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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 36e Législature
Volume 137, Numéro 133

Le mercredi 28 avril 1999
L'honorable Gildas L. Molgat, Président


LE SÉNAT

Le mercredi 28 avril 1999

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

Visiteurs de marque

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, j'aimerais vous signaler la présence à notre tribune de quelques visiteurs de marque. Nous avons parmi nous aujourd'hui le nouveau consul général à Winnipeg de l'Islande, qui est également l'envoyé spécial pour les affaires du millénaire, M. Svavar Gestsson. Il est accompagné de son épouse, Gudrun Thorbjarnadottir.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite à tous les deux la bienvenue au Sénat en tant qu'invités de l'honorable sénateur Johnson.

Des voix: Bravo!


AFFAIRES COURANTES

La Loi sur l'accès à l'information

Le comité des affaires juridiques et constitutionnelles-Dépôt des fiches de rendement concernant l'observation par divers ministères des délais de réponse

Au dépôt de documents:

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer des documents intitulés: «Fiche de rendement - Observation des délais prévus dans la Loi sur l'accès à l'information», préparés par le commissaire à l'information du Canada, conformément à l'entente convenue avec le Comité permanent des affaires juridiques et constitutionnelles et touchant les ministères suivants: Citoyenneté et Immigration; Affaires étrangères et Commerce international; Santé Canada; Défense nationale; Bureau du Conseil privé; et Revenu Canada.

la fonction gouvernementale AUTOCHTONE

présentation et impression en annexe du rapport du comité des peuples autochtones concernant le budget de l'Étude

L'honorable Charlie Watt, président du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, présente le rapport suivant:

Le mercredi 28 avril 1999

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones a l'honneur de présenter son

HUITIÈME RAPPORT

Votre comité, qui a été autorisé par le Sénat le mardi 9 décembre 1997, à examiner, pour rapport, les recommandations de la Commission royale sur les peuples autochtones relativement à la fonction gouvernementale autochtone, demande que des fonds lui soient approuvés pour 1999-2000.

Conformément à l'article 2:07 des Directives régissant le financement des comités du Sénat, le budget présenté au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration ainsi que le rapport s'y rapportant, sont annexés au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,
CHARLIE WATT

(Le texte de l'annexe figure à l'annexe "A", p. 1508 des Journaux du Sénat.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Watt, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

Agriculture et forêts

Avis de motion visant à autoriser le comité à renvoyer au sous-comité des documents déjà réunis sur l'étude de la forêt boréale

L'honorable Nicholas W. Taylor: Honorables sénateurs, je donne avis que le jeudi 29 avril 1999, je proposerai:

Que les documents reçus et les témoignages entendus à propos de l'exploitation de la forêt boréale durant la deuxième session de la trente-cinquième législature soient renvoyés au Sous-comité de la forêt boréale du Comité sénatorial de l'agriculture et des forêts.

La situation actuelle et l'avenir de la foresterie-Présentation et impression en annexe du rapport budgétaire du comité concernant le budget de l'Étude

Permission ayant été accordée de revenir à la présentation des rapports des comités permanents et spéciaux:

(1340)

L'honorable Leonard J. Gustafson, président du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts, présente le rapport suivant:

Le mercredi 28 avril 1999

Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts a l'honneur de présenter son

NEUVIÈME RAPPORT

Votre comité, qui a été autorisé par le Sénat le 18 novembre 1997 et le 24 novembre 1998 à examiner diverses questions touchant la situation actuelle et l'avenir de la foresterie au Canada, demande respectueusement l'approbation de fonds pour 1999-2000.

Conformément à l'article 2:07 des Directives régissant le financement des comités du Sénat, le budget présenté au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration ainsi que le rapport s'y rapportant, sont annexés au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,
LEONARD J. GUSTAFSON

(Le texte de l'annexe figure à l'annexe "B", p. 1514 des Journaux du Sénat.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Gustafson, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)


PÉRIODE DES QUESTIONS

Le patrimoine canadien

Le projet de loi sur les services publicitaires fournis par des éditeurs étrangers-L'article de journal-La possibilité d'amendement-La position du gouvernement

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, ma question est suscitée par un article publié aujourd'hui à la une du Globe and Mail sous le titre: «Plan pour éviter une guerre commerciale des périodiques». Selon cet article, des discussions tirent à leur fin à Washington entre des hauts fonctionnaires canadiens et américains du commerce. L'article poursuit:

Le plan vise à éviter une guerre commerciale à propos de la politique que le Canada compte adopter en ce qui a trait aux périodiques et affaiblirait probablement le projet de loi C-55 [...].

Le leader du gouvernement au Sénat peut-il confirmer ou infirmer que les discussions qui ont lieu à l'heure actuelle, à Washington, entre des hauts fonctionnaires canadiens et américains du commerce vont aboutir à un accord comme celui dont il est question dans l'article, à savoir un accord qui affaiblirait effectivement le projet de loi C-55?

Les conclusions de cet article sont-elles valables?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai aussi lu l'article auquel le sénateur Lynch-Staunton fait allusion. Il est vrai que des discussions là-dessus et sur une variété d'autres questions ont eu lieu entre des hauts fonctionnaires canadiens et des représentants des États-Unis. Je crois savoir que le Canada n'a pas proposé de solution de rechange au projet de loi C-55, mais a plutôt renforcé notre position voulant que la politique publique sous-jacente vise à faire que les périodiques destinés au marché canadien aient un contenu original.

Je crois savoir que des rencontres ont eu lieu, mais qu'on n'en a pas prévu d'autres.

Le sénateur Lynch-Staunton: Honorables sénateurs, si je comprends bien, le ministre ne peut pas infirmer ni confirmer ce que rapporte aujourd'hui le Globe and Mail.

Quoi qu'il en soit, le 18 mars, au cours de la deuxième lecture, comme on peut le lire à la page 2844 du hansard, le ministre a dit ceci en réponse à une question: «Je viens de dire que nous n'avons aucun amendement de prévu et que nous n'avons pas l'intention d'apporter des amendements.» En réponse à une autre question, il a dit ceci: «Je suis le parrain du projet de loi et, en ce qui me concerne, le projet de loi restera tel qu'il est.»

Le ministre peut-il nous confirmer que c'est toujours là sa position et la position du gouvernement?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, aujourd'hui, oui.

Le sénateur Lynch-Staunton: Aujourd'hui?

Le sénateur Graham: Oui. Les membres du comité et les sénateurs sont maîtres du Sénat. Les membres du comité sont maîtres du comité. Il se peut, comme cela s'est produit à d'autres occasions, que des sénateurs, tant de l'opposition que du côté ministériel, souhaitent présenter des amendements. Le gouvernement pourrait proposer des amendements après les discussions. Cependant, je ne suis au courant d'aucun amendement qui pourrait être présenté.

Entre-temps, les audiences se poursuivent et le comité accomplit de l'excellent travail.

Le sénateur Lynch-Staunton: Le comité s'acquitte fort bien de son travail. La plupart d'entre nous sont maintenant persuadés que ce projet de loi devrait être adopté sous sa forme actuelle. Malgré certaines questions au sujet de la Charte et de l'Organisation mondiale du commerce, nous croyons que le risque en vaut la chandelle, surtout du fait que cela nous est présenté comme une contestation de l'identité culturelle du Canada. De ce fait, je crois que nous devrions tous nous tenir ensemble. Lorsque la ministre Copps s'est présentée devant le comité, le 13 avril, elle a déclaré:

Je compte sur une adoption rapide de ce projet de loi, honorables sénateurs. C'est pourquoi nous siégeons ici ce soir. Je me suis adaptée plutôt rapidement à votre programme modifié, car j'adorerais que ce projet de loi soit adopté le plus rapidement possible.

Cela semble être la position officielle du gouvernement. Je suis persuadé qu'elle a l'appui du sénateur Graham. Ainsi, quelle utilité y a-t-il à poursuivre les audiences du comité alors que ce projet de loi pourrait être modifié à l'issue des discussions qui ont lieu à Washington? Pourquoi ne prenons-nous pas nous-mêmes la décision au sujet de notre propre mesure législative et ne demandons-nous pas à notre comité, comme nous en avons le droit, de passer à l'étude article par article cette semaine et de nous renvoyer le projet de loi la semaine prochaine pour que nous l'adoptions? Ce faisant, le Canada aura adopté une position ferme alors que, selon le Globe and Mail, une fois de plus, nous allons nous plier aux souhaits du gouvernement américain.

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, j'invite le chef de l'opposition à lire la liste des témoins prévus jusqu'au début de mai.

Le sénateur Lynch-Staunton: Oui, et il y en a d'autres. Cela ne fait aucun doute. La plupart n'ont rien à voir avec les audiences sur ce projet de loi.

Le sénateur Graham: Pourquoi le chef de l'opposition veut-il refuser à des Canadiens ou à des organisations l'occasion de faire valoir leurs points de vue au comité? Il me semble que ce serait conforme au processus démocratique que nous espérons respecter en tout temps au Parlement.

La Société de développement du Cap-Breton

La fermeture de mines-La proposition de modifications du régime de pension-L'effet sur l'admissibilité des employés

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, cette semaine, le leader du gouvernement au Sénat et son collègue, le ministre des Ressources naturelles, M. Goodale, ont rencontré les représentants des United Families of Cape Breton pour parler du sort qui attend les mineurs des mines de charbon et leurs familles après l'annonce de la décision gouvernementale de liquider la Société de développement du Cap-Breton.

Que répond le gouvernement à la proposition de modifications du régime de pension qu'il a offerte aux employés de cette société, modifications qui rendraient admissibles une plus forte proportion des employés mis à pied? Je crois savoir que quelque 340 des 1 700 employés auraient droit à une pension de retraite complète.

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le sénateur Murray a raison, j'ai rencontré avec le ministre Goodale les représentants des United Families of Cape Breton. Les réunions ont eu lieu lundi. Il y a en aura peut-être une autre aujourd'hui et une autre demain matin avec le même groupe, qui est tout à fait responsable.

J'ai déjà rencontré ce groupe il y a trois semaines, à Glace Bay, et je suis très au courant de leurs préoccupations. Le gouvernement n'a pas modifié sa position au sujet de l'ensemble de mesures en matière de ressources humaines, comme les retraites anticipées, les indemnités de fin d'emploi et la formation. Nous avons écouté le point de vue de ces représentants responsables et nous allons continuer de le faire. J'ignore si l'ensemble de mesures reste toujours inchangé.

Le sénateur Murray: Honorables sénateurs, je n'ai pas très bien entendu ou compris la dernière phrase. Le ministre a dit que l'ensemble de mesures reste tel quel. Dois-je comprendre que les propositions présentées notamment par les United Families of Cape Breton concernant un régime de pension amélioré sont à l'étude par le gouvernement?

(1350)

Le sénateur Graham: Je ne peux confirmer ni infirmer ces renseignements, honorables sénateurs. Il y a environ 1 700 personnes qui pourraient être considérées comme des employés de la Société de développement du Cap-Breton. Environ 1100 d'entre elles seraient touchées par la fermeture de la mine Phalen. De ce nombre, si la mine continue à être exploitée jusqu'en l'an 2000 comme nous l'espérons, près de 340 auraient droit à une retraite anticipée. D'autres recevraient une indemnité de cessation d'emploi et se verraient offrir un programme de recyclage. Les autres continueraient de travailler pour la Devco à la mine Prince jusqu'à ce qu'elle soit privatisée.

Le sénateur Murray: Honorables sénateurs, le régime offert par le gouvernement semble s'appliquer à court ou peut-être à moyen terme. J'espère que le gouvernement tiendra compte des propositions qui lui sont faites en vue d'améliorer le sort de ceux qui ne sont pas couverts par les régimes de pension et d'assurance-santé et autres mais qui vivent dans des régions où l'incidence du cancer est parmi les plus élevées au pays.

La fermeture de mines-La responsabilité concernant la dépollution-La position du gouvernement

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, le leader pourrait-il dire au Sénat comment le gouvernement entend s'acquitter de sa responsabilité en ce qui concerne les opérations de dépollution? Au Cap-Breton, il y a 100 mines abandonnées, c'est du moins le chiffre officiel. La société d'État en a hérité en même temps que les opérations minières plus récentes et les activités secondaires. Sur le plan environnemental, elles relèvent toutes du gouvernement canadien. Cette responsabilité se chiffre à plusieurs centaines de millions de dollars. Le travail prendra plusieurs années.

Le gouvernement envisage-t-il de confier ce travail à la Devco, ou à une filiale de la Devco, dont les employés, outre qu'ils sont très au courant de ces questions, ont besoin de ces emplois pour être plus tard admissibles à une pension de retraite?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le gouvernement et la société d'État Devco sont très au courant de leurs responsabilités en ce qui a trait à la dépollution de ces sites. Aucune décision définitive n'a encore été prise à cet égard.

Le sénateur Murray: Honorables sénateurs, j'en conclus que la possibilité que la Devco ou une filiale de la société d'État prennent directement en charge ces travaux existe toujours. C'est très encourageant.

Le revenu national

L'Agence des douanes et du revenu du Canada-L'emplacement de l'administration centrale-La position du gouvernement

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, la sanction royale sera donnée sous peu au projet de loi C-43, qui a été adopté hier, ici, en troisième lecture. Il s'agit du projet de loi portant création de l'Agence des douanes et du revenu du Canada. Le sénateur se rappelle que, à la Chambre des communes, le gouvernement a accepté un amendement ayant pour effet d'accorder au gouvernement le pouvoir discrétionnaire d'établir l'administration centrale de cette nouvelle agence n'importe où au Canada.

Le gouvernement a-t-il décidé de l'emplacement de l'administration centrale de l'agence? Dans la négative, quand pouvons-nous prévoir qu'une décision sera prise? Le ministre nous assurera-t-il que le Cap-Breton est dans la course?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, si je comprends bien, la décision n'a pas été prise. J'ai fait des recommandations en faveur du Cap-Breton. Je ne sais pas si l'honorable sénateur voudrait que son nom soit associé à l'immeuble abritant Revenu Canada s'il devait être situé dans cette région.

Je sais que d'autres parties du pays ont fait des démarches. Je prends la suggestion du sénateur au sérieux. Cela contribuerait substantiellement à améliorer la situation économique dans cette partie du pays.

Revenons un instant à la Devco. En présentant ses propositions, le gouvernement du Canada doit, comme mon collègue le sait, tenir compte des difficultés d'administrer une société d'État dans le cas des mines de charbon. Le gouvernement dont le sénateur Murray faisait partie en 1991 a dû radier une somme de l'ordre de 155 millions de dollars. En 1996, le gouvernement a avancé une autre somme de 69 millions de dollars qui était censée faire l'objet d'un remboursement. Par suite des difficultés que nous avons eues et de l'annonce faite le 27 janvier, le gouvernement a accepté de radier ces 69 millions de dollars. Ensuite, afin d'aider la mine Phalen à tenir jusqu'au 31 mars de cette année, le gouvernement a dû injecter une autre somme de 41 millions de dollars. Pour que la mine puisse tenir jusqu'à l'an 2000, il a fallu injecter encore 40 millions de dollars.

Le gouvernement a accepté de radier toutes ces sommes. En plus de cela, comme je l'ai dit il y a quelques instants, une somme de 111 millions de dollars était prévue, dans le cadre de l'ensemble de mesures de développement des ressources humaines, pour les retraites anticipées, les indemnités de cessation d'emploi et la formation. En plus de toutes ces sommes, le gouvernement du Canada a accepté d'injecter 68 millions de dollars pour le développement économique. Ce montant s'ajoute à ceux qui sont normalement injectés dans cette région par le truchement du développement des ressources humaines. La moyenne annuelle est d'environ 35 millions de dollars, soit 140 millions sur quatre ans. Ce montant est supérieur à la somme qui provient habituellement de la SECB et de l'APECA, soit en moyenne 20 millions de dollars par année, ou 80 millions en tout. Au total, l'aide dépasse le demi-milliard de dollars.

Le gouvernement est très conscient des difficultés que connaît cette région du pays. Nous écoutons attentivement le public. C'est pourquoi j'ai rencontré tout récemment, lundi dernier, les United Families of Cape Breton à Glace Bay et je dois les rencontrer de nouveau aujourd'hui et demain en matinée.

Je tiens à assurer au sénateur Murray, qui porte un intérêt spécial à cette région du pays et à l'industrie minière, que le gouvernement fait tout ce qu'il peut pour être équitable et écouter attentivement les doléances qui lui sont soumises.

La Défense Nationale

L'OTAN et le conflit en Yougoslavie-Les responsabilités du chef d'état-major de la Défense

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat.

À un moment où il importe que les Canadiens aient, en apparence et en réalité, un leadership solide pour tout ce qui concerne le conflit en Yougoslavie, il est tout aussi important que les militaires canadiens soient assurés d'un leadership clair et visible. J'ai fréquemment vu le sous-chef d'état-major de la Défense dans les médias, à la télévision et au cours de séances d'information, et cela risque de soulever un problème car je n'ai pas vu le chef d'état-major de la Défense, le général Baril, depuis assez longtemps déjà. Le général se porte-t-il bien?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le général est vivant et bien portant. En fait, je l'ai vu hier et il est en excellente santé.

Le sénateur Forrestall: Je suis heureux de l'entendre.

Le sénateur Graham: Il prend ses responsabilités très au sérieux. Vous savez sans doute que le sous-chef d'état-major de la Défense, qui était présent à notre séance d'information hier, a été désigné porte-parole des Forces armées canadiennes. C'est pourquoi vous n'avez pas souvent vu le général Baril, mais je peux donner l'assurance aux honorables sénateurs qu'il est aux commandes et bien portant.

(1400)

Le sénateur Forrestall: Les nombreuses personnes qui s'interrogent là-dessus depuis quatre ou cinq jours seront heureuses d'entendre cela.

La recherche et le sauvetage-Les risques du largage de carburant des hélicoptères Labrador et Sea King

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, sans traiter nécessairement de la situation au Kosovo, mais plutôt de l'équipement des Forces canadiennes, nombreux sont ceux qui continuent de laisser entendre que la procédure suivie pour larguer le carburant des hélicoptères Labrador 305 a probablement contribué aux événements tragiques qui se sont produits.

Le ministre pourrait-il nous dire, soit après avoir consulté ses notes de synthèse ou des collègues, si des documents de la Défense ou des rapports d'enquête indiquent que c'est une procédure dangereuse qu'il serait peut-être bon de revoir? Dans ce cas, pourrait-il nous dire si un ordre à cet effet a circulé auprès des pilotes de Labrador et de Sea King?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, les risques sont inhérents à l'aviation militaire, même quand il s'agit des aéronefs les plus récents et les plus perfectionnés. Les Forces canadiennes prennent au sérieux leur responsabilité qui consiste à rechercher constamment des façons de réduire les risques. Les procédures strictes qui sont en place permettent à notre personnel de sécurité aérienne de gérer les risques, en restant toujours vigilant et en évaluant constamment la situation. Ce genre d'évaluation et de vigilance s'effectue continuellement.

En ce qui concerne les circonstances tragiques de l'écrasement au Québec en octobre, je ne suis pas au courant que l'on ait pu en attribuer la cause à la procédure de largage de carburant. Si je peux obtenir des renseignements complémentaires sur cette question, je serai très heureux de vous les communiquer.

L'OTAN et le conflit en Yougoslavie-Le déploiement de troupes terrestres pour le maintien de la paix-Les autorités responsables

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, compte tenu du fait que nous avons envoyé en Macédoine 800 de nos militaires aux fins du maintien de la paix et que le ministre Axworthy est en route pour la Russie, s'il n'y est pas déjà rendu, le gouvernement est-il d'avis que ces militaires ne devront être dépêchés que sous l'égide de l'OTAN?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, comme il a été indiqué hier, quelque 800 militaires seront envoyés pour des missions de maintien de la paix qui sont effectuées, pour l'instant, sous l'égide de l'OTAN.

Le sénateur Andreychuk: Honorables sénateurs, dois-je déduire de cette réponse que le gouvernement n'envisage pas la possibilité qu'une mission de maintien de la paix puisse être dirigée par l'ONU ou, peut-être, par une coalition de membres de l'OTAN et d'autres pays?

Le sénateur Graham: Ce serait réaliste, et je ne voudrais pas écarter cette possibilité, honorables sénateurs. Je suppose que je m'aventure ici en territoire dangereux. La meilleure solution serait évidemment une mission parrainée par les Nations Unies, mais je suis certain que le Canada et ses alliés étudieraient la possibilité d'une mission dirigée par l'OTAN et par d'autres alliés.

Il serait important que l'OTAN reste aux commandes pour s'assurer que tous les Kosovars puissent rentrer chez eux en toute sécurité et non pas seulement les membres de l'UCK. C'est peut-être une distinction difficile à établir.

Il y a toutefois des dangers inhérents à tous les scénarios, que l'on envisage une mission sous la direction des Nations Unies, sous l'égide de l'OTAN seule, ou encore de l'OTAN et de certains de ses alliés. Voilà pourquoi ces questions sont étudiées quotidiennement. Il est à souhaiter que les efforts déployés par le premier ministre Chrétien et par d'autres, y compris la très importante mission que le ministre des Affaires étrangères, M. Axworthy, entreprendra en Russie plus tard cette semaine, permettront de trouver une solution diplomatique à ce terrible problème.

Le sénateur Andreychuk: Honorables sénateurs, j'espère que les articles de journaux, selon lesquels le ministre Axworthy ne négociera avec les Russes que des opérations de maintien de la paix dirigées exclusivement ou du moins essentiellement par l'OTAN, sont donc erronés.

Le sénateur Graham: Honnêtement, je n'en sais rien. Si j'avais été sur les lieux, j'imagine que je pourrais vous en dire plus long. Je ne veux pas anticiper sur les négociations ou sur la nature des négociations entre le ministre Axworthy, son homologue, le premier ministre actuel ou l'ex-premier ministre de la Russie.

L'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord

Le conflit en Yougoslavie-Le déploiement de troupes terrestres-La tenue possible d'un vote au Parlement-La position du gouvernement

L'honorable Gerry St. Germain: À ce sujet, honorables sénateurs, est-il vrai que le premier ministre a déclaré qu'il ne laisserait pas le déploiement de troupes terrestres sur ce que certains appellent déjà le théâtre des opérations faire l'objet d'un vote?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Je crois comprendre que le premier ministre s'est engagé à saisir de nouveau le Parlement de cette question si jamais nos forces armées sont déployées à des fins autres que le maintien de la paix.

Le sénateur St. Germain: A-t-il déclaré qu'il n'y aurait pas de vote? Le ministre a précisé que la décision relevait de l'exécutif. Je respecte cela, mais étant donné l'importance de la question, il faudrait tenir un débat national.

En Colombie-Britannique, la province que je représente, la décision du gouvernement n'est même pas appuyée par un vote majoritaire. Comme 38 p. 100 des Canadiens ont appuyé le gouvernement aux dernières élections, je pense qu'il serait indispensable qu'il y ait un vote sur l'envoi de nos hommes et de nos femmes sur le théâtre des opérations.

Je suis sûr que le gouvernement aura l'appui de la Chambre des communes en entier, comme vous avez le nôtre, mais il faut que la décision soit examinée de la manière traditionnelle. Je vous demande cela, honorable sénateur, dans un esprit de coopération, et non de confrontation.

Le sénateur Graham: D'après ce que j'ai compris, le premier ministre ne s'est pas engagé à ce qu'il y ait un vote. Il a dit que des décisions de l'exécutif ont été prises dans le passé. Il y a des précédents. Il s'est toutefois engagé à soumettre la question au Parlement si l'on décide que ces forces doivent être déployées à des fins autres que le maintien de la paix.

J'ai vérifié dans le hansard les votes qui ont été pris à la Chambre des communes, pour pouvoir répondre à la question du sénateur St. Germain. Entre 1950 et 1996, on a pris 22 décisions ayant trait à l'envoi de personnel militaire canadien à l'étranger. De ces 22 décisions, 17 ont fait l'objet d'une proposition en ce sens au Parlement. De ces 17 propositions, cinq ont donné lieu à un vote par appel nominal et trois à des motions adoptées sans qu'elles aient été mises aux voix. Cinq décisions ont été prises après le déploiement. Dans trois de ces cas, il s'agissait de la guerre du Golfe, soit lors de l'envoi de troupes en Iran, en Iraq et en Somalie. Trois autres décisions ont été prises en vue d'un déploiement.

Je voudrais informer les honorables sénateurs d'une dernière nouvelle. On m'a appris, juste au moment où j'entrais à la Chambre, que le vice-premier ministre de Yougoslavie, M. Vuk Draskovic, a été démis de ses fonctions.

[Français]

(1410)

Les relations Canada-États-Unis

La perte de l'exemption spéciale prévue dans le Règlement sur le commerce international des armes-La possibilité d'un différend commercial-Les effets sur la coopération militaire

L'honorable Pierre Claude Nolin: Honorables sénateurs, le Canada et les États-Unis partagent le même continent. Nous avons établi une relation unique pour développer les activités économiques qui ont permis d'établir les bases industrielles et technologiques de notre système de défense mutuel.

Cette relation s'est développée au cours de la Deuxième Guerre mondiale et s'est renforcée en 1958 avec la création du système de défense aérienne et spatiale d'Amérique du Nord par le biais de la signature de l'Accord NORAD.

En plus de collaborer avec les Américains au système de défense nord-américain et de l'OTAN, nos deux pays collaborent afin de répondre à toute menace qui pourrait mettre en péril la sécurité nationale et territoriale de nos deux pays.

Les États-Unis et le Canada ont entamé, à la fin du mois de février, des négociations pour renouveler l'Accord NORAD, qui expirera en l'an 2001. Comme ce fut le cas dans les négociations sur la réglementation américaine pour le commerce des armements, le Canada entrevoyait des négociations difficiles avec les Américains. Ces derniers veulent inclure, dans le nouvel accord de déploiement, un nouveau système aérospatial de défense contre les armes de destruction massive dont les coûts de construction s'élèveraient à plus de 10 milliards de dollars.

Le Canada, bien qu'il soit prêt à fournir plus de 600 millions de dollars pour la construction de ce système, a quand même fait part de son inquiétude aux Américains, affirmant, d'une part, que cela pourrait aller à l'encontre du traité entré en vigueur en 1972, qui limite l'utilisation du système de défense contre les missiles balistiques intercontinentaux. D'autre part, ce système pourrait provoquer une nouvelle course aux armements avec la Chine et la Russie.

Ma question s'adresse au leader du gouvernement. Au cours des huit derniers mois, le Canada n'a pas été en mesure de modifier la position américaine, qui veut en partie mettre fin au statut particulier du Canada contenu dans cette réglementation américaine sur le commerce des armes. Cela affectera la coopération entre nos deux pays quant au développement de technologies militaires et aérospatiales.

Le leader du gouvernement peut-il nous informer de l'état des discussions avec les Américains au sujet de l'Accord de NORAD?

[Traduction]

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je sais que des négociations sont en cours. Je sais également que les Américains aimeraient beaucoup que le Canada participe au système de défense aérospatiale, qui a été décrit avec force détails par le sénateur Nolin. À ma connaissance, il n'y a pas eu d'entente. Je crois même pouvoir l'affirmer. Cependant, je ne m'avancerais pas jusqu'à prétendre que nos rapports commerciaux ou autres se sont détériorés parce que nous avons refusé de participer à un système de défense aussi perfectionné. Il y a d'autres moyens nous permettant d'entretenir, voire d'améliorer, nos rapports avec nos voisins.

[Français]

Le sénateur Nolin: Les Américains pourraient aller de l'avant unilatéralement avec leur projet de bouclier spatial, comme ils l'ont fait dans le dossier du statut unique du Canada dans la réglementation sur le commerce des armes. Si le Canada ne met pas tout en 9uvre pour convaincre les Américains du bien-fondé de notre position en ce qui a trait au renouvellement de l'Accord de NORAD, le ministre est-il d'accord pour affirmer que la coopération militaire, vieille de 40 ans, entre nos deux pays ne deviendra pas plus difficile qu'elle ne l'est déjà?

[Traduction]

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je ne prévois aucune difficulté découlant d'un désaccord. Je crois qu'il y a constamment des discussions et des points de divergence, que ce soit dans le domaine commercial ou dans les questions de défense. Il y a des échanges d'idées en permanence et cela est particulièrement vrai dans le cas des questions de défense avec nos alliés de l'OTAN. Il y a notamment des échanges de visites. Le sénateur se souviendra peut-être des gros contingents alliés qui ont participé aux exercices très réussis à Terre-Neuve l'an dernier. En plus du terrain, qui a été si bien utilisé, nos alliés ont bénéficié de l'hospitalité des Terre-Neuviens.

Mais sérieusement, je ne crois pas que la question crée de difficultés. Si vous habitez sur la côte Est et que vous passez par Halifax, vous pouvez constater les nombreuses visites faites non seulement par nos alliés de l'OTAN, mais aussi par les membres de la marine américaine.

Le sénateur Nolin: Honorables sénateurs, les États-Unis ont pris position. Même si nous avons 120 jours pour tenter de régler le problème concernant le commerce des armes entre nos deux pays, la question est très importante. NORAD est un accord conclu entre deux pays souverains. Nous sommes partie à cette entente depuis 40 ans et il est temps de la reconduire. Si, après 120 jours, nous sommes incapables de répondre aux préoccupations commerciales des Américains, qu'adviendra-t-il du NORAD? Les entreprises canadiennes ne pourront plus vendre d'armes aux Américains. Est-ce ce que nous voulons?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je suis sans doute légèrement plus optimiste que le sénateur Nolin. Il manifeste une préoccupation légitime, et je suis heureux qu'il l'ait soulevée. Comme toujours, je porterai ses observations et ses préoccupations à l'attention de mes collègues.

Le sénateur Lynch-Staunton: Il veut une réponse.

Le sénateur Graham: Si j'avais une réponse, je la donnerais, sénateur Lynch-Staunton.

Le sénateur Lynch-Staunton: Dites-lui que vous ne connaissez pas la réponse.

Le sénateur Graham: Je n'ai pas la réponse et je crois que c'est évident.

Le sénateur Lynch-Staunton: Exactement.

Le sénateur Graham: Si vous souhaitez poser une question, il pourra y avoir une question supplémentaire lorsque j'en aurai terminé avec le sénateur Nolin.

Comme je l'ai dit, il y a des négociations continues. Dans certains cas, on note une honnête divergence d'opinion. On peut espérer que toute divergence sera aplanie. Nous reconnaissons tous l'importance du NORAD et des accords qui s'y rapportent.

Le sénateur Nolin: Comme le ministre le sait, l'industrie aérospatiale est très importante.

Son Honneur le Président: Ce sera là la dernière question, sénateur Nolin.

Le sénateur Nolin: Ce sera ma dernière question.

Nous parlons non seulement de canons et de véhicules blindés, mais aussi de l'industrie aérospatiale, qui est une industrie importante à Montréal. Selon nous, le gouvernement fédéral ne prend pas au sérieux les préoccupations des Américains et, comme le sénateur Bolduc l'a dit hier, nous leur faisons des crocs-en-jambe. Finalement, les Américains ont décidé de riposter. Maintenant, nous réagissons et tout ce que nous obtenons, c'est un répit de 120 jours. Nous sommes très préoccupés. J'espère que le ministre l'est également.

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je suis très préoccupé. L'honorable sénateur peut avoir la certitude que les ministres, qu'il s'agisse du ministre du Commerce international, du ministre de l'Industrie, du ministre de la Défense nationale ou encore du premier ministre, sont préoccupés au plus haut point par cette question.

De fait, il y a à peine quelques semaines, moi-même et le ministre Manley avons pris la parole à l'occasion d'une activité dans la région de Montréal. Le ministre a parlé de l'industrie aérospatiale, qui est très importante dans cette partie du Canada. Elle revêt de l'importance pour tout le pays. Je suis convaincu que les négociations en cours connaîtront un aboutissement heureux.


ORDRE DU JOUR

Projet de loi sur l'extradition

Troisième lecture-Motions d'amendement-Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Bryden, appuyée par l'honorable sénateur Pearson, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-40, Loi concernant l'extradition, modifiant la Loi sur la preuve du Canada, le Code criminel, la Loi sur l'immigration et la Loi sur l'entraide juridique en matière criminelle, et modifiant ou abrogeant d'autres lois en conséquence;

Et sur les motions d'amendement de l'honorable sénateur Grafstein, appuyées par l'honorable sénateur Joyal, c.p., que le projet de loi ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit modifié:

1. à l'article 44:

a) par substitution, à la ligne 30, à la page 17, de ce qui suit:

«b) soit les actes à l'origine de la demande d'extradition sont sanctionnés par la peine capitale en vertu du droit applicable par le partenaire;

c) soit la demande d'extradition est présen-»;

b) par substitution, aux lignes 1 à 5, à la page 18, de ce qui suit:

«(2) Malgré l'alinéa (1)b), le ministre peut prendre un arrêté de remise lorsque le partenaire qui demande l'extradition lui donne l'assurance que la peine capitale ne sera pas imposée ou, si elle est imposée, ne sera pas exécutée, et qu'il est satisfait de l'assurance qu'on lui a donnée.».

2. à l'article 2 et nouvelle partie 3:

a) par substitution, au terme «accord», de «accord général d'extradition»;

b) par substitution, à l'expression «accord spécifique», de «accord spécifique d'extradition»

c) à l'article 2:

(i) à la page 2, par adjonction, après la ligne 8, de ce qui suit:

««extradition» Livraison d'une personne à un État aux termes d'un accord général d'extradition ou d'un accord spécifique d'extradition.»,

(ii) à la page 1, par suppression des lignes 7 à 10;

(iii) à la page 2, par substitution, à la ligne 13, de ce qui suit:

««partenaire» État qui est soit partie»;

(iv) à la page 1, par adjonction, après la ligne 10, de ce qui suit:

«accord général d'extradition» Accord en vigueur auquel le Canada est partie, qui porte en tout ou en partie sur l'extradition, à l'exception de tout accord spécifique d'extradition.

«accord général de remise» Accord en vigueur auquel le Canada est partie, qui porte en tout ou en partie sur la remise à un tribunal international, à l'exception de tout accord spécifique d'extradition.»,

(v) à la page 1, par substitution, aux lignes 11 et 12, de ce qui suit:

«accord spécifique d'extradition» Accord visé à l'article 10 qui est en vigueur.

«accord spécifique de remise» Accord visé à l'article 10, tel qu'il est modifié par l'article 77, qui est en vigueur.»,

(vi) à la page 2, par substitution, aux lignes 7 et 8, de «b) un territoire.»; à la page 2, par adjonction, après la ligne 16, de ««partenaire judiciaire» Tribunal international dont le nom figure à l'annexe.»; et à la page 2, par adjonction, après la ligne 8, de ««remise à un tribunal international» Le fait de livrer une personne à un tribunal international dont le nom figure à l'annexe.»;

d) à la page 32, par adjonction, après la ligne 4, de ce qui suit:

«PARTIE 3
REMISE À UN TRIBUNAL INTERNATIONAL

77. Les articles 4 à 43, 49 à 58 et 60 à 76 s'appliquent à la présente partie, à l'exception de l'alinéa 12a), du paragraphe 15(2), de l'alinéa 15(3)c), des paragraphes 29(5), 40(3), 40(4) et de l'alinéa 54b):

a) comme si le terme «extradition» se lisait «remise à un tribunal international»;

b) comme si l'expression «accord général d'extradition» se lisait «accord général de remise»;

c) comme si l'expression «partenaire» se lisait «partenaire judiciaire»;

d) comme si l'expression «accord spécifique d'extradition» se lisait «accord spécifique de remise»;

e) comme si l'expression «État ou entité» se lisait «tribunal international»;

f) avec le modifications prévues à l'article 78 à 82;

g) avec les autres modifications exigées par les circonstances.

78. Pour l'application de la présente partie, l'article 9 est réputé se lire comme suit:

«9. (1) Les tribunaux internationaux dont les noms apparaissent à l'annexe sont désignés partenaires judiciaires.

(2) Le ministre des Affaires étrangères peut par arrêté, avec l'accord du ministre, radier tout nom de l'annexe ou y ajouter d'autres noms de tribunaux internationaux.»

79. Pour l'application de la présente partie, le paragraphe 15(1) est réputé se lire comme suit:

«15. (1) Le ministre peut, après réception de la demande de remise à un tribunal international, prendre un arrêté introductif d'instance autorisant le procureur général à demander au tribunal, au nom du partenaire judiciaire, la délivrance de l'ordonnance d'incarcération prévue à l'article 29.»

80. Pour l'application de la présente partie, les paragraphes 29(1) et (2) sont réputés se lire comme suit:

«29. (1) Le juge ordonne dans les cas suivants l'incarcération de l'intéressé jusqu'à sa remise:

a) si la personne est recherchée pour subir son procès et le juge est convaincu que la personne qui comparaît est celle qui est recherchée par le partenaire judiciaire;

b) si la personne est recherchée pour se faire infliger une peine ou pour la purger et le juge est convaincu qu'elle est celle mentionnée dans l'arrêté.

(2) L'ordonnance d'incarcération indique le nom de l'intéressé, le lieu où il sera détenu et le nom du partenaire judiciaire.»

«a) soit accueillir l'appel, au motif, selon le cas:»

81. Pour l'application de la présente partie, la partie de l'alinéa 53a) qui précède le sous-alinéa (i) est réputée se lire comme suit:

82. Pour l'application de la présente partie, l'alinéa 58b) est réputé se lire comme suit:

«b) soit la désignation de l'infraction à l'origine de la demande de remise;»

e) par le changement de la désignation numérique de la partie 3 à celle de partie V et des articles 77 à 130 à celle d'articles 83 à 136;

f) par le changement de tous les renvois qui en découlent.»

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, j'invoque le Règlement. Mon rappel au Règlement concerne le fond et la clarté des motions dont nous sommes saisis et ce sur quoi on nous demande de voter exactement.

En relisant les débats ce matin, j'ai lu attentivement et avec intérêt les questions que le sénateur Nolin m'a posées. Par conséquent, honorables sénateurs, mon rappel au Règlement fait suite aux interventions faites par le sénateur Nolin hier durant ce débat sur le projet de loi C-40 et sur les amendements proposés par le sénateur Grafstein.

(1420)

À mon avis, les questions du sénateur Nolin sont importantes, tout comme l'est son opinion. Après tout, cette étape du débat est fondée sur l'avis des membres du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Les recommandations et le rapport du comité servent de guides au Sénat dans son ensemble.

Hier, dans mes observations, j'ai dit:

De nombreux pays membres des Nations Unies souhaitent que la tradition juridique anglo-saxonne, la tradition de common law du Canada, soit affaiblie. C'est ce que fait le projet de loi C-40, notamment les articles 31 à 37, qui modifient les règles de la preuve, en admettant le ouï-dire comme preuve et en permettant l'utilisation de documents non accompagnés d'un serment.

C'est ce que j'ai dit hier. Dans une question qu'il m'a posée, le sénateur Nolin m'a demandé, et je cite:

Madame le sénateur a ajouté que, si nous adoptons le projet de loi, nous autoriserons et sanctionneront le ouï-dire, ce qui n'est pas permis au Canada. Pourrait-elle nous donner plus de précisions à ce sujet?

J'ai répondu à la question en répétant mes observations précédentes. Le sénateur Nolin a répondu:

Madame le sénateur doit être précise. Elle veut que nous permettions des preuves fondées sur le ouï-dire. Je ne puis souscrire à ce point de vue.

Le sénateur Nolin a dit qu'il n'est pas en faveur du recours au ouï-dire. Il a dit qu'il n'appuierait pas le projet de loi s'il autorisait et sanctionnait le ouï-dire, qui n'est pas actuellement permis au Canada.

Honorables sénateurs, mon recours au Règlement est lié à cette information contraire dont le Sénat est maintenant saisi et au fait que les sénateurs ont besoin d'éclaircissements quant au libellé réel du projet de loi C-40, sur lequel on nous demande de nous prononcer.

Ce que j'ai dit est une répétition des arguments qui ont déjà été exprimés en faveur du projet de loi C-40. J'ai utilisé presque les mêmes mots que la ministre de la Justice, Anne McLellan, a utilisés quand elle a comparu devant le Comité permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, dont je ne suis pas membre, et que le parrain du projet de loi au Sénat, madame le sénateur Fraser, a utilisés quand elle s'est adressée au Sénat. J'ai répété ce qu'elles ont dit, honorables sénateurs.

Lors de la séance du 18 mars 1999 du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles, la ministre McLellan a dit beaucoup de choses au sujet de ces changements aux règles de la preuve. Je veux en mentionner quelques-unes.

Le projet de loi C-40 est également important parce qu'il permet au Canada de respecter les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies qui prévoient la mise sur pied de tribunaux criminels internationaux pour le Rwanda et l'ancienne Yougoslavie.

La ministre a aussi déclaré, à la page 63:

Comme plusieurs témoins l'ont probablement déjà souligné, nos lois actuelles en matière d'extradition ne nous donnent pas la flexibilité dont nous avons besoin pour extrader un fugitif et le livrer au tribunal qui le recherche.

Elle a ajouté, à la même page:

De plus, et c'est là un changement important, cette preuve doit être produite sous une forme qui respecte les règles canadiennes de la preuve. Cela signifie que les pays étrangers doivent transmettre des déclarations sous serment qui sont faites à la première personne et sous serment et ne devant pas contenir de ouï-dire et qui respectent les normes juridiques canadiennes. Dans certaines causes très complexes, des centaines de déclarations de ce genre pourront être transmises.

Son Honneur le Président: Honorable sénateur Cools, je regrette de vous interrompre, mais je ne vois pas matière à un rappel au Règlement. Il me semble que vous êtes simplement en train de relancer un débat sur le fait que vous n'êtes pas d'accord avec ce qui s'est dit.

Le sénateur Cools: Pas du tout.

Son Honneur le Président: Je ne vois aucune infraction au Règlement. Vous êtes simplement en train de tenir un deuxième débat. Je regrette, mais je ne peux autoriser une telle démarche.

Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, je ne me lance pas dans un deuxième débat. Ce que j'essaie de dire, et je m'efforçais de ne pas employer les déclarations d'autres personnes que la ministre et le sénateur Fraser, c'est que, d'après ce que je constate, le sénateur Nolin est en train de dire au Sénat qu'il a changé d'idée ou qu'il ne savait pas...

Le sénateur Lynch-Staunton: Ce n'est pas un rappel au Règlement. C'est un débat.

Son Honneur le Président: Sénateur Cools, le Règlement dit clairement qu'un sénateur ne peut prendre la parole qu'une seule fois relativement à une question. Or, vous êtes en train de relancer un débat. Vous n'avez cité aucun article du Règlement qui serait enfreint. Vous n'êtes pas d'accord avec un autre sénateur, ce qui est tout à fait dans les règles, mais vous n'invoquez pas le Règlement.

Le sénateur Cools: Ce n'est pas ce que je fais.

Son Honneur le Président: Je regrette, je ne puis accepter votre recours au Règlement.

Le sénateur Cools: Votre Honneur, je ne suis pas en désaccord. Ce que je dis, c'est que la présidence doit nous apporter ses lumières et clarifier les questions sur lesquelles on nous demande de voter aujourd'hui. Je demande à la présidence de nous servir de guide.

Son Honneur le Président: Ce n'est pas la responsabilité de la présidence. Nous sommes saisis d'une motion portant lecture d'un projet de loi. Il y a aussi un amendement. C'est ce dont le Sénat est saisi.

Il n'appartient pas au Président de statuer sur ce qui a été dit durant le débat. Le Règlement indique clairement que chaque sénateur a le droit de prendre la parole une fois sur chaque sujet, à l'exception de l'auteur de la motion. Je m'excuse, mais le recours au Règlement est irrecevable. Je ne puis l'accepter, à moins que vous ne citiez une règle qui aurait été enfreinte.

Le sénateur Cools: Très bien. Honorables sénateurs, ce que je dis, c'est que l'étape de l'étude en comité, qui fait partie du processus d'examen d'un projet de loi, permet d'en faire un examen adéquat...

Le sénateur Lynch-Staunton: Sur quoi porte le recours au Règlement?

Le sénateur Cools: ... après quoi le projet de loi est renvoyé au Sénat avec la recommandation de voter sur le projet de loi tel quel, ou de ne pas voter sur le projet de loi tel quel, mais de l'amender.

Dans le cas actuel, le comité a recommandé d'adopter le projet de loi sans amendement. Cependant, le vice-président du comité a ultérieurement déclaré qu'il n'était pas d'accord avec le contenu du projet de loi. Ce ne sont pas les divergences d'opinions qui nous intéressent, mais le sujet à l'étude.

Le sénateur Lynch-Staunton: Cela n'est pas un recours au Règlement!

Le sénateur Cools: C'en est un.

Son Honneur le Président: Je regrette, sénateur Cools, mais je ne vois pas là matière à un recours au Règlement. S'ils le veulent, les honorables sénateurs peuvent changer d'idée sur un sujet donné. Il ne m'appartient pas de dire s'ils ont raison ou non de le faire.

La question dont le Sénat est saisi est claire: il s'agit de la motion de l'honorable sénateur Bryden, appuyée par l'honorable sénateur Pearson, tendant à la troisième lecture du projet de loi, et des motions d'amendement de l'honorable sénateur Grafstein, appuyées par l'honorable sénateur Joyal. C'est la question dont le Sénat est saisi. Nous pouvons débattre de cette question. L'honorable sénateur n'a cité aucun article du Règlement qui serait enfreint. À moins que le Sénat y consente, je ne peux pas accepter que vous preniez la parole deux fois sur le même sujet.

Le sénateur Cools: Je n'essaie pas de prendre la parole deux fois. Je connais très bien le Règlement.

Le sénateur Lynch-Staunton: Vous contrevenez au Règlement!

Le sénateur Cools: Je suis disposée à intervenir à la troisième lecture. Si les gens ne veulent pas m'entendre, c'est très bien. Je voterai contre le projet de loi, c'est tout.

Son Honneur le Président: Honorable sénateur Cools, ce n'est pas que les sénateurs ne veuillent pas vous entendre. Tous les sénateurs à la Chambre ont les mêmes droits. Aucun sénateur n'a plus de droits que les autres. Mon rôle est de faire appliquer le Règlement.

Si un sénateur intervient au Sénat et indique qu'une règle a été enfreinte, alors il est de mon devoir, à la demande du Sénat, de vérifier ce qu'il en est. Mais rien n'indique qu'une règle ait été enfreinte en l'occurrence. Je ne peux donc pas accepter ce rappel au Règlement et je dois donc donner la parole au prochain sénateur qui le souhaite.

L'honorable Landon Pearson: Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui en ma qualité de membre du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles pour ajouter mes réflexions au débat sur le projet de loi C-40 et expliquer les raisons pour lesquelles je ne pourrai pas appuyer les amendements proposés par les sénateurs Grafstein et Joyal.

Le sénateur Joyal a fait un excellent discours jeudi dernier et j'ai beaucoup de respect pour le sénateur Joyal et le sénateur Grafstein qui, à n'en pas douter, ont fondé leurs amendements sur de nobles principes.

Je crains cependant, et c'est la raison pour laquelle j'interviens aujourd'hui, que les principes qu'ils défendent si éloquemment ne soient pas les principes fondamentaux qui sous-tendent cette loi, principes auxquels la Chambre a souscrit à l'étape de la deuxième lecture.

Comme le sénateur Cools l'a dit succinctement lors de son intervention de la semaine dernière, le projet de loi C-40 est une loi nationale. Certes, il faut déplorer que certains États américains imposent encore la peine de mort, alors que ce pays a ratifié le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Cependant, un vote contre les amendements n'est pas et ne peut pas être considéré comme un vote en faveur de la peine de mort.

Les principes qui sous-tendent cette mesure législative sont la nature des conditions judiciaires et procédurales qui doivent être remplies au Canada avant qu'on extrade un individu vers un État qui en fait la demande ou, puisque cette loi le permet pour la première fois, vers un tribunal pénal international. J'estime que, dans sa mouture actuelle, le projet de loi expose clairement quelles sont ces conditions à respecter.

(1430)

Je considère de plus que la discrétion conférée au ministre, qui préoccupe tant les sénateurs Grafstein et Joyal, est bien définie par les critères énoncés à l'article 47, qui prévoient entre autres que:

47. Le ministre peut refuser d'extrader s'il est convaincu que :

[...] c) l'intéressé avait moins de dix-huit ans au moment de la perpétration de l'infraction et le droit applicable par le partenaire est incompatible avec les principes fondamentaux mis en oeuvre par la Loi sur les jeunes contrevenants.

Cela signifie qu'il n'y a pas de pénalité pour les jeunes.

La discrétion du ministre est de plus soumise à une révision judiciaire effectuée par une cour d'appel provinciale et, enfin, par la Cour suprême du Canada.

Jusqu'à maintenant, aucune des personnes que nous avons accepté d'extrader n'a jamais été exécutée. Nous recevons environ 200 demandes par année et nous extradons de 30 à 40 personnes. Les lois actuelles accordent une certaine discrétion ministérielle dans ces circonstances.

Du point de vue pratique, en laissant une certaine discrétion au ministre, nous renforçons à mon avis la capacité du Canada à modifier l'attitude de l'État requérant au sujet de la peine de mort. Sans cette discrétion, le Canada ne disposera d'aucun levier efficace.

Le second point que j'aimerais souligner en ce qui touche l'extradition de prisonniers vers des pays où la peine de mort existe toujours est que, à ce que je sache, le droit inhérent à la vie n'a jamais été considéré comme un principe de droit absolu. Les homicides, dans les cas de légitime défense par exemple, sont justement reconnus comme une légitime défense - on enlève une vie pour en protéger une autre.

En tant que parlementaires canadiens, je crois que nous avons la responsabilité fondamentale de protéger nos citoyens. Je suis persuadée que le Canada risque effectivement de devenir un refuge pour les pires meurtriers si notre ministre de la Justice ne peut compter sur une certaine discrétion et que nous laissons savoir aux criminels que le Canada est un endroit rêvé pour ceux qui veulent se soustraire aux conséquences de leurs crimes odieux. Au nom de tous les Canadiens, et en particulier des jeunes qui sont vulnérables, je ne suis pas prête à prendre ce risque.

En ce qui concerne le deuxième amendement, j'ai peu de chose à ajouter à ce que le sénateur Fraser et d'autres ont déjà dit. Je ne suis pas prête à accepter qu'il y ait deux procédures juridiques pour les gens vivant au Canada, peu importe les crimes qu'ils ont commis. Le fait que nous n'ayons pas très bien réussi à poursuivre les criminels de guerre dans le passé n'est pas une raison suffisante pour faciliter leur extradition à l'heure actuelle.

Avec la mise sur pied de nouveaux tribunaux sur les crimes de guerre et la possibilité d'un tribunal pénal international, la collecte de preuves au moment où les crimes sont commis ou tout juste après devient plus sophistiquée et efficace. Il sera plus facile à l'avenir de poursuivre les intéressés. De plus, peu importe le résultat des diverses causes, le fait de poursuivre les individus accusés de crimes de guerre a, selon moi, tellement sensibilisé la population à cette question que les procès eux-mêmes ne peuvent pas vraiment être considérés comme des échecs.

Enfin, je voudrais dire quelques mots au sujet des questions soulevées par le sénateur Cools hier. Même s'il est vrai que les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies ont créé les deux tribunaux actuels sur les crimes de guerre, le Canada, en tant que membre à part entière des Nations Unies, a accepté ces résolutions et s'est engagé à ne pas ménager ses efforts pour en faire un instrument efficace pour ce qui est d'exprimer le dégoût du monde entier à l'égard de ces crimes. Le tribunal pénal international proposé dans ce projet de loi prendra forme de façon différente, dans le cadre d'un traité international. Je suppose qu'il y aura une loi de mise en oeuvre et ce sera, selon moi, le moment idéal pour examiner les questions touchant les cours et les tribunaux internationaux en profondeur plutôt que de le faire dans le cadre de l'étude de cette mesure législative.

Je recommande également que l'un de nos comités permanents étudie le plus rapidement possible en profondeur les répercussions de nos engagements aux termes du droit international et des ententes internationales afin que nous soyons tous mieux informés.

Entre-temps, honorables sénateurs, le projet de loi C-40 est une mesure législative importante pour moderniser nos procédures, pour nous permettre de respecter nos obligations actuelles en tant que membre important des Nations Unies et pour protéger notre propre population. Je vous exhorte à y souscrire sans amendement.

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint de l'opposition): Pourrais-je poser une question à l'honorable sénateur Pearson?

Le sénateur Pearson: Bien sûr.

Le sénateur Kinsella: Sénateur, que pensez-vous des travaux du comité des droits de l'homme des Nations Unies en cours en ce moment et, plus particulièrement, de la décision qui pourrait concerner cette question, et qui, d'après mes renseignements, doit être rendue vendredi à Genève?

Le sénateur Pearson: D'après ce que je sais, les négociations vont bon train et la décision qui fait actuellement l'objet de discussions sera conforme à ce projet de loi. Quand les choses seront terminées, j'espère avoir des nouvelles par l'intermédiaire de l'un de vos collègues.

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, j'espère que l'honorable sénateur Pearson me permettra de lui poser des questions sur ses propos au sujet des tribunaux internationaux et, en particulier, sur le fait qu'il sera maintenant plus facile d'extrader parce qu'il sera plus facile d'amasser des preuves.

Mon honorable collègue conviendra-t-elle qu'une fois qu'on a établi un tribunal international, comme nous l'avons fait pour la Yougoslavie et le Rwanda quand nous avons ratifié la création de ces deux tribunaux et approuvé leurs règles de la preuve, ces dernières font alors partie du droit canadien?

Le sénateur Pearson: Honorables sénateurs, ce n'est pas comme cela que je comprends ce qui se passe lorsque nous ratifions une convention. Ma seule expérience vient de la Convention relative aux droits de l'enfant. On m'a toujours dit que lorsque nous ratifions une convention, cette dernière ne fait pas immédiatement partie du droit canadien, mais qu'elle y est lentement incorporée.

Je ne sais pas très bien comment répondre à la question du sénateur. Je ne suis pas spécialiste en la matière.

Le sénateur Grafstein: Par ratification, j'entends le processus selon lequel le Canada intègre un traité international dans le droit interne, en le mettant en annexe d'une mesure législative. D'après ce que j'en sais, quand nous adoptons une telle mesure de droit interne, le traité est alors intégré dans la législation canadienne.

Je vois que le sénateur Nolin, qui est membre du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles, hoche la tête pour signifier son accord.

Honorables sénateurs, j'imagine que j'ai raison de dire - et si j'ai tort, mes collègues seront nombreux à me corriger - que nous avons incorporé, par renvoi, les règles de la preuve établies par le tribunal international. Au cours d'un exposé très intéressant, le sénateur Cools nous a expliqué son point de vue, que certains d'entre nous ne partagent pas entièrement. Toutefois, nous avons incorporé dans les tribunaux internationaux tous les éléments d'un procès et d'un contre-interrogatoire équitables ainsi que tous les éléments de la Charte visant à protéger l'accusé.

Nous avons donc deux chartes. Nous avons la Charte canadienne et nous avons adopté, par renvoi, toutes les protections qu'accordent les règles de la preuve des tribunaux internationaux, parce que nous n'aurions pas ratifié ce traité s'il n'avait pas été conforme à la Charte canadienne des droits et libertés. Madame le sénateur est-elle d'accord avec moi?

Le sénateur Pearson: Honorables sénateurs, j'imagine que ce serait le cas. Ces traités seraient examinés en fonction de la Charte canadienne des droits et libertés, comme nous le faisons pour chaque mesure législative dont nous sommes saisis. Je ne crois pas que nous ayons été saisis d'une mesure législative traitant directement du tribunal. Mon collègue, qui siège ici depuis plus longtemps que moi, pourrait peut-être nous le confirmer.

Le sénateur Grafstein: Honorables sénateurs, le Président m'a déjà rappelé que je ne pouvais intervenir deux fois, alors je tenterai d'éviter d'enfreindre le Règlement.

De toute évidence, aux termes de cette mesure législative - et nous avons abordé la question hier - le tribunal international est considéré comme une entité. Nous n'en aurions pas fait une entité aux termes de ce projet de loi si nous n'avions pas ratifié le traité et accepté le fait qu'il fasse partie de la législation canadienne. Par conséquent, les honorables sénateurs pourraient peut-être se plier à mes désirs et se ranger à mon avis, du moins pour l'instant.

(1440)

Si je comprends bien, honorables sénateurs, nous avons prévu pour les personnes reconnues coupables de crimes contre l'humanité non pas une série de protections, mais deux: une au Canada et une au tribunal. C'est ainsi qu'un criminel de guerre présumé ou une personne accusée de crimes contre l'humanité bénéficie non pas d'un, mais de deux niveaux de protection: un au Canada et un à l'étranger. C'est en effet la conclusion logique de votre argumentation. Autrement dit, au lieu de faciliter l'extradition, nous aurons accordé une immunité infinie en utilisant la Charte d'une manière qui n'a jamais été prévue pour empêcher des criminels de guerre d'être rapidement traînés devant la justice.

Le sénateur Pearson: Je crois comprendre maintenant votre question.

J'ai participé récemment à une conférence où un homme m'a expliqué comment il avait recueilli des preuves de ce qu'il considérait comme un crime de guerre en Éthiopie. Une école avait été bombardée et il avait des preuves que ce n'était pas un accident, mais un génocide délibéré.

J'ai été impressionnée de voir que des particuliers et des groupes recueillent maintenant des preuves de ce genre, une chose qui n'aurait pas été possible ni même envisageable au cours de la dernière guerre mondiale. Tel est le point que j'essayais de faire valoir.

Nous apprenons que des gens au Kosovo recueillent soigneusement des preuves auprès de témoins. Je crois que cela rendra les choses plus faciles que de juger des gens pour des crimes commis il y a une quarantaine d'années.

L'honorable Serge Joyal: Je voudrais poser une question au sénateur.

J'ai visité son site Web et j'y ai lu ceci, et je cite:

Outre mes fonctions de sénateur, je suis conseillère auprès du ministre des Affaires étrangères pour les droits des enfants.

Le sénateur ajoute:

Un bon endroit où commencer est la Convention de l'ONU relative aux droits de l'enfant - l'instrument international le plus ratifié de l'histoire.

Le sénateur poursuit:

En signant la convention de l'ONU relative aux droits de l'enfant, à quoi s'est engagé le Canada?

En ratifiant la convention en décembre 1991, le Canada a indiqué sa volonté d'être légalement lié par les principes de cet instrument.

L'article 37 de la convention dit, et je cite:

Les États parties veillent à ce que:

a) Nul enfant ne soit soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Ni la peine capitale ni l'emprisonnement à vie sans possibilité de libération ne doivent être prononcés pour les infractions commises par des personnes âgées de moins de dix-huit ans;

C'est la convention par laquelle le sénateur Pearson estime que nous sommes légalement liés.

L'honorable sénateur a cité l'article 47 du projet de loi, qui dit:

Le ministre peut refuser d'extrader s'il est convaincu que [...]

[...] l'intéressé a moins de dix-huit ans [...].

Madame le sénateur est-elle au courant d'une décision de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique concernant une décision du ministre de la Justice en poste à l'époque, l'honorable Allan Rock, d'extrader deux Canadiens de dix-huit ans aux États-Unis, où ils risquent la peine de mort? Est-elle au courant de cette décision de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique, qui fait actuellement l'objet d'un appel?

Je voudrais citer un passage du jugement rendu par le juge Donald. Le paragraphe 48 dit:

[48] L'âge et la nationalité des requérants devraient être pleinement pris en considération. Le ministre semble vouloir empêcher tout un tas de meurtriers imaginaires de chercher refuge au Canada. Ce faisant, il rend l'application de l'article 6 du Traité très difficile.

C'est clair. Comme l'honorable sénateur Pearson, je pense que nous sommes liés par la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant.

Son Honneur le Président: L'honorable sénateur veut-il bien poser sa question?

Le sénateur Joyal: Comment madame le sénateur concilie-t-elle l'engagement aux termes de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant de ne pas condamner à mort un jeune de 18 ans et l'article 47 du projet de loi, qui laisse cette décision au pouvoir discrétionnaire du ministre? Le ministre a exercé ce pouvoir discrétionnaire et sa décision a été cassée par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique le 30 juin 1997. Comment madame le sénateur concilie-t-elle ces deux positions?

Le sénateur Pearson: À titre d'éclaircissement, je souligne que, dans le cas en question, les jeunes avaient 18 ans lorsqu'ils ont commis le crime. La convention vise les personnes de moins de 18 ans. Bien que la distinction puisse être très ténue, elle existe.

L'honorable sénateur Joyal et moi divergeons d'opinion non pas tant sur le principe que sur la meilleure façon de procéder. Je crois que les dispositions de la Loi sur les jeunes contrevenants font en sorte qu'il est acceptable d'accorder un pouvoir discrétionnaire au ministre. Le sénateur Joyal estime qu'il faudrait employer le terme «doit», alors que je suis en faveur du terme «peut». C'est sur cet aspect que nous divergeons d'opinion.

Le sénateur Joyal: Le sénateur comprend que la différence entre le terme «peut» employé à l'article 47 et le terme «doit» est l'emprisonnement à vie. Dans un cas, le ministre empêche l'imposition de la peine à des personnes de moins de 18 ans. Aux termes de l'article 47, le ministre «peut» le faire.

Son Honneur le Président: Honorable sénateur Joyal, veuillez poser votre question. Je ne peux pas vous autoriser à continuer de faire une observation.

Le sénateur Grafstein: Le paragraphe 37(4) du Règlement prévoit des questions et des observations.

Le sénateur Joyal: Madame le sénateur convient-elle qu'une disposition qui établirait à tout le moins certains paramètres pour les citoyens de moins de 18 ans constituerait une meilleure assurance que nous respectons la convention internationale?

Le sénateur Pearson: J'estime que les assurances prévues dans le projet de loi sont suffisantes. C'est sur ce point que nos opinions diffèrent.

Le sénateur Kinsella: Madame le sénateur Pearson voudrait-elle nous donner son avis au sujet de la justesse du processus de ratification qu'a suivi notre pays ces dernières années? Ce processus concerne directement le problème que nous devons examiner et qui suscite des craintes chez notre collègue, le sénateur Joyal.

Lorsque le gouvernement du premier ministre Mulroney était au pouvoir, le Canada a ratifié la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant. Cette ratification a fait suite à une consultation entre les gouvernements provinciaux et territoriaux et le gouvernement du Canada. Conformément à la jurisprudence sur les conventions concernant le travail, le comité judiciaire du Conseil privé du Royaume-Uni a déterminé que nous devions procéder ainsi lorsque des obligations internationales touchaient les compétences fédérales et provinciales.

Le sénateur est-il d'avis que le Parlement doit participer directement à la ratification par le Canada de traités internationaux qui nous imposent ce genre d'obligation en droit international de sorte que, lorsque nous sommes saisis d'un projet de loi comme celui-ci, nous sachions à quoi nous en tenir, parce que nous avons participé directement au processus de ratification?

Le sénateur Pearson: La question est très intéressante. J'y ai beaucoup réfléchi moi-même, car l'une de mes préoccupations, depuis fort longtemps, est le peu de connaissance que nous avons de certaines de nos conventions internationales. Ce doit être le cas des conventions et de tous les autres accords que nous avons ratifiés. Cependant, je ne suis pas experte en droit international, et je ne sais donc pas comment ces choses doivent se passer. Il me faudrait demander bien des conseils avant de pouvoir répondre à la question.

(1450)

Je suis d'accord avec le sénateur. Plus nous serons nombreux à savoir ce que contiennent ces conventions, plus elles auront de l'influence sur l'attitude du public. Mais je ne sais pas comment il faut s'y prendre.

Le sénateur Kinsella: Madame le sénateur nous ferait-elle profiter de ses connaissances sur la Convention relative aux droits de l'enfant? Cette convention interdit-elle explicitement l'exécution d'enfants? Y a-t-il, oui ou non, une interdiction explicite?

Le sénateur Pearson: Oui.

Le sénateur Kinsella: N'est-il pas également exact que, dans les conventions de Vienne ayant trait à l'observation des lois internationales, le Canada est lié par ce cadre général ainsi que par les conventions qu'il a ratifiées et les obligations qu'il a acceptées? Le gouvernement Mulroney a ratifié la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant. Par conséquent, n'est-il pas exact que le Canada a accepté des obligations directes visant à interdire l'exécution d'enfants, en vertu de cette convention? Le Canada a en outre accepté la Convention de Genève sur l'application du droit des traités internationaux. Il est donc clair que le Canada doit prendre toutes les mesures nécessaires pour que la peine capitale ne soit pas infligée aux enfants, n'est-ce pas?

Le sénateur Pearson: Honorables sénateurs, je pense que...

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je souligne que le temps de parole qui était prévu est écoulé. La permission est-elle accordée à l'honorable sénateur pour qu'elle continue?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Veuillez continuer, sénateur Pearson.

Le sénateur Pearson: Honorables sénateurs, au moment de la ratification de cette convention, nous avons certes pris l'engagement de veiller à ce que, sur le territoire canadien, les enfants de moins de 18 ans ne soient pas passibles de la peine capitale.

Encore une fois, la mesure dans laquelle les obligations que nous assumons en tant que signataires de la convention s'appliquent à l'étranger est une question de droit international, domaine que je ne connais pas bien. Quand les États-Unis ont ratifié le Pacte relatif aux droits civils et politiques, qu'ont-ils fait de la question de la peine capitale? L'honorable sénateur en sait sûrement plus que moi à ce sujet.

Le sénateur Kinsella: Ils ont émis une réserve.

Le sénateur Pearson: Mon argument concernant le projet de loi C-40 est qu'il s'agit d'une loi intérieure. Aux termes de ce projet de loi, le ministre doit prendre toutes les mesures nécessaires dans le cas d'enfants de moins de 18 ans. Cette prescription figure à l'alinéa 47c). C'est mon opinion.

Le sénateur Kinsella: Je remercie l'honorable sénateur pour cette réponse. Reconnaît-elle comme une valeur canadienne acceptée aussi bien légalement que philosophiquement le fait que la peine capitale est un mal que la société canadienne rejette?

Le sénateur Pearson: Oui.

Le sénateur Kinsella: Comment pouvons-nous alors justifier l'article 47 du projet de loi si nous partons du principe que la peine de mort est inacceptable?

Le sénateur Pearson: Honorables sénateurs, quand on veut combattre quelque chose d'inacceptable, on essaie de trouver une façon d'influencer les individus, les pays ou les États qui font ce que nous estimons inacceptable, et on essaie de les amener à se raviser. En retirant au ministre son pouvoir discrétionnaire, nous priverions le Canada de sa capacité d'exercer quelque influence que ce soit.

Comme bien des femmes, je suis assez pragmatique au sujet de ces questions. J'aimerais que le Canada conserve sa capacité de faire valoir des arguments et de négocier. À ma connaissance, dans les dossiers d'extradition que nous menons, c'est ce qui se produit: il y a des discussions entre les parties. S'il n'y en avait pas, nous n'aurions aucun moyen d'influencer l'attitude des Américains à l'égard de la peine capitale.

Le sénateur Kinsella: De l'avis de l'honorable sénateur, est-il opportun que les législateurs consultent des juges au sujet d'un projet de loi?

Le sénateur Pearson: Honorables sénateurs, il est parfaitement légitime de tenir une séance à huis clos, comme nous l'avons fait avec le comité sur la garde et le droit de visite des enfants. Nous avons aussi tenu une séance à huis clos avec des juges. J'ai pensé que c'était tout à fait opportun parce que nous avions besoin de leurs conseils et ainsi de suite. Dans un contexte structuré comme celui-là, c'est une activité parfaitement légitime.

L'honorable Lois M. Wilson: Honorables sénateurs, d'après ce que j'ai compris, les conventions et les pactes internationaux ne sont pas des options politiques servant à influencer, mais des mesures exécutoires. De plus, nous devons aligner le droit canadien sur les engagements que nous avons pris à l'échelle internationale.

Par exemple, le doyen de la faculté de droit de l'Université McGill m'a informée que les tribunaux canadiens, sans parler de nos juges ou du public, n'invoquent que très rarement les conventions et les pactes des Nations Unies. Ils les considèrent comme des options politiques, non comme des mesures exécutoires.

N'incombe-t-il pas aux législateurs d'adopter des mesures législatives qui aideraient à concilier le droit canadien et le droit international, en vertu duquel nous avons pris certains engagements?

Le sénateur Pearson: Honorables sénateurs, c'est ce que nous avons fait pour la Convention relative aux droits de l'enfant. C'est ce que nous avons fait pour le projet de loi C-27 sur le tourisme du sexe, dans lequel nous avons cité le préambule de la Convention relative aux droits de l'enfant.

Je conviens que nos communautés judiciaire et juridique et d'autres ont généralement fait preuve d'une certaine lenteur pour incorporer et mentionner nos pactes et autres engagements. Ceux d'entre nous que cela préoccupe font de gros efforts en vue de sensibiliser les gens à cette question. L'UNICEF vient de faire paraître un excellent texte, destiné aux hommes de loi, aux juges et à d'autres personnes, qui explique comment incorporer la convention dans la législation d'un pays.

En tant que législateur, j'ai certainement essayé le plus possible, dans mon domaine, de me reporter aux textes pertinents. La question dont nous parlons concerne une mésentente au sujet du moyen le plus efficace de promouvoir nos obligations. Telle est ma position. De façon générale, toutefois, c'est une chose qu'il faudrait faire le plus possible.

Le sénateur Wilson: Honorables sénateurs, si c'est évident que nous l'avons fait dans le cas de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant, pourquoi ne sommes-nous pas disposés à le faire dans le cas présent, sachant que l'on apprend beaucoup de la loi?

Le sénateur Pearson: Cela ne convient pas dans ce cas, honorables sénateurs. Dans le texte, il est dit que la ministre doit en tenir compte quand on lui présente une demande d'extradition. J'ignore quelle disposition on pourrait inclure dans le projet de loi. Si on y ajoute un préambule sur toutes les conventions, laquelle mettriez-vous en évidence? Je ne souscris pas à ce que je crois être sous-entendu dans votre question.

L'honorable Joan Fraser: Honorables sénateurs, madame le sénateur Pearson répondrait-elle à deux autres questions?

Le sénateur Pearson: Certainement.

Le sénateur Fraser: D'abord, je voudrais lire un passage d'une ébauche de résolution présentée par l'Allemagne, au nom de l'Union européenne, à la Commission des droits de l'homme des Nations Unies. C'est une résolution assez longue et libellée de façon assez mordante, mais le paragraphe qui m'intéresse est le cinquième, qui s'énonce comme suit:

La Commission demande aux États qui ont reçu une demande d'extradition relativement à des accusations passibles de la peine de mort de se réserver explicitement le droit de refuser l'extradition en l'absence d'assurances formelles des autorités compétentes de l'État faisant la demande que la peine capitale ne sera pas appliquée.

(1500)

Étant donné que la résolution a été présentée par l'Union européenne, dont tous les membres, si j'ai bien compris, ont aboli la peine capitale et s'y opposent fermement, cela ne constituerait-il pas, pour la communauté internationale, une reconnaissance claire qu'il existe en droit un pouvoir discrétionnaire dans ces cas? Nous espérons tous que tous les pays du monde aboliront la peine capitale, mais, entre-temps, il faut faire face à la réalité.

Le sénateur Pearson: Oui, sénateur Fraser, je comprends comme vous la résolution. Je dirais également que, à mon avis, le projet de loi C-40 va dans le sens que nous souhaitons parce que nous nous y réservons le droit de refuser une extradition.

Le sénateur Fraser: Ma deuxième question fait suite à la question posée par le sénateur Grafstein au sujet de sa deuxième proposition d'amendement, soit celle qui porte sur l'extradition demandée par des tribunaux internationaux.

Si je suis son raisonnement, il dit que, parce que ces tribunaux offrent de bonnes protections, assimilables à celles de la Charte, et de bonnes garanties d'application régulière de la loi, il ne serait pas nécessaire que nous appliquions nous-mêmes tous les critères d'application régulière de la loi dans les cas où l'extradition est demandée par ces tribunaux. Cependant, nous extradons des individus vers des pays qui ont aussi de bonnes garanties, constitutionnelles ou autres, d'application régulière de la loi. Je pense notamment au Royaume-Uni. Comme le sénateur Cools nous l'a rappelé, le système de common law britannique est un monument de notre civilisation. La France et les autres pays de l'Union européenne offrent aussi de bonnes garanties. Les États-Unis, en dépit de la peine capitale et quoi que nous en pensions, offrent aussi des garanties solides d'application régulière de la loi.

Madame le sénateur pourrait-elle répondre à la question suivante: si nous acceptons que la seule garantie d'application régulière de la loi justifie le traitement rapide des demandes d'extradition, ne devrions-nous pas accélérer le traitement de toutes les demandes, et non pas uniquement de celles qui proviennent de tribunaux internationaux?

Le sénateur Pearson: Honorables sénateurs, je ne me suis pas encore faite à l'idée que nous puissions avoir deux processus distincts de traitement des demandes. D'après la description que nous avons donnée du processus, il devrait être suffisant. Le fait qu'une double protection sera offerte n'est que plus rassurant. J'espère simplement que les éléments de preuve seront recueillis plus efficacement qu'ils ne l'ont été dans le passé.

Toutefois, il s'agit d'une question pratique sur laquelle devront se pencher les procureurs et les enquêteurs, et non une question de procédure à régler au Canada. Nous ne devrions pas accélérer un processus judiciaire pour un groupe de gens, peu importe ce qu'ils ont fait, malgré les garanties qui sont données à l'autre bout.

(Sur la motion du sénateur Andreychuk, le débat est ajourné.)

[Français]

Projet de loi sur le précontrôle

Troisième lecture

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool propose: Que le projet de loi S-22, Loi autorisant les États-Unis à effectuer au Canada le précontrôle en matière de douane, d'immigration, de santé publique, d'inspection des aliments et de santé des plantes et des animaux à l'égard des voyageurs et des marchandises à destination des États-Unis, soit lu une troisième fois.

- Honorables sénateurs, je voudrais faire le point sur quelques préoccupations qui ont été soulevées lors du débat à l'étape de la deuxième lecture de ce projet de loi sur le précontrôle.

Le projet de loi S-22, intitulé: Loi sur le précontrôle, assurerait le fondement juridique des opérations menées aux postes de précontrôle au Canada, mais surtout, il permettrait d'appliquer de nouvelles approches à la gestion de la frontière, une frontière qui entretient une des relations commerciales les plus riches et les plus dynamiques du monde et un des plus grands marchés bilatéraux de transport aérien des voyageurs.

Depuis la signature, en 1995, de l'Accord Canada-États-Unis sur l'ouverture des espaces aériens, le trafic aérien a augmenté de 31 p. 100, et le nombre de vols sans escale vers des destinations aux États-Unis est passé à 84. Le précontrôle a joué un rôle important dans la réalisation des objectifs de l'accord. Le précontrôle permet aux organismes fédéraux américains d'inspecter au Canada les voyageurs et les marchandises à destination des États-Unis.

L'accord relatif au prédédouanement dans le domaine du transport aérien conclu en 1974 entre les deux pays a officialisé les services américains de précontrôle dans les aéroports canadiens. En 1998, 9,3 millions de voyageurs sont passés par les installations américaines de précontrôle. Le projet de loi sur le précontrôle a été déposé pour répondre à trois faits nouveaux survenus depuis la signature de l'accord de 1974.

D'une part, la Charte des droits et libertés de 1982 reconnaît de nouveaux droits individuels aux Canadiens. D'autre part, l'augmentation rapide des déplacements transfrontaliers de personnes et de marchandises appelle une adaptation des services d'inspection à la frontière. Enfin, les progrès de la technologie permettent de cibler plus efficacement les voyageurs à risque, d'obtenir des renseignements préalables sur les passagers et de rationaliser les procédures. Le projet de loi sur le précontrôle définit l'application du droit canadien, les droits et les obligations des voyageurs, le pouvoir des contrôleurs américains et les renseignements que doivent fournir les compagnies aériennes.

De plus, il établit la base d'un réaménagement des ententes sur le contrôle à la frontière des personnes et des marchandises voyageant par air et par d'autres moyens de transport. Il s'agit d'un texte législatif exceptionnel qui confère aux Américains un ensemble limité de pouvoirs dans le contexte du droit canadien.

Le projet de loi sur le précontrôle est conçu de manière à se conformer le plus étroitement possible aux dispositions de la Loi sur les douanes et à la jurisprudence du Canada. Le Canada sera souverain dans les zones de précontrôle. Les droits des voyageurs seront protégés dans ces zones par la Charte des droits et libertés, la Déclaration canadienne des droits et la Loi canadienne sur les droits de la personne.

[Traduction]

Les agents américains ne seront autorisés qu'à appliquer les volets civils des lois des États-Unis qui sont directement liés à l'admission des voyageurs et à l'importation de biens aux États-Unis, alors que l'application de ces lois sera assujettie à la loi canadienne. Les lois américaines s'appliqueront aux douanes, à l'immigration, à la santé publique, à l'inspection des aliments et aux mesures phytosanitaires et zoosanitaires. Tout geste de nature pénale posé dans une zone de précontrôle relèvera des autorités canadiennes.

Les préposés au précontrôle pourront fouiller des personnes par palpation, détenir des passagers en vue de leur transfert aux autorités canadiennes, examiner et saisir des biens et imposer des peines pécuniaires. Ils ne seront pas autorisés à effectuer des fouilles à nu ou des fouilles plus indiscrètes.

Le projet de loi est l'aboutissement d'environ deux ans de négociations avec le gouvernement américain et se veut un mariage équilibré des régimes juridiques des deux pays. Le processus frontalier comprend des mesures d'exécution d'ordre civil, pénal et administratif. Le précontrôle est un régime hybride qui permet aux États-Unis de faire appliquer des mesures d'ordre civil et administratif et au Canada de mettre en oeuvre des mesures d'ordre pénal.

[Français]

Le Comité sénatorial des affaires étrangères a constaté que le projet de loi recueille l'appui de l'industrie canadienne du transport aérien. Il a aussi reconnu que le régime de précontrôle sera institué en toute réciprocité aux États-Unis. Des modifications ont été apportées au texte pour répondre à certaines recommandations formulées par l'Association du Barreau canadien.

Ainsi, un amendement a été proposé en ce qui concerne les fausses déclarations. La mesure de dissuasion prévue à cet égard s'appliquera désormais au seul voyageur et non plus aux tiers pouvant être associés aux déclarations faites par celui-ci. Le voyageur devra avoir fait sciemment la fausse déclaration, qui sera punissable sur déclaration sommaire de culpabilité uniquement. Des amendements ont aussi été proposés pour indiquer clairement qu'il ne peut être décidé de détenir ou de fouiller un voyageur pour le seul motif que celui-ci refuse de répondre aux questions qui lui sont posées.

[Traduction]

(1510)

Nous avons aussi adopté un amendement qui fournira une garantie supplémentaire que les droits des Canadiens ne seront pas compromis. Cette modification exige qu'un examen des dispositions et de l'application de la loi fasse l'objet d'un rapport aux deux Chambres du Parlement dans un délai de cinq ans.

[Français]

Le Canada n'a pas encore d'installations de précontrôle aux États-Unis, mais la loi ne sera promulguée que lorsque les deux pays auront signé un accord de réciprocité à cet égard.

En résumé, cette loi modernise notre frontière pour le XXIe siècle. Elle clarifie les pouvoirs conférés aux autorités américaines et protège les droits des voyageurs en droit canadien. Les voyageurs arrivant en Amérique du Nord en provenance d'Europe et d'Asie seront mieux servis. Un régime plus uniforme sera appliqué aux postes de précontrôle et au passage de la frontière, de part et d'autre de celle-ci, pour la lutte contre les activités illégales.

[Traduction]

Son Honneur le Président: Si aucun autre honorable sénateur ne souhaite prendre la parole, je vais passer à la motion.

Il est proposé par l'honorable sénateur Losier-Cool, appuyée par l'honorable sénateur Ferreti Barth, que le projet de loi soit lu une troisième fois maintenant. Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.)

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, étant donné qu'il est presque 15 h 15 et que des comités doivent siéger cet après-midi, je pense que les deux côtés de la Chambre sont d'accord pour que l'on ajourne maintenant.

Son Honneur le Président: Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs, pour que la séance soit levée?

Des voix: D'accord.

(Le Sénat s'ajourne à 14 heures demain.)


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