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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 36e Législature
Volume 137, Numéro 76

Le jeudi 18 juin 1998
L'honorable Gildas L. Molgat, Président


LE SÉNAT

Le jeudi 18 juin 1998

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction

L'honorable Jacques Hébert
L'honorable Philippe Deane Gigantès

Hommages à l'occasion de leur départ à la retraite

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, l'un des plus grands intellectuels et journalistes québécois, André Laurendeau, le rédacteur en chef du quotidien Le Devoir dans la société guindée du Québec d'après-guerre, a dit une fois du journal militant Cité libre que c'était un journal qui disait tout haut ce que d'autres pensaient tout bas. Pour le sénateur Jacques Hébert, rédacteur de l'hebdomadaire à l'esprit réformateur Vrai, administrateur et membre du comité de rédaction de Cité libre et membre de cette génération fascinante des Citélibristes, la lutte contre l'autoritarisme a été menée en première ligne au sein d'une société en pleine révolution interne alors que naissait un monde nouveau.

C'était une génération connue pour sa défense des droits et des libertés de la personne et pour sa condamnation de l'égocentrisme et de l'intolérance associés à l'idéal nationaliste inflexible et rigide. C'était une génération connue pour sa passion des droits de l'homme et de la liberté. C'était une génération de citoyens du monde.

Dans Deux innocents en Chine rouge, Hébert et Trudeau racontent le premier voyage qu'ils ont effectué ensemble en 1960, mais font remarquer qu'à eux deux, ils ont fait quatre fois le tour du monde, vogué à peu près sur toutes les mers et exploré à fond cinq continents. C'étaient des gens qui criaient tout haut, par-dessus les toits, leur engagement à l'égard de l'ouverture, de la démocratie et du pluralisme politique, ethnique et religieux, ainsi que leur profond amour pour cette vaste fédération, pour la diversité qui fait la force et pour le rêve de compromis et de coopération que le Canada symbolise partout sur la planète.

Le regretté Gérard Pelletier a su capturer l'esprit de beaucoup de ses collègues de l'époque. Il a capturé l'esprit du Québec à la veille de la Révolution tranquille lorsqu'il a dit:

Nous avons été la première génération à dire [...] nous allons rester chez nous et changer les choses de l'intérieur.

Et ils ont certainement changé les choses.

Aujourd'hui, nous honorons le sénateur Jacques Hébert, un homme pour qui la plume était le moteur de la liberté, un esprit révolutionnaire à beaucoup d'égards, qui a passé une grande partie de sa vie à essayer sans relâche de changer sa province, son pays et même le monde.

Honorables sénateurs, nous honorons aujourd'hui un voyageur pour qui la récompense ultime était le voyage lui-même. Nous honorons un officier de l'Ordre du Canada, un chevalier de l'Ordre de la Pléiade et un chevalier de l'Ordre de Malte. Nous honorons l'auteur de 35 ouvrages en trois langues. Nous honorons un des architectes d'un nouveau droit mondial.

(1410)

Le sénateur Hébert a commencé comme journaliste dans sa province, enregistrant en particulier les conséquences profondément émouvantes d'une des premières luttes pour les libertés démocratiques au Québec, la grève de l'amiante de 1949. C'est la grève historique pendant laquelle un homme - un ami qui lui ressemblait à bien des égards - un homme nommé Pierre Trudeau, s'est adressé à 5 000 mineurs et les a tenus en haleine.

Avec Jean Marchand et Gérard Pelletier, entre autres, tous témoins des événements dramatiques d'Asbestos, Jacques s'est rapidement fait la réputation de suivre la voie étroite, celle de l'idéalisme politique, spirituel et intellectuel.

[Français]

Il chemine toujours en dehors des sentiers battus et il n'obéit jamais à aucun diktat hors ceux de sa conscience.

[Traduction]

Dès cette époque et de façon constante au cours des décennies, il s'est laissé guider par sa conscience. Lorsque Jacques a écrit J'accuse les assassins de Coffin, en 1964, un livre qui a failli le faire mettre en prison, son ami et âme soeur Pierre Trudeau a réussi à lui éviter la prison devant la Cour d'appel du Québec. Il est devenu le président fondateur de la Ligue des droits et libertés du Québec et il a commencé à écrire sur le monde en développement avec l'éminent Maurice F. Strong.

[Français]

Mais ce sont les jeunes d'ici et d'ailleurs qui demeurent sa vraie passion.

[Traduction]

En 1986, lorsque le sénateur Hébert a entrepris sa grève de la faim de 21 jours, grève maintenant historique, pour sauver le programme Katimavik qu'il aimait tant, un jeune bénévole l'a aidé à passer le temps en lui lisant des passages du livre Le Petit Prince de Saint-Exupéry. Une des merveilleuses lignes que ce jeune bénévole doit avoir savourée alors qu'il passait de longues heures à lire des passages de ce livre à l'extérieur du hall du Sénat est devenue l'une des grandes citations du monde occidental:

[Français]

On ne voit bien qu'avec le coeur, l'essentiel est invisible pour les yeux.

[Traduction]

Le sénateur Hébert a donc laissé parler son coeur. Au cours des 25 dernières années, il s'est surtout engagé auprès des jeunes du Canada et du monde entier. Le fondateur de Jeunesse Canada Monde et Katimavik a déclaré que les jeunes pouvaient, en travaillant ensemble, apprendre à surmonter pratiquement tous les obstacles. Grâce à ces deux programmes d'échange de jeunes, il croyait que des milliers de jeunes apprenaient des choses que l'école ne pouvait leur enseigner. Il a déclaré qu'on préparait les jeunes à la vie. On enseignait aux jeunes que l'éducation est inséparable du service, de la justice et de la vérité.

Pour des milliers de jeunes, ces programmes étaient un moyen de se réaliser et d'accepter des valeurs autres que les leurs. Ils étaient synonymes d'ouverture sur les autres, d'autonomie et d'initiative. Ils signifiaient également sociabilité, éducation et fraternité.

[Français]

L'expérience nous démontre que c'est en regardant ensemble dans la même direction que s'accomplissent les plus grandes réalisations.

[Traduction]

Le fait de regarder ensemble dans la même direction reflète un sens des responsabilités, une conscience sociale et une préoccupation pour les autres. Les programmes d'échange de jeunes visaient et visent à bâtir de nouveaux mondes et de nouvelles sociétés. Ils portaient et portent sur le rôle central des jeunes dans l'évolution de sociétés tolérantes et civilisées qui serviront de catalyseur à la paix mondiale à l'avenir. Ces programmes étaient et sont fondés sur l'idée que, pour aller de l'avant, il faut retourner vers les pouvoirs qui sont à l'intérieur de nous-mêmes.

Comme Pablo Picasso l'a si justement fait remarquer, nombreux parmi nous sont ceux qui mettent beaucoup de temps à devenir jeunes. Contrairement à un si grand nombre d'entre nous, le sénateur Hébert n'a pas pris beaucoup de temps à comprendre les simples réalités, les rêves et les espoirs de nos jeunes. Il a eu très vite la capacité de voir avec le coeur, cette capacité qui était la prérogative spéciale du Petit Prince de Saint-Exupéry et que beaucoup d'entre nous ont du mal à retrouver.

[Français]

Merci, Jacques, d'avoir été pour nous une grande source d'inspiration comme whip et comme gardien de notre conscience. Merci surtout de ta loyauté et de ta grande amitié.

[Traduction]

Des voix: Bravo!

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, j'ai assisté, l'automne dernier, à la pièce de Shaw, Major Barbara, au théâtre Neptune de Halifax. Je me souviens très distinctement de cette célèbre réplique, à l'Acte I: Personne ne peut dire un mot contre le grec: c'est la marque d'une bonne éducation.

Philippe, malgré l'humour caustique du grand dramaturge, je vous ai toujours admiré, précisément pour votre éducation et pour la pureté et la puissance de votre esprit. Je vous confesse que j'ai souvent été très impressionné par la précision de votre pensée et la nature si pénétrante de votre intelligence. Vous êtes peut-être un homme brillant. Je le dis sans impertinence, vous qui nous avez conseillé d'éviter l'emploi de ce mot lorsque nous résumons la carrière de sénateurs qui partent à la retraite, comme le pauvre vieux sénateur Blogs, ce personnage que vous avez inventé.

Peut-être vaudrait-il mieux éviter le mot «brillant» et tenir plutôt le langage suivant, inspiré du classique Hamlet:

Honorables sénateurs, le sénateur Gigantès est un homme, un vrai, jamais nous ne reverrons son pareil.

Voilà le vrai, l'homme des multitudes. Par où commencerai-je? Par le baptême du feu sur le champ de bataille et par l'homme aux nombreux noms? Dois-je évoquer le souvenir de son père, un héros de guerre grec souvent décoré et celui d'un ancêtre courageux qui a combattu les Turcs à la bataille de Lépante? Faut-il rappeler sa carrière de journaliste au London Observer, puis à la Gazette de Montréal; ses présences répétées à l'émission Point de Mire, animée par René Lévesque, et le rôle d'intermédiaire qu'il a joué ultérieurement en présentant René Lévesque à Pierre Trudeau? Faut-il évoquer ses états de service sur des torpilleurs de la Marine royale durant la Seconde Guerre mondiale ou l'époque fascinante où il déconseillait vivement au jeune roi Constantin de tenter un coup d'État contre le premier ministre de l'époque?

Au cours d'observations qu'il faisait récemment au Sénat, le sénateur Gigantès nous a tous conseillés, fort judicieusement, d'être brefs dans nos discours. Lui qui a cependant livré l'un des plus longs discours de l'histoire du Parlement canadien, reprend maintenant à son compte les paroles de l'Écclésiaste: Sois sobre de discours.

S'il est vrai que la concision est l'essence de l'intelligence, Philippe est certainement un brillant interprète de cet aphorisme. Le sénateur est aussi un interprète de premier ordre d'un autre aphorisme selon lequel l'intelligence est plus souvent un bouclier qu'une lance.

(1420)

Peut-on prétendre que l'intelligence est un bouclier contre la vie? Ou peut-être un bouclier qui sert à protéger un esprit noble et passionné, tout aussi noble et passionné que ce chef-d'oeuvre de la nature, l'éléphant, souvent représenté sur ses fixe-cravate ou ses dessins, sous les traits de personnages de bandes dessinées qui semblent être synonymes de l'approbation et de la désapprobation de la joie et de la tristesse du sénateur Gigantès, le regard peut-être tourné vers l'intérieur?

Le sénateur Gigantès a été témoin, tout jeune, des horreurs de la guerre, d'abord dans son propre pays durant la Seconde Guerre mondiale, puis lorsqu'il a dû fuir en Palestine, sous mandat britannique. Plus tard, en tant que jeune journaliste en Corée, il a été capturé et a subi 33 mois de torture en tant que prisonnier de guerre de la Corée du Nord.

J'ai lu certains des comptes rendus que le sénateur Gigantès faisait de cette époque, il y a quelques mois, à la presse canadienne. Comme toujours, c'était du pur Gigantès, raconté avec enthousiasme, humour et esprit.

Laissons là le passé. Bien peu d'entre nous ont connu ces histoires d'horreur. Cet homme, qui a su tirer de sa grande souffrance beaucoup de sagesse, a dit aux Canadiens que la prochaine guerre ne laisserait aucune issue, aucun survivant, aucun ancien combattant.

[Français]

Pensons au sénateur qui a mis son énergie et sa grande joie de vivre au service de cette institution, qui a toujours su, par ses écrits et ses allocutions, se faire le défenseur du Sénat.

[Traduction]

Pour finir, j'aimerais parler un peu du Gigantès au grand coeur que l'on trouve dans un endroit bien spécial au Canada. En des mots très simples dans la préface de son livre A Road Ahead, il dit en substance:

Je suis Canadien par choix. J'ai fait ce choix la veille de Noël en 1950, dans un camp de prisonniers de guerre en Corée du Nord. Autour de moi les gens mouraient de maladie, de froid, de faim et de désespoir. C'est alors que j'ai décidé que je survivrais et que je vivrais par la suite heureux pour le reste de mes jours au Canada. J'ai travaillé ou étudié dans 59 pays ou encore écrit sur eux. J'aurais pu choisir la Grande-Bretagne, la France, la Grèce ou les É-U. pour m'installer. Mais les gens que j'ai le plus aimés ont toujours été des Canadiens. Dans mon périple à travers les continents, avant mon arrivée au Canada, j'ai toujours visité l'ambassade canadienne des pays où je me trouvais, à la recherche d'amitié et de confiance et je n'ai jamais été déçu. Depuis mon arrivée au Canada, j'ai toujours été traité aussi bien qu'un natif, si ce n'est mieux. J'ai écrit ce livre en remerciement des 25 années merveilleuses que j'ai passées au Canada.

Philippe, aujourd'hui, c'est à nous de vous remercier.

[Français]

Merci à vous, homme de coeur, de grande intelligence et d'une force peu commune. Votre vif esprit et votre sens de l'humour nous manqueront ainsi que vos manifestations d'impatience à l'égard du statu quo.

[Traduction]

Nous remercions en vous, Philippe, un homme de plusieurs langues et de plusieurs aventures, un homme de plusieurs pays. Nous vous remercions surtout de nous avoir choisis.

Des voix: Bravo!

L'honorable Sharon Carstairs (leader ajoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avant de me joindre au Sénat, j'en connaissais déjà quelques membres, la plupart de réputation et non personnellement. J'ai toujours pensé qu'il y avait un géant parmi les sénateurs. Celui-ci avait pour nom Jacques Hébert. J'ai passé la majeure partie de mes premières années de travail avec les jeunes. Pour ceux d'entre nous qui avons choisi de faire carrière dans l'enseignement ou qui avions la vocation, Jacques Hébert était le symbole de l'attention, des soins et du dévouement dont les jeunes Canadiens avaient besoin pour devenir des membres à part entière, non seulement de la famille canadienne, mais de la race humaine.

Depuis que le premier ministre m'a nommée au poste de leader adjoint du gouvernement, au mois de septembre dernier, Jacques Hébert est devenu mon ami. En plus d'avoir le même amour pour les jeunes, nous avions des rapports commandés par le travail quotidien, ce qui fait que nous nous visitions dans nos bureaux respectifs au moins deux ou trois fois par jour.

Honorables sénateurs, cet homme a toute la dévotion de son personnel. Ses employés lui sont attachés parce qu'ils savent à quel point il a leur bien à coeur.

Jacques Hébert est un homme d'amour. Il aime son pays, ses concitoyens et les citoyens du monde. Ce fut un très grand honneur et un privilège pour moi que de travailler avec lui. Il m'a appris qu'on ne doit jamais cesser de s'occuper des autres. Il m'a montré qu'il faut tendre la main aux jeunes, parce qu'ils représentent notre avenir. Il m'a donné envie d'être comme lui - jeune pour toujours.

Honorables sénateurs, on tend généralement à abuser du mot «aimer», mais je veux qu'on puisse lire dans le compte rendu que j'aime Jacques Hébert. J'aime son état d'esprit, son mode de pensée et tout ce qu'il est. Il me manquera énormément.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, je pense avec beaucoup de tristesse que le sénateur Gigantès ne sera bientôt plus notre collègue.

La pensée du sénateur Gigantès évoque en moi des souvenirs intéressants. Mon premier souvenir remonte à la première fois où je l'ai rencontré. C'était chez nous, à côté de la piscine, par une chaude soirée d'été. Ce soir-là, il avait diverti, comme il sait si bien le faire, un groupe de jeunes littéralement rassemblé à ses pieds.

Je me souviens aussi du jour où il a dansé la valse avec ma fille Cathi, dans son bureau. On peut se demander comment c'est arrivé. C'est que je venais tout juste d'être nommée, qu'il déménageait dans l'édifice du Centre et qu'on me proposait de prendre son bureau. Je suis allée visiter le bureau avec Catherine. Elle était un peu déconcertée, c'est le moins qu'on puisse dire, mais quand elle a appris combien il s'intéressait au sort des autres et comme il aimait s'amuser, elle s'est immédiatement sentie proche de lui.

Je me souviens évidemment aussi de la douleur manifeste qu'a été pour lui la perte de sa femme et, peu de temps après, de son frère. Je me souviens de la dignité qu'il gardait dans sa détresse, même si l'on voyait nettement qu'il était en colère contre le sort qu'ils avaient connu et qu'il devait subir aussi.

Mais ce dont je me souviendrai plus que tout, c'est l'appui qu'il m'a manifesté quand j'ai été nommée leader adjoint. Philippe venait régulièrement faire un tour dans mon bureau rien que pour me faire savoir qu'il était là pour m'appuyer. Il pensait que je ne m'en rendais pas compte, mais j'en étais parfaitement consciente, et j'appréciais beaucoup son appui.

Honorables sénateurs, nous sommes très chanceux d'avoir ici des hommes et des femmes de l'envergure de Philippe Deane Gigantès. Quand il partira, au cours de l'été, il emportera une pleine mesure de respect, d'amour et d'affection de ma part.

Des voix: Bravo!

[Français]

L'honorable Normand Grimard: Honorables sénateurs, personnellement, j'ai eu le plaisir d'effectuer un voyage à Cuba avec le sénateur Hébert et cinq autres députés, en janvier 1995, dans le cadre de l'Association parlementaire d'amitié Canada-Cuba qu'il présidait à ce moment.

(1430)

Je fus pour lui «le néanmoins sympathique collègue conservateur, Normand Grimard», comme je me suis amusé à le lire dans son compte rendu qu'il publia dans la revue Cité libre de mai-juin 1995.

À cette occasion, j'ai surtout appris comment le sénateur Hébert voyageait; se mêlant aux citoyens du pays, visitant leur famille, s'informant d'eux. J'ai pu aussi comprendre, du moins je l'ai imaginé, comment il avait pu déjà parcourir le monde avec un autre Québécois, encore vivant, qui est devenu premier ministre du Canada.

Ce voyage à Cuba m'a permis d'apprécier le sénateur Hébert, de le découvrir, de le juger sous un autre jour, tâche peut-être encore plus ardue pour un adversaire, surtout un conservateur nommé comme je l'ai été par le premier ministre Mulroney, à l'époque de la bataille pour l'adoption de la TPS.

J'ai également eu l'occasion d'apprécier encore davantage le sénateur Hébert lorsque nous avons travaillé ensemble au moment de la visite de la délégation cubaine au Canada, présidée par le ministre de l'Éducation, un ami du sénateur Hébert. Ce ministre était accompagné de quelques parlementaires cubains.

Presque tous les jours, durant les semaines précédant ce voyage, j'étais dans son bureau et je vous avouerai, sénateur Hébert, que mes collègues de ce côté de la Chambre pensaient que vous et moi étions en train de travailler un passage d'un côté à l'autre de la Chambre. En réalité, nous travaillions ensemble à l'organisation de ce voyage.

Vous vous souvenez qu'à un moment donné, parce que vous avez un grand coeur, ce que des fois on n'apprécie pas ou on ne connaît pas, vous aviez de grandes idées et vous saviez que nos moyens était limités. Je vous ai dit: «Sénateur, continuez à avoir vos grandes idées, mais laissez-moi administrer les dollars. Je vous promets qu'à la fin, nous allons avoir un surplus», ce qui est arrivé. Alors nos collègues on fait un voyage merveilleux à Montréal, à Ottawa, à Toronto, sans compter la visite à Niagara. Grâce au travail que vous avez effectué et grâce à mon administration financière, tout s'est terminé avec un surplus pour l'organisation du voyage Canada-Cuba.

Le sénateur Hébert se présente sous le dehors froid d'un vieux loup de mer, si nous tentons peut-être une comparaison avec Ernest Hemingway, qui lui aussi allait souvent à Cuba.

Mais mieux le connaître m'a donné la chance de découvrir, et je pèse mes mots, quel homme chaleureux, dévoué, affable et combien serviable se cache derrière ces apparences.

Dois-je dire que le sénateur Hébert et moi différions parfois d'avis et souvent, même? Lui? Un adversaire acharné de Maurice Duplessis. Et moi? Un admirateur tout aussi inconditionnel de l'ancien premier ministre du Québec. En conséquence, le sénateur voudra sans doute sourire en se souvenant, aujourd'hui, des fois où lui et moi avons dû laisser des points de suspension, dans nos discussions, quand nous arrivions à ce sujet névralgique et très délicat.

J'aimerais, en terminant, relever une autre qualité du sénateur Hébert. Il s'agit, à mon point de vue, de son titre de grand Canadien et de vibrant fédéraliste qui, au Québec, quelle que fût la mesquinerie déployée, n'a jamais craint de clamer les beautés et l'attrait qu'exerçait sur lui un pays aussi unique que le Canada.

Donc, au sénateur Hébert, à l'ex-éditeur et à l'auteur, au journaliste encore à l'affût, nous souhaitons une joyeuse retraite, maintenant que la Constitution et l'âge le forcent à abandonner son bâton de whip du parti au pouvoir.

J'ajoute que mon épouse, que vous connaissez bien, partage également les mêmes sentiments que j'ai envers vous.

[Traduction]

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, je suis heureux d'avoir l'occasion d'intervenir aujourd'hui pour rendre hommage à deux de nos honorables collègues de la division sénatoriale du Québec, soit le sénateur Hébert et le sénateur Gigantès, qui doivent nous quitter, ayant atteint l'âge obligatoire de la retraite, ce qui est contraire à l'article 15 de la Charte des droits et libertés. Avant de quitter le Sénat, mon ancien compagnon de banquette, le sénateur Doyle, s'est levé et a crié: «Quatre autres années!» Je laisse le soin aux gens d'en face de présenter cette requête aujourd'hui.

Honorables sénateurs, j'ai rencontré Jacques Hébert pour la première fois il y a plus de 30 ans. Le sous-secrétaire d'État de l'époque, le très honorable Jules Léger, qui deviendrait plus tard Gouverneur général, avait convoqué à une réunion un certain nombre de Canadiens pour examiner les programmes auxquels le Canada pourrait participer dans le domaine de la défense des droits de la personne. Depuis ce temps, je suis la carrière de Jacques.

Le sénateur Gigantès et le sénateur Hébert sont de grands amis. Le fait qu'ils doivent quitter le Sénat en même temps est une coïncidence fort intéressante. Il convient également de souligner de façon toute spéciale que ces deux sénateurs nous viennent du Québec. La grande province de Québec au Canada offre à tous les Canadiens de souche et à tous les Canadiens d'adoption l'occasion de servir leur pays aux plus hauts niveaux, sans être victimes de discrimination. Tous les Canadiens sont égaux et peuvent profiter de tous les avantages qu'offre le Canada qu'imaginait le sénateur Gigantès lorsqu'il a décidé de s'établir dans notre pays.

Nous nous souvenons tous de la nouvelle appellation que le sénateur Hébert avait trouvée pour le foyer du Sénat. Il l'appelait un deuxième chez-soi sans cafétéria. Toutefois, ce n'est que ces derniers temps qu'en qualité de whip de ce côté-ci, j'ai eu l'occasion de travailler en étroite collaboration avec le sénateur Hébert, puisqu'il occupait le poste de whip en chef du gouvernement. Il s'est toujours montré très direct, pratique et professionnel. J'ai bien aimé collaborer avec le sénateur Hébert en sa qualité de whip en chef du gouvernement.

(1440)

Le sénateur Gigantès qui, comme on le sait, est un avide lecteur de la Bible, avait attiré mon attention, il y a huit ans, quand je suis arrivé pendant une période beaucoup plus turbulente. Je me souviens de lui, assis à une table spéciale devant le siège qu'occupe maintenant le sénateur Graham, en train de lire la Bible. Le sénateur Doody était là lui aussi. Depuis, cet endroit est devenu plus courtois et civil.

Honorables sénateurs, je dois dire que j'aime beaucoup l'histoire d'Antigone telle que racontée par Sophocle. Le roi Créon avait décrété que, puisqu'il avait commis un crime pour lequel il avait été exécuté, le frère d'Antigone ne pouvait pas être enterré, mais cette dernière, convaincue qu'il existait une loi supérieure, décida qu'il était de son devoir d'aller à l'encontre du décret du roi et d'enterrer la dépouille de son frère. Convoquée devant le roi qui lui demanda: «Pourquoi as-tu enfreint mes ordres?», elle répondit que c'était parce qu'il existait des lois supérieures à celles des hommes et du roi.

D'une certaine manière, le sénateur Gigantès incarne cette grande tradition. C'était particulièrement visible pendant les travaux du comité des affaires juridiques et constitutionnelles. Il prenait à partie les fonctionnaires du ministère de la Justice qui tentaient de défendre une mesure législative rédigée dans un langage moins que clair et simple, insistant toujours avec éloquence sur la nécessité de s'exprimer d'une manière plus directe.

Je pense aussi à Platon quand je pense au sénateur Gigantès. Nous connaissons l'histoire des ombres de la caverne de Platon. Je me suis souvent dit que l'ombre que le sénateur Gigantès voyait était celle d'un éléphant et tout comme on associe de nombreux principes idéalistes aux ombres de Platon, avec le sénateur Gigantès, il y a toujours eu un idéaliste dans les rangs d'en face.

J'avais pensé parler de Socrate et de la ciguë, mais j'ai craint que ce ne soit mal interprété, alors j'ai décidé de m'en tenir à Aristote.

Le sénateur Lynch-Staunton: Nous aurions dû y penser il y a huit ans.

Le sénateur Kinsella: J'ai eu du mal à choisir les traités d'Aristote que je voulais citer, hésitant, parmi tant d'autres, entre Éthique à Nicomaque et Politique, mais j'ai fini par retenir Métaphysique, dans lequel on trouve cette merveilleuse phrase qui, pour moi, décrit parfaitement le sénateur Gigantès. En effet, il y est dit que par nature l'homme est un être politique. De tous les sénateurs qui ont siégé dans cette enceinte, je n'en ai jamais connu de plus politique que mon cher ami Philippe.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Kinsella: Je sais aussi - nous le savons tous d'ailleurs - que le sénateur Gigantès a mené une brillante carrière militaire dans la Marine royale, qu'il a servi de conseiller au roi Constantin - qui a été détrôné, soit dit en passant - et qu'il a agi avec héroïsme comme agent de la presse libre pendant ses années d'emprisonnement en Corée. Encore une fois, je rappelle que le sénateur Doyle, mon ancien voisin de banquette, et le sénateur Gigantès ont travaillé ensemble au Globe and Mail.

Permettez-moi de conclure en offrant nos meilleurs souhaits aux sénateurs Hébert et Gigantès, et en leur présentant nos hommages. D'une façon très spéciale, je voudrais dire au sénateur Gigantès, qui m'a fait tellement bénéficier de ses connaissances: efkaristo.

L'honorable Joyce Fairbairn: Honorables sénateurs, à eux deux, nos amis représentent un remarquable pan d'histoire. Il nous est pénible de les voir partir.

Cependant, à l'époque où mon parti siégeait dans l'opposition, le sénateur Hébert et moi étions voisins de banquette. Il venait d'être nommé whip en chef de nos troupes et je me contentais d'ajouter mon grain de sel quand il le fallait. J'avais constaté avec émerveillement que le sénateur Bill Petten avait préservé sa santé mentale et faisait toujours l'objet d'un profond respect, même après avoir rempli la fonction de whip pendant quelque 17 ans. Par conséquent, un jour que Jacques avait l'air particulièrement exaspéré, je lui ai demandé gentiment comment il se tirait d'affaire. Il m'a regardé droit dans les yeux en disant: «C'est formidable. J'ai peine à croire qu'on m'ait choisi moi, Jacques Hébert, pour occuper un tel poste. Tous les jours, je me présente au travail la joie au coeur. Quand j'étais petit, ma mère avait l'habitude de prier tous les matins pour que son fils devienne whip. C'est vraiment prodigieux.»

Essuyant une larme, je me disais que c'était un type incroyable. D'une part, il est un citoyen du monde, un maître des mots, une source d'inspiration et d'espoir pour les jeunes du Canada et d'ailleurs, un ardent défenseur des droits et libertés de la personne, une voix fédéraliste claire et forte pour un Québec vigoureux dans un Canada uni, une personne qui, pendant presque toute sa vie, a lutté pour des causes, et non pour des partis politiques. D'autre part, il assume une fonction parlementaire qui compte parmi les plus dures, les plus éprouvantes, les plus politiques, souvent les plus ingrates et pourtant les plus indispensables. Il s'en acquitte avec humour, équité et compréhension, mais en même temps avec une fermeté qui provoque parfois chez ses collègues de l'agacement, si ce n'est vraiment de l'exaspération, quand ils doivent annuler des événements très importants.

Honorables sénateurs, le sénateur Hébert a été un whip superbe et je l'aime beaucoup pour cela. Il a survécu sous trois leaders, Royce Frith, moi-même et le sénateur Graham. Il nous a tous aidés à survivre.

On ne peut s'empêcher de considérer les autres facettes de Jacques Hébert et de s'émerveiller devant sa capacité à s'adapter aux circonstances, à donner si généreusement de lui-même aux milliers de personnes qui en sont arrivées à compter sur lui et sur son leadership, surtout à des moments difficiles.

J'ai l'impression que Jacques et moi avons toujours été copains, même si je n'avais pas vraiment fait sa connaissance avant d'entrer au Sénat il y a 14 ans. Cependant, certains de ses combats et de ses succès légendaires étaient déjà entrés dans l'histoire que j'ai apprise sur la colline parlementaire. J'ai entendu parler de lui quand je travaillais à la tribune de la presse parlementaire dans les années 60 et que j'entendais célébrer ou diffamer le nom de Jacques Hébert, selon le parti que l'on adoptait, à la suite de la publication d'un livre qu'il avait écrit sur l'affaire judiciaire d'un certain Wilbert Coffin, un Gaspésien qui avait été accusé du meurtre de trois chasseurs américains en 1953, jugé coupable et pendu. Jacques a mené un combat acharné contre le système et contre les autorités qui avaient mené résolument le procès que beaucoup ont considéré et continueront toujours de considérer comme une tragique erreur judiciaire.

Un de ses livres, J'accuse les assassins de Coffin, a causé un véritable tumulte et un tollé public en 1963, aussi bien au Parlement que dans tout le pays. Il a donné lieu à l'institution d'une commission royale d'enquête sur l'affaire Coffin au Québec; ses membres ont été si outrés contre les accusations que l'auteur portait contre le système judiciaire que, malgré les efforts de son avocat, Pierre Trudeau, notre collègue a été condamné à payer une amende et à faire 30 jours de prison. Il a passé trois jours en prison avant d'être acquitté plus tard, ce qui l'a poussé à écrire un autre livre intitulé: Trois jours en prison.

(1450)

Je mentionne ce cas, car il illustre bien la passion et la conviction que cet homme spécial apporte à son travail et qu'il manifeste avec les êtres humains qu'il rencontre en chemin. C'est ce qui l'a amené à s'associer à Pierre Trudeau, Gérard Pelletier et à d'autres pour publier la revue Cité libre, un organe de protestation contre le régime Duplessis au Québec dans les années 50. Il en a assuré la survie en tant que moyen d'expression qui ne mâche pas ses mots. Il y a quelques mois à peine, Cité libre est devenue une publication bilingue et évolue sous l'oeil vigilant de notre collègue.

À mon avis, ce sont la même passion et la même conviction qui l'ont amené à créer un des meilleurs programmes à l'intention de jeunes à avoir jamais existé dans notre pays, le programme Katimavik, si cher à Jacques. Des milliers de jeunes Canadiens ont ainsi été encouragés à voyager, à travailler et à apprendre à connaître les différentes régions de notre pays, ce qui demeure une des meilleures façons de contrer les facteurs de division, de séparation, de désunion et de malentendu.

C'est à la suite de l'annulation de ce programme, en 1986, que Jacques a entrepris une grève de la faim de 21 jours à l'extérieur du Sénat, pour attirer l'attention sur la fin du programme Katimavik, certes, mais aussi sur la situation très difficile des jeunes Canadiens obligés de se tailler une place dans un marché du travail en évolution tout en subissant les pressions économiques mondiales. Certains l'ont ridiculisé et vivement critiqué. Les jeunes et leurs parents ont toutefois été encouragés par ce que d'autres ont vu comme la manifestation de quelqu'un ayant le courage de ses convictions.

En fin de compte, le programme Katimavik a pu survivre dans une version limitée grâce à la persévérance et à la persuasion de son fondateur, qui reste une source d'inspiration pour les jeunes Canadiens désireux d'attirer l'attention de ceux qui sont au pouvoir d'un océan à l'autre.

C'est ce même esprit qui a amené Jacques à se tourner vers l'extérieur en créant Jeunesse Canada Monde, organisme qui a permis à nos jeunes de tendre la main à des gens d'autres pays et de comprendre leurs besoins et leurs espoirs. Cela continue de monopoliser beaucoup de son temps. Je sais qu'en quittant cette Chambre, il redoublera d'énergie pour offrir des possibilités à ceux qui seront les dirigeants de ce monde bien après nous.

Jacques avoue d'ailleurs que, lorsque M. Trudeau l'a invité à venir au Sénat en 1983, il a été renversé. Il lui a répondu que c'était hors de question, que Jeunesse Canada Monde, c'était sa vie. Après avoir obtenu de M. Trudeau l'assurance que son rôle de sénateur lui permettrait de continuer de servir cette cause, il a accepté ses nouvelles fonctions, mais il a aussi été nommé président à vie de Jeunesse Canada Monde.

Tout cela transparaît dans le dévouement dont il fait preuve envers ses enfants et ses petits-enfants. Certains d'entre vous ne savent peut-être pas que parmi les nombreux ouvrages que Jacques a publiés, il y a une délicieuse série de récits de voyages pour les enfants; le premier de ces récits s'intitule: Deux innocents dans un igloo et lui a été inspiré par un voyage dans l'Arctique qu'il a fait, en 1990, avec son petit-fils Max alors tout jeune, voyage au cours duquel il est resté chez des amis inuits et a participé à la construction d'un igloo dans lequel il a dormi.

Jacques a été un vif esprit pendant toutes ses années au Sénat. Il m'a gardée jeune. Il a offert à ses collègues le même encouragement et la même générosité que ceux qu'il a manifestés pendant les autres épisodes de sa vie.

Pour ma part, le comité le plus intéressant et le plus intense auquel j'ai siégé au Sénat est le comité spécial sur la jeunesse, dont Jacques était président. C'est durant les audiences que ce comité a tenues d'un bout à l'autre du Canada en 1985 que nous avons appris avec consternation l'existence de problèmes très répandus en matière d'analphabétisme et de difficultés d'apprentissage dans toutes les régions du pays. Cette expérience m'a poussée à m'engager dans une campagne d'alphabétisation qui a duré toute ma vie. Dans un sens, je fais partie des étudiants de Jacques.

Dans son livre, Bonjour le monde! où il est question de la jeunesse, du Canada et du monde, il écrit:

De l'instant présent, on est le maître. On peut lui donner des ailes et le laisser s'envoler comme une hirondelle qui traverse le ciel sans laisser de traces. Ou on peut le saisir par la main pour qu'il nous entraîne vers la grâce.

C'est la voie que Jacques a choisie. Je lui suis tellement reconnaissante de m'avoir laissée l'accompagner une partie du chemin.

N'arrêtez jamais, Jacques. En partant, vous emporterez avec vous nos meilleurs voeux pour toute votre famille et les milliers d'autres que vous continuerez d'inspirer.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, c'est aussi avec une grande affection que je rends personnellement hommage au sénateur Gigantès, qui ne sera plus des nôtres quand nous reviendrons à l'automne. Au lieu de cela, quand il aura 75 ans en août, il consacrera son humour, son imagination ardente, sa gentillesse et son amour à ses enfants et à ses petits-enfants.

Nul doute qu'il retiendra de ces années des sentiments où se mêleront l'étonnement, la frustration et, je l'espère, la fierté d'avoir participé et contribué à une institution à laquelle il n'avait jamais pensé appartenir durant une carrière aussi remarquable.

Phillippe Gigantès est un homme très intéressant. Depuis son enfance à Athènes, en Grèce, il a vécu des expériences qui pourraient servir de matière à un livre, et il a lui-même écrit quelques livres.

Nous avons entendu aujourd'hui qu'il a été officier dans la Marine royale de la Grande-Bretagne durant la Seconde Guerre mondiale, qu'il a eu une carrière incroyable à titre de correspondant à l'étranger, y compris pendant la terrible guerre de Corée, où il a été emprisonné pendant 33 horribles mois dans un camp de prisonniers de guerre, expérience qu'il a par la suite racontée dans un ouvrage plutôt saisissant qui a pour titre I Should Have Died.

Il a été ministre dans le gouvernement grec et conseiller du roi Constantin, qui n'a peut-être pas assez suivi ses conseils. Il a été quelques temps à l'université, puis fonctionnaire du Canada et conseiller, écrivain et ami de l'ancien premier ministre Pierre Elliott Trudeau.

Je ne l'ai admiré que de loin comme journaliste. Si ce ne sont pas ses prodigieux articles qui ont attiré mon attention dans les années 50, c'est tout simplement parce que, à Lethbridge, en Alberta, nous n'avions pas accès au London Observer, au Globe and Mail ni à La Presse. Je l'ai d'abord connu sous le nom de Philippe Deane, lorsqu'il était reporter pour la radio et la télévision, où il s'exprimait avec verve et intelligence et où il utilisait ses tournures de phrases particulières qui, au Sénat, suscitaient autant l'admiration que la colère, selon que ses auditeurs étaient du même camp que lui ou du camp adverse.

Philippe est un bon journaliste, pas uniquement parce qu'il a connu de grands conflits ou qu'il a vécu une vie d'aventure, mais parce qu'il a pris le temps d'apprendre l'histoire, la politique et les langues - il en connaît six. En deux brèves années, il a obtenu une maîtrise et un doctorat de l'Université de Toronto. Au cours de sa carrière, il est allé à la fois défier et provoquer une de mes institutions préférées, l'Université de Lethbridge, où il a été doyen de la faculté des arts et des sciences et professeur d'études classiques.

Cependant, il a toujours été rappelé par la vocation d'écrivain, il n'a jamais cessé de regarder comment le monde évoluait et comment les gouvernements s'efforçaient de gérer le changement. Il était fasciné par la transformation du travail ainsi que par les inconvénients et le potentiel qui accompagnaient cette transformation. Il avait un frère très proche en poste à l'OCDE à Paris qui le tenait informé des tendances émergeant en Europe.

(1500)

Cependant, je ne l'ai rencontré que dans les années 70. Il est soudainement apparu dans le bureau de M. Trudeau, débordant d'enthousiasme et d'humour et excentrique, comme à son habitude. Je m'escrimais à chercher des réponses aux questions susceptibles d'être posées à M. Trudeau et, à l'époque, quelques-unes des plus pointues portaient sur l'économie. Les réponses étaient trop souvent ennuyeuses et incompréhensibles pour le Canadien moyen qui ne hantait pas ce qu'il est convenu d'appeler les corridors du pouvoir sur la colline du Parlement ou à la Banque du Canada.

C'est à ce moment-là que Philippe est arrivé, avec une attitude plus audacieuse que la normale pour un bureaucrate. Il m'a dit d'assimiler l'économie à un événement sportif où les pays concurrents pourraient être évalués selon leurs succès et leurs échecs. Il a d'ailleurs préparé un document sur ce qu'il appelait les «olympiques économiques ». Ce document, qui pouvait être constamment mis à jour, était rempli de tous les indicateurs et de toutes les statistiques imaginables. C'était une nouvelle façon de parler d'un sujet assez pénible, et M. Trudeau a beaucoup aimé l'idée. En fait, le livre a même donné naissance à une émission télévisée portant le même titre et animée par nul autre que Philippe Gigantès. On a continué d'entendre des échos de ces olympiques économiques dans les réponses données par les leaders qui se sont succédé au Sénat.

Lorsqu'il a été nommé au Sénat, Philippe y est venu pour travailler. Il a apporté une contribution importante et constante au comité permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Il a été l'auteur d'un projet de loi privé visant à faire de l'intoxication dangereuse une infraction, concept que le gouvernement a fini par intégrer dans une de ses mesures législatives.

Il a siégé au comité permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie et est à l'origine d'un rapport intitulé: «Il n'y a que le travail qui vaille». Il s'agit d'une étude sur la façon d'améliorer l'éducation, l'alphabétisation et la formation, de créer des emplois et de réduire le chômage à 4 p. 100 sans qu'il y ait augmentation du déficit, du taux d'inflation ou des taux d'imposition. C'est un document qui vaut encore la peine d'être lu aujourd'hui.

Il n'a jamais manqué à l'appel et s'est dévoué à cette institution de façon exceptionnelle, même lorsqu'il était totalement absorbé par son épouse bien-aimée, Sylvie, qu'il a appuyée tout au long de sa courageuse bataille contre le cancer. Une fois la bataille terminée, il est revenu tranquillement à son travail, qui lui tenait beaucoup à coeur.

Il a défendu cette institution, honorables sénateurs, ainsi que ceux qui y siègent, avec une vigueur et un respect dont même les rédacteurs les plus sceptiques ne peuvent pas faire abstraction, et ses lettres ont paru dans diverses publications d'un bout à l'autre du pays.

Oui, Philippe est un partisan. Il est un partisan de son parti, le Parti libéral du Canada; il est un partisan de la société démocratique et des droits des citoyens, quels que soient leur âge, leur couleur, leur sexe ou leur condition sociale et économique; enfin, il est un ardent partisan de son pays parce que, comme nous le savons tous, Philippe a choisi de venir au Canada. Il voulait être Canadien. Son expérience en Corée n'a fait que renforcer sa détermination. Il s'est toujours donné et se donnera toujours corps et âme à son pays. Il représente fièrement le Québec au Sénat et il se bat avec toute l'habileté et l'expérience qu'il possède pour un Québec fort dans un Canada uni.

Sur une note personnelle, il m'a appuyée et m'a encouragée avec beaucoup de gentillesse depuis le jour de mon arrivée et durant mon mandat comme leader du gouvernement. Il est aussi un ardent partisan de la croisade pour l'alphabétisation au Canada. Mais il est avant tout mon ami, et cette amitié a pour moi une valeur inestimable.

Philippe, vous avez fait du Sénat une meilleure institution. Que les années qui viennent vous apportent santé et bonheur, à vous et à toute votre famille que vous aimez tant.

Des voix: Bravo!

[Français]

L'honorable Serge Joyal: Honorables sénateurs, en 1958, j'avais à l'époque 13 ans, j'ai entendu pour la première fois le nom de Jacques Hébert. Il venait de publier un livre qui animait toutes les conversations à l'heure du souper au Québec, ouvrage intitulé: Coffin était innocent.

Jacques Hébert osait remettre en cause l'autorité du système judiciaire au Québec qui, à cette époque, pliait pour une part devant l'autorité politique, voire cléricale. Le sort de Coffin avait de quoi secouer les esprits. Le régime politico-judiciaire avait pu faire pendre un innocent pour calmer les craintes des riches touristes américains qui venaient pêcher et chasser sur les côtes du Saint-Laurent.

Mon père nous racontait l'histoire. Mon frère et moi étions terrifiés à l'idée d'imaginer le corps d'un innocent se balançant au bout d'une corde. C'est ainsi que dans nos esprits, les prisons devinrent des lieux de supplice. Ce n'est que plus tard, en 1963, que j'ai lu le second ouvrage de Jacques Hébert sur le sujet, le fameux J'accuse les assassins de Coffin.

Ce qui m'avait frappé et me préoccupe encore, c'est cette phrase à la page 9, et je la cite:

Quoi qu'il arrive, tant que j'aurai un souffle de vie, je continuerai à défendre la cause de W. Coffin, devenue un cas de conscience à l'échelle de la nation.

Voilà en une phrase, honorables sénateurs, tout le sens de l'engagement de Jacques Hébert. Tant que j'aurai un souffle de vie, je continuerai à défendre les causes qui défient la conscience nationale. Homme de profonde conviction et de combat, visière levée, il nous aura appris un enseignement de grande conséquence, et c'est celui-ci: en toute chose, il faut se méfier des idées reçues et de l'unanimisme qui tend à s'imposer dans une société où l'on privilégie plutôt les consensus que l'approche critique. Et Dieu sait que ce cléricalisme a toujours des racines. Aujourd'hui, il a peut-être perdu son visage religieux mais ses allures politiques n'ont rien perdu de leur force.

Combien de fois ne nous sert-on pas cet argument pour clore tout débat? Il y a un consensus. Comment osez-vous vous opposer à la voix unie derrière ces élites politiques ou syndicales?

Jacques Hébert s'est toujours battu contre cette vision d'une société à la pensée corporatiste. Cette approche n'a jamais été la sienne. Il n'est pas né dans ce berceau. Il fait plutôt partie, comme dirait son ami et inséparable compagnon, le sénateur Philippe Gigantès, de l'école des philosophes sceptiques, et croyez-moi, notre société ne s'en porte que mieux.

Sa grande culture, son humanisme, voire sa spiritualité sont l'illustration vivante de cette action de l'un des plus grands philosophes français de la Renaissance, Montaigne, et je cite:

Le doute est un bien mol oreiller pour une tête bien faite.

Nous savons tous qu'il quitte cette Chambre pour porter son combat sur d'autres terrains qui s'imposent à notre conscience nationale.

À lui et à son compagnon, nos meilleurs voeux les accompagnent.

[Traduction]

L'honorable Lorna Milne: Honorables sénateurs, je vais m'efforcer de me conformer aux exhortations de Philippe Deane Gigantès et d'être brève en rendant moi aussi hommage à mon bon ami.

Comme les nouveaux sénateurs commencent à s'en rendre compte, le Sénat peut-être un endroit déroutant au début, et je les préviens qu'ils vont bientôt être presque ensevelis sous la montagne de documents qui se retrouvera sur leurs bureaux. Ceux-ci seront aussi horrifiés de faire la découverte que la colline du Parlement est en réalité une petite société avec son propre code de conduite, sa hiérarchie et son système de récompenses et de punitions.

Lorsque je me sentais presque dépassée après quelques mois ici, le sénateur Gigantès m'a prise sous son aile, a gonflé mon orgueil avec ses manières courtoises, m'a encouragée à ne pas désespérer, et m'a fait comprendre que je n'étais pas complètement seule. J'ai beaucoup compté sur lui en comité, compte tenu de son assiduité, de la brièveté toute nouvelle de ses interventions, de sa capacité innée de poser aux témoins des questions difficiles et parfois de nature à susciter la controverse, et de l'appui qu'il a donné à la présidence, chaque fois que cet appui était nécessaire, et ce même lorsqu'il n'était pas d'accord avec ce que je faisais. Sa présence d'esprit a égayé bien des après-midi gris et monotones. La combinaison des qualités de notre ami est extrêmement rare, et son parcours exceptionnel est une constante source d'étonnement.

Philippe, vous avez beaucoup fait pour le pays que vous avez choisi et pour le Sénat. Vous allez me manquer, cher ami.

Des voix: Bravo.

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, lors du débat sur la TPS, où le sénateur avait parlé sans interruption pendant 21 heures, un journaliste lui avait demandé quelle sorte de poumons ou de larynx il avait pour accomplir un exploit aussi extraordinaire. En fait, en tant qu'ancien éditorialiste, il était habitué à parler, que les gens écoutent ou non.

Pour l'autre côté, qui était alors le gouvernement, ce fut une leçon, celle de prendre garde aux Grecs possédant le don de la rhétorique.

Le sénateur Kinsella a fait référence à Platon et au mythe de la caverne. Je suis sûre que le sénateur Gigantès ne resterait jamais assis dans la caverne en retrait de la réalité. Il lui faut l'éclat et la lumière du jour pour enseigner aux autres ce qu'est vraiment le monde.

Ses dons extraordinaires manqueront beaucoup au Sénat. Je lui souhaite une retraite féconde et j'espère qu'il emploiera ces dons - je suis sûre qu'il le fera - au profit d'autres causes très importantes. Nous le regretterons tous.

[Français]

Je voudrais dire quelques mots au sujet du départ de notre honorable ami, le sénateur Jacques Hébert. Beaucoup d'encre et beaucoup de mots nous ont déjà inondés pour lui rendre hommage. Le Toronto Star l'a comparé, peut-être avec raison, à Martin Luther King en parlant de son geste courageux et même téméraire de 1986.

Plus récemment, il a posé un autre geste tout aussi courageux, en affirmant que les femmes sont, et je cite:

 

[...] plus consciencieuses, plus dévouées et plus passionnées concernant le travail ici au Sénat que les hommes.
[Traduction]

Je voudrais également remercier le sénateur Hébert des quelques cadeaux qu'il m'a donnés durant mes années au Sénat. Je le remercie d'abord des mégadoses de vitamines C et ensuite de la merveilleuse publication Cité libre, que je me suis efforcée de lire en français. Je le remercie également des quelques livres merveilleux qu'il m'a donnés, qui sont en bonne place dans ma bibliothèque et qui portent son nom.

[Français]

Donc, sénateur Hébert, vous allez nous manquer.

[Traduction]

Des voix: Bravo!

L'honorable Jerahmiel L. Grafstein: Jacques Hébert, encore et toujours Jacques Hébert: voyageur, éditeur, auteur, esprit vif, conteur, rédacteur, pamphlétaire, romancier, penseur, communicateur, commissaire à la radiodiffusion, catalyseur, organisateur inventif, humaniste et bon vivant. En somme, Jacques Hébert est un homme ordinaire des plus extraordinaires.

J'ai entendu parler de Jacques Hébert comme défenseur des libertés civiles, longtemps avant de faire sa connaissance, il y a plus de 25 ans. Au moment de cette rencontre, nous avons vite découvert que nous partagions une profonde affinité au niveau des idées politiques. De plus, nous avions le même gourou, mon mentor, le cher et regretté Fernand Cadieux, sociologue et penseur en matière de médias qui était l'égal de Marshall McLuhan, mais qui était pratiquement inconnu au Canada anglais et, malheureusement, au Canada français. Fernand Cadieux a exercé une profonde influence sur Jacques et sur une cohorte de militants politiques et d'universitaires du Québec et d'ailleurs, dont Trudeau, Lévesque, Seguin, Breton, Guindon, Falardeau, Pelletier, David, Dion, Marchand, Lamontagne, Sauvé, Ryan, Roux, Gagnon, Juneau, Chaisson, Pitfield, Faibish, Strong, Meisel, Cook, Joyal, moi-même et beaucoup d'autres. Il reviendra aux historiens de demain de décrire l'influence de Cadieux sur Jacques et tous ces gens, ainsi que le modèle qu'est devenu Jacques pour sa génération dans tous ses travaux.

Dans le cas de Jacques, son apparence plutôt tranquille d'homme effacé dissimule l'âme d'un poète turbulent aux idées fermes et aux engagements passionnés, qui rêve constamment de ce qui est possible. George Bernard Shaw a dit:

D'aucuns voient les choses et les expliquent; pour ma part, je rêve de choses qui n'ont jamais existé sans même chercher à les expliquer.

Il en va de même pour notre ami Jacques.

Peu après la Seconde Guerre mondiale, Jacques est devenu non seulement le premier rédacteur touristique au Québec qui a ouvert une fenêtre sur le monde, mais aussi un précurseur en fondant la première maison d'édition française au Québec, puis en mettant sur le marché des livres à prix spécialement bas pour que leurs auteurs soient plus facilement accessibles et mieux connus dans la collectivité. Jacques a encore fait oeuvre de précurseur lorsqu'il a fondé l'hebdomadaire Vrai, dont il était aussi le rédacteur en chef, qui provoquait la presse docile qui avait marqué l'ancien régime, devenu aujourd'hui le nouveau, au Québec.

Comme son vieil ami, compatriote et collègue de voyage, Pierre Trudeau, Jacques était au fond de lui-même un partisan du contraire. Dès son plus jeune âge, il fut à contre-courant, contre la pensée traditionnelle de son propre milieu. Jacques croit au pouvoir de la plume plus que toute autre chose, comme en témoignent ses 35 ouvrages. À une époque, alors que le gouvernement avait forgé un petit cercle d'idées au Québec, Jacques et quelques autres se sont bravement attaqués à ce petit cercle et ont jeté les bases de la Révolution tranquille. Les révolutions dévorent leurs dirigeants, mais Jacques a su y échapper. Jamais il n'aurait accepté de remplacer un cercle d'idées bornées par un autre cercle d'idées bornées. Il cherchait toujours à garder le nouveau cercle ouvert aux idées d'égalité et d'accessibilité.

Pour Jacques, l'égalité n'était pas un slogan creux, mais un mot plein de sens et d'engagement. Il a donc encore joué les précurseurs lorsqu'il a fondé la Ligue des droits et libertés du Québec, à une époque où les libertés civiles n'étaient pas très populaires parmi les dirigeants de la province. Il a de nouveau pris la tête à titre de catalyseur pour Cité libre en français et même en anglais cette année.

Aucune tâche n'a été trop petite et aucun objectif n'a été trop grand pour qu'il n'y consacre temps et attention. Au Sénat, il a fait revivre le palais de ses rêves, Katimavik, dans lequel il compte voir naître un nouveau Canada uni et différent grâce à l'association et à l'union des jeunes de toutes les régions. Cet effort commun ne peut à son avis qu'engendrer des valeurs communes. C'était là le plan d'un homme, le plan de Jacques, pour l'unité nationale. En amenant les jeunes à se réunir autour de tâches fascinantes, l'unité nationale devrait selon lui suivre de près.

Les honorables sénateurs se souviendront qu'il a mis ses talents incontestables et son énergie à contribution au moment de la création de Jeunesse Canada Monde et de Katimavik, dont il a été le président fondateur. Les sénateurs se rappelleront aussi de son jeûne héroïque dans l'antichambre du Sénat pour attirer l'attention du public sur le sort de Katimavik.

Sans Jacques, le Sénat sera un endroit bien ennuyeux pour moi. Nous avons partagé des frustrations tellement intenses en observant les hauts et les bas, les dérivations et même l'érosion de l'idée fédéraliste, particulièrement de la part de ceux qui professent l'idéologie fédéraliste. Il n'avait pas besoin, et n'a toujours pas besoin de la béquille de la reconnaissance constitutionnelle pour être distinctif. Ce serait dégradant pour lui. Jacques a toujours été une personne différente dans toutes ses entreprises.

Jacques, vous allez nous manquer beaucoup, non seulement pour la stimulation que nous procure votre présence, mais aussi pour le plaisir que nous procure votre compagnie.

Le grand écrivain et humaniste français Albert Camus a écrit un jour que même le plus noir des hivers finissait toujours par céder la place à un été invincible. Jacques, je vous souhaite de profiter de nombreux étés ensoleillés tout comme nous avons profité de l'invincibilité de vos idées et de votre amitié.

Albert Camus a aussi écrit:

J'aime trop mon pays pour être nationaliste.

Il en va de même pour mon ami Jacques Hébert.

[Français]

Tu nous manqueras beaucoup, Jacques. Au revoir, mon vieux. Salut!

[Traduction]

Des voix: Bravo!

(1520)

Le sénateur Grafstein: Longtemps avant de faire la connaissance de mon ami Philippe Gigantès, j'en avais entendu parler sous le nom de «Philip Deane». Je connaissais son agilité d'esprit grâce aux articles pénétrants que le Globe and Mail publiait il y a trois décennies de la part de son correspondant à l'étranger basé à New York et à Washington.

Quelle odyssée a connue cet élégant, éloquent et charmant aventurier d'origine grecque! Fils du plus grand général et héros de guerre de la Grèce, il a été officier de marine et gentleman, soldat, commando, héros de guerre deux fois médaillé, correspondant de guerre, prisonnier de guerre, humaniste, communicateur, globe-trotteur, amant, auteur d'une douzaine d'ouvrages, journaliste, éditorialiste, gourmet, érudit et professeur en études classiques, ministre, haut fonctionnaire de l'ONU, législateur, vrai libéral, sioniste, et conseiller auprès de rois, de premiers ministres et de secrétaires généraux des Nations Unies. La carrière haute en couleur de Philippe illustre le vrai sens de l'adage souvent cité mais rarement mis en pratique: une vie inexplorée ne vaut pas la peine d'être vécue.

Dès notre toute première rencontre, il y a plusieurs décennies, Philippe et moi avons découvert que nous partagions l'amour des idées, des mots, des livres, de la vie et de la littérature. Philippe possède un don et une capacité uniques d'inspirer l'amitié et la loyauté.

Or, honorables sénateurs, comment pourrait-on le mieux célébrer adéquatement la vie presque hors pair de Philippe et ses réalisations extraordinaires? Peut-être un poème écrit en 1911 par un des plus grands poètes de Grèce, Constantin Cavafy, conviendrait-il? Ce poème, c'est Ithaque. Il se pourrait que certains passages fassent écho à la vie du sénateur. Je cite:

 

Quand tu partiras pour Ithaque,
Souhaite que la route soit longue,
Riche d'aventures et d'enseignements.
Ne crains pas les Lestrygons,
Les Cyclopes ou la colère de Poséïdon.
Tu ne verras jamais rien de tel sur ta route
Si ta raison reste haute, si ton âme et ton corps
Ne sont touchés que par des émotions choisies.
Tu ne rencontreras pas les Lestrygons,
Les Cyclopes ou Poséïdon déchaîné
Si tu ne les portes pas en toi,
Si ton âme ne les dresse pas devant toi.

Souhaite que la route soit longue,
Que nombreux soient les matins d'été
Où tu entreras - avec quel délice,
Avec quelle joie! - dans des ports inconnus.
Attarde-toi dans les comptoirs phéniciens
Et fais de beaux achats:
Nacres et coraux, ambres et ébènes,
Parfums voluptueux de toutes les sortes,
Toujours plus de parfums voluptueux.
Rends-toi dans de nombreuses villes d'Égypte,
Apprends encore et encore de leurs érudits.

Garde toujours Ithaque dans ton esprit,
C'est vers elle que tu vas.
Mais ne hâte pas ton voyage:
Mieux vaut qu'il dure beaucoup d'années,
Que tu sois vieux déjà en abordant ton île,
Riche de ce que tu auras gagné sur ta route,
Et sans espoir qu'Ithaque te donne des richesses.

Ithaque t'a donné ce beau voyage.
Sans elle, tu n'aurais pas pris la route.
Elle n'a plus rien à te donner.

Même si elle te paraît pauvre, Ithaque ne t'a pas trompé:
Maintenant que te voilà sage avec tant d'expérience,
Tu auras compris ce que les Ithaques veulent dire.

Des voix: Bravo!

[Français]

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool: Honorables sénateurs, à mon tour, je veux rendre hommage aux sénateurs Hébert et Gigantès.

Le sénateur Hébert a été pour moi un vrai mentor à mon arrivée au Sénat il y a trois ans. Il était disponible pour m'aider à mieux faire mon travail au Sénat. Je dois dire qu'à mes débuts au Sénat, parce que le sénateur Hébert me demandait d'aller à tous les comités, je croyais que c'était parce qu'il trouvait que j'avais appris vite et que j'étais bonne, mais j'ai vite compris que c'était pour avoir le quorum aux séances des comités. Cela m'a permis d'apprendre malgré tout.

En 1958, j'ai aussi entendu parler du sénateur Hébert quand mes parents lisaient le livre du sénateur Hébert, J'accuse les assassins de Coffin. Je me souviens que mes parents commentaient le genre d'homme qu'était Jacques Hébert. En 1958, je n'étais pas aussi jeune que le sénateur Joyal, mais j'étais encore une jeune femme qui n'avait pas tellement d'intérêt pour le sénateur Hébert et encore moins pour les assassins de Coffin.

Maintenant, ma mère a 91 ans. Je lui dis souvent comme je suis chanceuse d'avoir connu Jacques Hébert, ce grand fédéraliste. Cela lui fait plaisir quand j'ajoute «ce grand libéral», ce grand défenseur des jeunes, cette personne qui voit la vie avec un si grand coeur et qui est devenu mon grand ami.

Sénateur Hébert, mon mari, que vous connaissez bien, se joint à moi pour vous souhaiter une retraite active, reposante, mais valorisante. Je continuerai à défendre Katimavik au caucus national. Je vous souhaite une bonne santé, beaucoup d'amour et longue vie à Katimavik.

Je remercie le sénateur Gigantès pour toutes ses bonnes paroles d'encouragement quand je trouvais mon adaptation au Sénat si difficile. Vos paroles réconfortantes m'ont permis de tenir le coup. Aujourd'hui, j'aime mon travail, peut-être grâce à ces paroles. Je vous souhaite des moments précieux avec ceux et celles que vous aimez et qui vous aiment. Je sais que votre petit-fils de trois ans saura rendre ces moments encore plus agréables.

Je vous souhaite bonne santé, beaucoup d'amour, de beaux voyages et revenez nous voir pour mettre l'heure juste.

[Traduction]

L'honorable Willie Adams: Honorables sénateurs, je voudrais ajouter mes observations à celles que notre chef a faites au sujet du sénateur Hébert. Je connais le sénateur Hébert depuis très longtemps. Il est toujours à ma recherche pour s'assurer que je serai à mon fauteuil au Sénat chaque jour.

Le sénateur Fairbairn a parlé tout à l'heure du voyage que le sénateur Hébert a fait dans l'Arctique. Alors que je tentais d'organiser un voyage dans les territoires, le sénateur Hébert m'a demandé quelle était la meilleure collectivité à visiter dans le Nord. Le Sénat était alors sur le point d'ajourner pour le congé de Pâques. Je lui ai conseillé d'aller à Igloolik, car ils ont encore des attelages de chiens qu'ils utilisent pour se déplacer en traîneau et visiter des endroits où les gens vivent encore comme il y a 1 000 ans.

Le sénateur Hébert a ensuite demandé mon aide pour réserver une chambre. Je me suis mis en rapport avec un type que je connaissais là-bas qui était propriétaire d'un motel. Lorsque je lui ai téléphoné, il m'a dit que la chambre coûtait 150 $ par nuit. Le sénateur Hébert a dit que c'était trop cher pour lui. J'ai rappelé le propriétaire du motel pour savoir s'il pouvait baisser son prix et il m'a dit qu'il pouvait louer la chambre à 125 $ par nuit. Encore une fois, le sénateur Hébert a dit que c'était nettement trop cher par rapport à son budget quotidien de 140 $, d'autant plus que son petit-fils allait l'accompagner.

J'ai communiqué avec la mission anglicane pour voir s'il y avait de la place, mais c'était complet. J'ai finalement téléphoné à un de mes amis là-bas et je lui ai dit qu'un sénateur d'Ottawa et son petit-fils aimeraient passer quelques nuits dans un igloo. J'ai finalement trouvé quelqu'un capable de bâtir un igloo et prêt à le faire, et nous avons pris les dispositions nécessaires. Il ne restait plus qu'à lui trouver un sac de couchage qui le protégerait même à 40 degrés sous zéro. À son retour, après avoir passé trois nuits dans l'igloo, il m'a dit: «Willie, je ne sais pas comment ton peuple a pu survivre pendant des milliers d'années. J'avais apporté un thermomètre et j'ai pu constater, un soir, dans l'igloo, qu'il faisait 36 degrés sous zéro!»

Un jour, le sénateur Hébert m'a dit qu'il voulait se rendre à Eskimo Point, qui est situé exactement à mi-chemin entre St. John's, à Terre-Neuve, et Victoria, en Colombie-Britannique. Il m'a avoué qu'il songeait à s'y rendre à pied, à partir de Churchill, au Manitoba, ce qui représente une randonnée d'environ 150 milles, tout un exploit pour un homme de plus de 75 ans.

Le sénateur Hébert me manquera. Il fut un très bon whip.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Adams: Il s'est dit beaucoup de choses aujourd'hui au sujet du sénateur Gigantès. Je suis ravi de voir qu'il sortira d'ici vivant. Je me souviens du jour où il s'est effondré dans son siège, ici, au Sénat. J'ai cru qu'il souffrait d'un malaise cardiaque.

Je me souviens du moment où nous avons mis aux voix le projet de loi sur l'aéroport Pearson. Nous avions perdu ce vote, et le sénateur Gigantès s'était tellement fâché contre le sénateur Sparrow qu'il avait perdu connaissance. Je suis très content de le voir bien en vie aujourd'hui.

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, je me joins aujourd'hui à mes collègues pour rendre hommage au sénateur Gigantès. Je lui souhaite une retraite heureuse, et j'ai hâte de lire son prochain livre.

En disant au revoir à Philippe, je repense à son discours de plusieurs heures, durant le fameux débat sur la TPS. Je me souviens bien de tout l'art qu'il avait employé à mettre à l'épreuve la patience des conservateurs. Je me souviens aussi à quel point nous étions tous touchés de savoir que sa femme, Sylvie, était à la tribune pendant toute la durée de son discours. Cela nous avait tous profondément touchés. Le sénateur Gigantès tentait de voir son nom inscrit dans le Livre Guinness des records.

Bonne chance, sénateur Gigantès, et bon vent!

Des voix: Bravo!

Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, je veux aussi rendre hommage au sénateur Jacques Hébert. À mon arrivée au Sénat, on m'avait assise à ses côtés. Je tiens à lui dire adieu. Je me souviendrai de lui pour différentes choses, mais surtout pour deux faits particuliers. Je vais me rappeler de lui tout d'abord pour son plus célèbre dîner-causerie devant les membres de Cité libre à La Maison du Egg Roll, où l'ancien premier ministre, Pierre Elliott Trudeau, a parlé de l'Accord de Charlottetown. Honorables sénateurs, j'étais là ce soir-là. En parcourant la salle du regard pour trouver les quelques rares libéraux, je me suis dit: «Frère Jacques, à nous deux, nous formons une multitude ce soir.»

Je me rappelle également de la conférence de 1996 en l'honneur de Allan J. MacEachen, à l'occasion de son départ du Sénat. La conférence a eu lieu à l'Université St. Francis Xavier, à Antigonish. Beaucoup d'entre nous étaient présents. Les sénateurs Lowell Murray et John Stewart ont prononcé des discours. Si je m'en rappelle si bien, c'est que Frère Jacques est venu en voiture de Montréal, accompagné de MM. Pierre Elliott Trudeau et Gérard Pelletier. C'est la dernière fois que j'ai vu M. Pelletier vivant.

Cette réunion, à Antigonish, marquait une époque. J'ai été vivement frappée à ce moment-là par la devise de l'Université St. Francis Xavier: «Whatever things are true». J'ai pensé qu'en disant au revoir à Jacques aujourd'hui, et en disant au revoir à tant de gens qui ont été associés à M. Trudeau, je vous ferais part de la citation complète. Elle est tirée du Nouveau Testament, chapitre 4, verset 8, des Philippiens:

Au reste, frères, que tout ce qui est vrai, tout ce qui est honorable, tout ce qui est juste, tout ce qui est pur, tout ce qui est aimable, tout ce qui mérite l'approbation, ce qui est vertueux et digne de louange, soit l'objet de vos pensées.

Pour dire au revoir, je devrais reprendre les paroles du sénateur David Croll. À l'occasion de la dernière réunion de M. Trudeau avec son caucus libéral, en 1984, en tant que membre le plus ancien du caucus libéral, le sénateur Croll a été appelé à dire adieu à M. Trudeau au nom du caucus. Le sénateur Croll s'est levé et a dit: «Nous, juifs, avons une expression pour des situations comme celle-là. C'est «shalom».» À nos collègues qui nous quittent, je dis donc «shalom».

[Français]

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, une des difficultés d'être un des derniers à parler, c'est d'essayer de rendre la chose intéressante tout en étant très près de ce que l'on a envie de dire.

Le sénateur Carstairs, ainsi que le sénateur Fairbairn et plusieurs autres, ont bien résumé ce que j'avais envie de dire de nos deux collègues qui nous quittent aujourd'hui.

J'ai connu le sénateur Hébert, cela va vous surprendre, en 1953. J'étais étudiant et toujours présent, comme dans tous les événements du Québec moderne, à l'Institut canadien des affaires publiques à Sainte-Adèle, qui se réunissait une fois par année. Je n'ai jamais été absent de cet Institut canadien des affaires publiques. Je peux dire que le sénateur Hébert était certainement celui qui était toujours le plus présent d'entre nous. Je n'étais qu'un jeune étudiant qui profitait d'une bourse de 25 dollars pour pouvoir aller à l'Institut canadien des affaires publiques. C'était l'affaire des grands, nous disait-on. Depuis ce temps, j'ai suivi sa carrière.

Nous nous sommes retrouvés au caucus du Québec. J'ai été à plusieurs reprises président du caucus et le sénateur Hébert représentait le Sénat comme vice-président. Il acceptait toutes les tâches les plus ingrates de représentation que l'on voulait lui confier jusqu'à la dernière minute. Un jour, je suis venu le rejoindre au Sénat. Pour les nouveaux députés et les sénateurs, vous connaissez les événements de ces cinq dernières années. J'ai toujours compris le sénateur Hébert, et celui qui me l'a le mieux décrit dans une phrase, c'est son grand ami, un homme très respecté et que je respecterai toujours, c'était Jean-Louis Roux. Lorsqu'il y a eu une ombre sur l'amitié que nous avions l'un pour l'autre, le sénateur Hébert et moi, le sénateur Roux m'a pris à l'écart et m'a dit: «Marcel, mon cher Marcel, on connaît tous Jacques, c'est un homme entier.»

Dès ce jour, j'ai décidé de rester bien souriant dans mon coin parce que je savais qu'il n'y avait aucune rancune personnelle chez Jacques Hébert pour personne, et que c'est un homme entier, entier dans tout.

Lorsqu'il a fait cette grève, j'avais l'honneur d'être président du caucus libéral du Canada, si ma mémoire est fidèle. Tous les matins, ma tâche était de venir m'enquérir de l'état de santé de Jacques, qui était en pleine souffrance. Il tenait son bout dans ce qu'il avait de plus cher, le programme Katimavik.

J'ai un secret à partager avec vous. «Ne le répétez pas», comme disait de Gaulle lorsqu'il parlait à 40 millions d'habitants. Le sénateur Grimard et moi avions conspiré contre le sénateur Hébert. Nous avions décidé de demander au sénateur Hébert de devenir le premier président des rencontres Canada-Cuba. Ne pouvant le faire directement à l'époque, j'ai donc passé par l'entremise du sénateur Grimard. Je peux même vous révéler que je surveillais le sénateur Grimard traverser la Chambre pour aller offrir la candidature de président-fondateur de Canada-Cuba. Je savais que Jacques ferait du groupe d'amitié Canada-Cuba une institution connue, avec le concours financier et l'administration du sénateur Grimard, comme il nous l'a rappelé tantôt.

J'ai participé à des voyages un peu partout et je suis heureux du peu d'influence que j'ai pu avoir sur Jacques Hébert. Il était plus vite et plus talentueux que moi. Je lui ai parlé des voyages que j'avais faits dans les deux Yémen qui, heureusement, sont devenus un Yémen.

Le sénateur Hébert a parcouru le Yémen avec son baluchon de voyageur. Ce voyage l'a inspiré à écrire deux très beaux livres traduits en trois langues: en allemand, en français et en anglais. C'est ainsi qu'il a fait connaître le Sénat dans un pays obscur, vieux et historique qui s'appelle le Yémen. J'ai en première page une dédicace que je ne vous lirai pas, mais que je conserverai très longtemps, parlant de ce livre et de ces contacts que nous avions eus indirectement avec le Yémen. Il aura ici des défenseurs dans ses projets qui lui tiennent à coeur et qui sont très importants.

[Traduction]

(1540)

Voilà une chose qui nous unit tous. Nous sommes tous d'accord. Il y aura toujours ici des gens pour défendre de telles initiatives. J'espère que dès que le sénateur Hébert aura quitté le Sénat pour prendre sa retraite, le premier ministre jugera bon de lui confier la responsabilité de certains événements et qu'il continuera de consacrer tout son talent aux jeunes du Canada. Quiconque connaît un peu les ambassades sait que, où qu'il aille dans le monde, le sénateur Hébert a toujours un programme en faveur des jeunes. C'est bon pour le Sénat, c'est bon pour le Canada.

[Français]

Je souhaite au sénateur Gigantès une agréable vie dans ses nouvelles activités. Je sais que le sénateur Gigantès et le sénateur Hébert deviendront deux personnages redoutables au Québec puisque tous les deux ont la plume la plus fine et la plus dangereuse qui soit. Ils auront maintenant beaucoup plus de temps pour se porter à l'attaque de ceux qui veulent détruire le Canada. Vous savez tous ce que je pense de mon pays, je vous fais grâce de vous en parler plus longuement. Ils se consacreront tous les deux à ce redoutable nouvel emploi qui est d'écrire avec les mots les plus simples et les plus compliqués, de convaincre les gens que nous avons beaucoup plus en commun les uns les autres que l'un contre l'autre.

Le sénateur Gigantès, n'a jamais reculé devant les tâches les plus ingrates. Un jour, on lui a demandé d'être un homme politique actif.

[Traduction]

Le sénateur Gigantès n'a jamais refusé aucune tâche, même très difficile. En 1980, personne ne voulait se porter candidat dans une circonscription de Toronto. Le sénateur Gigantès n'a pas hésité à répondre à l'appel du Parti libéral du Canada et à se porter candidat contre Bob Rae, qui a presque perdu les élections. M. Rae est par la suite devenu premier ministre de l'Ontario. Vous auriez dû voir la lutte entre eux. Je m'en souviens encore. Imaginez un peu la scène à Toronto entre le sénateur Gigantès et Bob Rae.

Aujourd'hui, j'ai eu le sentiment que, finalement, il fallait dire quelque chose de nouveau. Je lui souhaite, moi aussi, une très heureuse retraite. J'espère qu'il continuera d'écrire. Vous avez peut-être lu ses oeuvres en anglais ou en français.

Le sénateur Gigantès est venu une fois dans ma circonscription m'aider alors que je participais à un programme de télévision en grec. Je ne sais pas s'il a traduit en grec exactement ce que je disais en anglais mais le résultat a été incroyable. Je suppose donc qu'en traduisant, il a corrigé les choses que je n'aurais pas dû dire. Il peut toujours publier des articles dans les journaux grecs à Montréal et au Canada. Je lui souhaite, comme au sénateur Hébert, une très heureuse retraite. J'espère que tous deux publieront bientôt leurs mémoires. J'espère qu'ils nous feront savoir où ils sont et que, si nous faisons appel à eux pour nous aider à rédiger des lettres à l'intention des journaux au Canada, ils accepteront de le faire.

La politique est un dur métier.

[Français]

C'est de bon ton de dire ce qui nous unit et de passer sous silence les ombres que nous avons pu connaître au cours des cinq dernières années. Quand je regarde l'ensemble de la vie, ce n'étaient pas des ombres, mais des petits picots noirs et je tiens à les garder silencieux. Je vous remercie, honorables sénateurs, de me permettre de me joindre à ce concert d'éloges.

L'honorable Léonce Mercier: Honorables sénateurs, je suis vraiment surpris d'entendre ce que j'entends. Il faudra que des documents soient déposés pour que l'on s'assure que tout ce que l'on dit est vrai. Je ne peux pas croire que ces deux hommes ont autant de qualités! C'est incroyable.

Je voudrais remercier le sénateur Kinsella qui, lors de l'annonce de ma nomination comme whip, a eu la gentillesse de me féliciter et de m'assurer de sa collaboration. J'ai bien apprécié votre geste. Soyez assuré que de mon côté, il y aura une grande collaboration.

Je vais entrer dans le vif du sujet. Si cela vous ennuie, applaudissez et je vais arrêter. Depuis 1983 siège au Sénat un parlementaire de carrière. Homme aux qualités multiples, à l'intelligence redoutable, ses talents inouïs de créateur l'auront catalogué parmi les grands Canadiens. Il fut président et fondateur de Jeunesse Canada Monde et de Katimavik; fondateur et rédacteur de l'hebdomadaire Vrai; fondateur et directeur général des Éditions du Jour; président de l'Association des éditeurs canadiens; membre fondateur et président de la Ligue des droits de la personne du Québec; président du comité organisateur de la Première Assemblée Nord-Sud de la Jeunesse en 1981. Il participa à plusieurs émissions d'affaires publiques à Radio-Canada et est l'auteur de 35 livres. Il est cofondateur et membre de Cité libre. Il est également un membre prestigieux de sociétés et organismes reconnus. Il est officier de l'Ordre du Canada, chevalier de l'Ordre de la Pléiade, Chevalier-Commandeur de Mérite, Ordre Souverain Militaire de Saint-Jean de Jérusalem et de Malte et autres.

Malgré cette foule d'activités et les 24 heures quotidiennes insuffisantes, l'honorable Jacques Hébert trouva aussi le moyen de fonder une très belle famille qui compte trois filles et deux garçons.

Selon toute vraisemblance et des informations obtenues secrètement, les enfants du sénateur Hébert sont parmi les plus vitaminés au Canada.

Les vitamines recommandées par le sénateur Hébert: les super algues, la vitamine E, 400 U.I., la vitamine C 1 000 milligrammes, le bêta-carotène 25 000 U.I., le zinc 10 mg, l'échinacée - douze ampoules buvables de 10 ml- et bien d'autres ne sont plus utiles parce qu'aujourd'hui, sénateur Hébert, il y a le Viagra.

Nous retiendrons de l'honorable sénateur Jacques Hébert cette citation:

Un journaliste qui interviewe un autre journaliste, c'est aussi ennuyeux que de danser avec sa soeur!

(1550)

Honorables sénateurs, permettez-moi de vous relater quelques faits de ma première rencontre au bureau du whip avec le sénateur Jacques Hébert. Pour votre information, je ne l'avais jamais, mais jamais rencontré auparavant. Je le connaissais de nom comme tout le monde et lui ne m'avait jamais rencontré. On me le présente: «Mais Léonce, t'as pas changé!» Il ne m'avait jamais vu!

Les gens m'avaient dit que j'occuperais certainement le siège de Jean-Louis Roux. J'étais fier de cela. Le sénateur Hébert m'a dit qu'il n'en était pas question car tous ceux qui arrivent occupent d'abord le 104. Après mon arrivée, il y a eu huit nominations, mais j'étais toujours au 104. Je me suis organisé pour changer de place. Comme vous voyez, je me suis vengé. Aujourd'hui, j'occupe un autre siège.

Étant donné que je remplaçais Jean-Louis Roux, je pensais que son bureau au cinquième étage de l'édifice du Centre me serait assigné. Mais le whip, d'un ton autoritaire, me dit que cela était impossible et que cela créerait un tollé de protestations de la part des autres sénateurs. Il m'a installé au troisième étage et mon adjointe au sixième. Tous mes collègues me disaient: «T'es bien mal organisé. Ça n'a pas d'allure».

Sénateur Hébert, en quittant le Sénat vous allez laisser de très bons souvenirs et vous y compterez de nombreux amis. Votre énergie, votre détermination comme vos connaissances seront toujours une source de référence pour plusieurs d'entre nous, et j'ai la certitude que, partant du principe que même une feuille de papier est plus légère quant on la porte à deux...vous saurez bien guider ceux et celles qui, à l'avenir, pourront encore se référer à votre sagesse.

Sénateur Hébert, je vous regarde et vous êtes comme moi, vous n'avez pas changé!

C'est maintenant difficile de parler du sénateur Gigantès sans parler du sénateur Hébert. Tu vois le sénateur Gigantès, tu vois le sénateur Hébert, et vice versa. C'est pratiquement les Dupont. Si vous faites un compliment à l'un, vous êtes obligé de le faire à l'autre. La seule chose que le sénateur Gigantès ne fait pas et que le sénateur Hébert fait, c'est que le sénateur Gigantès ne prend pas de vitamines.

Sénateur Gigantès, je regrette de ne pas vous avoir connu. Je suis sincère quand je vous dis cela parce que si je vous avais connu, j'aurais fait de vous deux sacrés bons politiciens.

L'honorable Jacques Hébert: Honorables sénateurs,le 30 avril dernier, je m'étais inscrit en faux contre cette curieuse manie que nous avons d'accabler de compliments les sénateurs qui prennent leur retraite.

Essayons d'imaginer le nombre d'heures, pour ne pas dire de semaines et de mois que le Sénat a ainsi perdus depuis 1867. Tous les arbres abattus pour que ces déluges d'amabilité soient consignés à jamais dans le compte rendu officiel, comme si quelqu'un, un jour, irait à la bibliothèque pour relire cela.

De manière à limiter les dégâts, j'avais alors imploré mes collègues de m'épargner la chose quand ce serait mon tour. On vient de me donner la preuve que je n'ai aucune autorité dans cette Chambre, soit d'un bord ou de l'autre, tout whip que j'aie été.

[Traduction]

Je suis seulement déçu que mon père et ma mère ne puissent pas être ici.

Le sénateur Fairbairn: Spécialement votre mère.

Le sénateur Hébert: Ma mère aurait été très fière d'entendre tout cela. Quant à mon père, il aurait tout cru.

[Français]

Je mentirais si je vous disais que ce que je viens d'entendre m'a laissé indifférent. Derrière les plus invraisemblables exagérations, j'ai cru déceler des sentiments d'amitié ou de vraie camaraderie. Cela me touche infiniment plus que je n'aurais envie de l'avouer. Pour éviter de sombrer dans le sentimentalisme qui nous guette tous en pareille circonstance, je remercierai tout le monde en bloc, sans nommer personne. Merci, thank you.

[Traduction]

Des voix: Bravo!

L'honorable Philippe Deane Gigantès: Honorables sénateurs, en quatorze ans et demi, j'ai rassemblé quelques notes. J'ai pensé que, pour l'occasion, et fort de votre grande courtoisie, vous supporteriez que je vous lise ce texte. Puis je me suis souvenu que la vertu de clémence est de n'être forcée, elle descend comme la douce pluie du ciel. Aussi, je laisserai descendre ces notes sur vous.

Le sénateur Di Nino: Il a tout mémorisé.

Le sénateur Gigantès: Vous êtes admirable. Ce fut pour moi un privilège et un honneur de participer au grand débat qui est l'essence même de la démocratie. Nous avons bien eu des joutes verbales, mais ce que nous faisons est ce qui permet à la démocratie de fonctionner et à un pays comme le Canada d'être tellement civilisé. Nous avons eu nos différends, mais la raison d'être de la démocratie est précisément de nous permettre d'exprimer nos différences d'opinion.

Par un accident de l'histoire, mes honorables collègues d'en face se retrouvent dans une assemblée centriste, qu'ils le veuillent ou non. À la droite se trouve une menace pour ce pays, tout comme à la gauche.

Durant mes quatorze ans et demi de présence au Sénat, cette Chambre a apporté des centaines d'amendements à 59 projets de loi que nous a renvoyés la Chambre des communes. Ces projets de loi avaient donc des lacunes. Nous y avons apporté des corrections et l'autre endroit les a acceptées. Nous avons ainsi servi le pays.

Nous le faisons à peu de frais. Le Sénat coûte 1,40 $ par Canadien, par année, c'est-à-dire 42 millions de dollars divisés par 32 millions de personnes. Chaque sénateur coûte 1,4 cent par Canadien, par année. Durant mes quatorze années et demie de présence au Sénat, j'ai coûté 20 cents à chaque Canadien. Je me suis efforcé, avec votre aide, d'aider mes concitoyens canadiens à améliorer leur qualité de vie.

Je remercie les sénateurs d'en face, et notamment le sénateur Beaudoin, qui est absent, de m'avoir permis de présenter au Sénat un projet de loi interdisant d'invoquer l'intoxication comme moyen de défense. Lorsque nous étions sur le point d'adopter ce projet de loi, le ministre de la Justice m'a demandé s'il pouvait le reprendre à son compte, et j'ai accepté.

(1600)

Les sénateurs des deux côtés l'ont fait, à de nombreuses reprises. Un sénateur avançait une idée, puis un ministre demandait s'il pouvait la reprendre. Nous acceptions, et c'est ainsi que le Sénat a pu produire des choses utiles pour le Canada.

Je suis persuadé que les Canadiennes, à qui nous avons coûté 1,4 cent, estiment qu'elles en ont eu pour leur argent, ne serait-ce qu'en ce qui concerne notre rôle dans l'interdiction de l'intoxication comme défense.

Je m'arrête ici et me contenterai, pour la première fois, de vous saluer en grec. Yatara, ce qui signifie santé et joie.

Des voix: Bravo!

 


Visiteurs de marque

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je vous signale la présence à notre tribune de visiteurs qui sont les invités de l'honorable sénateur Forrestall. Il s'agit de représentants de l'Association des officiers de la marine du Canada et de la coalition de la marine marchande pour l'égalité.

Soyez les bienvenus au Sénat.

 


DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Mme Nancy MacBeth

Félicitations au chef du Parti libéral pour son élection à l'Assemblée législative de l'Alberta

L'honorable Jean B. Forest: Honorables sénateurs, à l'instar de tous les sénateurs, je déplore aujourd'hui le départ des sénateur Hébert et Gigantès, mais je dois aussi avouer que c'est une journée réjouissante pour les libéraux de l'Alberta. Hier soir, notre chef nouvellement élue, Nancy MacBeth, a remporté un siège à l'Assemblée législative et, je suis heureuse d'ajouter qu'elle a ravi la victoire aisément.

Je connais Nancy depuis quelques années déjà, ayant travaillé avec elle quand elle était responsable des portefeuilles de l'Éducation et de la Santé dans le gouvernement de Don Getty. Nancy s'est montrée habile et compétente comme ministre. Elle faisait évidemment partie d'un cabinet conservateur, mais les honorables sénateurs savent bien que je collabore volontiers avec des conservateurs compétents. Comme le premier ministre Klein l'a mentionné en offrant ses félicitations hier soir, nous avons hâte de suivre les débats intéressants qu'il y aura à l'Assemblée législative de l'Alberta.

 

La défense nationale

L'absence des Forces armées canadiennes de la mission de l'OTAN au Kosovo, en Serbie

L'honorable Michael A. Meighen: Honorables sénateurs, j'interviens au sujet d'une question grave qui, je crois, remet en cause l'engagement du gouvernement à agir comme un membre actif et constructif de la communauté internationale à une époque où la situation reste très instable et incertaine.

Comme les honorables sénateurs le savent, le Canada a été la seule puissance aérienne de l'OTAN qui n'a pas participé aux raids simulés au-dessus des voisins du Kosovo, exercice militaire qui devait envoyer un message ferme et indispensable au président serbe Milosevic. En fait, le Luxembourg, l'Islande et le Canada ont été les seuls pays membres de l'OTAN à ne pas participer - mince consolation, vu que ni le Luxembourg ni l'Islande ne possèdent le moindre avion de chasse.

L'absence du Canada est apparemment surtout attribuable au fait que nos forces n'ont plus de capacité de ravitaillement en vol, laquelle est nécessaire pour soutenir notre escadrille de CF-18, depuis que le gouvernement a mis au rancart notre dernier avion ravitailleur l'année dernière. Cette décision battait en brèche une recommandation clé du rapport de 1994 du comité mixte spécial de la politique de défense du Canada, dont j'avais eu l'honneur de faire partie, à savoir que le gouvernement améliore à moyen terme la capacité de ravitaillement en vol, une recommandation dont le ministre de la Défense nationale semblait lui-même parfaitement inconscient cette semaine.

Honorables sénateurs, notre absence n'est pas passée inaperçue auprès de nos partenaires du pacte Atlantique. On dit en effet que les États-Unis ont acquiescé à notre demande de fournir un avion-citerne, nous permettant ainsi, grâce à eux, de remplir, bien que tardivement, nos obligations dans le cadre de l'OTAN.

Honorables sénateurs, le manque d'intérêt du gouvernement envers les forces canadiennes se révèle chaque fois que le Canada néglige de respecter ses obligations et ses responsabilités de pays membre du G-7 et de pays membre du pacte Atlantique. Ce manque d'intérêt suscite de sérieuses questions quant à savoir pourquoi le gouvernement ne considère pas comme une priorité de maintenir des forces armées unifiées, aptes au combat et polyvalentes, des forces dotées d'un bon équipement et de ressources suffisantes, un objectif auquel le gouvernement a souscrit officiellement. De plus, le gouvernement continue de rogner sur le budget militaire, ce qui donne au Canada le pire de tous les résultats possibles: des forces armées réduites, manquant d'équipement et dépourvues de la capacité de se déployer rapidement. Honorables sénateurs, ce manque d'intérêt compromet la capacité du Canada de remplir ses obligations et ses responsabilités internationales, ce qui finira à mon avis par nuire à nos intérêts nationaux, sur les plans politique et économique.

Honorables sénateurs, les Canadiens peuvent avoir le meilleur des mondes: des forces armées réduites, mais bien équipées et bien entraînées, capables d'intervenir rapidement pour défendre nos intérêts nationaux. Tout cela est possible, mais uniquement si le gouvernement respecte son engagement et exerce un degré de leadership qui laisse beaucoup à désirer jusqu'à présent.

 

Halifax, Nouvelle-Écosse

L'anniversaire de la fondation de Halifax

L'honorable Wilfred P. Moore: Honorables sénateurs, je tiens à signaler aujourd'hui l'anniversaire de la fondation de ma ville natale, Halifax, en Nouvelle-Écosse, qui sera célébré le dimanche 21 juin prochain. Il s'agit du 249e anniversaire du jour où le nouveau gouverneur de la Nouvelle-Écosse, le lieutenant-colonel Edward Cornwallis, un beau jeune homme de 36 ans, de sang noble, aguerri et incorruptible, est arrivé en provenance de Londres, à la tête d'une douzaine de navires transportant près de 2 600 colons, et a longé les rives d'un des plus magnifiques ports naturels du monde entier pour fonder la ville de Halifax que des générations de Canadiens allaient apprendre à aimer et à chérir.

L'histoire de la ville de Halifax est incroyablement riche. C'est une histoire que devraient célébrer non seulement les Néo-Écossais, mais l'ensemble des Canadiens. Halifax a préparé l'émergence du Canada. Dès le début des années 1800, pendant que «Muddy York», qui allait devenir Toronto, venait de se transformer de petit campement en colonie de quelque 70 habitations, Halifax était non seulement le bastion de l'empire britannique en Amérique du Nord et la plus grande forteresse à l'extérieur de l'Europe, mais aussi un port cosmopolite, grouillant d'activités, qui regroupait 10 000 habitants et qui regorgeait de trésors architecturaux, comme Government House, l'horloge de la ville, l'église St. Paul, un port où trois journaux étaient publiés, où les théâtres étaient très fréquentés, où d'innombrables bals, banquets, feux d'artifice et défilés étaient organisés et où vivaient des dames éblouissantes, parées de bijoux et habillées à la dernière mode.

Je ne veux pas dénigrer Toronto, mais dans l'histoire des fiers-à-bras, des grands gaillards qui aimaient la mer et la guerre, dans l'histoire des héros, des crapules, des aventuriers et des pirates, Toronto vient loin derrière la bonne vieille ville de Halifax.

Aucune autre ville canadienne n'a autant connu la privation, l'angoisse, l'horreur, l'excitation et le fracas de la Seconde Guerre mondiale que Halifax. Aucune autre ville canadienne n'a été autant touchée par la guerre ou n'a autant suscité l'amour et la haine chez les soldats et les marins, et je n'ai pas encore mentionné le Titanic, l'explosion survenue à Halifax et les émeutes le jour de la Victoire en Europe.

À Son Honneur le maire Walter R. Fitzgerald, aux conseillers et aux citoyens de la ville affectueusement appelée le «Gardien du Nord», je souhaite un bon anniversaire. Permettez-moi également de remercier et d'encourager M. Jack Keith et son comité de bénévoles qui s'activent déjà à préparer les festivités du 250e anniversaire de Halifax, qui auront lieu l'an prochain.

Je remercie également M. Harry Bruce, écrivain de renom, qui m'a aidé à rédiger cette allocution.

 

La santé

L'augmentation du financement public de l'Initiative pour la recherche sur le cancer du sein

L'honorable Janis Johnson: Honorables sénateurs, je veux aujourd'hui féliciter le gouvernement d'avoir annoncé l'octroi de 45 millions de dollars pour la recherche sur le cancer du sein au cours des cinq prochaines années. C'est une excellente nouvelle. Je félicite aussi le Conseil de recherches médicales du Canada de participer au financement d'un fonds pour les scientifiques qui travaillent à prévenir et à traiter le cancer du sein. De même, il est très réjouissant d'apprendre que le financement de base de 7 millions de dollars par année de l'Initiative canadienne pour la recherche sur le cancer du sein sera automatiquement réexaminé après cinq ans.

Il est facile de dire que cela ne suffit pas. Évidemment, comme d'autres, j'aimerais que l'on fasse plus. Je veux toutefois reconnaître le grand mérite des Canadiennes qui ont permis au dossier de progresser, un mérite plus grand que celui de tous les politiciens ou gouvernements, ainsi que le mérite d'organisations comme la Women's Health Research Foundation of Canada, organisme qui a son siège social à Winnipeg, qui recueille des fonds depuis 15 ans pour la recherche sur les problèmes de santé des femmes et dont j'ai l'honneur d'être la présidente d'honneur; la Genesis Foundation de Toronto, fondation qui joue un rôle de premier plan afin que davantage de fonds soient affectés à la recherche sur les problèmes de santé particuliers aux femmes; ainsi que tous les groupes de femmes au Canada et toutes celles qui ont survécu à un cancer du sein et qui ont fait en sorte que cette question s'inscrive dans les priorités gouvernementales. C'est seulement depuis une dizaine d'années que nous avons vraiment réussi à sensibiliser la population, les politiciens et les chercheurs à l'importance d'axer les efforts sur ce problème de santé dévastateur.

(1610)

Honorables sénateurs, 4 p. 100 des fonds consacrés à la recherche servent à la recherche et aux problèmes de santé propres aux femmes, outre les principales causes de décès. C'est un chiffre étonnant. Les femmes ont souffert pendant des années à cause de cela. Toutefois, nous figurons maintenant dans les priorités publiques d'une manière significative.

La recherche est la clé de nos problèmes, entre autres. La sensibilisation et le dépistage sont la clé d'un traitement précoce et de la santé. Les fonds consacrés à la recherche avancée dans le domaine du cancer du sein cette semaine auront pour effet que 19 000 femmes diagnostiquées chaque année auront une meilleure chance de survie et que la proportion d'une femme sur neuf qui meurt de cette maladie sera diminuée.

J'espère que, dans un proche avenir, le gouvernement déploiera davantage d'efforts pour promouvoir la recherche sur d'autres problèmes de santé touchant les femmes, notamment la maladie de coeur, le cancer des ovaires et la maladie mentale - tous des problèmes qui s'aggravent tous les jours.

 

Le système de santé national intégré

L'honorable Wilbert J. Keon: Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour attirer votre attention sur la requête récente des gouvernements provinciaux d'augmentation substantielle des paiements de transfert afin de renflouer leurs systèmes de santé qui éprouvent de graves difficultés.

Même si le gouvernement fédéral a haussé le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, le faisant passer de 11 milliards de dollars par année à 12,5 milliards de dollars au cours du présent exercice, les provinces ont récemment fait front commun pour demander un montant supplémentaire de 6,2 milliards de dollars au titre des transferts fédéraux en matière de santé et de programmes sociaux. Leur intention de combler l'écart entre les provinces riches et les provinces pauvres sont certes louables, mais le gouvernement prévoit cette année de transférer un total de 26 milliards de dollars aux provinces et aux territoires dans le cadre du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux pour les soins de santé, l'éducation postsecondaire, l'aide sociale et les programmes de service social. Comme chacun sait, les propositions des provinces d'une forte hausse des transferts et de la péréquation ne sont pas sans précédents.

Honorables sénateurs, le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, qui, comme vous le savez tous, a remplacé le Financement des programmes établis et le Régime d'assistance publique du Canada au moyen desquels le gouvernement finançait les soins de santé avant 1996, est un bloc de fonds qui donne aux provinces la flexibilité nécessaire pour concevoir leurs propres programmes, tout en respectant les critères et les conditions énoncés dans la Loi canadienne sur la santé. On estime que ce transfert, qui prend la forme de transferts pécuniaires et de transferts de points d'impôt, donnera 7 milliards de dollars de plus aux gouvernements provinciaux d'ici 2003.

Ce qui m'inquiète, c'est que rien ne semble garantir que cette augmentation des transferts fédéraux sera appliquée aux soins de santé parce que le TCSPS est un bloc de fonds que les provinces peuvent dépenser à leur guise, y compris en réduisant les impôts si elles le veulent.

Honorables sénateurs, nul n'est besoin de dire que, pour tous les Canadiens, notre système de soins de santé est un des programmes sociaux les plus précieux et les plus respectés. J'ai signalé au Sénat à plusieurs reprises que l'information sur la santé dans notre pays est dans un état lamentable. L'élaboration d'une stratégie nationale en vue de la mise sur pied d'un système intégré d'information sur la santé est d'une importance vitale. Toutefois, ce système doit aussi servir de base à la mise sur pied d'un système national intégré de soins de santé. Je félicite le gouvernement et le ministre de la Santé d'avoir entrepris cette initiative en établissant le Conseil consultatif national sur l'infostructure de la santé pour mettre sur pied un système qui puisse servir la population en général, les scientifiques, les patients et les fournisseurs de soins de santé.

Notre système de soins de santé a lui aussi grandement besoin d'intégration pour pouvoir offrir un continuum coordonné de services à une population définie et pour pouvoir être tenu cliniquement et financièrement responsable des résultats. Je crois que la meilleure façon d'y arriver serait de créer un institut national de la santé semblable à celui qui existe chez nos voisins du sud. Une telle institution dynamique et diversifiée pourrait coordonner la collecte et la distribution d'information sur la recherche et sur les nouvelles techniques médicales en mettant l'accent sur la promotion de la santé et le contrôle des maladies. Elle verrait à ce que les Canadiens bénéficient des plus récents progrès dans le domaine médical et aiderait à l'établissement et à la publication de buts et objectifs au nom des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux.

Il ne fait aucun doute que notre précieux système de soins de santé connaît de graves problèmes. Un financement accru pourrait, il est vrai, régler certains de ces problèmes. Nous ne saurions cependant nous contenter de cette solution simpliste, car elle ne nous permettra pas d'apporter les améliorations que nous souhaitons tous. Insistons plutôt pour que le gouvernement fédéral fasse preuve d'un véritable leadership en mettant sur pied un système de santé intégré qui fixera des normes et imposera une obligation redditionnelle, concernant les soins dispensés, dans le cadre des dépenses financières.

 

Le Sénat

Hommage aux pages

L'honorable Mabel M. DeWare: Honorables sénateurs, à l'approche des vacances d'été, je tiens à offrir, en mon nom personnel et au nom des honorables sénateurs, mes remerciements aux jeunes pages du Sénat. Nous les remercions pour le dévouement dont ils ont fait preuve, tant au Sénat que dans les comités. Nous leur savons gré de la façon plaisante dont ils nous ont servis et du respect qu'ils ont manifesté tant à l'endroit des sénateurs que de l'institution sénatoriale. Je leur souhaite à tous un été agréable et excitant.

 

Les Philippines

Le centenaire de la déclaration d'indépendance de l'Espagne

L'honorable Dan Hays: Le 12 juin 1998, vers 7 h 30, au sanctuaire Kawit, à Cavite, où a vécu le général Emilio Aguinaldo, fondateur de l'État indépendant des Philippines, les Philippins ont célébré le centenaire de la déclaration d'indépendance des Philippines de l'Espagne. J'ai eu le plaisir de représenter le Canada à la cérémonie du centenaire, à l'invitation du ministre des Affaires étrangères, l'honorable Lloyd Axworthy.

La cérémonie s'est tenue en présence du peuple philippin et de chefs d'État, ministres et représentants de divers pays. Il régnait une atmosphère de fête évidente à Manille et à la grandeur du pays. J'ai eu la chance d'assister aux riches manifestations de la culture, du patrimoine et de la fierté nationale qui se sont manifestées durant les fêtes commémoratives de cette importante date de l'histoire internationale.

La commémoration de ce centenaire est importante pour les Philippins et pour tous les citoyens de la communauté internationale. Les Philippines font aujourd'hui figure de modèle de paix, de sécurité et de prospérité, ce qui n'était possible que dans le contexte de liberté et de démocratie qui existe actuellement aux Philippines. Son Excellence le président V. Fidel Ramos l'a souligné de façon très éloquente, vendredi dernier, à l'occasion du vin d'honneur servi à Malacanang, le palais présidentiel. Ses paroles méritent l'attention de tous ceux qui chérissent les vertus de la liberté et de l'amitié. Il a déclaré: Notre mère patrie sera toujours le berceau de notre identité, mais le monde, la communauté mondiale, est le creuset où nous serons mis à l'épreuve et où nous pourrons nous accomplir pleinement.

[Français]

Le président a évoqué le souhait des Philippines d'être un partenaire indépendant et dynamique de la communauté internationale, et il a appelé de ses voeux la paix et la prospérité pour tous les pays et pour tous les peuples. Dans cet accord d'idées, il est intéressant de noter que les Philippines ont été parmi les premiers pays à s'associer à l'initiative du Canada qui a mené à la signature par 122 pays du traité international interdisant les mines antipersonnel lors d'un congrès tenu à Ottawa, du 2 au 4 décembre 1997.

[Traduction]

Nous devrions être très impressionnés par le succès des Philippines. Le peso philippin est confronté aux mêmes pressions que les autres monnaies asiatiques, mais les répercussions de la crise monétaire asiatique actuelle ont été beaucoup moins graves sur l'économie des Philippines que sur celle de ses voisins. Cela a donc placé le pays dans une bonne position pour faire face à la sécheresse attribuable à El Niño, qui a durement frappé toute la région.

J'ai constaté, honorables sénateurs, que les Philippines ont traversé une difficile période d'ajustement il y a quelques années, soit bien avant la crise financière que l'Asie connaît en ce moment. Pendant que les autres pays se débattent devant les défis que les Philippines ont déjà surmontés, l'économie de ce pays profite des efforts déployés jusqu'à maintenant, témoignant d'une plus grande stabilité et également de traditions et de valeurs démocratiques bien ancrées.

[Français]

Prenons, par exemple, les réalisations de cette fière nation au cours du mandat de six ans de son président sortant. Sous la direction de Fidel Ramos, les Philippines se sont dégagées d'un programme du Fonds monétaire international pour se joindre à l'Organisation mondiale du commerce, ont donné une impulsion aux investissements internationaux et ont démantelé les monopoles dans l'agriculture, les télécommunications et la production d'énergie.

[Traduction]

L'économie des Philippines continue à croître. Les besoins sont en voie d'être comblés en ce qui concerne l'infrastructure. La main-d'oeuvre est qualifiée, et la transparence s'est améliorée dans le secteur financier. De même, le principe de la reddition de comptes par le gouvernement est respecté grâce à la représentation des partis d'opposition au congrès et à la liberté de presse.

(1620)

Le fait le plus révélateur, honorables sénateurs, c'est peut-être que l'espérance de vie des Philippins a augmenté de quatre ans et qu'elle atteint maintenant 69 ans. En outre, le nombre de citoyens vivant sous le seuil de la pauvreté a chuté de 10 p. 100.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je dois informer le sénateur Hays que son temps de parole est écoulé. Plaît-il aux sénateurs de laisser le sénateur Hays continuer?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Hays: Honorables sénateurs, la plupart des analystes attribuent ce succès à l'engagement du gouvernement à l'égard de la démocratie et à ses politiques de libéralisation et de privatisation. L'héritage de stabilité politique et de réforme économique que laisse le président Ramos en dit long sur les moyens démocratiques que son gouvernement a employés pour le bien collectif.

En terminant, honorables sénateurs, je constate simplement que les Philippins sont fiers du succès de leur pays, et avec raison. La transition qui les a fait passer de l'état de colonie à celui de pays indépendant fut longue et ardue, mais ils ont résisté à la dictature et surmonté la désunion et les difficultés économiques qui leur ont nui pendant si longtemps. Au moment où le président Ramos se prépare à laisser la place à son successeur, le président désigné Joseph Estrada, le 30 juin, les Philippins ont raison d'être optimistes quant au prochain centenaire de leur pays.

J'invite enfin mes collègues à se joindre à moi pour souligner le centenaire de la déclaration d'indépendance des Philippines et pour souhaiter au président sortant ainsi qu'à son successeur et à son gouvernement tout le succès possible dans les années à venir.

 

Les travaux du Sénat

Correction aux fins du compte rendu

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, j'étais à mon bureau hier lorsque j'ai entendu le sénateur Grafstein parler du Groupe interparlementaire Canada-États-Unis. J'ai couru jusqu'ici, mais j'étais essoufflé et je me suis mal exprimé quand j'ai pris la parole dans cette enceinte. Étant donné que j'ai reçu une aimable lettre de mon cher ami, le sénateur Gauthier, je voudrais régler ce problème tout de suite.

À la page 1831 des Débats du Sénat d'hier, le mercredi 17 juin 1998, au sommet de la deuxième colonne, on peut lire:

 

... je prévois rédiger [...] un rapport...
C'est incorrect. Le conseil interparlementaire m'a demandé de rédiger un rapport. Ce n'est pas une initiative personnelle.

Comme je le disais, le sénateur Gauthier m'a envoyé une lettre dans laquelle il disait que si c'était ce que je voulais faire, je n'avais pas compris l'importance de l'AIPLF.

Honorables sénateurs, je voudrais que le sénateur Gauthier sache que je le comprends. Je n'ai jamais envisagé l'abolition de toutes les associations parlementaires pour ne garder que le Groupe interparlementaire Canada-États-Unis. Ce n'est pas mon intention.

[Français]

Sénateur Gauthier, loin de moi l'intention d'abolir toutes les autres associations parlementaires pour ne garder que le Groupe interparlementaire Canada-États-Unis. J'essayais seulement de les prioriser. Deuxièmement, il n'a pas à me dire que je ne connais pas le fonctionnement de l'association et le rôle important de l'AIPLF. Il y joue un grand rôle mais il y a une chose importante, chez Jean-Robert Gauthier, c'est qu'il lit les débats. Il a lu attentivement tous les débats et il a découvert cette perle, donc je veux réparer ce que j'aurais pu commettre comme erreur hier et le rassurer que ce n'est pas mon intention. Je ferai le travail qu'on m'a demandé de faire, et loin de moi l'idée d'abolir les autres associations interparlementaires. C'est simplement pour mettre de l'ordre dans les associations parlementaires et les groupes d'amitié.

 


[Traduction]

 

AFFAIRES COURANTES

Projet de loi concernant la Sanction royale

Rapport du comité

L'honorable Lorna Milne, présidente du comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, présente le rapport suivant:

Le jeudi 18 juin 1998

Le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a l'honneur de présenter son 

DOUZIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été déféré le projet de loi S-15, Loi relative aux modalités d'octroi par le Gouverneur général, au nom de Sa Majesté, de la sanction royale aux projets de loi adoptés par les Chambres du Parlement, a, conformément à l'ordre de renvoi du mardi 9 juin 1998, étudié ledit projet de loi et en fait maintenant rapport avec les modifications suivantes:

1. Page 1, article 1: substituer les lignes 13 à 15 par ce qui suit:

 

«loi de crédits présenté lors d'une session;»
2. Page 1, article 3: substituer les lignes 19 à 21 par ce qui suit:

 

«dent ou le suppléant de celui-ci.»
3. Page 1, Nouvel article 3:

 

a) ajouter après la ligne 16, page 1, ce qui suit:
«3. L'octroi de la sanction royale s'effectue selon les formalités visées à l'alinéa 2a) au moins une fois par année civile.»

 

b) renuméroter les articles subséquents.
4. Page 1, Nouvel article 7: Ajouter après la ligne 27 ce qui suit:

«7. Nulle sanction royale n'est invalide du seul fait de l'inobservation de l'article 3 au cours d'une année civile.»

Respectueusement soumis, 

La présidente,
LORNA MILNE

Son Honneur le Président suppléant: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

Le sénateur Milne: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)g) du Règlement, je propose que l'étude du rapport soit inscrite à l'ordre du jour de la présente séance.

Son Honneur le Président suppléant: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Des exemplaires de ce rapport ont-ils été distribués?

Le sénateur Milne: Je veillerai à ce que ce soit fait.

(La motion est adoptée et l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la présente séance.)

 

Le commissaire à l'information

Présentation du rapport du comité sur la motion portant approbation de sa nomination

L'honorable Lorna Milne, présidente du comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, présente le rapport suivant:

Le jeudi 18 juin 1998

Le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a l'honneur de présenter son 

TREIZIÈME RAPPORT

Votre comité, conformément à l'article 54 de la Loi sur l'accès à l'information, chapitre A-1, des Lois révisées du Canada (1985), que le Sénat approuve la nomination de l'honorable John M. Reid, c.p., à titre de commissaire à l'information, a, conformément à l'ordre de renvoi du mardi 16 juin 1998, entendu l'honorable John M. Reid et recommande que le Sénat approuve sa nomination à titre de commissaire à l'information.

Respectueusement soumis, 

La présidente,
LORNA MILNE

Son Honneur le Président suppléant: Honorables sénateurs, quand ce rapport sera-t-il étudié?

(Sur la motion du sénateur Milne, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)g) du Réglement, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la présente séance.)

 

Les lignes directrices fédérales sur les pensions alimentaires pour enfants

Dépôt et étude du rapport provisoire du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie chargé de leur examen-Ajournement du débat

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le dixième rapport du comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie. Ce rapport traite de la mise en oeuvre et de l'application du chapitre 1, Loi modifiant la Loi sur le divorce, la Loi d'aide à l'exécution des ordonnances et des ententes familiales, la Loi sur la saisie-arrêt et la distraction de pensions et la Loi sur la marine marchande du Canada, et de lignes directrices qui s'y rapportent, soit les Lignes directrices fédérales sur les pensions alimentaires pour enfants.

Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant le paragraphe 97(3) du Règlement, je propose que le rapport soit mis à l'étude dès maintenant afin que je puisse en donner quelques explications en 60 secondes.

Son Honneur le Président suppléant: Permission accordée, honorables sénateurs?

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, j'aimerais obtenir une précision de la présidence. Si le sénateur se voit accorder la permission de parler, à quelle étape en serons-nous de l'étude du rapport après son intervention?

Son Honneur le Président suppléant: Le sénateur Murray propose, avec la permission du Sénat: Que le rapport soit étudié maintenant. Il a signalé au Sénat qu'il souhaite parler pendant quelques 60 secondes environ. Bien entendu, le Sénat devra donner sa permission.

La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Murray: Honorables sénateurs, dans ce rapport, le comité fait des observations préliminaires et relève les domaines qui doivent être étudiés plus en profondeur quant aux répercussions et à la mise en oeuvre des lignes directrices qui sont entrées en vigueur le 1er mai 1997. Certains sénateurs se rappellent peut-être que l'étude découle de l'examen préalable par le comité du projet de loi C-41, modifiant la Loi sur le divorce et prévoyant la mise en place des lignes directrices par voie de règlements. Même si nos travaux ont suivi de près leur

mise en oeuvre, tous les membres du comité vont reconnaître que cet effort était utile et que les témoins qui ont comparu lors de 13 séances avaient des arguments convaincants. Le comité entend se pencher à nouveau sur la question dans les 18 prochains mois, à cause de l'importance des lignes directrices et de l'intérêt de nos membres.

Notre rapport provisoire renferme 12 recommandations. La plus importante d'entre elles, c'est qu'on doit clarifier les dispositions portant sur les dépenses extraordinaires. La plupart des témoins ont jugé que cette disposition causait de très graves problèmes. Nous avons recommandé une interprétation de ces dispositions qui nous semble sensée et nous avons proposé une définition des dépenses extraordinaires qui, selon nous, aidera les avocats, les plaideurs et les juges à résoudre des problèmes difficiles.

La Loi sur le divorce exige que le ministre de la Justice examine de façon exhaustive les lignes directrices et présente un rapport à ce sujet au Parlement après cinq ans. Dans notre rapport, nous avons exhorté la ministre à ne pas attendre aussi longtemps avant d'apporter les modifications aux lignes directrices, s'il est évident que cela s'impose. Nous avons fait une distinction entre les domaines qui ont besoin d'une attention immédiate et ceux qui exigent plus de temps pour qu'on puisse évaluer leurs répercussions. Nous avons également formulé des recommandations sur les dépenses touchant l'enseignement postsecondaire en particulier, le partage des responsabilités parentales, les difficultés indues et l'exécution des ordonnances et des ententes familiales.

Je remercie les honorables sénateurs de leur indulgence.

(Sur la motion du sénateur Cools, le débat est ajourné.)

 

La Loi sur les grains du Canada
La Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire
La Loi sur les marchés de grain à terme

Projet de loi modificatif-Rapport du comité

L'honorable Leonard J. Gustafson, président du comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts, présente le rapport suivant:

Le jeudi 18 juin 1998

Le comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts a l'honneur de présenter son 

SIXIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-26, Loi modifiant la Loi sur les grains du Canada et la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire et abrogeant la Loi sur les marchés de grain à terme, a, conformément à l'ordre de renvoi du mardi 16 juin 1998, étudié le projet de loi et en fait maintenant rapport sans propositions d'amendement.

Respectueusement soumis, 

Le président,
LEONARD J. GUSTAFSON

Troisième lecture

Son Honneur le Président suppléant: Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi une troisième fois?

Le sénateur Gustafson: Honorables sénateurs, nonobstant l'alinéa 58(1)g) du Règlement, je propose que le projet de loi soit maintenant lu une troisième fois.

Son Honneur le Président suppléant: Accordez-vous la permission, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.)

 

Le Code canadien du travail
La Loi sur les déclarations des personnes morales et des syndicats

Projet de loi modificatif-Rapport du comité

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de présenter le onzième rapport du comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie sur le projet de loi C-19, Loi modifiant le Code canadien du travail (partie I), la Loi sur les déclarations des personnes morales et des syndicats et d'autres lois en conséquence.

Je demande que le rapport soit imprimé aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui.

Son Honneur le Président suppléant: Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(Le texte du rapport figure dans les Journaux du Sénat d'aujourd'hui.)

Son Honneur le Président suppléant: Honorables sénateurs, quand le projet de loi sera-t-il lu une troisième fois?

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Avec la permission du Sénat, plus tard aujourd'hui.

Son Honneur le Président suppléant: La permission est-elle accordée?

Des voix: D'accord.

(Sur la motion du sénateur Carstairs, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la présente séance.)

 

Régie interne, budgets et administration

Présentation et adoption du vingt-deuxiÈme rapport du comité

L'honorable Bill Rompkey, président du comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, présente le rapport suivant:

Le jeudi 18 juin 1998

Le comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration a l'honneur de présenter son 

VINGT-DEUXIÈME RAPPORT

La Loi constitutionnelle de 1867, paragraphe 23(5), mentionne qu'un sénateur «devra être domicilié dans la province pour laquelle il est nommé». Les sénateurs qui ont leur résidence principale à plus de 100 kilomètres de la colline parlementaire engagent des frais de subsistance additionnels lorsqu'ils sont dans la région de la capitale nationale et ils devraient en être défrayés.

Les députés ont droit à une indemnité maximale de 6 000 $ pour acquitter leurs frais de subsistance lorsqu'ils sont loin de leur résidence principale. La commission Blais a récemment recommandé de relever cette indemnité à un maximum de 12 000 $ par an.

La commission a reconnu que les sénateurs engageaient eux aussi des dépenses de subsistance lorsqu'ils sont dans la région de la capitale nationale et a recommandé qu'ils aient droit au remboursement de leurs frais. Votre comité fait remarquer qu'il est habilité, aux termes du paragraphe 63(1) de la Loi sur le Parlement du Canada, à prendre des mesures pour le remboursement des dépenses de cette nature engagées par les sénateurs.

Votre comité propose, par conséquent, ce qui suit:

 

(i) qu'une politique soit établie pour le remboursement aux sénateurs admissibles des frais de subsistance effectivement engagés dans la région de la capitale nationale; et
(ii) que votre comité soit autorisé à établir les modalités de cette politique et de les réviser périodiquement.
Votre comité souligne que les montants remboursés aux sénateurs au titre des frais de subsistance engagés dans la région de la capitale nationale seront divulgués dans les Comptes publics du Canada.

Respectueusement soumis, 

Le président,
WILLIAM ROMPKEY

Son Honneur le Président suppléant: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

Le sénateur Rompkey: Avec la permission du Sénat, maintenant.

Son Honneur le Président suppléant: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.) 

 

Privilèges, Règlement et procédure

Dépôt du sixième rapport du comité

L'honorable Shirley Maheu: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le sixième rapport du comité permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure.

Son Honneur le Président suppléant: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Maheu, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour du mardi 22 septembre 1998.)

[Français]

 

Régie interne, budgets et administration

Présentation du vingt-troisième rapport du comité

L'honorable Pierre Claude Nolin, vice-président du comité sénatorial permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, présente le rapport suivant:

Le jeudi 18 juin 1998

Le comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration a l'honneur de présenter son 

VINGT-TROISIÈME RAPPORT

Le Budget 1998-1999 adopté par le Sénat le 26 février 1998 prévoit des crédits de 500 000 $ pour le financement de recherches additionnelles menées par les caucus des partis, sous réserve d'autres discussions. Des fonds semblables sont accordés aux partis officiels de l'autre endroit, et ils aideront les sénateurs à s'acquitter de leurs fonctions parlementaires.

Votre comité recommande maintenant qu'à compter du 1er avril 1998, les crédits de 500 000 $ soient distribués comme suit pour l'année financière 1998-1999: (i) jusqu'à 5 000 $ à chacun des sénateurs indépendants; (ii) le reste devant être partagé également entre le parti gouvernemental et l'opposition officielle. Ces fonds doivent servir à l'aide à la recherche et à l'acquisition de l'équipement connexe nécessaire.

L'établissement de contrats de services suivra le modèle prévu pour le budget global des sénateurs. Les employés à contrat appartiendront à l'une ou l'autre de trois catégories suivantes : i) les contrats de courte durée pour un projet précis; ii) les contrats de services de moins de six mois; iii) les contrats de services de plus de six mois. Les contrats seront renouvelés tous les ans au 1er avril.

L'espace de bureau, les fournitures et les lignes téléphoniques seront fournis par l'Administration du Sénat. Les autres services (messagerie, poste, imprimerie) seront également accordés aux centres de recherche.

Les dépenses seront engagées par l'Administration du Sénat sur réception des documents approuvés. Le chef de chaque parti déléguera un pouvoir de signer à deux sénateurs de son parti. Chaque sénateur indépendant exercera un pouvoir de signer jusqu'à concurrence du maximum prévu.

Votre comité réexaminera cette politique avant le prochain exercice.

Respectueusement soumis, 

Le président,
WILLIAM ROMPKEY

Son Honneur le Président suppléant: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

Le sénateur Nolin: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat, et nonobstant l'alinéa 59(1)g) du Règlement, je propose que le rapport soit inscrit à l'ordre du jour pour étude plus tard aujourd'hui.

Son Honneur le Président suppléant: Vous plaît-il honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(Sur la motion du sénateur Nolin, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour plus tard ce jour.)

[Traduction

Projet de loi de reconnaissance des services de guerre de la marine marchande

Première lecture

L'honorable J. Michael Forrestall présente le projet de loi S-19, visant à faire davantage reconnaître les services des anciens combattants de la marine marchande du Canada et prévoyant à leur endroit une compensation juste et équitable.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président suppléant: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Forrestall, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour du mardi 6 octobre 1998.)

[Français

Les pays en voie de développement

L'état de l'éducation et de la santé chez les jeunes filles et les femmes-Avis d'interpellation

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool: Honorables sénateurs, conformément à l'article 57(2) du Règlement, je donne avis que le mardi 22 septembre 1998, j'attirerai l'attention du Sénat sur la population, l'éducation et la santé dans de nombreux pays en voie de développement, en particulier chez les jeunes filles et les femmes.

 


[Traduction

PÉRIODE DES QUESTIONS

Les travaux du Sénat

L'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada-L'assurance visant le sort de la motion-La position du gouvernement

L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Elle a trait au Régime de pensions du Canada.

Aujourd'hui, les membres du comité sénatorial permanent des banques et du commerce ont demandé à l'unanimité au Sénat d'adopter immédiatement la motion no 73 inscrite au Feuilleton au nom du sénateur Carstairs. J'ai proposé cette motion le 8 juin. Le débat a été ajourné par le sénateur Carstairs. Je ne pense pas que l'ajournement du débat devrait servir à reporter indéfiniment l'examen de la motion.

Pourrions-nous examiner cette motion aujourd'hui étant donné que nous partons demain en congé pour l'été?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, les sénateurs de ce côté-ci de la Chambre sont d'accord pour examiner cette motion plus tard aujourd'hui. 

La défense nationale

La préparation des Forces armées canadiennes pour participer à l'initiative de l'OTAN au Kosovo, en Serbie-La position du gouvernement

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Quelle est la position du gouvernement en ce qui concerne l'envoi de forces militaires au Kosovo face aux récents mouvements militaires des Serbes qui voulaient renforcer leur position avec des véhicules blindés lourds dans la région de la route de Prizren?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, comme vous le savez, le Canada a appuyé les tactiques de nos alliés de l'OTAN. Nous appuyons aussi les efforts de la Russie en vue d'arriver à un règlement négocié. Le but essentiel est, bien sûr, de mettre fin aux combats.

Je pense que nos alliés de l'OTAN ont clairement fait comprendre au gouvernement yougoslave que les combats qui se déroulent au Kosovo sont inacceptables. La question de savoir si l'on devrait envoyer du personnel canadien est à l'étude.

Le sénateur Forrestall: Honorables sénateurs, le leader du gouvernement pourrait-il nous dire si des arrangements ont été pris afin de mettre à la disposition de nos alliés un certain nombre d'avions de guerre canadiens? Dans l'affirmative, comment se propose-t-on de les livrer?

(1650)

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je suis persuadé que les gens responsables à cet égard au ministère de la Défense nationale sont parfaitement au courant de la situation et prêts à intervenir sur-le-champ s'ils en reçoivent l'ordre du gouvernement du Canada.

Le sénateur Forrestall: Ma question est encore plus fondamentale.

Nous avons pris cet engagement il y a longtemps. Nous n'avions aucun moyen de les amener là-bas. Je le demande plus précisément: avons-nous un moyen de les amener dans cette partie du monde?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je crois comprendre que cette question a fait l'objet d'un réexamen complet de la part des autorités militaires et qu'on a pris des mesures pour veiller à ce que les avions soient prêts à intervenir sur-le-champ, comme cela devrait se faire.

Le sénateur Forrestall: Ils sont stationnés sur la piste de la base de Cold Lake! Il n'y servent pas à grand-chose.

 

Les allégations de mauvais traitements de la part de membres des forces armées-Les propos du ministre avant la fin de l'enquête-La position du gouvernement

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et a trait à l'affaire de Ann Margaret Dickey. Comme vous le savez, Mme Dickey allègue qu'elle a été violée par d'autres soldats à la base de recrutement de Saint-Jean, au Québec. Plus précisément, la jeune femme de 25 ans a allégué qu'un matelot-chef et un caporal-chef l'avaient battue à coups de poing et à coups de pied, puis l'avaient violée en l'obligeant même à les supplier de lui garder la vie sauve.

Ces allégations ont donné lieu à une enquête de la part de la police militaire. En réaction à ces allégations, le ministre de la Défense aurait dit, selon ce que rapporte le Sun d'Ottawa du 12 juin:

Je crois comprendre qu'elle a fait des dépositions différentes à des moments différents aux autorités policières, des dépositions révisées ou nouvelles, sur une base continue, de sorte qu'il a fallu procéder à d'autres examens et enquêtes.

Ne trouvez-vous pas qu'il n'est pas correct de la part du ministre de la Défense, dont le ministère enquête dans cette affaire, de faire des commentaires sur cette affaire avant que l'enquête soit terminée?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je crois que le ministre de la Défense nationale a agi correctement. On a posé une question à ce sujet l'autre jour. J'ai dit que j'examinerais la question et qu'elle fait l'objet d'une enquête approfondie de la part de la police militaire. Nous espérons qu'un rapport sera rendu public dans un avenir très rapproché.

Le sénateur Oliver: L'honorable leader ne trouve-t-il pas que le fait pour le ministre d'intervenir comme il l'a fait et de tenir des propos contre la victime a pour effet de miner l'impartialité de l'enquête et de la compromettre?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je ne suis pas au courant des propos que le ministre a pu tenir à ce sujet.

Le sénateur Oliver: Je vous ai lu ces propos qui ont été rapportés dans les journaux. Le ministre ne devrait-il pas démissionner?

Le sénateur Graham: Non.

 

Réponses différées à des questions orales

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai les réponses aux questions posées au Sénat le 25 mars, par l'honorable sénateur David Tkachuk, concernant les modifications aux règles sur le supplément de revenu garanti relatives aux gains occasionnels des personnes âgées; le 8 juin, par l'honorable sénateur Mira Spivak, concernant l'aide et l'information fournies aux acheteurs du réacteur CANDU; le 9 juin 1998, par l'honorable J. Michael Forrestall, concernant l'achat dans le secteur public de vêtements et d'équipements pour les troupes; le 10 juin, par l'honorable sénateur Orville Phillips et par l'honorable sénateur Raynell Andreychuk, concernant le statut actuel du Centre de santé Perley-Rideau pour anciens combattants; le 11 juin 1998, par l'honorable J. Michael Forrestall, concernant la formation et le déploiement des réservistes et l'insuffisance de la ration alimentaire; et le 11 juin 1998, par l'honorable sénateur Consiglio Di Nino, concernant les accusations de mauvais traitements et d'agressions portées contre des membres des forces armées.

L'honorable Orville H. Phillips: Honorables sénateurs, madame le leader adjoint du gouvernement pourrait-elle me lire la réponse à la question que le sénateur Andreychuk et moi-même avons posée au sujet du Centre de santé Perley-Rideau pour anciens combattants?

Le sénateur Carstairs: Certainement. Toutefois, je n'ai pas la réponse car je viens de la donner au page. Si on veut bien me la rapporter, je m'empresserai d'en faire la lecture.

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, pendant que nous attendons, est-ce que les réponses aux questions inscrites au Feuilleton sont distribuées à ceux qui les ont posées? Mme le leader adjoint du gouvernement a dit, je crois, que six ou sept des réponses avaient été demandées depuis un certain temps déjà: Les auteurs des questions aimeraient bien voir les réponses.

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, je présume que les réponses sont distribuées le plus rapidement possible. Les pages ont reçu un nombre approprié de copies.

 

Les anciens combattants

Le statut actuel du centre de santé Perley-Rideau pour anciens combattants-La position du gouvernement

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, voici la réponse à une question que l'honorable sénateur Orville Phillips a poséele 10 juin 1998.

Anciens Combattants Canada accorde la plus grande importance qui soit au soin et au bien-être des anciens combattants. Le ministère consacre près de 2 milliards de dollars aux programmes destinés aux anciens combattants, dont environ 200 millions sont versés à l'égard des soins de longue durée prodigués aux anciens combattants.

Comme dans le cas de tous les établissements semblables, Anciens Combattants Canada assure une supervision rigoureuse des soins qui sont prodigués aux anciens combattants au Centre de santé Perley-Rideau pour anciens combattants. En avril dernier, Anciens Combattants Canada et le ministère de la Santé de l'Ontario ont réalisé un examen de la qualité des soins qui a confirmé que les anciens combattants reçoivent des soins convenables au Centre Perley-Rideau. Anciens Combattants Canada continuera d'assurer la supervision des soins prodigués au Centre Perley-Rideau, et le cas échéant, prendra les mesures nécessaires pour assurer le maintien de la qualité des soins.

Anciens Combattants Canada a soigneusement examiné la possibilité d'intervenir dans l'action en justice intentée par le Centre Perley. Il a été convenu qu'il s'agissait d'une question qui devait être réglée par le Centre Perley et l'Ontario. La cour de justice de l'Ontario (Division générale) a été informée de cet avis.

 

Les finances nationales

Les modifications aux règles sur le supplément du revenu garanti relatives aux gains occasionnels des personnes âgées-La position du gouvernement

(Réponse à la question posée par l'honorable David Tkachuk le 25 mars 1998)

Les changements apportés à la définition du revenu utilisée pour calculer le Supplément de revenu garanti (SRG) ou l'Allocation au conjoint (AAC) visent à harmoniser davantage la définition du revenu avec celle de la Loi de l'impôt sur le revenu. Les changements visent également à faire en sorte que l'administration traite ces prestations d'une manière plus conforme aux méthodes utilisées pour administrer la Prestation fiscale pour enfants, le remboursement des prestations sociales et l'exemption en raison de l'âge.

Or, à la suite en partie de discussions amorcées par les membres du comité et des groupes de revendication, on a signalé au gouvernement que cette mesure pourrait avoir des conséquences non souhaitées sur les paiements du SRG/de l'AAC d'un petit nombre d'aînés.

Le 25 mai 1998, le ministère des Finances a émis un communiqué de presse indiquant qu'il n'introduirait pas ce changement ni un autre qui aurait instauré une nouvelle formule de calcul pour les paiements du SRG/de l'AAC. Le ministre du Développement des ressources humaines appuie cette annonce.

Le gouvernement a procédé avec ce projet de loi sur le budget (C-36) sans le modifier, mais veillera à ce que ces deux changements n'entrent pas en vigueur.

 

Énergie atomique du Canada Limitée

L'aide et l'information fournies aux acheteurs du réacteur CANDU-La mesure de protection qu'est la signature d'un accord de non-prolifération-La position du gouvernement

(Réponse à la question posée par l'honorable Mira Spivak le 8 juin 1998)

Cette affaire est actuellement en instance devant les tribunaux, il ne serait donc pas approprié de faire des commentaires en ce moment.

 

La défense nationale

L'achat dans le secteur public de vêtements et d'équipement pour les troupes-La position du gouvernement

(Réponse à la question posée par l'honorable J. Michael Forrestall le 9 juin 1998)

Le 25 février 1998, le quartier général du Secteur du Québec de la Force terrrestre à Montréal a fait parvenir une demande au Quartier général de la Défense nationale afin d'acheter des bottes de combat d'un commerce local. À ce moment-là, il y avait une pénurie de bottes de combat dans certaines pointures, alors que 2 063 recrues devaient arriver entre le 16 mars et le 29 juin 1998 à l'École des recrues des Forces armées canadiennes à St-Jean. Le personnel à St-Jean avait trouvé dans la région de Montréal un magasin spécialisé dans la vente d'excédents militaires qui avait des bottes de combat neuves en stock (achetées directement d'un manufacturier). Même si on a constaté par la suite que les bottes étaient de second choix et qu'elles avaient été rejetées par l'autorité fonctionnelle du MDN, on a néanmoins décidé que c'était la façon la plus rapide de satisfaire aux besoins des premières recrues, et on en a acheté 579 paires. En outre, des directives d'approvisionnement ont été émises en vue de déplacer plusieurs centaines de paires de bottes d'autres endroits du MDN à St-Jean. On a passé une commande, auprès d'un manufacturier, pour obtenir 900 paires de bottes qui seraient livrées avant la fin d'avril 1998. On a conclu un important contrat en avril 1998 pour l'achat de 23 000 paires de bottes, livrées à raison de 1 000 paires par semaine. Les livraisons dans le cadre de ce contrat ont débuté le 5 juin 1998.

Plusieurs facteurs auraient contribué à la pénurie de vêtements et d'équipement de combat. De plus en plus, la majorité du personnel de la Force terrestre porte des vêtements de combat à titre de tenue de jour, et on tente d'éliminer la tenue de garnison en vue de rationaliser la tenue de la Force terrestre et de réduire les coûts. D'autres facteurs ont contribué à cette pénurie: augmentation du port de vêtements de combat par les membres des autres éléments; le fabriquant du tissu servant aux vêtements de combat a fait faillite, et on a eu de la difficulté à trouver un autre entrepreneur satisfaisant aux normes du MDN; la demande de vêtements de combat pour les réservistes a augmenté en raison de leur participation accrue aux opérations.

Pour corriger la situation, le Ministère a octroyé des contrats au cours des six derniers mois pour l'approvisionnement de chemises, pantalons et bottes de combat, d'une valeur approximative de 8,1 millions de dollars, afin de renflouer les stocks de vêtements de combat et de satisfaire à la demande croissante de vêtements de combat. Dans l'intervalle, comme il est mentionné ci-dessus, plusieurs démarches ont été entreprises en vue de satisfaire aux besoins des unités déployées, des unités se préparant à un déploiement et de l'instruction des recrues.

 

La formation et le déploiement des réservistes-L'insuffisance de la ration alimentaire-La position du gouvernement

(Réponse à la question posée par l'honorable J. Michael Forrestall le 11 juin 1998)

La section de l'alimentation des Forces armées canadiennes est autorisée à fournir de la nourriture à tous les membres de la Réserve et de la Force Régulière pendant les périodes d'entraînement ou sur le théâtre d'opérations. Elle fournit une quantité de nourriture qui devrait satisfaire la majorité des appétits et pratiquement tous les besoins nutritionnels et ce, sans frais pour les militaires. Un menu avec une bonne sélection d'aliments et des portions généreuses est la norme. De plus, si les soldats ont un entraînement très ardu, le Commandant a l'autorité de demander un surplus, afin de fournir des calories additionnelles au groupe pour une période spécifique. Les Forces armées canadiennes ont la réputation bien méritée de fournir un très haut standard d'alimentation à ses membres, autant au Canada qu'à l'étranger.

 

Les accusations de mauvais traitements et d'agressions portées contre des membres des forces armées-La position du gouvernement

(Réponse à la question posée par l'honorable Consiglio Di Nino le 11 juin 1998)

Le Service national des enquêtes (SNE) des Forces armées canadiennes enquête actuellement sur l'affaire concernant Ann Margaret Dickey. Comme cette dernière a formulé des allégations très graves et compliquées, le SNE constitue le meilleur mécanisme pour faire en sorte que tous les faits soient recueillis et qu'une enquête approfondie soit menée.

Le SNE a été créé en septembre 1997 à titre d'organisation indépendante, par suite de l'examen que le juge en chef Dickson a effectué au sujet du système de justice militaire et en réponse à une recommandation faite par la Commission d'enquête sur la Somalie.

 

Dépôt de réponses à des questions au Feuilleton

Le ministère de la Justice-La lettre aux autorités suisses au sujet de prétendues activités criminelles dans le cadre du contrat d'achat des Airbus

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 82 au Feuilleton, inscrite au nom du sénateur Lynch-Staunton.

 

La confirmation au sujet des prétendus envois humanitaires d'articles médicaux au Mexique par le sénateur Andrew Thompson

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 84 au Feuilleton, inscrite au nom du sénateur LeBreton.

 

Le ministère du Revenu-Le respect de la Loi sur les carburants de remplacement

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 104 au Feuilleton, inscrite au nom du sénateur Kenny.

 

Les transports-Les péages sur la Transcanadienne

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 112 au Feuilleton, inscrite au nom du sénateur Oliver.

 

Le rapport du vérificateur général sur l'immigration

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 114 au Feuilleton, inscrite au nom du sénateur Oliver.

 

Le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration-Demande de rapports

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 118 au Feuilleton, inscrite au nom du sénateur Oliver.

 

Le Sénat

Hommage aux pages qui nous quittent

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, avant que je ne passe à l'appel de l'ordre du jour, je voudrais présenter les pages qui vont nous quitter avant que nous nous réunissions pour la prochaine fois et leur dire adieu.

Aujourd'hui, nous perdons non seulement deux sénateurs, mais également cinq pages. Il y a, tout d'abord, Issie Berish, de Côte-Saint-Luc, au Québec. Il vient de sortir de l'Université d'Ottawa avec un diplôme en sciences politiques, et il espère poursuivre ses études en droit en septembre 1998.

[Français]

Honorables sénateurs, Alexandre Cloutier est originaire d'Alma, au Québec, et il termine sa deuxième année comme page au Sénat. Il est inscrit à la faculté de droit de l'Université d'Ottawa et il étudie le droit civil. Nous lui souhaitons un bon voyage au Costa Rica cet été.

[Traduction]

Il y a ensuite Hamish Kidston, qui répond aujourd'hui à toutes les questions des gens qui veulent savoir ce qui est arrivé à son coude. Il vient de Maple Ridge, en Colombie-Britannique. C'est également un diplômé de l'Université d'Ottawa, en administration des affaires dans son cas. Il espère poursuivre ses études en droit.

Nous avons également Aneel Rangi d'Ottawa, en Ontario. Elle étudie en criminologie à l'Université d'Ottawa. L'année prochaine, même si elle ne comptera pas parmi nos pages, elle travaillera quand même au Sénat. Elle travaillera, en effet, au bureau du sénateur Corbin en tant qu'adjointe à la recherche.

Malheureusement, le cinquième page a dû nous quitter pour une autre réunion. Il s'agit de Geoffrey Sisk.

[Français]

Il est originaire de la ville de Québec. Jeff a grandi à Fredericton, au Nouveau-Brunswick. Inscrit à l'Université d'Ottawa, il se spécialise en économie. Il termine sa deuxième année du programme de page.

De la part des sénateurs, je remercie tous les pages qui nous quittent pour leurs excellents services. Nous vous souhaitons bonne chance quelle que soit votre direction.

 


[Traduction

ORDRE DU JOUR

La Loi sur le Parlement du Canada
La Loi sur les allocations de retraite des parlementaires
La Loi sur les traitements

Projet de loi modificatif-Troisième lecture

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement) propose: Que le projet de loi C-47, Loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada, la Loi sur les allocations de retraite des parlementaires et la Loi sur les traitements, soit lu une troisième fois.

- Honorables sénateurs, je cède la parole au sénateur Simard.

L'honorable Jean-Maurice Simard: Honorables sénateurs, dès le départ, et au risque d'être traité de profiteur et de cumulard et d'être classé aux yeux des députés réformistes de l'autre endroit, comme certains journalistes anglophones ont appelé les collègues de Preston Manning un peu plus tôt, je demanderais à mes collègues anglophones de bien vouloir écouter mon intervention en français.

J'ai fait savoir aux chefs des deux côtés de cette Chambre plus tôt aujourd'hui que je proposerais un amendement à ce projet de loi. J'ai également informé les deux partis ici présents de la nature de cet amendement.

[Français]

(1700)

Honorables sénateurs, je sais que mon discours dépassera la durée permise à tout sénateur à cette étape. Je me rappelle que le sénateur Carstairs a déclaré que le Sénat réservera tout le temps nécessaire à une étude sérieuse et complète de ce projet de loi. Je demande à l'avance que les sénateurs me permettent de dépasser le temps permis.

Les opinions exprimées dans ma présentation à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-47 n'engagent que le sénateur d'Edmundston, mais se veulent tout de même une défense de la classe politique canadienne.

Honorables sénateurs, lorsque nous avons accepté de siéger dans cette Chambre, nous avons accepté en même temps d'être fidèles aux nobles devoirs qui nous étaient confiés: notre devoir envers l'institution du Sénat, que nous avons la responsabilité de rendre efficace et pertinente, notre devoir envers nos partis politiques respectifs, qui sont le véhicule primordial de notre action et de notre engagement publics. Mais, surtout, nous avons accepté notre devoir envers la Constitution de ce pays, qui nous confère de grandes responsabilités face aux gens des régions que nous représentons et face à la population canadienne dans son ensemble.

Je n'ai jamais eu aucun doute que ce devoir sacré, envers les Canadiens et les Canadiennes, devrait primer sur tous les autres. Et, avec tout ce qu'elle implique, cette responsabilité se résume finalement à dire qu'en tant que parlementaires, nous devons être non seulement des leaders d'opinion, mais aussi des défenseurs farouches des valeurs démocratiques fondamentales à l'existence même de ce pays.

C'est dans cet esprit, honorables sénateurs, que je tenais à intervenir dans ce débat du projet de loi C-47, modifiant la Loi sur le Parlement du Canada, la Loi sur les allocations de retraite des parlementaires et la Loi sur les traitements, et offrir mes commentaires suite au rapport du comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre des communes, relatif à la rémunération des parlementaires et aux recommandations de la commission Blais.

Je suis intervenu brièvement à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi, le mardi 16 juin 1998, pour exposer et dénoncer l'hypocrisie des députés, et la procédure rarement utilisée dans l'autre Chambre, de façon à adopter la mesure législative en moins de deux heures de débat, quasiment en cachette, à la vapeur et à la dernière heure avant les vacances estivales.

Je ne peux faire autrement que vous faire part de ma profonde déception, pour ne pas dire de mon indignation, face à ce que je ne peux que qualifier de lâcheté et d'hypocrisie de la part des députés des cinq partis représentés dans l'autre Chambre.

J'ai bien dit les cinq partis. J'inclus donc le mien, le Parti progressiste-conservateur, quoique je me permets de croire que pour les députés de mon parti, il s'agit peut-être d'une «erreur de jeunesse», 18 sur 19 n'ayant été élus pour la première fois que lors de l'élection de juin 1997.

Je ne fais pas allusion au contenu ou aux dispositions du projet de loi avec lesquelles je suis foncièrement d'accord, sauf quelques réserves importantes que je soulignerai plus loin. Je fais allusion à la façon indigne avec laquelle ces élus du peuple, ces personnes choisies parmi tant d'autres pour défendre les intérêts des Canadiens, ces gens qui profitent chaque jour des bienfaits de la démocratie, qui ont choisi de se cacher, comme de vulgaires conspirateurs, lorsqu'est venu le moment d'adopter la loi qui risquait de les rendre impopulaires.

L'interprétation que l'on pourrait donner à cette façon de faire pourrait être la suivante: nous allons piger dans l'argent des contribuables pour augmenter nos revenus personnels et nous croyons que c'est parfaitement justifié.

Mais le véritable message qu'ils transmettaient à leurs électeurs était celui de la honte et de la sournoiserie. Ils disaient aux gens qui leur ont donné leur confiance: «Nous prenons votre argent, mais nous ne pouvons vous dire pourquoi. Vous n'êtes pas assez intelligents pour comprendre.»

Quelle insulte! Quelle honte! On se cacherait à moins.

Le fondement de la démocratie est celui de la vérité, de la transparence. Car que vaut le droit de pouvoir s'exprimer librement si, dans l'enceinte la plus vénérable de cette libre expression au Canada, les élus supposés démocrates se liguent pour manipuler la procédure dans le seul but d'obscurcir la vérité?

Honorables sénateurs, vous me pardonnerez si je semble encore, à mon âge, et après 30 années de vie politique active, me bercer de certaines illusions.

J'en ai quand même perdu plusieurs depuis la fin des années 1940 où, encore adolescent, je venais comme pensionnaire étudier à Ottawa sous la gouverne des pères Oblats. Je me suis alors très vite passionné pour la scène politique parlementaire, et je me faisais un plaisir, alors, de venir assister aux débats des Communes, plusieurs fois par année, à l'invitation de mon député.

Cette proximité du pouvoir ne faisait qu'attiser la flamme de nos débats politiques de collégiens. Tout nous semblait pourtant si facile avec nos yeux d'adolescents. En huit ans, nous avions réglé tous les problèmes des étudiants, tous les problèmes du Canada et quelques conflits mondiaux lorsque nous avions quelques heures pour nous y arrêter.

Et nous avions ensemble pris de grandes décisions quant à notre avenir personnel, par exemple, que nous serions millionnaires avant l'âge de 40 ans et que nous ferions de la politique un jour.

Quant à moi, natif de Rivière-Bleue, j'avais déjà conclu que je deviendrais chef de mon parti au Québec, que je ne serais jamais un politicien à plein temps, et que je ne passerais pas plus de dix ans en politique active. Ah! oui. Je connaissais ça, la politique avec mes confrères.

(1710)

Cinquante ans plus tard, je peux vous dire que je ne suis jamais devenu millionnaire, que je n'ai jamais été chef de mon parti au Québec, que j'ai fait carrière en politique au Nouveau-Brunswick, et que cela fait 30 ans maintenant que je ne fais que cela.

Mais il y a quand même une chose sur laquelle je suis sûr de ne pas m'être trompé: c'est celle d'avoir alors choisi comme modèle un député du nom de Jean-François Pouliot, porte-étendard libéral - croyez-le ou non! - dans ma circonscription natale de Rivière-du-Loup-Témiscouata pendant plus de 30 ans.

Ce n'est pas pour rien que Jean-François Pouliot a été élu et réélu huit fois. Parmi le troupeau de moutons libéraux du temps, qui se prétendaient députés du Québec, il était un homme d'une grande franchise et d'un grand courage politique, qui n'hésitait pas à placer le bien de ses concitoyens avant celui de son parti. Il alla même jusqu'à se présenter comme libéral indépendant, en 1945, ce qui ne réduisait même pas sa confortable majorité.

J'ai connu ma première leçon de politique vécue - plutôt que rêvée - à l'élection du 25 juin 1968, comme candidat du Parti progressiste-conservateur, sous la direction de l'honorable Robert Stanfield, quand j'ai été confronté à un phénomène surnommé la Trudeaumanie et à un adversaire libéral du nom de Eymard G. Corbin, jeune journaliste et professionnel comme moi; quant à moi, j'avais fondé, 9 ans plus tôt, une firme de comptables agréés à Edmunston avec un bureau à Grand-Sault.

Malgré la défaite qui me fait encore un pincement au coeur après trente ans, il me fait énormément plaisir de retrouver ici dans cette Chambre cet adversaire, l'honorable sénateur de Grand-Sault, Eymard G. Corbin, qui a été un modèle de dévouement pour les gens de sa région, de sa province et du Canada au cours des 30 dernières années et que je salue, que je remercie et que je félicite aujourd'hui au nom de tous les concitoyens de notre province.

Ce dont je me souviens le plus est qu'il avait gagné, le 25 juin 1968, dans l'honneur, comme j'avais accepté la défaite dans l'honneur. Les électeurs ne l'ont pas oublié, ni pour lui, ni pour moi. Quelques mois plus tard, je devenais président du Parti progressiste-conservateur provincial; le 26 octobre 1970, sous le leadership de Richard Hatfield, j'étais élu député alors que nous prenions le pouvoir contre un adversaire libéral apparemment invincible, l'honorable premier ministre Louis Robichaud, le premier Acadien élu premier ministre, un collègue sénateur que je salue, que je remercie au nom de tous les citoyens et citoyennes de ma province.

Pendant les 15 prochaines années de pouvoir ininterrompu, j'ai eu la chance de faire partie du Cabinet d'un premier ministre, feu l'honorable Richard Hatfield, qui est devenu un exemple de tolérance et de dynamisme à travers tout le Canada. En juin 1985, j'ai eu le bonheur d'accéder au Sénat et de venir défendre les intérêts de ma région sur la scène nationale.

Pendant toutes ces années de politique active, je suis fier de dire que j'ai toujours voulu me tenir rigoureusement au courant des préoccupations quotidiennes de mes électeurs, comme de celles de mes collègues députés et sénateurs.

J'ai appris que les électeurs canadiens sont beaucoup plus intelligents que les observateurs et les fins stratèges de la scène politique voudraient bien nous ne le laisser croire. Que ces électeurs sont capables de faire la part des choses et de tirer leurs propres conclusions, souvent beaucoup plus brillamment que ces pontifes de la politique.

J'ai toujours essayé d'agir avec transparence et à certains moments, cette façon de procéder m'a créé des petits problèmes passagers. Je n'ai jamais eu peur de la vérité. Les électeurs d'Edmundston m'ont fait confiance quatre fois, en m'accordant chaque fois 55 p. 100 du vote exprimé.

En même temps, les électeurs d'Edmundston réélisaient, pendant 16 années, un député fédéral libéral. Ne me dites pas que ce n'est pas un signe d'intelligence, que ces électeurs ne savent pas quels députés défendent leurs intérêts avant ceux de leur parti.

Je n'ai jamais eu aucun doute que les gens pouvaient faire la différence entre la propagande et le courage, entre la poudre aux yeux et la franchise, entre le subterfuge et l'honnêteté.

Quand les parlementaires ont le courage de s'expliquer, sans détour, les électeurs, même s'ils restent en désaccord avec leurs représentants, apprécient avant tout leur courage de dire la vérité.

Richard Hatfield, moi-même et notre gouvernement étions loin de la perfection. Mais les gens du Nouveau-Brunswick savaient à quoi s'en tenir avec nous. Les Acadiens nous ont crus, lorsque nous leur avons dit que ce Parti progressiste-conservateur renouvelé, parti qui leur avait toujours été hostile pendant tant d'années, était maintenant prêt à reconnaître leurs droits acadiens. Et le gouvernement de Richard Hatfield a respecté ses engagements.

Les Acadiens nous l'ont rendu, en 1982, lorsque le gouvernement de Richard Hatfield a remporté sa quatrième élection générale consécutive, ayant presque balayé la province dont plusieurs circonscriptions dans les régions acadiennes.

En nous réélisant, en 1982, les Acadiens rejetaient aussi le chef libéral du temps, Doug Young. N'allez pas me dire que les électeurs du Nouveau-Brunswick ne voyaient pas clair!

Pour revenir plus précisément au projet de loi devant nous, je vous dois des aveux et je dois des aveux à mes commettants. Le 12 juillet 1993, les sénateurs qui sont ici, incluantLowell Murray, se rappellent de cette date, alors que le Sénat a voté pour résilier la décision prise le 23 juin précédant qui autorisait aux membres de cette Chambre des dépenses mensuelles de 500 $ pour frais de dépenses de voyages encourues, à Ottawa, avec pièces justificatives à l'appui, j'ai choisi de m'abstenir.

J'ai toujours regretté de ne pas avoir eu le courage d'expliquer les raisons de mon abstention. Les gens d'Edmundston, du Nouveau-Brunswick et du Canada méritaient mieux.

Je ne commettrai pas la même erreur deux fois. C'est la principale raison pour laquelle j'interviens si longuement dans ce débat. Ainsi, je ne me tairai pas devant les manigances déplorables des députés de l'autre Chambre, tout comme je compte dire franchement et ouvertement aux gens de ma circonscription, aux Canadiens et aux Canadiennes pourquoi j'appuie l'essentiel du projet de loi, tout comme les raisons de mon profond désaccord sur certaines de ses dispositions.

Quelle ironie, honorables sénateurs, de lire le titre du rapport de la commission Blais: «Au service de la démocratie»!

Quelle tristesse de voir comment le travail honnête de cette commission d'étude des indemnités des parlementaires a pu être déshonoré aussi rapidement et sans scrupules par ces parlementaires qu'elle cherchait, entre autres, à revaloriser aux yeux d'une population de plus en plus sceptique!

En l'espace de quelques heures d'égarement, les cinq partis représentés aux Communes ont tout gâché.

La commission Blais écrivait ceci à la page 30 de son rapport, et je cite:

 

[...] il faut reconnaître que la confrontation et la critique sont des aspects intrinsèques et indispensables de l'accomplissement des responsabilités du Parlement. À ce titre, il faut également obliger le gouvernement à rendre compte des décisions et des mesures qu'il prend et veiller à la divulgation des renseignements importants pour l'intérêt public, afin de permettre aux parlementaires, et à tous les Canadiens, de se faire une opinion juste et de prendre des décisions éclairées à propos des questions liées à la politique gouvernementale.
Ces belles paroles ont-elles un sens aujourd'hui? Peut-on blâmer les gens d'être cyniques à l'endroit des parlementaires et des politiciens en général? Que doit-on penser de leur engagement envers l'intérêt public, lorsque les représentants des cinq partis signent un pacte en secret, tiennent un débat bidon de deux heures aux Communes, adoptent une mesure législative qui les touche directement sans tenir de vote formel, et le font juste avant que la Chambre n'ajourne pour trois mois avant les vacances d'été pour pouvoir mieux s'esquiver?

Nous ne sommes pas tellement surpris de voir le gouvernement actuel piloter un tel projet. Mais les bras m'en tombent lorsque les quatre partis d'opposition endossent allègrement des tactiques aussi déshonorantes.

Et que dire de ce Parti réformiste, devenu symbole de l'hypocrisie: ces députés qui refusaient les bénéfices marginaux, les «perks», comme on le dit communément. Ce chef qui ne voulait pas vivre à Stornoway, qui refusait la voiture et le chauffeur offerts par le Parlement, et qui aujourd'hui accepte tout cela, en plus de s'habiller aux frais des contribuables, en plus de conspirer avec le «diable libéral» pour accepter une formule de primes de départ qui, après 12 ans à la Chambre, pourraient valoir 300 000 $, à M. Preston Manning!

Les masques sont tombés pour montrer le vrai visage des réactionnaires.

Comme je le disais plus tôt, je suis foncièrement d'accord avec les dispositions du projet de loi C-47 et d'accord avec la commission Blais, et je cite:

La rémunération d'un parlementaire devrait être suffisante pour tenir compte des dépenses réelles associées à un mode de vie comprenant des semaines de travail de sept jours, de fréquents déplacements dans bien des cas sur de grandes distances, une séparation d'avec sa famille et la participation à des manifestations et à des cérémonies publiques. Cette rémunération doit être juste et raisonnable, compte tenu de la situation économique et de la valeur que l'on accorde à la vie politique.

Comme le disait si bien l'honorable Don Boudria:

La rémunération ne devrait pas s'avérer une manne financière, mais une rémunération juste, réaliste et comparable à l'ensemble de la société, de façon à ne pas exposer les parlementaires à des difficultés financières.

On peut difficilement être en désaccord avec ce principe sur lequel la commission Blais a fondé ses recommandations. Et j'estime que, dans ce sens, compte tenu d'augmentations de salaires comparables dans le privé et dans la fonction publique, l'augmentation de l'indemnité de 2 p. 100 proposée à la loi C-47 n'est pas excessive, même si la commission Blais ne recommandait aucune augmentation à l'heure actuelle.

Par contre, comme nous le savons, une allocation de dépenses exempte d'impôt s'ajoute à cette indemnité parlementaire, et constitue, en fait, un tiers de la rémunération totale du parlementaire. La commission Blais proposait de mettre fin à cette exemption d'impôt, en majorant l'indemnité parlementaire de sorte que la rémunération nette, après impôt, reste identique à celle reçue selon la méthode actuelle.

Je déplore le fait que les députés de l'autre Chambre aient choisi de rejeter cette recommandation, qui n'aurait au fond que donné aux parlementaires le même statut que tous les autres contribuables canadiens.

Je suis particulièrement choqué des motifs invoqués pour justifier ce refus. Les députés membres du comité parlementaire qui a étudié la proposition étaient préoccupés de la «perception» qu'en aurait le public canadien. Que diraient les contribuables en apprenant que le salaire de leurs députés passait de 64 400 $ à plus de 106 000 $, selon la nouvelle formule proposée par la commission Blais? Pire encore, que diraient les électeurs lorsqu'ils apprendraient que ce salaire a vraiment été, depuis 1991, de 106 000 $, puisque c'est là l'équivalent de leur indemnité parlementaire, plus l'allocation de dépenses non imposable?

La commission Blais a estimé l'équivalent global brut des salaires et des allocations de dépenses à 106 000 $. Encore une fois, ce n'est pas une question de justice et de transparence qui préoccupe nos collègues de l'autre Chambre. C'est une question d'image et de propagande.

De même, le comité a voulu justifier son refus en s'appuyant sur un argument des plus absurdes. Selon le comité, une telle modification à la rémunération des députés serait inéquitable étant donné les différences de traitement des députés dans les différentes provinces.

En d'autres mots, certains députés seraient taxés plus que d'autres.

Imaginez! Les députés représentant leurs circonscriptions seraient traités de la même façon que leurs électeurs! On ne peut permettre un tel scandale!

Vous me pardonnerez le sarcasme, honorables sénateurs, mais j'en perds mon sang-froid.

Les raisons invoquées par la commission Blais pour éliminer ce privilège éhonté accordé aux parlementaires dans leur rémunération étaient pourtant excellentes. L'adoption de cette mesure aurait deux avantages, et je cite la commission Blais, à la page 32 du rapport:

Elle rendrait la rémunération des parlementaires plus transparente puisqu'il n'y aurait qu'une seule somme, au lieu d'une indemnité parlementaire et d'une allocation de dépenses, et que ce montant entier serait assujetti à l'impôt sur le revenu.

Elle permettrait de mieux comparer la rémunération des parlementaires à celle des autres Canadiens, ce qui répondrait à l'une des principales objections que nous avons entendues, c'est-à-dire que l'octroi d'une allocation de dépenses exonérée d'impôt confère aux parlementaires un avantage injuste dont ne jouissent pas les autres citoyens.

Je regrette de conclure que, compte tenu de leurs agissements, les membres de l'autre Chambre n'ont été que fidèles à eux-mêmes en rejetant cette recommandation.

Ceci étant dit, j'appuie, d'autre part, une autre mesure recommandée par la commission Blais et adoptée, celle-là, par la Chambre des communes. Il s'agit de l'augmentation de l'allocation des dépenses de voyage, qui passera de 6 000 $ à 12 000 $ par année pour chaque député. Il est d'autant plus facile d'être d'accord que les députés devront fournir des preuves justificatives à l'appui de leurs demandes de remboursement.

Tous les Canadiens et les Canadiennes ont le droit d'être bien représentés et leurs élus ne devraient pas être pénalisés du fait qu'ils vivent loin d'Ottawa et qu'ils doivent maintenir deux résidences, une situation plutôt exceptionnelle.

De la même façon, honorables sénateurs, je suis toujours d'accord, comme je l'étais en 1993, que les sénateurs devraient aussi recevoir le remboursement des frais de dépenses encourues à Ottawa. Ce remboursement, quant à moi, devrait être basé sur les critères inclus dans la formule régissant le remboursement aux députés.

Je félicite le sénateur Rompkey et les autres membres du comité de la régie interne du Sénat d'avoir déposé un rapport, hier, contenant une recommandation dans ce sens. Il serait important de discuter du régime de retraite tant critiqué par les députés réformistes qui semblent aujourd'hui l'embrasser. Un autre de leurs grands principes balancé par-dessus bord!

Je demande, honorables sénateurs, que nous acceptions de discuter et de débattre, en plein jour, le temps venu, du rapport du comité de la régie interne et de chacune des dispositions contenues au projet de loi C-47, dont l'amendement contenu dans le projet de loi C-47 quant à l'ajout relatif à la formule de primes de départ des députés.

Je ne suis pas naïf et je suis conscient qu'en intervenant sur cette question aujourd'hui, je m'expose moi aussi à la critique. Je plaide coupable du fait que je suis l'un de ces infâmes «double-dippers». J'ai une pension du gouvernement du Nouveau-Brunswick en plus de la rémunération que je reçois au Sénat. Je ne crains pas de m'expliquer là-dessus en temps et lieux au Sénat, dans ma province et dans les médias.

Mais le risque que je prends est insignifiant comparativement aux dommages immenses que crée, dans l'opinion publique, le comportement absolument inacceptable de ces élus du peuple qui se liguent clandestinement dans un pacte honteux pour tromper leurs électeurs.

En conclusion:

Premièrement:

 

Attendu que la commission Blais a fait certaines recommandations suite à une étude d'une durée de plusieurs mois, et dont plusieurs de ces recommandations ont été rejetées, en secret, par le comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre;
Deuxièmement:

 

Attendu que les cinq partis ont convenu d'employer une procédure rarement utilisée et ne permettant pas aux Canadiens d'identifier le vote de chaque député;
Troisièmement:

 

Attendu qu'il m'apparaît que le projet de loi C-47 mérite une étude sérieuse et complète par les députés et les sénateurs;
Quatrièmement:

 

Attendu qu'il serait indécent que le Sénat approuve à la vapeur, à la 11e heure avant les vacances estivales, se rendant ainsi complices des manigances des députés;

Motion d'amendement

L'honorable Jean-Maurice Simard: Honorables sénateurs, je propose, appuyé par le sénateur Orville H. Phillips:

Que le projet de loi C-47 ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit lu une troisième fois d'ici six mois.

[Traduction]

Son Honneur le Président: L'honorable sénateur Simard, appuyé par l'honorable sénateur Phillips, propose que le projet de loi C-47 ne soit pas lu maintenant une troisième fois, mais qu'il soit lu une troisième fois dans six mois à compter d'aujourd'hui.

(1730)

Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: Que tous les sénateurs qui sont en faveur de la motion d'amendement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que tous ceux qui sont contre la motion d'amendement veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: À mon avis, les non l'emportent. Je déclare la motion d'amendement rejetée.

Son Honneur le Président: Si aucun autre sénateur ne désire prendre la parole, je vais mettre aux voix la motion de troisième lecture.

L'honorable sénateur Carstairs, appuyée par l'honorable sénateur Bacon, a proposé que le projet de loi soit lu une troisième fois. Plaît-il aux sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: Je vois qu'un seul sénateur s'est levé. Ce n'est pas suffisant pour convoquer les sénateurs.

(La motion est adoptée, et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.)

(1740)

 

Projet de loi sur l'éducation des Mi'kmaq

Troisième lecture

L'honorable Mary Butts propose: Que le projet de loi C-30, Loi concernant les pouvoirs des Mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse en matière d'éducation, soit lu une troisième fois.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.)

 

Projet de loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie

Troisième lecture

L'honorable Jean B. Forest propose: Que le projet de loi C-6, Loi constituant certains offices en vue de la mise en place d'un système unifié de gestion des terres et des eaux de la vallée du Mackenzie et modifiant certaines lois en conséquence, soit lu une troisième fois.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.)

 

La loi sur la défense nationale

Projet de loi modificatif-Deuxième lecture

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Rompkey, c.p., appuyée par l'honorable sénateur Robichaud, c.p. (Saint-Louis-de-Kent), tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-25, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et d'autres lois en conséquence.

L'honorable William M. Kelly: Honorables sénateurs, je suis heureux d'intervenir aujourd'hui pour parler du projet de loi C-25. Je voudrais, tout d'abord, féliciter le sénateur Rompkey pour son exposé sur ce projet de loi. Je ne vais pas répéter ce qu'il a déjà dit.

Honorables sénateurs, nos forces armées font certes face à beaucoup de critiques de la part des médias depuis quelque temps. Les médias semblent avoir la ferme intention de détruire les institutions chaque fois que quelques membres d'une institution donnée sont reconnus coupables de diverses infractions. Je ne prétends pas que des choses répréhensibles ne se sont pas passées au sein de nos forces armées, mais je trouve tout à fait injuste qu'on ternisse la réputation de toute une institution à cause des méfaits de certains.

Depuis la Seconde Guerre mondiale, j'ai maintenu un certain lien avec les Forces armées canadiennes. Lorsque je parle d'elles, je parle de milliers de jeunes hommes et femmes dont plus de 90 p. 100 servent notre pays de façon honorable, le servent bien. Lorsqu'on compare la couverture accordée aux actes répréhensibles commis par quelques-uns aux efforts remarquables de nos forces durant les inondations au Manitoba et la récente tempête de verglas, il est clair que les médias accordent beaucoup plus d'importance à ces quelques méfaits qu'à l'intervention réussie de nos forces armées au Manitoba et dans l'est du pays.

Honorables sénateurs, ainsi, il est clair que les Canadiens, à l'intérieur et à l'extérieur des Forces armées canadiennes, sont maintenant persuadés que la situation au sein des Forces armées canadiennes est vraiment terrible. C'est peut-être vrai ou pas, mais il faut garantir aux gens que les cadres juridiques voulus sont en place pour réagir immédiatement et prendre les mesures qui s'imposent lorsqu'on constate des méfaits. Je crois qu'il est fort possible que le projet de loi C-25 permette, dans une large mesure, de réaliser cet objectif extrêmement important.

À cause de la curée à laquelle la presse se livre actuellement, on peut comprendre que le moral dans les forces armées soit plutôt bas. Il faut remédier à cette situation dans l'intérêt des membres des forces armées et dans celui de leurs familles.

Honorables sénateurs, je vous exhorte à adopter immédiatement le projet de loi en deuxième lecture afin qu'on puisse le renvoyer au comité sans délai. Le projet de loi est complexe et exige un examen détaillé. Outre d'autres témoins, je crois que le comité devrait entendre certains membres des forces armées elles-mêmes, non pas seulement des échelons supérieurs mais des sous-officiers et des hommes et des femmes de troupes. J'espère en outre que le comité siégera durant l'été afin d'être en mesure de faire rapport dès l'ouverture de la session d'automne.

Je sollicite votre coopération pour renvoyer le projet de loi au comité aussitôt que possible.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu une deuxième fois.)

 

Renvoi au comité

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Carstairs, le projet de loi est renvoyé au comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.)

 

Les travaux du Sénat

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je crois qu'il y a entente pour que nous passions à la motion no 67 concernant l'hépatite C, inscrite en mon nom. Lorsque le débat et le vote seront terminés, nous reviendrons à l'ordre normal des travaux inscrits au Feuilleton

La santé

La Commission d'enquête sur le système d'approvisionnement en sang au Canada-motion portant observation des recommandations-Motion d'amendement-Recours au Règlement-Ajournement du débat jusqu'à la décision de la présidence

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Lynch-Staunton, appuyée par l'honorable sénateur DeWare:

Que le Sénat sanctionne et appuie les conclusions et les recommandations de la Commission d'enquête sur l'approvisionnement en sang au Canada;

Que, pour des motifs humanitaires, le Sénat exhorte le gouvernement du Canada et les gouvernements des provinces et des territoires à accepter ces conclusions et ces recommandations; et

Qu'une copie de la présente motion soit communiquée aux ministres de la Santé du gouvernement fédéral, des provinces et des territoires;

Et sur la motion en amendement de l'honorable sénateur DeWare, appuyée par l'honorable sénateur Kinsella, que la motion ne soit pas maintenant adoptée, mais qu'elle soit modifiée en supprimant, au deuxième paragraphe, les mots «à accepter ces conclusions et ces recommandations» et en les remplaçant par ce qui suit:

 

«à ne pas exclure dans la détermination de l'indemnisation toute personne ayant contracté l'hépatite C au moyen de composés ou de produits sanguins»;

Et sur la motion en amendement de l'honorable sénateur Berntson, appuyée par l'honorable sénateur DeWare, que la motion ne soit pas maintenant adoptée, mais qu'elle soit de nouveau modifiée en supprimant, au premier paragraphe, les mots «les conclusions et les recommandations» et en les remplaçant par «recommandation 1»; et en ajoutant après les mots «au Canada», «et reconnaît le rôle qu'a joué le gouvernement du Canada dans sa mise en application».-(L'honorable sénateur Carstairs).

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Je parlerai ce soir de la motion et de ses amendement et sous-amendement.

Honorables sénateurs, le rapport final de la commission Krever a expliqué aux Canadiens, de façon très détaillée, comment le système d'approvisionnement en sang au Canada fonctionnait depuis plusieurs décennies et il a recommandé d'en modifier la structure en profondeur, afin d'améliorer la gestion du risque et le fonctionnement du système.

Le juge Krever s'est attardé en particulier à la transmission du virus de l'hépatite C par transfusion sanguine. Le rapport dresse un historique détaillé de la façon dont le virus de l'hépatite C a été identifié, des utilisations du test indirect de dépistage au Canada et ailleurs et de la situation actuelle concernant la sécurité dans ce domaine. Cette analyse et d'autres travaux effectués dans ce domaine mettent en évidence l'importance de la période 1986-1990, au cours de laquelle les États-Unis, contrairement au Canada, ont eu recours aux tests indirects de dépistage de l'hépatite C.

Le 27 mars dernier, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux annonçaient leur intention d'offrir une aide financière aux personnes infectées à cause du système d'approvisionnement sanguin entre 1986 et 1990. Jusqu'à 22 000 Canadiens pourraient recevoir une indemnisation dont le montant atteint 1,1 milliard de dollars. Lorsque les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont convenu d'offrir de l'aide aux personnes infectées entre 1986 et 1990, ils l'ont fait en vertu de certains principes et non pas à cause du nombre des victimes. Le principe le plus important est qu'il convient d'indemniser les personnes qui ont subi des préjudices au cours de la période pendant laquelle les responsables du système d'approvisionnement sanguin auraient pu prendre des décisions pour réduire les risques, mais ne l'ont pas fait.

Depuis l'annonce de cette offre importante, on a beaucoup discuté de la manière d'aider les Canadiens infectés par le virus de l'hépatite C avant et après la période de 1986 à 1990. Les ministres de la santé se sont récemment rencontrés et ont constitué un groupe de travail chargé d'examiner un certain nombre de solutions, y compris le maintien du statu quo. Certaines provinces, le Québec et l'Ontario par exemple, proposent d'accroître le nombre de personnes pouvant être indemnisées.

Le gouvernement fédéral, qui a été le principal artisan de l'offre d'indemnisation applicable à la période de 1986-1990, tente de voir, avec les provinces et les territoires, s'il est possible de définir une approche nationale en vue d'accorder une aide aux personnes contaminées après la période de référence. Le ministre de la Santé, Allan Rock, a indiqué que les discussions avec les provinces et les territoires se poursuivent et qu'il pourrait en sortir un nouveau consensus.

L'accès aux services est la chose la plus importante pour les victimes de l'hépatite C, mais il y a aussi l'assurance-médicaments, l'assurance des soins à domicile, les centres d'excellence et la recherche. Certains de ces services sont offerts par quelques provinces et territoires, dans le cadre de l'assurance-maladie et des programmes de prestations supplémentaires pour soins de santé, mais pas partout. Il y a des failles, mais on peut y remédier en travaillant avec les provinces et les territoires.

(1750)

Il est souvent nécessaire de modifier et d'adapter nos systèmes de soins de santé pour réagir à de nouveaux problèmes et répondre à de nouvelles demandes. La demande de services associés à l'hépatite C, qui a augmenté à cause de l'ancienne structure du système d'approvisionnement en sang, en est un exemple. De même que les problèmes évoluent, les systèmes devraient évoluer, et le gouvernement fédéral a toujours poussé en faveur d'une telle évolution.

Il y a divers moyens de faire face aux nouveaux problèmes et aux nouvelles demandes. Par le passé, nous avons fait face à certains problèmes de santé publique associés à l'hépatite C, par exemple, en essayant d'arriver à un consensus en ce qui concerne le suivi des dossiers et la notification des parties concernées.

Une autre étape dans l'évolution d'une approche à l'égard des besoins des victimes de l'hépatite C pourrait être la mise au point d'une stratégie nationale pour l'hépatite C comparable, comme on l'a fait pour le sida et le cancer du sein. Une telle stratégie pourrait inclure de nouveaux efforts en matière de recherche et de nouvelle technologie et la planification de nouveaux services.

Une autre étape encore pourrait être d'investir dans les efforts en vue de combler les failles dans la prestation de services - par exemple, l'assurance-médicaments et les soins à domicile.

La possibilité de regrouper diverses contributions au profit du bien-être des victimes de l'hépatite C dans un ou plusieurs endroits du pays, par exemple, sous la forme de centres d'excellence, est une considération importante dans ce type d'approche. Cela aurait l'avantage de concentrer les compétences et de permettre l'élaboration de nouvelles initiatives exigeant une certaine masse critique.

Une des préoccupations actuelles du gouvernement fédéral, c'est que la meilleure politique concernant le système d'approvisionnement sanguin ne pourra surgir que d'efforts concertés du gouvernement fédéral, des provinces et des divers autres intervenants, comme la Croix-Rouge et les représentants des victimes.

Le gouvernement s'inquiète aussi de l'attraction superficielle qu'exerce la solution financière à des problèmes complexes. L'argent répond rarement de façon définitive et satisfaisante à des besoins qui ne sont pas strictement superficiels. Dans le domaine de la santé, bien des choses ne s'achètent pas ou alors, elles coûtent une fortune. L'aide d'un ami ne s'achète pas. De même, au Canada, personne ne peut acheter une transplantation hépatique, et c'est tant mieux.

En fait, cette tendance excessive à traiter les problèmes humains comme s'il s'agissait de marchandises risque de miner notre précieux système de santé et notre filet de sécurité sociale. Depuis nombre d'années maintenant, les gouvernements reconnaissent qu'il y a de meilleures façons d'aider les gens dans le besoin que de leur remettre de l'argent comptant. L'argent est utile, nous le savons tous, mais une indemnisation sans égard à la faute établirait un énorme précédent.

Comme le premier ministre l'a dit, il existe d'autres solutions. Il est possible d'améliorer les programmes en place, notamment ceux qui assurent des services médicaux. Nous avons déjà les véhicules nécessaires pour fournir des soins médicaux, des services sociaux et un soutien du revenu aux Canadiens qui sont dans le besoin. En nous attaquant au dossier de l'hépatite C, nous devrions explorer à fond le potentiel de ces véhicules.

Cette exploration aurait notamment pour avantage de résoudre la crise du sang contaminé au moyen des mécanismes en place, de sorte que nous ne serions plus paralysés par le coût élevé de la recherche de nouvelles solutions non encore éprouvées, comme des régimes d'indemnisation généralisée sans égard à la faute, et par les retards qui y seraient associés.

Nous pouvons rêver d'un monde parfait où nous pourrions échapper aux pressions de la responsabilité, mais, au Sénat, nous savons que la politique est l'art du possible. Les Canadiens s'inquiètent vraiment pour leurs concitoyens victimes du système d'approvisionnement sanguin et nous allons, dès que possible, utiliser au mieux les mécanismes en place pour remédier aux problèmes issus du passé.

Le gouvernement fédéral a déjà fait preuve de leadership pour élaborer rapidement un programme d'indemnisation couvrant la période de 1986 à 1990, en invoquant un règlement négocié et approuvé par les tribunaux qui est juste et définitif. Dans tous ses pourparlers avec les provinces et les territoires, il s'efforcera de tabler sur l'excellence actuelle pour entreprendre d'autres démarches opportunes relativement aux problèmes engendrés par l'hépatite C.

Nous, dans cette enceinte, attendons avec impatience la fin des pourparlers avec les provinces et les territoires. Ce sont des problèmes difficiles, et ils méritent des solutions réfléchies qui amélioreront la cohésion de la société canadienne.

Honorables sénateurs, je tiens à ce que nos intentions soient parfaitement claires relativement à cette motion. Comme les sénateurs le savent, nous débattons actuellement un sous-amendement proposé par le sénateur Berntson à l'amendement du sénateur DeWare. Comme il n'est plus possible de proposer un autre sous-amendement en ce moment, notre intention serait de voter contre le sous-amendement et l'amendement, puis de proposer un autre amendement à la motion principale, qui, je l'espère, sera jugé acceptable par les sénateurs des deux côtés.

Honorables sénateurs, notre intention est que, après le vote sur le sous-amendement et l'amendement, le sénateur Kirby présente un amendement.

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, j'ai déjà pris la parole sur le sous-amendement, mais j'estime avoir le droit de poser une question au sénateur Carstairs. Celle-ci se rend certainement compte qu'en disant que ses collègues et elle voteront contre l'amendement, ils voteront en fait contre l'objet même de la motion. Par conséquent, l'amendement que ses collègues et elle présenteront après avoir rejeté l'amendement devra être à tout le moins aussi fort que le sous-amendement, sinon nous voterons contre. Je m'attends à ce qu'elle propose une version diluée du minimum que nous proposons. J'espère qu'elle peut nous assurer que l'amendement qu'elle proposera sera aussi fort, voire davantage, que ce qu'elle et ses collègues veulent rejeter.

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, l'amendement que nous proposerons, à mon point de vue, est celui qu'il faut adopter dans les circonstances pour garantir que les discussions entre les provinces et le gouvernement fédéral se dérouleront de manière logique et ordonnée.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, si aucun autre sénateur ne souhaite prendre la parole, je procéderai au vote.

Il a été proposé par l'honorable sénateur Lynch-Staunton, appuyé par l'honorable sénateur DeWare, que le Sénat appuie...

Des voix: Suffit!

Son Honneur le Président: Et l'honorable sénateur DeWare, appuyée par l'honorable sénateur Kinsella, propose que la motion ne soit pas adoptée, mais qu'elle soit modifiée...

Des voix: Suffit!

Son Honneur le Président: Il a également été proposé par l'honorable sénateur Berntson, appuyé par l'honorable sénateur DeWare, que la motion ne soit pas adoptée maintenant, mais qu'elle soit modifiée...

Des voix: Suffit!

Son Honneur le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion d'amendement no 2 veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: À mon avis, les non l'emportent.

Et deux sénateurs s'étant levés.

Son Honneur le Président: Convoquez les sénateurs.

Honorables sénateurs, on m'a fait savoir qu'il avait été convenu de faire retentir la sonnerie d'appel pendant 15 minutes. Êtes-vous également d'accord pour que je ne tienne pas compte de l'heure?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Le vote aura donc lieu à 18 h 15.

(1810)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, le vote porte sur le sous-amendement de l'honorable sénateur Berntson.

(La motion de sous-amendement (sénateur Berntson) est rejetée.)

 

POUR
LES HONORABLES SÉNATEURS

Angus, Atkins, Berntson, Buchanan, Cohen, Comeau, DeWare, Di Nino, Doody, Forrestall, Grimard, Johnson, Kelleher, Kelly, Kinsella, LeBreton, Lynch-Staunton, Meighen, Murray, Nolin, Oliver, Phillips, Rossiter, Simard, Spivak, Stratton, Tkachuk-27 

CONTRE
LES HONORABLES SÉNATEURS

Adams, Bacon, Bryden, Butts, Callbeck, Carstairs, Chalifoux, Cook, Cools, Corbin, Fairbairn, Ferretti Barth, Fitzpatrick, Forest, Gigantès, Grafstein, Graham, Hays, Hébert, Hervieux-Payette, Johnstone, Joyal, Kenny, Kirby, Kolber, Kroft, Lewis, Losier-Cool, Maheu, Mahovlich, Maloney, Mercier, Milne, Moore, Pépin, Poulin, Robichaud (L'Acadie-Acadia), Robichaud (Saint-Louis-de-Kent), Rompkey, Ruck, Stewart, Taylor, Watt-43 

ABSTENTIONS
LES HONORABLES SÉNATEURS

Aucune 

Son Honneur le Président: Je déclare la motion de sous-amendement rejetée.

Le vote suivant porte sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur DeWare, appuyée par l'honorable sénateur Kinsella.

Puis-je me dispenser de lire la motion?

Des voix: Suffit!

Son Honneur le Président: Les honorables sénateurs veulent-ils que nous tenions un autre vote ou sont-ils prêts à appliquer les résultats du précédent à celui-ci?

Le sénateur Kinsella: Nous voulons appliquer les résultats à celui-ci.

Le sénateur Carstairs: Oui, nous appliquerons les mêmes résultats.

(La motion d'amendement de l'honorable sénateur DeWare est rejetée.)

 

POUR
LES HONORABLES SÉNATEURS

Angus, Atkins, Berntson, Buchanan, Cohen, Comeau, DeWare, Di Nino, Doody, Forrestall, Grimard, Johnson, Kelleher, Kelly, Kinsella, LeBreton, Lynch-Staunton, 
Meighen, Murray, Nolin, Oliver, Phillips, Rossiter, Simard, Spivak, Stratton, Tkachuk-27 

CONTRE
LES HONORABLES SÉNATEURS

Adams, Bacon, Bryden, Butts, Callbeck, Carstairs, Chalifoux, Cook, Cools, Corbin, Fairbairn, Ferretti Barth, Fitzpatrick, Forest, Gigantès, Grafstein, Graham, 
Hays, Hébert, Hervieux-Payette, Johnstone, Joyal, Kenny, Kirby, Kolber, Kroft, Lewis, Losier-Cool, Maheu, Mahovlich, Maloney, Mercier, Milne, Moore, Pépin, Poulin, Robichaud (L'Acadie-Acadia), Robichaud (Saint-Louis-de-Kent), Rompkey, Ruck, Stewart, Taylor, Watt-43 

ABSTENTIONS
LES HONORABLES SÉNATEURS

Aucune 

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, nous sommes maintenant revenus à la motion principale.

 

Motion d'amendement

L'honorable Michael Kirby: Honorables sénateurs, je propose, appuyé par l'honorable sénateur Carstairs:

Que la motion ne soit pas maintenant adoptée mais qu'elle soit modifiée en supprimant tout les mots suivant le mot «appuie» au premier paragraphe et en les remplaçant par ce qui suit:

 

«la première recommandation de la Commission d'enquête sur l'approvisionnement en sang au Canada, qui demande aux provinces et aux territoires de répondre aux besoins des personnes qui ont subi des préjudices liés au système de distribution du sang;
Que le Sénat reconnaisse que le gouvernement du Canada a fait preuve de leadership en élaborant des mesures fédérales-provinciales d'indemnisation des personnes qui ont été infectées par le virus de l'hépatite C par le biais du système de distribution du sang entre 1986 et 1990;

Que, étant donné que le gouvernement fédéral et les provinces ont convenu de revoir cette première entente afin d'accroître le consensus vis-à-vis de notre réponse à cette tragédie nationale, le Sénat prie instamment le gouvernement du Canada et les gouvernements des provinces et des territoires de prendre des mesures concrètes pour répondre aux besoins des personnes qui subissent les conséquences désastreuses de l'hépatite C contractée par le biais du système de distribution du sang; et

Qu'une copie de la présente motion soit envoyée à chaque ministre de la Santé fédéral, provincial et territorial.»

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion d'amendement?

 

Recours au Règlement

L'honorable Orville H. Phillips: Honorables sénateurs, j'invoque le Règlement. Je pense que l'amendement est irrecevable du fait qu'il modifierait l'objet de la motion originale, ce qui est interdit par le Règlement du Sénat. Je demande donc à Votre Honneur de prendre la question en délibéré et de rendre votre décision.

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, pour ce qui est du rappel au Règlement soulevé par le sénateur Phillips, je crois qu'il a raison. Je vous renvoie à la sixième édition du Beauchesne. Le paragraphe 567, à la page 181, dit ceci:

L'amendement peut avoir pour objet de modifier une proposition de façon qu'elle soit accueillie plus favorablement ou d'offrir à la Chambre un nouveau texte susceptible de remplacer la proposition originale.

Le paragraphe 579 à la page 183 du même ouvrage prévoit ce qui suit:

L'amendement qui aborde une question étrangère à la motion principale n'est pas pertinent et ne peut être présenté.

Je renvoie Son Honneur aux directives que nous trouvons dans l'ouvrage de Beauchesne. Nous savons tous que Beauchesne traite davantage de ce qui se passe dans l'autre endroit, mais nous en tirons tout de même une certaine orientation.

L'article 48 de notre propre Règlement traite des motions. De plus, au tout début de notre Règlement, il est stipulé que si nous avons de temps à autre besoin d'orientation sur des points qui ne sont pas clairement définis dans notre Règlement, il est approprié de consulter les documents traitant de procédures, et c'est ce que j'invite Son Honneur à faire dans ce dossier.

Je crois que cette motion, telle qu'elle nous a été présentée, est plus que contraire à ce que le sénateur Lynch-Staunton a proposé. C'est une proposition tout à fait différente. Elle est différente en substance et en objet.

La motion du sénateur Lynch-Staunton, telle que précisée par les deux sous-amendements, traitait d'une mesure particulière que l'on demandait au Sénat d'avaliser et de faire parvenir aux ministres fédéraux et provinciaux visés. La motion d'amendement dont il est question vise une action tout à fait différente tant dans son objet que dans son contenu. Elle est contraire - et on pourrait même dire contradictoire - et elle ne peut donc pas être acceptée.

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, l'amendement original, ainsi que la motion proposée par l'honorable sénateur Lynch-Staunton, avaient pour but, je crois, d'appuyer le rapport de la commission d'enquête Krever. L'enquête Krever a très clairement établi que les provinces et les territoires avaient une responsabilité.

La présente motion appuie cette recommandation, autrement dit. Elle la modifie très certainement. Les articles 565 et 567 du Beauchesne le permettent. Cet amendement est donc recevable, à mon avis.

Son Honneur le Président: Puisqu'aucun autre sénateur ne désire prendre la parole sur ce rappel au Règlement, je vais prendre la question en délibéré et je rendrai ma décision plus tard.

 


Visiteur de marque

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, j'aimerais souhaiter la bienvenue à notre tribune au Président de la Chambre des communes.

Des voix: Bravo!

 


[Français]

 

Le Code canadien du travail
La Loi sur les déclarations des personnes morales et des syndicats

Projet de loi modificatif-Troisième lecture

L'honorable Shirley Maheu propose: Que le projet de loi C-19, Loi modificant le Code canadien du travail (partie I), la Loi sur les déclarations des personnes morales et des syndicats et d'autres lois en conséquence, soit lu une deuxième fois.

- Honorables sénateurs, je suis heureuse de vous présenter cet important projet de loi lié au Code du travail.

[Traduction]

Je vais commencer par citer une personne qui a comparu devant notre comité il y a seulement quelques jours. Elle a dit:

Ce dont vous êtes saisis est le fruit d'un événement historique. En effet, les employeurs et le mouvement syndical sous compétence fédérale ont trouvé un terrain d'entente.

[Français]

Cela situe notre débat dans un contexte approprié. Depuis sa conception jusqu'à sa production, le projet de loi C-19 a fait l'objet de nombreux examens, commentaires, consultations et compromis. Sa période de gestation date maintenant de trois ans.

Tous les intervenants imaginables ont eu l'occasion de faire valoir leur point de vue et presque toutes les options possibles ont été étudiées lorsque chaque disposition du projet de loi a été analysée, débattue et finalement choisie. Les parlementaires ont eu l'occasion de débattre deux fois de ce texte de loi, la première lorsqu'il s'agissait du projet de loi C-66 et, à présent, de son successeur, le projet de loi C-19.

Les sénateurs avaient exprimé certaines préoccupations au sujet du projet de loi C-66 et le gouvernement a répondu à ces inquiétudes. La semaine dernière, le comité a donné aux diverses associations la possibilité d'émettre leurs opinions.

[Traduction]

Quant tout fut dit, tous ceux qui dès le début avaient participé à la rédaction du projet de loi, tant du côté patronal que syndical, et qui seront directement touchés par les dispositions de ce dernier, sont parvenus à un consensus suffisant pour pouvoir dire: c'est quelque chose que nous pouvons accepter.

(1830)

Il est vrai que les points qui étaient controversés au début le sont demeurés, mais la controverse porte moins sur les choix du gouvernement concernant les dispositions en question que sur le sujet du débat. Le gouvernement a toujours cherché à atteindre un compromis, mais quand ce n'était pas possible, il a tranché. Permettez-moi de donner quelques exemples.

Premièrement, les travailleurs de remplacement. Honorables sénateurs, si vous lisez les comptes rendus des débats de la Chambre et du comité, vous verrez des arguments diamétralement opposés. Certains étaient absolument contre tout recours aux travailleurs de remplacement alors que d'autres ne voulaient voir aucune restriction quant à l'utilisation de leurs services. Pouvez-vous imaginer le tollé si nous avions opté pour l'une ou l'autre de ces deux propositions?

Le gouvernement a choisi une solution à mi-chemin, permettant qu'on ait recours aux travailleurs de remplacement sauf si l'employeur le faisait dans le but de miner la capacité de représentation d'un syndicat. En modelant l'article relatif aux travailleurs de remplacement sur la lettre et l'esprit de la recommandation majoritaire de la commission Sims, nous avons tenu compte du rapport sénatorial précédent en la matière.

Pour ce qui est de l'accréditation corrective, nous avons pris en considération le rapport précédent du Sénat sur la question et nous y avons donné suite. Nous avons répété à maintes reprises les principales caractéristiques de ce genre d'accréditation. Pour commencer, l'accréditation d'un syndicat sera toujours basée sur l'appui de la majorité. Toutefois, au cas rare où un employeur aurait recours à la subversion ou à l'intimidation, entravant ainsi l'exercice du droit des employés à envisager d'adhérer à un syndicat, un conseil indépendant et neutre pourra redresser une telle injustice. Le ministre s'est engagé à surveiller la mise en oeuvre de ces dispositions.

Quant au grain, il est vrai que, dans l'ensemble, les parties auraient voulu voir un traitement plus généralisé, mais le gouvernement n'a jamais eu l'intention de récrire la loi en termes vagues en ce qui concerne le transport des marchandises qui passent par les ports canadiens. Pas plus qu'il n'avait l'intention d'intervenir plus directement, maintenant ou à l'avenir, dans le processus de négociation collective.

Quels que soient les mérites des arguments au sujet de la garantie que les produits parviendront aux navires, la seule intention de la disposition, comme le ministre le disait au comité permanent, est d'éliminer ce qui a causé tant de problèmes, à savoir les grains. En fait, le directeur exécutif de la Western Grain Elevator Association l'a confirmé à notre comité mardi, lorsqu'il a dit:

Le but de la mesure législative est de créer un climat de négociation qui encourage des négociations à armes égales entre employeurs et employés, et de parvenir ainsi à une situation où la grande majorité des renouvellements de contrat se fera par entente mutuelle. Cette mesure législative fait abstraction du grain dans l'équation de la négociation pour les deux parties.

Je remarque aussi que les syndicats agricoles des Prairies, qui représentent quelque 100 000 agriculteurs, appuient le projet de loi C-19 avec l'article 87.7 intact, tout comme l'International Longshoremen's and Warehousemen's Union.

Le ministre a reconnu qu'il y avait des objections àl'article 87.7. Là encore, il s'est engagé à examiner son efficacité l'année prochaine après la prochaine ronde de négociation des débardeurs de la côte ouest.

Je suis convaincu que les dispositions qui ont suscité un débat aussi intense contiennent suffisamment de mesures de protection pour que les inquiétudes de l'opposition ne se matérialisent pas. Le ciel ne nous tombera pas sur la tête.

Ce qui est révélateur, c'est que les intéressés, même s'ils ont des réserves à l'égard de certaines parties du projet de loi, nous demandent de l'adopter sans autres amendements. Je pense que nous pouvons nous en remettre à eux.

Regardons la position de l'ETCOF, l'association des Employeurs des transports et communications de régie fédérale. En tant que groupe, il représente des sociétés qui emploient 60 p. 100 des employés régis par le fédéral. Ce n'est pas rien, honorables sénateurs, dans un secteur clé de l'économie. Voici ce que disait le président de l'ETCOF à notre comité, la semaine dernière:

Nous avons observé un processus hautement consultatif et, comme nous sommes le groupe d'employeurs le plus important qui soit visé, nous avons participé librement et activement aux travaux. En gros, nous sommes heureux de constater que le projet de loi montre que la révision a été effectuée selon une approche équilibrée. D'une façon générale, il y a un esprit compétitif avec lequel nos membres peuvent composer...

Bref, nous croyons que le processus suivi dans ce cas-ci pourrait servir d'exemple pour illustrer comment des réformes législatives devraient être effectuées.

Prenons un groupe ayant manifestement une idéologie différente, c'est-à-dire le Congrès du travail du Canada. Dans le mémoire que ce dernier a fait parvenir au comité, il souligne qu'en octobre 1995, à la première rencontre syndicale-patronale, le président du groupe de travail a constaté que tous les membres partageaient un certain nombre de convictions selon lesquelles, entre autres, la partie I du Code canadien du travail actuel sert toujours bien les travailleurs, les modifications de contrepoids apportées au code ne sont ni nécessaires ni souhaitables et le consensus entre les parties constitue la meilleure base qui soit pour prendre des décisions concernant des modifications législatives. Il poursuit en disant que le groupe de travail s'en était tenu à ces hypothèses ou, comme il le déclare, qu'au bout du compte, le projet de loi C-19 permettait de maintenir le cap sur l'approche pragmatique adoptée par le groupe de travail.

[Français]

Le projet de loi est donc un document historique qui constitue en grande partie un compromis. Ce document nous donne un nouveau conseil représentatif des relations industrielles doté d'un nouveau pouvoir qui accélérera le traitement des dossiers, qui simplifiera le processus de conciliation et qui assurera le maintien de la sécurité et de la protection de la santé du public en cas de grève et de lock-out. Ce projet de loi offre une tribune au ministre du jour pour rencontrer de temps à autre des experts et des représentants d'employeurs et de travailleurs afin de discuter des questions liées aux relations industrielles. Finalement, ce projet de loi s'attaque à des questions difficiles comme les travailleurs suppléants, l'accréditation comme recours et il propose des compromis raisonnables que des gens raisonnables peuvent accepter.

[Traduction]

Honorables sénateurs, nous avons étudié en détail les dispositions de ce projet de loi, nous l'avons débattu et discuté. Nous nous sommes penchés sur toutes ses dispositions. Nous pouvons être d'accord sur certains points et en désaccord sur d'autres, mais le temps est venu d'aller de l'avant et d'adopter le projet de loi C-19. Ne pas le faire reviendrait à laisser tomber des centaines de milliers de Canadiens dont la vie dépend d'un droit du travail qui soit équitable et à jour. Ne les décevons pas en retardant davantage ce projet de loi et faisons en sorte qu'il devienne la loi du pays.

(1840) 

Motion d'amendement

L'honorable Erminie J. Cohen: Honorables sénateurs, je propose:

Que le projet de loi C-19 ne soit pas lu une troisième fois maintenant, mais qu'on le modifie.

Avec la permission du Sénat, je voudrais distribuer à tous les honorables sénateurs des copies de ma motion de 22 pages et j'aimerais qu'on s'entende pour dire que la motion a été lue, à moins que les honorables sénateurs préfèrent que je lise les 22 pages.

Son Honneur le Président suppléant: Honorables sénateurs, êtes-vous d'accord pour qu'on distribue l'amendement?

Des voix: D'accord?

L'honorable Lowell Murray: Je ne veux pas m'opposer à toute initiative visant à accommoder les honorables sénateurs, mais ma collègue a-t-elle l'intention d'aborder les amendements qu'elle propose, afin que nous sachions à quoi nous en tenir?

Le sénateur Cohen: Oui.

Honorables sénateurs, je voudrais vous expliquer cette motion tendant à corriger une surprenante omission de la part du gouvernement, qui a oublié de rectifier le langage sexiste utilisé dans la partie I du Code canadien du travail.

Par exemple, on parle souvent du ministre au masculin. On parle aussi, entre autres, des «pêcheurs» et des «hommes d'affaires». Je suis convaincue que tous les sénateurs présents conviendront que cet usage ne traduit pas la réalité que vit la société canadienne d'aujourd'hui. En adoptant cette motion, honorables sénateurs, nous aiderions le gouvernement à propulser la partie I du Code canadien du travail dans les années 90 et bien au-delà. Ces amendements sont certainement conformes aux intentions du gouvernement.

Dans un communiqué diffusé le 6 novembre dernier, le ministre du Travail a promis que le projet de loi C-19 moderniserait le code. Pourtant, malgré le projet de loi C-19, le code demeure truffé d'expressions sexistes et personne, à mon avis, ne peut qualifier ce langage de moderne.

L'usage d'un langage neutre est particulièrement important dans le Code canadien du travail, car, tout comme la Loi canadienne sur les droits de la personne mais contrairement à bien d'autres mesures législatives, le code est beaucoup utilisé comme outil éducatif et manuel dans nos écoles, nos universités et nos lieux de travail. C'est un document social et vivant ayant une large portée et une grande pertinence dans le domaine essentiel des relations de travail au Canada. Chose certaine, il ne reste pas sur les tablettes.

Je rappelle également aux honorables sénateurs que cela fait plus de dix ans qu'on essaie de veiller à ce que le libellé des lois fédérales ne soit pas sexiste. Modifier le projet de loi C-19 pour corriger les dispositions sexistes qui persistent dans le Code canadien du travail serait une suite logique à cet important processus. Sous sa forme actuelle, honorables sénateurs, le projet de loi C-19 fait fi de dix années de progrès pour ce qui est de parvenir à un libellé non sexiste dans les lois fédérales.

En décembre 1997, une loi de mise en vigueur des Lois révisées du Canada, 1995, a pris effet. Elle donnait le pouvoir d'examiner toutes les lois du Canada et d'en modifier le libellé en fonction de la Charte canadienne des droits et libertés.

Lorsque les Lois révisées du Canada ont été publiées en 1995, on s'est aperçu que le problème de sexisme dans le libellé n'avait pas été corrigé dans beaucoup de lois et qu'il était évident qu'il faudrait faire preuve d'une vigilance accrue. Il est clair que c'est toujours le cas.

Honorables sénateurs, je vous exhorte à souscrire à cette motion d'amendement.

Son Honneur le Président suppléant: L'honorable sénateur Cohen, appuyée par l'honorable sénateur Angus, propose: Que le projet de loi C-19 ne soit pas lu une troisième fois maintenant, mais qu'il soit modifié...

Des voix: Suffit!

Son Honneur le Président suppléant: Que tous ceux qui sont en faveur de l'amendement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président suppléant: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président suppléant: À mon avis, les non l'emportent.

Et deux honorables sénateurs s'étant levés.

Son Honneur le Président suppléant: Convoquez les sénateurs.

Honorables sénateurs, les whips me signalent qu'ils ont besoin d'une sonnerie d'appel de cinq minutes. Le vote aura lieu à18 h 50.

(1850)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, le vote porte sur la motion d'amendement proposée par l'honorable sénateur Cohen.

(La motion d'amendement, mise aux voix, est rejetée.)

 

POUR
LES HONORABLES SÉNATEURS

Angus, Atkins, Bernston, Buchanan, Cohen, Comeau, DeWare, Di Nino, Doody, Forrestall, Grimard, Johnson, Kelleher, Kelly, Keon, Kinsella, LeBreton, Lynch-Staunton, Meighen, Murray, Nolin, Oliver, Phillips, Rossiter, Simard, Spivak, Stratton, Tkachuk-28 

CONTRE
LES HONORABLES SÉNATEURS

Adams, Bacon, Bryden, Butts, Callbeck, Carstairs, Chalifoux, Cook, Cools, Corbin, Fairbairn, Ferretti Barth, Fitzpatrick, Forest, Grafstein, Graham, Hays, Hébert, Hervieux-Payette, Johnstone, Joyal, Kenny, Kirby, Kolber, Kroft, Lewis, Losier-Cool, Maheu, Mahovlich, Maloney, Mercier, Milne, Moore, Pépin, Poulin, Prud'homme, Robichaud (L'Acadie-Acadia), Robichaud (Saint-Louis-de-Kent), Rompkey, Ruck, Stewart, Taylor, Watt-43 

ABSTENTIONS
LES HONORABLES SÉNATEURS

Aucune 

Son Honneur le Président: Je déclare l'amendement rejeté. Nous revenons à la motion principale.

L'honorable Orville H. Phillips: Honorables sénateurs, j'invoque le Règlement. Je sais que ce sont les whips qui déterminent la durée de l'appel, mais cinq minutes, ce n'est pas suffisant pour permettre aux sénateurs qui sont dans l'édifice Victoria de se rendre jusqu'ici, particulièrement compte tenu des travaux de construction en cours. Ce n'est pas suffisant non plus pour permettre à ceux qui sont dans l'édifice de l'Est de se rendre jusqu'ici, sans compter que quiconque souffre d'un handicap ne peut pas se déplacer jusqu'ici en cinq minutes. Je voudrais que cette période soit prolongée pour tenir compte de tous les sénateurs.

Son Honneur le Président: Je prends note des remarques de l'honorable sénateur Phillips. Malheureusement, je ne peux pas les considérer comme un rappel au Règlement, mais les whips peuvent peut-être les considérer comme une suggestion.

L'honorable Mabel M. DeWare: Je devrais peut-être présenter mes excuses à l'ancien whip de mon parti, mais nous croyions que tous les sénateurs étaient aux environs. Nous tiendrons compte de la remarque du sénateur Phillips.

Honorables sénateurs, c'est avec beaucoup de peine et un grand sens des responsabilités que je prends la parole au nom de mes collègues de ce côté-ci de la Chambre en ce débat de troisième lecture du projet de loi C-19. La peine que j'éprouve est due à la déception engendrée par la réaction du ministre du Travail et de nos collègues du gouvernement face aux efforts que nous avons prodigués pour améliorer ce projet de loi. Malgré les appels répétés des Canadiens demandant des changements positifs, nous en sommes malheureusement revenus au point de départ avec la présentation du projet de loi C-66. La progression du projet de loi C-19 au Sénat n'a été que la dernière d'une série d'occasions ratées de moderniser la partie 1 du Code canadien du travail.

La première de ces occasions ratées remonte au moment de la rédaction du projet de loi C-66. Le gouvernement a raté une deuxième occasion l'été dernier, au cours des consultations précipitées en vue de rafistoler les problèmes les plus criants. Puis une troisième chance a été de nouveau ignorée en grande partie lorsque le projet de loi C-19 a été déposé à l'autre endroit. Encore une autre occasion s'est présentée hier, mais elle est bien vite disparue lorsqu'une majorité des membres du comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a voté contre une série d'amendements réfléchis et, à notre avis, nécessaires.

Cela m'amène au sentiment de responsabilité qui devrait à mon avis être partagé par tous les sénateurs. Nous avons encore une chance de nous reprendre parce que le projet de loi C-19 n'a pas encore été adopté. Avant qu'il le soit, nous devons, à titre de législateurs, faire tout ce qui est en notre pouvoir pour nous assurer que c'est la meilleure loi possible. Nous le devons bien aux travailleurs assujettis aux lois fédérales et à leurs employeurs, ainsi qu'aux Canadiens en général. J'exhorte tous les sénateurs présents à bien réfléchir à ce que je vais dire puisque je vais reprendre certaines des principales préoccupations que nous avons en regard de cette mesure législative.

Je vous demanderais également de ne pas oublier que le rapport du comité permanent sur le projet C-66 est aussi pertinent aujourd'hui qu'il l'était hier. En fait, notre collègue, le sénateur Maheu, l'a reconnu lorsqu'elle a pris la parole dans le débat de deuxième lecture sur le projet de loi C-19 il y a quelques semaines. Cet ajout est joint à notre rapport qui sera présenté par le comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie ce soir.

Les honorables sénateurs continuent d'être très préoccupés par le pouvoir que le projet de loi C-19 accorde au Conseil canadien des relations industrielles d'autoriser l'accréditation syndicale même si la majorité des employés s'y opposent.

Le sénateur Lynch-Staunton: C'est consternant.

Le sénateur DeWare: Cette disposition fait qu'il est possible pour une minorité de travailleurs d'imposer sa volonté à la majorité, ce qui est tout à fait contraire aux principes démocratiques que les assemblées législatives canadiennes sont chargées de faire respecter.

Nous avons encore de sérieuses réserves au sujet de la disposition du projet de loi C-19 qui porte sur la divulgation des noms et adresses des travailleurs à distance aux organisateurs syndicaux. Nous sommes d'accord avec le groupe de travail Sims que les travailleurs à distance devraient avoir la possibilité d'évaluer les avantages de la négociation collective. Nous pensons que la vie privée et la sécurité personnelle devraient être davantage protégées. Même si nous sommes conscients des concessions déjà faites par le gouvernement à cet égard, nous ne croyons pas que celles-ci vont assez loin. La vie privée et la sécurité des travailleurs à distance pourraient être mieux protégées si le Conseil canadien des relations industrielles était tenu d'obtenir leur consentement exprès pour pouvoir divulguer leur nom et adresse, au lieu de tout simplement leur donner la possibilité de refuser.

(1900)

Honorables sénateurs, en dépit du changement apporté au libellé de la disposition du projet de loi C-19 sur les travailleurs de remplacement, nous continuons de craindre que celle-ci ne soit pas assez claire. Vous allez penser que je sonne la charge encore une fois, mais comme j'ai encore une préoccupation, je me dois de l'exprimer ici ce soir. Nous pensons qu'une plus grande clarification est nécessaire afin que cette disposition ne soit pas interprétée par le conseil d'une façon qui minerait le droit d'une entreprise de poursuivre son activité durant un arrêt de travail. Cette disposition devrait refléter davantage l'esprit des recommandations du rapport Sims.

Nous pensons que la disposition du projet de loi C-19 visant à assurer l'expédition du grain en cas d'arrêt de travail dans un port canadien devrait aussi faire l'objet d'un examen plus poussé. Là encore, je dois dire que mes collègues et moi ne voyons absolument aucun problème à assurer une protection spéciale à une marchandise aussi importante. Cette disposition est également compatible avec le rôle principal qu'Ottawa a toujours joué pour assurer l'acheminement du grain. Nous craignons cependant que le gouvernement n'ait peut-être pas songé comme il aurait dû le faire à d'autres marchandises importantes qui sont acheminées vers les ports canadiens comme la potasse et la luzerne déshydratée. Nous ne voudrions pas que le projet de loi C-19 empêche d'élargir la portée de cette disposition. Nous sommes impatients de prendre connaissance du rapport Estey qui devrait être publié à l'automne.

Un autre sujet de préoccupation tient au pouvoir que le projet de loi C-19 donne au Conseil canadien des relations industrielles d'imposer des modifications aux dispositions des conventions collectives relatives aux droits d'ancienneté. Quiconque a une compréhension ne serait-ce que la plus superficielle des relations de travail comprend que la notion de droits d'ancienneté est essentielle aux conditions de travail établies entre les travailleurs et la direction; aussi, permettre d'imposer des modifications aux droits d'ancienneté minerait sérieusement le processus de négociations collectives.

Honorables sénateurs, comme je l'ai fait remarquer à l'étape de la deuxième lecture, mes collègues et moi de ce côté-ci de la Chambre croyons que le projet de loi C-19 renferme plusieurs mesures positives qui pourraient se révéler très bénéfiques. Cependant, nous devons maintenant nous préoccuper des éléments potentiellement dangereux du projet de loi. Nous ne pouvons pas laisser miner les objectifs du projet de loi par des dispositions qui pourraient nuire aux relations de travail dans les secteurs essentiels de l'économie canadienne au cours des années à venir. Les enjeux sont tout simplement trop élevés.

Honorables sénateurs, il s'agit d'un projet de loi inspiré par les syndicats. Des représentants de la Fédération canadienne du travail et du Congrès du travail du Canada sont venus devant notre comité pour nous demander d'adopter le projet de loi sans amendement en disant qu'il s'agissait d'un bon projet de loi pour les travailleurs canadiens. Bien sûr qu'il est bon pour eux. Quand avons-nous vu une fédération du travail se présenter devant le gouvernement et se dire d'accord avec tout ce qu'il fait? C'est un projet de loi inspiré par les syndicats. Où est l'équilibre dans le projet de loi? Plusieurs éléments du Code du travail parlent de pratiques déloyales, mais les pratiques déloyales s'exercent contre l'employeur. Il ne mentionne pas le fait que les syndicats et les employés se livrent parfois eux aussi à des pratiques déloyales.

La Chambre des communes nous a renvoyé le projet de loi C-66 trois ou quatre semaines avant la dissolution du Parlement. Nous avons eu six jours de séance pour étudier le projet de loi C-19, un projet de loi très important

Des voix: C'est honteux.

Le sénateur DeWare: Nous abordons ce projet de loi seulement pour un septième jour. On s'attend à ce que nous adoptions une importante mesure législative sur les relations de travail au Canada en sept jours de séance. Je souhaite bonne chance au ministre.

 

Motion d'amendement

L'honorable Mabel DeWare: Honorables sénateurs, je propose, avec l'appui du sénateur Kinsella:

que le projet de loi C-19 ne soit pas maintenant lu une troisième fois mais qu'il soit modifié,

a) à l'article 2, page 3, par substitution, aux lignes 12à 15, de ce qui suit:

«(5) Le président, les vice-présidents et les deux tiers des autres membres doivent avoir une expérience et des compétences dans le domaine des relations industrielles.»;

b) à l'article 7, page 12, par substitution, à la ligne 29, de ce qui suit:

«d'expiration ou à»;

c) à l'article 33, page 23, par substitution aux lignes 26 et 27, de ce qui suit:

«75. (1) Le ministre peut prolonger le délai avant»;

d) à l'article 37, page 30, par adjonction après laligne 40, de ce qui suit:

«(4) Le gouverneur en conseil peut, par règlement, étendre l'application du présent article afin de maintenir les activités liées à l'amarrage et à l'appareillage des navires autres que céréaliers, ainsi qu'à leur chargement, et à leur entrée dans un port et leur sortie d'un port.»;

e) à l'article 42, page 32, par substitution, aux lignes 15 à 20, de ce qui suit:

«(2.1) Lorsque le recours à des travailleurs de remplacement a pour but établi de miner la capacité de représentation d'un syndicat plutôt que d'atteindre des objectifs légitimes de négociation, si le Conseil a statué que ce recours à des travailleurs de remplacement constitue une pratique déloyale de travail, il est interdit à tout employeur ou quiconque agit pour son compte d'utiliser les services de toute personne qui n'était»;

f) à l'article 50, page 37, par substitution, aux lignes 4à 9, de ce qui suit:

«a) demander le consentement de tout employé à la transmission de son nom et de son adresse au représentant du syndicat qu'il autorise et, si l'employé y consent, transmettre ces renseignements au représentant;».

Son Honneur le Président: L'honorable sénateur DeWare, appuyé par l'honorable sénateur Kinsella, propose que le projet de loi ne soit pas maintenant lu une troisième fois...

Une voix: Suffit!

Son Honneur le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion d'amendement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: À mon avis, les non l'emportent.

Le sénateur DeWare: Je demanderais que nous appliquions à ce vote le résultat de l'autre vote.

Son Honneur le Président: Est-ce d'accord pour appliquer le résultat de l'autre vote?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Murray: Non, non, non. Y a-t-il des sénateurs debout?

Des voix: Avec dissidence.

Le sénateur DeWare: Avec dissidence.

Son Honneur le Président: Est-ce un vote avec dissidence?

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: L'amendement est rejeté à la majorité.

Nous revenons maintenant à la motion principale.

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, nous avons tous le rapport du comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie sur ce projet de loi et je le porte à votre attention, car un certain nombre de ses observations ont été adoptées à l'unanimité par tous les membres du comité, hier soir. En lisant ce rapport, vous constaterez toutefois que certains membres du comité ont des réserves au sujet du projet de loi.

Je pense qu'il est important de souligner la ligne de conduite que nous avons suivie lorsque nous avons été saisis du projet de loi, il y a environ une semaine. Comme le sénateur DeWare l'a mentionné, la Chambre des communes a eu huit mois pour se pencher sur le projet de loi. Nous, nous avons eu environ une semaine. C'est un projet de loi compliqué. Comme le sénateur Maheu l'a expliqué, il est le résultat de nombreux compromis faits par les divers intervenants et d'un travail énorme accompli par les fonctionnaires du ministère. On nous a dit qu'il y a eu des consultations entre le ministre du Travail et ses homologues des provinces. On nous donne une semaine pour examiner un important projet de loi d'initiative ministérielle.

Le sénateur Simard: C'est une honte!

(1910)

Le sénateur Kinsella: Permettez-moi de vous expliquer, honorables sénateurs, ce que nous avons fait avec ce projet de loi. Nous l'avons étudié très attentivement dans le peu de temps dont nous disposions. Nous avons examiné chacune de ses dispositions. Les amendements qui ont été proposés par ma collègue, madame le sénateur Cohen, et qui ont été rejetés sont la preuve que nous avons examiné tout le projet de loi.

En comité, sous la direction éclairée du président, le sénateur Murray, nous avons fait ce que j'estime être le devoir d'un comité: nous avons examiné le projet de loi article par article. Nous avons littéralement examiné chacune de ses dispositions.

Lorsque l'occasion se présentait et que les membres du comité estimaient qu'une disposition laissait à désirer, les honorables sénateurs proposaient des amendements à l'article en question, et le comité se prononçait en votant sur les amendements. Tout cela figure dans le compte rendu des délibérations du comité.

Sur la question de la terminologie liée aux différences entre les sexes dans la rédaction juridique, le ministre, quand il a comparu devant nous, a convenu avec nous que c'est ainsi que les lois doivent être rédigées. C'est ainsi que nous avons l'alinéa dans le rapport qui a été déposé et dont nous sommes saisis. Honorables sénateurs, c'est une réalisation dont le Sénat doit à juste titre être fier. Nous avons attiré l'attention du gouvernement, de tous les sénateurs et, je l'espère, de nos amis de l'autre endroit sur le fait que nous devons examiner les lois de façon détaillée, en portant attention tant à la forme qu'au fond.

Plus particulièrement, nous devons examiner la forme des lois qui ne finiront pas sur les tablettes de la bibliothèque pour n'être lues que par les juges ou les avocats. Le Code canadien du travail est largement consulté. Nombre de travailleurs canadiens le consultent. Il est presque un outil pédagogique en lui-même, et c'est pourquoi les lois de ce genre doivent être rédigées le plus soigneusement possible. Elles devraient être rédigées dans la langue commune, comme mon ami le sénateur Gigantès le dirait, mais elles doivent aussi l'être dans une langue neutre sur le plan des sexes.

J'espère que cette expérience enverra un signal aux fonctionnaires du ministère de la Justice qui travaillent en fonction des consignes de rédaction qu'ils reçoivent des divers ministères. J'espère qu'ils se rendent compte qu'en rédigeant un projet de loi modifiant un article d'une loi, ils doivent lire l'article en cause au complet et en profiter pour modifier cet article pour qu'il soit conforme au principe de la neutralité sur le plan des sexes.

Nous avons soulevé cette question. Nous avons apporté notre contribution sur ce point seulement parce que nous avons bien entrepris une étude attentive de cette importante loi.

Il y a une question importante qui me préoccupe. C'est à l'article 46 du projet de loi. L'article 46, honorables sénateurs, à la page 35 du projet de loi, se lit comme suit en ce qui concerne le Conseil canadien des relations industrielles:

 

99.1 Le Conseil est autorisé à accorder l'accréditation même sans preuve de l'appui de la majorité des employés [...]
C'est ce que je considère comme un «détournement de la démocratie». Je pense que c'est une bonne description de ce qui nous guette. J'estime même que si cet article est adopté, les tribunaux l'invalideront parce qu'il n'est pas conforme à la Charte des droits et libertés.

Des voix: Bravo!

Le sénateur Kinsella: Je dirai tout simplement que, à mon avis, il n'est pas conforme à la charte parce que, à l'article 2, elle prévoit que nous avons la liberté d'association. Avant la Charte, les tribunaux avaient clairement établi que le droit d'association incluait le droit de ne pas s'associer, mais nous nous souvenons tous de l'époque du juge Rand, ce grand juriste du Nouveau-Brunswick, et de sa fameuse formule Rand. Lorsque la majorité des employés s'entend sur un syndicat, tous sont forcés de s'associer. Vous n'êtes pas forcés de devenir membres, mais vous devez payer les cotisations syndicales pour que le syndicat puisse s'acquitter de ses obligations en tant qu'agent négociateur exclusif du groupe.

Cette association forcée, ou cette limite à la liberté d'association, se justifie parce que le syndicat a été établi dans le cadre d'un processus démocratique. Habituellement, ce processus prend la forme de la signature de cartes d'adhésion au syndicat par plus de 50 p. 100 des membres du groupe ou la forme d'un scrutin. La limitation de notre liberté d'association a été décidée par la majorité. De même, nous devons tous payer des impôts même si nous n'avons pas voté pour le gouvernement du jour, et que, à notre avis, nous avions raison de ne pas voter pour ce gouvernement. La majorité l'emporte.

En l'occurrence, cependant, l'article 46 limitera le droit d'association lorsque la majorité aura déclaré qu'elle ne veut pas s'associer. Je ne vois aucun moyen de justifier une telle limitation. Et ma conviction va dans le sens de la recommandation que notre honorable Chambre a formulée, pas une, mais bien deux fois. Nous l'avons dit dans notre dix-septième rapport, lorsque nous avons étudié le projet de loi C-66, et nous le disons encore, honorables sénateurs, à la page 2 du rapport qui est devant le Sénat.

Honorables sénateurs, tout ce que je peux dire, c'est que nous savons tous comment les choses se passent à Ottawa. Nous savons tous un peu comment se passent les choses dans les ministères. Nous savons qu'un document au Cabinet est produit, que le Cabinet prend une décision, qu'une mesure législative est présentée à l'autre endroit, que la majorité est obligée d'appuyer la position du gouvernement et que le projet de loi est adopté. Ensuite, ce projet de loi nous est renvoyé. Nous savons comment se présente maintenant la majorité au Sénat.

Il est très important, honorables sénateurs, que nous résistions quel que soit le côté où nous nous trouvons. Oui, de temps à autre, il est important pour le gouvernement de fonctionner avec l'appui de la majorité dans les deux Chambres. C'est ce qui permet au système de fonctionner. De temps à autre, cependant, honorables sénateurs, nous ne pouvons permettre à ceux de l'édifice Langevin de nous dicter ce que nous devrions faire lorsque nous examinons une mesure législative. Il me semble qu'en l'occurrence, nous nous trouvons dans l'un de ces cas où nous sommes confrontés à un principe démocratique fondamental et que nous avons deux solutions: ou bien nous conformer aux instructions venant de l'autre côté de la rue, ou bien faire la chose appropriée, c'est-à-dire déclarer que le principe de la démocratie est trop important pour que cette Chambre puisse adopter ce projet de loi.

(1920)

Nous devrions simplement éliminer cet article du projet de loi. Cela ne réduira en rien la capacité du nouveau Conseil canadien des relations industrielles de faire son travail. Ce conseil dispose de toute une série d'autres recours en cas de pratiques déloyales de la part de l'employeur. Par exemple, dans une situation donnée, il peut recourir au moyen qu'il juge approprié, comme la tenue d'un vote de représentation. Le scrutin secret est la seule façon d'affirmer la volonté de la majorité dans une démocratie. Il n'y en a pas d'autre.

 

Motion d'amendement

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Par conséquent, honorables sénateurs, je propose, appuyé par l'honorable sénateur DeWare:

Que le projet de loi C-19 ne soit pas maintenant lu une troisième fois mais qu'il soit modifié:

 

(a) à la page 35, par la suppression de l'article 46;
(b) par substitution, aux actuels numéros d'article 47à 97, des numéros d'article 46 à 96, respectivement et par le changement des renvois qui en découlent.
Son Honneur le Président: Si aucun autre sénateur ne désire intervenir, je mettrai la question aux voix.

Il est proposé par l'honorable sénateur Kinsella, appuyé par l'honorable sénateur DeWare: Que le projet de loi C-19 ne soit pas maintenant lu une troisième fois mais qu'il soit modifié...

Des voix: Suffit.

Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont en faveur de l'amendement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que les honorables sénateurs qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: À mon avis, les non l'emportent.

Et deux sénateurs s'étant levés.

Son Honneur le Président: Convoquez les sénateurs.

Honorables sénateurs, les whips m'ont avisé qu'ils s'étaient mis d'accord sur un timbre de 15 minutes. Le vote aura donc lieu à 19 h 40.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, le vote porte sur la motion d'amendement présentée par l'honorable sénateur Kinsella.

(La motion d'amendement, mise aux voix, est rejetée)

 

POUR
LES HONORABLES SÉNATEURS

Angus, Atkins, Berntson, Buchanan, Cohen, Comeau, DeWare, Di Nino, Doody, Forrestall, Grimard, Johnson, Kelleher, Kelly, Keon, Kinsella, LeBreton, Lynch-Staunton, Meighen, Murray, Nolin, Oliver, Phillips, Rossiter, Simard, Spivak, Stratton, Tkachuk-28 

CONTRE
LES HONORABLES SÉNATEURS

Adams, Bacon, Bryden, Butts, Callbeck, Carstairs, Chalifoux, Cook, Corbin, Fairbairn, Ferretti Barth, Fitzpatrick, Forest, Gigantès, Grafstein, Graham, Hays, Hébert, Hervieux-Payette, Johnstone, Joyal, Kenny, Kirby, Kolber, Kroft, Lewis, Losier-Cool, Maheu, Mahovlich, Maloney, Mercier, Milne, Pépin, Poulin, Robichaud (L'Acadie-Acadia), Robichaud (Saint-Louis-de-Kent), Rompkey, Ruck, Stewart, Taylor, Watt, Wilson-42 

ABSTENTIONS
LES HONORABLES SÉNATEURS

Aucune 

Son Honneur le Président: Je déclare la motion d'amendement rejetée.

Le vote suivant porte sur la motion de troisième lecture du projet de loi C-19.

Si aucun autre sénateur ne désire intervenir, je procéderai au vote.

L'honorable sénateur Maheu, appuyée par l'honorable sénateur Ferretti Barth, propose que le projet de loi C-19 soit lu une troisième fois.

Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

Le sénateur DeWare: Honorables sénateurs, pourrait-on appliquer les résultats du vote précédent à cette motion?

Son Honneur le Président: Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, on appliquera les résultats du vote à l'inverse.

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

 

POUR
LES HONORABLES SÉNATEURS

Adams, Bacon, Bryden, Butts, Callbeck, Carstairs, Chalifoux, Cook, Corbin, Fairbairn, Ferretti Barth, Fitzpatrick, Forest, Gigantès, Grafstein, Graham, Hays, Hébert, Hervieux-Payette, Johnstone, Joyal, Kenny, Kirby, Kolber, Kroft, Lewis, Losier-Cool, Maheu, Mahovlich, Maloney, Mercier, Milne, Pépin, Poulin, Robichaud (L'Acadie-Acadia), Robichaud (Saint-Louis-de-Kent), Rompkey, Ruck, Stewart, Taylor, Watt, Wilson-42 

NON
LES HONORABLES SÉNATEURS

Angus, Atkins, Berntson, Buchanan, Cohen, Comeau, DeWare, Di Nino, Doody, Forrestall, Grimard, Johnson, Kelleher, Kelly, Keon, Kinsella, LeBreton, Lynch-Staunton, Meighen, Murray, Nolin, Oliver, Phillips, Rossiter, Simard, Spivak, Stratton, Tkachuk-28 

ABSTENTIONS
LES HONORABLES SÉNATEURS

Aucune 

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.) 

La santé

La Commission d'enquête sur l'approvisionnement en sang au Canada-motion portant acceptation des recommandations-Motion d'amendement-recours au Règlement-Décision de la présidence

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Lynch-Staunton, appuyée par l'honorable sénateur DeWare:

Que le Sénat sanctionne et appuie les conclusions et les recommandations de la Commission d'enquête sur l'approvisionnement en sang au Canada;

Que, pour des motifs humanitaires, le Sénat exhorte le gouvernement du Canada et les gouvernements des provinces et des territoires à accepter ces conclusions et recommandations; et

Qu'une copie de la présente motion soit communiquée aux ministres de la Santé du gouvernement fédéral, des provinces et des territoires;

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Kirby que la motion ne soit pas maintenant adoptée mais qu'elle soit modifiée en supprimant tous les mots suivant le mot «appuie» au premier paragraphe et en les remplaçant par ce qui suit:

«la première recommandation de la Commission d'enquête sur l'approvisionnement en sang au Canada, qui demande aux provinces et aux territoires de répondre aux besoins des personnes qui ont subi des préjudices liés au système de distribution du sang;

Que le Sénat reconnaisse que le gouvernement du Canada a fait preuve de leadership en élaborant des mesures fédérales-provinciales d'indemnisation des personnes qui ont été infectées par le virus de l'hépatite C par le biais du système de distribution du sang entre 1986 et 1990;

Que, étant donné que le gouvernement fédéral et les provinces ont convenu de revoir cette première entente afin d'accroître le consensus vis-à-vis de notre réponse à cette tragédie nationale, le Sénat prie instamment le gouvernement du Canada et les gouvernements des provinces et des territoires de prendre des mesures concrètes pour répondre aux besoins des personnes qui subissent les conséquences désastreuses de l'hépatite C contractée par le biais du système de distribution du sang; et

Qu'une copie de la présente motion soit envoyée à chaque ministre de la Santé fédéral, provincial et territorial.»

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je suis maintenant prêt à rendre ma décision concernant le recours au Règlement exercé plus tôt aujourd'hui par l'honorable sénateur Phillips. Je remercie les honorables sénateurs de m'avoir donné le temps de lire attentivement la motion d'amendement. Je l'ai comparée à la motion originale et j'ai également pu consulter la Jurisprudence parlementaire de Beauchesne.

Le sénateur Kinsella a cité le commentaire 567, que j'ai pu lire attentivement, ainsi que d'autres commentaires, notamment ceux qui concernent les amendements irrecevables, l'interdiction de contredire la motion, et cetera.

Le commentaire 567 stipule:

L'amendement peut avoir pour objet de modifier une proposition de façon qu'elle soit accueillie plus favorablement ou d'offrir à la Chambre un nouveau texte susceptible de remplacer la proposition originale.

Si j'examine l'amendement, je constate qu'il s'agit effectivement d'une proposition différente, qui accroît les chances d'adoption de la motion. Toutefois, je constate que l'amendement modifierait la motion originale. En un sens, il la clarifie, sans la contredire. L'amendement accepte simplement une des recommandations plutôt que toutes les recommandations contenues dans la motion.

Aussi, l'amendement ne me paraît pas irrecevable. Je suis d'accord avec le commentaire 567 de Beauchesne. L'amendement est recevable.

Le vote porte sur la motion présentée par l'honorable sénateur Lynch-Staunton, appuyée par l'honorable sénateur DeWare: Que le Sénat sanctionne et appuie... suis-je dispensé de lire la suite?

Des voix: D'accord.

 

Adoption de la motion amendée portant acceptation des récommandations

Son Honneur le Président: Et la motion en amendement présentée par l'honorable sénateur Kirby, appuyée par l'honorable sénateur Carstairs: Que la motion ne soit pas adoptée maintenant...

Des voix: Vous êtes dispensé de lire la suite.

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, je voudrais parler de l'amendement, car autant j'estimais à l'origine qu'il pourrait être en contradiction avec la motion originale, plus il me paraît, en le relisant, être compatible avec la motion originale et ses deux amendements.

En améliorant la motion originale grâce aux deux amendements, nous avons limité l'appui du Sénat à la recommandation 1 du rapport Krever. L'amendement présenté par le sénateur Kirby propose que le Sénat sanctionne et appuie la recommandation 1 de la Commission d'enquête sur l'approvisionnement en sang au Canada, qui invite les provinces et les territoires à répondre aux besoins de ceux qui ont souffert à cause de la façon dont le système d'approvisionnement en sang a été géré.

Ce sont précisément ces personnes que nous voulons aider. J'attire l'attention des honorables sénateurs sur les personnes dont parlait le juge Krever et sur la façon dont il est parvenu à sa conclusion.

Le chapitre 39, volume 3, contient une longue explication qui aboutit à la recommandation 1. Voici deux ou trois extraits qui, je crois, résument la pensée du juge Krever que nous vous demandons, et que l'amendement demande aussi, je l'espère, d'appuyer. Le juge déclare:

Comme je l'ai souligné dans mon rapport provisoire, les malheureux membres de notre société qui ont été infectés à la suite de transfusions de sang ou de produits sanguins trouveront peu de consolation, voire même de pertinence, dans la sécurité relative actuelle de l'approvisionnement en sang. Un système qui engendre des conséquences qu'il a pourtant prévues a, à tout le moins, l'obligation morale de prendre en considération la question du dédommagement légitime des victimes de ces événements inévitables.

À la fin de ce chapitre, il ajoute:

Jusqu'ici, le traitement que nous avons réservé aux victimes de préjudices liés au sang n'a pas été équitable. Après avoir subi, pendant des années, des pertes financières catastrophiques, de nombreuses personnes infectées par le VIH à la suite de transfusions de sang ou de produits sanguins, ou les membres survivants de leurs familles, ont finalement reçu une aide financière. D'autres Canadiens et Canadiennes qui ont également été victimes de préjudices à la suite d'une thérapie sanguine n'ont reçu aucune indemnité. Pourtant, les besoins des victimes sont analogues, indépendamment de la cause du préjudice et de la possibilité d'établir la faute. On ne saurait, à mon avis, justifier l'indemnisation de certaines victimes dans le besoin et la refuser à d'autres. Les provinces et les territoires du Canada devraient concevoir des mécanismes législatifs de responsabilité sans faute, qui permettraient d'indemniser de façon rapide et satisfaisante toutes les personnes victimes d'accidents transfusionnels, de façon qu'elles ne doivent pas supporter un appauvrissement ni se trouver dans l'impossibilité de se procurer les traitements requis. Je recommande donc que, sans délai, les provinces et les territoires établissent des mécanismes législatifs d'indemnisation sans égard à la faute pour les personnes qui ont subi de graves préjudices à la suite de l'administration de constituants sanguins ou de produits sanguins.

Ce sont les gens dont nous parlons, pas tous ceux qui sont infectés par l'hépatite C, mais ceux qui ont contracté l'hépatite C à cause de la négligence, parfois volontaire, des autorités responsables de l'approvisionnement en sang au Canada, après avoir reçu du sang ou des produits sanguins contaminés, parce que les donneurs n'ont pas été testés avant qu'ils ne donnent leur sang.

J'admire l'esprit d'initiative dont le ministre Rock a fait preuve en ce qui concerne l'indemnisation, mais malheureusement, il s'est limité aux années allant de 1986 à 1990. Durant cette période, il y avait une procédure établie pour effectuer des tests, que le gouvernement, la Croix-Rouge et d'autres n'ont pas adoptée avant 1990. Cependant, avant cela, il y avait d'autres procédures d'essai. On en avait déjà une dès les années 50. Elle était rudimentaire et primitive, mais elle existait.

On a élaboré un nouveau système bien avant 1986. On sait maintenant que ces deux procédures d'essai, quand on les utilisait ensemble, permettaient, dans une proportion de 60 p. 100 environ, de détecter l'hépatite C. C'était bien avant 1986. En fait, le centre sanguin de New York a adopté, en 1982, une de ces deux procédures. Dans le rapport Krever, le directeur du programme sanguin du Grand New York affirmait que les technologies et le test lui-même étaient excellents, mais que ce n'était pas un indicateur absolu de l'hépatite virale séronégative. Il n'y avait pas de terme connu pour désigner l'hépatite C, alors on a donc simplement parlé d'hépatite non A, non B. Il dit ensuite que c'est le seul critère qui existait pour identifier les donneurs présentant un risque élevé de transmission de ce type d'hépatite.

Ce n'était pas à toute épreuve. Encore maintenant, le test n'est pas à toute épreuve. À l'époque, il l'était encore moins, mais il existait et nous ne l'avons pas adopté parce que nous avons cru bon d'épargner quelques dollars. La raison, selon le rapport Krever et les témoignages des responsables, c'est qu'on croyait à l'époque que les personnes infectées étaient si peu nombreuses que l'investissement qu'il aurait fallu faire pour tester les donneurs de sang aurait été beaucoup trop coûteux par rapport au nombre possible de personnes touchées.

C'est une tragédie dont nous sommes tous responsables. N'accusons pas un ministre ou un sous-ministre en particulier. C'est une responsabilité sociétale que nous avons assumée dans le cas des victimes du VIH, comme nous l'avions fait pour les victimes de la tragédie de la thalidomide. C'est l'une de ces terribles erreurs humaines.

Notre amendement à la motion voulait que larecommandation 1 du rapport Krever soit adoptée. Les sénateurs du côté du gouvernement sont d'accord là-dessus. C'est l'essentiel de l'amendement. S'ils sont sérieux et qu'ils le confirment, je serai le premier à appuyer l'amendement avec enthousiasme. La recommandation 1 se lit comme suit:

Il est recommandé que les provinces et les territoires prennent, sans délai, des dispositions législatives pour instaurer des régimes d'indemnisation sans égard à la faute, dont bénéficieront les personnes qui ont subi de graves préjudices à la suite de l'administration de constituants sanguins ou de produits sanguins.

Aucune limite de temps n'est fixée. C'est très bien d'exprimer l'espoir que les personnes infectées soient indemnisées, mais il sera très dur, dans bien des cas, de prouver que l'infection a bien été causée par du sang contaminé. Quoi qu'il en soit, si l'amendement du sénateur Kirby signifie vraiment que nous ne sommes pas contents des indemnisations prévues actuellement, parce qu'elles s'appliquent à une période allant de 1986 à 1990, j'appuie cet amendement avec beaucoup d'enthousiasme.

Le reste de l'amendement a trait à la reconnaissance du leadership. Je reconnais le leadership dont le ministre Rock a fait preuve. J'éprouve de la sympathie pour lui. Quand la ministre qui l'a précédé a déclaré qu'elle ne serait pas en faveur d'une indemnisation, et après que plusieurs ministres provinciaux de la Santé eurent dit qu'ils ne seraient pas en faveur de l'indemnisation, il a déclaré qu'il faudrait trouver une solution. On sait que certaines personnes ont été victimes de négligence. Je félicite le ministre Rock d'avoir fait ce qu'il a fait. Puisqu'il est allé jusque là, je lui demande de faire le dernier pas, c'est-à-dire de rendre toutes les victimes admissibles à l'indemnisation.

Le reste de l'amendement, qui est aussi dans la ligne de pensée du gouvernement, vise à combler les besoins de toutes les victimes de l'hépatite C. J'espère qu'on le fait déjà. Nous n'avons pas besoin de résolution pour ce faire.

Honorables sénateurs, j'aimerais que le sénateur Kirby ou le sénateur Carstairs confirme mon interprétation de cet amendement, à savoir qu'il signifie que le Sénat du Canada appuiera l'établissement d'un programme d'indemnisation qui rendra admissibles toutes les personnes ayant contracté l'hépatite C pour avoir utilisé du sang contaminé ou des produits du sang contaminé, quelle que soit la date à laquelle elles ont contracté la maladie. C'est mon interprétation de l'amendement. Si c'est l'intention de la partie ministérielle, ce sera une autre preuve de l'esprit de compréhension et de compassion qui règne toujours en cet endroit.

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, nous nous en tenons à l'amendement.

Le sénateur Lynch-Staunton: Honorables sénateurs, madame le sénateur Carstairs pourrait-elle me dire si mon interprétation de l'amendement est correcte ou non?

Le sénateur Carstairs: Je crois que l'amendement est très clair. Évitons de jouer sur les mots. Je suis fatiguée et le sénateur Lynch-Staunton l'est également.

Aux termes de l'amendement, nous appuyons la recommandation 1 de la Commission d'enquête sur l'approvisionnement en sang au Canada, qui demande aux provinces et aux territoires de répondre aux besoins de ceux qui souffrent.

Le sénateur Lynch-Staunton est-il prêt à aller jusqu'à indemniser ceux qui n'ont subi aucun tort? Certaines victimes de l'hépatite C ne ressentent aucun symptôme. Si elles n'ont pas subi de préjudice, je ne crois pas qu'elles devraient recevoir une indemnisation.

L'amendement a été modifié pour dire que ceux qui ont souffert devraient recevoir une indemnisation. Il est maintenant conforme aux arguments du sénateur Lynch-Staunton. Le gouvernement fédéral a effectivement joué un rôle de leader dans ce dossier. L'amendement dit que les provinces et les territoires devraient prendre des mesures positives pour répondre aux besoins de ceux qui ont souffert des effets de l'hépatite C.

Voilà comment je comprends l'amendement. J'espère que le sénateur Lynch-Staunton le comprend aussi de cette façon. J'espère également que c'est l'interprétation de tous les sénateurs en cette Chambre. Si tel est le cas, la motion sera adoptée et transmise aux ministres fédéral, provinciaux et territoriaux de la Santé.

Le sénateur Lynch-Staunton: Je crois que les esprits se sont rencontrés sur ce point. Je lirai la recommandation à nouveau car les mots ici reprennent les propos du juge Krever. La recommandation 1 se lit comme suit:

Il est recommandé que les provinces et les territoires prennent, sans délai, des dispositions législatives pour instaurer des régimes d'indemnisation sans égard à la faute, dont bénéficieront les personnes qui ont subi de graves préjudices [...]

Ce sont les mêmes mots que ceux de l'amendement

 

[...] à la suite de l'administration de constituants sanguins ou de produits sanguins.
Le juge Krever ne fixe pas de limite.

Le sénateur Grafstein: C'est exact.

Le sénateur Lynch-Staunton: Cet amendement n'en fixe pas non plus. C'est précisément ce que je demande. Vous faites exactement ce que nous faisions au moyen de deux amendements.

Le sénateur Gigantès: Pourquoi vous opposez-vous?

Le sénateur Lynch-Staunton: Je ne m'oppose pas du tout. Je veux m'assurer que nous parlons de la même chose. Un garçon de 11 ans victime de l'hépatite C parcourt le pays à bicyclette pour recueillir un million de signatures en faveur de cette recommandation. Nous pouvons sûrement consacrer un peu de temps pour que les sénateurs - qui sont seulement au nombre de 75 - l'appuient.

Ce qui manque - malheureusement, l'amendement aurait dû l'inclure - c'est «sous la direction constante du ministre fédéral de la Santé». J'espère que c'est sous-entendu. Si le sénateur Kirby voulait l'ajouter à son amendement, ce dernier serait plus précis. Selon mon interprétation et celle du sénateur Carstairs, nous parlons tous deux de la même intention et nous espérons certes qu'elle se concrétisera.

Son Honneur le Président: Le vote dont le Sénat est saisi porte sur la motion de l'honorable sénateur Lynch-Staunton, appuyée par l'honorable sénateur DeWare: Que le Sénat sanctionne et appuie les conclusions...

Des voix: Suffit!

Son Honneur le Président: L'amendement proposé par l'honorable sénateur Kirby, appuyé par l'honorable sénateur Carstairs: Que la motion ne soit pas maintenant adoptée, mais qu'elle soit modifiée en supprimant tous les mots après...

Des voix: Suffit!

Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion d'amendement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont contre veuillent bien dire non. Comme je n'entends aucun non, à mon avis, les oui l'emportent.

Nous revenons maintenant à la motion principale, telle que modifiée. Puis-je me dispenser d'en faire la lecture?

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont contre veuillent bien dire non. Comme je n'entends aucun non, la motion est adoptée.

(La motion est adoptée.)

 

Le commissaire à l'information

Adoption du rapport du comité sur la motion portant approbation de sa nomination

Le Sénat passe à l'étude du treizième rapport du comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, présenté au Sénat le 18 juin 1998.

L'honorable Lorna Milne: Honorables sénateurs, je propose l'adoption du treizième rapport du comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

 

La Loi sur la taxe d'accise

Projet de loi modificatif-Troisième lecture-Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Di Nino, appuyée par l'honorable sénateur DeWare, tendant à la troisième lecture du projet de loi S-10, Loi modifiant la Loi sur la taxe d'accise.-(L'honorable sénateur Maheu).

L'honorable Shirley Maheu: Honorables sénateurs, je veux commencer par féliciter le sénateur Di Nino de son projet de loi, parce qu'il nous a tous forcés à nous intéresser aux questions relatives à l'alphabétisation, au Canada.

[Français]

Dès son introduction à la Chambre haute, ce projet a reçu l'appui d'un grand nombre de sénateurs, y compris moi-même. Toutefois, lorsqu'il fut présenté au comité permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, certains sénateurs n'étaient pas convaincus qu'il inciterait à l'alphabétisation.

[Traduction]

Du moment où ce projet de loi a été présenté à la Chambre haute, il a eu l'appui d'un bon nombre de nos collègues, y compris de moi-même. Toutefois, quand il a été étudié au comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, beaucoup de sénateurs étaient convaincus que, en réalité, ce projet de loi ne ferait pas grand-chose pour promouvoir l'alphabétisation, et je suis d'accord avec eux.

Je suis convaincue que l'analphabétisme est un problème grave qu'on ne peut plus négliger. L'analphabétisme met en danger la place que le Canada s'est taillée sur les marchés mondiaux.

Votre Honneur, serait-il possible de rappeler les sénateurs à l'ordre, s'il vous plaît? On ne s'entend plus parler.

Son Honneur le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Les sénateurs qui doivent avoir une conversation devraient la tenir à l'extérieur de la Chambre!

Le sénateur Maheu: Le comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et des technologie devrait consulter chacune des provinces pour les convaincre de se joindre à un projet de lutte contre l'analphabétisme au Canada. J'aimerais que la fin du millénaire voie naître un plan visant à mettre un terme à l'analphabétisme.

Bien que nous n'ayons pas de preuve concrète qu'exonérer les imprimés de la taxe sur les produits et services aura pour effet de faire chuter considérablement le taux d'analphabétisme au Canada, même si une telle mesure ne permettait qu'à un enfant ou à un immigrant de posséder les outils nécessaires pour apprendre à lire, le projet de loi du sénateur Di Nino serait utile - et Peter Gzowski est d'accord avec moi là-dessus.

Malheureusement, le projet de loi nous laisse, à moi et à de nombreux sénateurs membres du comité, de nombreuses questions. Le principal problème, c'est que le projet de loi S-10 ne définit pas «les articles de lecture».

Le premier de mes trois amendements, que je vais proposer sous peu, porte sur l'exclusion d'une catégorie d'imprimés qui sont considérés par certains comme de la littérature et que j'appellerais des ordures. Toutefois, la Constitution et la jurisprudence limitent notre capacité à exercer la censure.

Avec l'aide de notre légiste, je me suis penchée sur la question des imprimés violents, de la littérature haineuse, de l'obscénité et de la pornographie. Nous avons rédigé un amendement qui exclurait les articles dont la vente, l'acquisition ou le visionnement sont limités par la loi à une catégorie d'âge, ou qui tombent sous le coup de l'article 163 du Code criminel portant sur l'obscénité et la pornographie. Les imprimés à caractère violent, bien qu'étant inquiétants, devront faire l'objet d'une étude ultérieure.

Le deuxième amendement propose de soustraire à l'application du projet de loi les périodiques, les revues et les journaux dont le contenu est fait à plus de 5 p. 100 de publicité, comme c'est le cas de la loi qui exonère les bibliothèques de la TPS. Je suis en faveur d'accorder un répit aux petites publications - et oui, je sais que le gouvernement fédéral perçoit la TPS sur la vente d'espaces publicitaires. Toutefois, par exemple, le Ottawa Citizen coûte 2 $ le samedi, soit 1,87 $ plus la TPS.

Honorables sénateurs, honnêtement, pensez-vous que Conrad Black baissera le prix de son journal si celui-ci n'est plus assujetti à la TPS? Je ne le crois pas.

Le sénateur Lynch-Staunton: Et le Toronto Star?

Le sénateur Maheu: On en a déjà parlé. La première semaine, peut-être.

Cette mesure législative a été présentée pour combattre l'analphabétisme au Canada, pas pour donner un dégrèvement fiscal. Je ne saurais appuyer une chose qui enrichit les riches et appauvrit les pauvres. Je sais qu'il y a certaines inquiétudes et que cet amendement pourrait aider plusieurs petites publications, les magazines spécialisés et les périodiques de langue non officielle.

Honorables sénateurs, je voudrais rapidement préciser les choses. Le sénateur Di Nino et moi avons parlé de cela. Les petites publications comme les journaux communautaires sont habituellement - mais pas toujours - gratuits, les revenus venant de la publicité, par conséquent elles n'ont pas à s'en faire. Les journaux et périodiques de langue non officielle ne sont pas touchés, car le plus souvent ils viennent de l'étranger et ne sont pas soumis à la TPS. Je suis sûre qu'il y aurait une certaine inquiétude en ce qui concerne les magazines qui s'adressent aux hommes, aux femmes, aux minorités, aux enfants, aux autochtones. Toutefois, la plupart des documents éducatifs et professionnels contiennent moins de 5 p. 100 de publicité et seraient, pas conséquent exemptés.

Le troisième amendement porte sur les textes éducatifs achetés par les parents pour que l'enfant se conforme aux exigences de la classe enseignée. Il s'agirait, par exemple, des cahiers d'exercices en langue ou des textes supplémentaires en langue seconde. Le matériel de lecture comprend beaucoup de choses utilisées dans les écoles. Je suis d'avis que si un enfant a de la difficulté en classe, les parents devraient être en mesure d'aller acheter des textes supplémentaires sans payer la TPS. Les cahiers d'exercices et autres matériels approuvés par les autorités scolaires de la province pour utilisation en classe devraient aussi être exemptés.

Je voudrais féliciter le sénateur Di Nino. Il a démontré son désir de combattre l'analphabétisme. Je voudrais informer tous les sénateurs que je me joins à lui, et je désire donner un appui conditionnel au projet de loi S-10 accompagné de mes amendements.

 

Motion d'amendement

L'honorable Shirley Maheu: Honorables sénateurs, je propose, appuyée par l'honorable sénateur Ferretti Barth:

Que le projet de loi S-10 ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit modifié à l'article 1, page 1, par substitution, à la ligne 9, de ce qui suit:

 

«lecture, y compris toute représentation graphique ou autre moyen d'expression approuvé par un établissement d'enseignement pour utilisation dans ses programmes, à l'exception cependant de tout article:
a) soit dont la vente, l'acquisition ou la consultation comporte des restrictions imposées par la loi quant à l'âge des personnes en cause;
b) soit qui est obscène au sens de l'article 163 du Code criminel ou est de nature pornographique;
c) soit qui comporte plus de cinq pour cent de publicité.»
Son Honneur le Président: L'honorable sénateur Maheu, appuyée par l'honorable sénateur Ferretti Barth, propose que le projet de loi soit modifié...

Des voix: Suffit!

[Français]

L'honorable Marisa Ferretti Barth: Honorables sénateurs, j'interviens aujourd'hui pour appuyer les amendements du sénateur Maheu relativement à la troisième lecture du projet de loi S-10. Avant d'aller plus loin, je tiens à souligner que j'appuie le projet de loi et je tiens à féliciter le sénateur Di Nino d'avoir pris cette initiative. Comme lui, je suis d'avis que le Canada devrait faciliter l'accès à la lecture.

Si nous voulons encourager les gens à lire davantage, nous devons nous assurer qu'ils ont accès à la lecture à des prix raisonnables. Je crois que le projet de loi S-10 pourrait aider à promouvoir la lutte contre l'analphabétisme. Cependant, je m'inquiète de la définition de l'article de lecture de ce projet de loi. Elle est trop vague. Notre amendement éviterait qu'on rende plus accessibles les publications exigeant un avertissement aux parents à cause du langage, des scènes de nudité ou de violence.

[Traduction]

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables collègues, permettez-moi tout d'abord de remercier le sénateur Maheu et le sénateur Ferretti Barth de leur appui. Nous avons essayé tout au long de ce processus de traiter la question de façon impartiale et non politique et nous continuons de le faire.

Je n'ai aucune réserve quant à l'amendement du sénateur Maheu qui vise à ajouter des éléments à la liste du matériel exclu de la TPS autres que les mots imprimés sur du papier, tels qu'approuvés par un établissement d'enseignement. C'est un ajout utile et je l'en remercie.

De même, je n'ai pas non plus de réserve quant aux deux autres éléments qui permettraient d'exclure du matériel imposé par la loi renfermant une restriction d'âge. C'est juste. Certaines de ces publications ne devraient pas être exclues de la TPS.

Nous avons déjà discuté de la question de l'obscénité telle que traitée par le Code criminel. Le sénateur Maheu a ajouté le mot «pornographique» avec lequel je suis d'accord, bien que je reconnaisse qu'il sera difficile pour ceux qui devront l'interpréter de le faire respecter.

Ce qui me préoccupe toutefois dans l'amendement du sénateur Maheu est l'exclusion du matériel de lecture contenant plus de 5 p. 100 de publicité. Écoutez-moi encore un tout petit moment. C'est un point important et je serai bref.

Certains des problèmes soulevés par cette règle du 5 p. 100 ont trait à la distinction artificielle qui sera créée entre les périodiques qui jouent un rôle semblable dans la communauté, mais qui ont un contenu publicitaire d'un régime différent. Cela créerait également une surcharge administrative dans les kiosques à journaux ou tout autre endroit où les périodiques sont offerts. Comment le marchand est-il censé savoir si une publication renferme plus ou moins de 5 p. 100 de publicité.

Le sénateur Murray: En se basant sur le numéro précédent.

Le sénateur Di Nino: Il pourrait y en avoir plus certains mois que d'autres.

La règle du 5 p. 100 pénaliserait les publications qui génèrent le plus de revenus de TPS. Une publication qui accroîtrait ses revenus de publicité à 20 p. 100 serait pénalisée. Cela pourrait empêcher les publications se situant actuellement sous la barre des 5 p. 100 d'accroître leur stabilité financière en ajoutant des revenus de publicité.

Selon certains points de principe, l'argument en faveur de l'amendement semble être que les publications qui renferment de la publicité sont trop commerciales et, par conséquent, ne méritent pas un taux nul de taxe. L'information sur les marges bénéficiaires des éditeurs qui a été compilée par Statistique Canada ne confirme pas le point de vue voulant que, d'une façon générale, les publications soutenues financièrement par la publicité réalisent des profits énormes. Au contraire, les marges bénéficiaires sont minces. On nous l'a répété à maintes reprises. De toute évidence, les revenus tirés de la publicité permettent de maintenir les coûts à un niveau raisonnable pour les lecteurs, ce qui est certainement un objectif social valable.

Une analyse des publications canadiennes ne confirme pas le point de vue selon lequel les périodiques renfermant de la publicité sont moins louables que les autres quant à leurs objectifs ou à la contribution qu'ils apportent à la société. La capacité de solliciter des annonces publicitaires est principalement liée à l'importance de la publication, qui est elle-même liée à l'intérêt suscité par celle-ci auprès des consommateurs.

Certaines des publications les plus importantes au Canada, y compris Saturday Night, Maclean's, L'Actualité et Chatelaine, pour n'en nommer que quelques-unes, dépasseraient toutes le seuil de 5 p. 100, tout comme de nombreuses publications s'adressant à un marché plus restreint. Quelle est la norme? La vraie question est de savoir si l'amendement possible renforcerait ou minerait l'objectif visé par le projet de loi S-10.

Pour autant que l'on puisse dire, l'amendement aurait pour effet de miner, plutôt que de soutenir, l'argument principal en faveur de l'abolition de la taxe sur les publications, à savoir la promotion de la lecture, la mise en place d'une économie fondée sur les connaissances, ainsi que l'élimination des injustices et des contraintes créées par la TPS dans le secteur des publications.

Honorables sénateurs, de quoi discutons-nous en réalité? Tous les sénateurs connaissent, lisent, appuient et achètent des publications locales dans les petites villes et collectivités où ils habitent. La plupart de ces publications appartiennent à des résidants locaux qui ne font pas des profits énormes, mais qui fournissent un service très utile à ces collectivités.

Le Canada bénéficie de la présence d'une multitude de personnes provenant de toutes les régions du monde qui ont décidé de venir s'installer dans notre pays. La plupart de ces personnes ont au moins une publication dans leur langue, et peuvent parfois en avoir besoin d'autres. Au Canada, on trouve des centaines, sinon des milliers de publications dans des langues autres que les deux langues officielles. Je soupçonne que la plupart de ces publications génèrent peu ou pas d'argent. Ces publications ne sont pas gratuites. Certaines le sont, mais la majorité sont vendues.

(2020)

Les gens ont besoin d'un certain revenu et de recettes pour pouvoir avoir être en mesure de soutenir ces publications. Je vais vous donner quelques exemples précis. Je vais vous citer le titre de certaines des publications qui seraient exemptées. Je pourrais en citer 150, mais je me contenterai d'en citer quelques-uns.

Aboriginal Voices, The Voice of the Canadian Aboriginal People. Cette revue coûte 21,40 $ pour quatre numéros, au cas où quelqu'un penserait qu'elle est distribuée gratuitement; Azure, Developments in Canadian and International Design, au coût de 19,95 $ pour six numéros.

Je ne vous donnerai pas tous les prix. Ces publications sont toutes offertes à la vente.

Green Teacher, Global and Environmental Awareness for Children; The Nation, The News and Cultural Magazine of the James Bay Cree; Family Health, Promoting Healthy Lifestyles and Injury Prevention; Books in Canada, Canada's Book Review Journal.

Vous remarquerez que je lis seulement un titre ou deux de chaque page.

Kindred Spirits of PEI, The Life and Works of L.M. Montgomery; Matrix, Featuring New and Established Canadian and International Writers; NeWest Review; Kinesis; Shift Magazine; Ryerson Review of Journalism; Vice Versa; Windspeaker; Equinox.

Toutes ces revues seraient exemptées si nous acceptions le projet de loi. Elles font plus de 5 p. 100 de recettes en publicité.

Je vais terminer en montrant aux honorables sénateurs quatre ou cinq de ces revues. Voici Aboriginal Voices dont j'ai déjà parlé. Qui voudrait lui dire que non, elle ne peut pas être traitée de la même façon que certaines des autres publications.

Voici Vie des arts, Arts Atlantic, Prism International, QUEPASA, MIX ZEDOROR, la revue traitant de dossiers ukrainiens. Ce sont toutes là d'excellentes publications canadiennes.

De quoi parlons-nous, honorables sénateurs? De l'amendement. Le sénateur Maheu doit accepter que la lecture est liée à l'alphabétisation. L'amendement que propose le sénateur Maheu est bon, sauf lorsqu'il suggère que les publications qui tirent plus de 5 p. 100 de leurs recettes de la publicité ne devraient pas bénéficier de cette exemption.

Je dois malheureusement, en toute déférence, rejeter son amendement et je propose un sous-amendement très simple à l'amendement du sénateur Maheu, qui consiste tout simplement à supprimer la dernière ligne de son amendement, c'est-à-dire l'alinéa c).

 

Motion de sous-amendement

L'honorable Consiglio Di Nino: Je propose, appuyé par le sénateur Kinsella:

Que la motion d'amendement soit modifiée par suppression de son alinéa c).

Des voix: Bravo!

Son Honneur le Président: L'honorable sénateur Di Nino, appuyé par l'honorable sénateur Kinsella, propose:

 

Que l'on modifie la motion d'amendement...
Une voix: Suffit!

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, le vote porte sur la motion de sous-amendement.

L'honorable Joyce Fairbairn: Honorables sénateurs, c'est dans un esprit tout à fait neutre et impartial que j'affirme que nous débattons ici de questions importantes et que je veux ajourner le débat.

Son Honneur le Président: Voulez-vous intervenir, sénateur Lynch-Staunton?

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Oui, je veux intervenir si je ne peux ajourner le débat en mon nom.

Son Honneur le Président: Lorsque deux honorables sénateurs se lèvent et que l'un d'entre eux demande l'ajournement du débat, je demande toujours à l'autre s'il veut intervenir.

Le sénateur Di Nino: Je veux aborder la motion d'ajournement.

Son Honneur le Président: La motion d'ajournement ne fait pas l'objet d'un débat.

Le sénateur Lynch-Staunton: Je veux intervenir avant que la motion d'ajournement ne soit mise aux voix.

Son Honneur le Président: Je n'ai pas encore mis la motion aux voix.

Le sénateur Lynch-Staunton: Honorables sénateurs, je voudrais, le plus brièvement possible, rappeler à nos amis d'en face la position qu'ils ont adoptée à ce sujet dans le passé. Le projet de loi que le sénateur Di Nino présente correspond mot pour mot à celui que le sénateur Frith a présenté au Sénat et qui n'a jamais fait l'objet d'un vote. À l'époque, le sénateur Frith était le leader de l'opposition et il prenait place dans ce fauteuil. Il a présenté ce projet de loi au nom de ses collègues et, j'imagine, du Parti libéral qui, si vous vous souvenez bien, avait promis aux électeurs de supprimer entièrement la TPS.

Les origines du projet de loi visant à supprimer la TPS sur les articles de lecture remontent à novembre 1990; pendant le débat sur la TPS, l'opposition libérale avait proposé huit amendements au projet de loi sur la TPS, le projet de loi C-62. Le premier amendement avait été proposé par celui qui était alors le leader de l'opposition, le sénateur MacEachen. Celui-ci, comme nous l'avons appris dernièrement, est une ressource nationale, il est disponible pour fins de consultation; à ma connaissance, il occupe encore une suite digne du Taj Mahal dans l'édifice de l'Est et, de toute évidence, lorsqu'il adopte une position, il n'en démord pas. Appuyé par le sénateur Frith, il a donc proposé un amendement au projet de loi C-62, celui sur l'accise qui prévoyait la mise en application de la TPS, afin de soustraire les articles de lecture à l'application de cette taxe. Deux fois, au Sénat, le Parti libéral a recommandé de soustraire les articles de lecture à l'application de la TPS, purement et simplement, sans égard au contenu ni aux recettes publicitaires. D'ailleurs, lorsque l'amendement a été proposé, le sénateur MacEachen a publié un communiqué dans lequel il déclarait ceci:

De tous les aspects condamnables de la TPS, l'imposition d'une taxe sur les articles de lecture est certainement la mesure la plus régressive et la plus préjudiciable à la culture et à l'éducation jamais présentée par un gouvernement.

Le sénateur Berntson: Le trésor national.

Le sénateur Lynch-Staunton: À ceux qui pourraient demander pourquoi nous n'avons rien fait à cet égard à l'époque, je dois rappeler ce que le ministre des Finances, M. Wilson, avait dit à l'époque:

Que nous n'accepterions pas ces amendements, mais que lorsque la TPS aurait été en place depuis un certain temps, nous réexaminerions la situation et que si les exemptions étaient justifiées, nous les mettrions certainement en oeuvre.

Le sénateur Hébert, que le communiqué désignait comme membre fondateur d'une importante maison d'édition et qui, par conséquent, avait une connaissance de première main de cette industrie, aurait dit ceci:

Les effets de la TPS sur les imprimés seront dévastateurs, se traduisant par des pertes d'emploi et une baisse des ventes.

Le sénateur Hébert a poursuivi en disant:

Paradoxalement, le déclin sera plus fortement ressenti dans les secteurs où le gouvernement a établi ses priorités, pour des motifs sociaux et culturels, soit sur les écrits canadiens qui ont trait aux domaines intéressant les Canadiens.

Des membres de premier plan du parti siégeant ici ont présenté un argument puissant. Au cours du débat, que j'exhorte les sénateurs d'en face à lire avant de voter sur ce projet de loi, les arguments les plus convaincants ont été présentés par leurs collègues.

Le sénateur Gigantès: Cela ne vous a pas convaincu la dernière fois.

(2030)

Le sénateur Lynch-Staunton: Le sénateur MacEachen a dit:

Il nous semble raisonnable d'adopter un amendement ayant pour effet de rétablir le statu quo de manière à soustraire les imprimés à l'application de la TPS. On se trouverait alors à maintenir un système actuellement en vigueur au Canada qui, à tout le moins, donnerait une chance à l'industrie canadienne des imprimés. Les arguments présentés aujourd'hui par le sénateur Di Nino sont les mêmes qui ont été invoqués alors et qui ont été rejetés par le gouvernement conservateur, le ministre Wilson ayant ajouté qu'après quelques années d'application de la TPS, la question de l'exemption de TPS sur les imprimés serait réexaminée.

Parlant de cet amendement, le sénateur Hébert a dit:

En ce qui me concerne, je me limiterai à parler des effets catastrophiques de la TPS sur l'industrie du livre. Les journaux et les magazines ont été également touchés, mais c'est le livre qui est à la base de notre développement culturel.

Le sénateur Fairbairn est tout naturellement intervenu dans le débat en raison de son travail constant et admirable en faveur de l'alphabétisation au Canada. Autant pour des raisons personnelles que politiques, le sénateur Fairbairn tient à ce que l'alphabétisation soit encouragée dans toute la mesure du possible et un des moyens pour cela consiste à éliminer la TPS sur les articles de lecture. À l'époque, ses discours étaient très longs, mais aussi très chargés. Je vous en cite un court extrait:

J'imagine que la question qu'il faut nous poser aujourd'hui, c'est: pourquoi attendre? Notre amendement visant à ramener à zéro le taux de la taxe sur les livres et les imprimés donne au gouvernement du Canada une occasion en or d'éliminer la taxe. Je crois que ce serait une excellente réponse aux préoccupations de la population.

Nous sommes huit ans plus tard, rien de nouveau n'a été ajouté sur les faits, aucun argument nouveau n'a été avancé et, à l'époque, 23 sénateurs libéraux avaient voté en faveur de l'élimination de la TPS sur les articles de lecture. Puisque la plupart d'entre eux sont ici, il convient de leur rappeler comment ils ont voté. Je sais que la cohérence ne sera jamais une de leurs grandes qualités, mais il leur arrive de temps à autre d'être cohérents.

Le sénateur Gigantès: Vous m'étonnerez toujours. Vous avez voté pour l'imposition de la taxe la dernière fois.

Le sénateur Lynch-Staunton: Nous avons voté en faveur de la TPS sur les articles imprimés à l'époque et le ministre Wilson avait déclaré que, au moment opportun, tout le système de la TPS serait revu et les livres, journaux et magazines seraient parmi les premiers articles exemptés. Tout cela peut être vérifié dans les comptes rendus.

Ce que l'on peut aussi vérifier au compte rendu, c'est le nom des sénateurs libéraux qui sont encore ici aujourd'hui et qui ont voté en masse et avec enthousiasme en faveur de l'élimination de la TPS sur les articles de lecture. Ce sont les sénateurs Adams, Austin, Bosa, Cools, Corbin, De Bané, Fairbairn, Gigantès, Grafstein, Graham, Hébert, Kenny, Kirby, Kolber, Lewis, Lucier, Molgat, Perrault, Louis Robichaud, Stewart, Stollery et Watt. Je les invite à s'unir à nous pour appuyer, une fois de plus, le principe de l'abolition de la TPS sur les livres, les journaux et les magazines.

Des voix: Bravo!

L'honorable Joyce Fairbairn: Honorables sénateurs, je propose l'ajournement du débat.

Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Le sénateur Di Nino: Non. Ce n'est qu'une manoeuvre dilatoire. C'est tout ce que c'est. Vous devriez avoir honte.

Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: À mon avis, les oui l'emportent.

Et deux sénateurs s'étant levés.

Son Honneur le Président: Convoquez les sénateurs.

Les whips m'informent qu'il a été convenu que le timbre se fera entendre pendant 10 minutes. Le vote aura donc lieu à 20 h 45.

Son Honneur le Président: Le vote porte sur la motion de l'honorable sénateur Fairbairn, appuyée par l'honorable sénateur Gigantès, que le débat de troisième lecture soit ajourné jusqu'à la prochaine séance.

(La motion est adoptée, et le débat est ajourné.) 

POUR
LES HONORABLES SÉNATEURS

Adams, Bacon, Bryden, Butts, Callbeck, Carstairs, Chalifoux, Cook, Cools, Corbin, Fairbairn, Ferretti Barth, Fitzpatrick, Forest, Gigantès, Grafstein, Graham, Hébert, Hervieux-Payette, Johnstone, Joyal, Kirby, Kroft, Losier-Cool, Maheu, Mahovlich, Maloney, Mercier, Milne, Pépin, Poulin, Robichaud (L'Acadie-Acadia), Robichaud (Saint-Louis-de-Kent), Rompkey, Ruck, Sparrow, Stewart, Taylor, Watt, Wilson-40. 

CONTRE
LES HONORABLES SÉNATEURS

Angus, Atkins, Berntson, Cohen, Comeau, DeWare, Di Nino, Forrestall, Grimard, 
Kelleher, Keon, Kinsella, LeBreton, Lynch-Staunton, Meighen, Murray, Nolin, Oliver, Phillips, Rossiter, Simard, Spivak, Stratton, Tkachuk-24. 

ABSTENTIONS
LES HONORABLES SÉNATEURS

Aucune 

(2050)

Projet de loi sur la sanction royale

Étude du rapport du comité-motion d'amendement-Ajournement du débat

Le Sénat passe à l'étude du douzième rapport du comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles (projet de loi S-15, Loi relative aux modalités d'octroi par le Gouverneur général, au nom de Sa Majesté, de la sanction royale aux projets de loi adoptés par les Chambres du Parlement), présenté plus tôt aujourd'hui au Sénat.

L'honorable Lorna Milne propose l'adoption du rapport, avec des propositions d'amendement.

- Honorables sénateurs, en ce qui concerne les amendements adoptés par le comité, le premier amendement, qui se rapporte à l'article 2 du projet de loi, précise que la cérémonie traditionnelle de la sanction royale est nécessaire pour le premier projet de loi de crédit déposé pour fins de sanction au cours d'une session.

Les amendements à l'article 3 suppriment l'obligation de présenter une déclaration écrite devant chaque Chambre du Parlement dans les 15 premiers jours de séance. Le nouvel article 3 fait en sorte que la cérémonie de la sanction royale ait lieu pour au moins un projet de loi durant chaque année civile ultérieure d'une session.

Les autres articles du projet de loi ont fait l'objet d'une nouvelle numérotation, jusqu'à l'article 6, et un nouvel article 7 a été créé pour s'assurer que les déclarations écrites de la sanction royale ne soient pas invalidées dans le cas où la règle relative à la tenue d'une cérémonie traditionnelle au cours des années subséquentes de la session ne serait pas respectée.

Cependant, honorables sénateurs, comme je le disais durant les séances du comité, même si ces amendements ont été adoptés par le comité, j'ai certaines réserves au sujet du projet de loi, amendé ou non. Je suis convaincue que la sanction royale, avec tout son cérémonial, est le dernier vestige traditionnel de ce qui justifiait, à l'origine, la présence d'un huissier de la verge noire et d'une étape importante de l'évolution du système de démocratie parlementaire dont nous jouissons aujourd'hui.

Il s'agit aussi d'une belle pièce de théâtre, qu'un nombre accru de Canadiens devraient connaître.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, en tant que membre du comité des affaires juridiques et constitutionnelles, j'ai écouté et examiné la déposition des deux seuls témoins qui ont comparu devant le comité au sujet du projet de loi S-15, et qui proposaient de moderniser la pratique de la sanction royale au Sénat. Je me suis abstenu de voter en faveur des recommandations figurant dans ce rapport. Je continue de douter que les conséquences symboliques de réduire la sanction royale au Sénat au moyen des propositions que renferme ce projet de loi ont bien été pesées.

Je me réjouis de l'initiative qu'a prise le chef de l'opposition d'attirer l'attention du Sénat sur l'érosion des pratiques concernant la sanction royale. Néanmoins, je ne puis m'empêcher de faire remarquer que si le regretté et très vénéré, le très honorable John Diefenbaker, nous regarde, il se pourrait bien qu'il ne soit pas très bien disposé envers les membres de son parti qui doivent l'avoir un peu déconcerté par leur conduite plus que curieuse.

J'ai dit hier au comité qu'il est vraiment étrange pour les sénateurs de ce côté-ci de la Chambre de se sentir obligés d'invoquer la mémoire de John Diefenbaker, mais au Sénat, tout est possible, manifestement. Dans les circonstances, je pense que la meilleure ligne de conduite à suivre, c'est de renvoyer ce projet de loi au comité de façon à ce que ce dernier puisse à l'automne obtenir le point de vue du public et du Sénat quant au rôle de la Couronne, de son représentant, le Gouverneur général, dans l'exercice de son devoir constitutionnel le plus insigne, la sanction royale, qui facilite le passage des mesures législatives dans la primauté du droit au Canada, à laquelle sont assujettis la Couronne et le pays.

 

Motion d'amendement

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Par conséquent, honorables sénateurs, je propose, appuyé par l'honorable sénateur Pépin, que ce rapport ne soit pas adopté et que le projet de loi soit renvoyé au comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles pour plus ample examen.

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, je félicite mon collègue, le sénateur Grafstein, pour son excellent discours. Je n'ai pas eu l'occasion de méditer sur l'amendement qu'il a proposé, mais j'avais l'intention de faire de brèves remarques à ce stade en vue d'ajourner le débat.

Pour commencer, je rappelle à certains honorables sénateurs qu'un projet de loi très similaire à celui-ci avait été soumis au Sénat sous le gouvernement conservateur. Ce projet de loi est mort ici parce que le chef de l'opposition d'alors, le sénateur MacEachen, a veillé à ce qu'il soit placé tout en dessous de la pile des mesures législatives, pour ainsi dire.

Je n'oserais pas parler au nom du sénateur MacEachen, mais je ne crois pas me tromper en disant qu'il s'opposait au projet de loi parce qu'il faisait pratiquement disparaître la cérémonie de la sanction royale au Sénat, ce qui représentait, de la part de la Chambre des communes et du gouvernement de l'époque, une mesure de plus pour diminuer le rôle et l'importance du Sénat au titre de l'une des Chambres du Parlement. C'est ce qu'il croyait et, comme je le disais, il a vu à ce que, aussi longtemps qu'il a été à la tête de la majorité à notre Chambre, le projet de loi n'aille pas plus loin.

Honorables sénateurs, je dois avouer que, à titre personnel et en privé, j'admets que ses arguments avaient un certain mérite. Quand la situation s'est renversée au Sénat et que le gouvernement conservateur est devenu majoritaire ici, je n'ai rien fait pour ressusciter le projet de loi. Toutefois, le voici de nouveau, grâce à l'initiative de mon ami le chef de l'opposition.

Honorables sénateurs, j'ai une grande sympathie à l'égard de la position du sénateur Grafstein. Cela étant dit, j'ai une autre confession à faire. Durant sept ans et demi, j'ai assisté à presque toutes les sanctions royales au Sénat, parce que tel était mon devoir. J'ai toujours été frappé, comme d'autres sénateurs l'ont sûrement été depuis, par la faible participation des sénateurs à cette cérémonie. J'étais aussi frappé - en fait, «scandalisé» serait le mot juste - par la faible participation des députés. Comme les sénateurs le savent, il arrive souvent que, du Président et du vice-président, un seul des deux soit présent, accompagné peut-être de quelques autres députés derrière la barre. La foule qu'on voit à cet endroit est en grande partie composée de greffiers, de pages et d'autres fonctionnaires.

J'avoue que, depuis 1993, j'ai assisté à une seule sanction royale au Sénat. Il serait donc hypocrite de ma part d'insister pour que cette cérémonie soit maintenue telle quelle.

J'ai beaucoup de sympathie à l'égard de la position du sénateur Grafstein, mais je ne peux pas, en toute bonne conscience, dire que je voterai ou que j'aimerais voter contre ce projet de loi pour une question de principe.

Toutefois, je veux faire part d'un motif d'inquiétude dont mon collègue, le doyen du Sénat, le sénateur Phillips, et moi-même avons discuté relativement à ce projet de loi. Si le sénateur Phillips ne s'y oppose pas, je pourrais peut-être faire connaître sa position. Si je n'en rends pas compte fidèlement, il me corrigera certainement très vite. Le sénateur Phillips est d'avis, et je suis d'accord avec lui, que le fait d'envoyer un projet de loi à Rideau Hall pour la sanction royale exigerait qu'on fasse plus que de le faire parvenir par les soins d'un messager, ou même d'un greffier ou d'un Président.

(2100)

Nous sommes d'avis qu'il serait obligatoire, si nous voulons changer cette pratique, qu'un représentant de l'opposition et un représentant du gouvernement des deux Chambres soient présents à la sanction royale selon la nouvelle formule, si on veut que ce projet de loi ou tout autre projet de loi similaire soit jamais adopté.

J'allais proposer l'ajournement du débat sur l'amendement du sénateur Grafstein, et je peux toujours le faire. J'en fais la proposition maintenant.

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Avant de passer à autre chose, honorables sénateurs...

Le sénateur Grafstein: Il a proposé l'ajournement du débat. Parlons donc de l'ajournement.

Le sénateur Lynch-Staunton: Me feriez-vous la courtoisie de me laisser parler?

Le sénateur Grafstein: Le sénateur Murray a proposé l'ajournement du débat.

Le sénateur Di Nino: Mais le Président ne l'a pas encore mis aux voix.

Son Honneur le Président: À l'ordre, s'il vous plaît.

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, dans l'esprit de collégialité que je pensais être le nôtre ce soir, je pense que nous pourrions nous entendre pour appuyer la motion du sénateur Murray en vue d'ajourner le débat. Toutefois, je ne pense pas que nous voulions empêcher de prendre la parole quelqu'un qui a exprimé le désir de parler sur ce sujet. Si le sénateur Lynch-Staunton veut prendre la parole, je pense que nous devrions le lui permettre.

Le sénateur Di Nino: Le sénateur Cools aussi veut prendre la parole.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, la pratique habituelle dans cette Chambre veut que si une motion portant ajournement d'un débat a été proposée, mais qu'un autre sénateur veut prendre la parole, on lui accorde cette courtoisie. Deux sénateurs se sont levés, le sénateur Lynch-Staunton et le sénateur Cools. Bien que le sénateur Murray ait proposé l'ajournement du débat, je n'ai pas mis la motion aux voix. Par conséquent, je suis prêt, à moins que le Sénat ne le refuse, à entendre l'honorable sénateur Lynch-Staunton.

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, je voudrais poser quelques questions au sénateur qui a présenté le rapport, si c'est possible.

Son Honneur le Président: Que désirez-vous faire, sénateur Cools?

Le sénateur Cools: Je voulais poser quelques brèves questions sur le rapport. Si l'on procède d'une certaine façon, le président du comité présente son rapport et, souvent, on peut l'interroger. J'ai quelques questions que j'aimerais lui poser, avec votre permission.

Son Honneur le Président: Je ne peux autoriser le sénateur Cools à poser des questions à l'auteur de la motion. Nous avons passé ce stade.

[Français]

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, j'aurais aimé faire un discours très vigoureux sur cette question mais, en raison de l'heure peut-être, je ne sais pas pourquoi, je ne me sens pas tout à fait capable de parler longtemps, tant mieux!

[Traduction]

Je voudrais toutefois faire savoir officiellement que j'ai toujours été et que je resterai un profond traditionnaliste, attaché à la tradition parlementaire britannique. J'ai toujours dit - et je ne peux pas changer après 35 ans - que tout ce qui réduit nos traditions devrait être accepté avec une grande prudence.

J'ai eu des discussions avec un sénateur qui siège de l'autre côté. C'est un érudit, un enseignant, un professeur. Nous parlions de la question de savoir si le nombre de députés exigés pour la sanction royale pouvait être réduit. C'est possible. Un jour, nous devrions débattre de cette question. J'ai dit qu'aucune loi ne pouvait être adoptée sans que des députés soient appelés pour la sanction royale. S'ils ne venaient pas, les lois seraient invalidées par les tribunaux.

Je ne parlerai pas de cela ce soir. J'en ai déjà parlé au sénateur Nolin et au sénateur Stewart. Ils connaissent ma position.

Si le débat est ajourné, nous aurons alors plus de temps pour réfléchir à la question.

Je suis honoré, en tant que Canadien français, de défendre la tradition britannique. Nous avons un nouvel huissier de la verge noire. Pensons-nous que maintenant, du fait que certains sénateurs ne viennent pas au Sénat, nous allons mettre un terme à cette tradition? Eh bien non. C'est ce qui nous rend si différents des autres. Certains prétendent que cette cérémonie prend trop de temps. De telles cérémonies ont un sens. Avant de nous en débarrasser, nous devrions réfléchir un peu plus longtemps.

L'honorable Orville H. Phillips: Honorables sénateurs, étant donné que mon voisin a parlé de notre discussion, je signale que je me rappelle très bien de la discussion au sein de divers comités lorsque le Parti conservateur envisageait un projet de loi semblable.

On s'est beaucoup demandé qui devrait remettre ce projet de loi au Gouverneur général. Je crois que c'est le sénateur Frith qui a expliqué le système britannique, dans lequel le projet de loi est soumis à Sa Majesté par les membres du Conseil privé. Je me rappelle que le sénateur Frith a précisé que l'opposition devait être représentée lorsqu'on soumettait ce projet de loi à Sa Majesté, parce que cela soulignait le fait que l'opposition fait partie du Parlement et a un rôle à jouer. La présentation d'une mesure législative à la Reine ou au Gouverneur général devrait signifier que tout le Parlement a participé à son adoption.

Honorables sénateurs, je prétends que si nous ne voulons pas qu'un membre du Conseil privé soumette le projet de loi au Gouverneur général, il conviendrait alors que les Présidents des deux Chambres le fassent. Je serais certes heureux de les accompagner, car généralement, lorsque nous visitons la résidence du Gouverneur général, on ouvre le champagne. Je suis persuadé que les deux Présidents ou Présidents adjoints adoreraient cela.

Je souscris à l'idée du renvoi de ce projet de loi au comité pour cette raison. En ce qui concerne le rapport déposé cet après-midi, le troisième amendement prévoit que la sanction royale doit avoir lieu au moins une fois par année civile.

L'amendement no 7 dit:

Nulle sanction royale n'est invalide du seul fait de l'inobservation de l'article 3 au cours d'une année civile.

Pourtant, l'article 3 proposé, dont j'ai parlé, précise qu'il doit y avoir une sanction royale une fois par année.

On ne peut en aucune façon concilier ces deux amendements. Pour cette raison, je suis en faveur du renvoi du projet de loi au comité où on pourra discuter de certaines de ces considérations plus en détail.

J'ignore où en est la motion d'ajournement du débat de mon collègue. Si elle est invalide, je serai heureux de proposer l'ajournement du débat.

(Sur la motion du sénateur Phillips, le débat est ajourné.)

[Français]

 

La Sanction royale

Avis

Son Honneur le Président suppléant informe le Sénat qu'il a reçu la communication suivante: 

RIDEAU HALL

Le 18 juin 1998 

Monsieur le Président,
J'ai l'honneur de vous aviser que le très honorable Ian Binnie, juge puîné de la Cour suprême du Canada, en sa qualité de Gouverneur général suppléant, se rendra à la Chambre du Sénat aujourd'hui, le 18 juin 1998, à 21 h 45, afin de donner la sanction royale à certains projets de loi.

Veuillez agréer, monsieur le Président, l'assurance de ma haute considération. 

Le secrétaire du Gouverneur général,
Judith A. LaRocque

L'honorable
   Le Président du Sénat
      Ottawa

Régie interne, budgets et administration

Adoption du vingt-troisième rapport du comité

Le Sénat passe à l'étude du vingt-troisième rapport du comité sénatorial permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, déposé au Sénat le 18 juin 1998.

L'honorable Pierre Claude Nolin: Honorables sénateurs, je propose l'adoption de ce rapport.

Son Honneur le Président: Vous plaît-il d'adopter la motion, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

[Traduction]

 

Les transports

Le rapport Lerner sur l'annulation des accords sur l'aéroport Pearson-Interpellation

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur LeBreton, attirant l'attention du Sénat sur le rapport intitulé: «Cancelling the Pearson Airport Agreements», de Stephen D. Lerner.-(L'honorable sénateur Tkachuk)

L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, trois ans ont passé depuis la formation du comité sénatorial spécial sur les accords de l'aéroport Pearson. En juillet, août et septembre, les sénateurs ont enquêté sur l'annulation du contrat d'aménagement de l'aéroport Pearson et l'octroi de ce contrat à un consortium nommé Paxport et, par la suite, à la Pearson Development Corporation.

Étant conservateur de nature et de pensée, je respecte et je crains le pouvoir du gouvernement. Dans une démocratie, nous n'y pensons pas souvent. Nous croyons que les gouvernements démocratiques sont moins portés à utiliser leur pouvoir. En fait, la démocratie a toujours été ce qu'il y avait de mieux pour l'ensemble d'une population. Elle confère à tous ses membres le droit de voter. Mais les élus ont parfois des comportements qui ne sont pas dans l'intérêt de la population.

Je crois que la répétition d'allégations de corruption et de favoritisme contre Paxport par les médias - autre pilier de pouvoir qui fait des abus aussi régulièrement que le gouvernement - et ensuite par le premier ministre, alors chef du Parti libéral du Canada, est une illustration de la pire propagande. C'est ce que l'histoire retiendra et ce qu'on étudiera en tant qu'exemple de la manière de répandre de fausses allégations, parce que c'est un des pires exemples d'abus de pouvoir qu'il y ait eu au Canada.

L'ignorance peut être excusée pendant un certain temps, comme dans ce cas, avant les élections. Toutefois, lorsque le gouvernement libéral a pris le pouvoir à l'automne de 1993, celui-ci a immédiatement choisi une voie qui allait perpétuer le mensonge en ce qui a trait à Paxport et à Pearson Development Corporation, au lieu de chercher la vérité. Sans les mesures prises par cet endroit tant décrié qu'est le Sénat, cette décision aurait terni à jamais la réputation de ces personnes et de ces entreprises.

Il faut se demander pourquoi ils ont choisi une personne en particulier, une entreprise, une famille de la ville de Mississauga, en Ontario. Ils ont choisi Don Matthews, qui était tout simplement patron d'une compagnie de construction, le groupe Matthews. Celui-ci était âgé de 66 ans et il était membre d'un parti politique. Rien dans ses antécédents, sa réputation ou ses actions en tant qu'être humain ayant travaillé toute sa vie et ayant réussi ne justifiait que cette personne soit choisie par un groupe pour devenir le bouc émissaire, pour devenir celui qui avait fait quelque chose qui ressemblait à un acte criminel. En fait, sa seule faute était d'être membre d'un parti politique et d'avoir choisi de servir ce parti dans des fonctions élevées. Don Matthews a bien servi son parti au début des années 70 à titre de président du parti sous Robert Stanfield. Il a ensuite choisi de ramasser des fonds pour le parti et de travailler fort pour favoriser le processus démocratique.

Honorables sénateurs, nous nous faisons du tort lorsque nous abusons de nos pouvoirs et que nous attaquons des partis politiques sans raison. C'est à cause de telles attaques que les Canadiens pensent maintenant que si vous aviez des liens avec le Parti libéral, vous êtes un mauvais choix pour une nomination au Sénat. Peu importe ce que vous avez fait dans votre vie personnelle, tout ce qui compte c'est que vous avez servi un parti politique. Dans le cas du sénateur Mahovlich, sa femme a servi un parti politique et cela est perçu comme une mauvaise chose.

La frénésie avec laquelle des accusations ont été portées était honteuse. Lorsque des personnes puissantes se servent de leurs pouvoirs pour détruire la réputation et la sécurité financière - qu'il a fallu toute une vie pour bâtir - de personnes et de leurs familles - la peine imposée devrait être sévère. Toutefois, ce sont en fait les contribuables qui ont payé le prix, compte tenu des pertes subies devant les tribunaux, des pertes d'emplois à l'aéroport en 1993, et des pertes de temps dans le développement de l'aéroport. Les innocents ont payé. Les journalistes qui ont gagné des prix parce qu'ils ont mis au grand jour cette soi-disant corruption n'ont pas retourné leurs prix. Stevie Cameron erre toujours, à l'affût de la nouvelle. Les politiciens qui ont perpétué cette situation continuent d'être élus.

Je veux mentionner un extrait de l'étude de M. Lerner, qui a été publiée dans le dernier numéro du International Industry Legal Journal et qui est intitulée: Annals of Air and Space Law. Dans son étude, M. Lerner, qui possède une maîtrise en droit, conclut qu'à la suite de l'annulation des accords conclus avec la Pearson Development Corporation, des poursuites judiciaires ont été intentées contre le gouvernement fédéral et se sont soldées récemment par un règlement en espèces de 45 millions de dollars plus 15 millions en frais d'intérêt et frais judiciaires.

Environ 750 personnes ont perdu leur emploi, et l'embauche prévue d'un maximum de 1 000 travailleurs durant les travaux de réaménagement ne s'est pas concrétisée. Entre temps, l'aéroport Pearson a continué de se détériorer durant quatre années et le gouvernement fédéral touchera 328 millions de dollars de moins de revenus sur une période de 20 ans à cause de l'annulation des accords concernant l'aéroport Pearson. Le gouvernement fédéral touchera 300 millions de dollars de moins en recettes sur une période de 20 ans à la suite du transfert de l'aéroport Pearson à la GTAA et, de plus, le gouvernement fédéral devra payer 60 millions de dollars pour le règlement à l'amiable accordé à la Pearson Development Corporation et un allégement de loyer de 185 millions dont bénéficiera la GTAA. La décision du gouvernement fédéral d'annuler les accords concernant l'aéroport Pearson et de transférer l'aéroport à la GTAA aura coûté directement aux contribuables canadiens 873 millions de dollars sur une période de 20 ans.

M. Lerner poursuit en affirmant que les accords concernant le réaménagement des aérogares 1 et 2, au moyen de capitaux du secteur privé, n'auraient pas dû être annulés. M. Nixon et le gouvernement fédéral n'ont pas expliqué pourquoi des partenariats entre le secteur privé et le secteur public ne pouvaient pas répondre aux objectifs d'intérêt public tout en profitant des avantages de l'efficacité et de la réceptivité du marché propres au secteur privé. Plus précisément, M. Nixon et le gouvernement fédéral n'ont pas démontré que le réinvestissement de 682 millions de dollars dans le réaménagement des aérogares 1 et 2, sans fardeau pour le trésor public, était contraire à l'intérêt public.

Honorables sénateurs, je voudrais déposer au Sénat le rapport et l'article de M. Lerner.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, permission est-elle accordée de déposer le rapport?

L'honorable John G. Bryden: Avant d'accepter, je voudrais savoir qui est cette personne.

Le sénateur Tkachuk: Le professeur Lerner a obtenu sa maîtrise en droit de l'Institut de droit aérien et spatial, de l'Université McGill, à Montréal, au Canada. Il pratique actuellement le droit au cabinet d'avocats Taylor McCafferty, à Winnipeg, au Canada.

Le sénateur Bryden: Est-il avocat spécialiste de l'aérospatiale dans un cabinet privé?

Le sénateur Tkachuk: C'est exact.

Le sénateur Bryden: Je ne m'oppose pas au dépôt de ce rapport, en autant que je puisse dire ce que j'en pense.

Le sénateur Di Nino: Absolument. Nous avons hâte de connaître votre opinion.

Le sénateur Tkachuk: Vous aurez l'occasion de répliquer.

Son Honneur le Président: Les sénateurs permettent-ils le dépôt de ce rapport?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Si personne d'autre ne veut prendre la parole, le débat sur cette interpellation est considéré comme terminé.

[Français

La sécurité des transports

Adoption du rapport final du comité des transports et des communications

Le Sénat passe à l'étude du neuvième rapport du comité sénatorial permanent des transports et des communications (étude de l'état de la sécurité des transports au Canada), déposé au Sénat le 10 juin 1998.

L'honorable Lise Bacon: Honorables sénateurs, je propose l'adoption de ce rapport.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

[Traduction

L'Office d'investissement du régime de pensions du Canada

Rapport du comité des banques et du commerce-adoption de la motion demandant une réponse du gouvernement

L'ordre du jour appelle:

Reprise de débat sur la motion ou l'honorable sénateur Tkachuk, appuyée par l'honorable sénateur Cohen,

Que, dans les 90 jours de l'adoption de la présente motion, le Leader du gouvernement communique au Sénat la réponse du gouvernement au onzième rapport du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, initulé «L'Office d'investissement du régime de pensions du Canada: partir du bon pied», déposé au Sénat le 31 mars 1998.-(L'honorable sénateur Carstairs).

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je suis disposée à appuyer la motion proposée par l'honorable sénateur Tkachuk. Toutefois, j'attire l'attention du Sénat sur le fait que nous pourrions ne pas siéger dans les 90 prochains jours. En fait, j'espère sincèrement que nous ne siégerons pas dans les 90 jours qui viennent. Par conséquent, je tiens à préciser que le dépôt du document auprès du greffier nous permettrait de respecter les conditions de la motion.

Son Honneur le Président: Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

 

L'Union interparlementaire

Réunion tenue à Windhoek, Namibie-Ajournement du débat

L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateurs, je veux faire rapport de la conférence de l'Union interparlementaire qui a eu lieu à Windhoek, en Namibie, le 5 avril 1998. Je tenterai d'être le plus bref possible, étant donné l'heure tardive, mais je tenais à vous livrer ce rapport sur cet événement très important. Notre collègue, le sénateur Taylor, a assisté à cette rencontre en tant que délégué, en compagnie de Mme Finestone, de Mme Catterall, de Mme Dalphond-Guiral, de Mme Folco, de M. Stoffer et de Mme Torsney, de l'autre endroit.

[Français]

La Namibie, vaste pays désertique peu peuplé, compte 1,8 million d'habitants. D'abord colonie allemande, puis sous le contrôle de l'Afrique du Sud à partir de 1915, elle n'a accédé à l'indépendance qu'en 1990, après une longue lutte et après des négociations avec Pretoria, les Nations Unies, l'Angola et Cuba. En 1988, les pourparlers et la lutte armée qui duraient depuis une génération ont débouché sur un accord qui prévoyait la tenue d'élections menant à l'indépendance, supervisées par les Nations Unies, en échange du retrait graduel des troupes cubaines stationnées en Angola. L'Organisation du peuple du Sud-Ouest africain (SWAPO), dirigée par Sam Nujoma, a remporté les élections en novembre 1989, et l'indépendance a été déclarée l'année suivante. Les premières élections après l'indépendance se sont déroulées en décembre 1994.

Selon les observateurs internationaux, elles ont été justes, équitables et révélatrices d'une culture démocratique bien ancrée. La SWAPO a obtenu une majorité de 72,7 p. 100 et le président Nujoma a été réélu avec 76,3 p. 100 des votes.

[Traduction]

Les principales relations du Canada avec la Namibie remontent aux négociations tenues entre 1977 et 1982 sur le plan de règlement des Nations Unies. Le Canada a participé activement à la mise en oeuvre de ce plan en 1989-1990, fournissant du personnel militaire et des casques bleus, des contrôleurs policiers, des superviseurs d'élections et des experts techniques. Une fois l'indépendance déclarée, notre mission d'observation est devenue notre premier et notre seul haut- commissariat jusqu'à ce que cette mission soit abandonnée en mai 1993 en raison de compressions budgétaires.

La Namibie est accréditée au Canada par l'intermédiaire de son haut commissariat à Washington, DC. L'honorable Walter McLean a été nommé consul honoraire pour la Namibie au Canada en octobre 1994 et un consulat namibien a été ouvert à Waterloo en Ontario. De son côté, le Canada est accrédité en Namibie par l'intermédiaire du haut commissariat du Canada à Pretoria.

Par le passé, le Canada a fourni de l'aide technique à la Namibie et l'organisation de cette conférence n'a pas fait exception. Deux employés du Parlement du Canada ayant une vaste expérience de l'organisation de conférences internationales ont été détachés au Parlement namibien pendant les deux mois qui ont précédé la tenue de la conférence. Leur contribution à la bonne marche de ces opérations a été reconnue par le président du Parlement namibien dans son discours d'ouverture.

On entend de nombreux commentaires sur l'importance des associations parlementaires et le travail effectué au cours des conférences internationales. J'aimerais souligner certaines initiatives spéciales de notre délégation.

Le groupe canadien a considéré cette conférence comme le deuxième pas vers la réalisation des objectifs de la conférence d'Ottawa sur les mines et comme une occasion d'avoir recours à la diplomatie parlementaire pour faire avancer la cause de l'interdiction des mines antipersonnel.

De même, nous avons eu recours à de nombreuses techniques afin de mettre ce problème en évidence au cours de la conférence. Les participants qui ont assisté à plusieurs de ces conférences ont souligné que les Canadiens avaient réussi à attirer l'attention de tous les délégués sur l'importance de signer et de ratifier la convention d'Ottawa sur les mines antipersonnel.

(2130)

Mme Susan Walker, nouvelle coordonatrice de la campagne internationale visant à interdire les mines antipersonnel et lauréate du Prix Nobel de la paix, a agi à titre de conseillère spéciale auprès de notre délégation et est devenue une ressource précieuse pour nous tous. Elle a non seulement aidé les participants canadiens à mener une campagne pour sensibiliser les délégations à l'état d'avancement du processus de ratification dans leur pays, mais elle a aussi pris la parole à plusieurs occasions, y compris à la réunion des femmes parlementaires. Elle a travaillé de longues heures pendant la conférence et elle a été, dans ce dossier, une personne-ressource extrêmement efficace pour tous les délégués.

Chacun de nos neufs délégués a choisi dix pays dont il devait pressentir les représentants personnellement. Plus de 250 exemplaires de la trousse d'information sur le processus de ratification préparée par le ministère des Affaires étrangères ont été distribués. Tous les délégués se sont montrés très diligents dans l'exécution des tâches qui leur étaient confiées. De plus, un comptoir où l'on distribuait de la documentation du Canada sur les mines antipersonnel a été installé juste à l'extérieur de la salle où se tenait la plénière principale. Notre conseillère, Susan Walker, et différents délégués se relayaient pour assurer une présence au comptoir. De nombreux participants à la conférence arrêtaient pour parler du processus de ratification.

Le groupe canadien a organisé deux dîners, un en anglais, l'autre en français, avec des représentants de pays africains, pour discuter de la façon dont le processus de ratification pourrait progresser. Les invités étaient tous attablés à de petites tables de quatre ou six places, et un parlementaire faisait office d'hôte à chaque table.

Les invités spéciaux à ces dîners comprenaient des représentants de pays qui ont aidé au processus visant l'interdiction des mines antipersonnel: l'Autriche, l'Australie, la Belgique, la Nouvelle-Zélande, la Norvège, l'Afrique du Sud et la Suisse. De plus, pendant les deux dîners, certains ont présenté des témoignages personnels sur la nature dévastatrice des mines antipersonnel, notamment sur le caractère changeant de ces mines et sur les décès et les mutilations qu'elles causent.

Ce fut un plaisir d'observer le sénateur Taylor s'entretenir en français avec des parlementaires de la France et, comme d'habitude, de le voir réussir à vendre ses idées dans n'importe quelle langue.

Le président de la Namibie, le président de la conférence et le président de l'Union interparlementaire, aussi bien que le représentant du secrétaire général des Nations Unies, ont parlé de l'importance du traité sur les mines terrestres au cours de la cérémonie inaugurale. Il était évident que le sujet des mines terrestres était très d'actualité.

Des contacts personnels ont été pris avec tous les parlementaires de sexe féminin et chacune des délégations a reçu un exemplaire de la trousse d'information. L'intérêt sur cette question au sein des parlementaires de sexe féminin a été tel que Susan Walker a été invitée à prendre la parole devant le groupe à la dernière séance.

Mme Finestone a parlé de l'importance de la ratification de la convention d'Ottawa et divers autres délégués, y compris les chefs des délégations britannique et norvégienne, ont également choisi les mines terrestres comme sujet.

Le premier jour, Susan Walker a montré aux délégués une prothèse appartenant à une jeune réfugiée thaïlandaise qui a été mutilée par une mine terrestre et a expliqué que cette prothèse avait été exposée à toutes les séances de négociation et à toutes les conférences internationales sur l'interdiction des mines terrestres. Tant le chef de la délégation norvégienne que Mme Finestone se sont servis de cette prothèse durant leurs discours. Ainsi, la prothèse qui a été placée sur la table de la délégation canadienne est devenue le symbole de la conférence.

Dans son discours à la conférence, le ministre des Affaires étrangères de la Namibie a parlé de l'importance des mines terrestres. De plus, le Président du Parlement de la Namibie, qui présidait la conférence, a mis un terme au débat général en prononçant un discours impromptu sur l'importance de l'interdiction des mines terrestres.

Des présentations ont été faites à la réunion des parlementaires de sexe féminin. Le groupe des douze et plus - les pays européens, auxquels se sont ajoutés l'Australie, le Canada, la Nouvelle-Zélande et les États-Unis -, l'Internationale libérale et le groupe Action mondiale des parlementaires étaient également représentés, de même que la conférence des conservateurs.

Le Canada a également été admis au sein du groupe Asie-Pacifique durant la conférence. Cela est très important parce que, jusqu'à ce moment-là, nous ne faisions pas partie de ce groupe. Les pays de la région Asie-Pacifique ont maintenant reconnu la place très importante qu'occupe le Canada au sein des pays côtiers du Pacifique.

Le conseil interparlementaire est l'organisme décisionnel de l'union. Lorsque la délégation canadienne a présenté un projet de motion sur les résultats des réunions tenues lors de la conférence d'Ottawa, la motion a été adoptée à l'unanimité. Les travaux préparatoires avaient été bien faits.

En conclusion, je dirai que j'ai passé beaucoup de temps à énumérer les différentes activités entreprises par le groupe canadien de l'Union interparlementaire en faveur de la cause du traité sur les mines terrestres dans le but d'illustrer ce que peuvent faire les associations parlementaires.

De plus, ces activités s'ajoutaient aux travaux normalement faits dans le cadre de ces conférences. Ces activités n'étaient que des à-côtés.

Notre délégation a également participé aux débats sur la prévention des conflits, sur le VIH et le sida, sur la nécessité de protéger nos océans et nos ressources halieutiques, ainsi que sur la dette extérieure. Sur ce dernier sujet, le sénateur Taylor a fait un excellent travail.

Je crois que les associations parlementaires peuvent jouer un rôle utile dans la promotion des dossiers importants pour la population canadienne. Le fléau des mines antipersonnel est un sujet sur lequel le Canada a assumé un rôle de premier plan. Le groupe canadien de l'Union interparlementaire est fier de ce qu'il a fait en faveur du traité d'interdiction des mines terrestres. Nous devrions être fiers de tout ce que les parlementaires canadiens ont fait à cette conférence très importante.

Des voix: Bravo!

(Sur la motion du sénateur Prud'homme, le débat est ajourné.)

 

L'environnement

Les rapports sur le développement durable-Interpellation-Suspension du débat

L'honorable Mira Spivak, conformément à l'avis donné le 11 juin 1998:

Qu'elle attirera l'attention du Sénat sur le «Rapport du commissaire à l'environnement et au développement durable à la Chambre des communes 1998» et le rapport du comité permanent de l'environnement et du développement durable intitulé: «L'intérêt public d'abord! L'application des lois canadiennes sur la pollution».

- Honorables sénateurs, je veux parler du rapport du commissaire à l'environnement et au développement durable ainsi que du troisième rapport du comité permanent de la Chambre des communes sur l'environnement et le développement durable, qui critiquent tous deux sévèrement le gouvernement actuel pour ses mesures de protection de l'environnement.

Le rapport du commissaire nous dit que, à bien des égards, le Canada ne respecte pas les engagements internationaux qu'il est tenu de respecter de bonne foi conformément au droit international. Le Canada manque à ses engagements aux termes de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques et de la Convention de 1992 sur la diversité biologique.

Le problème, comme nous le dit le commissaire, c'est que le gouvernement canadien n'a pas pris note de son rendement relativement à la majorité de ses engagements aux termes de plus de 230 accords internationaux exécutoires et autres instruments non exécutoires. Il n'existe donc aucun dossier complet sur ce qui a été fait au Canada pour la mise en oeuvre de ces accords.

Le rapport du comité de la Chambre des communes examine notre bilan en matière d'application des lois et règlements. Il examine de façon particulière l'application de la mesure législative la plus importante, la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, ainsi que le mandat d'Environnement Canada en ce qui concerne l'application des règlements pris en vertu de l'article 36 de la Loi sur les pêches. Le rapport signale qu'un manque de volonté politique et que des fonds insuffisants empêchent l'application adéquate de ces lois. Cela vient du comité de la Chambre des communes présidé par l'honorable Charles Caccia.

Le budget global d'Environnement Canada a été réduit de quelque 40 p. 100. Le Plan vert du gouvernement précédent est mort sans qu'aucun plan de rechange ne soit mis en place. Les vacances au sein du personnel d'application des lois n'ont pas été comblées depuis des années dans certaines régions. Par conséquent, comparativement aux 300 agents d'application des lois dont on aurait besoin selon une étude interne datant de 1993, nous n'avons maintenant que 60 agents d'application des lois dans les régions et 22 au bureau national, soit 27 p. 100 du personnel nécessaire pour faire le travail.

En quoi consiste le travail exactement? J'aimerais rappeler aux sénateurs comment le gouvernement précédent voyait les choses. Le 23 juin, cela fera cinq ans jour pour jour que l'ancien premier ministre Brian Mulroney a quitté son poste.

(2140)

En rétrospective, les Canadiens commencent à reconnaître que ce premier ministre avait une vision très claire de l'environnement et que cette vision trouvait des appuis dans un budget qui comportait des mesures énergiques. En juin 1988, dans un discours qu'il livrait à Toronto, à l'occasion d'une conférence mondiale sur les changements climatiques, à laquelle le sénateur Fairbairn et moi-même avons assisté, M. Mulroney résumait ainsi le défi environnemental:

 

Nous perturbons gravement le système planétaire. Nous éliminons les forêts, provoquons l'érosion des sols, créons de vastes déserts, éliminons de nombreuses espèces de plantes et d'animaux, dépouillons nos océans et empoisonnons nos cieux plus rapidement que nous ne l'avons jamais fait auparavant.
L'objectif, disait-il, était de protéger et de restaurer la terre et d'assurer un environnement acceptable, sain et généreux pour tous les peuples du monde. Voici une courte liste des mesures prises par son gouvernement.

En 1987, le Canada a été l'hôte d'une conférence internationale sur l'amincissement de la couche d'ozone, qui a abouti au protocole de Montréal, visant à prévenir la destruction de la couche d'ozone. En 1992, au sommet de Rio, la Convention sur la diversité biologique a été sauvée en dépit de l'opposition des États-Unis. Au chapitre du changement climatique, le Canada s'est engagé à stabiliser, en l'an 2000, les émissions de gaz à effet de serre au niveau de 1990. Le gouvernement avait également décidé de travailler directement avec d'autres pays, notamment les États-Unis, pour combattre les pluies acides, protéger le gibier d'eau d'Amérique du Nord et resserrer les contrôles sur le transport des déchets dangereux. Le gouvernement a appuyé la création d'un centre environnemental pour l'Europe de l'Est et a conclu des accords avec le Mexique, l'Allemagne, l'ancienne Union soviétique et la Chine. Le gouvernement a également créé une table ronde nationale, autour de laquelle il a réuni des dirigeants d'entreprise, des intellectuels et des environnementalistes, afin de modifier les attitudes et de démystifier le faux conflit entre les emplois et l'environnement.

Le Centre international de développement durable a été établi à Winnipeg. Cet organisme a pour fonction d'aider les décideurs, au Canada et ailleurs, à avoir accès à l'information la plus récente sur les objectifs environnementaux. La première loi d'évaluation environnementale a été adoptée au Canada et le Cabinet a pris un décret obligeant tous les ministères et organismes fédéraux à faire l'évaluation environnementale de tous les programmes et politiques fédéraux soumis au Cabinet. Je suis très heureuse de voir que ce commissaire à l'environnement poursuit cet objectif. On a créé le Plan vert, avec plus de 80 projets concrets.

Le rapport du comité de la Chambre des communes déposé la semaine dernière renfermait des observations frappantes sur l'une des initiatives reliées au Plan vert. Le plan d'action du fleuve Fraser était conçu pour protéger l'habitat si essentiel au saumon du Pacifique. Le 1er avril de cette année, alors que le projet dans le cadre du Plan vert prendra fin, le budget de fonctionnement pour l'inspection des usines et les enquêtes sur les pollueurs sera réduit, de façon incroyable, de 72 p. 100, passant de 313 000 $ à 87 000 $. Chose peu surprenante, le comité a jugé ces chiffres alarmants.

Le comité a également entendu qu'en ne donnant pas aux agents chargés d'appliquer la loi les budgets voulus, le Canada se prive de bons renseignements sur le transport de substances appauvrissant la couche d'ozone ou l'importation de déchets dangereux. Le gestionnaire de l'application des règlements pour la région de l'Ontario a présenté les choses de cette façon:

 

Nous ne pouvons continuer de traiter avec les autres organismes d'application de la loi, que ce soit aux États-Unis ou au Canada, qu'il s'agisse de la police provinciale, de la police fédérale, de la police d'État, des Douanes ou d'autres personnes, car nous sommes considérés, dans une large mesure, comme une risée, parce que nous n'avons pas les ressources ou les services de renseignement nécessaires.
Le commissaire à l'environnement et au développement durable a également formulé des observations sur l'incapacité d'atteindre les objectifs précédents. Sur l'ordre du Cabinet, en ce qui concerne l'évaluation environnementale des politiques et des programmes adoptés par le précédent gouvernement, le commissaire a reconfirmé ce qui avait été établi deux ans plus tôt par une étude publiée par l'Agence canadienne d'évaluation environnementale, à savoir que 60 p. 100 à peine des ministères et organismes avaient fait un effort en ce sens et que de ce nombre, à peine 45 p. 100 avaient des documents pour appuyer leurs évaluations. Rien n'a changé au cours des deux dernières années et selon le commissaire, dans certains ministères, les fonctionnaires responsables de la préparation des documents du Cabinet ignoraient la directive du Cabinet ou ne savaient pas comment elle était suivie.

En ce qui concerne l'engagement du Canada aux termes de la Convention de 1992 sur la diversité biologique, voici ce que le commissaire avait à dire:

Cinq ans plus tard, un plan de mise en oeuvre global, un outil essentiel pour coordonner les efforts, n'a pas encore été élaboré.

Comme nous le savons, le gouvernement n'a pas présenté une autre mesure législative pour protéger les espèces menacées d'extinction et ainsi, le Canada est encore sans un élément essentiel à un plan.

En ce qui concerne la promesse de réduire les gaz à effet de serre, le commissaire établit une liste des 19 choses qui doivent être faites.

Son Honneur le Président: Je suis désolé, mais je dois interrompre le sénateur, car le juge est maintenant arrivé et nous devons procéder à la sanction royale.

Je quitte le fauteuil pour attendre l'arrivée de Son Excellence.

(Le Sénat s'ajourne à loisir.)

 


[Français

Sanction royale

L'honorable Ian Binnie, juge puîné de la Cour suprême du Canada, en sa capacité de suppléant du Gouverneur général, prend place au pied du trône. La Chambre des communes, priée de se présenter, arrive avec son président. Son Honneur le Président dit:

J'ai l'honneur de vous faire savoir qu'il a plu à Son Excellence le Gouverneur général d'ordonner l'émission de lettres patentes sous ses seing et sceau constituant l'honorable Ian Corneil Binnie, juge puîné de la Cour suprême du Canada, son suppléant, et le chargeant d'exécuter au nom de Son Excellence, tous les actes nécessaires, au gré de Son Excellence.

Le greffier du Sénat donne lecture de la commission.

Il plaît à l'honorable suppléant de Son Excellence le Gouverneur général de donner la sanction royale aux projets de loi suivants:

Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu, les Règles concernant l'application de l'impôt sur le revenu, la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, le Régime de pensions du Canada, la Loi sur les allocations spéciales pour enfants, la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, la Loi sur l'exportation et l'importation de biens culturels, la Loi sur les douanes, le Tarif des douanes, la Loi sur l'assurance-emploi, la Loi sur la taxe d'accise, la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces, la Loi sur l'interprétation des conventions en matière d'impôts sur le revenu, la Loi sur la sécurité de la vieillesse, la Loi sur la Cour canadienne de l'impôt, la Loi sur la cession du droit au remboursement en matière d'impôt, la Loi sur l'assurance-chômage, la Loi sur les paiements de transition du grain de l'Ouest et certaines lois liées à la Loi de l'impôt sur le revenu, (Projet de loi C-28, Chapitre 19, 1998)

Loi sur le Bureau canadien d'enquête sur les accidents de transport et de la sécurité des transports et une autre loi en conséquence (Projet de loi S-2, Chapitre 20, 1998)

Loi portant exécution de certaines dispositions du budget de 1998 déposé au Parlement le 24 février 1998 (Projet de loi C-36, Chapitre 21, 1998)

Loi modifiant la Loi sur les grains du Canada et la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire et abrogeant la Loi sur les marchés du grain à terme (Projet de loi C-26, Chapitre 22, 1998)

Loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada, la Loi sur les allocations de retraites des parlementaires et la Loi sur les traitements (Projet de loi C-47, Chapitre 23, 1998)

Loi concernant les pouvoirs des Mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse en matière d'éducation (Projet de loi C-30, Chapitre 24, 1998)

Loi constituant certains offices en vue de la mise en place d'un système unifié de gestion des terres et des eaux de la vallée du Mackenzie et modifiant certaines lois en conséquence (Projet de loi C-6, Chapitre 25, 1998)

Loi modifiant le Code canadien du travail (partie I), la Loi sur les déclarations des personnes morales et des syndicats et d'autres lois en conséquence (Projet de loi C-19, Chapitre 26, 1998)

Loi visant à changer le nom de certaines circonscriptions électorales (Projet de loi C-410, Chapitre 27, 1998)

L'honorable Gilbert Parent, Président de la Chambre des communes, s'adresse ensuite à l'honorable suppléant du Gouverneur général en ces termes:

 

Qu'il plaise à Votre Honneur.
La Chambre des communes du Canada a voté certains crédits requis pour permettre au gouvernement de pourvoir aux dépenses du service public.

Au nom de la Chambre des communes, je présente à Votre Honneur les projets de loi suivants:

Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 1999 (Projet de loi C-45, Chapitre 28, 1998)

Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 1999 (Projet de loi C-46, Chapitre 29, 1998)

À ces projets de loi, je prie humblement Votre Honneur de donner la sanction royale.

Il plaît à l'honorable suppléant du Gouverneur général de donner la sanction royale aux projets de loi.

La Chambre des communes se retire.

Il plaît à l'honorable suppléant de Son Excellence le Gouverneur général de se retirer.

 


[Traduction]

(2210)

(Le Sénat reprend sa séance.)

 

L'environnement

Les rapports sur le développement durable-Interpellation

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur l'interpellation du sénateur Spivak attirant l'attention du Sénat sur le «Rapport du commissaire à l'environnement et au développement durable à la Chambre des communes 1998» et le rapport du comité permanent de l'environnement et du développement durable intitulé: «L'intérêt public d'abord! L'application des lois canadiennes sur la pollution»

L'honorable Mira Spivak: Honorables sénateurs, comme je le disais, le commissaire établit une liste de vérification en 19 points pour la réalisation de l'objectif de la réduction des gaz à effet de serre. En cinq ans, le gouvernement a adopté trois de ces mesures. Il n'a pas clairement défini le rôle de chef de file du gouvernement fédéral. Il n'a pas encore mis sur pied le programme de sensibilisation du public qu'il a promis. Il n'a pas analysé les coûts et les avantages de l'action et de l'inaction. Il n'a pas établi de train de mesures. Et la liste ne s'arrête pas là.

Il y a deux ans, le Sierra Club a livré ce message au premier ministre actuel:

 

Le premier ministre Chrétien doit indiquer clairement que son ministre de l'environnement jouit d'un appui inconditionnel sur les diverses questions en cause, des espèces menacées aux changements climatiques.
En juin 1998, dans le même discours prononcé à la Conférence mondiale, Brian Mulroney a affirmé:

 

En adoptant la philosophie du développement durable, nous ne mettons pas un frein au développement économique. Au contraire. Le développement durable est plus proche des sciences économiques pures que de la théologie environnementale.
Voilà en essence la question qu'on doit se poser: si le gouvernement actuel peut poursuivre la politique du gouvernement progressiste-conservateur sur le libre échange, la TPS et une foule d'autres politiques économiques que l'on considère après coup comme justes et raisonnables, pourquoi ne pas suivre une stratégie environnementale très sensée du point de vue économique qui peut aider à prévenir des pratiques de plus en plus destructrices.

Il reste encore suffisamment de temps pour le faire.

Son Honneur le Président: Si aucun autre sénateur ne désire intervenir, l'interpellation est réputée débattue.

 

La sécurité des transports

Constitution d'un comité spécial du sénat

L'honorable J. Michael Forrestall, conformément à l'avis du 11 juin 1998, propose:

Qu'un comité spécial du Sénat soit formé pour examiner, afin de présenter des recommandations, la question de la sécurité des transports au Canada et à mener une étude comparative des mécanismes techniques, juridiques et réglementaires, dans le but de vérifier que la sécurité des transports au Canada est d'une qualité telle qu'elle répondra aux besoins du Canada et des Canadiens au prochain siècle;

Que le comité soit composé de sept sénateurs, dont trois constituent un quorum;

Que le comité soit habilité à convoquer des personnes, à faire produire des documents et dossiers, à entendre des témoins, à faire rapport de temps à autre et à faire imprimer au jour le jour les documents et témoignages qu'il juge à propos;

Que les mémoires reçus et les témoignages entendus sur la question par le sous-comité de la sécurité des transports du comité permanent des transports et des communications durant la deuxième session de la trente-cinquième législature et de la première session de la trente-sixième législature soient déférés au comité;

Que le comité soit habilité à retenir les services de conseillers, techniciens, employés de bureau ou autres éléments nécessaires pour son étude;

Que le comité soit autorisé à permettre la diffusion de ses délibérations publiques par les médias d'information électroniques, de manière à déranger le moins possible les travaux;

Que le comité soit autorisé à voyager à l'intérieur et à l'extérieur du Canada;

Que le comité présente son rapport final au plus tardle 31 mars 1999; et

Que, sans égard aux pratiques habituelles, si le Sénat ne siège pas lorsque le rapport final du comité sera terminé, le rapport puisse être déposé auprès du Greffier du Sénat et qu'il soit considéré comme ayant été déposé devant cette Chambre.

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat, aux termes de l'article 30 du Règlement, je propose: Que la motion soit modifiée en ajoutant, après le deuxième paragraphe, ce qui suit:

Que, nonobstant l'alinéa 85(1)b) du Règlement, les membres du comité spécial soient les honorables sénateurs Adams, Bacon, Fitzpatrick, Forrestall, Johnson, Mercier et Roberge.

Son Honneur le Président: L'honorable sénateur Forrestall, avec l'appui de l'honorable sénateur Johnson, propose: Que...

Le sénateur Carstairs: Suffit!

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Forrestall: Mes collègues, je serai bref étant donné l'heure tardive.

Je remercie ceux qui ont collaboré pour permettre au sous-comité du comité sénatorial permanent des transports et des communications présidé par notre collègue, l'honorable sénateur Bacon, de pouvoir terminer son travail.

(2220)

Nous avons passé la dernière année et demie à recueillir des renseignements d'une importance vitale sur la sécurité des transports au Canada aujourd'hui et pour les années à venir afin de nous préparer au prochain millénaire.

Je remercie ceux qui se sont dits prêts à siéger au comité. Nous espérons pouvoir terminer rapidement notre travail. Il nous reste beaucoup à faire.

J'invite les sénateurs à une réunion à la pièce 256-S immédiatement après l'ajournement du Sénat aujourd'hui.

Son Honneur le Président: Si aucun autre sénateur ne désire prendre la parole, je vais mettre la motion aux voix.

L'honorable sénateur Forrestall, appuyé par l'honorable sénateur Johnson, propose...

Des voix: Suffit!

Son Honneur le Président: L'honorable sénateur Forrestall, appuyé par l'honorable sénateur Johnson, propose également en amendement...

Des voix: Suffit!

Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter l'amendement?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Vous plaît-il d'adopter la motion principale?

Des voix: D'accord.

 

Affaires sociales, sciences et technologie

Autorisation au comité d'étudier les dimensions de la cohésion sociale du Canada

L'honorable Lowell Murray, ayant donné avis le 15 juin 1998, propose:

Que le comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soit autorisé à faire une étude et à présenter un rapport sur les dimensions de la cohésion sociale au Canada dans le contexte de la mondialisation et d'autres éléments économiques et structurels qui influent sur les niveaux de confiance et de réciprocité dans la population canadienne.

Que le comité présente son rapport au plus tard le 30 juin 1999.

- Honorables sénateurs, selon moi, les forces de la mondialisation et des changements technologiques exercent des pressions énormes et une influence néfaste sur la cohésion sociale de ce pays. Ces pressions, auxquelles s'ajoutent le clivage linguistique, culturel et géographique que nous ne connaissons que trop bien depuis si longtemps, menacent gravement le bien-être des Canadiens à long terme.

Les honorables sénateurs ne sont pas sans savoir que, dans notre pays, pendant les années 90 et presque toutes les années 80, le secteur public et le secteur privé ont subi des bouleversements énormes. La politique monétaire a été réorientée à la fin des années 80 dans le but d'arrêter l'inflation pour le long terme. Une longue période d'austérité fédérale a été instaurée. L'Accord de libre-échange avec les États-Unis et l'ALENA ont été négociés. La privatisation, la déréglementation et de nombreuses autres politiques ont été mises en oeuvre afin d'améliorer la compétitivité du Canada et de son économie.

J'ai, à maintes reprises, défendu ces initiatives. Je suis tout aussi convaincu aujourd'hui de leur nécessité que je l'étais il y a dix ans.

Grâce à ces politiques, le budget est équilibré, le commerce est florissant; les bénéfices augmentent rapidement et, dans l'ensemble, la bourse est à la hausse. Superficiellement, l'économie semble être en parfaite santé, mais le défit que doivent maintenant relever les dirigeants est la répartition spectaculairement inégale des retombées de tous ces progrès économiques. Les deux mots qui apparaissent dans la motion qui sont le plus souvent associés à la cohésion sociale sont la confiance et la réciprocité. Les termes confiance et réciprocité font référence à nos obligations les uns envers les autres et aux obligations de l'État, à ce sens mutuel d'obligation.

Si, superficiellement, l'économie se porte bien, la plupart des gens ne voient guère leur niveau de vie s'améliorer. Le revenu des familles est demeuré stagnant. L'écart entre les revenus s'est creusé. La pauvreté dans ce pays a augmenté.

J'invite les honorables sénateurs à se demander combien de temps la cohésion sociale peut durer et si la confiance et la réciprocité peuvent être maintenues dans un climat d'inégalité qui va en s'accroissant.

Comme vous le savez tous, la tendance au Canada n'a jamais été à l'inégalité croissante, au contraire, mais c'est pourtant le cas aujourd'hui. Il est vrai qu'aujourd'hui, l'inégalité devient de plus en plus grande. Par conséquent, honorables sénateurs, il y a plusieurs dimensions à la question de la cohésion sociale. Je ne sais pas si un comité sénatorial permanent peut arriver à trouver des solutions, mais je pense que nous pouvons identifier certaines questions et les soumettre carrément au Parlement et aux Canadiens. J'aimerais en tous cas que nous essayions de le faire. Je vous recommande d'appuyer cette motion.

Des voix: Bravo!

Son Honneur le Président: Si aucun autre sénateur ne désire prendre la parole, je procéderai au vote.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

 

L'Association parlementaire du Commonwealth

Le dixième colloque annuel tenu à Charlottetown, Île-du-Prince-Édouard-Interpellation

Permission ayant été accordée de revenir en arrière:

L'honorable Lorna Milne, ayant donné préavis le 2 juin 1998:

Qu'elle attirera l'attention du Sénat sur la participation d'une délégation parlementaire au dixième colloque annuel de l'Association parlementaire du Commonwealth, tenu à Charlottetown, Île-du-Prince-Édouard.

- Honorables sénateurs, pour plus de brièveté, je demande en outre la permission de déposer mon rapport complet, dont je me contenterai de vous faire un bref résumé.

Son Honneur le Président: Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Milne: Je voudrais raconter brièvement mon voyage à Charlottetown où j'ai assisté au dixième colloque annuel de l'Association parlementaire du Commonwealth au nom du Parlement du Canada du 21 au 26 mai 1998. Lorsque notre avion s'est approché de Charlottetown, il est sorti des nuages juste à temps pour nous permettre de voir les falaises rouges de la côte sud-est de l'île et le rouge et le vert vifs des champs. C'était une vision extraordinaire que je n'oublierai pas de sitôt.

Bob Speller, le député de Haldimand-Norfolk-Brant, et moi étions les deux seuls représentants du Parlement fédéral canadien. Les autres Canadiens venaient de l'Alberta, du Nouveau-Brunswick, de l'Ontario, de la Saskatchewan, du Yukon et, bien sûr, de l'Île-du-Prince-Édouard. Il y avait de nombreux contingents du sous-continent indien et des Caraïbes. Des délégués venaient également du Royaume-Uni, de Malte, du Kenya, de l'Afrique du Sud, de l'Australie, de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, de l'île de Jersey et des îles Falkland. J'ai découvert avec intérêt que la Barbade était le seul pays représenté qui avait lui aussi un Sénat dont les membres sont nommés.

La deuxième séance a consisté à parler du système canadien de gouvernement fédéral et de notre Constitution. Bob Speller a fait un exposé à ce sujet et les délégués se sont particulièrement intéressés à ce qu'on appelle la «question québécoise».

Arthur Donahoe, ancien président de l'assemblée législative de la Nouvelle-Écosse, était chargé de l'exposé à la séance suivante. M. Donahoe est maintenant secrétaire général de l'Association parlementaire du Commonwealth. Il a fait un résumé magistral de l'histoire et du rôle actuel de l'association. Il a décrit l'association comme un organisme qui cherche des solutions plutôt qu'un organisme qui prend des décisions. Celle-ci englobe toutes les formes de gouvernement et compte actuellement 54 pays membres, soit le tiers des pays du monde et le quart de sa population. Au cours des cinq dernières années, 17 nouveaux pays se sont joints à l'Association parlementaire du Commonwealth et cinq ont réintégré celle-ci après en avoir été expulsés ou l'avoir quitté volontairement.

La séance plénière a été présidée et dirigée par le professeur Douglas Boylan, de l'Université de l'Île-du-Prince-Édouard. Le professeur Boylan nous a fait un exposé humoristique sur l'histoire du gouvernement de l'île et le développement de ses procédures parlementaires. L'une de ses anecdotes les plus intéressantes avait trait à la conférence de 1864, qui a mené à la Confédération et au surnom donné à l'Île-du-Prince-Édouard, qu'on appelle le berceau de la Confédération. À l'origine, la conférence de 1864 avait été planifiée pour envisager, une fois de plus, une union maritime.

Toutefois, à l'époque le processus parlementaire dans les provinces unies du Haut et du Bas Canada était dans une impasse totale. Par conséquent, les politiciens canadiens se firent inviter à la réunion de Charlottetown et firent porter la discussion sur la création d'une union plus large. La conférence se tint à Charlottetown:

 

[...] parce que si vous voulez que les gens de l'Île-du-Prince-Édouard participent, vous devez vous rendre là-bas, étant donné qu'eux ne vont pas quitter leur île. C'est l'été et le cirque s'en vient.
La séance suivante fut une discussion sur le rôle du Président au Parlement, qui semble varier énormément au sein du Commonwealth.

Une autre séance a porté sur le système de comités du Royaume-Uni, qui est extrêmement complexe. Plutôt que d'en discuter de façon plus approfondie, j'en ai déposé une description aujourd'hui.

Le dimanche, les délégués ont visité l'est et le nord de l'île. Près de la rivière Murray, dans le coin que connaît bien le sénateur Bonnell, nous avons rencontré des représentants de la Atlantic Mussel Growers Corporation. Six partenaires produisent des moules vraiment délicieuses. L'un d'eux produit 1,2 million de livres de moules par année. La société offre des emplois directs et indirects, notamment dans le secteur du camionnage, à environ 850 travailleurs locaux. Les partenaires sont fiers d'être les plus grands producteurs de moules élevées en suspension en Amérique du Nord. L'élevage des moules est un secteur en pleine expansion à l'Île-du-Prince-Édouard et ces moules bleues de l'île sont expédiées partout dans l'est du Canada et aux États-Unis.

Malheureusement, ce qui devait être le fait saillant de cette expédition a tourné au cauchemar. Je dois avouer, en toute franchise, que la visite à la maison aux pignons verts, la vieille maison de ferme dont s'est inspirée Lucy Maud Montgomery pour écrire son oeuvre, fut très décevante. Il y a à peine un an, un feu a détruit les pièces situées à l'avant de la vieille maison et il semble que Parcs Canada ait fait appel à des spécialistes en vue de la «restauration» de la vieille demeure. Lorsque vous entrez dans la maison, vous êtes pratiquement ébloui par le papier peint fleuri, style William Morris, qui décore le hall d'entrée et vous ne pouvez que remarquer le tapis mur à mur aux motifs ondulés. Ce qui semble être des rideaux de dentelle moderne et synthétique traînent par terre, à la mode typique des années 1990. Pouvez-vous imaginer une vieille Écossaise de l'Île-du-Prince-Édouard, un peu collet monté, évoluer dans un tel décor? Ses voisins auraient été horripilés. La reconstruction est un véritable désastre.

Heureusement, il semble que, outre les pièces à l'avant, le reste de la maison n'a pas été aussi endommagé. Donc, ces pièces respectent davantage le style de la région et de l'époque.

Une toute nouvelle grange à deux étapes a été construite sur la route originale menant à la maison. Pour se rendre à la maison, il faut passer par la grange. Je parie qu'il s'agit de la seule grange de ce style-là dans toute l'Île-du-Prince-Édouard. Je tiens de sources bien informées qu'il n'y avait pas de grange semblable sur la ferme originale.

Le pire, c'est la boutique de souvenirs. Elle est située dans un immeuble tout neuf qui bloque l'accès à la maison et qui regorge des plus affreuses babioles que j'avais jamais vues. Il n'y avait même pas un petit coin réservé aux oeuvres remarquables des artisans locaux. À mon avis, c'est une honte pour Parcs Canada et il aurait été tout aussi facile et beaucoup moins dispendieux de s'en tenir à l'ameublement original qu'on trouvait dans les maisons de ferme des localités rurales écossaises. J'ajouterais que notre nouveau sénateur, le sénateur Archie Johnstone et son aimable femme, Felicia, sont d'excellents guides, mais je vais encore me faire mal voir par le sénateur Bonnell, le bus ne s'est pas arrêté lorsque nous sommes passés à Murray River.

La présidente de la septième séance était Sue Edelman, une députée du Yukon. Il était question des simples députés et de leurs relations avec l'exécutif. Trinité et Tobago est un des pays dont nous avons parlé. Leur système de partis et leur constitution datent des années 1950. Le pays a actuellement deux Chambres: une de 39 sénateurs et une de 40 députés. Les députés ne servent qu'à temps partiel et n'ont donc pas de pension ou autre système d'aide. Apparemment, il n'y a pas de simples députés du côté de la majorité. Ils sont tous ministres ou secrétaires parlementaires. Normalement le parlement ne siège que le vendredi, mais à l'occasion il peut siéger le lundi et le mercredi.

La huitième séance portait sur les traitements et allocations des parlementaires. Comme le disait un président d'assemblée d'un des États de l'Inde, les fonctionnaires dans ce pays sont payés bien plus chers que les députés, ce qui ne nous est pas inconnu. Son secrétaire particulier gagne deux fois son salaire et il lui avait téléphoné la semaine précédente pour lui annoncer que les secrétaires avaient obtenu une autre augmentation. Le salaire peu élevé sert toutefois à camoufler tous les avantages indirects dont bénéficie le Président. De plus, en Inde, chaque député reçoit dix millions de roupies par année pour financer des projets dans le territoire qu'il représente-ces fonds devant, en théorie, être attribués selon des lignes directrices strictes.

Une autre séance a porté sur les conflits d'intérêts. Il y a de nombreuses façons de résoudre le problème; en République dominicaine, les policiers, les militaires ou les membres du clergé doivent démissionner de leurs fonctions pour être candidats, tandis qu'en Grande-Bretagne, certains députés semblent penser que le fait de déclarer un conflit d'intérêts suffit à excuser tout comportement ultérieur.

Le dernier jour que j'ai passé là-bas a aussi été consacré aux visites. Le matin, nous avons visité la ferme Elite Seed Potato Farm dans l'île Fox. Nous y avons appris qu'on n'accepte aucune pomme de terre de l'extérieur dans cette exploitation agricole pour éviter la contamination du sol. Toutes les pommes de terre de cette ferme sont produites à partir de boutures en condition d'asepsie. J'ai appris qu'une seule pomme de terre de semence pouvait produire beaucoup si on coupait les yeux et on continuait la propagation pendant un hiver. En fait, un seul plant pouvait produire suffisamment de semences pour toute l'île.

Nous avons traversé le pont de la Confédération - j'étais alors très proche de chez le sénateur Bryden -. C'est un ouvrage d'art très impressionnant. Nous avons traversé beaucoup de belles régions le long de la côte et jusque dans la région des montagnes de l'Île-du-Prince-Édouard, qui est formé de collines d'environ 150 pieds de hauteur. Pouvez-vous imaginer une grande colline de 150 pieds avec un télésiège à trois places? C'est très surprenant. Les collines environnantes étaient couvertes de l'herbe la plus verte que je n'avais jamais vue.

J'ai dû revenir à Ottawa le lendemain pour un vote et c'est avec beaucoup de tristesse que j'ai mis fin à une expérience magnifique dans un paysage merveilleux.

J'ai trouvé l'échange d'information sur les nombreux systèmes de gouvernement dans les pays du Commonwealth extrêmement intéressant et il est devenu très évident que l'information sur l'expérience canadienne aide beaucoup d'autres pays où la démocratie est peut-être toute nouvelle. C'était à coup sûr une réunion informative et j'aimerais vivre pareille expérience. J'ai très hâte de retourner dans cette belle région du Canada.

Des voix: Bravo!

Son Honneur le Président: Si aucun autre sénateur ne souhaite prendre la parole, cette interpellation sera réputée avoir été débattue. 

L'ajournement

Permission ayant été accordée de revenir aux avis de motion du gouvernement:

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)h) du Règlement, je propose:

Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, ce soit au mardi 22 septembre 1998, à 14 heures.

(La motion est adoptée.)

 

Les travaux du Sénat

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, avant de procéder avec la motion d'ajournement en tant que telle, j'ai remarqué que certains sénateurs ont froncé le sourcil quand j'ai interrompu le sénateur Spivak. Je vous renvoie aux paragraphes 135(8) et (9) du Règlement. La présidence n'a pas le choix.

L'honorable Jacques Hébert: Honorables sénateurs, je propose que le Sénat s'ajourne maintenant.

(Le Sénat s'ajourne au mardi 22 septembre 1998, à 14 heures.) 


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