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APPA - Comité permanent

Peuples autochtones

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones

Fascicule 3 - Témoignages du 11 février 2014


OTTAWA, le mardi 11 février 2014

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd'hui, à 9 h 31, afin d'examiner, pour en faire rapport, les responsabilités constitutionnelles, conventionnelles, politiques et juridiques du gouvernement fédéral à l'égard des Premières Nations, des Inuits et des Métis, et d'autres questions générales relatives aux peuples autochtones du Canada.

Le sénateur Dennis Glen Patterson (président) occupe le fauteuil.

Le président : Bonjour. J'aimerais souhaiter la bienvenue à tous les honorables sénateurs et à tous les membres du public qui suivent les débats du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones sur la chaîne parlementaire CPAC ou sur Internet.

J'estime que je ferais preuve de négligence si j'omettais, avant que nous n'entreprenions notre examen des questions relatives aux infrastructures et au logement, de faire état d'une importante rencontre qui a eu lieu vendredi, dans la réserve de la Première Nation des Blood, en Alberta, et à laquelle ont participé le chef national Atleo et des membres du comité, à savoir le sénateur Tannas, Gerry St. Germain — ancien président du comité — et moi-même. Il s'agissait de la première étape très prometteuse d'un travail de longue haleine sur la question de l'éducation dans les réserves des Premières Nations. Le chef national, le premier ministre et le ministre Valcourt ont évoqué les étapes à venir, dont un certain nombre seront mentionnées, je crois, dans le discours du budget qui sera présenté aujourd'hui. Si je signale cela aux membres, c'est que, dans son rapport intitulé La réforme de l'éducation chez les Premières Nations : De la crise à l'espoir, le comité avait formulé une recommandation touchant l'instauration d'un cadre législatif, et qu'il semble qu'un tel cadre sera élaboré conjointement par les Premières Nations et le gouvernement. Tout cela n'est qu'un début — et j'imagine que le comité sera mis à contribution pour la suite des choses, mais il est très encourageant. Je tenais simplement à mentionner cela avant que nous ne commencions nos travaux.

Je m'appelle Dennis Patterson, du Nunavut, et j'assume la présidence du comité, lequel a le mandat d'examiner les mesures législatives et les questions qui concernent les peuples autochtones du Canada de façon générale. Afin de saisir les préoccupations de nos mandants, nous invitons régulièrement des témoins à se présenter devant nous pour qu'ils puissent nous instruire sur des sujets qui revêtent actuellement de l'importance pour eux.

Ces séances sont précieuses, dans la mesure où elles aident le comité à choisir les études qu'il va entreprendre en vue de servir au mieux la collectivité autochtone. Nous avons récemment tenu des réunions dans le cadre desquelles des témoins nous ont fourni des renseignements de nature générale sur la vaste question du financement des infrastructures dans les réserves, laquelle englobe notamment les projets d'immobilisations et la construction d'écoles et de logements. Ces derniers temps, nous nous sommes concentrés plus particulièrement sur le logement.

Nous entendrons ce matin des représentants d'une organisation que le comité a fréquemment l'occasion d'entendre, à savoir l'Assemblée des Premières Nations — l'APN —, qui a souvent évoqué les problèmes liés au logement avec lesquels les collectivités des Premières Nations sont aux prises, notamment en ce qui a trait au nombre de logements disponibles et au caractère non sécuritaire de bon nombre de logements. Nous nous réjouissons à l'idée que les témoins nous en apprendront davantage à ces sujets, et nous leur souhaitons la bienvenue ici.

Avant d'entendre les exposés des témoins, j'aimerais demander aux membres du comité ici présents de se présenter.

Le sénateur Moore : Bonjour. Wilfred Moore, de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Watt : Charlie Watt, du Nunavik.

La sénatrice Dyck : Bonjour. Je m'appelle Lillian Dyck, et je suis sénatrice de la Saskatchewan. Je suis également vice-présidente du comité.

Je tiens à féliciter le chef Atleo de l'entente annoncée vendredi. Comme bien des gens le savent, j'ai joué un rôle très actif dans le cadre de diverses activités liées à l'éducation des Premières Nations, et, à titre de vice-présidente du comité, j'aurais bien apprécié d'être invitée moi aussi à la réunion. Merci.

Le sénateur Sibbeston : Par curiosité, j'aimerais savoir, vu qu'il s'agissait d'une initiative liée aux Premières Nations, pourquoi certains membres du comité ont été invités à la rencontre, et d'autres, non.

Le président : Il s'agit là d'une bonne question. Pour ma part, j'ai reçu une invitation de dernière minute. Je crois que c'est également le cas du sénateur Tannas, qui se trouvait à retourner dans sa région afin d'assister à l'événement. Nous devrions prendre bonne note de cet incident pour nous assurer que cela ne se reproduise plus.

La sénatrice Dyck : Merci.

Le sénateur Sibbeston : D'ailleurs, en y réfléchissant, je me demande pourquoi le comité, qui s'intéresse aux questions touchant les peuples autochtones, n'est pas présidé par un Autochtone. Qu'est-ce qui explique cela? Êtes- vous en mesure de nous le dire?

Le président : Ce n'est pas moi qui ai pris la décision de me nommer au poste de président. Cela dit, comme vous le savez, la coutume veut que le fauteuil soit occupé par un membre du gouvernement. Hélas, il n'y a actuellement aucun sénateur conservateur remplissant les conditions requises.

Le sénateur Sibbeston : À la lumière de ce qui s'est passé au Sénat, à savoir le fait que nous sommes devenus des sénateurs indépendants, êtes-vous prêts à envisager de céder le fauteuil à un Autochtone?

Le président : Sauf votre respect, sénateur, je crois que votre suggestion est probablement contraire au Règlement, mais j'en ferai part au comité directeur et à nos instances dirigeantes. Merci de la suggestion.

Poursuivons.

Le sénateur Sibbeston : Nick Sibbeston, des Territoires du Nord-Ouest.

Le sénateur Tannas : Scott Tannas, de l'Alberta.

La sénatrice Raine : Nancy Greene Raine, de la Colombie-Britannique.

La sénatrice Beyak : Lynn Beyak, du nord-ouest de l'Ontario.

Le sénateur Meredith : Don Meredith, sénateur de l'Ontario.

Le sénateur Wallace : John Wallace, du Nouveau-Brunswick.

Le sénateur Ngo : Le sénateur Ngo, de l'Ontario.

Le président : Je vais maintenant demander aux membres du comité de joindre leurs voix à la mienne afin de souhaiter la bienvenue aux représentants de l'Assemblée des Premières Nations, à savoir Shawn Atleo, chef national; Glenn Hudson, chef, Première Nation de Peguis; et Madeleine Paul, chef, Première Nation d'Eagle Village.

Madame, messieurs, nous avons hâte d'entendre vos exposés et de vous poser ensuite des questions. Je crois comprendre que la chef Paul prendra la parole en premier, et qu'elle sera suivie du chef Hudson et du chef national Atleo.

Madeleine Paul, chef, Première Nation d'Eagle Village, Québec, Assemblée des Premières Nations : Bonjour à tous. Je remercie le président et les sénateurs de me donner l'occasion de m'adresser à eux aujourd'hui au sujet du logement dans les collectivités des Premières Nations et des besoins en la matière.

Je m'appelle Madeleine Paul, et je suis chef de la Première Nation d'Eagle Village, collectivité algonquine de la région de Temiskaming aussi connue sous l'appellation de Kebaowek. Je suis également, au sein de l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador — l'APNQL —, la chef responsable des questions relatives au logement et aux infrastructures. Je suis ravie d'avoir l'occasion de vous présenter un survol des difficultés auxquelles fait face notre Première Nation au chapitre du logement.

Mon exposé portera principalement sur les besoins en matière de logement et d'infrastructures connexes comme les réseaux d'aqueduc et d'égout. Je n'aborderai pas les questions liées aux autres infrastructures majeures, par exemple les écoles, les stations d'épuration d'eau et les usines de traitement des eaux usées.

Tout d'abord, j'aimerais exposer le mandat de l'APNQL en matière de logement. Le logement représente une priorité pour les chefs, et leur dévouement à cet égard est sans équivoque. L'APNQL créée en 1985, est l'instance qui permet aux chefs des Premières Nations du Québec et du Labrador de se rencontrer. Elle fournit du soutien aux collectivités et représente 10 nations. Sa mission et ses objectifs sont axés sur l'affirmation et le respect de nos droits, la reconnaissance des gouvernements des Premières Nations la mise en œuvre de stratégies visant la promotion de nos opinions communes et la défense de nos intérêts et de nos points de vue communs devant diverses organisations.

Comme je l'ai dit il y a quelques instants, le logement est une priorité pour les chefs de l'APNQL, qui ont pris position sur cette question à de nombreuses reprises au fil des ans. L'objectif consiste à améliorer les conditions de vie et de logement dans les collectivités, ce qui représente tout un défi, compte tenu de l'ampleur des besoins des Premières Nations à ce chapitre.

Les chefs sont conscients du fait que le logement joue un rôle de premier plan dans les collectivités, et que toute amélioration à cet égard est susceptible d'occasionner des progrès concrets pour nos membres en matière de santé, d'éducation et d'emploi.

Afin de réaliser cet objectif, l'APNQL déploie une série d'efforts. Nous tentons de cerner les stratégies les mieux à même de répondre aux besoins en matière de logement des Premières Nations, nous tenons une banque de données concernant les besoins des collectivités et nous présentons des exposés à diverses organisations afin de les influencer en notre faveur.

Je dois aussi attirer votre attention sur le fait que l'APNQL fait partie intégrante du Comité régional tripartite en logement, qui comprend également des représentants du ministère des Affaires autochtones et de la Société canadienne d'hypothèques et de logement. Nous discutons ensemble de questions d'intérêt commun touchant le logement, et nous élaborons des stratégies conjointes en la matière. Ce comité constitue un exemple de collaboration entre les Premières Nations et des partenaires gouvernementaux.

Il y a 40 Premières Nations au Québec et deux au Labrador. Elles comptent 81 000 membres enregistrés, et 70 p. 100 d'entre eux vivent dans des collectivités des Premières Nations. Ces collectivités renferment 14 700 unités de logement, et chacune d'entre elle abrite en moyenne quatre personnes — j'insiste sur le fait qu'il s'agit d'une moyenne, car nous savons qu'il arrive que des familles de 8, 9 ou même 10 personnes vivent entassées dans de petites résidences.

Le surpeuplement est la principale source de nos besoins en matière de logement. Par comparaison, on compte en moyenne 2,1 personnes par unité d'habitation au Québec, selon le plus récent recensement mené par Statistique Canada.

Depuis 15 ans environ, l'APNQL tient une banque de données portant sur les besoins en matière de logement des Premières Nations. Nous utilisons les données ministérielles de base comme point de départ, et nous les validons ensuite auprès des collectivités. En outre, nous les comparons avec les données du recensement de Statistique Canada, ce qui nous permet d'expliquer les différences. Enfin, nous disposons de données fiables fournies par les collectivités. Nous utilisons toutes ces données afin de sensibiliser les autorités à l'égard des besoins en matière de logement des Premières Nations du Québec et du Labrador.

Ainsi, notre base de données nous fournit de l'information concernant les besoins des Premières Nations et, de façon plus générale, de la région, en ce qui a trait à la construction d'unités d'habitation, à la remise en état et à la décontamination de logements existants et aux infrastructures de base. Nous avons brossé un tableau de la situation pour les années 2000, 2006 et 2012.

Lorsqu'on examine des statistiques englobant une longue période, il est possible de relever des tendances et de tirer des conclusions. Par exemple, nous sommes en mesure de dire que, en moyenne, 250 unités de logement sont construites chaque année dans nos collectivités. De 2006 à 2012, le gouvernement du Canada a affecté des fonds supplémentaires au logement dans les collectivités des Premières Nations; plus précisément, il a investi 295 millions de dollars sur trois ans en 2005, et 400 millions de dollars sur deux ans en 2009. Ces investissements ont eu des effets concrets dans nos collectivités — comme je viens de le dire, elles bâtissent en moyenne 250 unités de logement par année. En outre, grâce à ces deux importantes initiatives, 750 unités d'habitation se sont ajoutées à notre parc immobilier — en six ans, de 2006 à 2012, nous avons construit autant d'unités que nous n'en construisions auparavant en neuf ans. Cela n'est certainement pas étranger au fait que, au cours de cette période, le taux de croissance de notre parc immobilier — 17 p. 100 — a été supérieur au taux de croissance de la population de nos collectivités — 11 p. 100. Ce rendement se reflète dans le nombre moyen de personnes par logement, qui a légèrement diminué de 2006 à 2012 — il est passé de 4,1 à 3,9.

Je pourrais établir un parallèle du même ordre entre les fonds supplémentaires octroyés durant cette période et la rénovation de 2 150 unités d'habitation.

Ce que je tente de faire ressortir, mesdames et messieurs, c'est que nos chiffres montrent que, lorsque le gouvernement du Canada va au-delà des programmes courants et investit des sommes supplémentaires dans le logement des Premières Nations, cela donne des résultats concrets. La courbe de l'évolution des besoins en matière de nouveau logement indique clairement l'effet qu'ont eu les initiatives de 2005 et de 2009. De 2000 à 2006, ces besoins ont augmenté de 25 p. 100, et de 2000 à 2006, de 7 p. 100 seulement. Il s'agit là d'un pas dans la bonne direction.

Cependant, la période de 2006-2012 a été marquée par une forte inflation dans les secteurs de la construction, du logement et des infrastructures, ce qui a accru de façon spectaculaire nos besoins financiers, qui s'élèvent à présent à 2,5 milliards de dollars. Il s'agit là du montant qu'il faudrait investir pour répondre aux besoins en matière de logement des Premières Nations du Québec et du Labrador. De façon plus précise, les besoins de nos 42 Premières Nations sont les suivants : 9 400 unités d'habitation doivent être construites pour régler les problèmes de surpeuplement, pour remplacer les logements décrépits, pour répondre aux besoins liés à la croissance de la population sur une période de cinq ans, pour accueillir des non-résidents qui souhaitent s'installer dans leur collectivité et pour établir de nouvelles collectivités; 5 000 unités doivent être rénovées; 1 100 unités touchées par la présence de moisissures doivent être décontaminées; 63 unités contenant un isolant de vermiculite doivent être décontaminées; 279 cas de contamination au radon ont été relevés; et, enfin, 8 300 parcelles de terrain doivent être affectées à des travaux d'infrastructure.

De plus, l'échéance du plan d'action économique a marqué le retour au rythme normal de construction et de rénovation. Je crains que notre prochaine mise à jour statistique n'indique une forte croissance de nos besoins liés au logement, comme ça a été le cas de 2000 à 2006. Comme vous le savez, nos collectivités doivent composer avec une forte demande au chapitre du logement, laquelle s'explique par la croissance de notre population, la hausse des coûts de construction et la réduction de l'ampleur du programme de logement social — je fais ici allusion au programme de logement de la SCHL établi aux termes de l'article 95.

De façon générale, les crédits affectés au secteur du logement sont insuffisants. Cela pose de grandes difficultés pour les Premières Nations, surtout celles où le marché immobilier n'est pas établi et où l'économie locale et régionale est peu développée.

La solution que les chefs préconisent en vue de régler la crise du logement est la même depuis plusieurs années, et comporte deux mesures de base, à savoir l'injection massive de fonds fédéraux afin d'éliminer l'arriéré, et la tenue de pourparlers visant l'élaboration et la mise en œuvre d'une nouvelle stratégie permettant aux Premières Nations d'exercer leur compétence en matière de logement.

Les chefs de l'APNQL croient aux partenariats, et j'estime que c'est au moyen d'une démarche axée sur la coopération que nous devons envisager de combler les besoins en matière de logement des Premières Nations.

Meegwetch.

Le président : Merci. Je crois que nous allons tenir la période de questions une fois que tous les exposés auront été entendus.

Chef Hudson, vous avez la parole.

Glenn Hudson, chef, Première Nation de Peguis, Manitoba, Assemblée des Premières Nations : Bonjour. Je tiens d'abord à vous remercier de m'avoir invité à me présenter ici ce matin afin de prendre part à votre débat.

Je m'appelle Glenn Hudson, et je suis chef de la Première Nation de Peguis, au Manitoba. Je suis originaire d'une collectivité ojibway-crie du Manitoba. Peguis se trouve à deux ou trois heures de route au nord de Winnipeg, dans la région des lacs du Manitoba, région qui porte bien son nom, mais dont la situation géographique a également été à l'origine de revers de fortune. S'il s'agit d'un nom approprié, c'est que la région est située entre deux des plus vastes plans d'eau de la province et du pays — le lac Manitoba et le lac Winnipeg —, ce qui a eu une énorme incidence sur le destin de notre collectivité. Cependant, cette situation a occasionné des coups du sort, car lorsque le niveau de l'eau monte, nos terres et nos maisons sont inondées, et nous devons passer à la prise de mesures de rétablissement. En d'autres termes, nous devons mener une campagne coûteuse contre les autorités externes afin de nous assurer que nos gens reçoivent un traitement équivalent à celui qui est accordé aux Manitobains et aux Canadiens dont les habitations sont touchées par des catastrophes comme une inondation. Le contrôle du niveau de l'eau de ces lacs relève des services d'hydroélectricité, dont la priorité consiste à exploiter les ressources hydriques sans égard aux priorités des habitants des réserves. Il s'agit d'un gros problème auquel nous devons faire face au moment où nous tentons de planifier la construction de logements pour nos gens.

La Première Nation de Peguis s'efforce de s'intégrer à l'économie du Manitoba. Notre réserve a été relocalisée en 1907, après la cession illégale de réserves de St. Peter, situées dans les riches terres agricoles de Selkirk. La revendication territoriale déposée par notre conseil de Première Nation relativement à cette cession illégale a finalement été réglée en 2009. Nous nous affairons à établir de nouveau notre présence dans la région de Selkirk en sélectionnant des terres en vertu de nos droits fonciers issus de traités. Nous choisissons aussi des terres sur l'ancien site des casernes Kapyong, à Winnipeg. Le 18 décembre 2013, j'ai annoncé l'établissement d'un partenariat avec Assiniboia Downs — coentreprise de Manitoba Jockey Club —, de Winnipeg, en vue de la construction d'un hôtel, d'un centre des congrès, de locaux pour la vente au détail et de logements dans le secteur des installations de Downs. Ce projet doit commencer cette année.

Quelque 3 900 membres de la Première Nation de Peguis vivent dans la réserve de la collectivité, et environ 4 700 autres vivent à l'extérieur de la réserve, laquelle comporte à peu près 950 résidences unifamiliales et quatre résidences constituées de deux appartements. Comme plus ou moins 600 résidences sont requises pour combler l'arriéré, on peut dire que la réserve est touchée par une crise du logement. De nombreux résidents vivent dans des logements insalubres; le surpeuplement, la moisissure et les dommages causés par les inondations suscitent du stress, des maladies respiratoires et d'autres troubles de santé. La moitié des logements de la réserve sont situés sur les rives de la rivière Fisher, de sorte qu'ils sont susceptibles d'être endommagés par une inondation. Au cours des sept dernières années, seulement 29 maisons et un immeuble de six logements destinés aux aînés ont été construits.

En 2009, Chuck Strahl, ministre des Affaires autochtones de l'époque, avait promis de remplacer en trois ans 75 de nos 480 unités d'habitation touchées par les inondations. Toutefois, à ce jour, seulement neuf unités ont été construites.

En 2010, les gouvernements du Canada et du Manitoba se sont empressés d'investir 100 millions de dollars pour la construction d'un canal d'urgence servant à drainer les eaux du lac Manitoba. Le projet a été réalisé promptement. En 2014, nous sommes toujours en attente de l'aide financière promise il y a plus de trois ans à nos membres touchés par les inondations. Dans notre réserve, ce sont nos maisons qui ont été détruites par les diverses inondations, et non pas des chalets ou des immeubles à vocation récréative. Il s'agissait de la résidence principale des personnes touchées. Nous n'en voulons pas aux Premières Nations et aux autres qui profiteront du canal construit afin de réduire au minimum les répercussions des inondations dans leur région. Le conseil de la Première Nation de Peguis a demandé aux gouvernements fédéral et provincial de collaborer avec lui afin d'élaborer une solution à long terme du genre de celle de la dérivation des eaux du lac Manitoba, mais dont l'ampleur serait bien moindre. Nous proposons la construction d'un canal de dérivation ou d'un canal d'évacuation des crues sur la rivière Fisher. À ce jour, on ne nous a offert que 8,5 millions de dollars afin de remplacer ou de déplacer 75 résidences, alors que, dans les faits, 480 unités d'habitation ont été touchées par une inondation survenue en 2010.

En dépit de ces problèmes, la Première Nation de Peguis fait des progrès en matière de logement. Notre situation géographique nous rappelle chaque jour que nous devons construire nos habitations de façon durable. Nous devons trouver une manière d'établir une distinction entre l'administration des questions relatives au logement et notre processus politique. C'est le fait que des personnes ont tenté de se faire du capital politique avec le dossier du logement qui a creusé notre déficit jusqu'au point qu'il avait atteint avant 2008.

C'est pour cette raison que, en 2010, notre conseil a constitué un comité chargé de l'administration du logement dans notre réserve. Le conseil demeure responsable de certaines décisions prévues par la loi, lesquelles concernent principalement les terres. Le conseil de la Première Nation de Peguis, qui est responsable du logement de tous les membres de la bande, y compris ceux qui vivent à l'extérieur de la réserve, a autorisé le comité de logement à se constituer en société. Au cours des trois dernières années, le comité a examiné et révisé la politique en matière de logement de la Première Nation de Peguis, il a assigné, au besoin, des logements, et il a dirigé un processus visant à faire approuver par la collectivité une stratégie globale en vue de régler la crise du logement.

Le 25 février 2012, les résidents de notre réserve ont approuvé la proposition soumise à la fiducie constituée par suite de la revendication relative à la cession en vue de l'octroi d'une subvention de 3,5 millions de dollars pour la création d'un fonds de construction immobilière. En 2012, nous avons conclu une entente avec la Banque de Montréal relativement à l'achat de 37 maisons mobiles de manière à ce que nous puissions combler plus rapidement nos besoins criants en matière de logement. Ces unités d'habitation ont été livrées, et nous sommes en train de couler les fondations afin de les mettre en place.

Le conseil et le comité de logement de la Première Nation de Peguis se sont mis d'accord sur l'adoption d'une nouvelle stratégie en matière de logement — une solution concrète, durable et indispensable élaborée chez nous, par nos gens. De toute évidence, l'ancienne façon de faire, qui consistait à confier au seul conseil la prise de décisions touchant le logement et à tabler entièrement sur le fait que le gouvernement fédéral respecterait son obligation découlant de traités quant au financement du logement, ne fonctionne pas. Les questions relatives au logement doivent être prises en charge par les membres de la collectivité, et les décisions en la matière doivent être approuvées par nos citoyens. Au cours des dernières années, le comité de logement, le conseil et le service du logement de la Première Nation de Peguis ont travaillé fort afin d'élaborer une nouvelle stratégie en matière de logement qui sera soumise à nos membres au cours des prochains mois aux fins de discussions et d'approbation.

Par suite d'un vote tenu dans la collectivité et de la subvention de 3,5 millions de dollars qui lui a été confiée en vue de donner un coup de fouet à la construction immobilière, le comité du logement a une mission à accomplir. La somme en question provient non pas du gouvernement, mais d'un fonds appartenant à la collectivité. Le fait que nous ayons utilisé ces fonds ne signifie pas que nous avons renoncé à nos droits juridiques et moraux issus de traités en ce qui a trait au logement. En utilisant ces fonds, le comité vise non pas à se substituer au gouvernement fédéral, qui a une obligation conventionnelle à assumer en matière de logement, mais plutôt à adopter une démarche pragmatique et responsable afin de prendre en charge une crise face à laquelle nous ne pouvons plus demeurer inactifs en attendant une intervention fédérale. Le comité et le conseil ont convenu qu'une nouvelle stratégie en matière de logement était requise. Le conseil de la Première Nation de Peguis fait tout ce qu'il peut afin d'accroître l'ampleur de son parc immobilier, mais nous craignons que cela ne soit pas suffisant.

Le comité du logement a déterminé qu'il devait adopter une stratégie à deux volets afin de régler la crise. Tout d'abord, le comité et le conseil doivent collaborer avec d'autres Premières Nations et d'autres organisations dans le cadre d'une initiative concertée touchant les droits conventionnels en matière de logement. Il faudrait élaborer une stratégie axée sur l'accroissement de la collaboration et où les échelons supérieurs du gouvernement, les autorisations de financement et les pratiques exemplaires de l'industrie joueraient un rôle afin de régler le problème du logement dans la réserve de Peguis. Cette stratégie devrait comporter des mesures d'ordre juridique permettant de susciter une réforme fondamentale des cadres actuels, qui ont pour effet d'entraver les progrès et de décourager ceux qui veulent les provoquer. Par exemple, pourquoi les Premières Nations de l'Ontario ont-elles droit à une allocation-logement, et pas celles du Manitoba? La Première Nation de Peguis doit déployer des efforts afin d'obtenir une réponse à cette question, et si aucune réponse raisonnable ne lui est transmise, elle doit prendre les mesures qui s'imposent afin de pallier une situation injuste et inadmissible que les Premières Nations doivent subir en matière de logement en raison des échelons supérieurs de gouvernement. Les Canadiens accepteraient-ils sans résister une telle situation? Non. Leurs dirigeants devraient tenir compte de leurs préoccupations, à défaut de quoi ils auraient des comptes à rendre.

Ensuite, une solution locale doit être fondée sur un principe aussi simple que celui de l'utilisateur-payeur — en d'autres termes, ceux qui ont un emploi doivent assumer les coûts de leur propre résidence de manière à ce que tout le monde ait la possibilité de disposer d'un logement adéquat et à ce que nous puissions supprimer notre arriéré.

C'est ce qui a permis à nos aînés de passer à travers des temps difficiles. Cela peut fonctionner pour nous aussi. Ceux qui ont les moyens de payer leur résidence le font. En fait, dans notre collectivité, il y a une demande pour ce qui est des prêts hypothécaires — si je ne m'abuse, plus de 80 personnes sont en attente d'un prêt hypothécaire lié à leur résidence.

Les fonds alloués par le gouvernement fédéral nous permettraient de construire un plus grand nombre de résidences. Qu'est-ce qui est viable sur les plans financier et environnemental? Les gens de ma génération ne doivent pas refiler à leurs enfants et à leurs petits-enfants leurs factures en matière de logement. À cet égard, nos décisions doivent être viables dès maintenant, et non pas dans l'avenir. Nous savons que la chose responsable à faire consiste à payer nos propres maisons. Nous devons également prendre des décisions durables sur le plan environnemental — nous devons éviter de provoquer des dégâts environnementaux au moment de mettre en œuvre nos projets immobiliers.

Je tiens à souligner que nous avons prévu que chaque nouvelle résidence et chaque nouvel édifice à vocation commerciale construit dans notre réserve sera chauffé à l'énergie géothermique.

À nos yeux, nos terres et notre environnement ne font qu'un — nous avons une responsabilité sacrée à assumer à cet égard.

Il va sans dire que ceux qui n'occupent pas un emploi n'ont pas les moyens de payer leur maison. Une nouvelle stratégie doit prendre en considération le fait que des gens se retrouvent dans le besoin par suite d'une incapacité d'occuper un emploi rémunérateur ou sont au chômage en raison de la conjoncture économique difficile. C'est la raison pour laquelle nous nous sommes efforcés, au cours des dernières années, de créer des liens et des partenariats avec le milieu des affaires de notre collectivité et de l'extérieur. De tels partenariats sont nécessaires pour que nous puissions renforcer nos capacités en matière d'éducation, de formation et d'affaires, et offrir des emplois à nos gens.

De quelle façon la construction immobilière peut-elle contribuer à notre économie? Le développement économique, la formation et la création de capacités en matière de métiers, de passation de marchés et d'approvisionnement en matériel doivent constituer des éléments clés de notre stratégie en matière de logement.

Je tiens à mentionner que l'un des seuls magasins Home Hardware de notre région est situé dans notre réserve. C'est là que nous achetons une partie de notre matériel.

La stratégie relative au logement doit constituer une solution globale élaborée et approuvée par les membres de la collectivité. En 2011, au moment d'entrer sur le marché immobilier, la Première Nation de Peguis a conclu une entente avec le Fonds pour les logements du marché destinés aux Premières Nations afin de faciliter l'obtention d'un prêt en vue de l'acquisition d'un logement disponible sur le marché, mais également de permettre à notre collectivité de devenir autonome au moment de mettre en place un système durable de logement fondé sur le marché.

D'autres réserves sont passées à un marché libre de l'habitation où un plus grand nombre de personnes sont propriétaires de leur propre résidence, et où ils sont en mesure de la vendre à une autre personne ou de profiter des avantages découlant de l'accession à la propriété, de la même façon que les propriétaires de logement vivant à l'extérieur des réserves. Les personnes qui vivent dans les réserves peuvent aussi faire cela.

Dans la réserve de Peguis, au moins 100 résidences sont occupées par des gens qui payent un loyer ou une hypothèque. Il a été difficile d'amener nos gens à devenir propriétaires de leur logement au moyen d'un prêt hypothécaire, mais nous estimons que, à long terme, le fait d'encourager le libre marché permettra à nos gens de tirer un sentiment de fierté de leur accession à la propriété.

Qu'est-ce que le comité de logement a fait des 3,5 millions de dollars alloués par la fiducie constituée par suite de la revendication relative à la cession? Le 25 février 2012, après avoir consulté les plans immobiliers proposés par le comité, les membres de notre collectivité ont approuvé l'allocation de ce montant forfaitaire afin qu'il serve à l'obtention de prêts d'une institution bancaire visant à régler de façon immédiate et complète la pénurie de logements qui sévit dans notre réserve.

Dans l'avenir, nous continuerons de collaborer avec les gouvernements fédéral et provincial en vue d'accroître notre parc immobilier, mais à ce jour, le progrès s'est révélé d'une lenteur frustrante.

Je vais vous fournir un exemple de collaboration avec le gouvernement provincial. Un immeuble comportant plus de 55 unités d'habitation a été construit par le gouvernement provincial tout juste à l'extérieur des frontières de notre réserve. Dans cet immeuble, 15 unités n'étaient occupées que par deux personnes. Nous avons informé le gouvernement provincial de la demande dans notre collectivité, et il a donc pris la décision de permettre à des gens de tout âge de louer des unités. Tout de suite après, ces unités se sont remplies.

Les problèmes que nous causent les inondations demeurent affligeants. Nous avons besoin de la coopération des échelons supérieurs des gouvernements afin de remplacer les solutions à court terme par des solutions à long terme qui nous permettront de passer à travers la crise actuelle. La saison de construction à venir marquera le début d'une nouvelle ère pour notre secteur immobilier. Nous construirons 54 unités de logement grâce à divers programmes, notamment ceux de la SCHL et d'AADNC, de même que notre propre programme financé par la BMO et axé sur les principes du logement durable et du logement fondé sur le marché. Nous avons beaucoup de pain sur la planche, mais il est important que nous montrions de façon concrète que nous faisons des progrès, même si quelques-uns des programmes fédéraux en vigueur ne nous fournissent pas le soutien requis à ce moment-ci.

Je tenais à mentionner que nos fonds en matière de logement nous permettront de construire des infrastructures étroitement liées aux logements qui seront bâtis, à savoir les usines d'épuration des eaux usées et de traitement de l'eau. Je sais que, en 2005, le gouvernement fédéral disposait d'un programme relatif aux hypothèques et au logement, et qu'il s'assortissait de sommes visant la construction de ces infrastructures de traitement des eaux; cependant, dans le cadre du programme général de la SCHL et d'autres organismes, ce n'est pas le cas — ces fonds doivent être obtenus de façon distincte. Il faudrait donc envisager de combiner les fonds relatifs aux infrastructures et ceux liés aux logements.

En outre, les sommes allouées par Santé Canada dans le cadre d'initiatives visant à soutenir les usines de traitement de l'eau et les réseaux d'aqueduc ne sont pas suffisantes. Un chef d'une collectivité éloignée du nord du Manitoba m'a dit que sa réserve disposait d'un réseau d'aqueduc permettant de fournir de l'eau chlorée, mais que les fonds alloués par le gouvernement fédéral ne lui permettaient d'acheter du chlore que pendant la moitié de l'année. En effet, comme il s'agit d'une collectivité isolée, il est difficile de transporter des choses par camion jusque là-bas. Ainsi, pendant l'autre moitié de l'année, sa collectivité doit se passer d'eau traitée. Nous devons redoubler d'efforts afin de régler les problèmes de ce genre.

Je tenais également à souligner que notre collectivité a toujours vécu dans un environnement durable, et que nous devons assurément envisager de mettre en place des programmes faisant la promotion de l'utilisation d'énergie durable, par exemple l'énergie géothermique ou même solaire, dans les régions du Grand Nord où on utilise encore le diesel.

J'aimerais maintenant formuler quelques observations à propos des infrastructures. De façon générale, dans quelques-unes des collectivités de la région des lacs — que je représente ici à titre de président du Conseil tribal des réserves de la région des lacs —, nous devons prendre des mesures afin de nous protéger contre les inondations, et, à coup sûr, prendre des mesures à long terme afin de remédier à leurs effets et de les atténuer à long terme, de manière à ce que nous puissions avoir l'assurance que nos maisons et nos infrastructures ne seront pas touchées par les inondations. Je sais qu'il y a quelque 2 000 personnes qui ont été évacuées en 2010 et qui n'ont pas pu regagner leur domicile, alors que, dans la région et dans l'ensemble du Manitoba, il n'y aucun évacué non autochtone. Je vous pose la question : comment cela peut-il se passer aujourd'hui? À coup sûr, j'aimerais que le comité se penche là-dessus. À mon avis, des solutions concrètes peuvent être appliquées, mais nous devons nous engager en bonne et due forme à régler ces problèmes.

Meegwetch.

Shawn (A-in-chut) Atleo, chef national, Assemblée des Premières Nations : Merci, monsieur le président. Bonjour à tous. Je suis honoré d'être ici en compagnie des chefs Paul et Hudson. Je vous suis reconnaissant de m'avoir invité à me présenter devant vous aujourd'hui sur un territoire algonquin n'ayant fait l'objet d'aucune cession.

Comme le chef Hudson l'a mentionné, il est important que nous replacions notre présente discussion dans le contexte des droits issus de traités, du titre autochtone, des droits ancestraux et des droits énoncés dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Ainsi, nous avons le droit d'élaborer une stratégie en vue de régler les problèmes avec lesquels nos peuples sont aux prises. Je sais que vous avez déjà entendu un certain nombre de témoins, et je crois qu'il était important que vous preniez connaissance des points de vue régionaux et locaux.

Je reprends à mon compte les propos que les chefs ont formulés avant moi. Les chiffres que la chef Paul a mentionnés concernant les besoins décelés par l'APNQL dans le cadre de ses recherches ne sont pas négligeables, et j'ai pu, en compagnie du chef Hudson, constater moi-même l'ampleur des problèmes auxquels il fait face. Il s'agit d'une chose que j'ai bien souvent l'occasion de faire. J'ai l'énorme privilège de me rendre dans des collectivités de toutes les régions du pays, et il est très difficile d'observer les souffrances occasionnées par le surpeuplement et l'absence de logements adéquats, sûrs et sécuritaires. Ces problèmes sont fréquemment plus marqués dans les régions du Nord, où le nombre insuffisant de logements et le caractère inadéquat de ceux disponibles ne sont que trop flagrants. Cela pose des risques pour la santé. Je raconte souvent l'histoire du jeune Jaden. Il s'agit d'un garçon de 10 ans qui, lorsque je lui ai rendu visite, vivait avec neuf personnes dans une cabane ne comportant qu'une seule pièce, où il n'y avait ni électricité ni eau courante, et à l'avant de laquelle étaient placés des seaux faisant office de toilette.

Monsieur le président, vous avez évoqué l'éducation, et je crois que, dans le cadre de son étude, le comité se penchera sur quelques parallèles entre l'éducation et d'autres secteurs. Je vais formuler quelques observations, mais je garderai Jaden présent à l'esprit et dans mon cœur, car je rencontre de nombreuses personnes dans sa situation. Il m'a dit à quel point son grand-père était fier des résultats qu'il obtenait à l'école. Pourtant, il doit être extrêmement difficile pour lui de faire ses devoirs dans une cabane où neuf personnes vivent dans la même pièce. Cela soulève la question de savoir pourquoi, en 2014, des gens vivent toujours dans de telles conditions au sein de l'un des pays les plus riches du monde.

J'ai d'autres commentaires à vous présenter. D'une part, je crois qu'il est extrêmement inspirant d'observer, partout où je me rends, la résilience des gens que je rencontre et avec lesquels je passe du temps, mais, d'autre part, j'estime qu'il est temps d'informer davantage les Canadiens à propos des besoins criants qu'éprouvent nos gens dans les domaines qui ont été mentionnés, car, selon moi, les Canadiens ne sont pas nécessairement au courant de l'existence des conditions que nous décrivons. Ils ne savent peut-être pas qu'il arrive que trois ou quatre familles vivent ensemble dans une même maison chauffée au moyen d'un poêle à bois ou d'une génératrice diesel, ou que nos collectivités ne disposent pas des infrastructures de base, ou qu'elles sont dotées d'infrastructures inefficaces en raison du financement inadéquat des projets d'immobilisations, de fonctionnement et d'entretien. Ces facteurs ont une incidence sur l'apprentissage et la croissance des enfants, notamment le jeune Jaden, et sur les mesures que nos collectivités peuvent prendre afin de se préparer à saisir des occasions de développement économique. Il est facile de comprendre que l'accès à de l'eau potable constitue un catalyseur économique en l'absence duquel les investisseurs ne seront pas attirés par nos collectivités.

Les conditions de logement des Premières Nations sont inférieures aux normes, voire déplorables, et il s'agit d'un phénomène persistant qui prend de l'ampleur. Les programmes actuels en matière de logement ne répondent pas à la demande croissante pour de nouvelles unités d'habitation, demande suscitée par une croissance démographique supérieure à la moyenne, le surpeuplement des logements, les dommages occasionnés par les inondations et la détérioration des logements résultant de travaux de construction de piètre qualité et de la moisissure.

On estime que, de 2010 à 2034, l'arriéré augmentera pour atteindre 130 000 unités d'habitation. Une proportion de 44 p. 100 des unités existantes exigeront des rénovations majeures, et 18 p. 100 d'entre elles devront être remplacées.

Une partie des unités à remplacer ont été ravagées par le feu. Des personnes ont récemment perdu la vie en raison d'incendies, ce qui attire l'attention sur l'absence d'infrastructures de lutte contre les incendies et dénote des lacunes au chapitre de la sensibilisation et de la formation dans les collectivités.

Dans un rapport publié en 2004 concernant les incendies dans les habitations au Canada, la SCHL a fourni des statistiques relatives aux pertes attribuables aux incendies dans les maisons unifamiliales et bifamiliales de toutes les régions du pays. Il semble que, en fonction du nombre d'unités d'habitation, au sein des collectivités des Premières Nations, le taux d'incendie est 2,4 fois plus élevé que dans le reste du Canada, le taux de blessures, 2,5 fois plus élevé, le taux de dommages occasionnés par le feu, 1,7 fois plus élevé, et le taux de décès, 10,4 fois plus élevé. Quelques raisons peuvent expliquer cela, entre autres, le fait que les pertes sont plus importantes dans les régions rurales éloignées qu'elles ne le sont dans les régions urbaines. J'ai pu constater cela moi-même dans mon petit village d'Ahousaht, situé sur la côte ouest de l'île de Vancouver.

Une autre raison tient au surpeuplement. Il a été prouvé que le surpeuplement crée des conditions qui ouvrent la voie à des taux plus élevés de décès causés par des incendies.

Une évaluation du logement dans les réserves effectuée en février 2011 par le Secteur de la vérification et de l'évaluation de la Direction générale de l'évaluation, de la mesure du rendement et de l'examen d'AADNC, a fait ressortir les besoins continus en la matière. Il renferme la conclusion suivante : « Même si s'est poursuivie la construction de nouveaux logements dans les réserves, les pénuries persistent et paraissent plus gagner en importance que le contraire. »

On estime que, de 2013 à 2018, les subventions versées par le gouvernement fédéral pour 9 580 logements sociaux dans les réserves arriveront à échéance. Au cours de la même période, on ne prévoit conclure que 2 075 nouvelles ententes, ce qui signifie que quelque 7 505 familles n'auront pas les moyens de se payer un logement dans leur collectivité, et devront probablement s'installer chez des amis ou des membres de leur famille, ce qui causera des problèmes de surpeuplement.

La présence de moisissures dans de nombreuses résidences des collectivités des Premières Nations a rendu plus urgent l'octroi de fonds visant la remise en état de ces logements. Le surpeuplement a aggravé les effets causés par les inondations et la moisissure sur la santé des occupants d'une multitude de logements situés dans des réserves. À l'heure actuelle, 1 891 membres de Premières Nations ne peuvent plus vivre dans leur maison depuis les inondations survenues au Manitoba il y a plus de deux ans, en 2011, et 801 autres personnes ont été évacuées à la suite de l'inondation qui a eu lieu en Alberta en juillet 2013.

Leurs résidences ne sont plus habitables, et elles doivent être rénovées, remplacées ou déplacées, sans parler du coût humain extrêmement élevé que doivent assumer les familles séparées de leur territoire ni des graves conflits et traumatismes découlant du fait d'être obligées de s'installer ailleurs.

Les 300 millions de dollars que le gouvernement fédéral a injectés en 2007 dans le Fonds pour les logements du marché destinés aux Premières Nations n'ont donné lieu qu'à 55 prêts au logement dans les réserves. Du 1er avril au 27 novembre 2013, 59 prêts visant l'accession à la propriété individuelle ont été consentis dans le cadre du programme des garanties d'emprunt ministérielles d'AADNC. Cela montre que les programmes que le gouvernement a créés ne répondent pas aux besoins des Premières Nations. Les processus, les restrictions, les directives et les conditions d'admissibilité dissuadent les membres des Premières Nations d'accéder au Fonds pour les logements du marché destinés aux Premières Nations. Il y a des chefs qui ont complètement renoncé à tenter de répondre aux conditions d'admissibilité.

Les Premières Nations qui ont obtenu du financement de ce fonds ont réussi à renforcer leurs capacités, notamment en matière d'éducation, mais les Premières Nations qui ont véritablement besoin d'un tel financement sont incapables d'y accéder.

En 2005, l'Assemblée des Premières Nations a déterminé que 85 000 unités d'habitation devaient être construites afin de supprimer l'arriéré. Pour en arriver à ce nombre, elle s'est fondée sur les chiffres fournis directement par les organisations des Premières Nations. Selon une analyse plus récente, menée par Stewart Clatworthy à la demande d'AADNC, au cours de la période s'étendant de 2010 à 2035, plus de 130 000 unités d'habitation seront requises, comme je l'ai mentionné plus tôt, et de nombreuses autres devront être rénovées et remises en état en raison des répercussions extrêmes des changements climatiques, de la piètre qualité des constructions, du surpeuplement, des coûts d'entretien élevés et du fait que les gens n'ont pas le revenu ni les compétences nécessaires pour effectuer les travaux d'entretien courants.

Quelques régions ont tenté, avec succès, de chiffrer leurs besoins en matière de logement. Toutefois, les régions ne disposent pas toutes des ressources requises aux fins de cet exercice. Il semble qu'un effort plus concerté permettrait de chiffrer les besoins en matière de logement à l'échelle nationale. Il faudrait également établir un dialogue entre les divers gouvernements en vue de l'élaboration de plans d'action dont le but consisterait à régler tous les problèmes liés au logement. Il est essentiel que les gouvernements des Premières Nations participent avec les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux à l'élaboration et à la mise en œuvre de solutions permettant d'instaurer des relations harmonieuses et coopératives fondées sur des principes, sur la démocratie, sur le respect des droits de la personne et la non-discrimination. Les chefs membres de l'assemblée ont appuyé la création d'une stratégie nationale relative au logement des Premières Nations qui serait fondée, comme je l'ai indiqué plus tôt, sur les droits inhérents et les droits issus de traités, et qui viserait à fournir des logements adéquats, accessibles et abordables aux Premières Nations et à énoncer les mesures que toutes les parties peuvent prendre pour obtenir en collaboration les résultats attendus. Les difficultés posées par une telle initiative sont considérables, mais les chefs des Premières Nations sont manifestement résolus à examiner les options et les possibilités qui permettront de surmonter les obstacles auxquels nous faisons face, comme l'ont indiqué plus tôt les chefs ici présents.

Les membres et les chefs de l'Assemblée des Premières Nations ont réclamé l'adoption d'une stratégie globale englobant au sein d'un ensemble homogène toutes les facettes du logement, qu'il s'agisse des fonds à injecter dans le logement social, de la construction de logements abordables ou de la mise en œuvre de programmes financés adéquatement qui offrent aux personnes dans le besoin des solutions facilitant l'accession à la propriété individuelle. Je crois que vous conviendrez que la situation actuelle ne peut par perdurer.

Par leurs paroles et par les actes sans précédent qu'ils posent, nos gens font savoir qu'ils n'attendront pas que les choses changent d'elles-mêmes. Nos jeunes nous montrent la voie à suivre dans le cadre de cette démarche de sensibilisation et de prise de conscience. La situation exige des solutions audacieuses. La créativité et l'innovation sont essentielles, et je crois comprendre que c'est pour cette raison que vous avez entrepris de vous pencher sur la question de façon plus approfondie.

Les Premières Nations évoluent malheureusement dans un environnement où la créativité est souvent entravée par des obstacles posés par les champs de compétence et la bureaucratie. La semaine dernière, l'Assemblée des Premières Nations a tenu une conférence nationale portant sur les infrastructures des Premières Nations à laquelle ont participé plus de 500 délégués de l'ensemble de nos territoires. Ces gens ont discuté des difficultés auxquelles ils font face et des façons novatrices qu'ils sont en train de mettre en place pour les surmonter. Cette conférence constituait un moyen de combler le besoin criant des Premières Nations en matière d'échange de renseignements. Il s'agissait pour eux d'une occasion unique de discuter de solutions novatrices.

Parmi les solutions qui ont été examinées, mentionnons le partenariat public-privé que l'on envisage de créer au Manitoba. Il s'agirait d'un projet commun auquel participeraient quatre écoles. Ce partenariat constituerait une première. Les Premières Nations ne disposent pas des capitaux requis pour combler leurs besoins en matière d'infrastructure, de sorte qu'un partenariat de cette nature représenterait un outil utile pour elles.

Nous nous sommes également penchés sur les solutions de rechange au chapitre de la réalisation des infrastructures, notamment la création d'un organisme régional dont les Premières Nations seraient propriétaires et qui serait exploité en partenariat en vue de la mise en œuvre de solutions durables, rentables et à long terme. Des partenaires se sont montrés intéressés à offrir, entre autres, des solutions en matière de prestation de services et d'approvisionnement, en vue de combler les besoins de nos collectivités sur le plan des infrastructures.

Toutefois, pour que ces solutions puissent être mises en place, il faut que le gouvernement fédéral modifie sa politique sur les accords de contribution de manière à ce que des engagements à beaucoup plus long terme puissent être pris dans le cadre des partenariats financiers de cette nature. Comme nous le savons, à l'heure actuelle, les accords de contribution sont en vigueur pendant un an, quelquefois plus, mais généralement cinq ans tout au plus. Il faudrait que le gouvernement s'engage pour 15, 20 ou 25 ans, voire davantage, de façon à ce que l'on puisse susciter l'intérêt de partenaires financiers.

Un autre important fait nouveau tient aux normes en matière de développement durable des Premières Nations, qui ont été élaborées dans le cadre d'un projet pilote de partenariat réunissant la collectivité Atikameksheng Anishnawbek, l'assemblée des Premières Nations et The Holmes Group, dirigé par Mike Holmes. Ce projet a abouti à un document en quatre volumes où l'adoption de 20 normes et pratiques exemplaires clés est recommandée afin que les Premières Nations puissent administrer de façon durable leur programme de logement et ainsi concevoir et construire des maisons de nature à durer plus longtemps. Les Premières Nations pourront adapter et modifier ces normes en fonction de leur milieu et de leur situation. De toute évidence, des investissements adéquats devront être effectués.

Au cours de la plus récente réunion des ministres des Affaires autochtones et des dirigeants d'organisations autochtones nationales, le ministre Valcourt a évoqué les besoins en matière de logement des Premières Nations et a souligné que des investissements accrus ne régleraient pas le problème. J'ai eu une impression de déjà-vu, et j'ai mentionné le fait que des propos semblables avaient été tenus à propos de l'éducation. Depuis des années, on nous répète la même chose à propos de l'éducation des Premières Nations — le gouvernement fédéral insistait sur le fait que nos écoles recevaient suffisamment de financement, en dépit de l'évidence flagrante du contraire.

Nous avons tourné la page et avons trouvé une nouvelle solution dans le cadre de laquelle les besoins réels des Premières Nations au chapitre des investissements en éducation — comme vous l'avez signalé, monsieur le président — sont reconnus. Comme cela s'est passé dans le cas de l'éducation, il faut que les ressources s'assortissent d'un soutien permettant aux Premières Nations d'élaborer et de mettre en œuvre elles-mêmes des solutions adaptées à leurs besoins et à leur situation uniques en leur genre.

On doit donner aux Premières Nations l'occasion de concevoir ces solutions et de contribuer à leur mise en œuvre. La solution doit offrir aux organisations des Premières Nations les ressources dont elles ont besoin pour acquérir les capacités techniques, financières et administratives requises afin d'établir les mécanismes de soutien dont elles ont besoin.

Nous avons recommandé que d'autres organisations régionales spécialisées dans les services techniques, par exemple l'Ontario First Nations Technical Services Corporation et l'Alberta Technical Services Advisory Group, soient prises en considération. Ces deux organisations ont été créées au milieu des années 1990 dans la foulée de l'initiative fédérale de transfert aux Premières Nations des responsabilités en matière de services techniques. Il faudrait envisager d'accroître le financement du volet des services techniques des conseils tribaux et des grandes collectivités des Premières Nations, ce qui comprend le fait de prendre conscience des mesures novatrices qui ont été prises, par exemple, par le comité du logement dont le chef Hudson a parlé.

Selon des rumeurs qui ont circulé, le gouvernement fédéral envisagerait d'élaborer à l'intention des Premières Nations des normes législatives de nature semblable à celles contenues dans les codes du bâtiment en place dans d'autres administrations. Soyons clairs : les Premières Nations tiennent absolument à construire des logements qui répondent aux normes les plus élevées en matière de sécurité et, comme on l'a indiqué, de durabilité environnementale, mais le fait d'adopter des lois afin d'imposer des normes n'est pas la solution, et, en fait, une telle façon de faire n'a jamais été la solution. Nous devons plutôt nous efforcer collectivement de supprimer les obstacles qui entravent l'innovation et empêchent les Premières Nations d'appliquer les solutions qui amélioreront véritablement la vie de leurs gens.

Je sais que les chefs assis à mes côtés vous ont parlé de la situation dans laquelle ils se trouvent. Avant de terminer, j'aimerais formuler quelques suggestions concernant des éléments que vous devriez examiner dans le cadre de votre étude.

Tout d'abord, nous recommandons que la portée des lacunes des Premières Nations au chapitre des infrastructures et les coûts à engager afin de les combler soient établis au moyen d'une évaluation nationale des besoins en capitaux. Une telle étude devrait comprendre un plan d'activités et un plan de mise en œuvre relatifs aux solutions viables à adopter afin de pallier l'insuffisance sur le plan de nos infrastructures. AADNC a mené une étude de ce genre à propos des réseaux d'aqueduc et des usines d'épuration des eaux usées. Selon le rapport déposé en juillet 2011, les sommes requises s'élevaient à 4,7 milliards de dollars. Cependant, le rapport ne comprenait pas de plan d'activités ni de plan de mise en œuvre.

Nous savons que, selon le Bulletin de rendement des infrastructures canadiennes de la Fédération canadienne des municipalités, dont les données s'appuient sur une enquête, un nombre considérable d'infrastructures municipales des quatre catégories d'actifs examinées sont dans un état jugé de passable à très mauvais. En moyenne, environ 30 p. 100 des infrastructures figurent dans cette fourchette. Le coût de remplacement de ces seules infrastructures s'élève à 171,8 milliards de dollars à l'échelle nationale.

Les carences des Premières Nations sur le plan des infrastructures sont beaucoup plus graves. Parmi les services et infrastructures communautaires financés par AADNC, mentionnons les réseaux d'aqueduc et le traitement des eaux usées, la distribution et la collecte des eaux, les routes et les ponts, la collecte de déchets solides et l'élimination des déchets, les réseaux de distribution d'électricité et les réseaux de stockage et de distribution de carburant en vrac. Il faudrait ajouter à cela les installations de lutte contre les incendies, les systèmes de détection d'incendie, les édifices communautaires et la lutte contre les inondations et l'érosion. Dans le cadre du budget de 2013, on a annoncé qu'environ 7 milliards de dollars seront injectés sur 10 ans dans les infrastructures des Premières Nations, par exemple les routes, les ponts, les réseaux de distribution d'électricité et d'autres priorités en la matière.

Nous estimons qu'une somme annuelle de 700 millions de dollars ne sera pas suffisante pour supprimer l'arriéré accumulé dans toutes les catégories d'infrastructures financées que j'ai mentionnées, surtout si l'on tient compte du fait que l'arriéré ne cesse de prendre de l'ampleur en raison de la croissance démographique, de la restructuration du capital et des nouveaux systèmes. À de nombreuses occasions, nous avons attiré l'attention sur les répercussions du plafond de 2 p. 100 imposé en 1996 sur les programmes destinés aux Autochtones. Si l'on tient compte de l'inflation et de l'accroissement des coûts de construction, le financement réel a stagné, tandis que la population a augmenté plus rapidement dans les réserves qu'à l'extérieur des réserves. Si nous parvenons à brosser un tableau exact de la situation, nous pourrons mettre en place des solutions.

En outre, l'APN recommande que, dans le but de créer des occasions d'innovation, le comité mène une étude sur les obstacles réels et permanents auxquels les Premières Nations sont confrontées au moment de mettre en œuvre les solutions qui leur permettraient de construire des logements et de soutenir, d'entretenir et de protéger les infrastructures de leurs collectivités.

On avance depuis longtemps que le partage des recettes de l'exploitation des ressources représenterait une solution au problème de financement des Premières Nations. Nos collectivités savent ce qu'elles doivent faire pour surmonter ces obstacles. On doit s'engager à collaborer avec elles en amont de manière à ce que l'on puisse véritablement soutenir leur potentiel.

Merci beaucoup.

Le président : Je tiens à vous remercier tous les trois des exposés que vous nous avez présentés, et surtout des recommandations concrètes que vous avez formulées et qui, je le sais, nous seront extrêmement utiles. Tout ce que je peux dire, c'est que, au moment d'entreprendre les présents travaux, le comité est véritablement frappé par l'urgence du problème. Nous sommes très heureux d'avoir décidé de nous pencher sur cette question.

La sénatrice Dyck : Merci des exposés que vous nous avez présentés ce matin. Vous nous avez fourni des informations si nombreuses que nous avons presque de la difficulté à déterminer par où nous devons commencer.

Je pourrais peut-être commencer par une question d'ordre très général. Pour l'essentiel, lorsque les gens se penchent sur la question du logement dans les réserves, ils se disent que la situation est trop complexe et jettent l'éponge. Il y a des besoins cruciaux à court terme qui ont été réglés, par exemple ceux causés par les inondations et que le chef Hudson a évoqués, puis il y a les besoins qui exigent une solution à long terme, à savoir un financement adéquat et des plans d'avenir.

Par où commencer? Si vous disposiez de toutes les ressources requises pour régler ce problème complexe, quelle serait la première mesure que vous prendriez? Quel serait ensuite votre objectif à long terme? Je sais qu'il s'agit d'une question générale, mais votre réponse nous aidera peut-être à préciser les choses.

Le président : Cette question s'adressait-elle au chef national?

La sénatrice Dyck : Elle s'adresse à quiconque veut y répondre.

M. Atleo : Je fournirai une réponse brève, vu que les autres chefs ont peut-être des réflexions à formuler. Il s'agit de régler la crise qui a été, à juste titre, évoquée, notamment par le chef Hudson, qui a mentionné que, si les problèmes avec lesquels nous sommes aux prises accablaient une quelconque banlieue d'une grande ville, cela soulèverait l'indignation. Je suis d'accord avec cela.

Le rapporteur spécial des Nations Unies est récemment venu au Canada pour parler de la crise en matière de droits de la personne qui sévit ici. Il s'agit là d'un exemple. On doit attirer l'attention sur la crise du logement à laquelle notre pays est en proie et sur les besoins auxquels les Premières Nations sont confrontées sur leurs propres territoires, mais il faut que les dirigeants assument leurs responsabilités et que des investissements adaptés aux besoins réels soient faits.

Je recommande au comité de poursuivre l'étude complète et approfondie qu'il a entreprise, et je lui recommande également de se pencher sur les suggestions formulées relativement à l'élaboration de solutions locales et à l'instauration d'un cadre souple pouvant être adapté aux besoins de chaque collectivité.

Mme Paul : J'aimerais ajouter que, comme nous l'avons indiqué durant nos exposés, le principal problème tient au surpeuplement. Il s'agit d'un problème qui touche non pas uniquement notre région, mais les collectivités de l'ensemble du pays. Dans ma région, au Québec, il s'agit du principal problème auquel nous nous heurtons.

La remise en état de nos logements représente un autre besoin criant. Là encore, on constate cela à l'échelle du pays. Les unités d'habitation doivent être décontaminées en raison de problèmes liés à la moisissure — lesquels sont attribuables au surpeuplement. On doit mettre l'accent sur les collectivités où les besoins en matière de logement social sont grands. Il s'agit là d'un élément qui n'est pas pris en considération. À mes yeux, c'est sur ces quatre points qu'il faut insister.

M. Hudson : J'ai une solution à cela. Elle met nos collectivités à contribution. J'y réfléchis depuis un certain temps. Pour l'essentiel, nous voulons mettre en œuvre des mesures à long terme qui permettront à nos collectivités d'atténuer les effets des inondations sur elles. Depuis le début des années 1970, c'est-à-dire depuis le début de la production d'hydroélectricité, notre collectivité subit chaque année une inondation — ce n'est que l'ampleur de l'inondation qui varie d'une année à l'autre.

En 2010 et en 2011, les inondations ont eu des répercussions majeures dans l'ensemble de notre collectivité — quelque 480 résidences ont été touchées. Dans l'immédiat, le gouvernement doit donner suite à l'engagement qu'il a pris — notamment par l'entremise du ministre de l'époque, M. Strahl — en ce qui a trait au remplacement de chacune de ces 480 résidences, même si cela doit se faire au moyen de l'installation de maisons mobiles. De toute évidence, bon nombre des personnes évacuées veulent regagner leur domicile. Il s'agit là d'une solution immédiate.

En ce qui a trait au fait de faciliter le renforcement des capacités et le développement économique, je mentionnerai que nous avons élaboré un plan visant la construction de maisons dans la collectivité. Nous disposons de l'ensemble de compétences requises à cette fin. Ce qu'il nous manque, c'est simplement les ressources nécessaires pour la mise en œuvre de ce plan. Les autres collectivités de la région des lacs participent actuellement à des pourparlers visant l'acquisition de terres qu'elles ne peuvent plus occuper. Les ajouts aux réserves doivent se faire de manière à ce que ces collectivités puissent accroître l'ampleur de leur territoire et y construire des habitations qui ne seront pas exposées aux inondations.

Je tenais également à faire des commentaires à propos du logement social. Au cours d'une conférence à laquelle j'ai pris part la semaine dernière, j'ai évoqué le taux de chômage élevé qu'affichent nos collectivités. À coup sûr, il faut prendre en considération les besoins en matière de logement social. Les allocations relatives au logement doivent être versées de façon uniforme à l'échelle du pays. Nous constatons que notre taux de logements non disponibles et de logements surpeuplés est le plus élevé des Prairies, et cela est attribuable à l'inaccessibilité de l'allocation-logement. Dans les provinces où cette allocation est offerte, le surpeuplement est un problème de moindre envergure. Je sais pertinemment que, dans ces provinces, il y a davantage d'unités de logement disponibles. On doit se pencher sur le problème de l'allocation-logement.

La sénatrice Dyck : Pourriez-vous me fournir de plus amples renseignements à propos des allocations de logement? Il s'agit d'un sujet que je ne connais pas. Ce programme semble caractérisé par des inégalités entre les régions. Il me semble déraisonnable que l'Ontario ait accès à des fonds dont les Prairies ne peuvent pas bénéficier.

M. Hudson : Le programme n'est pas uniforme à l'échelle du pays. Je sais que, au Manitoba, en Saskatchewan et en Alberta, l'allocation-logement offerte par le gouvernement fédéral et nos programmes sociaux est moins substantielle que celle dispensée par les gouvernements provinciaux. On constate des disparités semblables dans la région de l'Atlantique. En Ontario, au Québec et en Colombie-Britannique, un allocation-logement est offerte conformément aux normes provinciales. Ce programme doit être exécuté uniformément dans l'ensemble des provinces et des territoires.

Le président : Le programme est administré par AADN, n'est-ce pas?

M. Hudson : Oui.

La sénatrice Raine : En quoi consiste ce programme? S'agit-il d'une subvention pour le logement qui peut être utilisée de n'importe quelle façon?

M. Hudson : L'allocation-logement est versée aux personnes admissibles par l'entremise des programmes sociaux. Il s'agit d'un montant destiné à aider les bénéficiaires à payer leur loyer. Ainsi, si nous avions accès à cette allocation, nous pourrions, par exemple, envisager de financer un projet immobilier. Un tel projet deviendrait plus abordable.

Les personnes qui n'ont pas d'emploi — et une proportion d'environ 70 p. 100 des membres de notre collectivité sont dans cette situation — sont admissibles à ce programme social. Là encore, si nous avions accès à l'allocation- logement, nous pourrions envisager de financer à long terme quelques-uns des projets immobiliers qui sont grandement nécessaires.

La sénatrice Dyck : Vous avez mentionné l'état déplorable du logement dans les réserves. Pourtant, de façon générale, le grand public ne semble pas au courant de la situation. Croyez-vous qu'un rapport du comité serait utile au moment d'éduquer le grand public quant à la situation générale de manière à ce qu'il comprenne mieux ce qui se passe? Ma question s'adresse à vous trois.

M. Atleo : Je suis absolument favorable à cela. Dans le cadre de votre question précédente, vous avez évoqué la complexité. Il s'agit d'une chose qui, depuis longtemps, nuit considérablement aux relations entre les Premières Nations et le gouvernement du Canada. Le simple fait de faire fi du problème sous prétexte qu'il est trop complexe revient essentiellement à fermer les yeux sur une crise tragique qui sévit au pays sur le plan des droits de la personne. Partout dans le monde, le gouvernement du Canada a fait figure de champion des droits de la personne et a contribué à attirer l'attention sur des crises, et il est temps qu'il agisse de même à l'égard de ce qui se passe sur son propre territoire.

Le problème du logement n'est que l'un des nombreux problèmes avec lesquels sont aux prises les Premières Nations et pour lesquels nous pouvons établir des parallèles avec d'autres problèmes de nature politique, par exemple l'éducation et le besoin d'investissements adéquats. Le fait de régler ces problèmes revient à investir dans notre pays. Il faut renforcer les capacités et soutenir l'innovation en tenant compte des droits issus de traités de manière à ce que les Premières Nations élaborent elles-mêmes les solutions adaptées à leur population et des stratégies judicieuses pour elles.

La Première Nation de Peguis est manifestement en proie à des difficultés auxquelles viennent s'ajouter d'autres éléments, par exemple, la nécessité de prendre des mesures afin de lutter contre les inondations. Ainsi, nous devons élaborer un plan relatif aux solutions qui serait fondé sur le titre autochtone et les droits découlant de traités. Bien souvent, des solutions ont été imposées de l'extérieur et de façon unilatérale sur toutes sortes de sujets, par exemple l'emplacement des collectivités et l'incohérence du processus décisionnel relatif au déplacement de l'eau. D'un côté, il y a une collectivité des Premières Nations, et de l'autre, la route transcanadienne. Tout juste l'été dernier, à Calgary, j'ai pu observer comment diverses administrations ont pu créer une crise qui aurait pu être évitée et dont les aînés des collectivités albertaines ont fait les frais.

Les idées que nous expliquons aujourd'hui sont ancrées dans les droits issus de traités, notamment le droit des Premières Nations de concevoir une stratégie adaptée à leurs besoins.

À mon avis, nous ne pouvons pas faire abstraction du problème au seul motif qu'il est trop complexe, et le comité peut peut-être contribuer à ce que cela ne se produise pas. Les solutions existent. Les Premières Nations ont la capacité de mettre en œuvre leurs propres solutions, et le Canada peut prendre conscience du fait qu'investir dans la construction de logements sécuritaire revient à investir dans l'avenir d'enfants qui, comme le jeune Jaden, pourront disposer d'un endroit plus propice aux études, obtenir du succès et contribuer à la relance de leur collectivité. Si nous ne faisons pas cela dès maintenant, chers sénateurs, nous nuirons aux générations futures. Je crois que vous devriez insuffler un sentiment d'urgence aux travaux que vous menez et à l'étude que vous envisagez d'effectuer.

Le sénateur Moore : Je vous remercie à mon tour d'être ici.

En ce qui concerne l'entente en matière d'éducation qui a été annoncée l'autre jour, je tiens à vous dire, chef Atleo, que je suis au courant de ce que vous faites en tant que chancelier de l'Université de l'île de Vancouver, et je veux vous féliciter de faire la promotion de l'éducation en tant que solution à bon nombre des problèmes qui ont été évoqués. L'éducation est véritablement la solution. J'invite les gens qui croient que l'éducation coûte cher à réfléchir aux coûts que nous devrons assumer dans l'avenir si nous n'investissons pas dans l'éducation. Je vous demande instamment de continuer à promouvoir l'éducation dans l'intérêt de vos populations et de celui du Canada.

J'ai lu le rapport d'étape publié par le Bureau du vérificateur général en 2011. La première phrase de la section portant sur les initiatives fédérales en matière de logement est la suivante : « Même si le gouvernement fédéral est d'avis qu'il n'est pas tenu, aux termes de la loi et des traités, d'appuyer le logement dans les réserves [...] ».

Il est évident que vous-même, l'organisation que vous représentez et l'ensemble des Premières Nations sont d'un avis contraire à celui du gouvernement fédéral et croient qu'il doit, en vertu des droits découlant de traités et d'autres droits, assumer une obligation en ce qui trait au logement dans les réserves.

Je tente de concilier l'affirmation faite par le gouvernement fédéral et la stratégie en matière de logement que vous avez adoptée en 2012. Est-ce que vous invoquez cette stratégie dans le cadre de vos négociations avec le gouvernement fédéral? Est-ce que le gouvernement fédéral, qui affirme n'être pas tenu d'appuyer le logement dans les réserves, en admet le bien-fondé? Comment cela fonctionne-t-il? Qu'en est-il actuellement de ce qui me semble être une impasse?

M. Hudson : Je n'ai pas consulté le rapport que vous évoquez, mais pour mettre les choses en contexte, je vous dirai que, dans les années 1960, on croyait que le gouvernement avait une telle obligation en vertu des droits issus de traités, et, à coup sûr, la nécessité d'appuyer le logement des Premières Nations faisait l'objet d'un consensus. Cependant, il semble que nous nous sommes éloignés d'une telle vision des choses. Nous avons manifestement affaire à un marché de locataires, à du logement fondé sur le marché, et les gens envisagent assurément d'acquérir leur propre résidence. Aux fins du compte rendu, je peux vous dire que, à ma connaissance, je suis le premier chef de ma collectivité à avoir acheté sa propre résidence au moyen d'un prêt hypothécaire et à donner la possibilité à ceux qui n'ont assurément pas les moyens de le faire d'envisager de s'installer dans l'un des foyers d'accueil d'urgence établis dans nos collectivités par suite de droits issus de traités ou d'autres programmes.

Le fait est que nos populations croient fermement que le droit au logement est un droit découlant de traités, et ils constatent que nous semblons nous éloigner d'une telle vision des choses. Comme je l'ai mentionné la semaine dernière durant une conférence sur le logement, comme la demande de logements se chiffre à 80 000 ou 85 000 unités d'habitation, et que le coût de construction de chacune de ces unités est au bas mot de 150 000 $, nous avons besoin de 12 milliards de dollars afin de combler nos besoins et de régler le problème lié aux droits.

Là encore, à mon avis, on semble abandonner la vision selon laquelle le logement est un droit issu de traités au profit d'une vision selon laquelle les responsabilités partagées en matière de logement doivent être transférées aux gens eux- mêmes. Toutefois, comment une collectivité où le taux de chômage est de 70 ou de 90 p. 100 peut-elle instaurer un marché immobilier? Comment les gens de ces collectivités pourront-ils obtenir un prêt hypothécaire afin d'acquérir leur propre maison? Comme je l'ai mentionné plus tôt à propos de l'allocation-logement, nous semblons tourner le dos à la vision fondée sur les droits issus de traités et faire la promotion du logement fondé sur le marché. Au Manitoba et au sein de la Première Nation de Peguis, nous croyons et soutenons que le droit au logement est un droit issu de traités.

Je tenais à formuler une autre observation concernant l'utilisation de nos propres ressources afin de combler les besoins de nos gens. Afin de répondre à la demande de logements, nous mettons un système d'acomptes à la disposition de nos membres qui ont les moyens d'y recourir, peu importe qu'ils vivent dans la réserve ou à l'extérieur de la réserve. Là encore, il ne s'agit pas d'un programme fédéral, ni d'un programme provincial — il s'agit d'un programme créé par notre propre collectivité. La solution à long terme à ce problème tient à ce que nous nous occupions nous-mêmes des questions relatives au logement et de nos programmes en la matière, et à ce que nous concevions, en collaboration avec le gouvernement fédéral, nos propres solutions, plutôt que d'appliquer des solutions élaborées par le gouvernement fédéral.

Le sénateur Moore : Merci, chef Hudson. J'aimerais vous poser quelques questions concernant le nombre de personnes qui n'ont toujours pas accès à leur logement en raison de la plus récente inondation majeure. Vous avez dit que ces personnes étaient au nombre de 2 000. Vous avez évoqué la construction de nouvelles résidences. J'aimerais savoir si votre réserve renferme suffisamment de terres qui ne seraient pas exposées à des inondations et où de nouvelles maisons pourraient être construites de manière à ce que les personnes évacuées puissent recommencer à vivre dans la réserve sans craindre la prochaine inondation printanière.

M. Hudson : Oui, nous disposons de terres situées à l'extérieur de la zone exposée aux inondations. Nous avons établi que toutes les nouvelles constructions devaient avoir lieu à l'extérieur de cette zone.

Je vais vous fournir quelques renseignements de nature logistique. Nous avons perdu environ 60 p. 100 de nos terres en raison des inondations successives, et nous en avons informé le gouvernement. De toute évidence, nous tentons de tirer parti des politiques en matière d'ajout aux réserves, mais il s'agit d'un processus qui exige au moins deux ans. Il s'agit là d'un processus que l'on doit abréger.

En outre, au titre de nos droits fonciers issus de traités, nous avons sélectionné et acquis des terres adjacentes à notre réserve dans le cadre d'un processus distinct de celui des ajouts aux réserves. Les droits fonciers découlant de traités ne nous permettent pas de construire des bâtiments sur ces terres avant qu'elles n'aient été converties. Il s'agit là d'une politique qui caractérise le processus.

Le sénateur Moore : Pourriez-vous nous fournir des explications à ce sujet, s'il vous plaît? Je n'ai pas bien saisi la condition que vous devez respecter avant d'être en mesure de construire des bâtiments sur des terres ajoutées aux réserves.

M. Hudson : Dans le cadre du processus d'ajout aux réserves, on peut le faire, mais ce processus est un peu plus long. Au titre des droits fonciers issus de traités, nous avons acquis, par l'entremise d'un agent de l'extérieur, 9 000 acres de terre, de même que des terres adjacentes à notre réserve, mais dans le cadre de ce processus, nous ne pouvons pas occuper ces terres ni construire quoi que ce soit sur ces terres avant qu'elles n'aient été converties en terres de réserve. Il s'agit d'une politique gouvernementale. Nous avons tenté de surmonter ces difficultés de manière à ce que nous puissions construire des maisons à l'extérieur de la plaine inondable et sur les terres ajoutées à notre réserve.

Le sénateur Moore : Est-ce que les terres qui ne se trouvent pas dans la plaine inondable et que vous ajoutez à votre réserve sont contigües aux terres que vous possédez déjà et qui ne se trouvent pas dans la plaine inondable, ou sont- elles éloignées, de sorte que vous vous retrouvez avec une mosaïque de terres plutôt qu'un seul et même territoire prenant de l'ampleur?

M. Hudson : Dans le cadre de notre plan, nous tenons compte à la fois de l'endroit où nous envisageons de relocaliser nos gens, mais également de toute nouvelle construction. Nous aimerions construire des maisons sur les terres ajoutées, mais, je le répète, selon la politique gouvernementale relative aux droits fonciers issus de traités, on ne peut pas le faire tant que ces terres n'ont pas été converties.

Le sénateur Moore : Qui prend cette décision?

M. Hudson : À mon avis, le gouvernement fédéral.

Le sénateur Moore : Qu'est-ce qui explique que le processus s'étire sur deux ans et demi?

M. Hudson : Cela s'explique par des questions de nature procédurale. Il s'agit d'une politique, et cette politique doit changer.

Le président : Je vous signale, sénateur, que nous avons mené une étude visant à dénouer cette impasse.

Le sénateur Moore : Je crois comprendre que cette étude a été menée avant que je ne sois membre du comité.

La sénatrice Raine : Je peux comprendre la frustration que provoque ce délai. Nous sommes bien au fait des problèmes occasionnés par le processus d'ajout aux réserves.

Pendant que ce processus suit son cours et que vous ne pouvez pas construire de maisons, est-ce que vous en profitez pour élaborer des plans relatifs aux infrastructures, de manière à ce que vous soyez prêts à agir une fois que les choses auront finalement débloqué?

M. Hudson : Oui. Nous avons entrepris l'élaboration d'un plan communautaire exhaustif, et nous envisageons également de mettre en place un plan de financement et de logement à long terme. Toutefois, ces obstacles nous empêchent de mettre tout cela en œuvre.

La sénatrice Raine : Je suppose que, dans l'intervalle, les coûts liés au logement des 2 000 personnes toujours évacuées sont assumés par le gouvernement fédéral.

M. Hudson : Oui.

La sénatrice Raine : Le comité pourrait peut-être transmettre au gouvernement une lettre l'enjoignant à se dépêcher et à ne pas attendre que l'étude soit menée à bien.

Le président : Je suis certain que cela est possible.

Mme Paul : J'ai quelque chose à dire à propos des ajouts aux réserves. Il s'agit d'un processus complexe. Je peux vous dire que, pour notre part, il nous a fallu plus de 10 ans pour ajouter des terres à notre réserve. Nous devons trouver une façon plus efficace de collaborer en cette matière.

Nous sommes en train de demander à une autre organisation de construire une usine de traitement des eaux usées, mais il y a toujours un élément qui vient bloquer les choses au sein de l'appareil gouvernemental. Nous ne pouvons pas construire de bâtiments sur ces terres tant qu'elles n'ont pas été transférées par le gouvernement fédéral. Il faut se pencher sur ce processus.

Le sénateur Sibbeston : La semaine dernière, le vérificateur général s'est présenté devant nous, et il a effectué un examen très objectif et très analytique de la situation relative au logement dans les réserves. Il semble qu'une étude ait été menée à ce sujet en 2003. À cette époque, Affaires autochtones et Développement du Nord Canada avait constaté qu'il manquait environ 8 500 unités d'habitation. Il est intéressant de le signaler, dans la mesure où, selon votre estimation, l'arriéré est de 130 000 unités de logement. Il y a un écart considérable entre vos chiffres et ceux du gouvernement.

Une autre étude a été réalisée en 2011, et le vérificateur général affirme essentiellement que les conditions de vie des Premières Nations ne se sont pas améliorées depuis que l'étude a été faite. Il conclut qu'un certain nombre d'obstacles systématiques empêchent le gouvernement de prendre des mesures pour améliorer la situation dans le domaine du logement. Ces obstacles sont le manque de clarté quant au niveau des services, l'absence de fondements législatifs, l'absence de mécanismes de financement appropriés et le manque d'organisations capables de veiller à la prestation des services à l'échelle locale.

Quant à sa recommandation, il a dit poliment que le comité souhaiterait peut-être demander aux représentants d'Affaires autochtones si leur point de vue concernant les obstacles structurels a changé ou non. En gros, il dit que nous devrions nous adresser au ministère. Je pense toutefois que le problème du logement est si criant chez les Autochtones qu'il va falloir trop de temps pour le régler si nous comptons sur le ministère et les fonctionnaires pour le faire. Comme vous le savez, les choses se font très lentement lorsque ce sont les ministères qui s'en occupent. Je pense donc que la solution est de s'adresser directement aux ministres et aussi au premier ministre.

J'allais poser la question suivante au grand chef Atleo : vu le succès que vous avez connu récemment dans vos négociations et vos discussions avec le premier ministre, qui vous ont permis d'obtenir des sommes importantes pour l'éducation — 1,9 milliard de dollars, quoique dans deux ans seulement — pensez-vous qu'il est possible que le gouvernement fasse quelque chose relativement au logement? Le problème ne sera pas réglé à l'intérieur du système. Il faut qu'il y ait une volonté politique, et il faut que les ministres et le premier ministre décident de s'occuper du logement. Pensez-vous que c'est possible?

M. Atleo : Je pense qu'il y a un lien entre le fait d'appuyer une démarche de ce genre et la question de la sénatrice Greene Raine concernant le fait que nous puissions encourager le gouvernement à adopter cette solution précise dès maintenant, dans ce cas-ci. J'ai à mes côtés deux chefs qui, pour l'endroit qui les concerne — une région dans un cas, et un territoire dans l'autre — sont prêts à appliquer des solutions. Ils sont à la recherche d'un partenaire capable de les aider à exécuter le travail et d'éviter de s'embourber dans les politiques et les programmes existants. Plus d'une trentaine de vérifications ont été faites vers 2003 et un peu après, et elles indiquent toutes un manque de ressources prévisibles, durables, axées sur les besoins et qui seraient fournies à long terme dans divers domaines, dont l'éducation, mais aussi le logement, et que les Premières Nations auront besoin de soutien pour les appliquer.

Par ailleurs, nous avons récemment pris conscience du fait que nous devons non seulement parler d'une crise touchant les droits de la personne et la santé, mais également commencer à quantifier le coût de la maladie et du fait que des enfants comme Jaden ne reçoivent pas le soutien dont ils ont besoin pour réussir à l'école. Les conséquences pour le pays sont extrêmement importantes. Le temps est venu de combler ces besoins. J'ai de l'espoir.

Pour faire un lien avec la question posée tout à l'heure, la version provisoire de la Stratégie nationale pour le logement des Premières nations de l'Assemblée des Premières Nations a été adoptée par les chefs; elle a été appuyée. Je veux préciser que l'Assemblée des Premières Nations est une organisation de défense des droits des Autochtones. Lorsque les chefs se réunissent et disent qu'il faut que nous adoptions une démarche globale, nous le faisons parce que nous reconnaissons le fait que les droits appartiennent aux chefs. Ce sont les chefs du gouvernement de leur territoire, et mon rôle est de les soutenir. Je ne suis pas le chef des gouvernements des Premières Nations du Canada. La responsabilité de faire avancer le travail revient à juste titre aux chefs.

C'est la raison pour laquelle nous commençons par l'article 23 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, qui dit que nos peuples « [...] ont le droit de définir et d'élaborer des priorités et des stratégies en vue d'exercer leur droit [...] » et il y a une divergence entre ce que le gouvernement fédéral décrit et ce qu'entend le chef Hudson par « Il y a un droit issu d'un traité. » Il y a aussi un droit à l'éducation issu d'un traité, et le gouvernement fédéral n'avait pas non plus de moyens de décrire sa responsabilité relativement au financement de l'éducation, notamment dans ses lois.

C'est ce qui se dit à l'heure actuelle. Il faut que cela se fasse dans le contexte de la reconnaissance de l'endroit où ces droits s'appliquent légitimement, c'est-à-dire chez les Premières Nations et sur leur territoire, pour qu'on conçoive des solutions qui seront efficaces.

Vous avez entendu l'idée du chef lorsqu'il a décrit la façon dont les collectivités peuvent collaborer pour trouver des solutions dans des domaines comme le logement, par exemple l'idée d'un conseil du logement. Assurez-vous d'établir un lien avec les mesures d'atténuation des risques d'inondation. Vous entamez le processus de résolution des problèmes liés au logement, mais vous voyez que la solution est liée au fait de régler la question des terres et des droits fonciers issus de traités.

L'Assemblée des Premières Nations dispose d'un cadre provisoire large auquel les chefs ont donné leur plein appui, et il y a des résolutions qui remontent à des dizaines d'années relativement à la défense des droits et au fait de régler le problème du manque de financement.

Je pense que la réponse est que oui, nous devons mettre en lumière l'ensemble des défis à relever. En même temps, il ne faut pas que nous attendions qu'une étude soit terminée; nous devons agir rapidement pour apporter les solutions nécessaires à l'heure actuelle. Nous devons démythifier l'idée que le financement n'est pas toute la solution, mais qu'il fait partie de la solution. C'est ce que notre étude donne à penser.

Les solutions doivent être élaborées conjointement, et il faut que ce soit une démarche de collaboration. Il y a quelque chose là-dedans au sujet d'un rapport entre nations — les chefs des Premières Nations qui sont responsables. Comme le chef le disait — je trouve son exemple excellent, personnellement —, il a un conseil du logement, mais les dirigeants politiques doivent quand même gouverner et superviser le travail pour en assurer le succès. Si nous laissons la bureaucratie résoudre le problème toute seule — plus d'une trentaine de vérifications montrent que cela ne suffit pas. L'application des traités et la question des négociations territoriales sont des choses que nous avons portées à l'attention du premier ministre, et nous avons aussi parlé d'autres grands thèmes comme les problèmes de violence, d'éducation et des filles autochtones assassinées et disparues.

Mais la question du logement est tout à fait fondamentale, si on veut soutenir les apprenants pour leur permettre de réussir, sur les plans de l'éducation ou de l'économie.

Le sénateur Meredith : Monsieur le chef national Atleo, je respecte votre leadership. Merci du travail que vous faites au nom des Premières Nations. J'ai toujours dit cela aux personnes qui sont venues témoigner devant nous — le leadership des Premières Nations.

Vous parlez de votre travail de défense des droits, mais, dans une perspective globale, il s'agit d'une crise humanitaire. Quelle est la réaction lorsque vous portez cela à l'attention des dirigeants du gouvernement? Vers quoi la réaction tend-elle?

Certes, vous déléguez aux chefs la tâche de s'occuper des causes des problèmes affectant les diverses Premières Nations, mais quelle est la réaction lorsque vous attirez l'attention sur cet enjeu?

Je pense que le sénateur Sibbeston vous a posé la question et que vous l'avez un peu éludée, mais j'ai besoin d'une réponse directe, parce que je crois que ce sont les dirigeants qui doivent faire bouger la bureaucratie. Je n'aime pas la bureaucratie. Trop souvent, lorsque des vies sont en jeu, il n'est pas approprié de faire circuler les documents à l'infini. Les AR — nous l'avons entendu : 10 ans. Des vies sont en jeu. Quelle est la réaction lorsque vous en parlez aux dirigeants et que vous leur demandez comment nous allons régler ces problèmes? Nous pouvons rester ici à parler pendant des heures, mais il s'agit de trouver une façon de faire avancer les choses pendant que les enfants comme Jaden attendent et que leur qualité de vie doit être améliorée.

M. Atleo : J'ai deux idées à vous communiquer rapidement. La première, c'est l'espoir venant de deux choses qui se sont produites récemment. Il y a d'abord le fait que tous les partis ont soutenu le rêve de Shannen. Les parlementaires de toutes allégeances politiques ont donc convenu du fait qu'il faut agir maintenant dans le domaine de l'éducation.

Après que le Parlement a été prorogé et qu'il a recommencé à siéger, un comité composé de membres de tous les partis a recommencé à étudier la question de la violence faite aux femmes et filles autochtones. Ce n'est pas à la hauteur de ce que nous demandons, c'est-à-dire une commission d'enquête publique nationale en bonne et due forme sur les femmes assassinées et disparues, car il s'agit d'une grande tragédie qui se produit au pays et dont le monde commence seulement à prendre conscience et mesurer l'envergure.

J'espère que nous allons voir dans le budget d'aujourd'hui la prise de mesures concrètes dans le domaine de l'éducation et l'affectation de ressources à ce chapitre. Nous n'avons pas vu cela jusqu'à maintenant. Nous espérons que des mesures de ce genre vont être prises. Il nous reste peut-être encore énormément de travail à faire pour nous assurer que les droits ancestraux et issus de traités des Premières Nations sont respectés et que nous commençons rapidement à investir dans l'éducation d'enfants comme le petit Jaden. Il a toujours besoin d'un endroit adéquat pour étudier et d'un accès à de l'eau potable.

Comme Amnistie Internationale l'a fait remarquer à juste titre lorsque le rapporteur spécial est venu ici, il s'agit d'une crise grave touchant les droits de la personne. Nous avons défendu nos droits auprès de tous les gouvernements, et nous avons remporté plus de 150 batailles juridiques en affirmant que les droits ancestraux et issus de traités dont les chefs qui sont à mes côtés parlent sont bien réels. Il est temps que le Canada le reconnaisse et cesse de le contester devant les tribunaux. Il doit dépenser 100 millions de dollars par année pour se battre contre des gens comme moi en cour. Nous venons d'avoir gain de cause dans une affaire de pêcherie. Toutes ces choses sont liées. Elles sont profondément et inextricablement liées, surtout à l'avenir de nos enfants. Il faut que le statu quo vole en éclats. Il faut qu'il y ait une prise de conscience, et notre peuple a démontré comme jamais auparavant à la population canadienne que le statu quo que nous vivons est inacceptable. Nous en appelons à un leadership politique.

Je peux vous donner des exemples de choses qui me donnent de l'espoir par rapport au fait qu'on commence à reconnaître que nous comptons pour 4 p. 100 de la population du pays. Il faut que nous demandions à tous les Canadiens d'exiger des gouvernements et des dirigeants politiques de toutes allégeances qu'ils conviennent que cette situation n'est plus acceptable. Le moment est venu d'investir dans les collectivités des Premières Nations d'une manière qui respecte et honore les droits ancestraux et issus de traités des Autochtones. Une impression de déjà-vu se dégageait de la discussion au sujet de l'éducation. Il faut investir dans le logement et, comme la sénatrice Raine le disait tout à l'heure, s'occuper des crises sans attendre, mais en prenant acte de la nécessité d'établir un plan global dont l'application sera dirigée par les Premières Nations pour les aider à faire avancer les choses. Nous disposons du cadre nécessaire. Mais surtout, pour moi, en tant que défenseur des droits — parce que je dois corriger l'impression que vous avez exprimée : ce n'est pas moi qui délègue, ce sont les chefs qui, au moyen de résolutions, me donnent pour directive de défendre les droits.

Je vous suggérerais de collaborer avec la chef Paul et avec les chefs du Québec et du Labrador pour les doter du plan qu'ils envisagent, pour appuyer leurs solutions, et pour appuyer le travail du chef Hudson. Il fait preuve d'innovation et il présente de nouvelles idées, mais il évolue au sein d'une structure qui n'appuie pas l'innovation, puisque les ressources manquent. C'est ce que le Sénat peut contribuer à transmettre à la population canadienne. C'est un appel lancé à l'ensemble des Canadiens.

Mike Holmes construit des maisons au Kenya, entre autres, mais il se joint aux Premières Nations pour dire que la situation actuelle est inacceptable et qu'il faut commencer à construire des maisons ici, au Canada. Il y a Habitat pour l'humanité. Nous avons besoin d'aide pour qu'on puisse commencer à construire des maisons dans les réserves, ce qui ne s'est pas encore fait. On a construit un village au Yukon, celui de Champagne et Aishihik, et nous avons également appuyé la construction d'un immeuble à Ottawa pour permettre à une femme âgée de subvenir aux besoins de ses enfants. Voilà un exemple de situations où des Canadiens ordinaires prennent la parole et décident de nous aider. Voilà l'aide dont nous avons besoin à ce moment-ci.

Le sénateur Tannas : Merci d'être parmi nous aujourd'hui. Chef Hudson, vous avez mentionné le fait qu'il y a une liste d'attente comptant 80 noms de personnes attendant de pouvoir obtenir une hypothèque dans votre collectivité, et nous avons entendu parler plus tôt du Fonds d'aide au logement du marché des Premières nations — et le chef Atleo y a fait allusion — des 300 millions de dollars qui ont été affectés et de la cinquantaine d'hypothèques ayant été émises.

Est-ce qu'il s'agit d'un problème d'admissibilité, pour les 80 personnes dont le nom figure sur la liste d'attente? Pouvez-vous nous donner une idée de ce qui pose problème?

M. Hudson : Je pense que le problème a trait à l'admissibilité aux programmes. Je vais vous donner un exemple. Je sais que, à un moment donné, à cause du niveau d'endettement dans notre collectivité, la SCHL a décidé que nous n'étions pas admissibles aux garanties de prêt offertes par le ministère. Il y avait cependant un second programme n'exigeant pas de garantie ministérielle, et il suffit que les gens aient le profil recherché dans le cadre du programme pour y être admissibles. C'est la même chose dans le cas du Fonds d'aide au logement du marché des Premières nations.

Notre Première Nation compte 500 employés, dont beaucoup d'éducateurs. Nous gérons nous-mêmes notre système d'éducation, et il doit y avoir environ 130 employés ayant reçu une formation et des enseignants qui gagnent de 50 000 à 70 000 $ par année. Ces gens sont admissibles, ils peuvent obtenir une hypothèque à la banque. Nous avons tout simplement décidé, pour les cas où nous ne respectons pas les critères de programme pour une raison ou pour une autre, de collaborer avec les banques et d'examiner la possibilité de nous occuper nous-mêmes de l'émission d'hypothèques. Toutefois, une institution financière ne peut accepter de prendre le risque d'offrir 80 hypothèques en même temps; les institutions financières nous permettent de prendre 10 ou 15 hypothèques d'un coup, mais pas toutes celles qui sont demandées. Nous essayons de trouver des solutions pour les gens avec ces institutions, mais cela prend du temps, vu le risque lié aux hypothèques.

Le président : Merci.

Le sénateur Wallace : Chef Paul, je ne connaissais pas les stratégies que vous avez élaborées par l'intermédiaire de l'APNQL, et j'ai été impressionné. Les stratégies et les évaluations sont très détaillées. Vous connaissez très bien les besoins dans les réserves du Québec et du Labrador, et vous êtes en mesure d'examiner des solutions.

Le chef Atleo a dit très clairement — et je suis sûr que vous êtes tous d'accord — que les Premières Nations s'attendent à participer à l'élaboration des solutions et à les appliquer. Encore une fois, comme le chef Atleo le faisait remarquer, ce sont les chefs qui dirigent les gouvernements des Premières Nations. Lorsque j'y pense, c'est une question que je me posais dans le contexte de notre discussion : selon vous, qui doit diriger et qui doit suivre? Qui doit jouer le rôle de soutien?

J'ai l'impression qu'il y a parfois de la confusion quant à savoir qui dirige, entre le gouvernement fédéral, d'une part, et les chefs et les conseils, d'autre part, ainsi que l'APN, qui coordonne tout cela. Il est toujours difficile d'atteindre l'objectif et de trouver la solution lorsqu'on ne sait pas qui dirige.

La question que je me pose, dans tout cela, au sujet des diverses collectivités des Premières Nations du pays, est la suivante : est-ce que l'obligation d'évaluer la situation et de trouver des solutions incombe aux chefs et aux conseils des diverses collectivités des Premières Nations? Est-ce que le rôle du gouvernement fédéral, par l'intermédiaire de ses ministères, est d'offrir une expertise, du soutien, des connaissances et, bien entendu, du financement pour les appuyer?

Ai-je raison de penser que vous estimez que ce sont les chefs et les conseils qui doivent lancer les évaluations, trouver les solutions, puis demander du soutien aux ministères fédéraux? Vous attendez-vous plutôt à ce que ce soit le gouvernement fédéral qui dirige les initiatives?

Mme Paul : C'est une bonne question. Ce sont vraiment les chefs et les conseils qui doivent diriger leur collectivité, comme le chef Atleo l'a dit. Il s'agit d'un rapport entre nations. Nous sommes responsables de notre nation. Du point de vue des droits et des titres ancestraux, nous estimons que le gouvernement fédéral doit répondre à nos besoins en matière de logement et d'éducation.

Au Québec, nous cherchons à définir ces besoins au sein de notre commission tripartite. L'évaluation a été faite dans toutes les collectivités au Québec, et les résultats ont été remis à chacune d'entre elles. À titre de chef de la collectivité, je sais exactement quels sont mes besoins. Nous connaissons également les besoins de la région.

Il appartient aux chefs et aux conseils, ainsi qu'au gouvernement fédéral, de travailler en partenariat dans le but de définir et de combler les besoins de chacune des collectivités.

Le sénateur Wallace : Oui, mais le rôle du gouvernement fédéral est davantage un rôle de soutien; comme vous le disiez, chef Atleo, ce sont les chefs qui dirigent le gouvernement de leur Première Nation.

Mme Paul : Oui.

Le sénateur Wallace : D'accord. Cela m'éclaire.

Chef Atleo, après ce qui s'est passé la semaine dernière et la nouvelle loi concernant l'éducation des Premières Nations, on a enfin mis cela en place avec beaucoup d'optimisme.

Vous avez mentionné que vous voyez des parallèles entre ce qui a été mis au point dans le cadre de la Loi sur l'éducation des Premières nations et la façon dont cela pourrait s'appliquer aux besoins en matière de logement des collectivités des Premières Nations. Pouvez-vous nous en dire davantage? Selon vous, quels seraient les éléments clés de la démarche en matière d'éducation que le comité pourrait envisager pour ce qui est de formuler des recommandations correspondant aux besoins en matière de logement des Premières Nations?

M. Atleo : Le fait d'inviter les trois témoins ici présents est un exemple. Le chef Hudson parle précisément de la Première Nation de Peguis, et il est en mesure de communiquer au comité les problèmes et les besoins de sa collectivité et de lui permettre de mieux comprendre la façon de régler le problème.

Nous avons ensuite accès à un point de vue régional, les collectivités de l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador donnant de bons exemples d'efforts concertés à l'échelle régionale. Ailleurs au pays, vous verrez des interventions régionales et infrarégionales. Dans certains cas, cela se situe à l'échelon du conseil tribal. Lorsque l'Assemblée des Premières Nations se réunit, deux fois l'an, nous demandons aux chefs de réfléchir à la façon dont ils souhaiteraient coordonner leurs efforts. C'est ce qui permet essentiellement la rédaction d'une stratégie nationale en matière de logement contenant de nombreux éléments et incluant la contribution de chacune des régions.

Comment faire, dans ce cas, pour profiter de la force d'une union, malgré une diversité incroyable — plus de 50 langues, une diversité régionale, et cetera —, et se réunir pour pouvoir en arriver à un consensus selon lequel nous avons le droit de concevoir une approche fondée sur les droits ancestraux et issus de traités et sur les besoins et les directives à l'échelon régional et local? Il y a des différences entre les régions, comme le chef vient de le dire; il y a des différences entre l'Ontario et le Québec sur le plan des politiques. Il est important de comprendre leur nature, surtout lorsqu'on s'attaque à une crise aussi grave que celle qui existe dans le domaine du logement.

Il faut d'abord transmettre l'idée que l'intervention devrait être directe et immédiate. Comment faire? Nous préconisons depuis les années 1970 des changements touchant la maîtrise de l'éducation indienne en général. Aujourd'hui, nous parlons de maîtrise de l'éducation des Premières Nations par celles-ci. Quarante ans plus tard, le travail de sensibilisation continue. On peut tracer des parallèles avec la question de l'éducation, d'abord pour ce qui est de la nécessité de reconnaître le fait que les Premières Nations ont des projets. Vous avez entendu deux chefs parler d'une collectivité — sa propre Première Nation — ainsi que d'une démarche régionale. Cela devrait alors faire partie d'une intervention globale. De quoi ces régions ont-elles besoin, et comment pouvons-nous concevoir ensemble une façon de faire avancer les choses?

Vous avez entendu le sénateur Sibbeston citer des rapports antérieurs du vérificateur général, et les ensembles de données du gouvernement fédéral et des Premières Nations ne sont pas les mêmes. Pour élaborer des plans ensemble, il faut se réunir et mettre au point une approche qui permette de découvrir et de démystifier les besoins réels. Nous travaillons là-dessus dans le dossier de l'éducation depuis 40 ans. Évitons de prendre 40 ans pour régler le problème dans le cas du logement. Il faut accentuer le sentiment d'urgence par rapport à cette question et démystifier certains des problèmes liés aux politiques qui se posent dans l'immédiat, mais il ne faut pas par ailleurs éviter d'aborder les grands problèmes, comme le fait que les gouvernements qui se succèdent à l'échelon fédéral rebutent à reconnaître les droits issus de traités, dans ce cas-ci, et le droit prévu dans la déclaration des Nations Unies concernant l'élaboration d'approches visant à répondre aux besoins en matière de logement qui est un droit des Premières Nations, tout comme nous avons le droit d'élaborer une approche en matière d'éducation, et il faut que le gouvernement fédéral respecte ses obligations. À l'heure actuelle, il n'y a aucun moyen d'exprimer cela.

De façon similaire, dans le domaine de l'éducation, tout ce qu'il y avait, c'était des dispositions de la Loi sur les Indiens. Il n'y a rien, du côté du gouvernement fédéral, qui constitue une reconnaissance du droit à l'éducation issu des traités, lequel est explicite dans le traité no 3, par exemple. C'est pour cette raison que la mise en œuvre des traités est l'une des principales questions que nous avons portées à l'attention du gouvernement fédéral au fil des ans. C'est une grande question qu'il reste à régler. Nous commençons par reconnaître qu'il s'agit d'une relation encadrée par des traités. Lorsque les chefs viennent discuter avec vous, les sénateurs, ils discutent avec les représentants du gouvernement du Canada, avec la Première Nation à laquelle ils appartiennent.

C'est un exemple un peu grossier, mais les Nations Unies sont aussi un regroupement de nations, et le secrétaire général réunit les Nations Unies périodiquement. L'Assemblée des Premières Nations se réunit deux fois l'an. Diverses nations se réunissent pour trouver des façons de s'entraider, pour préconiser l'application de stratégies dans la relation avec la Couronne du chef du Canada.

Il est utile de disposer d'un point d'entrée par lequel nous envisageons l'un l'autre sur le plan fondamental, parce qu'il y a encore une absence de rapports juridiques entre les Premières Nations et le Canada. Nous en reparlerons un autre jour.

Par rapport à ce qui nous occupe, le plan existe dans un cadre large; l'Assemblée des Premières Nations, les chefs de l'assemblée et moi-même pouvons donc jouer un rôle de coordination et de regroupement, mais les solutions doivent quand même être appliquées par les régions.

Nous avons des idées concernant des projets de fiducie de placement hypothécaire, les types de logement, l'utilisation de matériaux locaux et les initiatives de partenariat et de collaboration dont nous avons parlé ici, comme le projet Holmes et Habitat pour l'Humanité. Il n'y a pas de plan de mise en œuvre en place pour ce qui est du logement, et il n'y en a jamais eu; on recommence chaque année. Comment faire pour planifier des interventions à long terme si des décisions discrétionnaires sont prises chaque année?

Cette façon de procéder ne sert pas les intérêts des Premières Nations ni ceux du Canada. Au Sénat, une occasion importante s'offre à vous de faire une réflexion très rapidement, parce que les Premières Nations travaillent là-dessus depuis longtemps et ont des plans.

Dans le cadre d'une stratégie nationale provisoire en matière de logement, les chefs se sont penchés sur des idées comme la création d'un centre d'excellence virtuel en matière de logement visant à établir des liens entre les capacités à l'échelle du pays. Les idées sont là, et nous avons deux experts qui, je crois, seraient disposés à mettre leur expertise à profit dans le contexte d'une démarche globale.

Le président : J'aimerais aborder la question indéniablement délicate des lois concernant les codes du bâtiment et les inspections. Selon des témoignages que nous avons entendus, un certain nombre de Premières Nations n'ont pas établi de code du bâtiment — quoique cela relève de leur compétence —, et les inspections qui sont faites ne sont pas comparables à celles qui respectent les normes les plus élevées et que nous aimerions voir. Il y a ainsi des logements qui ne respectent pas les normes, des moisissures et des risques d'incendie. C'est une préoccupation à laquelle le comité aimerait remédier.

Monsieur le chef national Atleo, vous avez dit clairement que le moyen de régler ce problème n'est pas d'adopter ce que j'appelle une « masse législative », mais vous avez réussi à trouver un moyen axé sur l'éducation qui permettrait de fonder un régime législatif. Il ne s'agit pas de faire assumer tout le fardeau aux Premières Nations : il y a toutes sortes de manques à gagner dans l'approche du gouvernement fédéral, à commencer par le fait qu'il existe deux organismes nationaux, la SCHL et AADNC, responsables du logement et diverses raisons pour lesquelles la responsabilité est partagée. Comme il semble y avoir un problème de lacunes dans les codes du bâtiment et les inspections, pouvez-vous nous conseiller quant à la façon de nous y prendre pour régler ce problème et de nous assurer que l'argent est bien dépensé et que les constructeurs ne peuvent pas construire des logements qui ne respectent pas les normes ni éviter les inspections? Avez-vous quelque chose à nous dire là-dessus?

M. Atleo : Je pense qu'il serait important aussi de recueillir les commentaires des chefs à ce sujet. Par rapport à ce que nous venons de dire au sujet de l'éducation, les chefs ont affirmé clairement à l'assemblée que cinq conditions doivent être présentes : la reconnaissance de la maîtrise des Premières Nations; des investissements réels; la fin de la supervision ministérielle unilatérale et, essentiellement, une intervention lourde; le soutien à la langue et à la culture autochtones, que les pensionnats indiens visaient bien entendu à faire disparaître; et un engagement constant et significatif.

Le gouvernement fédéral a montré qu'il a pris acte des conditions des chefs, et j'espère qu'il le démontrera dans le budget, en investissant. C'est là qu'il commence à y avoir certains parallèles.

L'imposition de lois de façon unilatérale ne fonctionne pas et n'a jamais fonctionné. C'est pour cette raison que nous nous sommes dotés d'un cadre national provisoire. Il y a ici deux chefs qui présentent, du point de vue d'une région et d'une nation, un ensemble de solutions et des idées pour la suite des choses. À mon sens, c'est là-dessus qu'il convient de fonder l'approche de collaboration décrite dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Il s'agit de concevoir une démarche d'avenir respectant les normes dont parlent les représentants des Premières Nations. Le gouvernement fédéral ne dispose pas de moyens de définir lui-même une façon de répondre aux besoins en matière de logement des Premières Nations. Il faut qu'il fasse preuve d'ouverture et qu'il soit disposé à collaborer pleinement et utilement avec les Premières Nations afin de concevoir des approches respectant et appliquant les droits issus de traités et les droits et titres ancestraux. C'est quelque chose que nous n'avons pas vu jusqu'à maintenant. Nous avons été témoins de l'élaboration d'une approche en collaboration — et l'exemple du Tribunal des revendications particulières vient à l'esprit, puisqu'il s'agissait d'une initiative visant la modification en collaboration de la façon dont les revendications particulières sont traitées — qui a donné lieu à la création d'un tribunal.

Il y a des exemples. Dans le domaine de l'éducation, les Premières Nations préconisent depuis 40 ans l'évolution de la relation et l'application du droit à l'éducation issu d'un traité. Dans le domaine du logement et, comme vous le dites, pour ce qui est du sujet délicat des lois et du gouvernement fédéral, ce dont nous avons été témoins récemment, c'est de l'adoption de lois qui, de façon générale, sont unilatérales et ne s'assortissent pas de ressources. Nous l'avons vu dans le cas de certains projets de loi liés à l'infrastructure, et c'est une grande source de préoccupation. Ce n'est pas la solution pour l'avenir.

Je pense que, si le Sénat devait entreprendre une étude portant sur la façon de conclure un arrangement équitable et malléable pour offrir un financement durable et prévisible aux Premières Nations dans le domaine du logement, cela devrait faire partie de l'entreprise, de la question, de l'engagement que vous prenez avec les Premières Nations — de préférence sur leur propre territoire —, de sorte que vous puissiez constater l'urgence de la crise et aider les Canadiens à la saisir.

Le président : Merci. Il nous reste quelques instants pour une deuxième série de questions. Je vous demanderais de poser de brèves questions, s'il vous plaît.

Le sénateur Meredith : Merci encore une fois de vos exposés. Je comprends la frustration qu'ont fait naître vos relations avec le gouvernement fédéral au fil des ans. Chef Atleo, merci de faire la promotion de l'éducation des Premières Nations. Je suis heureux que la réaction ait été positive, parce que je crois fortement que les jeunes de notre pays doivent recevoir une éducation et doivent pouvoir tirer parti des occasions que le Canada peut leur offrir.

Pour l'avenir, toutefois, en l'absence de lois — et il y a trois chefs ici présents aujourd'hui — comment nous y prendre pour demander aux chefs et aux conseils de rendre des comptes? Nous avons entendu les histoires d'horreur concernant des maisons construites de façon inadéquate, des réparations faites de façon inadéquate, et où l'inspecteur rend des comptes au chef, lequel décide de tout. Comment nous y prendre pour protéger la vie des membres des Premières Nations? Il y a le problème des moisissures chez vous, chef Paul, dans les maisons du Québec. Comment faire pour garantir la collaboration et le respect de codes adéquats? Aucun lotissement n'est construit à Ottawa ou dans ma collectivité, Richmond Hill, sans l'application de codes adéquats garantissant la présence d'installations d'égouts et de drainage adéquates, entre autres. Comment faire pour obliger les gens qui construisent les maisons dans les réserves des Premières Nations à rendre des comptes en l'absence de lois?

Le président : Je pense que le chef national a répondu à cette question, non? Avez-vous quoi que ce soit à ajouter, chef Hudson, chef Paul? Sénateur Meredith, je pense que vous vouliez dire que les inspecteurs rendent des comptes au constructeur, et non au chef.

Le sénateur Meredith : Désolé, au constructeur, mais, d'après ce que je comprends il y a une certaine collaboration. Chef Hudson, j'aimerais connaître votre point de vue. Vous semblez avoir des idées progressistes, par rapport entre autres à la géothermie et à l'énergie solaire, idées que j'appuie pleinement et qui permettraient la construction adéquate des maisons de façon à accommoder les Premières Nations et à ce qu'elles n'aient pas à subir le genre de problèmes qui surviennent.

M. Hudson : En l'absence de lois, nous devons rendre des comptes à notre collectivité. Nous sommes les premiers à apprendre qu'une maison n'a pas été construite adéquatement. Nous nous occupons de cela par l'intermédiaire de l'organisation responsable du logement que nous avons créée. Ce n'est pas régi par le gouvernement fédéral à l'heure actuelle, mais c'est quelque chose que nous faisons.

Pour approfondir un peu la question de la géothermie et de la capacité de construction, cette méthode novatrice contribue à la circulation de l'air à l'intérieur de la maison, ce qui fait qu'il n'y a pas de moisissures. À l'extérieur de nos collectivités, je sais que, lorsque nous construisons selon cette méthode, non seulement ces gens sont en mesure de s'occuper de nos logements dans la collectivité — et il y a une soixantaine d'unités dans notre collectivité qui recourent à la géothermie; nous élaborons ces solutions de façon autonome —, mais, pour ce qui est de la reddition de comptes, les gens viennent nous voir directement. Nous réglons le problème par l'intermédiaire de notre organisation responsable du logement.

Pour ce qui est des inspections, nous avons eu des problèmes liés à la façon dont les choses étaient faites dans le passé, mais nous faisons maintenant faire nos inspections par des groupes externes plutôt que par des gens de la collectivité. Nous apportons des changements à cet égard en demandant à nos gens qui sont capables de le faire de procéder à des inspections dans d'autres collectivités, parce qu'il y a évidemment des relations étroites. Nous essayons de répartir la tâche entre les inspecteurs et les gens qui s'occupent de la construction. Nous constatons l'existence de problèmes à ce chapitre, et nous les réglons nous-mêmes. Je pense que c'est une solution.

Le président : Je vais maintenant donner la possibilité à la sénatrice Beyak de poser une question.

Mme Paul : Pour répondre à votre question, dans la plupart des collectivités auxquelles j'ai affaire, nous appliquons le code du bâtiment du Canada. Une zone qui était un peu grise pour nous, c'était l'inspection. Nous pensions que la SCHL nous envoyait ses inspecteurs. Ils sont venus dans nos collectivités, et nous nous sommes fiés à leur expertise, en tant que chefs, pour affirmer que les bâtiments respectaient le code. Nous nous sommes fiés à eux, parce que c'étaient eux, les inspecteurs. Je pense que ce n'était pas vraiment toujours le cas. Voilà certaines des lacunes qui existaient dans les collectivités des Premières Nations.

Le sénateur Meredith : Merci.

La sénatrice Beyak : Ma question concerne l'éducation. Félicitations pour votre dernière initiative.

J'ai une très bonne amie qui vit à Dryden et qui a 92 ans. Elle a une excellente suggestion à faire. Les Autochtones ayant un tempérament si artistique — ils sont tellement bons en sculpture, en gravure, en dessin, en perlage et dans tout le reste — avez-vous envisagé d'utiliser une grande partie des fonds que vous recevez pour l'éducation pour développer ces talents et pour enseigner aux gens à vendre leurs œuvres, à lancer des entreprises et à trouver du financement? C'est un marché mondial, et je pense que mon amie a peut-être eu une bonne idée.

Le président : Madame la sénatrice, nous allons permettre que vos précieux conseils figurent au compte rendu, mais nous devons vraiment nous concentrer sur le logement aujourd'hui, alors, sauf votre respect, je vais passer à la sénatrice Greene Raine. Mais merci de votre idée.

La sénatrice Raine : Merci à tous. Ça a été une séance extraordinaire.

Chef Paul, lorsque l'APN a mis la base de données à votre disposition, comment avez-vous abordé la chose? S'agit-il de quelque chose que nous devrions envisager de recommander à l'échelle nationale? Était-ce là ce que le chef Atleo recommandait en premier lieu, c'est-à-dire que nous prenions connaissance de l'ampleur de la lacune en créant un répertoire national?

Mme Paul : Oui. Je suis d'accord. Les données viennent directement de la collectivité, ce qui permet de se faire une idée exacte de la situation de chacune des collectivités. Cela pourrait se faire à l'échelle nationale, et vous obtiendriez ainsi un portrait exact de chacune des collectivités. Comme le sénateur l'a laissé entendre au début de la séance, sensibiliser la population du Canada est vraiment une bonne idée. Cela vous permettrait d'obtenir un instantané, et vous pourriez voir si les choses se sont améliorées. La base de données contient les vrais chiffres.

Même dans le contexte du développement communautaire, nous n'en avons pas parlé, mais, au Québec, il y a des collectivités sans eau courante et sans électricité; les gens vivent dans de petites cabanes. La pièce dans laquelle nous nous trouvons serait assez grande pour en accueillir neuf. Ce sont les faits, et les citoyens du Canada ne les connaissent pas. Il s'agit d'un bon exercice à faire à l'échelle du Canada, il profiterait à tout le monde.

La sénatrice Raine : Pourriez-vous nous faire parvenir plus d'information sur la façon dont vous avez procédé?

Mme Paul : Oui. Vous n'avez qu'à me dire à qui l'envoyer.

Le président : Je vais devoir conclure la séance, mais, au nom des membres du comité, je tiens à vous dire à quel point tous les exposés ont été utiles et nous ont éclairés.

Des membres de notre personnel ont assisté à la conférence sur le logement que vous avez tenue la semaine dernière, et j'aimerais aussi vous assurer que nous avons hâte de décider des endroits où nous devrions nous rendre en collaboration avec l'APN — comme vous le disiez, monsieur le chef national, cela peut être très éclairant —, des endroits où il y a des possibilités de mise en œuvre à saisir de toute urgence, comme vous le disiez. Le comité souhaite continuer de collaborer avec l'APN dans ce dossier extrêmement important et d'une grande urgence. Merci beaucoup à tous. Ça a été une séance très utile.

(La séance est levée.)


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