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MDRN - Comité spécial

Modernisation du Sénat (spécial)

 

Délibérations du Comité sénatorial spécial
sur la Modernisationdu Sénat

Fascicule n° 8 - Témoignages du 30 novembre 2016


OTTAWA, le mercredi 30 novembre 2016

Le Comité sénatorial spécial sur la modernisation du Sénat se réunit aujourd'hui, à midi, pour examiner les façons de rendre le Sénat plus efficace dans le cadre constitutionnel actuel.

Le sénateur Tom McInnis (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : La réunion d'aujourd'hui est publique. Au cours des dernières semaines, nous avons entendu les témoignages des dirigeants des différents caucus et groupes au Sénat. Dans l'invitation que j'ai envoyée à chacun d'eux, je leur ai demandé de réfléchir aux questions suivantes. Jusqu'à présent, nous avons entendu les témoignages du représentant du gouvernement au Sénat, du chef de l'opposition et du porte-parole du Groupe des sénateurs indépendants. On leur a tous posé les mêmes questions, qui sont les suivantes : croyez-vous que les caucus des partis politiques auront un rôle à assumer au Sénat dans le futur? Un Sénat moderne a-t-il besoin d'une opposition officielle ou de groupes d'opposition? D'après vous, quels changements devrions-nous apporter à nos règles ou à nos pratiques?

C'est avec plaisir que je souhaite la bienvenue aujourd'hui à notre prochain témoin, l'honorable sénateur Joe Day, le leader des libéraux au Sénat.

Sénateur Day, bienvenue à notre comité. C'est bon de vous voir. Veuillez commencer vos remarques.

[Français]

L'honorable Joseph A. Day, leader des libéraux au Sénat : Merci, monsieur le président et honorables sénateurs, pour votre invitation à témoigner aujourd'hui et pour le travail que vous avez déjà entrepris dans ce dossier et qui se poursuit. Le travail que l'on fait sur la modernisation du Sénat dans le cadre de ce comité est très important.

[Traduction]

Je voudrais tout d'abord remercier les membres du comité de l'invitation à leur faire part de mes opinions sur la façon dont le Sénat pourrait être structuré au cours des mois et des années à venir. J'ai eu l'occasion de lire la transcription des témoignages de chacun des autres leaders que l'honorable président a mentionnés, et je dois dire que leurs témoignages étaient excellents et que le comité a fait un travail remarquable en général et en lien avec ces exposés.

Mais, comme le sénateur Carignan l'a fait lorsqu'il a comparu devant vous, je tiens à vous prévenir que même si je suis le leader du caucus libéral indépendant, je m'adresse à vous aujourd'hui en mon propre nom. Il y a de nombreux excellents points de vue parmi les membres de mon caucus, et aucun n'a été soumis à la discipline du parti ou au diktat d'un parti sur la façon dont notre institution devrait procéder à l'avenir. Les opinions suivantes sont donc mes opinions personnelles.

Comme le président vient de le mentionner, on m'a communiqué quatre questions lorsqu'on m'a invité à témoigner, et je compte y répondre, mais j'aimerais commencer à aborder le sujet de façon plus générale en vous expliquant un peu le contexte qui m'a amené à adopter ces positions.

Le sénateur Harder a dit vouloir que le Sénat fasse l'objet de changements pour qu'il « ressemble davantage à l'organe indépendant, non partisan et complémentaire que les concepteurs de la Confédération avaient envisagé et que la Cour suprême a préconisé ».

Nous avons entendu les sénateurs Carignan et Cowan demander si les concepteurs de la Confédération avaient bel et bien une vision d'un Sénat non partisan.

Je ne vois aucune objection à ce que l'on soutienne que le Sénat devrait être une institution non partisane. C'est une question qui doit faire l'objet d'un débat concernant l'avenir. Mais j'ai des inquiétudes lorsque l'on avance que le Sénat devrait revenir à ses origines non partisanes — pas à ses origines moins partisanes mais à ses origines non partisanes.

Je suis tout à fait d'accord que le Sénat a été conçu de manière à être moins partisan que ce qu'il l'est depuis un certain moment. Les nominations à vie ont assuré une inamovibilité, comme au sein de la magistrature, pour aider les sénateurs à résister aux pressions politiques à court terme. Mais il y a une différence entre une institution moins partisane et une institution non partisane. Ce sont deux concepts très différents.

Le sénateur Carignan, lorsqu'il a témoigné devant le comité, nous a rendu à tous un fier service en présentant un certain nombre de faits importants à propos du Sénat d'origine, et en mentionnant plus particulièrement comment le premier ministre conservateur John A. Macdonald a nommé 25 sénateurs libéraux au tout premier Sénat établi.

Les membres se sont regroupés en tant que parti de l'opposition organisé et dirigé à la Chambre par Luc Letellier de Saint-Just, que le sénateur Carignan a qualifié d'ardent partisan.

Le sénateur Saint-Just est par la suite devenu le leader du gouvernement au Sénat en 1873 et a été ministre de l'Agriculture au Cabinet lorsque les libéraux ont pris le pouvoir sous la direction du premier ministre Alexander Mackenzie. Mais le sénateur Saint-Just n'a pas été le premier sénateur à siéger au Cabinet. En fait, cinq sénateurs ont servi au sein du premier Cabinet de Sir John A. Macdonald, en tant que receveur général, président du Conseil privé, ministre des Postes, ministre de l'Agriculture et ministre de la Marine et de la Pêche, qui étaient d'importants portefeuilles dans les premières années de notre pays.

Cinq ministres du Cabinet dans une Chambre de 72 membres ne semblent certainement pas constituer une Chambre non partisane en 1867. Fait encore plus révélateur, c'est que le premier Cabinet de Macdonald était composé de 14 ministres, si bien que les cinq sénateurs qui ont siégé au tout premier Cabinet du Canada représentaient plus du tiers des membres.

Durant les 33 premières années de notre pays, jusqu'au tournant du siècle suivant, 24 sénateurs différents ont agi à titre de ministres du Cabinet pendant de longues périodes.

Au cours des années qui ont suivi la Confédération, le Sénat a non seulement compté en son sein de nombreux ministres du Cabinet, mais il a également compté deux premiers ministres canadiens.

Le sénateur John Abbott a été premier ministre pendant qu'il siégeait au Sénat, de juin 1891 à novembre 1892. Il a été notre troisième premier ministre. Le cinquième premier ministre du Canada, le sénateur Mackenzie Bowell, a été premier ministre de décembre 1894 à avril 1896 alors qu'il était membre de notre Chambre.

Il faut souligner qu'un sénateur qui agissait comme premier ministre du Canada n'était pas une idée radicale à l'époque. En 1878, M. C.C. Colby, un éminent député de la Chambre des communes et ministre du Cabinet, dont certains documents lui appartenant se trouvent à l'Université Queen's, a rédigé un article sur le gouvernement parlementaire. Il a ensuite présenté sa position dans le cadre d'une conférence qu'il a faite au Collège Bishop, à Lennoxville, au Québec. Dans son article, il a écrit qu'en cas de démission ou de destitution d'un premier ministre, « il incombe au gouverneur général de communiquer avec un membre du Sénat ou de la Chambre des communes qui a suffisamment d'influence au sein de son parti pour se voir confier la tâche de former un nouveau gouvernement ».

C'est exactement ce qui s'est produit 12 ans après qu'il a écrit cet article lorsque le gouverneur général a pressenti le sénateur John Abbott et ensuite le sénateur Mackenzie Bowell pour former de nouveaux gouvernements et agir en tant que premier ministre alors qu'ils siégeaient au Sénat. Pour paraphraser M. C.C. Colby, ces deux hommes avaient suffisamment d'influence au sein de leur parti politique, même s'ils siégeaient au Sénat, pour être sélectionnés par les hauts placés du parti afin de devenir premier ministre du Canada.

Le Sénat a non seulement compté un grand nombre de premiers ministres et de ministres durant ses premières années soi-disant non partisanes, mais il y a également eu le cas révélateur du sénateur David Macpherson qui, de 1880 à 1883, alors qu'il était le Président du Sénat, a également été ministre au sein du Cabinet de sir John A. Macdonald. Il a en fait été assermenté aux deux postes par le premier ministre Macdonald le même jour.

Imaginez si la même chose se produisait aujourd'hui, que le sénateur Furey était soudainement nommé au Cabinet du premier ministre Trudeau tout en continuant de servir comme Président du Sénat, à qui l'on confie le mandat d'être un arbitre impartial dans cette enceinte. Pouvons-nous imaginer pareil scénario de nos jours? Est-ce le Sénat soi-disant non partisan auquel nous voulons retourner? Je vous pose ces questions à vous, honorables sénateurs.

Chers collègues, je pourrais continuer encore longtemps et vous fournir d'autres exemples pour vous démontrer que le Sénat était, dès le premier jour de sa création, une institution partisane. Elle a été conçue pour être une institution partisane, de même qu'une puissante assemblée législative.

Le Sénat a été créé, comme vous le savez tous, en s'inspirant des traditions partisanes du modèle de Westminster et des directives des concepteurs très partisans de la Confédération.

Même s'il est évident que le sénateur Harder, la sénatrice Bellemare et le sénateur Mitchell ne sont affiliés à aucun parti politique, ils veulent être considérés comme étant les membres de l'équipe des représentants du gouvernement ou, comme on les appelle, de l'équipe du G3. Ils sont des sénateurs qui représentent le gouvernement, un point c'est tout. Ils sont les seuls sénateurs qui sont assujettis aux orientations externes provenant non pas d'un parti politique, mais d'un gouvernement.

Dans le cadre de notre étude en vue de moderniser le Sénat, nous devrions nous entendre sur ce que nous devons faire pour commencer. La simple vérité, c'est que le Sénat a été créé en tant que puissante assemblée législative pour suivre les lignes de parti. En raison des dispositions constitutionnelles relatives aux projets de loi financiers, le Sénat n'est pas aussi puissant que la Chambre des communes, et en raison de l'inamovibilité et du processus de nomination, il n'est pas aussi partisan que la Chambre des communes. Le fait d'être moins puissant ne signifie pas qu'il est impuissant, pas plus que le fait d'être moins partisan ne signifie qu'il est non partisan. Pour paraphraser le sénateur Carignan, il n'y a pas d'univers sénatorial utopique et impartial post-Confédération auquel nous pouvons revenir. Un tel univers n'a jamais existé.

On peut penser notamment qu'on nous encourage à transformer le Sénat en éliminant les caractéristiques habituelles du modèle parlementaire de Westminster et en façonnant un modèle non partisan qui, je pense, n'existe dans aucune autre assemblée démocratique au monde et qui n'a certainement jamais vraiment existé dans notre pays.

À mon avis, nous avons besoin d'un groupe, dans notre cas, l'équipe des trois sénateurs du gouvernement, pour présenter des lois du gouvernement et faire valoir des arguments en faveur de ces lois, et d'un autre groupe, l'opposition officielle, pour remettre en question ces lois en présentant les points de vue opposés. C'est le modèle fondamental de Westminster.

Je comprends qu'il faut réduire la partisanerie au Sénat. Je comprends cela. J'ai été témoin de quelques-uns des problèmes qui ont découlé d'un cadre excessivement partisan que nous avons connu récemment, mais l'idée d'éliminer complètement la partisanerie est surprenante. Je suis très curieux de savoir pourquoi le sénateur Harder préconise cette vision. Est-ce une mission personnelle qui lui tient à cœur — que le Sénat doit être transformé de cette manière? Ou cherche-t-il à réaliser cette vision en tant que représentant du gouvernement au Sénat?

S'il le fait en sa qualité de titulaire d'une charge publique, en tant que délégué du gouvernement, ambassadeur, représentant, porte-parole ou leader, alors il parle au nom du gouvernement et nous encourage à façonner le Sénat à l'image que le gouvernement est en train de créer pour nous.

Si nous acceptons de nous engager dans cette voie, nous servirons les intérêts de qui, honorables sénateurs? Lorsqu'il a témoigné devant le comité, le sénateur Harder a dit ceci :

Même si j'ai discuté avec le gouvernement de certaines de ces questions, le point de vue que j'exprime est mon propre point de vue en tant que sénateur indépendant et, bien sûr, en tant que premier représentant du gouvernement au Sénat.

On dirait qu'il aborde sa mission sous les deux angles ou perspectives — en tant que sénateur indépendant autoproclamé et en tant que sénateur qui est rémunéré pour représenter le gouvernement au Canada.

En janvier 2014, lorsque j'étais le leader d'un petit caucus à la Chambre des communes, le leader du troisième parti dans cette enceinte à l'époque, s'opposant à un gouvernement Harper qui semblait être omnipuissant, M. Justin Trudeau a fait la déclaration suivante :

Si le Sénat a un rôle à jouer, c'est assurément de servir de contrepoids au pouvoir extraordinaire que détiennent le premier ministre et son Cabinet, surtout dans le cas d'un gouvernement majoritaire.

Deux ans et demi plus tard, M. Trudeau est le premier ministre d'un gouvernement majoritaire et détient le pouvoir extraordinaire contre lequel il a mis en garde le Sénat. Et maintenant, son représentant au Sénat demande que nous nous lancions dans un projet qui, comme certains d'entre vous nous l'ont déjà dit, pourrait faire en sorte qu'il soit beaucoup plus difficile pour le Sénat de servir de contrepoids à ce pouvoir.

Lorsque le sénateur Harder a reconnu participer avec le gouvernement dans le dossier de la modernisation du Sénat, j'ai du mal à croire que ces discussions mettent l'accent sur la façon dont le Sénat agit à titre de contrepoids efficace aux pouvoirs du premier ministre ou de son Cabinet. Or, c'est notre travail, d'après le premier ministre actuel du Canada, et c'est ce qu'il s'attend de nous. Heureusement, le Sénat n'est pas un ministère gouvernemental que le cabinet du premier ministre a le pouvoir de restructurer, de fusionner, de renommer ou même d'éliminer.

À mon avis, la question fondamentale consiste à savoir si le représentant du gouvernement au Sénat veut restructurer le Sénat pour qu'il puisse servir de contrepoids plus efficace au gouvernement qu'il représente. Si la réponse est oui, c'est-à-dire qu'il veut que nous soyons un contrepoids plus efficace, comment cela est-il conciliable avec le devoir du sénateur Harder de représenter le gouvernement? Son objectif premier est de faire valoir les intérêts du gouvernement dans cette enceinte.

Jusqu'à ce que je comprenne mieux qui bénéficiera d'une transformation rapide et totale du Sénat, je vais adopter une approche prudente à l'égard des idées qui sont proposées.

C'est un aperçu du contexte.

Permettez-moi de répondre aux quatre questions précises, monsieur le président, auxquelles vous m'avez demandé de répondre : Les caucus des partis politiques ont-ils un rôle à jouer dans un nouveau Sénat? Un Sénat moderne a-t-il besoin d'avoir un représentant du gouvernement? Un Sénat moderne a-t-il besoin d'une opposition officielle ou de groupes d'opposition? Quels changements, d'après moi, faut-il apporter à nos règles ou à nos pratiques? Et je précise que c'est « d'après moi » car, comme je l'ai dit, je ne parle pas au nom des autres membres de mon caucus ici.

En ce qui concerne la première question visant à savoir si les caucus des partis politiques ont un rôle à jouer dans un nouveau Sénat, au fil des siècles, l'idée généralement admise a été que les partis politiques sont un élément essentiel ou, à tout le moins souhaitable, du Parlement. En 1872, Benjamin Disraeli, certainement l'un des premiers ministres les plus connus et influents du Royaume-Uni, a dit ceci : « Je crois que, sans parti, il est impossible d'avoir un gouvernement parlementaire. »

Alpheus Todd, dans le volume 1 de son ouvrage précurseur de 1887 sur le gouvernement parlementaire en Angleterre, a écrit ceci :

Le gouvernement parlementaire est essentiellement un gouvernement par l'entremise d'un parti, puisque la condition même de son existence est que les ministres de la Couronne puissent guider les décisions du Parlement, et particulièrement de la Chambre des communes; et toutes les expériences prouvent qu'aucune assemblée populaire ne peut fonctionner sous la direction de leaders reconnus, à l'exception de partis.

En 1945, le libraire de la Chambre des communes britannique, Strathearn Gordon a écrit un livre sur l'histoire et le fonctionnement du Parlement. Au fil des ans, l'ouvrage a été republié dans six langues différentes, dont le japonais. Dans son livre, M. Gordon a cité en signe d'approbation les propos de Viscount Hailsham, qui a dit ceci :

La vérité, c'est que le parti est une institution politique aussi essentielle au pays que le Parlement : sans parti, le Parlement s'effriterait au point de devenir un club de débat sans responsabilité, ou un Reichstag, dont la responsabilité serait de consigner l'approbation des décisions d'un dictateur ou d'un appareil bureaucratique.

Par conséquent, il est certainement très radical de proposer de décourager à l'avenir la présence de partis politiques au Sénat. L'idée de décourager ou, encore pire, d'interdire toute forme d'affiliations politiques pour remédier à un excès de partisanerie me rend très mal à l'aise.

Lorsque M. Trudeau a annoncé le 29 janvier 2014 sa vision du nouveau Sénat, il a également affirmé ceci :

La liberté d'association est garantie par la Constitution. Tout le monde est libre de devenir ou de rester membre du Parti libéral du Canada.

La liberté d'association fait partie des libertés fondamentales décrites au deuxième paragraphe de la Charte canadienne des droits et libertés. Il serait alors plus qu'étrange que le Sénat adopte une règle qui restreint cette liberté fondamentale auprès de ses propres membres.

Donc, pour ce qui est de déterminer si les caucus des partis politiques devraient jouer un rôle, j'aimerais croire que tous les sénateurs pensent qu'il leur revient entièrement de décider s'ils veulent s'associer à un parti. Tous les Canadiens, y compris les sénateurs, possèdent le même droit conféré par la Charte. Compte tenu du caractère fondamental de la liberté d'association, ainsi que de notre indépendance individuelle, je suis surpris que l'on se donne même la peine de poser la question, car la réponse est évidente.

Pour être franc, la question de l'affiliation politique n'est en fait qu'un faux-fuyant. Le sénateur Harder affirme être indépendant parce qu'il n'a pas de liens officiels avec le parti au pouvoir. Avec tout le respect, ce n'est pas le critère ou la question que nous devrions retenir. Ce ne sont pas les liens officiels avec le gouvernement et le parti au pouvoir qui constituent le principal problème quand il est question de son indépendance.

Aucun leader du gouvernement au Sénat ne s'est déjà senti contraint à la suite d'un appel du président de son parti politique. Par contre, ils ont tous reçu des appels du cabinet du premier ministre ou du bureau d'un ministre au sujet de préoccupations liées à des projets de loi d'initiative ministérielle ou à des études de politique proposées par le Sénat. Les personnes qui appellent se moquent de savoir si le leader du gouvernement possède une carte de membre du parti au pouvoir. Cela n'a aucune importance.

Le problème n'a jamais été les liens officiels avec le parti au pouvoir; il a plutôt toujours résidé dans les liens officiels avec le cabinet du premier ministre, l'exécutif et le bureau d'autres ministres.

Parallèlement, du côté de l'opposition officielle au Sénat, le problème n'a jamais été les pressions exercées par le parti politique; il s'agit plutôt des pressions exercées par des collègues parlementaires dans le bureau du chef de l'opposition à la Chambre des communes. C'est la distinction qui s'impose.

À propos de la deuxième question, monsieur le président, quant à savoir si un Sénat moderne a besoin d'un leader ou d'un représentant du gouvernement, je vais laisser le gouvernement prendre la décision. La présence d'un représentant officiel du gouvernement préserverait l'une des plus importantes caractéristiques de notre système parlementaire traditionnel de Westminster, et le gouvernement actuel a choisi de maintenir cette tradition.

Lorsque le sénateur Harder a comparu devant le sous-comité du budget des dépenses au mois de mai, il a demandé « le montant qui a toujours été accordé au titulaire de [son] poste ». Bien qu'il occupe maintenant les fonctions de « représentant du gouvernement », il voulait obtenir le montant qui a toujours été accordé au leader du gouvernement, dans sa totalité.

Lorsqu'il a comparu devant votre comité le 28 septembre, il a décrit de façon assez détaillée ses responsabilités au Sénat, qui ressemblent beaucoup à celles de ses prédécesseurs. À un certain point, il a dit ce qui suit :

Je pense que je ne dois pas être affilié à un parti ou à un caucus en particulier et que ma tâche consiste à aider le gouvernement à mener à bien son programme législatif [...]

Je suppose que cela revient à dire qu'il ne veut pas être considéré comme un partisan du Parti libéral pendant qu'il assume sa responsabilité d'aider le gouvernement libéral à mener à bien son programme législatif au Sénat.

C'est vraiment comme si le gouvernement avait déjà décidé qu'il a besoin d'une sorte de représentation officielle au Sénat, comme le veut la tradition de longue date.

Cela nous amène naturellement à la troisième question, qui est de savoir si un Sénat moderne a besoin d'une opposition officielle ou de groupes d'opposition. Je peux comprendre qu'il est avantageux pour le gouvernement d'avoir au Sénat une structure traditionnelle de leadership gouvernemental appuyée par l'ensemble de l'appareil gouvernemental dans le but de mener à bien le programme législatif du gouvernement, sans qu'il y ait de structure traditionnelle d'opposition.

Je peux comprendre en quoi ce serait utile pour le gouvernement, mais je ne vois pas en quoi cela le serait pour cette Chambre de second examen objectif qui, comme on nous l'a dit, doit servir de contrepoids au pouvoir extraordinaire du premier ministre et de son Cabinet.

Le gouvernement et le cabinet du premier ministre sont très organisés, et il paraît logique que nous ayons nous- mêmes besoin d'un certain niveau d'organisation pour servir de contrepoids à leurs pouvoirs.

Enfin, pour ce qui est de la quatrième question, on m'a demandé quelles modifications nous devrions apporter à nos règles ou à nos pratiques. Je vais d'abord vous lire une citation : « La question de réformer le Sénat dans le but de l'harmoniser avec l'opinion publique fait l'objet de discussions dans la presse et au Parlement depuis de nombreuses années. » J'aimerais pouvoir affirmer que ce sont mes paroles, mais ces mots se trouvaient plutôt sur le couvre-livre d'un ouvrage publié il y a plus de 100 ans, en 1914. Ce sont les paroles de sir George Ross, dont nous avons beaucoup entendu parler dans le cadre du rappel au Règlement de la semaine dernière et de la décision que le Président a rendue hier au sujet du projet de loi C-2. Le livre s'intitule The Senate of Canada Its Constitution, Powers and Duties Historically Considered. Ces mots d'introduction montrent que le débat que nous tenons aujourd'hui est en réalité la suite d'un débat qui remonte à plus d'un siècle. Pendant ce temps, les règles et les procédures du Sénat ont évolué, comme elles continueront de le faire. La différence, c'est que nous tâchons maintenant de renforcer et de revoir les règles du Sénat à un rythme accéléré compte tenu du nombre exceptionnellement élevé de nouveaux sénateurs nommés. Nous devons réfléchir à la façon de les accommoder en vertu des règles existantes et aux règles que nous devrons modifier à cette fin. Je suis convaincu que nous devons accommoder les nouveaux sénateurs et chercher des moyens de le faire.

Je vais laisser le Comité sur la modernisation — au moyen de vos bonnes délibérations, chers collègues — et, par la suite, le Comité du Règlement et, enfin, le Sénat déterminer quelles règles il serait approprié de modifier maintenant, en tenant compte de la façon dont la Cour suprême du Canada a défini le rôle du Sénat du Canada en tant qu'institution politique fondamentale du pays.

Le président : Merci beaucoup, sénateur Day.

Comme prévu, la liste de sénateurs qui veulent poser des questions est plutôt longue. Nous commençons toujours par notre vice-président, le sénateur Joyal. Ce sera ensuite au tour de la sénatrice McCoy.

Le sénateur Joyal : Merci de votre exposé, sénateur Day. Il comportait des éléments historiques, et je pense qu'il est important de les mettre à la disposition de tous les sénateurs.

Ma question concerne la partisanerie par rapport à l'influence des ministres au Sénat, ce qui est un élément essentiel de la déclaration faite par M. Trudeau lorsqu'il était leader des libéraux à la Chambre des communes, à l'époque du gouvernement du très honorable Stephen Harper.

N'est-il pas plus dangereux que les sénateurs relèvent de l'un ou l'autre de ces cinq sénateurs, ce qui permet à un ministre d'approcher les sénateurs individuellement, avec confiance, en les appelant ou en les rencontrant dans un bureau, sans que personne ne soit au courant de ce contact et de cette influence qu'il exerce sur eux? N'est-il pas plus insidieux et antidémocratique qu'un sénateur proclame son allégeance à un parti reconnu, en vertu de la loi électorale? Tout le monde peut déterminer si un sénateur va trop loin dans sa partisanerie lorsqu'il fait des déclarations ou intervient dans un débat. C'est à tout le monde d'en juger. Si je déclare être libéral, tout le monde peut me juger en conséquence, mais si je reçois un appel d'un sénateur sans allégeance, d'un ministre qui m'exhorte à voter pour un projet de loi du gouvernement ou à le défendre, n'est-ce pas une façon de porter atteinte au rôle du Sénat? Si ma partisanerie va trop loin, tout le monde peut le constater et porter un jugement, la critiquer et la dénoncer, que ce soit au Sénat, dans les médias ou au sein du public. Cependant, si je suis juste ouvert, librement, à l'influence qu'un ministre ou un représentant du gouvernement exerce sur ma façon de voter, ne suis-je pas à vrai dire en train de nuire davantage au statut de l'institution, à son rôle qui consiste à faire contrepoids à l'exécutif et à effectuer un second examen objectif des projets de loi?

Le sénateur Day : Merci de poser la question, sénateur Joyal. Je pense qu'il faut trouver un équilibre.

Dans le caucus dont je fais maintenant partie, nous n'avons pas à nous conformer aux instructions d'un whip. Si le ministre m'appelait, ou que M. Harder ou Mme Bellemare m'approchait, et qu'il me demandait la position de mon caucus en prévision d'un vote, je lui répondrais que nous sommes libres de voter comme bon nous semble. À mon avis, l'idée que la mise sur pied d'un caucus politique partisan se traduirait par une seule voix est révolue. Ce fut une réalité pendant un certain temps. Il fallait voter selon les instructions d'un whip, et il y avait différents niveaux de discipline de parti. Je ne pense pas que ce soit souhaitable.

Toutefois, l'autre extrême revient à n'avoir aucun caucus, ce qui signifie que des pressions seraient exercées sur les 105 sénateurs et que personne ne saurait ce qu'il en est. Cette situation se traduirait par un grave manque de discipline dans la façon de mener nos travaux au Sénat. Il est avantageux que les gens qui pensent de la même façon et qui ont les mêmes points de vue dialoguent en toute confidentialité au sein de leur groupe respectif de collègues qu'ils connaissent et en qui ils ont confiance, jusqu'à ce qu'ils soient appelés à prendre une décision, à voter au Sénat. Je cherche donc un équilibre entre les deux extrêmes.

Le sénateur Joyal : Merci.

La sénatrice McCoy : Merci de votre réponse, sénateur Day. J'ignore si je dois m'offusquer, en tant que sénatrice indépendante, à l'idée que quelqu'un puisse m'appeler et me présenter un point de vue et essayer de m'en persuader, à l'idée que ce soit considéré d'une façon ou d'une autre comme une sorte d'atteinte injuste au Sénat du Canada. On se doit d'avoir une certaine confiance dans l'« honorabilité » de nos sénateurs.

Cela dit, je ne pense pas avoir bien entendu tout ce que vous avez dit. Vous avez dit que vous croyez, malgré les preuves du contraire — mais ne vous en faites pas; je ne vous en tiendrai pas rigueur — qu'une opposition officielle est absolument nécessaire dans un système de Westminster pour demander des comptes au gouvernement. Je ne vous ai pas ou je ne pense pas vous avoir entendu dire autre chose.

À l'heure actuelle, je pense que nous avons peut-être 64 sénateurs qui ne font pas partie de ce que nous appelons encore l'opposition au Sénat. Quel rôle revient selon vous aux sénateurs concernés, qui représentent les deux tiers du Sénat, si vous estimez que seule l'opposition peut assumer ces fonctions? Ai-je bien compris ce que vous avez dit?

Le sénateur Day : Je n'ai pas employé le terme « absolument ». Absolument pas.

Je crois que l'opposition officielle a un rôle à jouer. Dans un système où un groupe présente des mesures législatives et essaie de souligner ce qu'elles ont de bon, il est utile que des sénateurs indépendants, qui n'ont pas pris d'engagement — il devrait y en avoir beaucoup parmi nous au Sénat —, entendent le point de vue du groupe concerné, qu'ils soient d'accord ou non.

Il revient à l'opposition officielle d'attirer l'attention sur la faiblesse des arguments avancés par le représentant du gouvernement; de proposer d'autres façons de procéder; et, selon le projet de loi, de proposer un amendement ou, à tout le moins, de convaincre le gouvernement d'examiner les autres possibilités.

La sénatrice McCoy : Dernièrement, en juin — et je peux même penser à un exemple ayant eu lieu au cours de la présente session —, le sénateur Campbell, qui est indépendant, a parrainé le projet de loi C-7, qui a été présenté par le gouvernement et qui portait sur le droit à la syndicalisation de la GRC. Dans son premier discours prononcé au Sénat au sujet de cette mesure législative, il a dit que c'était essentiellement un très bon projet de loi, mais que des améliorations s'imposaient.

Pensez-vous que les sénateurs indépendants et les autres devraient tous être chargés d'attirer l'attention sur d'éventuelles améliorations et de contribuer à leur élaboration? Le sénateur a contribué à l'élaboration d'améliorations en proposant un amendement qui a permis d'améliorer le projet de loi.

Le sénateur Day : Tout d'abord, nous devrions définir ce que nous entendons par sénateurs « indépendants ». Je me considère comme un sénateur indépendant. Je pense que nous devons faire attention aux termes employés pour savoir de quoi nous parlons.

Le sénateur Campbell était le parrain, si je ne m'abuse, et j'ai trouvé très intéressant qu'il se prononce immédiatement contre le projet de loi. C'est toutefois un choix du gouvernement. Le gouvernement choisit le parrain. Dans ce cas-ci, il s'agissait d'un projet de loi d'initiative ministérielle. On savait vraisemblablement ce que le parrain allait dire, et c'est ce que le gouvernement voulait entendre.

Je ne vois aucun inconvénient à ce que nous acceptions de parrainer un projet de loi lorsque nous estimons pouvoir le faire en suivant notre propre conscience.

J'ai parrainé le projet de loi C-2, à la demande du représentant du gouvernement. En tenant compte de mon expérience, j'ai examiné le projet de loi et conclu que je pouvais aider le Sénat à comprendre son contenu. J'ai donc accepté de le parrainer. J'ai toutefois indiqué à ce moment-là que je me sentirais libre, en tant que parrain du projet de loi, de proposer les amendements qui pourraient s'avérer nécessaires et de donner de nouvelles explications moins favorables du point de vue de quelqu'un qui entend voter pour cette mesure législative.

La sénatrice McCoy : Bien sûr, nous avons entre autres vu des membres de votre caucus, des sénateurs faisant partie du groupe d'indépendants et des membres du caucus conservateur présenter des amendements au projet de loi C-14 sur l'aide médicale à mourir.

Il y a ensuite l'exemple du projet de loi S-2, qui portait sur le rappel de véhicules à moteur. Le porte-parole de l'opposition au Sénat s'est exprimé sur cette mesure législative à l'étape de la deuxième lecture en disant qu'elle ne lui posait absolument aucun problème. Il acceptait l'ensemble du projet de loi, mais des concessionnaires de partout au pays nous ont ensuite exhortés à y apporter des améliorations. Notre comité a volontiers donné suite à leur demande en présentant à nouveau l'amendement concerné.

Encore une fois, cela prouve-t-il que nous ne pouvons pas nous fier qu'à l'opposition officielle pour faire notre travail, qui consiste en quelque sorte à examiner attentivement la loi et à l'améliorer?

Le sénateur Day : Sénatrice McCoy, je suis tout à fait d'accord avec vous. Nous ne pouvons pas renier notre rôle de sénateurs, de législateurs et de personnes qui sont censées examiner les dispositions législatives, à titre de sénateurs indépendants, puis dire ce qu'ils en pensent à leurs collègues, à la lumière de leurs connaissances et de leur expérience.

Je n'ai aucun problème à ce que nous tentions d'y arriver sans opposition officielle, pour voir comment les choses se dérouleront. Mais si un sénateur défend le point de vue du gouvernement, il nous faut une certaine structure ou discipline pour nous assurer qu'il y a bel et bien une opposition. Il y aura peut-être beaucoup d'autres sénateurs qui voudront faire des commentaires, même s'ils n'appartiennent pas à l'opposition officielle, et certains iront à l'encontre de la proposition gouvernementale. Il n'y a rien de mal là-dedans. À vrai dire, nous avons le devoir et la responsabilité de procéder ainsi.

Le sénateur Tannas : Merci d'être avec nous, sénateur Day.

Il y a une question que nous avons déjà abordée ici, mais qui ne semble pas être tout à fait réglée, à savoir la question des caucus. Je pense que certains sénateurs sont profondément convaincus que les caucus doivent se limiter aux partis politiques, comme c'est le cas actuellement.

D'autres, comme le sénateur Harder, ne sont pas d'accord et soutiennent que les caucus doivent être des organisations non partisanes. J'ai déjà posé la question : pourquoi doit-on absolument trancher entre les deux modèles? Pourquoi ne pas être inclusifs? Pourquoi ne pourrions-nous pas avoir les deux types de caucus? J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

J'ai une question complémentaire. Qu'en est-il de l'équité relative au financement de ces caucus? Êtes-vous favorable au souci d'équité? Puisque vous appartenez au troisième parti, les membres de votre caucus bénéficient d'un important budget. Que pensez-vous de la formation de caucus non partisans, si jamais cela se produit? Au cours de la session à venir, tandis que nous débattons de la question, que pensez-vous d'accorder un financement équitable aux sénateurs indépendants, de sorte que l'argent à la disposition des membres de votre caucus, des sénateurs indépendants, des membres de notre caucus et du parti au pouvoir soit équitable?

Le sénateur Day : Sénateur Tannas, permettez-moi de répondre d'abord à la deuxième partie de votre question.

Je suis d'avis que si l'on forme un groupe bien précis ayant un certain niveau de responsabilité et de discipline — et j'ai l'impression que c'est ce qui se passe à l'heure actuelle —, celui-ci mérite d'obtenir un financement équivalent. Je l'ai déjà dit ailleurs. Chaque sénateur doit pouvoir s'acquitter des responsabilités qu'il a acceptées. Il ne faut pas qu'un groupe bénéficie de financement, mais pas un autre groupe, pourvu que certains paramètres soient respectés.

Le sénateur Tannas : Certains diront que le Règlement ne le permet pas, et que nous devrons soumettre quelque chose, nonobstant le Règlement, pour le faire avant que l'organisation n'agisse et que le Règlement ne soit modifié.

Le sénateur Day : En effet.

Le sénateur Tannas : Qu'en pensez-vous?

Le sénateur Day : Vous avez raison. Dans l'intervalle, il est possible de trouver un équilibre et d'assurer une équité au moyen de ce que nous appelons des ordres sessionnels. Nonobstant le Règlement, ce mécanisme existe et doit être envisagé. Nous savons que le Règlement doit être modifié à long terme. Il faut le changer.

Mais que pouvons-nous faire dans l'intervalle? Allons-nous demander aux sénateurs d'attendre sagement que le Règlement soit modifié? Nous ne pouvons pas le faire du jour au lendemain. Nous devons respecter les délais prescrits, dont l'objectif est d'éviter les conséquences imprévues.

Je ne pense pas que nous devons changer la procédure, mais en attendant, je crois qu'il y a un outil à notre disposition, et c'est ce que nous appelons des ordres sessionnels. Nonobstant le Règlement, c'est ce que nous allons utiliser jusqu'à ce que nous ayons eu la chance d'étudier pleinement le Règlement et d'y apporter les modifications que nous jugeons nécessaires. Au moment où le Règlement sera modifié, les changements prendront effet si c'est fait avant la fin de la session.

En réponse à votre première question, je pense qu'il faut établir une distinction entre un caucus sous l'angle de la procédure du Sénat, puis un caucus de type politique qui se forme naturellement. Il se peut qu'un caucus de type politique se forme — des caucus multipartites —, parfois même au sein de notre groupe. Il peut aussi y avoir des sous- groupes sur différentes politiques.

L'important est toutefois de s'assurer du bon fonctionnement du Sénat. Si des caucus au sein du Sénat ont besoin de fonds pour remplir leur partie de ce mandat, nous devons veiller à ce qu'ils en obtiennent.

Il en va autrement s'il est question de financer certains caucus politiques formés naturellement. Je pense que c'est secondaire. Nos ressources financières ne sont pas illimitées, et nous devons investir dans ce qui est le plus efficace.

[Français]

La sénatrice Bellemare : Je suis heureuse de vous entendre parler sans lire vos notes. Je suis tout à fait d'accord avec vos propos. Par contre, dans les notes que vous avez lues pour répondre aux questions du comité, j'ai senti que vous aviez fait plusieurs commentaires acerbes à l'égard du groupe qui s'occupe de faire le lien entre l'autre endroit et cette auguste Chambre, que l'on appelle l'équipe des représentants du gouvernement.

Je suis sans doute naïve et idéaliste à la fois, mais en acceptant le poste d'adjointe du représentant du gouvernement, je me suis dit qu'il s'agissait d'une période de transition où il faudrait aider le Sénat à être moins partisan, comme le souhaite l'ensemble de la population, c'est-à-dire moins partisan que par le passé. On a des choses à faire et c'est compliqué. Ce sont des tâches qu'il faut faire, parce que le Sénat n'existerait pas s'il n'y avait pas une autre Chambre. Nous avons pour mission d'étudier les projets de loi du gouvernement, et je crois que vous êtes d'accord avec moi.

Vous êtes aussi d'accord avec moi pour dire que nous sommes en mesure d'étudier et d'analyser la législation fédérale en faisant preuve d'objectivité, sans trop de partisanerie. C'est ce que vous venez de répondre. Par contre — ma question est en lien avec une réorganisation du Sénat —, je n'ai pas la même vision que vous en ce qui concerne la partisanerie. Peut-être que vous pourrez m'en dire davantage sur la mienne. Lorsque vous dites qu'il y a de la place pour les sénateurs qui appartiennent à des partis politiques, je suis bien d'accord avec vous. Je n'appartiens plus à aucun parti, mais j'ai déjà été membre du Parti conservateur. À mon avis, la population canadienne désire qu'on extirpe du Sénat la partisanerie qui veut que la grille d'analyse des sénateurs soit celle du parti politique auquel ils appartiennent, et ce, dans le but de prendre le pouvoir, de le conserver ou de donner des pelures de banane au gouvernement au pouvoir. Cette petite partisanerie avec un petit « p » n'a pas sa place au Sénat.

Pour faire du Sénat une institution moins partisane — c'est-à-dire pour retirer des pratiques qui incitent les sénateurs à analyser ou à mener des actions en fonction d'une grille d'analyse stratégique axée sur les croyances de leur parti politique —, il faut apporter des changements. Comme on ne peut pas le faire de manière constitutionnelle — on ne peut pas tout à coup avoir des sénateurs élus —, on ne peut pas restreindre la mission du Sénat. Il y a bien des choses qu'on ne peut pas faire. On doit absolument transformer le Sénat dans le contexte de la Constitution actuelle.

Alors, ne croyez-vous pas que, dans la pratique historique, la partisanerie s'est incrustée dans nos institutions au Sénat, parce que le premier ministre nommait le leader du gouvernement en Chambre et qu'il nomme toujours le Président du Sénat? Les règles et les pratiques du Sénat ont donné au leader du gouvernement en Chambre un ensemble de pouvoirs extrêmement importants, qui sont liés à l'attribution de plusieurs éléments, par l'entremise du whip et de l'équipe de direction du gouvernement, comme les bureaux, les comités et les déplacements. Il s'agit d'un ensemble de pouvoirs qui font que, lorsqu'un sénateur appartient au caucus d'un parti — il y a des pouvoirs aussi dans le caucus du parti de l'opposition —, il est en quelque sorte obligé de suivre la ligne du parti.

Tous ces petits pouvoirs se sont incrustés dans les règles et les procédures au fil des années. C'est ce qui fait qu'un sénateur se dira qu'il doit voter en fonction de son parti, même si ce n'est pas ce qu'il désire. Quand on parle de partisanerie, c'est une partisanerie qui s'est incrustée au sein du Sénat à travers ses règles et ses pratiques. C'est ce qu'on essaie de changer. Ne croyez-vous pas que, dans le cadre de la réorganisation du Sénat, on pourrait peut-être extirper toutes ces pratiques et ces façons de faire, des récompenses aux punitions, et les confier à des groupes non partisans, comme des divisions régionales, pour administrer le Sénat? Il s'agirait de créer des divisions administratives régionales, non pas des caucus et, par la suite, des caucus d'affinité politique qui pourraient être partisans, mais dans lesquels il n'y aurait aucune possibilité d'accorder de petits privilèges ou de donner de petites punitions si le sénateur désire être indépendant. Alors, voilà la question que je voulais vous poser.

Le sénateur Day : Je vous remercie de votre question. Je me demande par où commencer. Je suis d'accord que le public souhaite un changement, mais le problème découle du fait que les caucus du Sénat sont trop près des caucus de la Chambre des communes. C'est ce qui pose problème à mon avis. Je suis tout à fait d'accord pour dire qu'il n'y a pas de liaison dans notre groupe depuis que le premier ministre, M. Trudeau, chef du Parti libéral, nous a exclus du caucus. Je me suis dit que nos obligations en tant que sénateurs n'étaient plus les mêmes. Nous avons des obligations à court terme et à long terme qui concernent les régions et les minorités. Ce n'est pas la même chose du côté de la Chambre des communes et de leurs caucus. Selon moi, c'est une bonne chose que nous siégions séparément.

Peut-on avoir un caucus partisan au Sénat sans qu'il y ait de liaison avec le caucus des Communes? À mon avis, oui, car c'est un groupe dont les membres sont prêts à discuter ensemble et qui pensent de la même façon. C'est la meilleure chose pour le Sénat. J'utilise le terme « groupe », parce que le public attribue une connotation négative au mot « caucus ».

Comme je l'ai mentionné tantôt, on doit revoir les définitions ou utiliser d'autres mots comme « groupe ». Vous, vous êtes une équipe, ce qui est différent d'un caucus. Je suis prêt à changer notre façon de fonctionner avec les parlementaires de l'autre Chambre.

[Traduction]

Le sénateur Massicotte : Très cher collègue, je vous remercie d'être venu nous faire part de vos idées. Je vous suis grandement reconnaissant de ces précisions et de cet historique. Nous en avions un peu entendu parler la semaine dernière. Ce genre de chose ajoute toujours beaucoup de couleur, ce qui n'est pas sans me plaire.

Je me préoccupe plutôt de l'historique récent de notre institution, et de la raison pour laquelle nous sommes ici. Permettez-moi de répéter que notre principal objectif est de trouver la meilleure façon de nous acquitter de notre responsabilité première, qui consiste à effectuer un second examen objectif. Comment pouvons-nous y arriver? Le reste, ce ne sont que des détails, mais comment pouvons-nous atteindre cet objectif? Nous devons nous rappeler que c'est la raison pour laquelle nous sommes ici.

Cela dit, j'ai deux ou trois commentaires. Bien des choses ont été écrites sur l'existence des partis. Je suis tout à fait d'accord avec l'ensemble des propos, car c'est le gros bon sens. Un parti, c'est une marque, et c'est ce à quoi les gens s'identifient. Or, ce n'est pertinent que parce que les gens doivent faire un choix lors d'élections. Le concept des partis est donc tout à fait applicable à la Chambre des communes, mais je doute qu'une telle marque soit aussi utile au Sénat. Je ne suis pas même certain que ce soit nécessaire ou bénéfique. Je suis d'accord avec tous les arguments dans le cas de la Chambre des communes, mais je n'y adhère pas nécessairement dans le cas du Sénat.

Je n'ai aucun problème avec ce que vous avez dit sur notre affiliation à un parti politique. C'est une liberté de choix qui est convenable pour toutes les bonnes raisons.

Je vais m'éloigner un peu des propos de mon autre collègue. Cela dit, il suffit de regarder ce qui s'est passé récemment. Je suis au Sénat depuis 13 ans et, à l'exception de l'année dernière, je dis toujours que chaque sénateur de notre parti a voté conformément aux objectifs et au programme de nos collègues de la Chambre des communes dans 99,99 p. 100 des cas — j'ai vérifié une fois, mais c'est peut-être 99 p. 100 maintenant, étant donné que nous avons constaté des déviations récemment. Il est vrai que nous avons un esprit indépendant, mais la nature humaine étant ce qu'elle est, nous sommes grandement influencés par ce qui se passe au sein du caucus, que ce soit attribuable à la pression des pairs ou à un lavage de cerveau, peut-être. Quoi qu'il en soit, il est rare que les sénateurs ne votent pas conformément au souhait de leurs pairs et de leurs collègues.

Quand je constate la situation, je me dis que ce n'est certainement pas une bonne chose. Il suffit de jeter un œil à notre responsabilité constitutionnelle pour comprendre que nous y avons renoncé afin de défendre nos collègues de la Chambre des communes. Nous ne nous acquittions pas de notre responsabilité, qui consiste à effectuer un second examen objectif en toute indépendance.

L'histoire récente est donc plus inquiétante que l'histoire à long terme.

Cela dit, je suis conscient de ma responsabilité. Comment pouvons-nous concilier ce comportement, qui s'est manifesté pendant des années au sein de notre caucus, sans parler des autres caucus, avec notre responsabilité d'aujourd'hui?

Vous semblez dire que cela dépend de la façon de voir la partisanerie. Vous dites qu'il faut une opposition officielle, mais si elle réside du côté des groupes partisans que nous avons observés ces dernières décennies, j'estime que cela n'augure rien de bon, car l'intérêt d'un parti politique à gagner les prochaines élections l'emporte alors sur notre responsabilité à l'égard des Canadiens. Ce n'est certainement pas une bonne chose, et je doute que ce soit pertinent.

Vous semblez toutefois être d'accord avec moi là-dessus. Vous dites que c'est la partie répréhensible de l'histoire, qu'il ne faut pas reproduire. En revanche, vous ne voyez aucun problème aux caucus parlementaires politiques, s'ils sont totalement indépendants de la Chambre des communes. Vous vous rapprochez de ce que nous devrions permettre, selon moi. Nul besoin que tout le monde le fasse, mais je suis d'avis que cette façon de faire serait plus acceptable que ce qui se passait auparavant.

En même temps, regardons ce qui s'est passé récemment dans le cas des projets de loi C-14 et S-2. Je pense que la qualité des délibérations du Sénat était nettement supérieure dans ces deux cas, étant donné que tous les sénateurs ont voté librement pour ce qu'ils croyaient juste, plutôt que de recevoir des directives de leur parti politique ou de leurs collègues à la Chambre des communes.

Par conséquent, comment conciliez-vous votre désir qu'il y ait une opposition officielle, c'est-à-dire des caucus partisans, avec notre expérience de la dernière décennie, et avec notre objectif principal d'effectuer un second examen objectif?

Le sénateur Day : Un des grands avantages de l'arrivée des nombreux sénateurs, c'est que la situation nous a permis de comprendre l'importance de notre indépendance à titre de sénateurs. Nous devrions tous agir en toute indépendance.

Puisque j'étais ici lorsque vous êtes arrivés au Sénat, je me souviens de la façon dont nous nous sentions quand nous avions l'intention de voter contre une chose que nos collègues allaient appuyer. C'était ainsi parce que nous avons laissé le système de la Chambre des communes et des votes dictés par le parti s'insinuer dans la mentalité du Sénat. Je me souviens que nous en discutions déjà il y a de nombreuses années. Nous voulions savoir ce qu'il y avait de mal à voter contre une proposition, si nous n'y croyions pas. Les autres nous proposaient alors de nous absenter cette journée-là.

Toutes ces pratiques doivent demeurer dans le passé. Nous devons pouvoir affirmer notre indépendance. Ce n'est pas qu'une question de second examen objectif. Prenons tous nos projets de loi d'initiative sénatoriale — ceux qui sont déposés ici même. Nous sommes un organe législatif aussi — peut-être pas au même titre que la Chambre des communes, mais notre rôle ne se limite pas à un second examen objectif. Nous avons bel et bien un rôle législatif.

Il est donc vrai que nous avons laissé notre institution devenir trop partisane et trop dictée par les besoins à court terme de l'autre Chambre. Lorsque nous agissons ainsi, nous n'avons rien de complémentaire, et nous nous contentons d'approuver automatiquement les projets de loi. Nous devons changer les choses, et je pense que la discussion d'aujourd'hui y contribue.

C'est déjà arrivé : M. Trudeau nous a aidés à amorcer le changement. C'est déjà fait. Certains n'étaient pas particulièrement ravis de la façon dont les choses se sont déroulées, mais c'était la chose à faire. J'espère qu'un revirement semblable se produira dans un autre parti politique du Sénat. Ensuite, ce sera fait.

La sénatrice Cools : J'aimerais remercier mon bon ami, le sénateur Joseph Day, de sa présentation que j'ai trouvée exceptionnelle. Je le remercie tout particulièrement d'avoir cité Alpheus Todd. Vous n'êtes pas sans savoir que j'éprouve une grande admiration pour cet homme. John A. Macdonald avait l'habitude d'appeler M. Todd assez souvent pour le consulter sur des questions épineuses.

Je considère que le Sénat est abandonné à son sort. Nous pouvons appeler cela comme bon nous semble, mais je n'ai jamais vu le Sénat dériver autant dans l'incertitude et l'insécurité. Nous devons arrêter de nous bercer d'illusions et comprendre à quel point nous sommes abandonnés à notre sort.

Le Sénat n'a même pas tenu de débat sur les changements proposés. Certaines personnes — nommément le leader du gouvernement et le premier ministre — ont une idée en tête, mais la question n'a jamais été soumise au Sénat pour qu'il en délibère. Par conséquent, nous ignorons si ces idées émanent de recherches et d'études sérieuses sur plusieurs années, ou si elles découlent simplement du rêve de quelqu'un, qui s'est réveillé un matin avec un sentiment d'illumination. Nous n'en avons pas la moindre idée, de sorte que nous sommes dans une posture très délicate.

Sénateur Day, j'ai essayé de comprendre comment nous pouvons nous sortir de cette mauvaise posture, et je pense que nous devons commencer par affronter la réalité. Le Sénat existe depuis longtemps et a joué un rôle décisif au sein de la Confédération. Aussi, nous devrions appeler un chat un chat et parler des abus et des violations dont sont victimes les sénateurs et les députés de la Chambre des communes, de la part des prétendus chefs et de leur personnel. Je sais de quoi je parle puisque j'ai été convoquée plusieurs fois devant le personnel du chef. Chaque fois, il m'était ensuite plus facile de faire valoir mes idées. Comme vous le savez, j'ai empêché l'adoption de nombreux projets de loi, et j'en ai fait modifier plusieurs. Chaque fois, j'ai obtenu l'appui de l'opinion publique.

Le leader du gouvernement au Sénat nous dit qu'il représente le gouvernement, alors que les sénateurs ne doivent pas représenter le gouvernement. Nous appartenons à la Chambre haute et à la Chambre de Sa Majesté. Les sénateurs représentent Sa Majesté la reine, et nous devons le comprendre. Nous sommes donc les représentants de la reine.

Le gouvernement a le droit de nommer un leader au Sénat. C'était d'ailleurs une des ententes du gouvernement responsable — ce que j'ai dit à maintes reprises. Autrement dit, le roi ne devait plus s'ingérer personnellement dans les affaires du gouvernement. Il devait gouverner grâce à ses ministres, qui sont choisis parmi les deux Chambres du Parlement. Voilà l'essence même du principe de gouvernement responsable, ce que nous perdrons de vue si nous ne faisons pas attention.

Dans toute cette affaire, j'essaie de comprendre s'il est important que le Sénat tienne un véritable débat sur les changements que nous subissons, comme si nous étions des enfants qui doivent respecter les consignes. J'y réfléchis depuis un moment déjà. Nous devons tenir un débat sur ces propositions et sur les questions très profondes que nous étudions ici. Nous pouvons les appuyer et en discuter ensemble, mais ces enjeux n'ont fait l'objet ni de discussions ni de débats au Sénat. En réalité, le Sénat n'est pas au courant de l'ensemble des changements qu'il subit, et nous devons en discuter.

J'ai d'ailleurs posé cette question au sénateur Harder il y a quelques jours, et il a dit qu'il comptait sur les délibérations du Comité de la modernisation. Or, la question n'a rien à voir avec la raison d'être de notre comité.

Je m'empresse de rappeler une chose à mes collègues qui étaient présents pendant la dernière série de changements majeurs proposés pour le Sénat, notamment dans le cadre de l'accord du lac Meech — vous vous en souviendrez, et c'était la même chose lors de l'accord de Charlottetown. En fait, le Sénat avait participé activement au débat sur l'accord du lac Meech. Le Sénat se formait une opinion à partir des idées du premier ministre sur l'avenir du Sénat. Mais pour l'instant, nous sommes de simples spectateurs. Nous observons le processus et avançons à tâtons en essayant de retrouver notre chemin. Je trouve cela fort inquiétant.

Sénateur Day, vous avez tout à fait raison de dire — et vous avez cité M. Todd — que le gouvernement parlementaire est depuis longtemps gouverné par des partis, et il convient de les maintenir. Je ne voudrais pas avoir l'air de trahir qui que ce soit, mais l'expérience a démontré qu'en politique, si les gens ne se rallient pas à des idées et à des principes, ce qui est la raison d'être des partis politiques, ils vont se tourner vers des intérêts privés, des convictions personnelles, et même parfois des intérêts personnels.

Par conséquent, je trouve cette situation très préoccupante, et je suis impatiente de tenir un débat sur la question au Sénat. Sénateur Day, vous pourriez peut-être diriger le débat, car j'ai trouvé que votre exposé de ce matin était très réfléchi et direct.

N'empêche qu'on n'a pas parlé des pressions politiques. Bon nombre d'entre nous ont été malmenés par le personnel des leaders; ne vous méprenez pas. Je sais que de nombreux sénateurs sont partis parce qu'ils subissaient trop de pressions de la part des leaders. Et cela ne remonte pas à un passé lointain; on parle d'il y a à peine deux ou trois ans.

Quoi qu'il en soit, sénateur Day, cela pourrait vous donner matière à réflexion, et peut-être que certains d'entre nous pourraient trouver le moyen de lancer un débat au Sénat sur les changements proposés par le gouvernement, étant donné que le gouvernement ne nous les a aucunement présentés.

Le sénateur Day : Merci, madame la sénatrice.

J'aimerais revenir sur ce que j'ai dit plus tôt au sujet de l'afflux de nouveaux sénateurs. Cela nous a donné l'occasion de nous intéresser plus particulièrement à des questions dont nous n'avions pas vraiment été saisis auparavant, lorsque deux ou trois sénateurs étaient nommés en même temps. On s'assoyait là et on apprenait. On nous disait : « Voici la façon de procéder », et personne ne demandait pourquoi. Maintenant, avec un plus grand groupe, on peut se poser la question, et c'est même sain de le faire.

Selon moi, vous ne devriez pas vous inquiéter d'assister à la dérive du Sénat. Je pense que, tout comme moi, vous devez vous dire que nous sommes en plein processus de changement. La gestion du changement n'est pas toujours une chose facile et agréable, certes, mais c'est important que nous le fassions. Et nous le faisons. C'est en train de se produire, tout autour de nous, et c'est une bonne chose. Chose certaine, nous voulons nous assurer de prendre part au débat et de pouvoir faire entendre notre point de vue.

Le présent rapport est très utile, et il y aura un débat sur les divers rapports qui ont été présentés à la Chambre. Ces rapports peuvent d'ailleurs faire l'objet d'un vaste débat. Au sein du caucus libéral, nous avons passé plusieurs heures à discuter uniquement de la modernisation du Sénat et du rapport. Lorsque le prochain rapport sera présenté, si vous souhaitez participer au débat, nous serons heureux de vous y accueillir.

La sénatrice Cools : J'en serais ravie.

Le sénateur Eggleton : Il faut comprendre que le gouverneur général nomme de nouveaux sénateurs, sur la recommandation du premier ministre, qui n'adhèrent pas à un parti politique et qui arrivent ici comme étant non affiliés ou indépendants. Notre comité essaie de se faire à cette réalité.

Je tiens tout d'abord à vous remercier, sénateur Day, pour votre exposé, particulièrement pour votre leçon d'histoire sur le fait qu'il ne faut pas revenir à une situation non partisane qui n'a jamais vraiment existé, comme vous l'avez souligné. Toutefois, je conviens qu'il faut être moins partisan et que le Sénat doit garder son indépendance par rapport à l'autre Chambre et les gens qui s'y trouvent. Évidemment, nous, les gens du caucus libéral, n'avons plus à nous inquiéter. J'ai même dit à mes collègues : « N'attendez pas qu'on vous mette dehors; mettez-les dehors en premier. »

Si vous me permettez, j'aimerais revenir sur ce que vous avez dit au sujet de l'opposition officielle, puis poser une question à propos des caucus régionaux.

En ce qui a trait à l'opposition officielle, n'êtes-vous pas d'accord que tous les sénateurs sont appelés à exercer un rôle de second examen objectif? Nous avons tous la responsabilité d'effectuer un examen critique des projets de loi qui sont déposés. Je me souviens de mes 11 années comme maire de Toronto. J'avais l'impression qu'il y avait toujours une opposition sur chaque enjeu, et pourtant, il n'y avait aucun parti ni aucune opposition officielle. À vrai dire, je me disais que tout le monde représentait l'opposition officielle. Je passais d'un groupe à un autre et j'improvisais en quelque sorte une coalition dans chacun des dossiers. Si je dis cela, c'est pour démontrer qu'il y aura toujours des points de vue différents, y compris au sein de l'opposition.

Le problème, avec une opposition officielle, c'est l'idée que c'est une opposition impulsive qui va automatiquement réagir négativement à tout ce que vous proposez : vous dites blanc, je dis noir; vous dites oui, je dis non. Par conséquent, je n'en vois pas vraiment la nécessité, surtout si on a un groupe de gens intelligents, comme nous au Sénat, qui procède à ce type d'examen critique.

Si nous devons avoir une équipe représentant le gouvernement, constituée de trois personnes, nous devrions peut- être avoir une équipe représentant l'opposition. C'est peut-être ce dont nous avons besoin. Tout le monde serait libre d'écouter et d'établir son propre programme. Je ne suis pas convaincu de l'utilité de l'opposition officielle, alors j'aimerais que vous nous en disiez davantage à ce sujet.

J'aimerais également discuter de la notion des caucus régionaux, parce que c'est une question qui a été soulevée ici et auprès de tous les leaders. Je croyais que le sénateur Massicotte en parlerait, parce que je viens tout juste de lire un excellent texte qu'il a rédigé sur le sujet.

Le sénateur Harder estime que cela pourrait être une bonne chose sur le plan organisationnel; peut-être une fois par mandat, il pourrait y avoir un caucus régional afin de désigner les sénateurs qui feront partie des comités. Toutefois, ce qui nous inquiète, c'est que cela pourrait prendre de l'ampleur et devenir le principal élément organisateur du Sénat. En fait, cela pourrait aller à l'encontre de l'intérêt national, si nous avons des caucus régionaux de façon permanente. Il n'y a rien de mal à en avoir un à l'occasion, mais je pense qu'on craint que cela devienne un élément organisationnel du Sénat.

J'aimerais que vous reveniez sur ce que je viens de dire à propos de l'opposition officielle par rapport à notre rôle de second examen objectif et des caucus régionaux.

Le sénateur Day : Merci, sénateur Eggleton.

Si nous sommes plus nombreux au Sénat, il y a de fortes chances qu'il y ait des sénateurs d'arrière-ban, comme à la Chambre des lords, mais Dieu merci, nous n'en sommes pas là. Tous les sénateurs ici travaillent fort, et c'est ce à quoi on s'attend d'eux.

Vous avez répondu à votre propre question concernant les caucus régionaux. J'ai lu le point de vue du sénateur Massicotte, entre autres, et j'abonde dans le même sens : cela ne sert à rien de créer quelque chose qui va exacerber les différences régionales. Nous sommes sénateurs pour l'ensemble du Canada, et la place que chaque région occupe dans le Canada est importante.

Lorsque je suis arrivé ici, j'ai été très impressionné de voir à quel point les comités réunissaient des sénateurs venant de différents milieux et de différentes régions du Canada. Je n'avais jamais eu l'occasion de discuter d'enjeux avec des collègues de partout au Canada dans ce genre de tribune, alors je trouvais cela très intéressant. Cela m'a amené à penser que nous devrions établir une règle pour nous assurer d'avoir des représentants de partout au pays au sein de nos comités et de veiller à ce que les différents points de vue soient exprimés. Je n'appuierais pas les caucus régionaux.

Je n'appuierais pas des caucus régionaux officiels au sein desquels les sénateurs se réuniraient régulièrement. Cela se fait déjà de façon informelle. Il est tout à fait naturel de discuter de certains enjeux, tels que les pipelines. D'ailleurs, à ce sujet, on voudrait peut-être voir le caucus régional de l'Alberta sur les pipelines et celui de la Colombie-Britannique se réunir de temps à autre pour discuter de leurs différences. C'est important, et ce type de discussions a déjà lieu.

Comme je l'ai dit tout à l'heure, en ce qui concerne l'opposition officielle, il faut que tous les sénateurs puissent exprimer leurs points de vue. Je conviens que si nous n'avons pas d'opposition officielle, nous n'aurons pas une équipe de trois personnes représentant l'opposition. Cela me paraît important.

L'un des rôles de l'opposition officielle à l'égard des projets de loi du gouvernement est de veiller à ce qu'il y ait un critique pour chacun des projets de loi. Habituellement, le critique va préparer de la documentation et expliquer à tous les autres le contenu du projet de loi. Cette personne n'est pas nécessairement obligée d'appuyer la mesure ou de s'y opposer.

C'est comme dans le système judiciaire : il n'y a pas que le procureur; il y a aussi l'avocat de la défense. On écoute les deux points de vue et cela nous mène au meilleur résultat.

Si on investit toutes les ressources du gouvernement dans les représentants du gouvernement, sans qu'il y ait une autre structure organisée, on pourrait se retrouver avec des situations confuses du côté de l'opposition.

Je suis d'accord avec vous. J'ai bien aimé la façon dont on a traité le projet de loi sur l'aide médicale à mourir. J'aimerais que tous nos projets de loi soient débattus de cette façon. Et ce ne sont pas tous les projets de loi qui sont aussi litigieux que celui-ci. Par ailleurs, on ne sait pas où en est rendu le projet de loi sur la GRC. On attend qu'il revienne, mais le gouvernement est encore en train d'examiner les amendements que nous avons proposés. Il s'agissait d'amendements judicieux, et c'est très bien. Il y aura d'autres mesures législatives comme celles-là. Je ne pense pas que nous en avons terminé.

[Français]

La sénatrice Tardif : Sénateur Day, merci pour votre présentation. J'aimerais revenir sur la question de l'opposition officielle.

Vous avez parlé du rôle important que joue une opposition officielle au Sénat selon le système de Westminster. Croyez-vous que cette opposition officielle, organisée, pourrait provenir d'un groupe ou d'un caucus qui ne serait pas lié à un parti politique?

Le sénateur Day : Oui. Je pense qu'il n'est pas nécessaire d'être membre d'un parti politique. Normalement, ce rôle est attribué au parti politique qui n'est pas celui qui est à la tête du gouvernement, soit le deuxième parti le plus important qui est représenté au Sénat, mais il n'est pas nécessaire de le faire de cette façon. Le sénateur Eggleton a suggéré, par exemple, un G3 de l'opposition.

Ce que j'aimerais voir — et je pense que c'est important —, c'est une structure qui permet que, lorsque le gouvernement présente un projet de loi, quelqu'un soit prêt à parler du revers de la médaille et du fait qu'il faut aussi considérer d'autres facteurs dans le cadre de l'étude de ce projet de loi. Une fois que le débat est lancé, tous les sénateurs peuvent y participer : les sénateurs d'un côté, les sénateurs de l'autre côté, ainsi que ceux qui seraient d'un troisième côté.

La sénatrice Tardif : Selon vous, ce qui a été traditionnellement le cas n'est pas nécessaire.

Le sénateur Day : Non.

La sénatrice Tardif : Pourvu que soit en place une opposition officielle organisée.

Le sénateur Day : Exactement.

[Traduction]

Le sénateur Greene : J'aimerais revenir sur les dernières questions, particulièrement sur l'idée d'une équipe représentant l'opposition, proposée par le sénateur Eggleton.

Cette idée a été avancée par le sénateur Harder, dans un article qu'il a rédigé la semaine dernière. L'une des choses qui m'ont impressionné à propos du caucus libéral indépendant et du groupe indépendant, c'est qu'ils ont des caucus ouverts. En gros, ils invitent tout le monde à venir participer aux réunions du caucus et à entendre les débats. Du côté des conservateurs, c'est totalement fermé. À moins que vous soyez membre du caucus, vous n'êtes jamais invité, encore moins Paul Massicotte. Jamais nous ne l'inviterions.

Le sénateur Massicotte : Ne soyez pas aussi partisan.

Le sénateur Greene : Toutefois, l'une des choses qui me préoccupent concernant le rôle de l'opposition officielle, c'est que du côté des conservateurs, nous n'essayons pas de rallier les gens à nos positions, mis à part les membres de notre caucus, alors que le représentant du gouvernement au Sénat a apparemment le mandat d'amener tous les sénateurs à appuyer un point de vue ou un projet de loi en particulier, peu importe qu'ils fassent partie du caucus, qu'ils soient indépendants ou qu'ils soient conservateurs. Il invite tous les sénateurs à assister aux séances d'information sur les projets de loi et ainsi de suite, alors que l'opposition officielle du côté des conservateurs n'invite que ses propres membres et n'essaie pas de rallier d'autres gens.

Il me semble que si nous voulons atteindre un équilibre — et c'est ce que je voudrais — entre le rôle du gouvernement et le rôle de l'opposition — officielle ou non —, on devrait assumer des rôles identiques. Il faudrait avoir des ressources et des pouvoirs égaux. Par conséquent, l'opposition officielle au Sénat pourrait être constituée de seulement trois personnes, ayant le même mandat de rallier tous les sénateurs, qu'ils soient dans l'opposition ou non — ce sera révélé en temps et lieu — et le parti auquel elles appartiennent, s'il y a lieu, n'aurait rien à voir avec leur rôle.

Le parti auquel elles appartiennent aurait un leader, comme vous l'êtes pour les libéraux, mais il y aurait aussi un représentant de l'opposition officielle pour faire contrepoids à ce rôle du côté du gouvernement. Ainsi, il y aurait deux points de ralliement. L'un deux serait en faveur du projet de loi à l'étude et l'autre serait contre. Les ressources seraient équivalentes. Les mandats seraient les mêmes. La seule chose qui serait différente, ce serait la capacité des deux parties de rallier tous les sénateurs à leur position, ce qui serait révélé au moment du vote.

Puis-je avoir votre avis là-dessus?

Le sénateur Day : Ce sont des points très intéressants que nous pourrions étudier davantage relativement aux conséquences potentielles imprévues.

J'irais plus loin en disant qu'on ne choisirait pas nécessairement les trois membres de l'opposition à partir d'un parti politique organisé au sein du Sénat. Au contraire, il s'agirait de trois personnes, tout comme le sénateur Harder et son groupe, qui n'auraient pas un groupe de personnes derrière elles. Elles devraient donc trouver des parrains. Elles ne peuvent pas tout parrainer; elles doivent trouver des parrains au sein du Sénat pour les projets de loi du gouvernement.

Le rôle de l'opposition est de trouver un critique. Pourquoi ces trois personnes n'auraient-elles pas droit aux mêmes ressources que l'équipe représentant le gouvernement, sans faire partie d'un vaste groupe qui les appuie? Elles seraient seules, tout comme le sénateur Harder.

Le sénateur Greene : Je suis d'accord avec vous. La façon dont elles sont choisies, cependant, est importante, tout comme l'équipe représentant le gouvernement est choisie par le gouvernement et le Cabinet. L'équipe représentant l'opposition serait choisie par l'opposition à la Chambre des communes, selon moi.

Le sénateur Day : Je n'en suis pas convaincu. Ces personnes pourraient être choisies par le Sénat. Nous avons besoin d'une personne pour nous aider. Chaque fois qu'un projet de loi du gouvernement est présenté, nous devons bien le comprendre et forger notre propre opinion, qui n'est pas nécessairement celle du gouvernement.

La sénatrice Stewart Olsen : Vous parlez d'un grand club de débat, à ce moment-là. Je ne suis pas sûre que ce soit au service du pays.

Le sénateur Joyal : J'ai écouté attentivement la proposition du sénateur Greene. J'ai participé à deux séances d'information, une à propos du projet de loi C-16 et une autre sur le projet de loi S-4, un projet de loi du gouvernement. J'ai assisté à ces réunions, de la même façon que si elles avaient été convoquées par le ministre de la Justice ou le ministre du Travail.

Pour un sénateur, assister à une séance d'information du représentant du gouvernement sur la teneur d'un projet de loi n'est pas la même chose, à mon avis, que d'avoir une réunion avec des collègues aux vues similaires au cours de laquelle on échange des points de vue et on se concerte pour appuyer le projet de loi, s'y opposer ou y proposer des amendements.

Lorsque j'ai assisté aux deux séances d'information convoquées par le sénateur Harder, je n'avais pas l'impression de participer à un caucus. C'est tout simplement comme si j'avais accepté de prendre part à une séance d'information d'un ministre destinée à tous les sénateurs qui veulent en savoir davantage au sujet du projet de loi. Cela ne veut pas dire que j'adhérais aux points de vue qui étaient exprimés. En fait, si j'ai une question qui a une incidence politique, les représentants du ministère ne seront pas en mesure de me répondre. C'est donc à nous, au sein de notre groupe d'optique commune, de déterminer si un tel argument politique doit être présenté, débattu au Sénat, partagé ou s'il doit se retrouver dans un amendement au projet de loi. Si vous assistez à une séance d'information du gouvernement et que vous proposez un amendement, il n'y a aucune chance qu'on vous dise : « Votre idée est formidable, et nous allons modifier le projet de loi. » Soyons réalistes.

J'ai émis des réserves au caucus du gouvernement. Je ne sens pas que j'ai participé à un caucus du gouvernement. J'ai déjà fait partie d'un caucus du gouvernement, et ce sont deux sortes de rencontres différentes. C'est pour cette raison que je séparerais les deux exercices. C'est très important d'assister à une séance d'information du gouvernement sur un projet de loi pour en faciliter son étude personnelle, car on vous fournit de l'information brute ou contextuelle, ce que je trouve juste — cela me facilite la tâche, d'une certaine façon —; or, cela ne signifie pas du tout que je m'engage à appuyer la mesure législative.

Actuellement, le gouvernement tient d'abord une séance d'information. Ensuite, quand le projet de loi est déposé à la Chambre et le débat commence, nous nous attendons à ce que quelqu'un soit le porte-parole de la mesure législative. Le rôle du porte-parole est vraiment d'essayer de mettre le doigt sur des éléments auxquels la mesure législative ne répond pas, ou sur des améliorations ou des détails nécessaires que le gouvernement n'a pas inclus dans la mesure.

D'après moi, c'est parfois beaucoup plus important d'écouter le porte-parole que le représentant du gouvernement parce que c'est le porte-parole qui lance le débat, et non la proposition gouvernementale. La proposition gouvernementale vient d'un parti politique, qui a ses propres objectifs et des intérêts politiques partisans. Ce que le porte-parole fait en s'exprimant, en analysant le projet de loi et en mettant le doigt sur les faiblesses ou d'autres éléments du projet de loi, c'est là le réel exercice. C'est là que commence réellement l'exercice de la démocratie dans la Chambre.

Ce rôle doit être confié à quelqu'un. J'appuie tout à fait l'approche mentionnée par le sénateur Greene. Quelqu'un doit être responsable d'organiser cela et d'inviter tous les sénateurs à venir écouter les arguments que l'opposition pourrait vouloir donner. Cette façon de procéder n'empêche pas qu'une fois que le débat est terminé et que nous avons une multiplicité d'opinions, un autre aspect du projet de loi soit aussi présenté; à la fin, la Chambre sera bien placée pour prendre une décision.

Je crois sincèrement qu'au quotidien, le débat doit être structuré; sinon, nous allons simplement déclarer que personne ne veut se prononcer sur un sujet et la discussion s'arrêtera là. Quelqu'un doit être chargé de critiquer le sens et d'analyser le projet de loi, de mettre le doigt sur certains aspects propres à la mesure législative. C'est ainsi que le second examen objectif est effectué. Je suis tout à fait ouvert à l'idée que quiconque ait entière liberté d'action par rapport à toute mesure législative; néanmoins, le vote par lequel nous décidons de rejeter ou de modifier une mesure législative doit être structuré dans le cadre institutionnel de la Chambre. C'est là que je veux en venir depuis le début; c'est pourquoi j'ai demandé comment structurer le débat. C'est la question à laquelle nous tentons de répondre quant à notre mandat; c'est là que nous en sommes à la deuxième étape de notre réflexion.

Il faut comprendre que le système permet amplement d'adopter des points de vue indépendants dans la Chambre. J'ai tenté d'exprimer cette préoccupation durant nos séances. Nous sommes près de trouver un terrain d'entente relativement à la façon dont le Sénat pourrait procéder pour améliorer les débats. Au fond, c'est cela qui fait la crédibilité du Sénat.

Le sénateur Day : Tout à fait. J'appuie tout ce que mon collègue, le sénateur Joyal, vient de dire.

Monsieur le président, avant que vous me donniez congé, permettez-moi de vous remercier, vous et tous mes honorables collègues, pour deux heures très intéressantes.

Le président : Merci, sénateur Day. Votre exposé a été bien accueilli et il a donné lieu à beaucoup de questions et d'échanges. Merci beaucoup. C'est évident que vous y avez mis beaucoup de réflexions et d'efforts.

Le comité de direction se réunira demain.

La sénatrice McCoy : Je n'étais pas au courant.

Le président : Je viendrai vous chercher.

Dans tous les cas, la semaine prochaine, nous accueillerons le sénateur Mercer et nous étudierons son projet de loi, le projet de loi S-213. Nous recevrons ce dossier. Ensuite, il y a un certain nombre de témoins que nous aimerions accueillir en décembre, avant la pause. Les personnes en question sont la professeure Meg Russell, lord Lisvane, le professeur Phillip Lagassé et un autre témoin qui n'a pas encore été confirmé, Andrew Heard. C'est ce que nous aimerions réussir à faire avant Noël.

Le sénateur Massicotte : Lorsque le temps le permettra, j'aimerais bien que le comité ait une discussion sur le rôle qu'il devrait jouer pour faire avancer toutes les motions et les recommandations. Nous nous sommes entendus sur 21 recommandations. Qu'en ferons-nous? Devrions-nous prendre des mesures pour les faire avancer, les promouvoir et encourager nos collègues à les accepter?

Le président : C'est le prochain sujet que j'allais aborder. Je ne suis pas satisfait du point où certaines d'entre elles sont rendues. Nous ne menons pas les travaux du Sénat, mais nous avons un tableau qui montre exactement où chacune des recommandations est rendue. C'est un des points à l'ordre du jour du comité de direction. Je veux les voir avancer. Il y en a trois en particulier qui devraient être expédiées, dans la mesure du possible.

Lorsque quelqu'un propose la clôture, parlez-en. Notre comité a déployé beaucoup d'efforts pour en arriver aux recommandations, alors passons à la prochaine étape et approuvons-les ou rejetons-les. Nous y travaillons. Je suis le dossier de près. Nous avons été très patients, mais le temps est venu d'agir.

Le sénateur Eggleton : Le temps est venu de faire bouger les gens qui les bloquent et qui n'en parlent pas.

Le président : Tout à fait.

Le sénateur Joyal : À ce sujet, monsieur le président, quelle est la stratégie concernant l'échéancier?

Le président : Dès que possible. Personne ne veut devoir mettre un terme au débat. Si 15 personnes veulent intervenir, laissez-les parler. En même temps, soyons réalistes : il faut aller de l'avant.

Il y a trois recommandations en particulier qui prendront beaucoup de temps à être adoptées si elles sont envoyées au comité du Règlement et de la procédure. Voilà pourquoi il faut les faire adopter. C'est problématique qu'elles soient là depuis si longtemps et que personne n'en parle.

La sénatrice McCoy : Pour les recommandations 7 et 8 — je ne sais pas quel est le numéro dans le rapport —, notre échéance est aujourd'hui. Nous avions dit qu'elles devraient être soumises au comité du Règlement et au comité de la régie interne et retournées au Sénat aujourd'hui.

J'ai préparé un amendement pour différer l'échéance. C'est peut-être ce que nous devrions faire. Je ne peux pas le présenter parce que je me suis déjà prononcée sur la motion. J'en serais très reconnaissante. Le sénateur Sibbeston a demandé un ajournement. Je ne sais pas s'il est dans la Chambre.

Le sénateur Joyal : Il est absent cette semaine.

La sénatrice McCoy : Il n'est pas dans la Chambre aujourd'hui. Je m'en remets à tous. Que serait-il raisonnable de faire?

Le sénateur Tannas : Je travaille avec l'administration à un amendement précisément à ce sujet, mais le mien contient deux parties. D'abord, évidemment, il y a la question de l'échéance. J'ai eu des conversations avec le sénateur White sur la façon dont le comité du Règlement traitera le dossier. C'est très logique d'inclure aussi dans l'amendement des instructions à l'intention de l'administration. Pendant notre pause de janvier, elle peut cerner des modifications précises à apporter au Règlement. Ainsi, quand le Comité du Règlement sera saisi du dossier, il n'aura pas à se demander par où commencer. Mettons les travaux en train pour que nous puissions les poursuivre en février. Si nous pouvons présenter un amendement qui lance les travaux pendant notre absence, je pense que c'est important de le faire.

Michel Patrice travaille donc à un amendement en ce sens, et j'aimerais le présenter. Je ne me suis pas encore prononcé sur les recommandations relatives aux caucus et aux comités. Mon intention était d'obtenir l'amendement.

La sénatrice McCoy : Pouvez-vous présenter l'amendement aujourd'hui?

Le sénateur Tannas : Non. Il n'est pas encore prêt. Il devait parler à une autre personne concernant la procédure.

Le sénateur Eggleton : Les recommandations 7, 8 et 21 du comité ne sont-elles pas assez explicites pour que le Comité du Règlement les suive?

Le sénateur Tannas : Les recommandations stipulent que nous donnions instruction au Comité du Règlement. L'idée est vraiment de charger l'administration de préparer les scénarios afin que le Comité du Règlement ait quelque chose à examiner.

La sénatrice McCoy : Je ne me rappelle pas si mon personnel avait parlé à Till Heyde plutôt qu'à Michel, ou à un des greffiers au bureau. J'essaie de me souvenir s'ils m'ont dit que si la motion n'est pas adoptée le 1er décembre — il sera trop tard si nous ne l'amendons pas aujourd'hui —, nous ne pourrons pas adopter une motion dont l'échéance serait hier. Je pense donc qu'il faut présenter l'amendement aujourd'hui.

Vous pourriez présenter l'amendement aujourd'hui et le modifier plus tard.

Le sénateur Tannas : Obtenons une réponse.

Le président : Pouvons-nous poursuivre à huis clos? Êtes-vous d'accord?

Des voix : Oui.

(La séance se poursuit à huis clos.)

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