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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule 4 - Témoignages du 30 janvier 2014


OTTAWA, le jeudi 30 janvier 2014

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd'hui, à 10 h 31, pour faire une étude sur les produits pharmaceutiques sur ordonnance au Canada.

Le sénateur Kelvin Kenneth Ogilvie (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Bienvenue au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.

[Traduction]

Je m'appelle Kelvin Ogilvie, je suis sénateur et je viens de la Nouvelle-Écosse. Je suis également président du comité. J'aimerais inviter mes collègues à se présenter, en commençant à ma droite.

La sénatrice Buth : Sénatrice JoAnne Buth, du Manitoba.

La sénatrice Eaton : Nicole Eaton, de l'Ontario.

La sénatrice Stewart Olsen : Carolyn Stewart Olsen, du Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Seidman : Judith Seidman, de Montréal, au Québec.

Le sénateur Enverga : Tobias Enverga, de l'Ontario.

La sénatrice Seth : Asha Seth, de l'Ontario.

La sénatrice Dyck : Sénatrice Lillian Dyck, de la Saskatchewan.

Le sénateur Eggleton : Art Eggleton, sénateur de Toronto, toujours vice-président du comité.

Le président : Sans commentaire.

J'aimerais vous rappeler que nous étudions les produits pharmaceutiques sur ordonnance au Canada, et qu'il s'agit de la quatrième étape de notre étude en quatre étapes. Nous nous penchons donc sur la nature des conséquences imprévues. Aujourd'hui, nous recevons les représentants de deux organismes. Je vais les présenter lorsque je les inviterai à faire leur exposé. Après les exposés, les sénateurs pourront poser leurs questions.

Nous allons suivre l'ordre du jour, c'est-à-dire en commençant par John Wright, président et directeur-général de l'Institut canadien d'information sur la santé, qui présentera également son collègue, qui pourra répondre à nos questions, au besoin.

John Wright, président et directeur général, Institut canadien d'information sur la santé : Merci beaucoup, monsieur le président. Je suis John Wright, le PDG d'ICIS. Aujourd'hui, je suis accompagné du très élégant, charmant et intelligent Mike Gaucher. M. Gaucher est le directeur de notre groupe des ressources humaines en matière de produits pharmaceutiques et de santé à l'ICIS.

J'ai un bref exposé, que j'aimerais lire, monsieur le président. Bonjour, et au nom de l'Institut canadien d'information sur la santé, j'aimerais vous remercier de m'avoir donné l'occasion de comparaître devant le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.

Depuis 20 ans, l'ICIS joue un rôle unique dans le secteur de la santé au Canada. À titre d'organisme autonome sans but lucratif, il fournit de l'information essentielle sur le système de santé du Canada et sur la santé des Canadiens. Notre vision est simple : de meilleures données pour de meilleures décisions et des Canadiens en meilleure santé. L'ICIS exploite également des banques de données liées à plusieurs domaines qui pourraient intéresser ce comité, notamment les médicaments d'ordonnance, la dépendance, la perte d'efficacité des antibiotiques, et la contrefaçon de médicaments.

L'ICIS conserve les données relatives à l'utilisation des médicaments d'ordonnance dans le Système national d'information sur l'utilisation des médicaments prescrits, c'est-à-dire la base de données du SNIUMP. Cette base de données permet de dégager les tendances générales en matière d'utilisation des médicaments au fil du temps et d'analyser cette utilisation en mesurant des éléments comme le nombre et les types de médicaments que les patients consomment, le respect des consignes d'utilisation et les changements de médicaments.

Une autre banque de données de l'ICIS, c'est-à-dire le Système d'information sur les soins de longue durée, recueille des données cliniques, notamment de l'information sur l'utilisation des médicaments d'ordonnance chez les personnes âgées dans plus de 1 100 établissements de soins de longue durée de partout au pays.

Nous avons produit plusieurs rapports et indicateurs de qualité sur l'innocuité des médicaments d'ordonnance, surtout chez les personnes âgées. Les sujets traités comprennent l'utilisation potentiellement inappropriée des médicaments, la polypharmacie et les hospitalisations liées à des réactions indésirables aux médicaments. Voici les principales constatations de ces rapports. Tout d'abord, environ 70 p. 100 des personnes âgées prenaient cinq médicaments ou plus, et près de 10 p. 100 en consommaient 15 ou plus. Les personnes âgées étaient cinq fois plus susceptibles d'être hospitalisées en raison d'une réaction indésirable à un médicament que le reste de la population canadienne. Environ une personne âgée sur dix qui ne se trouvait pas dans un établissement de soins de longue durée prenait un médicament jugé potentiellement inapproprié.

Environ un résident des établissements de soins de longue durée sur trois prenait des médicaments antipsychotiques sans avoir reçu de diagnostic de psychose. Nous recueillons aussi des informations sur les erreurs de médicaments qui se produisent dans les hôpitaux et dans les établissements de soins de longue durée. Cela facilite la mise en commun des leçons apprises en matière d'erreurs de médicaments à l'échelle locale, régionale et nationale. L'information est utilisée pour mieux comprendre les facteurs qui entraînent des erreurs de médicaments et pour dégager des stratégies potentielles d'amélioration du système de santé.

Parmi les exemples des répercussions de ce travail à l'échelle nationale, on peut citer la transmission des données à Santé Canada pour appuyer ses travaux liés à la désignation, à l'emballage et à l'étiquetage des produits pharmaceutiques et le partage des données avec l'Institut pour l'utilisation sécuritaire des médicaments du Canada pour appuyer ses efforts de sensibilisation et pour cerner des stratégies visant à améliorer le système.

En ce qui concerne la dépendance, nous recueillons des renseignements sur les prescriptions et sur les maladies liées aux drogues par l'entremise de notre Base de données sur la santé mentale en milieu hospitalier lorsque les drogues ont été un facteur d'hospitalisation du patient. Nous recueillons également de l'information clinique sur la toxicomanie chez les personnes admises dans des lits en santé mentale réservés aux adultes. L'ICIS a examiné les répercussions des maladies mentales avec troubles concomitants liés à la consommation de psychotropes sur les modèles d'hospitalisation dans l'ensemble du Canada. Les résultats révèlent que les personnes souffrant de maladie mentale et présentant des troubles liés à la consommation de psychotropes font une utilisation plus élevée des services hospitaliers. On a aussi conclu que les Canadiens hospitalisés en raison d'une maladie mentale avec troubles concomitants liés à la consommation de drogues représentaient près du tiers de tous les patients hospitalisés en psychiatrie en 2010-2011. Lorsque l'on compare avec les personnes hospitalisées pour des troubles psychotiques, seules les personnes présentant des troubles concomitants liés à la consommation de psychotropes étaient plus susceptibles (de 25 p. 100 environ) d'être réadmises à l'hôpital dans l'année suivant leur congé.

Nos banques de données actuelles fournissent certains renseignements sur les conséquences imprévues de la prescription de médicaments. Il est possible, évidemment, d'aller encore plus loin. Même si nous ne disposons pas des renseignements cliniques détaillés requis pour évaluer l'efficacité des antibiotiques, nous recueillons toutefois des données qui pourraient servir à suivre les tendances en matière d'utilisation des antibiotiques, afin de déceler les changements dans les médicaments utilisés et dans la durée d'action des antibiotiques ou d'autres signes qui annoncent des changements dans l'efficacité des antibiotiques. Dans certaines provinces, il est possible de surveiller les cas d'hospitalisation pour infection chez les personnes prenant des antibiotiques.

Les données de l'ICIS pourraient également servir à déterminer le nombre de personnes susceptibles d'être touchées par une pénurie de médicaments. Ces données pourraient aussi être utilisées pour étudier les répercussions de ces pénuries sur le traitement des patients, par exemple, le nombre de patients qui changent de médicament ou qui arrêtent simplement leur traitement.

Dans le domaine de la contrefaçon de médicaments, nos données pourraient servir à suivre les tendances en matière d'utilisation des médicaments contrefaits, notamment pour cerner les régions aux prises avec ce problème.

Notre travail sur les produits pharmaceutiques repose sur un seul facteur, c'est-à-dire de meilleures données. Il y a des lacunes dans nos données actuelles sur les médicaments, et si elles étaient comblées, nous aurions une connaissance plus approfondie de l'offre, de l'utilisation, de l'innocuité et du prix des médicaments ainsi que de leurs répercussions sur les Canadiens.

L'ICIS s'efforce de combler certaines de ces lacunes, par exemple le fait que notre base de données sur les médicaments contient peu de données sur les jeunes Canadiens en raison de la façon dont les régimes publics d'assurance-médicaments au Canada sont conçus. On manque également de données sur les médicaments en milieu hospitalier. Nous avons récemment ajouté des données de la Colombie-Britannique sur les médicaments payés directement par les patients ou par des assureurs privés, et nous avons entamé des travaux préliminaires sur la faisabilité de recueillir ces données auprès d'autres provinces.

Nous avons aussi fait des travaux préliminaires pour vérifier la disponibilité des données sur les médicaments de chimiothérapie dans l'ensemble du pays. Il y a aussi des lacunes dans les données sur les incidents en oncoradiologie et sur les réactions indésirables aux médicaments.

Nous avons besoin de beaucoup plus de renseignements sur les troubles liés à la consommation d'alcool, de drogues et de médicaments d'ordonnance et sur les services offerts. Actuellement, le Centre canadien de lutte contre les toxicomanies recueille certaines données sur les services de traitement des dépendances offerts au Canada. De meilleurs renseignements à cet égard nous permettraient d'examiner les aspects et les résultats cliniques.

Quelles sont donc les prochaines étapes? Nous continuerons de produire des analyses sur les données concernant l'utilisation des médicaments d'ordonnance. Nous procédons actuellement à un examen approfondi de l'utilisation des médicaments chez les personnes âgées couvertes par les régimes publics d'assurance-médicaments. Les résultats de cette étude devraient être publiés au printemps et ils incluront les données sur les demandes de remboursement des médicaments pour environ 70 p. 100 des personnes âgées.

Monsieur le président, j'aimerais vous remercier de m'avoir donné l'occasion de vous présenter ces renseignements. Mon collègue Mike Gaucher et moi serons heureux de répondre à vos questions.

Le président : Je vais maintenant donner la parole à Brian O'Rourke, président et directeur-général de l'Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé, ou l'ACMTS, à nous livrer son exposé.

[Français]

Brian O'Rourke, président et directeur général, Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé : Monsieur le président, je vous remercie de m'offrir la possibilité de m'adresser au comité.

[Traduction]

J'aimerais féliciter les membres du comité de leur travail sur les produits pharmaceutiques sur ordonnance au Canada. Il s'agit d'un sujet important, et dans vos deux premiers rapports, vous avez formulé d'excellentes recommandations qui amélioreront sans doute l'infrastructure des essais cliniques au Canada et le suivi postapprobation effectué pour en assurer l'innocuité et l'efficacité au Canada.

J'ai hâte de lire votre troisième rapport et j'espère que lorsque j'ai comparu devant votre comité, je vous ai aidé dans votre étude sur l'emploi non conforme à l'étiquette de produits pharmaceutiques sur ordonnance.

[Français]

Je commencerai par vous parler de l'Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé et de la façon dont nos travaux pourraient être utiles en ce qui a trait à la nature des conséquences imprévues de l'utilisation des médicaments sur ordonnance.

L'agence est un organisme indépendant sans but lucratif qui a été créé en 1989. Nous nous considérons comme une organisation d'évaluation des technologies de la santé, ce qui signifie que nous fournissons des évaluations fondées sur des preuves d'efficacité clinique et sur le rapport coût-efficacité des produits pharmaceutiques de diagnostics, de dispositifs et de procédures médicales dentaires et chirurgicaux.

[Traduction]

Pour l'essentiel, nous avons deux secteurs d'activité généraux, à savoir notre portefeuille des médicaments et notre portefeuille de la technologie, lequel englobe les appareils, les diagnostics et les procédures. La plupart de mes commentaires aujourd'hui porteront sur notre portefeuille des médicaments.

Notre budget de fonctionnement annuel est d'environ 22 millions de dollars par année, dont la majeure partie provient de Santé Canada et de toutes les provinces et tous les territoires, à l'exception du Québec. Le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux qui financent l'ACMTS en sont membres ou propriétaires, et ils sont représentés par leur sous-ministre de la santé. L'ACMTS est gouvernée par un conseil d'administration relevant des sous-ministres.

L'ACMTS offre une vaste gamme de services pour appuyer la gestion efficace des produits pharmaceutiques et des autres technologies de la santé au Canada. L'un de nos programmes phares est le Programme commun d'évaluation des médicaments, un processus fédéral-provincial-territorial d'examen de l'efficacité clinique et de la rentabilité des nouveaux médicaments et des médicaments existants s'assortissant de nouvelles indications. Le Programme commun d'évaluation des médicaments soutient les décisions en matière de couverture de 18 des 19 régimes publics d'assurance- médicaments du Canada. Le Québec dispose de son propre régime.

Nous effectuons également des examens des classes thérapeutiques sur des produits pharmaceutiques, et nous menons des projets sur leur utilisation optimale, nous produisons des rapports, des recommandations et des outils qui découlent du processus de délibération des experts. Notre travail à cet égard fournit les données probantes aux décideurs en matière de soins de santé, afin de leur permettre de favoriser la prescription et l'utilisation appropriées des produits pharmaceutiques d'ordonnance.

Certains exemples récents d'examens des classes thérapeutiques que nous avons menés comprennent des thérapies de médicaments pour la prise en charge de la sclérose en plaques cyclique et les traitements antithrombotiques chez les patients atteints de fibrillation auriculaire.

[Français]

Je parlerai maintenant de notre rapport de valeur et de notre service d'examen rapide des résumés rapides de la vaste et complexe littérature médicale. Ce service est fort utile, car il répond à des besoins urgents de données probantes qui éclairent des politiques et des pratiques en matière de technologie pharmaceutique et non pharmaceutique. Notre mandat est de soutenir la gestion efficace des technologies de la santé tout au long de leur cycle de vie, de l'innovation à l'obsolescence.

Nous ne prenons pas les décisions définitives quant aux technologies qui seront financées par le ministère de la Santé ou utilisées par les patients et les cliniciens, mais notre travail éclaire les décisions liées à la technologie tant sur le plan des politiques que sur le plan de la pratique.

[Traduction]

En tant qu'organisme participant à la promotion de l'utilisation optimale des technologies de la santé, nous reconnaissons que les progrès réalisés en ce qui concerne les appareils médicaux, les médicaments et les procédures contribuent à l'amélioration de la prestation des soins de santé et des résultats pour les patients.

Nous reconnaissons également que « nouveau » n'est pas nécessairement synonyme de « meilleur » et que certaines nouvelles technologies pharmaceutiques ne procurent que des avantages négligeables, voire aucun, et ce, bien souvent, moyennant un coût beaucoup plus élevé. Nous reconnaissons la grande incertitude qui règne actuellement au sujet des nouveaux médicaments après leur approbation par Santé Canada, et surtout l'incertitude concernant les conséquences imprévues ou non désirables.

Nous estimons que notre rôle, et celui des évaluations de la technologie de la santé en général, consiste à fournir les données probantes qui permettent de faire en sorte que les technologies de la santé ajoutent de la valeur au système, qu'elles contribuent à l'amélioration des résultats pour les patients sans considérablement augmenter les risques liés au traitement et qu'elles constituent véritablement des innovations, et non des générateurs de coûts.

Permettez-moi de vous donner un exemple. Environ 350 000 Canadiens souffrent d'un problème cardiaque connu sous le nom de fibrillation auriculaire, qui se manifeste par un rythme cardiaque irrégulier et peut entraîner des complications médicales graves, par exemple un accident vasculaire cérébral. Dans la plupart des cas, les personnes atteintes de ce trouble doivent prendre toute leur vie des anticoagulants, c'est-à-dire des médicaments qui préviennent la formation de caillots de sang. Depuis environ 60 ans, le principal médicament consommé par ces personnes est la warfarine, mais de nouveaux anticoagulants administrés par voie orale et présentés comme une innovation importante sont maintenant accessibles. L'ACMTS a mené un examen rigoureux qui a révélé que, comparativement à la warfarine, ces nouveaux médicaments ne procuraient qu'un avantage éventuel négligeable, qu'on ne disposait d'aucune donnée à long terme sur leur innocuité et que leur rentabilité, lorsqu'ils sont utilisés à grande échelle pour remplacer la warfarine, était grandement incertaine. L'examen a confirmé que la warfarine demeurait le traitement de première ligne à privilégier, et notre comité d'experts a recommandé que la prise d'anticoagulants administrés par voie orale ne devrait être couverte que dans les cas où un patient ne devrait pas prendre de la warfarine ou ne peut pas le faire. Le comité a souligné que la rareté des données sur l'innocuité à long terme était une préoccupation importante.

[Français]

Notre agence a été créée il y a 25 ans par les ministres de la Santé fédéral, provinciaux et territoriaux du Canada pour aider les décideurs à gérer l'incertitude liée à l'utilisation efficiente des technologies de la santé.

[Traduction]

Soyons clairs; l'incertitude est très présente dans le domaine de la santé, particulièrement en ce qui a trait aux effets bénéfiques et indésirables des médicaments. Cette incertitude englobe les conséquences involontaires liées à l'emploi des médicaments d'ordonnance, ce qui est l'objet de votre étude.

Les conséquences inattendues découlant de l'emploi de médicaments d'ordonnance se divisent en trois grandes catégories. Premièrement, on retrouve les conséquences involontaires qui surviennent même lorsque le médicament est prescrit et utilisé conformément à la monographie approuvée par Santé Canada. Sachez que tous les médicaments peuvent provoquer des réactions involontaires. Même un médicament aussi commun qu'un décongestionnant peut causer des étourdissements, un état d'éveil, de la nervosité, de l'agitation, une augmentation de la pression artérielle et un rythme cardiaque irrégulier.

Deuxièmement, il y a les conséquences involontaires qui se produisent lorsqu'un médicament a été prescrit, administré ou pris de façon inappropriée. Ces effets pourraient être le résultat d'une utilisation non indiquée sur l'étiquette, d'une erreur de médicament ou d'un certain nombre de facteurs, comme l'ingestion d'une dose incorrecte ou une interaction médicamenteuse.

Troisièmement, il s'agit des conséquences involontaires liées au mauvais emploi d'un médicament, c'est-à-dire l'usage d'un médicament prescrit à quelqu'un d'autre ou obtenu illégalement.

Pour ce qui est des deux premières catégories, je crois que des initiatives sont en cours pour déterminer, prévenir et gérer les conséquences involontaires découlant de l'emploi de médicaments d'ordonnance tout au long de leur cycle de vie. Les modifications à la Loi sur les aliments et drogues, adoptées dans le cadre de la Loi de Vanessa et annoncées par la ministre de la Santé en décembre 2013, permettront de mieux protéger la santé et la sécurité des patients, en particulier après la mise en marché des médicaments.

De plus, Santé Canada est en pourparlers avec des organismes de réglementation de partout dans le monde concernant une méthode novatrice d'approbation des médicaments destinés à la consommation humaine, c'est-à-dire la délivrance de permis adaptable.

L'évaluation des technologies de la santé contribue à réduire l'incertitude entourant les médicaments en fournissant, en temps utile, des renseignements crédibles et pertinents fondés sur des données probantes. Les organismes d'ETS, comme l'ACMTS, ne se limitent pas aux évaluations des risques et avantages que mènent les organismes de réglementation et se penchent plutôt sur l'efficacité clinique et la rentabilité d'un médicament par rapport aux autres traitements disponibles. Autrement dit, nous comparons l'efficacité, les effets néfastes et la rentabilité des médicaments nouveaux avec les médicaments existants. Nous examinons les données probantes générées après la mise en marché d'un médicament, ce qu'on appelle les « données probantes du monde réel », en particulier les cas d'effets secondaires graves qui ne se sont pas produits à l'étape des effets cliniques contrôlés. Dans certains cas, nous donnons des directives supplémentaires, des outils et des séances d'information aux praticiens et aux patients. Lorsque nous sommes confrontés à une incertitude importante quant à l'innocuité d'un médicament, notre comité d'experts recommandera habituellement que le médicament en question soit prescrit sous réserve de certains critères qui limitent son emploi jusqu'à ce qu'on en sache plus sur les conséquences involontaires.

Je tiens également à souligner l'excellent travail accompli par le Réseau sur l'innocuité et l'efficacité des médicaments, le RIEM, une organisation dont le mandat est d'accroître la capacité d'entreprendre des études postcommercialisation de grande qualité pour assurer l'innocuité et l'efficacité des médicaments.

D'ailleurs, vous avez entendu son directeur général, le Dr Bob Peterson, au cours des séances précédentes, dans le cadre de votre étude sur les médicaments d'ordonnance. Je suis un ardent défenseur du RIEM, que je considère un précieux partenaire et un véritable atout pour le système de santé canadien. Le RIEM a contribué aux travaux de l'ACMTS sur les nouveaux anticoagulants oraux dont j'ai parlé plus tôt, et il mène actuellement de nombreux projets dans le domaine des données probantes du monde réel.

Grâce aux initiatives et aux approches de collaboration entre Santé Canada, l'ACMTS et le RIEM, nous avons un système en trois parties qui vise à réduire, de façon continue, l'incertitude entourant les effets bénéfiques et indésirables des médicaments au Canada, au moyen de l'approbation réglementaire, de l'évaluation des technologies de la santé et de la production de données probantes postcommercialisation.

[Français]

Nous pouvons être fiers de l'approche canadienne d'élaboration de preuve sur les effets néfastes et les avantages cliniques tout au long du cycle de vie des produits pharmaceutiques d'ordonnance, mais il reste certainement encore beaucoup de travail à accomplir.

[Traduction]

En ce qui concerne la troisième catégorie de conséquences involontaires, celles liées au mauvais emploi ou à l'emploi illégal des médicaments, sachez qu'il s'agit d'un problème très complexe et difficile à régler. Bien que ce domaine ne relève pas spécifiquement de notre mandat, nous avons effectué certains travaux en collaboration avec les régimes d'assurance-médicaments fédéral, provinciaux et territoriaux sur les stupéfiants et autres médicaments consommés de façon abusive, et c'est avec plaisir que je tenterai de répondre aux questions du comité sur ce sujet.

[Français]

Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de faire cet exposé aujourd'hui. Je répondrai avec plaisir à toute question que vous pourriez avoir.

[Traduction]

Le président : Merci beaucoup, monsieur O'Rourke. Avant de passer à la période de questions, j'aimerais vous parler de notre troisième rapport sur l'emploi non conforme à l'étiquette. Nous avons mené cette étude au printemps, mais en raison des intersessions et ainsi de suite, je vais le déposer au Sénat cet après-midi. Il fait suite à nos discussions.

Nous allons maintenant passer à la période de questions.

Le sénateur Eggleton : Ma première question s'adresse à vous, monsieur O'Rourke. Vous n'avez pas parlé des pénuries de médicaments, ce qui est un autre sujet qui nous intéresse, mais je crois comprendre que vous avez mené des travaux sur des avenues thérapeutiques de rechange, advenant des pénuries. Pourriez-vous nous en glisser un mot? Est- ce que vous conseillez les gouvernements fédéral et provinciaux sur ces solutions de rechange? Quelles autres mesures pourriez-vous prendre pour remédier à ce problème?

M. O'Rourke : En fait, cela ne relève pas de notre mandat. Nous n'avons pas fait grand-chose à ce chapitre. Nous avons été un observateur passif auprès des provinces et d'autres organisations, comme l'Association des pharmaciens du Canada, qui assume la responsabilité de ce dossier. Nous avons offert nos services, surtout pour ce qui est de trouver d'autres traitements dans le cas de pénuries. On ne nous a pas fait de demande à cet égard. C'est un peu délicat, étant donné que la plupart des décisions se prennent lors de la rencontre du patient et de son médecin.

Le sénateur Eggleton : Vous dites que vous offrez des solutions de rechange. Comment vous y prenez-vous?

M. O'Rourke : Nous n'avons pas offert de traitements de rechange, mais nous pouvons examiner des données probantes et fournir des conseils sur les traitements qui pourraient être envisagés dans un cas en particulier. Advenant la pénurie d'un antibiotique donné, nous pourrions produire un rapport démontrant que certains autres antibiotiques seraient efficaces dans cette situation clinique.

Le sénateur Eggleton : Cela ne serait-il pas utile?

M. O'Rourke : En effet.

Le sénateur Eggleton : Qu'est-ce que nous pourrions faire pour vous aider?

M. O'Rourke : La plupart des travaux sont réalisés à l'échelle locale, en milieu hospitalier. Les hôpitaux qui ont des centres d'information sur les médicaments, par exemple, pourraient examiner ces données. Du point de vue d'un organisme central, la tâche est très ardue étant donné qu'il faut tenir compte de nombreux autres facteurs liés aux patients au moment de prendre ces décisions. À ce stade-ci, on ne nous a pas vraiment demandé de jouer un rôle actif.

Le sénateur Eggleton : Monsieur Wright, dans votre exposé, vous avez relevé un certain nombre de lacunes en matière de données. Selon vous, quelles recommandations le comité devrait-il faire pour vous aider à combler ces lacunes?

M. Wright : À l'ICIS, nous accomplissons de grands progrès à bien des points de vue. Nous travaillons très étroitement avec les provinces et les territoires. Certaines choses exigent du temps. Nous venons tout juste de recueillir les données de la Colombie-Britannique, non seulement sur son régime d'assurance-médicaments public, mais aussi privé. Nous collaborons avec Terre-Neuve pour obtenir ses données et, lorsque nous les aurons, à l'exception du Québec, nous pourrons dresser un portrait assez exhaustif de la situation des régimes publics d'assurance-médicaments au Canada.

Nous aimerions beaucoup mettre la main sur les données concernant le régime privé. Encore une fois, nous avons obtenu celles de la Colombie-Britannique, et nous collaborons avec plusieurs provinces à cette fin. Nous vous sommes très reconnaissants de nous offrir votre aide, cependant, je considère que c'est un travail qui doit absolument se faire en collaboration avec les provinces et les territoires.

Le sénateur Eggleton : Vous êtes donc sur le point de remédier à ces lacunes.

M. Wright : Absolument.

Le sénateur Eggleton : C'est une question de temps. Pour ce qui est des données sur les régimes privés d'assurance- médicaments, vous avez dit avoir recueilli celles de la Colombie-Britannique, mais pas celles des autres provinces. Encore une fois, est-ce seulement une question de temps avant que vous obteniez les données des différentes provinces?

M. Wright : Oui. Nous effectuons certains travaux préliminaires avec les autres provinces afin d'avoir accès à leurs données. Plus les dossiers de santé et les ordonnances électroniques seront répandus, plus il sera facile pour nous de mettre la main sur ces données.

La sénatrice Eaton : Merci beaucoup, messieurs, d'être parmi nous aujourd'hui. J'aimerais vous parler de la polypharmacie. Selon vous, les médecins devraient-ils inciter leurs patients à toujours se procurer leurs médicaments auprès du même pharmacien ou à la même pharmacie, de manière à ce que les pharmaciens soient au courant de tous les médicaments qui ont été prescrits et qu'on évite, le plus possible, les interactions indésirables avec d'autres médicaments? Devrait-on encourager les pharmaciens et les pharmacies dans ce sens?

M. O'Rourke : À titre de pharmacien, et non pas à titre de président de l'ACMTS, je serais tout à fait en faveur d'une telle initiative. Il est essentiel d'avoir accès à toutes les données existantes, y compris les renseignements provenant des hôpitaux où les patients ont été admis, pour être en mesure de comprendre les besoins précis des patients. Comme je l'ai indiqué plus tôt, tous les médicaments peuvent entraîner des effets indésirables s'ils sont pris avec d'autres médicaments; ce serait donc très utile dans une situation comme celle-là.

La sénatrice Eaton : Nous savons tous que les gens consultent des spécialistes en plus de leur médecin de famille, mais aucun médecin ne semble être au fait de tous les médicaments que prennent leurs patients.

M. O'Rourke : Absolument.

La sénatrice Eaton : Le comité pourrait donc en faire la recommandation?

M. O'Rourke : Sans aucun doute.

La sénatrice Eaton : Il faudrait sensibiliser les gens.

M. O'Rourke : Absolument.

La sénatrice Eaton : L'ACMTS évalue-t-elle régulièrement les médicaments approuvés pour des bienfaits présumés importants qui ne sont pas associés à l'approbation de Santé Canada?

M. O'Rourke : Non, les médicaments sur lesquels nous nous penchons ont tous déjà été approuvés par Santé Canada, et nous les examinons pour leurs indications approuvées. Habituellement, lorsqu'un médicament nous arrive pour la première fois, on y retrouvera possiblement une ou deux indications. Pendant tout son cycle de vie, on pourrait faire la demande d'une indication supplémentaire. Toutefois, nous ne nous penchons pas là-dessus tant que Santé Canada n'a pas approuvé ledit médicament.

La sénatrice Eaton : Je vois. On m'a prescrit un médicament pour traiter une hernie discale. Ce médicament n'avait rien à voir avec les hernies, mais il m'a permis de marcher à nouveau. J'ai vu une annonce de ce médicament à la télévision, et il était destiné aux diabétiques souffrant de problèmes de pied. Je suppose que j'ai été chanceuse. Un ami me l'avait recommandé. Toutefois, selon ce que vous avez dit, vous n'entreprenez pas ce type de démarches?

M. O'Rourke : Non, seulement les indications approuvées pour le médicament.

La sénatrice Eaton : Que pouvons-nous faire pour remédier au problème de la résistance aux antibiotiques, monsieur Wright?

M. Wright : Je ne suis pas pharmacien, mais économiste. Par contre, je suis entouré de deux pharmaciens. Peut-être que M. Gaucher serait en mesure de vous répondre?

La sénatrice Eaton : Monsieur Gaucher, auriez-vous quelque chose à dire à ce sujet?

Michael Gaucher, directeur, Services d'information sur les produits pharmaceutiques et la main-d'œuvre de la santé, Institut canadien d'information sur la santé : Chose certaine, on reconnaît qu'il y a un problème et que certains antibiotiques sont potentiellement problématiques, et on surveille la situation de près. Nous ne faisons pas ce genre de travail à l'ICIS, mais l'Agence de la santé publique du Canada surveille la situation, à l'aide de ces données, afin de déterminer où se situent les problèmes.

La sénatrice Eaton : La population est-elle suffisamment sensibilisée au fait de ne pas prendre d'antibiotiques pour traiter des virus ou des rhumes? Est-ce qu'on le répète assez souvent, dans les bureaux de médecin et dans les écoles, qu'on ne prescrit pas des médicaments pour n'importe quoi?

M. Gaucher : Les gens sont assurément plus sensibilisés qu'ils l'étaient auparavant. Il y a une sensibilisation accrue au sein des fournisseurs de soins et de la population, mais il y a encore place à l'amélioration.

La sénatrice Eaton : En terminant, on sait que les États-Unis sont en train d'examiner toute la question de l'administration d'antibiotiques aux animaux destinés à l'alimentation. Ils se penchent également sur d'autres produits, notamment les savons antibactériens. Mène-t-on des études semblables au Canada?

M. O'Rourke : Pas à ma connaissance. Santé Canada effectue peut-être des travaux dans ce domaine. Pour répondre à votre question précédente, je pense que nous devons absolument mieux informer les patients sur l'usage des antibiotiques. Il y a tellement de patients qui consultent un médecin pour un rhume ou une grippe et qui s'attendent à ce qu'on leur prescrive un antibiotique. Trop de médecins se sentent contraints de prescrire des médicaments. Il faudrait donc sensibiliser davantage les patients à cet égard.

Nous avons également besoin de nouveaux antibiotiques. Nous sommes aux prises avec une résistance accrue aux antibiotiques. On devrait encourager les compagnies pharmaceutiques à développer de nouveaux antibiotiques. Cependant, les nouveaux antibiotiques sont mis sur le marché comme médicaments de troisième, quatrième et cinquième ligne, alors ce n'est pas très attrayant pour un fabricant d'investir d'importantes sommes dans le développement de nouveaux antibiotiques, compte tenu des maigres profits qu'il pourrait en tirer. C'est une impasse, en quelque sorte, pour les compagnies pharmaceutiques.

La sénatrice Stewart Olsen : J'ai plusieurs questions à poser sur la collecte de toutes ces données. Peut-être que M. Wright et M. O'Rourke pourront y répondre. Comment procédez-vous exactement à la collecte des données? Je sais que vous travaillez avec les provinces. Est-ce qu'elles vous les donnent, tout simplement?

M. Wright : Essentiellement, oui. Nous les recevons grâce à des flux de données, et nous les archivons dans un dépôt central. Bientôt, nous aurons accès à quelque 1,5 milliard d'entrées de données pluriannuelles sur les médicaments, et chaque entrée comporte différents indicateurs.

La sénatrice Stewart Olsen : Pardonnez-moi de vous interrompre. Vous recueillez des données sur le nombre de fois qu'un médicament a été prescrit ou sur un médicament en particulier? Quel type de données étudiez-vous?

M. Gaucher : Ce sont des données concernant les patients, qui sont donc essentiellement recueillies au niveau des ordonnances. On connaît le médicament, la quantité prescrite, le nom, le dosage, le format et différents paramètres. Il y a environ 30 paramètres différents en tout : la quantité prescrite, le coût, et cetera.

La sénatrice Stewart Olsen : Est-ce que les rapports d'effets indésirables sont joints à ces données?

M. Gaucher : Non. Il n'y a pas de rapports d'effets indésirables avec les données en tant que telles. Il est possible d'examiner tout le profil du patient, mais nous ne pourrions pas déceler la présence d'effets indésirables avec cette information. On peut cependant reconnaître, par exemple, les interactions médicamenteuses.

La sénatrice Stewart Olsen : Est-ce que cela ne serait pas utile d'avoir une méthode quelconque pour comparer les deux? Vous avez les données du patient, son nom et les médicaments qu'on lui a prescrits?

M. Gaucher : Oui.

La sénatrice Stewart Olsen : Mais il n'y a pas de suivi. Vous savez qu'il a pris tel ou tel médicament, mais vous ne savez pas s'il a eu des effets indésirables?

M. Gaucher : Non, nous n'avons pas cette information. La seule chose qui a été faite en ce sens est l'étude sur les hospitalisations en lien aux effets indésirables des médicaments. Nous avons dû mettre en relation nos données sur les médicaments avec la Base de données sur les congés des patients pour connaître les diagnostics indiquant un effet indésirable. Nous pourrions peut-être faire de même avec les données des services d'urgence, mais les données sur les médicaments ne donnent pas ce genre de renseignement, non.

M. O'Rourke : Nous allons bien plus loin que ces données objectives et précises. L'ICIS s'avère une merveilleuse référence pour nos analyses. Nous recevons également un dossier complet de la part du fabricant. Ce n'est jamais assez, évidemment. Nous pouvons compter sur une solide équipe de bibliothécaires et d'experts des renseignements médicaux, qui sondent la littérature internationale. Nous sommes constamment aux aguets pour détecter les effets indésirables, les effets nocifs. Si nous voyons qu'un grand nombre de patients ont abandonné une étude clinique ou qu'ils sont disparus en cours de route, nous demandons au fabricant ce qui leur est arrivé et nous prenons note des effets indésirables et des décès associés à la prise du médicament. Nous achetons aussi des renseignements auprès de certains fabricants commerciaux qui peuvent avoir des données différentes de celles que nous pourrions obtenir de l'ICIS.

La sénatrice Stewart Olsen : À ce sujet, à quelle échelle l'information est-elle diffusée?

M. Gaucher : Les rapports que nous produisons d'après les données sur les médicaments sont affichés sur notre site, et nous tentons de les diffuser à plus grande échelle par d'autres moyens. Nous les présentons à des conférences et les transmettons à des groupes que cela pourrait intéresser. Nous engageons des experts. L'information est diffusée de diverses façons, mais tous les rapports sont disponibles sur notre site web.

M. O'Rourke : Nous prenons des mesures passives, en ce sens que l'ensemble de notre travail est affiché sur notre site web, mais nous sommes également très présents dans les médias sociaux. Nous multiplions aussi les efforts pour diffuser notre information. Nous avons une équipe de spécialistes en mobilisation du savoir qui s'affaire à vulgariser des données scientifiques complexes, de façon à les rendre plus digestibles. Nous prenons part à des conférences dans les domaines médical, infirmier et pharmaceutique. Nous avons un agent de liaison — un employé de l'ACMTS — dans chaque province canadienne. Il recueille de l'information pour nous et en fait la promotion auprès de la population. Tout ce que nous faisons est du domaine public.

La sénatrice Stewart Olsen : Prenez-vous soin de travailler avec les facultés de médecine et les écoles de sciences infirmières, pour qu'elles sachent que votre organisation existe et qu'elles puissent consulter vos données?

M. O'Rourke : Absolument. Cela fait partie des mesures proactives que nous prenons. En fait, j'ai avec moi aujourd'hui un étudiant au doctorat en pharmacie de l'Université de Toronto, qui fait un stage d'un mois chez nous. Nous tentons d'établir un contact avec les écoles, les universités et les collèges. Le mois prochain, je fais une présentation en Nouvelle-Écosse pour le cours annuel de recyclage des médecins de la Nouvelle-Écosse. Je vais leur parler du travail que nous faisons. Nous tentons d'être proactifs dans la diffusion de notre information.

La sénatrice Stewart Olsen : Félicitations pour votre service d'examen rapide; est-ce aussi ouvert au public?

M. O'Rourke : Absolument. C'est un produit qui a été bien reçu. Notre capacité est limitée, mais tous les intervenants du domaine de la santé publique, qu'ils soient responsables de politiques ou qu'ils jouent un rôle de nature clinique, peuvent nous poser une question et nous leur fournirons les renseignements dont ils ont besoin pour confirmer certaines choses, prendre une décision à l'égard des politiques ou déterminer le traitement à suivre pour un patient.

La sénatrice Stewart Olsen : Votre étude sur la warfarine et les anticoagulants est intéressante. Vous recommandez que la warfarine demeure le médicament de première ligne, car vous n'avez pas de données à long terme sur les autres.

Allez-vous réévaluer la situation si des études à long terme démontrent que l'un de ces autres médicaments est plus efficace que la warfarine? Comme vous le savez sans doute, la warfarine cause beaucoup de problèmes. Est-ce que des mises à jour régulières ou de nouvelles évaluations vont être faites pour ces nouveaux médicaments?

M. O'Rourke : Oui, c'est le cas. Nos spécialistes en information sont en mesure de faire le suivi de toute nouvelle étude ou de tout nouveau rapport concernant un médicament que nous avons évalué. Dans la plupart des cas, nous n'avons pas à refaire ces recherches, parce que le fabricant nous informe quand une nouvelle évaluation est de mise pour un médicament. Nous avons un processus qui permet de soumettre de nouveau un médicament à une évaluation quand de nouvelles données sont disponibles. Les régimes d'assurance-médicaments peuvent nous demander de réexaminer les données.

Lorsqu'une compagnie lance un nouveau médicament, deux ou trois autres compagnies vont viser le même marché. Par exemple, de nouveaux médicaments contre la sclérose en plaques vont bientôt être mis sur le marché. Nous allons faire l'évaluation de chacun des médicaments avant de formuler des recommandations, puis nous allons procéder à un examen de la classe thérapeutique pour tous les agents qui entrent dans leur composition. Cela nécessite parfois une nouvelle évaluation des données.

Le sénateur Enverga : Merci pour vos exposés. Ma question porte sur les aînés, qui sont particulièrement vulnérables face à plusieurs des effets indésirables des médicaments d'ordonnance. L'ICIS a rapporté que les personnes âgées de plus de 65 ans courent cinq fois plus de risques que les autres Canadiens d'être hospitalisées en raison d'effets indésirables graves. Pouvez-vous nous expliquer sur quoi s'appuie l'analyse de l'ICIS sur les hospitalisations associées aux effets indésirables des médicaments?

M. Gaucher : Oui. Nous avons utilisé les données de la Base de données sur les congés des patients de l'ICIS, qui contient de l'information sur les diagnostics liés à différents effets indésirables, afin de cerner les personnes âgées qui avaient été hospitalisées pour cette raison.

Nous avons utilisé les données diagnostiques pour le déterminer, et nous avons cherché à savoir à quelle fréquence cela se produisait, quels types de médicaments étaient en cause et quels étaient les effets observés. Nous avons constaté, entre autres, que les anticoagulants étaient la classe thérapeutique la plus souvent en cause dans les hospitalisations (hémorragie causée par les médicaments).

À l'aide de l'information sur les médicaments, nous avons ensuite évalué les facteurs de risque associés à ces hospitalisations, en mettant en relation le profil du patient et celui du traitement employé. Nous avons ainsi pu conclure que les patients qui prenaient plus de médicaments couraient plus de risques. Nous avons aussi étudié d'autres facteurs pour déterminer ce qui rendait les patients plus à risque. Plus les patients étaient âgés, plus ils étaient à risque. Dans cette étude, nous avons examiné les données diagnostiques et les informations tirées de la Base de données sur les congés des patients, et nous les avons mis en relation avec les renseignements sur les médicaments pour avoir une meilleure idée des personnes âgées qui étaient à risque d'être hospitalisées pour cette raison.

Le sénateur Enverga : Est-ce que les données indiquent qu'une surconsommation de médicaments ou des interactions médicamenteuses pouvaient être à l'origine des hospitalisations?

M. Gaucher : C'est difficile à dire. Nous n'avons pas examiné ce facteur dans le cadre de cette étude. Nous avons noté qu'on pourrait approfondir la question en étudiant le cas des patients hospitalisés qui consomment plusieurs médicaments, leur profil de traitement et la présence potentielle de problèmes. Nous nous sommes limités dans ce cas-ci aux facteurs de risque en général et nous avons pu constater que plus les patients consommaient de médicaments, plus ils étaient à risque. Nous avons également identifié les types de médicaments qui sont le plus souvent associés à des hospitalisations.

Le sénateur Enverga : Est-ce que les antibiotiques sont en grande partie responsables de cette surconsommation de médicaments? Est-ce qu'on prescrit trop d'antibiotiques, particulièrement à nos aînés?

M. Gaucher : Nous avons jeté un coup d'œil aux médicaments les plus souvent en cause, et les antibiotiques n'étaient pas vraiment du nombre. Cela ne veut pas dire qu'ils ne sont jamais associés à des hospitalisations. Quand il s'agit d'étudier les données sur les médicaments, nous avons tendance à mettre l'accent sur les types de médicaments utilisés le plus fréquemment. Les antibiotiques n'en font généralement pas partie, mais il serait certainement possible d'examiner la question à l'aide de ces données. Nous pourrions faire des études plus ciblées sur l'utilisation des antibiotiques. Ce qui complique les choses, c'est que nous n'avons pas beaucoup de données autres que celles sur les personnes âgées. Comme M. Wright l'a indiqué, il nous manque de l'information du côté du secteur privé, alors en ce moment, la plupart des données que nous avons sur les antibiotiques concernent les personnes âgées. Nous n'en avons pas beaucoup sur les autres groupes de patients.

Le sénateur Enverga : Lors de cette étude sur les effets indésirables des médicaments, avez-vous émis des avertissements après avoir constaté un nombre trop élevé d'effets indésirables pour un groupe de patients en particulier? Avez-vous avisé les professionnels de la santé? Est-ce une voie que vous pensez emprunter à l'avenir?

M. O'Rourke : Pas directement, c'est-à-dire que nous n'avons pas alerté tous les médecins du pays. Je pense que Santé Canada a ce mandat lorsqu'on découvre qu'un médicament en particulier a des effets indésirables graves. Nous nous concentrons surtout sur la mobilisation du savoir dont je vous ai parlé tantôt. Si nous décelons des effets nocifs précis ou des problèmes d'innocuité pour une classe thérapeutique à l'étude, nous allons tâcher de vulgariser et de diffuser cette information. Bon nombre de nos rapports contiennent entre 200 et 300 pages; nous tentons de résumer le tout pour que les médecins, les infirmiers et infirmières et les différents professionnels de la santé puissent prendre connaissance de l'information malgré leur horaire chargé.

Pour ce qui est de votre autre question concernant les aînés, si je peux me permettre, le problème qui se pose est la résistance aux antibiotiques. Le problème de polypharmacie auquel la sénatrice Eaton a fait référence est très préoccupant, notamment dans les maisons de repos. Nous avons fait beaucoup de travail avec les provinces, surtout avec la Colombie-Britannique, à propos des chutes chez les aînés. Nous savons que bon nombre de chutes sont dues à des interactions médicamenteuses ou à des problèmes de polypharmacie, ou même à la prise d'un médicament qui peut accroître le risque de chute. Nous avons formulé des recommandations sur l'utilisation de protecteurs de hanche dans les maisons de repos pour prévenir les fractures pelviennes, entre autres, en cas de chute. C'est un problème inquiétant dans les maisons de repos et chez les personnes âgées.

Le sénateur Enverga : Lorsque vous faites des recommandations à Santé Canada, que pensez-vous de leur réaction? Est-ce que le ministère réagit instantanément? Comment est-ce que cela fonctionne pour vous? Est-ce que son délai de réponse devrait être plus rapide?

M. O'Rourke : Je pense que nous avons d'excellents rapports avec Santé Canada, notamment avec la Direction générale des produits de santé et des aliments. Nous avons mis sur pied un programme dans le cadre duquel nous commençons à examiner les nouveaux médicaments environ trois ou quatre mois avant qu'ils ne soient commercialisés ou approuvés par Santé Canada. Nous n'avons pas besoin d'utiliser l'information du ministère. Nous participons aux nombreuses discussions qu'il a avec les fabricants, avant la présentation des médicaments. Bref, nous entretenons d'excellents rapports avec Santé Canada.

M. Wright : Nous aussi, nous entretenons d'excellents rapports avec Santé Canada, mais nous n'avons pas à lui faire de recommandation. Nous préférons nous en tenir à ce que révèlent les données.

La sénatrice Dyck : Je vous remercie de vos exposés. J'aimerais commencer par les questions concernant les antibiotiques. L'un des effets non voulus de la surutilisation d'antibiotiques est l'augmentation des infections à Staphylococcus Aureus résistantes à la méthicilline. Je me demande si l'on tient compte de l'incidence de ces types d'infections dans la collecte de données et si l'on compile une liste d'antibiotiques spécifiques auxquels on peut avoir recours pour traiter ces infections. Et selon ce que révèlent ces données, envisageriez-vous d'utiliser un formulaire pharmaceutique les concernant. Je pense que les familles qui seraient sujettes à ce type d'infections finiraient par payer des frais d'ordonnance extrêmement élevés pour obtenir le médicament en question.

M. O'Rourke : En effet. En ce qui concerne les schémas de résistance particulièrement aigüe — comme la résistance à la méthicilline et à la vancomycine — ainsi que les incidents graves qui se produisent dans les hôpitaux, comme les infections nosocomiales, nous avons étroitement collaboré avec les hôpitaux pour trouver des moyens, tels que des lignes directrices, pour prévenir ces incidents. Ainsi, nous avons mis au point à l'intention des hôpitaux un outil électronique pour suivre les infections à Staphylococcus Aureus résistantes à la méthicilline.

Lorsque des incidents surviennent, on applique les lignes directrices bien établies proposées par les sociétés spécialisées pour traiter les patients souffrant d'infections graves et pour déterminer quel médicament utiliser lorsqu'un antibiotique n'est plus efficace dans un groupe de patients. Tout cela relève des techniques suivies dans les hôpitaux.

Par rapport aux questions de financement que vous soulevez, il est difficile de répondre sans savoir de quel médicament il s'agit. S'il s'agit d'un médicament récemment approuvé ou qui a fait l'objet d'une indication que l'on nous a recommandée, nous le ferions examiner, comme tous les autres médicaments, par notre comité d'experts et recommanderions éventuellement aux provinces de le financer. En revanche, nous ne nous occupons pas des médicaments utilisés dans les hôpitaux, qui sont achetés et couverts par les comités thérapeutiques et les pharmacies de ces établissements.

La sénatrice Dyck : Question rapide, est-ce que la liste des médicaments disponibles peut être consultée sur un site web pour vérifier si un médicament donné a été approuvé par Santé Canada?

M. O'Rourke : Bien sûr, Santé Canada a un site web qui renferme la liste de tous les médicaments approuvés. De leur côté, les provinces ont toutes un site de leur ministère de la Santé où figure la liste des médicaments approuvés. On y indique habituellement aussi s'il y a des restrictions. Les gens qui bénéficient du bien-être social et les aînés sont couverts dans la plupart des provinces, en fonction du programme d'avantages offerts.

M. Gaucher : Quant à l'information sur les traitements, nous pourrions avoir des données sur les médicaments utilisés. Nous pourrions aussi, je suppose, en avoir dans d'autres banques de données touchant par exemple les gens qui sont hospitalisés ou qui font des visites aux urgences. Rien n'est particulièrement ciblé dans ce secteur, mais nous pourrions avoir de l'information sur ce qui se fait.

La sénatrice Dyck : Dans le même ordre d'idées, est-ce que vous recueillez des données sur les médicaments prescrits dans les prisons? Est-ce que ces données font partie de vos collectes habituelles? Nous savons bien qu'il y a beaucoup de dépendances et de désordres mentaux dans les prisons.

M. Gaucher : Nous ne gardons pas actuellement ce genre d'information. Nous pouvons en avoir une idée à partir d'autres banques de données relatives aux dépenses, mais pour ce qui est de données détaillées de notre banque de médicaments d'ordonnance, nous ne les avons pas.

La sénatrice Dyck : Ce pourrait être des données révélatrices, par exemple sur l'utilisation des médicaments et cela m'amène à ma troisième question. Pouvez-vous, en interprétant les données que vous recueillez, constater des tendances de mauvaise utilisation d'un médicament donné? On a beaucoup parlé de l'OxyContin et selon une note que je me suis faite, j'espère ne pas le voir arriver de sitôt. Il y a d'autres médicaments que l'on prescrit aux enfants, comme le Ritalin, que les adultes pourraient utiliser à mauvais escient. Faites-vous un suivi des médicaments d'ordonnance pour voir s'ils sont mal utilisés?

M. Gaucher : Il y a différents moyens de relever les tendances. On peut suivre le traitement des patients sur une période donnée. Dans la banque, nous avons des données provinciales qui remontent à l'an 2000 et, pour la plupart des provinces, qui remontent à cinq ans. On peut donc y suivre le traitement suivi par n'importe quel patient.

Il est difficile de déterminer s'il y a un vrai problème. On pourrait constater des tendances inhabituelles, par exemple de plusieurs ordonnances d'opiacés fournis par différents prescripteurs, des ordonnances qui sont renouvelées périodiquement ou pour des dosages de plus en plus importants. C'est le genre de données que l'on peut déceler. Mais on ne peut pas vraiment conclure qu'il y a un problème en examinant ce genre de tendances. Pour en revenir aux limites de nos collectes, nous n'avons des données sur les jeunes que pour la Colombie Britannique et certaines régions de deux autres provinces. Nous avons beaucoup de données sur les aînés, mais malheureusement pas autant sur les jeunes. C'est une lacune qu'il faut combler.

La sénatrice Dyck : J'allais justement vous poser une question à ce sujet. Quels types de collecte de données faisons- nous pour les enfants? On a parlé de surmédication chez les aînés, mais on pense qu'il pourrait y en avoir chez les enfants. Sans données à ce sujet, ce serait impossible de l'établir. Je me demande si vous avez l'intention d'accroître la collecte de données sur les enfants.

M. Gaucher : Nous travaillons d'arrache-pied pour combler les lacunes constatées du côté du privé. En ce qui concerne trois provinces, nous avons désormais d'assez bonnes quantités de données qui ne concernent pas les aînés. On commence à examiner ce qu'on pourrait en faire. Les deux objectifs vont de pair : chercher à combler ces lacunes en obtenant davantage de données sur les jeunes Canadiens d'autres provinces, tout en examinant les diverses façons de les utiliser pour documenter d'autres enjeux.

[Français]

La sénatrice Chaput : La stratégie nationale antidrogue va être élargie pour inclure l'abus de médicaments. Santé Canada s'est engagé à travailler en collaboration avec les organismes. Est-ce que vous avez déjà été consultés? Sinon, vous allez l'être à un moment donné. Quelle sera la position de votre organisme sur la façon de remédier à cet abus? Également, quelles mesures allez-vous recommander pour déceler les cas et réduire les incidences?

[Traduction]

M. Gaucher : Pardonnez-moi, je n'ai pas compris la question.

M. O'Rourke : Nous n'avons pas été directement consultés pour le moment. Sans que nous le demandions, nous avons reçu le rapport de l'organisation et nous l'avons examiné pour voir si nous avions quelque chose à offrir. C'est à mon avis un rapport extraordinaire qui contient beaucoup d'excellentes recommandations auxquelles donner suite.

Nous collaborons étroitement avec les régimes d'assurance-médicaments des provinces, des territoires et du fédéral, qui, pour la plupart, ont des politiques et pratiques en vigueur. Dans toutes les provinces, nous faisons actuellement l'état des lieux par rapport aux médicaments dont on abuse, tels que les opioïdes et les oxycodones. Nous élargirons ensuite l'enquête à d'autres types de médicaments. Nous espérons disposer de cette information en avril ou mai. Nous verrons alors s'il est possible d'agir différemment dans chaque province et nous tirerons les leçons de nos expériences mutuelles.

Pour le compte des régimes d'assurance-médicaments, nous avons fait pas mal de travail sur les thérapies qui pourraient être utilisées pour les dépendances aux opioïdes, et cetera. en comparant les médicaments disponibles, et en déterminant les risques associés à ces médicaments et leurs usages appropriés.

[Français]

La sénatrice Chaput : Si je comprends bien, certaines mesures pourraient être proposées en fonction de thérapies spécialisées, pour aider les patients à se défaire de cette dépendance?

[Traduction]

M. O'Rourke : Oui, les patients qui sont dépendants de drogues ou de médicaments d'ordonnance doivent habituellement passer par diverses phases. La phase de stabilisation qui les aidera à stopper la dépendance, à la fois mentale et physique. Dans la phase de désintoxication, on leur donne des médicaments tels que la méthadone ou le suboxone, qui les aident à arrêter de consommer. Cette étape est suivie de la phase de soutien et de la phase d'entretien. Nous intervenons au cours de la deuxième phase — la phase de désintoxication — en leur offrant les divers médicaments à disposition.

M. Wright : Dans le cas de l'Institut canadien d'information sur la santé, nous avons eu des discussions de haut niveau sur ce thème et sur les possibilités d'utiliser notre base de données sur les médicaments d'ordonnance. Nous espérons avoir d'autres conversations avec Santé Canada à ce sujet. Nous sommes là pour aider.

La sénatrice Cordy : Merci de votre témoignage. La sénatrice Dyck a fait un commentaire très intéressant sur la collecte de données dans les prisons. J'ai fait partie d'un comité qui s'est penché sur le thème du vieillissement et il est vrai que la population des prisons vieillit. Il est intéressant d'observer les statistiques sur la surmédication ou la mauvaise utilisation des médicaments chez les aînés. Nous savons aussi que le nombre de personnes souffrant de maladies mentales est beaucoup plus élevé, ou semble très élevé, dans les prisons. Il serait donc intéressant d'étudier la question.

Dans son Système national de déclaration des incidents, l'Institut canadien d'information sur la santé fait état de la collecte de données dans les hôpitaux, des médicaments administrés par erreur dans les hôpitaux et dans les établissements de soins de longue durée. D'après ce que je lis, les données que nous recevons, non seulement sur les médicaments administrés par erreur, mais aussi sur les autres erreurs médicales, dans les hôpitaux et les établissements de soins de longue durée, ne sont pas nécessairement aussi exactes qu'on voudrait le croire. Pensez-vous obtenir des données exactes sur les médicaments administrés par erreur dans les hôpitaux et les établissements de soins de longue durée? D'après ce que j'ai lu, on ne fait pas toujours de rapports lorsqu'il y a des problèmes dans ces établissements.

M. Gaucher : En ce qui concerne l'exactitude des données, leur qualité varie. La plupart de ces données sont codifiées ou codées. Il y a certaines rubriques à remplir lorsqu'on rapporte un incident et la façon de les remplir varie. Il est donc difficile de savoir avec précision si l'information est exacte. À notre avis, nous avons des données de bonne qualité, mais elles peuvent varier, probablement en fonction de l'établissement ou de la personne qui remplit le formulaire.

La sénatrice Cordy : Je ne veux pas nécessairement parler de la qualité des données, je me demande aussi si vous les recevez toutes? Je suppose que vous ne le savez pas à moins de les recevoir.

M. Gaucher : C'est très difficile de l'établir. On lit partout que seule une toute petite proportion des erreurs fait l'objet d'un rapport. Actuellement, nos données proviennent d'un peu moins de 300 établissements, il est donc clair que nous ne les avons pas toutes. Dans certains établissements, elles sont plus détaillées. Nous donnons aux établissements la possibilité de rapporter toute la gamme des incidents, depuis ceux qui ont été évités de justesse jusqu'aux incidents graves qui ont causé la mort ou des blessures. Certains établissements rapportent tout, d'autres, seulement les incidents graves. Nous avons donc, je suppose, une vision partielle des choses.

M. O'Rourke : Ayant travaillé dans des hôpitaux et ayant acquis une certaine expérience en pratique clinique, je voudrais faire une observation. Nous avons encore tendance à ne pas collecter de données ni à présenter des rapports particulièrement en ce qui concerne les cas où le patient n'a pas reçu de médicaments, et il y a encore une erreur associée à cette situation. Nous pouvons en tirer beaucoup d'enseignement de ces cas et faire en sorte que ces erreurs ne se reproduisent plus jamais. Nous produisons des rapports sur les événements sentinelles, ceux qui causent des complications majeures chez les patients et nous déclarons beaucoup d'erreurs de médication, et c'est à ce chapitre que nous devons obtenir de bien meilleurs résultats.

Si vous me le permettez, je dirais qu'en ce qui concerne le Service correctionnel du Canada, vous avez raison. Notre rôle consiste entre autres à appuyer aussi les régimes d'assurance-médicaments du fédéral, et le Service correctionnel du Canada est l'un de nos clients. Un de nos agents de liaison est responsable de tous les programmes fédéraux, comme ceux d'Anciens Combattants, du MDN et du Service correctionnel du Canada. Notre travail ne consiste pas à collecter des données, mais à les analyser, nous avons aussi collaboré avec le Service correctionnel.

La sénatrice Cordy : Vous avez raison. C'est une compétence fédérale, qui intéresse particulièrement le comité.

Est-ce que les provinces envisagent d'obliger, dans la mesure du possible, les hôpitaux à divulguer ce type d'incidents? À l'échelon national, 300 établissements qui fournissent des données, c'est très peu.

M. Gaucher : L'Ontario est actuellement la seule province qui a légiféré sur la déclaration obligatoire des erreurs de médication graves et de solutions intraveineuses. Nous recevons ces déclarations. Ces données ne peuvent être envoyées qu'à certains établissements désignés. C'est tout ce que je sais. D'autres provinces étudient d'autres possibilités ou viennent peut-être de mettre en œuvre des initiatives.

La sénatrice Cordy : L'ICIS m'intéresse. Vous avez aussi parlé de projets d'avenir et des médicaments contrefaits. Avez-vous beaucoup étudié cette question? Avez-vous beaucoup de données? Ces médicaments sont-ils très utilisés au Canada? Pouvez-vous nous donner quelques renseignements? J'imagine qu'il est plus facile de se procurer des médicaments contrefaits en passant une commande sur Internet. Il n'est pas nécessaire d'aller dans une pharmacie alors qu'on peut les acheter en toute discrétion.

M. Gaucher : Nous n'avons encore rien fait de particulier. Mais s'il est de notoriété publique que certains médicaments sont contrefaits, nous pourrions essayer de les rechercher dans notre base de données. Mais ce n'est pas facile. Tout dépend du type de médicaments.

La sénatrice Cordy : Nous ne savons pas jusqu'à quel point ils sont répandus.

M. Gaucher : Non, pas encore. Si leur utilisation devient un problème et si nous savons quels médicaments sont en cause, nous pourrions recueillir des renseignements les concernant.

La sénatrice Cordy : Monsieur O'Rourke, vous êtes-vous renseignés sur cette question?

M. O'Rourke : Non.

La sénatrice Cordy : Pour parler des médicaments licites et des établissements pharmaceutiques qui exercent leurs activités en toute légalité, cherchons-nous, au Canada, à savoir où sont fabriqués les médicaments? Beaucoup le sont à l'extérieur du Canada.

M. O'Rourke : Cela est du ressort de Santé Canada qui s'intéresse à trois facteurs : l'efficacité, l'innocuité et la qualité. L'Inspectorat de Santé Canada a cette responsabilité.

La sénatrice Cordy : Vous ne collectez que des données. Merci beaucoup.

La sénatrice Seidman : Beaucoup de questions ont été posées au sujet des données et de leurs particularités. Donc, on a déjà répondu à la plupart de mes questions. J'aimerais quelques éclaircissements sur les données et je vous prie de m'excuser si mes questions vous ont déjà été posées.

L'ICIS a la base de données du Système national d'information sur l'utilisation des médicaments prescrits. Vous dites que vous collectez des données cliniques sur les personnes âgées, qui sont dans des établissements de soins prolongés et pas dans la collectivité, n'est-ce pas?

M. Gaucher : Des personnes âgées dans les établissements de soins prolongés et aussi dans la collectivité.

La sénatrice Seidman : D'accord.

M. Gaucher : Excusez-moi, des données cliniques. Non.

M. Wright : Nous collectons des données cliniques dans 1 100 établissements de soins prolongés au pays.

La sénatrice Seidman : Entendu, et qu'en est-il de la consommation des médicaments prescrits aux personnes âgées qui vivent dans la collectivité?

M. Wright : Ces données proviennent des programmes de remboursement des médicaments sur ordonnance de chaque province.

La sénatrice Seidman : Ce sont des données propres à chaque personne, comme vous l'avez dit, sur tous les médicaments qui lui sont prescrits.

M. Wright : Oui.

La sénatrice Seidman : Cependant, vous ne les reliez pas aux événements indésirables, n'est-ce pas? Elles ne sont pas liées aux événements indésirables?

M. Gaucher : Dans l'étude que j'ai mentionnée, nous avons examiné le lien entre les hospitalisations et les effets indésirables des médicaments.

La sénatrice Seidman : Mais il aurait fallu ensuite que vous fassiez le lien.

M. Gaucher : Oui.

La sénatrice Seidman : On ne fait donc pas automatiquement le lien entre les données propres à un patient ou à une personne et les événements indésirables.

À quelle fréquence faites-vous des mises à jour? Est-ce que les renseignements propres à un patient sont d'actualité? Quand un nouveau médicament est administré à un patient figurant dans votre système, combien de temps vous faut-il pour l'ajouter?

M. Gaucher : Dans la base de données du SNIUMP, cela dépend de la province, mais les renseignements sont généralement ajoutés dans un délai d'un à trois mois. En fait, on peut avoir accès aux données du SINUMP à des fins d'analyse en relativement peu de temps.

M. Wright : Les données provenant des établissements de soins prolongés sont ajoutées trimestriellement. Nous en recevons mensuellement aussi, mais habituellement, c'est à chaque trimestre.

La sénatrice Seidman : Quand un médicament n'est plus administré à un patient, en êtes-vous informés?

M. Wright : Oui.

La sénatrice Seidman : Ce qui m'amène à vous poser une question. Je sais que vous participez à une étude sur les personnes âgées, qui va être publiée, selon vos dires. Elle sera publiée l'année prochaine, n'est-ce pas?

M. Wright : Le printemps prochain.

La sénatrice Seidman : Le printemps prochain, excellent. J'ai une question concernant un article intitulé « The Impact of Polypharmacy on the Health of Canadian Seniors » et publié en 2012 dans Family Practice. Des sondages ont été utilisés dans cette étude, qui était assez importante vu que 3 032 personnes interrogées avaient plus de 65 ans. Vos conclusions indiquaient que des interventions pouvaient réduire la polypharmacie et les événements indésirables, y compris les examens systématiques des médications. Je trouve que c'est une conclusion très intéressante. Nous avons entendu dire que de tels examens sont assez rares.

Comment communiquez-vous ce genre de conclusions? Est-ce que l'ICIS appuie cette étude. En résulte-t-il des mesures ou peut-être une étude effectuée par l'agence de M. O'Rourke, par exemple?

M. Wright : Permettez-moi de donner une réponse très générale. Nous utilisons divers moyens pour diffuser des renseignements sur nos produits et services, par exemple les médias partout au pays qui sont très intéressés par ce type d'information, mais aussi les ministères de la santé de tout le pays. Pour ce qui est de cette étude particulière, la documentation aurait été envoyée aux directeurs ou directeurs exécutifs des divers programmes de remboursement des médicaments sur ordonnance. Nous avons des groupes permanents qui tiennent des réunions, des comités consultatifs qui nous donnent des conseils pour ce genre d'activités que nous portons à leur attention. Nous utilisons beaucoup de moyens pour communiquer nos conclusions, mais la décision de prendre des mesures appartient aux autorités concernées.

La sénatrice Seidman : Qu'en est-il, par exemple, du Collège royal et de l'Association médicale canadienne? Le Collège royal supervise en quelque sorte les médecins. Nous parlons d'examens systématiques des médications et, généralement, les médecins font ces examens. C'est une conclusion très importante. Est-ce que, selon vous, il est sûr que le Collège royal aura connaissance des résultats de cette étude ou espérez-vous qu'il en prenne connaissance par hasard?

M. Wright : Ça dépend de l'étude. Je ne suis pas sûr que cette étude ait été envoyée au Collège royal. Les analystes du collège le sauraient certainement. La plupart des chercheurs du pays connaissent les produits et les services de l'ICIS. L'Association médicale canadienne ou l'Association médicale de la Saskatchewan auraient connaissance de la publication de ces rapports.

La sénatrice Seidman : Monsieur O'Rourke, j'aimerais vous poser une question au sujet d'une étude et d'un article publié dans le Journal de l'Association médicale canadienne à la fin de l'année dernière et qui préconisait la déprescription. Une initiative d'un pharmacien ontarien donne l'espoir d'un changement de la perception qu'ont les personnes âgées de la pharmacie. Elle présente quelques lignes directrices qui favoriseraient la réévaluation systématique de médicaments ou d'une série de médicaments, et susciterait une réflexion quant à la durée de consommation des médicaments, au dosage qui pourrait changer en fonction de l'âge et la période durant laquelle le patient doit consommer le médicament.

En fait, on parle très peu de la déprescription pour les personnes âgées, de l'arrêt de l'administration de certains médicaments et du changement des régimes de médication, au lieu d'envisager l'ajout d'autres médicaments. Je le rappelle uniquement parce que j'essaie de comprendre comment vous choisissez les thèmes de vos études, qui sont très approfondies. Je voudrais savoir si tout cela a été pris en considération.

M. O'Rourke : Effectivement, ça a été pris en considération. Une étude judicieuse sur la déprescription vient de commencer sous la direction de pharmaciens à l'Hôpital Elizabeth-Bruyère ici à Ottawa. Je crois que les inhibiteurs de la pompe à protons pour traiter les ulcères comptent parmi les médicaments de première catégorie étudiés. On nous a contactés pour savoir si nous voulions appuyer ces travaux ou y participer. Nous étudions encore cette proposition. Nous avons fait beaucoup de travaux sur les inhibiteurs de la pompe à protons. C'est une étude judicieuse.

Des travaux ont été également menés par la Capital Health Distric Authority à Halifax sous la direction de la Dre Laurie Mallery dont l'objectif est d'élaborer des lignes directrices pertinentes sur la consommation de médicaments chez les personnes âgées fragiles. Des médicaments sont prescrits à beaucoup de personnes âgées même si elles n'en veulent pas. La Dre Mallery essaie d'obtenir ces renseignements auprès des médecins généralistes et des maisons de soins infirmiers. Je crois que c'est un sujet qui suscite beaucoup d'intérêt.

Nous organisons chaque année une conférence. L'an dernier, nous en avons eu une ayant pour thème les percées sur premièrement l'évaluation des technologies de la santé et deuxièmement sur le retrait des produits pharmaceutiques répertoriés.

La sénatrice Seth : La plupart des sujets ont été soulevés, et les réponses à beaucoup de mes questions ont été données, mais j'aimerais savoir si vous avez pris en compte les effets des médicaments de prescription sur l'environnement. Que devient le composé chimique des médicaments remis aux patients? Qu'en faisons-nous? Prenons- nous des précautions? Quelles mesures prenons-nous à ce sujet?

M. O'Rourke : Nous n'avons pas beaucoup abordé sur cette question. Nous avons peut-être donné quelques réponses rapides basées sur les réactions des hôpitaux vis-à-vis de composés chimiques bien précis, de leur élimination et manipulation sans danger, mais je ne suis pas certain que nous ayons fait beaucoup de travail dans ce domaine.

La sénatrice Seth : Ne donne-t-on pas aux patients des directives écrites avec certains médicaments? N'y a-t-il pas d'indications sur le flacon ou ailleurs concernant la température d'entreposage du médicament afin de ne pas détruire ses composés chimiques? N'y en a-t-il pas?

M. O'Rourke : Cela ne fait pas partie de nos responsabilités. Nous ne sommes évidemment pas impliqués dans la prescription ou l'administration de médicaments aux patients, mais je crois que la plupart des monographies et des informations indiquées sur les emballages des médicaments donnent des directives d'entreposage, si votre vision est assez bonne pour vous permettre de lire ce qui est écrit sur les emballages de certains de ces produits.

La sénatrice Seth : Oui.

M. O'Rourke : Et ma vision n'est pas assez bonne.

La sénatrice Seth : Nous avons parlé des données collectées au moyen du SNIUMP. Elles indiquent que les personnes âgées constituent le groupe le plus susceptible de subir les conséquences involontaires causées par les médicaments sur ordonnance.

M. O'Rourke : Tout à fait.

La sénatrice Seth : Qu'en est-il des patients souffrant d'une maladie mentale ou des enfants? C'est une question.

Vous avez mentionné les antithrombotiques et avez dit que la warfarine était consommée couramment, mais qu'en est-il de certains nouveaux médicaments et des effets à long terme que l'on ne connaît pas encore et qui sont pourtant prescrits? Qui s'en occupe? Est-ce un comité spécial ou laissons-nous aux médecins le soin de décider? Comment gérons-nous cette situation, particulièrement en ce qui concerne les patients âgés?

M. O'Rourke : C'est une situation difficile à gérer. Dès qu'un médicament est commercialisé et reçoit l'approbation d'être prescrit au Canada, le fabricant décide s'il veut le vendre au Canada et les médecins peuvent le prescrire. Le patient souhaite que le médicament soit payé. Si le médicament est assujetti au régime public d'assurance-médicaments, nous formulerons une recommandation visant à le répertorier ou non. Nous recommandons que près de la moitié des médicaments que nous évaluons ne soient ni financés ni payés, et ce, pour des raisons d'innocuité ou de rentabilité ou simplement parce qu'ils n'ajoutent aucune valeur au système. Toutefois, les patients peuvent aussi se le procurer en utilisant un régime d'assurance-médicaments privé ou les acheter en payant comptant.

Un grand nombre des essais de nouveaux anticoagulants et certaines des principales recherches concernant ces coagulants ont été menés dans des hôpitaux canadiens. Par conséquent, des médecins canadiens font la promotion de ces nouveaux anticoagulants oraux, et les sociétés pharmaceutiques et leurs grosses équipes de marketing ne savent plus où donner de la tête. Bien que nous ne fassions pas de publicité grand public au Canada, quiconque a la télévision par satellite ou par câble voit des annonces publicitaires américaines pour les anticoagulants. Cela reflète, à mon avis, l'importance de la façon dont nous contrôlons la distribution, la consommation et la prescription de certains nouveaux médicaments qui ont des conséquences involontaires dangereuses.

La sénatrice Seth : Le SNIUMP n'est pas mis à contribution. C'est ce que vous essayez dire. Les sociétés pharmaceutiques qui...

M. O'Rourke : Je suis désolé, mais je n'ai pas saisi la première partie.

La sénatrice Seth : L'Institut canadien d'information sur la santé, qui administre le système national des médicaments sur ordonnance, ne joue aucun rôle?

M. Wright : Non.

La sénatrice Seth : Il n'en joue pas.

M. O'Rourke : Lorsque nous formulons une recommandation aux régimes d'assurance-médicaments, notre comité d'experts y ajoute habituellement des critères. Même si nous approuvons un médicament, le comité dira qu'il ne doit cibler qu'une population précise de patients ou qu'il ne peut être prescrit que par certains médecins. Les systèmes électroniques d'assurance-médicaments des provinces auront ces informations, et les pharmacies, puisqu'elles envisagent de vendre ces médicaments, s'assurent qu'ils répondent aux critères avant que les patients se les procurent.

La sénatrice Seth : Donc, c'est bien règlementé.

M. O'Rourke : Oui, à l'échelle provinciale.

Le président : Je voudrais revenir sur quelques points qui ont été soulevés aujourd'hui.

Tout d'abord, monsieur O'Rourke, je trouve intéressant votre traitement de la fibrillation auriculaire étant donné que des rapports récents indiquent qu'un patient victime d'une crise cardiaque ou d'un accident vasculaire cérébral court le plus de risques durant les premières 24 heures suivant l'administration du nouveau médicament, puis durant les 30 premiers jours. Cette question, qui est un autre problème de conséquences involontaires, fait l'objet d'un examen sérieux. Ce qui est conçu pour éviter un résultat accroît en fait les risques pendant un certain temps

Je voudrais parler brièvement de l'effet indésirable, de l'événement indésirable, de la déclaration des événements indésirables étant donné qu'ils ont suscité une vive préoccupation au comité durant leurs trois premières phases, et nous en avons parlé aujourd'hui quand on vous a demandé si vous conserviez ces données. Évidemment, si vous n'avez pas ces données, c'est pour une raison. Il n'y a pas de façon systématique de faire ces déclarations. Je ne vais pas entrer dans les détails pour le moment, mais je veux vous poser la question suivante : si un patient a l'occasion de donner à Santé Canada, facilement, peut-être par voie électronique, son avis sur un médicament qui lui a été prescrit, est-ce que votre mandat vous donne le droit de recevoir automatiquement une copie de cette communication ou devriez-vous vous la procurer auprès de Santé Canada? Supposons que cela se produira. La question est hypothétique.

M. Wright : Nous signerions un accord sur l'échange de données avec Santé Canada. Nous avons actuellement des accords en vue de communiquer certains renseignements à Santé Canada; ce serait donc réciproque.

Le président : Le problème est avant tout qu'il est difficile de faire en sorte que les données soient transmises. Par contre, lorsque les renseignements sont communiqués à Santé Canada, par exemple, ceux qui font des analyses et qui formulent des recommandations y ont accès, n'est-ce pas?

M. Wright : Oui. L'autre option serait en fait de nous transmettre directement les données, et nous les communiquerions ensuite à Santé Canada. Nous sommes les experts au pays en matière de stockage de données sur les soins de santé.

Le président : Je comprends ce que vous dites, mais la loi exige que ce soit Santé Canada qui le fasse.

M. Wright : D'accord.

Le président : Voilà pourquoi j'ai ainsi formulé ma phrase.

Monsieur Wright, j'aimerais revenir sur votre mémoire. Je crois que vous avez précisé l'une des questions que je voulais vous poser. Un point m'a frappé. À la page 4 de votre document, en ce qui a trait aux pénuries de médicaments et aux médicaments contrefaits, vous avez écrit que les données de l'ICIS « pourraient servir » à suivre la tendance. J'en comprends que ce n'est actuellement pas le cas, et vous avez répondu à cette question au sujet des médicaments contrefaits, soit l'autre catégorie où c'est mentionné. Je crois comprendre que vous avez en fait le mandat d'enquêter sur les problèmes, d'entreprendre des projets et d'aborder certains domaines. Pour ce qui est des pénuries de médicaments et des médicaments contrefaits, vous pencherez-vous sur ces enjeux ou s'agit-il seulement de dossiers d'intérêt dont vous surveillez la progression?

M. Wright : Nous avons un plan analytique sur deux ans en collaboration avec des gens de partout au pays. Santé Canada et d'autres y participent. Ces enjeux ne font pas partie de notre plan à l'heure actuelle. Si les gouvernements, des chercheurs ou d'autres partenaires de l'ICIS nous en font la demande, nous examinerons certainement la possibilité de les inclure dans le plan analytique.

Le président : Parmi les partenaires auxquels vous avez le mandat de faire rapport, une demande concernant les deux enjeux en question proviendrait fort probablement du gouvernement fédéral, n'est-ce pas?

M. Wright : Oui. Une telle demande pourrait provenir d'ailleurs ou des PDG des autorités régionales de la santé.

Le président : Il faudrait tout simplement que l'un de vos partenaires vous en fasse la demande, n'est-ce pas?

M. Wright : Tout à fait. Une demande raisonnable.

Le président : J'ai également été surpris d'apprendre que votre base de données est limitée en ce qui concerne les jeunes Canadiens en raison de la façon dont les régimes publics d'assurance-médicaments sont conçus. Cela signifie que les jeunes ne sont pas recensés de la même manière que les autres groupes d'âge. Est-ce la bonne interprétation?

M. Wright : Pas tout à fait. C'est surtout parce que bon nombre des régimes d'assurance-médicaments au Canada sont conçus en vue d'aider les aînés. Certaines provinces, dont la Saskatchewan, ont des régimes d'assurances- médicaments plus larges, ce qui nous permet d'avoir des données concernant les jeunes Canadiens. Tout dépend vraiment de la structure du régime provincial d'assurance-médicaments.

Le président : La majorité des régimes vous communiquent seulement des données en vrac. Sauf dans le cas des aînés, les régimes vous transmettent-ils des données en vrac, ou est-ce que c'est plutôt que vous ne recevez pas de données sur les jeunes?

M. Wright : Je vais tenter de l'expliquer autrement. Tout dépend de la structure et des intentions du régime provincial d'assurance-médicaments. Nous recevons ces données. Peu importe les bénéficiaires, nous avons d'excellentes données à ce sujet sur les gens. Cependant, nous ne recevons pas de données sur les Canadiens qui ne sont pas couverts par un régime provincial d'assurance-médicaments — ceux qui ont peut-être un revenu élevé; ceux qui ne sont pas des aînés; les familles à revenu moyen qui ont un régime privé d'assurance-médicaments avec leur employeur. Seule la Colombie-Britannique nous communique maintenant ces données, et nous travaillons de concert avec d'autres gouvernements pour obtenir les données provenant des régimes privés.

Le président : Je vois. Si les jeunes Canadiens sont couverts par le régime provincial, vous recevez les données, mais c'est seulement dans un tel cas, n'est-ce pas?

M. Wright : C'est exact.

Le président : D'accord. Voilà qui clarifie ce point. Merci beaucoup.

J'ai un dernier point à préciser. Vous dites que les Canadiens hospitalisés en raison d'une maladie mentale avec troubles concomitants liés à la consommation de psychotropes représentent près du tiers de tous les patients hospitalisés en psychiatrie. Selon ce qui se dégage de votre document jusqu'à ce point, êtes-vous en train d'insinuer que les troubles liés à la consommation de psychotropes découlent purement de la consommation de médicaments d'ordonnance ou plutôt de drogues illicites?

M. Wright : De drogues illicites, très certainement.

Le président : C'est une précision importante. C'est bien ce que je me disais, mais la structure de votre document laisse entendre autre chose.

M. Wright : Je m'excuse.

Le président : Ce n'est pas grave.

La dernière question ira à la sénatrice Stewart Olsen.

La sénatrice Stewart Olsen : Ma question porte sur l'approbation par les provinces des médicaments qu'ils financent. C'est simplement une question que je me pose. Lorsque vous proposez aux provinces de financer ceci, mais pas cela, sentez-vous qu'on vous écoute? Fondent-elles leurs approbations sur vos recommandations? Comment procèdent- elles? Il y a un grand écart dans ce que les provinces financent.

M. O'Rourke : Depuis la création du Programme commun d'évaluation des médicaments, qui a célébré son 10e anniversaire l'an dernier, l'uniformité des régimes provinciaux d'assurance-médicaments s'est considérablement améliorée; dans 92 p. 100 des cas, les décisions des provinces vont dans le sens de nos recommandations. Les gouvernements font une analyse d'impact budgétaire, et il arrive parfois d'avoir un léger retard, si cela porte sur l'ajout d'un médicament. Normalement, lorsque nous recommandons de ne pas ajouter un produit, les provinces nous écoutent.

La sénatrice Stewart Olsen : Pour ce qui est des médicaments expérimentaux que certains demandent dans les provinces, je ne sais même pas s'il s'agit vraiment de médicaments expérimentaux ou si c'est tout simplement que Santé Canada n'a pas encore terminé son examen. Quelle est votre opinion à cet égard? Devez-vous examiner les travaux ou les études canadiennes sur l'efficacité et la sécurité du médicament, ou consultez-vous les études américaines avant d'approuver un produit et de donner votre aval?

M. O'Rourke : J'essaye seulement de comprendre votre question.

La sénatrice Stewart Olsen : Je fais allusion aux médicaments que des gens demandent à une province d'approuver, mais Santé Canada n'a pas encore réalisé d'études exhaustives sur ces produits, alors que de nombreuses recherches peuvent avoir été réalisées à ce sujet aux États-Unis, en France ou en Angleterre, par exemple. Consultez-vous seulement les études canadiennes, ou examinez-vous aussi les études provenant d'autres pays qui ont une bonne réputation?

M. O'Rourke : J'ai quelques points. Tout d'abord, nous n'évaluons normalement pas les médicaments à l'étape des essais cliniques. Nous le faisons lorsque Santé Canada reçoit la présentation et formule une recommandation. Par contre, nous pouvons réaliser une évaluation rapide sur un médicament précis en vue d'aider une province dans sa prise de décisions. Nous consultons les études réalisées partout dans le monde. Peu importe où les renseignements se trouvent, nous allons à leur rencontre.

La sénatrice Stewart Olsen : Merci.

Le président : À titre de précision, Santé Canada est l'autorité qui prend les décisions concernant l'approbation des médicaments, et votre organisme s'occupe des éléments que vous avez mentionnés en ce qui concerne l'efficacité lorsqu'un produit est approuvé.

Vos organismes sont-ils favorables à la mise en place de moyens plus efficaces pour effectuer la collecte des signalements d'effets indésirables de manière à ce que l'expérience réelle de la population soit plus facile d'accès aux Canadiens qui donnent des conseils?

M. Wright : Oui.

M. O'Rourke : Oui.

Le président : Merci beaucoup. Je vous remercie de votre présence aujourd'hui et de la rigueur et de la sagesse de vos réponses. Je remercie encore une fois mes collègues de la précision et de la pertinence de leurs questions. Sur cela, la séance est levée.

(La séance est levée.)


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