûts. Il y a effectivement plus de banques aux États-Unis, mais il semble que les frais de guichet automatique y sont plus élevés.

M. Conacher : La TD a renoncé à ces frais de service additionnels aux États-Unis à cause de la concurrence. Les banques ont toutes doublé leurs frais en 2000-2001. Elles exigeaient des frais d'Interac de 1,50 $, puis elles ont ajouté des frais de service additionnels allant de 1 $ à 1,50 $ ou même plus dans certains endroits. Et s'il y a de la concurrence, comment se fait-il qu'il n'y a pas une seule banque qui ait réduit ses frais depuis six ans?

Comme elles l'ont dit dans un article du Globe and Mail du 22 février, si on les oblige à réduire ces frais, elles ne feront qu'augmenter les frais pour d'autres services. Préférez-vous des frais transparents ou des frais cachés?

Le président : Nous avons lu cet article avec beaucoup d'intérêt.

M. Conacher : La seule solution, c'est de faire faire une vérification indépendante. S'il y a de nouveaux frais qui sont exigés, il faudrait qu'il y ait une vérification qui montre qu'ils sont justifiés. Les banques assurent des services essentiels. Lorsque d'autres entités qui assurent des services essentiels, comme le chauffage et l'électricité, veulent augmenter leurs frais, elles doivent se présenter devant une commission. Les banques devraient être tenues de faire de même.

Le président : C'est noté. Je vais poser les questions que vous avez soulevées aux témoins qui vous suivront. Nous espérons qu'ils pourront y répondre parce que vous avez fait des affirmations graves. Je ne dirais pas que ce sont des allégations, mais vous avez soulevé bon nombre de points provocateurs, qui exigent une réponse. Si les autres témoins ne répondent pas, nous allons leur poser directement ces questions.

Le sénateur Angus : Excusez-moi, je crois que M. St-Amant voulait réagir à ce dernier point.

M. St-Amant : J'aurais une courte remarque à ajouter.

Le président : Le sénateur Angus comprend mieux que moi vos expressions faciales.

M. St-Amant : Nous avons travaillé ensemble il y a 15 ans chez Stikeman Elliot.

Le sénateur Angus : Oui, une organisation axée sur la défense des consommateurs.

Le président : Pas de publicité, je vous en prie.

M. St-Amant : Outre ce qu'a dit M. Conacher, il ne faut pas oublier que les frais de service additionnels constituent en fait pour les banques un moyen de dissuader la concurrence. Elles obligent ni plus ni moins ou invitent le consommateur à utiliser leur réseau bancaire à elles. C'est là un autre aspect de la question qu'il ne faut pas oublier.

Le président : Merci beaucoup. Encore une fois, nous nous sommes laissés aller. Nous avons laissé les témoins suivants pour le prochain créneau horaire. Si vous voulez bien quitter vos places, nous allons demander aux nouveaux témoins de prendre place.

Nous sommes là aujourd'hui parce que, dans son plan budgétaire de 2006, le gouvernement fédéral a prolongé de six mois, jusqu'au 24 avril, le délai de temporarisation. Cela ne nous donne pas beaucoup de temps, parce que l'autre Chambre a été trop paresseuse et trop lente pour nous envoyer le projet de loi. Je tiens à dire cela parce que j'ai lu aujourd'hui dans le National Post que nous sommeillons ici. Nous ne sommeillons pas; nous sommes bien alertes et nous travaillons. La Chambre des communes ne travaille pas assez vite, et c'est pourquoi nous avons reçu le projet de loi aussi tard. Nous sommes là pour faire notre travail, et nous tenons à souhaiter la bienvenue à M. Callon et à Mme Murray, de l'Agence de la consommation en matière financière du Canada, ainsi qu'à Mme Dixon, du Bureau du surintendant des institutions financières Canada.

Le sénateur Angus : Vous voudrez peut-être prendre note du fait que les collègues de M. Callon étaient ici hier et qu'il a raté une journée extraordinaire.

Jim Callon, commissaire intérimaire, Agence de la consommation en matière financière du Canada : On m'a fait un rapport complet. Merci.

[Français]

J'aimerais remercier les membres du comité d'avoir invité l'Agence de la consommation en matière financière du Canada à s'adresser à vous aujourd'hui. Vu le peu de temps dont nous disposons et à la demande du président, je serai le plus bref possible. Ce matin je vous parlerai du mandat et du rôle de l'Agence dans le contexte du projet de loi C-37. Ensuite, je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

[Traduction]

Le mandat de l'ACFC, qui est énoncé dans la Loi sur l'Agence de la consommation en matière financière du Canada, peut se résumer ainsi : protéger et informer les Canadiens. L'ACFC protège les Canadiens en faisant respecter la loi, en s'attaquant aux problèmes liés aux pratiques de l'industrie et en cherchant à apporter des améliorations sur le marché, dans l'intérêt du public. Nous veillons à ce que les institutions financières s'acquittent de leurs obligations envers les consommateurs, conformément aux lois qui régissent les institutions financières fédérales. Lorsqu'une mesure de conformité doit être prise, elle peut être bénéfique pour des centaines de milliers de consommateurs. En tant qu'organisme de réglementation des pratiques du secteur, notre but essentiel est de favoriser la variété des options pour le consommateur et la concurrence sur le marché.

Lorsque le Parlement a créé l'Agence de la consommation en matière financière du Canada, il en a profité pour consolider le cadre de protection des consommateurs pour y inclure le règlement des plaintes des consommateurs et les questions de recours. La création de divers services de médiation répondait — en partie — au souhait du Parlement que toutes les institutions financières sous réglementation fédérale adhèrent à un organisme indépendant de règlement des différends auquel seraient renvoyées les plaintes non réglées des consommateurs.

Lorsque les consommateurs s'adressent à nous, nous leur donnons les outils et l'information dont ils ont besoin pour régler la question qui les préoccupe. Et les consommateurs qui communiquent avec l'agence à propos d'une plainte contre une institution financière sont encouragés à enregistrer leur plainte auprès de l'agence. Nous l'examinerons du point de vue de la conformité. Et surtout, nous les informons du processus de traitement des plaintes de leur institution, pour que leur plainte puisse être réglée.

Aux termes de son mandat pour l'éducation des consommateurs, l'ACFC informe les consommateurs au sujet de leurs droits et responsabilités lorsqu'ils font affaire avec les institutions financières. Nous fournissons aux Canadiens des renseignements objectifs en temps opportun pour les aider à comprendre les produits et les services financiers communs et à magasiner pour se les procurer. Selon nous, des consommateurs informés et actifs contribuent à la concurrence dans le marché canadien.

Des représentants de l'ACFC se sont présentés devant vous hier et ils vous ont parlé du programme d'éducation des consommateurs de l'agence. Par conséquent, pour rester bref, je ne m'étendrai pas plus longtemps sur la question, mais je me ferai un plaisir de répondre à vos questions concernant notre programme.

J'aimerais toutefois revenir sur le travail très important que le comité a accompli quant aux questions de consommation au sein du secteur des services financiers. Votre rapport de 2006 contient des recommandations très précises visant à améliorer la protection et l'information des consommateurs de produits et de services financiers, dont bon nombre s'adressent précisément à l'ACFC.

Je suis heureux de vous laisser savoir que, grâce aux activités permanentes de l'agence — et grâce aux nouvelles initiatives inscrites dans son plan d'activités 2007-2009 — nous sommes bien placés pour donner suite aux recommandations du comité qui relèvent de notre mandat. De plus, comme l'a annoncé le ministre des Finances plus tôt cette semaine, l'ACFC jouera un rôle d'importance dans l'appui des efforts en vue d'accroître les connaissances financières des consommateurs partout au pays. Le travail effectué par votre comité nous sera grandement utile à cet égard. L'appui et l'intérêt que vous avez manifestés à l'égard de l'éducation des consommateurs et vos travaux sur les questions de consommation dans le secteur des services financiers contribueront à notre travail à mesure que nous progresserons.

Enfin, j'aimerais dire quelques mots au sujet du rôle de l'ACFC dans le cadre du projet de loi C-37. Il incombera à l'agence d'exécuter — dans le cadre de son mandat en matière de conformité — tous les changements qu'il est proposé d'apporter au cadre législatif et réglementaire en vigueur. Monsieur le président, j'aimerais souligner que — dans le cadre de son mandat général concernant l'éducation des consommateurs — l'ACFC conservera une approche proactive pour tenir les consommateurs au courant des obligations et des droits nouveaux ou modifiés qui découleront des changements apportés au cadre législatif et de la revue législative dans son ensemble.

[Français]

En conclusion, permettez-moi de vous remercier de nous avoir donné l'occasion de prendre la parole devant le comité. Je me ferai maintenant un plaisir de répondre à vos questions.

[Traduction]

Julie Dickson, surintendante intérimaire des institutions financières, Bureau du surintendant des institutions financières du Canada (BSIF) : Merci et bonjour, monsieur le président et membres du comité.

[Français]

J'aimerais tout d'abord remercier le comité d'avoir invité le Bureau du surintendant des institutions financières Canada à se présenter ici aujourd'hui pour contribuer à l'examen du projet de loi C-37.

Le Bureau du surintendant des institutions financières Canada (BSIF) est l'organisme de réglementation prudentiel des institutions financières fédérales. Le terme « prudentiel » signifie que nous nous préoccupons de la sûreté et de la viabilité des institutions financières, contribuant ainsi à la stabilité globale du système financier. Notre mandat ne s'étend pas aux comportements sur le marché ou aux questions touchant les consommateurs, qui relèvent d'autres organismes fédéraux ou provinciaux.

[Traduction]

Bref, le BSIF surveille les institutions financières fédérales pour s'assurer qu'elles sont en bonne santé financière et qu'elles se conforment aux lois qui les régissent. Nous sommes tenus d'aviser sans délai les institutions financières de toute lacune importante qui nuit à la sûreté et à la stabilité, et de prendre ou de forcer la direction ou les conseils d'administration à prendre des mesures pour corriger la situation sans tarder. Nous appuyons aussi l'adoption de politiques et de procédures conçues pour faciliter le contrôle et la gestion des risques, et surveillons et évaluons les enjeux systémiques et sectoriels susceptibles de nuire aux institutions financières.

Les examens législatifs menés à intervalles réguliers permettent de veiller à ce que les lois canadiennes demeurent propices à l'efficacité, à la concurrence et à la sûreté du secteur des services financiers. Dans le cadre de tout examen législatif, le BSIF cherche à savoir : premièrement, si les modifications législatives proposées pourraient accroître les risques que courent les institutions financières, entraînant d'importantes préoccupations d'ordre prudentiel; deuxièmement, si la loi est claire (parce que nous devons assurer l'application de la plupart des dispositions de la législation); troisièmement, si le BSIF est investi des pouvoirs dont il a besoin pour intervenir lorsque la situation l'exige (p. ex., y aurait-il lieu d'améliorer la trousse de surveillance prudentielle); et, quatrièmement, si le fardeau de la réglementation peut être éliminé lorsqu'il est clair que les exigences législatives qui pouvaient être nécessaires à un moment donné ne le sont plus d'un point de vue prudentiel.

Selon nous, le projet de loi C-37 n'accroît pas les risques que courent les institutions financières que nous réglementons. D'ailleurs, le Canada dispose déjà, grâce aux modifications apportées à la suite d'examens législatifs antérieurs, d'outils de surveillance prudentielle conformes aux normes internationales établies dans le but d'assurer la solidité des régimes de réglementation. Ainsi, le BSIF n'a pas cherché à faire adopter de nouvelles mesures de surveillance prudentielle importantes dans le cadre du présent examen.

Toutefois, plusieurs éléments du projet de loi C-37 nous aideraient à être plus efficaces parce qu'ils permettraient de clarifier certains aspects des diverses lois dont nous assurons l'application et élimineraient certaines exigences législatives qui n'étaient plus jugées utiles, ce qui réduirait les modalités administratives et le fardeau de la réglementation.

[Français]

La performance de l'économie canadienne repose sur un cadre de réglementation solide et efficace qui a toute la confiance des Canadiens et des intervenants à l'étranger. Selon le Bureau du surintendant des institutions financières Canada, l'adoption du projet de loi C-37 contribuerait à bâtir cette confiance.

[Traduction]

Je serais heureuse de répondre aux questions que les membres du comité pourraient avoir.

Le sénateur Angus : J'aimerais poser ma question à M. Callon. Nous avons été favorablement impressionnés par vos publications, lors de vos diverses comparutions devant notre comité. Notre président m'a toutefois signalé une anomalie, dans votre document intitulé Protéger les consommateurs et Informer les Canadiens où vous brossez un portrait de l'ACFC et de ses fonctions. À la page 3, il est indiqué :

D'octobre 2001 au 31 mars 2006, le commissaire de l'ACFC a identifié 120 violations à la loi, commises par des institutions financières, et 47 cas de non-conformité aux engagements publics et aux codes de conduite.

Il est également indiqué, en caractères gras :

Dans la totalité des cas de violation, les institutions financières ont pris des mesures correctrices pour se conformer, à l'avenir, aux dispositions visant les consommateurs.

Je crois que vous étiez présent quand M. Conacher a témoigné au nom de la Coalition canadienne pour le réinvestissement communautaire.

M. Callon : J'ai effectivement entendu les dernières minutes de l'intervention.

Le président : Je me procurerai un exemplaire de la documentation de la CCRC, pour que le témoin puisse répondre.

Le sénateur Angus : M. Conacher comparaît fréquemment devant le comité et nous trouvons qu'il cerne bien les questions qui préoccupent les consommateurs de produits et services financiers. Dans son exposé, il a consacré une partie à l'ACFC et, si j'ai bien compris ce qu'il disait, l'ACFC a effectué une enquête avec clients mystères en 2003, au cours de laquelle elle a vérifié dans plus de 1 600 succursales bancaires si on respectait la Loi sur les banques dans des domaines clés de la protection des consommateurs. Il énumère les banques et indique que 57 p. 100 manquaient à l'obligation que leur fait la loi d'afficher l'information sur les taux d'intérêt pour les comptes; deuxièmement, 49,6 p. 100 des succursales manquaient à l'obligation d'avoir une politique claire et connue du public sur la retenue des fonds déposés par chèque; et, troisièmement, 31,4 p. 100 des succursales manquaient à l'obligation de rendre publiques leurs déclarations annuelles. La liste se poursuivait.

Il a ajouté que l'enquête ne comprenait pas de vérification sur l'obligation d'ouvrir un compte de banque, et cetera. Il conclut en signalant un fait incroyable : votre prédécesseur n'a pas sanctionné les plus de 800 succursales ayant contrevenu à la Loi sur les banques, ni entamé de poursuites contre elles.

Il semble y avoir un écart majeur entre ce que vous dites et ce qu'il dit. Quels sont vos commentaires, s'il vous plaît. D'après eux, vous avez tous les outils voulus mais ne faites rien. D'après vous, vous avez les outils voulus et vous faites ce qu'il convient de faire.

M. Callon : Ce qui nous intéresse, c'est d'avoir des résultats — pas nécessairement de frapper fort sur les banques et d'entamer des poursuites judiciaires. Aussi longtemps que nous pouvons obtenir des résultats, grâce aux pouvoirs et à l'autorité législative dont nous disposons, c'est ce que nous souhaitons. Si nous pouvons éviter les poursuites judiciaires et les appels devant les tribunaux, si nous pouvons obtenir des résultats sur le marché aussi rapidement que possible, c'est ce que nous nous efforcerons de faire.

Nous avons à l'occasion rendu des noms publics, quand nous estimions n'avoir pas d'autre choix. Toutefois, dans nos contacts avec le secteur des institutions financières, nous comptons utiliser des mesures dont nous a doté le Parlement. En 2001, le Parlement nous a accordé toute une gamme de pouvoirs pour faire respecter la loi, selon les situations.

Nous pouvons rédiger des accords de conformité, ce que nous avons fait par le passé. M. Conacher évoque quant à lui le processus juridique de constatation d'une violation, d'imposition d'une amende et, éventuellement, de publication du nom des contrevenants.

Une enquête avec des clients mystères n'est pas une enquête juridique. Pour aller devant les tribunaux, nous utilisons nos pouvoirs. Une enquête de ce type n'est pas le mécanisme à utiliser pour étayer nos allégations de violation de la loi.

Mais elle donne à l'agence une bonne idée des problèmes qui existent sur le marché. Ces enquêtes avec clients mystères sont conçues à cet effet. Nous avons effectué deux ou trois de ces enquêtes au cours des dernières années. Ensuite, nous nous réunissons avec les institutions financières et nous leur disons qu'il existe ce type de problème, d'après nos constatations. Nous précisons que nous voulons voir les problèmes réglés, et ce, dans un temps raisonnable.

Nous abordons la question du point de vue du secteur dans son ensemble, afin de ne pas devoir nous adresser à chaque banque et de ne pas avoir à traiter la question plainte par plainte. Nous pouvons obtenir des résultats plus rapides et plus clairs sur le marché en utilisant les autres pouvoirs dont nous a doté le Parlement.

Comme l'indiquent les autres publications, c'est une méthode à laquelle nous avons dû avoir recours dans environ 120 cas de violation et pour une ou deux publications. C'est un outil dont nous avons besoin dans notre attirail, indubitablement, mais ce n'est pas le seul dont nous disposons.

Le sénateur Angus : En d'autres termes, vous ne voudriez pas que le comité reste sur l'impression que vous n'utilisez pas les outils à votre disposition pour corriger les violations.

M. Callon : Le message que je voudrais faire entendre est que nous obtenons des résultats, en ce qui concerne le respect de la loi.

Le président : Vos pouvoirs pour faire respecter la loi sont-ils suffisants?

M. Callon : Oui.

Le président : Êtes-vous satisfaits des pouvoirs dont vous disposez?

M. Callon : Oui.

Le sénateur Angus : Nous parlions hier à vos collègues des prêts sur salaire. C'est une question qui nous préoccupe beaucoup. Avez-vous des suggestions?

Vos collègues estimaient que cela ne relevait pas de leur compétence ni de leur mandat, mais cela touche toutefois beaucoup les consommateurs. C'est un domaine dont les institutions financières, qui sont incluses dans votre mandat, se sont retirées. Ce secteur a surgi pour combler un vide.

Je vais vous poser la question, madame Dickson, ainsi qu'au BSFI et à tous nos témoins. J'aimerais solliciter vos contributions, vu que la question nous préoccupe et que nous voulons faire ce qui s'impose.

M. Callon : Nous sommes pleinement conscients des grandes préoccupations du Sénat dans ce domaine.

Comme mes collègues, nous respectons notre mandat : nous sommes une agence de réglementation, nous faisons respecter des lois, mais nous n'élaborons pas de politiques pour le gouvernement. Nous avons un rôle de formation. Nous comptons parmi les organismes qui, en 2001, ont informé le Parlement de l'existence d'un problème. Nous l'avons fait par le biais de notre rapport annuel, qui nous permet d'informer les parlementaires et les décideurs de problèmes qui nous préoccupent — c'est un autre outil dans notre attirail. Nous avons donc exprimé cette préoccupation il y a cinq ans, et cela s'est traduit, je crois, par des entretiens des décideurs avec Industrie Canada, les provinces, le ministère des Finances et celui de la Justice, dans le but de trouver une solution. Cela relève de leur expertise.

Nous sommes, quant à nous, des experts en formation et en sensibilisation et c'est dans ce domaine que nous pouvons nous rendre utiles. Il y a quelque temps, nous vous avons fourni l'une des premières brochures publiées traitant des prêts sur salaire. Ce mois-ci, nous mettons à la disposition du public dans notre site web un autre pense- bête, un peu plus facile à imprimer et à assimiler, portant sur les points principaux de la question des prêts sur salaire.

Le sénateur Angus : C'est précisément parce que vous affichez un pense-bête sur les prêts sur salaire que j'estime qu'il était logique de vous poser la question.

Laissez-moi la reformuler : recevez-vous des plaintes de consommateurs qui s'estiment victimes, comme certains représentants des consommateurs, hier soir, qui militaient pour l'abolition des prêteurs sur salaire?

Comment réglementer le secteur? Faut-il laisser les choses comme elles sont, soit une chasse ouverte? Devons-nous faire comme le Québec et adopter une mesure qui, essentiellement, les oblige à fermer boutique?

M. Callon : Selon nous, les prêteurs sur salaire remplissent un créneau du marché. Nous nous sommes efforcés de combler les lacunes pour ce qui est de l'information sur le marché, conformément à notre mandat d'éducation du public. Quand il existe des lacunes et que les parties responsables ne comblent pas ces lacunes avec des informations, nous le faisons pour elles. Cela fait partie de notre mandat.

En ce qui concerne les prêts sur salaire, nous avons toujours affirmé qu'il faut améliorer les comportements sur le marché, ainsi que la divulgation des frais, des taux d'intérêt et de tous les éléments ajoutés au produit.

La réglementation de cette conduite sur le marché relève des provinces. Les responsables des orientations politiques devaient proposer un régime permettant de remédier à la lacune quant au comportement sur le marché. L'ACFC n'a pas compétence sur cet aspect pour les prêteurs sur salaire.

Le sénateur Angus : Madame Dickson, avez-vous un mot à dire sur la question?

Mme Dickson : Non. Cela ne relève pas du mandat du BSIF, si bien que je n'ai rien à ajouter.

Le sénateur Angus : Avez-vous un point de vue sur la question?

Mme Dickson : Non, nous ne recevons pas de plaintes des consommateurs sur la question.

Le sénateur Angus : Mon collègue, le président et moi passons tout au peigne fin parce que vous avez une obligation de supervision des banques. Or, les banques semblent avoir abandonné le terrain et engendré une situation, par leur absence. Selon moi, vous pourriez y voir une porte détournée vous habilitant à nous faire profiter de vos réflexions.

Mme Dickson : Effectivement, nous avons un droit de supervision sur les banques, mais il s'agit de supervision prudentielle. Il s'agit de savoir si leurs pratiques sont sûres. C'est pourquoi je ne suis pas tentée de m'aventurer dans le domaine que vous suggérez, d'autant que M. Callon semble avoir répondu à votre question du point de vue de l'agence de réglementation.

Le sénateur Angus : Je vois qu'il lève à nouveau la main.

M. Callon : Sans vouloir susciter d'autres questions, il y a un ou deux points que vous avez soulevés et que je n'ai pas repris dans ma réponse.

En ce qui concerne les plaintes, nous avons reçu l'an dernier 40 000 plaintes et demandes de renseignements. Chaque semaine, nous analysons ces plaintes pour repérer les tendances et les soubresauts du marché auxquels nous devrions peut-être réagir rapidement. Les prêteurs sur salaire ne s'inscrivent pas sur notre radar comme source majeure de plaintes ou de demandes de renseignements. Toutefois, vu que la question nous préoccupait quand même, nous avons effectué une ou deux enquêtes sur le marché pour poser des questions plus détaillées sur les services des prêteurs sur salaire. Nous avons constaté que toute une gamme d'utilisateurs avait recours à ces services. Le CDIP, le Centre pour la défense de l'intérêt public, une association de consommateurs, a lui aussi enquêté sur le terrain, pour parvenir à des conclusions similaires. Il existe peut-être un segment de la population dont on abuse avec ce type de service coûteux, mais les consommateurs ont toute une série de raisons pour avoir recours aux compagnies de prêts sur salaire, la commodité, par exemple. Dans certains cas, les consommateurs n'aiment pas faire affaire avec une succursale et c'est pour cela qu'ils utilisent un service de prêts sur salaire.

Le vice-président : Il est intéressant que vous affichiez ce pense-bête. Comment faites-vous parvenir ces renseignements aux gens qui ont besoin du pense-bête?

M. Callon : Nous nous y prenons de diverses façons. Nous travaillons en partenariat avec les médias; nous avons ainsi été mentionnés dans le Globe and Mail d'aujourd'hui; et, deux ou trois fois par semaine, nous sommes mentionnés dans le Globe and Mail, le Toronto Star et le Vancouver Sun.

Le vice-président : Est-ce que vous faites paraître un encart dans le journal?

M. Callon : Non, ce sont les journalistes qui nous mentionnent dans leurs articles. Ils renvoient à notre documentation quant au coût de ces institutions et reprennent parfois certains aspects de nos brochures. Nous sommes devenus une source d'information pour les spécialistes des questions de consommation. C'est un élément essentiel pour parvenir à une large diffusion de nos renseignements.

Le vice-président : D'après ce que je comprends, vous travaillez en partenariat avec l'ADRC et envoyez parfois des documents comme celui-ci avec ceux ayant trait à la déclaration d'impôt.

M. Callon : Ces dernières années, nous avons envoyé 24 ou 25 millions de documents joints aux chèques adressés aux personnes ayant droit au remboursement de la TPS, aux personnes bénéficiant de versements pour invalidité, aux personnes âgées, et cetera. De plus, chaque année, nous envoyons des messages par ce mécanisme grâce à notre partenariat avec l'ADRC. Nous jouissons également de partenariats avec le YMCA, qui organise des sessions pour les nouveaux immigrants ou des personnes à faible revenu.

Le président : Monsieur Callon, nous avons peu de temps. Vous avez dit ce que vous aviez à dire. Laissez-moi vous emboîter le pas. Le nouveau gouvernement du Canada a entamé l'examen, parce que le nouveau gouvernement conservateur prend au sérieux l'obligation d'examen dont chacun d'entre vous a parlé. On a beaucoup fait allusion au projet de loi C-8, qui a résulté du dernier examen quinquennal. Le projet de loi C-8 cherchait à faire adopter de nombreuses nouvelles mesures conçues pour protéger les consommateurs. Nous avons effectué une petite vérification, une étude, pour voir si ces mesures donnaient des résultats. Nous avons publié un rapport, très positif. Le gouvernement a lu notre rapport et le ministre des Finances nous a écrit une longue lettre indiquant qu'il entendait prendre certaines mesures à la suite de nos suggestions; le projet de loi C-37 reflète une bonne partie de ce travail.

Finances Canada nous a dit qu'il y avait eu des réfections majeures de leur système en 1991, quand ont été abattus les piliers — version canadienne du big bang — et que c'était un gros morceau. Puis, 10 ans plus tard, est intervenu le projet de loi C-8, puis il y a eu deux examens. Nous sommes à présent dans une période intérimaire. Selon Finances Canada, il n'y a pas de problèmes majeurs; tout va bien et le projet de loi C-37 représente plus ou moins ce qui serait utile à l'heure actuelle.

Seriez-vous tous trois d'accord avec ce que je viens de dire et avec l'orientation du projet de loi?

M. Callon : Oui, nous sommes en faveur du projet de loi. Nous rencontrons régulièrement les décideurs, pour signaler les problèmes que nous remarquons sur le marché; les décideurs s'efforcent par la suite d'effectuer les changements législatifs ou réglementaires qui sont, selon eux, requis. Nous avons un dialogue permanent avec eux. Les dispositions qu'ils ont suggérées seront une bonne chose pour le marché.

Le président : Pouvons-nous passer à autre chose? Merci, sénateur, pour cette publicité. En tant que sénateur libéral, j'ai fait preuve de plus de libéralité avec vous que je ne l'aurais dû. Je vais à présent donner au sénateur Goldstein la chance de poser des questions.

Le sénateur Goldstein : Je suis préoccupé par les fermetures de banques et divers témoins ont accru mes craintes. Vous avez des mécanismes d'examen des fermetures bancaires. D'après ce que je comprends, vous encouragez des réunions entre les groupes communautaires et les institutions financières ayant l'intention de fermer une succursale.

Les banques nous ont dit que, en cas de fermeture, elles s'efforçaient de veiller à ce que certaines installations soient offertes dans le secteur. Des GAB et d'autres installations sont mis à la disposition de la collectivité, pour réduire au minimum l'impact des fermetures. Le projet de loi traite de la question des fermetures, mais il n'existe ni dans le projet de loi ni dans vos pouvoirs de surveillance de pouvoir contraignant, si bien qu'il vous est impossible d'empêcher la fermeture d'une succursale.

Souhaiteriez-vous pouvoir disposer d'un meilleur mécanisme pour contrôler et superviser les fermetures bancaires? On pourrait l'ajouter au projet de loi actuel ou le faire figurer dans un projet de loi d'initiative parlementaire. J'ai bien conscience que les banques font partie du secteur privé et que les fermetures de succursales obéissent sans doute à des impératifs économiques. Mais il y a des cas où un secteur d'opération est contraint, du fait de sa nature, d'assurer un service, même quand on sait que c'est à perte. Ainsi, la licence octroyée à Air Canada contraint la société à assurer dans le Nord des vols qui ne sont pas rentables. Dans le secteur de l'assurance automobile, au Québec, sous réglementation provinciale, les assureurs sont tenus d'assurer des conducteurs qui, autrement, ne trouveraient pas à s'assurer. Pourriez-vous envisager des mesures susceptibles de réduire l'impact des fermetures de succursales bancaires?

M. Callon : L'impact de ces fermetures est énorme dans les petites villes. J'ai assisté à certaines des réunions dont nous parlions en tant que commissaire adjoint et trouvé importants les sentiments exprimés à cette occasion. Nos pouvoirs sont toutefois limités, dans ce domaine.

Je me permets de vous rappeler que, avant 2001, il n'existait aucune loi s'appliquant aux fermetures de succursales. Si une banque décidait tout à coup de fermer une succursale, rien ne l'en empêchait. Les petites entreprises n'avaient pas l'occasion de se réorganiser, soit en se tournant vers la concurrence soit en faisant appel à une caisse populaire ou à une autre banque. Nous avons entendu parler de situations où des entreprises n'ont pas pu organiser leurs affaires avant la fermeture de la banque. Le Parlement a adopté une politique pour remédier à la situation, rendant obligatoire un avis de fermeture. Il en va de même quand un gros employeur dans une petite ville compte fermer ses portes; dans les zones urbaines, il doit donner un préavis de quatre mois; dans les zones rurales, un préavis de six mois. Cela donne à ces zones le temps d'encourager des services à venir remplacer les banques qui ferment.

Pour les petites collectivités et les zones rurales, c'est un problème. Ce n'est pas à moi de recommander quelle mesure pourrait être adoptée pour y remédier. C'est un choix qui relève des décideurs.

Le sénateur Goldstein : Suggérez-vous, sans vous permettre de le dire, qu'il conviendrait d'adopter des mesures autres que celles qui existent dans le projet de loi C-37?

M. Callon : Je me place dans l'optique de quelqu'un ayant vécu dans une petite ville. La disparition de services clés, qu'il s'agisse d'une épicerie, d'une station-service ou d'une banque, a un impact et cause un inconvénient. Si un service est discontinué, où aller? Dans une ville où il n'y a qu'une seule banque, ça fait mal.

Le sénateur Goldstein : Nous réglementons d'autres services, comme les télécommunications ou l'approvisionnement en gaz et en électricité. Une bonne part de ces entreprises fonctionne avec des fonds publics, mais une bonne part aussi est privée, ce qui ne nous empêche pas de les réglementer et de les contraindre à respecter nos règlements. En ce qui concerne les fermetures de banques, le projet de loi C-37 ne comporte aucun pouvoir de faire respecter la loi. Il y a une disposition d'avis et de consultation volontaire, mais rien de nature coercitive. Sans vouloir nécessairement suggérer que cela constitue une lacune, je vous demande si les mesures existantes sont appropriées selon vous.

M. Callon : J'aimerais mieux ne pas répondre à cette question.

Le sénateur Goldstein : C'est votre droit.

Le président : Quelle est la réponse?

M. Callon : En tant qu'agence de réglementation et d'institution faisant respecter les règles, j'aime mieux ne pas me prononcer.

Le président : Monsieur Callon, nous nous efforçons de rendre service. Nous nous efforçons de vous rendre service à vous, aux consommateurs et à l'association des banques. Nous voulons des services de qualité à faible coût. Le sénateur Goldstein a soulevé une question majeure, qui revient constamment sur le tapis. Nous vous posons la question non pas en tant qu'organisme de réglementation mais en tant qu'organisme tenu de fournir des choix aux consommateurs.

Dans le cas envisagé, comme le souligne le sénateur Goldstein, dans une petite ville, il y a eu une fermeture de succursale et vous avez vous-même admis que les consommateurs n'avaient pas le choix. De fait, en n'intervenant pas dans ce processus, vous vous êtes dessaisis de la question.

M. Callon : Eh bien, il y a des choix comme les services bancaires en ligne et le service bancaire par téléphone. Certaines collectivités où des banques ont fermé ont réussi à obtenir une caisse populaire à temps partiel tout au moins sinon à temps plein. Nous allons travailler avec ces groupes pour trouver des façons d'obtenir de tels services. On leur envoie du matériel didactique pour leur donner un choix. Il y a possibilité de choix.

Le président : On nous a dit que le consommateur était davantage informé parce qu'il a accès aux ordinateurs et à Internet; il y a cependant un écart entre les ménages qui peuvent se permettre d'acheter des ordinateurs et d'avoir accès à Internet et ceux qui n'en ont pas les moyens, et l'écart augmente. Bon nombre de ces services peuvent être fournis par des moyens électroniques, mais dans une petite municipalité, cela accentue l'écart entre les riches et les pauvres. C'est un problème pour notre comité. Quels sont les autres choix?

M. Callon : Les principaux canaux de distribution sont le téléphone, Internet et les succursales bancaires.

Le président : Encore une fois, je reviens à Internet. Si on fait une analyse, on constate qu'au moins 24 p. 100 de la population n'a pas accès à Internet. Cet écart se rétrécit, mais progressivement. Comme les représentants de l'Association des consommateurs du Canada l'ont souligné, il y aura toujours un écart entre ceux qui ont des ordinateurs et ceux qui n'en ont pas. Il y a des gens qui n'ont pas les moyens d'acheter des ordinateurs.

M. Callon : Vous devez comprendre ma position. Je n'ai pas la capacité de faire des recherches sur un changement stratégique aussi important. Si c'était le rôle de notre agence, alors nous pourrions vous offrir ce service. Je ne voudrais certainement pas vous manquer de respect, mais je dois tenir compte de nos compétences et de nos limites. Je ne suis pas en mesure d'étudier la proposition, de constater l'impact économique et de donner un point de vue éclairé sur la question.

Le président : Très bien. Nous allons demander à l'association des banquiers de répondre à cette question.

Le sénateur Goldstein : Il y a des modèles dans d'autres pays où ce genre de problème, notamment l'absence de services bancaires dans les régions rurales, est résolu de différentes façons. Une solution consiste à faire en sorte que les forces de réglementation, les conglomérats de banques, toutes les banques, se partagent proportionnellement la perte du maintien d'une succursale, ou disposent d'un fonds auquel les banques doivent contribuer, de façon que le gouvernement permette le financement pour les régions qui ont perdu des banques.

Il y a toutes sortes de façons possibles d'éviter les fermetures de banques. Je ne parle pas ici d'une banque qui doit fermer au coin de la rue parce que le marché immobilier est devenu trop cher alors qu'il y a 16 succursales de cette banque ailleurs. Je parle des régions rurales, des régions autochtones, des endroits où les gens n'ont pas les moyens de se payer d'autres services et n'ont pas vraiment accès aux services bancaires sur Internet. Personne ne peut retirer un montant d'argent comptant en utilisant les services bancaires en ligne.

Je comprends votre position et votre problème. Je me mets à votre place.

Le président : Le sénateur Goldstein soulève une question qui préoccupe tous les membres de notre comité. De toute évidence, monsieur Callon, nous y reviendrons au cours de nos audiences. Il veut tout simplement vous aviser, vous et d'autres, qu'il s'agit d'une préoccupation constante pour tous les membres de notre comité.

Le sénateur Goldstein : Il y a une chose qui pique ma curiosité : on nous a dit au cours de témoignages précédents que les transgresseurs n'étaient pas identifiés. J'ai trouvé cela plutôt étonnant. Avez-vous constaté que c'était le cas en ce qui concerne les banques qui ne respectaient pas les exigences? Y a-t-il un mécanisme pour rendre publiques vos décisions à cet égard, nonobstant le fait que les banques, dans tous les cas, se sont conformées après que vous leur ayez demandé de le faire?

M. Callon : Lorsque nous rencontrons une situation qui exige une intervention, en d'autres termes, lorsque les actions de la banque ont nui au marché, notre pratique habituelle consiste à demander à la banque d'informer les consommateurs par écrit du problème, de les informer de la procédure relative aux plaintes si leurs clients souhaitent redresser la situation et ensuite, si c'est un problème de remboursement, cela se fait habituellement de façon volontaire de la part des banques. Il y a eu un effort volontaire à 100 p. 100 de la part des banques de rembourser chaque fois que nous avons constaté que les clients avaient droit à une réclamation.

Le sénateur Goldstein : Vous ne faites pas ce que le ministère du Revenu fait. À des intervalles de quelques mois, il publie les noms des gens qui ont été trouvés coupables d'évasion fiscale et les peines qui leur ont été imposées. Vous n'avez pas du tout ce genre de mécanisme, n'est-ce pas?

M. Callon : Dans notre boîte à outils, en ce qui concerne la conformité, il y a une possibilité de publication de violation. Mon prédécesseur s'en est servi à deux occasions où il a estimé, en se fondant sur plusieurs facteurs, qu'il était nécessaire de le faire.

Le sénateur Massicotte : Je comprends que vous ne rendiez pas publiques des situations spécifiques dans chaque cas, mais rendez-vous tout au moins public un sommaire des infractions dans les cas où les banques devaient rembourser afin de laisser savoir au public la fréquence et la gravité de la situation?

M. Callon : Absolument, ces renseignements sont affichés sur notre site web. En ce qui concerne ce genre de décisions, nous faisons un résumé de la situation, de la résolution, puis nous l'affichons sur notre site web.

Le président : Pour revenir à la question du sénateur, est-ce que vous nommez les banques?

M. Callon : Dans les sommaires génériques, non.

Le président : Pourquoi pas?

M. Callon : C'est une décision du commissaire.

Le président : Nous vous demandons pourquoi vous ne le faites pas, monsieur Callon?

M. Callon : Je ne peux pas répondre en ce qui concerne les décisions du commissaire précédent.

Le président : Le public a le droit de savoir. Il n'y a aucune raison pour que ce ne soit pas publié lorsqu'on a déterminé qu'elles avaient contrevenu à un règlement et s'y étaient ensuite conformées. Qu'y a-t-il de mal à faire cela?

M. Callon : C'est un outil dont dispose le commissaire et qu'il peut utiliser lorsqu'il juge approprié de le faire. Par le passé, il est allé jusqu'à publier le nom de l'institution.

Le sénateur Ringuette : Avez-vous été consultés en ce qui concerne le projet de loi C-37?

Mme Dickson : Oui, nous avons été longuement consultés car nous administrons les lois quotidiennement.

Le sénateur Ringuette : Je pose la question du point de vue de la conformité.

Mme Dickson : Oui, nous avons été consultés du point de vue de la conformité également. Il y a beaucoup de consultation. On veut connaître notre point de vue afin de s'assurer que nous comprenions bien les changements qui sont apportés et que nous avons tous les renseignements dont nous avons besoin lorsque les lois sont modifiées ou lorsqu'elles entrent en vigueur. Par ailleurs, nous donnons des conseils sur les aspects prudentiels de toute modification. Il est tout à fait normal qu'il y ait un certain nombre d'entretiens entre le ministère des Finances et le BSIF.

M. Callon : Nous avons des entretiens régulièrement avec le ministère des Finances, particulièrement s'il y a des initiatives de réglementation ou de législation.

Le sénateur Ringuette : Combien de fois avez-vous rencontré les groupes de consommateurs comme ceux qui ont témoigné tout à l'heure?

M. Callon : Nous rencontrons les principaux groupes de consommateurs au moins une fois par an. Dans certains cas, nous avons des rapports quotidiens avec eux en ce qui concerne notre matériel didactique qui s'adresse aux consommateurs ou pour ce qui est de déterminer les lacunes sur le marché.

Le sénateur Ringuette : Y a-t-il une coopération en ce qui concerne la protection du bien-être du consommateur?

M. Callon : Oui, si un groupe clé de consommateurs souligne une lacune sur le marché du point de vue de l'éducation du consommateur, nous tentons de combler cette lacune. Nous avons travaillé avec le Centre pour la défense de l'intérêt public dans le dossier des prêts sur salaire.

Le sénateur Ringuette : Vous avez dit qu'en moyenne vous entendez 40 000 plaintes par an.

M. Callon : Non, nous recevons 40 000 appels dont la majorité sont des demandes de renseignements au sujet des divers aspects des services financiers.

Le sénateur Ringuette : Combien de ces demandes visent les services bancaires?

M. Callon : Lorsqu'il y a des plaintes, nous parlons au consommateur des mesures qu'il doit prendre tout d'abord. Souvent, il n'a pris aucune mesure. Nous lui expliquons alors la procédure de son institution relative aux plaintes et l'aidons à naviguer dans le processus de recours en ce qui a trait à la plainte. Par ailleurs, nous avons développé une sorte de rolodex de toutes les procédures relatives aux plaintes en ce qui concerne les institutions financières réglementées par le gouvernement fédéral, et nous l'avons affiché sur notre site web.

Le sénateur Ringuette : Lorsque vous recevez tous ces appels et que vous déterminez la nature d'une plainte, êtes- vous en mesure de savoir vraiment si la plainte du consommateur est fondée? Si vous redirigez la plainte vers d'autres voies, êtes-vous en mesure de recueillir les données adéquates pour les consommateurs canadiens? Êtes-vous ensuite en mesure de transmettre ces renseignements au ministère des Finances de façon à ce que l'examen des services bancaires comme celui que l'on fait dans le cadre du projet de loi C-37 reflète la position des consommateurs?

M. Callon : Notre pratique habituelle, c'est qu'avant de dire au consommateur où s'adresser, nous nous renseignons sur la question. Nous saisissons cette information dans notre base de données, de façon à ne pas induire la personne en erreur pour ce qui est de savoir à qui elle devrait s'adresser concernant cette question ou cette plainte.

Le sénateur Ringuette : À la page 2 de votre document, pour 2005-2006, vous dites que 1 385 dossiers de conformité ont été fermés par l'ACFC. Vous dites que vous recevez 40 000 appels en moyenne par année. Il y a toute une différence entre le nombre d'appels que vous recevez au cours d'une année et le nombre de plaintes que vous fermez. Vous ne donnez pas le nombre de dossiers qui restent ouverts au cours d'une année.

M. Callon : Dans notre rapport annuel au Parlement, nous donnons une répartition complète de toutes nos statistiques, incluant les dossiers qui sont en suspens à la fin de l'année. Environ 20 à 30 p. 100 des 40 000 appels, selon la période, sont des plaintes. Nous demandons aux gens qui appellent pour porter plainte s'ils veulent les enregistrer auprès de notre agence. Nous les examinons du point de vue de la conformité. Nous constatons qu'entre 3 et 5 p. 100 de ces cas donnent lieu à une autre enquête de notre part pour déterminer s'il y a eu un problème en ce qui concerne la loi.

[Français]

Le sénateur Massicotte : Madame Dickson, vos commentaires sont à l'effet que rien dans le projet de loi ne préjuge votre responsabilité de gérer de façon « prudentielle » les institutions financières et que rien ne vous affecte directement.

Mais y a-t-il quelque chose qui n'a pas été prévu dans le projet de loi et qui vous aiderait à mieux répondre aux besoins des consommateurs?

[Traduction]

Mme Dickson : Nous ne pensons pas avoir besoin de pouvoirs additionnels. Je dirai que les témoins précédents ont fait une observation au sujet du rapport prêt-valeur de 75 p. 100 et de l'augmentation à 80 p. 100. Ils ont laissé entendre que cela pourrait créer des risques pour les banques qui n'étaient pas dans l'intérêt du système.

Nous sommes très à l'aise avec l'augmentation à 80 p. 100. Nous avons examiné les différences entre le marché canadien et le marché américain pour les hypothèques en-dessous du taux préférentiel et elles sont complètement différentes. Le rapport prêt-valeur de 80 p. 100 aide lorsque les banques accordent des prêts. Cela ne laisse pas beaucoup de marge de manoeuvre pour ce qui est de la courbe de risque, pour ainsi dire, lorsque l'hypothèque doit être assurée.

Les différences entre le marché canadien et le marché américain pour les hypothèques en-dessous du taux préférentiel sont d'environ 2,3 p. 100 du marché canadien et près de 15 p. 100 aux États-Unis. Les types de produits que l'on trouve aux États-Unis sont très agressifs, les prêts très exotiques. Au Canada, l'amortissement se fait surtout sur une période de 25 ou 30 ans. Nous ne retrouvons vraiment pas les mêmes caractéristiques qu'aux États-Unis. Ce marché est en train de prendre un peu d'essor au Canada. Les gens commencent à le regarder et certaines institutions s'y intéressent. Il est loin cependant d'avoir atteint la taille et les caractéristiques que l'on retrouve sur le marché américain. Nous sommes tout à fait à l'aise avec le ratio prêt-valeur de 80 p. 100.

[Français]

Le sénateur Massicotte : Monsieur Callon, vous ne proposez pas d'amendement au projet de loi, mais est-ce qu'il y a quelque chose qui ne figure pas au projet de loi et qui pourrait satisfaire davantage les besoins des consommateurs?

M. Callon : Dans le projet de loi, il y a des points saillants concernant certains enjeux. D'abord, il y aura une prévision visant à clarifier la divulgation en ce qui concerne les coûts d'emprunt. D'après nos statistiques, la majorité des plaintes ont trait aux prêts et à la divulgation des frais et des intérêts. Nous aimerions voir une amélioration de la situation sur le plan de la divulgation de ces informations. C'est ce que le projet de loi prévoit aborder. Il y a aussi l'aspect concernant la divulgation de tous les emprunteurs.

[Traduction]

Dans tous nos centres d'appels, nous avons constaté qu'il y avait un problème d'après le type d'appels que nous recevions : dans les cas d'emprunteurs multiples, il n'y a pas divulgation à tous les emprunteurs lorsqu'on a un prêt à des emprunteurs multiples; la divulgation continue n'est offerte qu'à un seul emprunteur. S'il y a des changements apportés aux prêts ou des amendements qui y sont apportés, tout le monde n'avait pas droit à cette divulgation étant donné la pratique qui existe dans l'industrie. Nous avons réglé ce problème et cela sera renforcé dans le projet de loi C- 37.

[Français]

Le sénateur Massicotte : Avez-vous prévu des pénalités comme telles? Est-ce que selon vous une augmentation de 100 000 $ serait adéquate?

M. Callon : Dans le projet de loi, je crois qu'il y aura une augmentation de 100 000 à 200 000 $. Tout dépend du montant en cause mais pour nous c'est le résultat qui compte.

Par exemple, pour régler le problème de la divulgation avec les co-emprunteurs, les frais s'élèveront environ à 50 000 $. C'est ce qu'il en coûtera pour régler le problème dans le marché.

[Traduction]

La pénalité de 100 000 $ est un outil dont nous avons besoin; mais franchement, lorsque nous sommes saisis de ces dossiers, nous parlons de coûts de plusieurs millions de dollars pour l'industrie pour mettre en place ce que le règlement dit qui devrait être en place.

[Français]

Le sénateur Massicotte : Vous dites que la somme est peu importante comparativement au coût d'application du projet de loi. Cela confirme aussi, indirectement, que les montants sont très minimes. En d'autres mots, ce n'est pas les 100 000 ou le 200 000 $ qui vont causer les problèmes. Et puisque vous ne publiez pas le nom des institutions fautives — comme c'est le cas aux États-Unis —, les institutions ne sont même pas craintives face à une ultime atteinte à la réputation. Pour vous, c'est le résultat qui compte et non les règlements ou la loi comme tels, mais dans trois ou cinq ans, il serait peut-être intéressant d'être encadrés par des règles claires et par des sanctions.

[Traduction]

M. Callon : L'industrie a connu des problèmes importants, particulièrement en ce qui concerne le respect de la vie privée. Il n'y a pas eu tellement de changement en ce qui concerne le comportement du consommateur. Je ne suis pas responsable de l'élaboration des politiques et je n'ai pas tous les faits en main, mais pour ce qui est de notre surveillance, nous n'avons pas constaté tellement de réaction de la part des consommateurs qui voulaient partir. Je ne sais pas jusqu'à quel point cela est délicat pour les consommateurs pour ce qui est de les obliger à dire cela suffit, je change.

Nous comptons sur la rapidité avec laquelle nous pouvons obtenir des résultats sur le marché pour régler le problème et faire en sorte que les consommateurs qui sont touchés par ce changement en sont informés par l'institution. C'est là-dessus que l'Agence a voulu mettre l'accent.

Le sénateur Massicotte : Je ne suis pas un sondeur professionnel, mais j'imagine que la plupart des consommateurs diraient qu'ils n'ont pas changé parce qu'ils pensent que toutes les banques sont pareilles. En d'autres termes, en ce qui concerne le respect de la vie privée ou les frais bancaires, et cetera, on a généralement l'impression que toutes les banques sont généralement les mêmes. N'êtes-vous pas d'accord avec cela?

M. Callon : À la suite de certains sondages que nous avons effectués, nous avons constaté que la grande majorité des gens ne changent pas de banque. Ils ont peut-être des litiges, mais ils les règlent avec l'institution. Peut-être que la raison que vous mentionnez est une réponse, mais c'est peut-être aussi une question de commodité, pour ce qui est de l'endroit où se trouve la succursale, et l'historique familial entre également en ligne de compte. Quoi qu'il en soit, il n'y a pas beaucoup d'élasticité pour ce qui est des consommateurs qui changent de banque.

Le sénateur Massicotte : À New York il y a un mois ou deux, les grandes banques et les principales sociétés de placement ont été accusées par les agences de réglementation de ne pas faire certaines transactions de façon appropriée ou de ne pas enregistrer ou informer leurs clients de façon appropriée. Cela a été rendu public et en fait, on craignait que certaines grandes institutions fassent faillite étant donné que cela mettait en danger leur réputation. Vous dites que ce n'est pas le cas ici, mais pourquoi n'entendons-nous pas parler de ce genre de choses au Canada? Nos institutions financières se comportent-elles de façon plus appropriée que les institutions américaines?

Les mêmes banques canadiennes ont été prises à faire certaines choses de façon irrégulière aux États-Unis. Il est étrange que l'éthique et les règles qui leur permettent un comportement tout à fait normal et acceptable au Canada ne soient pas appropriées aux États-Unis. Pourquoi ne publions-nous pas de telles infractions? Pourquoi semblons-nous être moins vigilants ici au Canada?

M. Callon : Nous avons certains problèmes, mais comme ma collègue l'a indiqué, les Américains sont beaucoup plus agressifs et repoussent les limites lorsqu'il y a une zone grise dans la réglementation. Le cadre de travail n'est peut-être pas parfaitement clair pour répondre à toutes les permutations possibles d'un produit, mais je suis d'avis que le marché américain est un marché beaucoup plus agressif.

Certaines questions ont été rendues publiques ici, à la fois sur notre site web et dans les médias. Par exemple, nous avons abordé la question de la divulgation des taux d'intérêt des cartes de crédit. Nous avons constaté que dans une campagne de marketing on disait aux gens qu'ils pouvaient obtenir une carte de crédit à un taux d'intérêt « aussi peu élevé que ». Lorsque nous avons examiné la question de plus près, nous nous sommes aperçu que très peu de gens pouvaient obtenir le taux d'intérêt « aussi peu élevé que ». Nous avons déterminé que la pratique n'était pas acceptable par rapport à la réglementation sur les coûts d'emprunt. Cette entreprise s'est en fait retrouvée devant les tribunaux et a reçu une certaine publicité.

Le sénateur Massicotte : Il convient de noter que vous reconnaissez que les Américains sont plus agressifs en ce qui concerne ce genre de pratiques. Certains, notamment les témoins que nous avons entendus avant vous, diraient qu'ils sont plus agressifs, oui, car ils font ce qu'il faut faire, et au Canada nous ne faisons pas ce qu'il faut faire. Je vais vous donner la chance de répondre car je pense qu'il est important de le faire aux fins du compte rendu.

D'aucuns diraient que nous ne sommes pas assez stricts, que votre agence n'est pas assez stricte. Ils laissent entendre que vous êtes trop près des banques et que par conséquent vous êtes trop axés sur la satisfaction de votre dictateur, des grandes banques, plutôt que sur celle du consommateur. Pouvez-vous répondre à cette observation, que nous entendons souvent?

M. Callon : Je trouve cela insultant étant donné nos résultats des cinq dernières années. Nous avons pris une nouvelle mesure législative, nous avons renforcé le personnel d'une agence, nous avons institué un cadre et nous avons réussi à mettre en place d'importants changements de comportement sur le marché. Ces observations sont irresponsables, à mon avis.

Le sénateur Massicotte : Notre approche canadienne donne à votre avis de meilleurs résultats que l'approche américaine.

M. Callon : Je ne passe pas tout mon temps devant les tribunaux. Je m'occupe d'apporter des changements sur le marché.

Le président : Je n'ai que deux petites questions, ensuite nous devrons conclure. Si j'ai bien compris, à la suite de la question du sénateur Massicotte, vous avez dit que vous n'auriez aucune objection à ce que nous recommandions que la pénalité soit augmentée aux termes de l'article 435, passant de 200 000 $ jusqu'à cinq millions de dollars. Une telle recommandation pourrait changer le comportement des banques même si vous avez souligné qu'il était difficile de changer le comportement des consommateurs.

En ce qui concerne le montant, je pense que 200 000 $ était la norme. C'est le montant que les mesures législatives de protection des consommateurs au pays prévoient habituellement pour ce qui est des petites et des grandes entreprises.

Le président : Vous dites que les consommateurs ne vont pas changer en raison de la pénalité car ils pensent que toutes les banques les traiteront de la même façon. Cependant, il ne s'agit pas ici nécessairement de changer les attitudes des consommateurs, mais il s'agit plutôt de changer les attitudes des banques si elles se trouvent dans une position supérieure sur le marché. Comment pouvons-nous changer l'attitude des banques afin qu'elles se conforment à la loi?

Ce que propose l'Association des consommateurs, et c'est ce à quoi songe le sénateur Massicotte également, de toute évidence, c'est que si nous ne pouvons pas changer les consommateurs, nous pouvons certainement changer le comportement des banques et vous faciliter la tâche.

M. Callon : Cela est certainement la prérogative du comité. En 2001, l'Agence a été créée afin d'interpréter un règlement qui n'avait jamais été interprété auparavant. Cela constitue à mon avis un jalon.

Le président : Monsieur Callon, nous sommes de votre côté. Nous avons surveillé la question; nous avons fait des études sur la question; nous comprenons qu'il y a eu une progression et que l'élément consommateur s'améliore, mais nous sommes d'avis qu'il y a encore beaucoup de progrès à faire. Je pense que vous êtes d'accord avec cela, et il s'agit de savoir comment nous pouvons y arriver plus rapidement.

C'est pour cette raison que nous examinons certaines de ces questions individuellement. Il ne s'agit pas d'une seule question, mais de toute une série de questions. Nous pensons que nous pouvons mieux informer les services bancaires, qui sont bons, et en même temps assurer le consommateur que la Loi sur les banques qui a été créée pour les réglementer est appliquée de façon adéquate. C'est une question d'application.

Je m'arrêterai là. J'ai une dernière question à poser à un témoin que nous avons négligé, madame Dickson. Vous savez que nous faisons actuellement une étude sur les fonds spéculatifs. Votre responsabilité consiste à vous assurer de la viabilité financière des banques, et l'information que nous avons à ce sujet à l'heure actuelle est plutôt insuffisante. Nous poursuivons notre étude, mais toute la question des fonds spéculatifs prend de plus en plus d'importance. Les banques interviennent en ce qui concerne les deux aspects des fonds spéculatifs : elles achètent, elles vendent, elles participent, et cetera.

Le sénateur Angus : Vous vous souviendrez que Mme Dickson a comparu en tant que témoin au cours de notre étude.

Le président : Je le sais, mais aujourd'hui, nous parlons plus spécifiquement de la Loi sur les banques et de la question pertinente. Madame Dickson, avez-vous quoi que ce soit à ajouter à ce sujet, est-ce que les banques ne sont pas plus exposées en raison de leurs activités en ce qui a trait aux fonds spéculatifs?

Mme Dickson : Non, nous continuons de surveiller la situation, et rien n'a changé. Ces expositions sont bien gérées et demeurent très limitées. Nous continuons de surveiller de très près ce qui se passe au Royaume-Uni et aux États- Unis, où se déroulent la plupart de ces activités. Je maintiens mon témoignage précédent.

Le président : À l'heure actuelle, en Europe et aux États-Unis, et au sein du Congrès américain même, il se déroule un vif débat pour déterminer jusqu'à quel point ces fonds spéculatifs devraient être réglementés. Avez-vous des remarques à ce sujet?

Mme Dickson : Je suis au courant de ce débat. Je participe aux réunions internationales où la question est discutée. D'ailleurs, la semaine prochaine, j'assisterai à une réunion où le sujet des fonds spéculatifs figure à l'ordre du jour. Je serai certainement très intéressée par cette question.

Le président : Si vous avez d'autres renseignements à fournir à ce comité, veuillez nous en faire part dans le cadre de cette étude.

Je voudrais remercier les témoins de leur comparution aujourd'hui. Notre mandat est d'aider les consommateurs, et nous ne cherchons pas, ne serait-ce qu'indirectement, à critiquer votre travail. Nous nous efforçons d'améliorer les services fournis aux consommateurs canadiens.

La partie des audiences publiques de cette réunion est terminée.

Messieurs et mesdames les sénateurs, nous passerons maintenant à l'étude du budget du comité. J'aurais besoin d'une motion à cet effet.

Le sénateur Angus : Je propose la motion.

Le président : La motion est proposée par le sénateur Goldstein et appuyée par le sénateur Angus. Y a-t-il des questions ou commentaires au sujet du budget? Je mettrai la question aux voix. Tous ceux qui sont en faveur?

Des voix : D'accord.

Le président : C'est unanime. Merci, sénateurs. Le sénateur Angus se demandait si le comité devrait envisager un voyage en Europe pour étudier la question des fonds spéculatifs. Nous allons certainement réfléchir à cette possibilité.

La séance est levée.


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