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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

2e Session, 36e Législature,
Volume 139, Numéro 27

Le mardi 15 février 2000
L'honorable Gildas L. Molgat, Président


LE SÉNAT

Le mardi 15 février 2000

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Le Jour du drapeau national

L'honorable B. Alasdair Graham: Honorables sénateurs, aujourd'hui est le Jour du drapeau canadien. Vu l'importance du sujet et au cas où je déborderais un peu les trois minutes prescrites, puis-je demander immédiatement la permission de poursuivre?

Des voix: Oh, oh!

Le sénateur Kelleher: Ne soyez pas timide.

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, à l'aube du XXIe siècle, il semble difficile d'imaginer que notre drapeau, l'unifolié, n'a jamais soulevé une controverse. Or, pour ceux et celles qui se rappellent le long débat houleux qu'avait donné le choix d'un drapeau national pour le Canada, ce fut un chapitre fort important de l'histoire d'un grand pays qui se cherche encore.

Les honorables sénateurs se rappelleront que, trois ans à peine avant la célébration de son centenaire, les Canadiens se battaient encore dans le but d'acquérir un des symboles les plus importants d'une nation, soit un drapeau national distinctif. Ce n'est pas que le nouveau drapeau hissé sur la colline du Parlement le 15 février 1965, le drapeau à la feuille d'érable rouge, était du nouveau dans notre histoire héraldique passablement compliquée, bien au contraire. La feuille d'érable symbolisa le Canada dès 1700, en raison de nos autochtones qui, chaque printemps, recueillaient la sève d'érable.

[Français]

C'est en 1834 que la Société Saint-Jean-Baptiste a proposé la feuille d'érable rouge comme emblème du Canada.

[Traduction]

En 1860, il a été adopté comme emblème national à l'occasion de la visite du prince de Galles à Toronto. Peu de temps après, ce brillant symbole de l'automne canadien a été honoré dans une pièce musicale connue sous le nom de «The Maple Leaf Forever». Nos athlètes olympiques le portent fièrement depuis 1904.

Les troupes canadiennes ont porté la feuille d'érable rouge sur leurs insignes militaires au cours de deux guerres mondiales et cette dernière est devenue avec le temps le principal symbole utilisé par bon nombre de régiments canadiens. Ces derniers la portaient lors de la victoire de Vimy et dans les heures héroïques de Normandie, dans les moments tragiques de la Somme et de Dieppe, au cours de la libération de la Sicile et dans les vaillantes luttes en vue de débarrasser l'Europe des horreurs du nazisme. Sur la terre, dans les airs et en mer, nos braves Canadiens ont porté la feuille d'érable à titre d'insigne de courage au cours de certaines des heures les plus sombres de l'histoire moderne, alors qu'ils luttaient pour la liberté et pour un monde meilleur.

Toutefois, même si nos athlètes et bon nombre de nos soldats portaient depuis longtemps la feuille d'érable avec fierté, ce n'est qu'en 1964 qu'un ancien combattant de la Première Guerre mondiale, le premier ministre Lester B. Pearson, a entrepris la difficile tâche de persuader les Canadiens d'officialiser les liens privés qu'ils entretenaient avec la feuille d'érable en l'incluant dans le nouveau drapeau canadien.

(1410)

Dans un discours qu'il a prononcé avant le congrès national de la Légion canadienne en 1964, M. Pearson a parlé de son service outre-mer en 1914 et de ses camarades de l'époque nommés Cameron, Gleidenstein, Chapin et O'Shaughnessy. Je reprends les paroles de M. Pearson lui-même, qui a dit:

Mais nous n'étions pas catégorisés comme Canadiens d'origine irlandaise, française ou hollandaise...

Le premier ministre ajoute:

Nous portions tous le même uniforme avec le même insigne unifolié et nous étions fiers d'être reconnus comme des Canadiens, de servir en tant que Canadiens et de mourir, le cas échéant, comme des Canadiens. Nous étions tous des Canadiens tout court. Nous étions fiers de notre pays et de nos concitoyens, fiers des symboles de ce pays. Le drapeau est l'un de ces symboles.

Aujourd'hui, honorables sénateurs, nous célébrons ce symbole, en ce Jour du drapeau. Nous célébrons le drapeau d'un pays qui représente l'espoir et l'espérance pour des millions de gens sur la planète - une étoile spéciale dans la constellation des nations qui est synonyme de paix, de liberté, de compassion et de respect des droits de la personne. Qu'il soit arboré fièrement par nos athlètes olympiques ou porté comme insigne par nos extraordinaires casques bleus partout dans le monde, notre drapeau constitue, par sa présence, un aperçu de ce qu'il est possible de réaliser dans les pays où l'espoir s'est souvent éteint.

Ayant moi-même eu l'honneur de participer au développement démocratique de pays comme la Namibie et le Nicaragua, cela m'a souvent amené à réfléchir sur ce que signifie notre drapeau pour des millions de personnes à l'échelle du globe qui sont démunies et affamées, des gens qui luttent pour la liberté et pour leur survie.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, est-ce d'accord pour permettre au sénateur de continuer?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Graham: Aujourd'hui, alors que nous nous rappelons cette froide journée de février d'il y a 35 ans, je pense à eux. Je pense à nos ancêtres qui, grâce à leur conviction et à leur engagement, ont bâti ce beau et généreux pays dans le nord du globe. Je pense à tous ceux qui sont morts jeunes dans des conflits à l'étranger pour que nous puissions être libres.

Honorables sénateurs, aujourd'hui, je me joins à tous les Canadiens pour célébrer le miracle de l'unifolié. Nous fêtons un pays plein d'espoir et de promesses. Nous célébrons les valeurs qui unissent tous les habitants de notre pays, qu'ils proviennent du Québec, de l'Ontario, de la Saskatchewan ou de la Nouvelle-Écosse, les valeurs d'un grand peuple talentueux qui a toujours compris que ce qui l'unit sera toujours plus fort que ce qui le divise.

Nous prions, honorables sénateurs, pour nos enfants, les enfants nés sous un drapeau qui est aimé et respecté à l'échelle de la planète, les enfants de la feuille d'érable rouge. Nous prions pour que leur esprit soit fort et qu'ils portent le flambeau afin que ce siècle soit animé par l'idéal de la force que confère la diversité, l'idéal magnifique auquel correspond et correspondra toujours le Canada.

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, je me réjouis d'ajouter mes commentaires à la magnifique présentation de notre drapeau par le sénateur Graham. C'est avec beaucoup de plaisir et de fierté que je souligne aujourd'hui le Jour du drapeau national au Canada.

Honorables sénateurs, je suis arrivé au pays il y a 49 ans, alors que j'étais un tout jeune homme. Je faisais partie des millions de personnes qui ont quitté l'Europe d'après-guerre, dans mon cas il s'agit de l'Italie, pour entreprendre une nouvelle vie dans un autre pays. Bien que près de cinq décennies se soient écoulées, je conserve toujours beaucoup d'affection pour mon pays d'origine, mais le Canada est mon nouveau foyer, «ma patrie». Je suis fier et même très fier d'être Canadien, tout comme c'est le cas de mes enfants et petits-enfants.

Honorables sénateurs, le drapeau que nous voyons flotter chaque jour au sommet de la Tour de la paix est plus qu'un emblème. C'est un symbole de notre unité nationale. Notre drapeau est un signe de notre objectif et de notre engagement communs en tant que pays. C'est le signe qu'en dépit de nos nombreux différends politiques, culturels et régionaux, de nos petites animosités et inimitiés, nous avons réussi à construire un pays qui compte parmi les plus formidables au monde.

Le drapeau du Canada est connu partout dans le monde. À la différence de nombreux drapeaux, celui qui porte la feuille d'érable rouge ne représente pas l'oppression, la tyrannie, la crainte ou la guerre, mais est plutôt le symbole de la paix, de la stabilité, de la tolérance et de la volonté de travailler et de vivre ensemble.

Nous, Canadiens, à la différence de nos magnifiques voisins au sud de la frontière, ne sommes pas beaucoup portés à brandir notre drapeau en public. C'est malheureux. À mon avis, il ne serait pas mauvais que nous brandissions un peu plus souvent notre drapeau. Nous n'éprouvons certes aucune difficulté à l'occasion du Jour du Canada et pendant les événements sportifs internationaux. Notre habitude collective d'être effacés camoufle le fait que nous sommes un pays où les gens manifestent un constant respect mutuel et une profonde admiration pour ce que nous avons accompli ensemble. Nous sommes, à juste titre, fiers d'être Canadiens.

Honorables sénateurs, les journaux nous apprennent aujourd'hui que l'on a trouvé le drapeau canadien original, qui avait été hissé pour la première fois ici sur la colline du Parlement en 1965. Le détail de ce qui lui est arrivé depuis cette époque n'est pas pertinent aujourd'hui. Toutefois, ce serait selon moi aujourd'hui une occasion propice pour que le premier ministre adopte les mesures nécessaires afin que ce drapeau, notre drapeau, soit rendu à la population du Canada, à laquelle il appartient de plein droit.

[Français]

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, le 10 février dernier, j'assistais à une réunion et je suis malheureusement arrivé en retard à la séance du Sénat. L'honorable John Buchanan a fait preuve de la civilité qui peut exister entre les différents sénateurs de tout le pays, car il a bien voulu me faire l'honneur de souligner mes 36 ans de vie parlementaire.

[Traduction]

Il a dit que deux parlementaires de longue date, dont Bob Muir, un ancien sénateur, l'avaient informé que le 10 février était la date anniversaire de mon arrivée ici, il y a trente-six ans. L'autre parlementaire était l'honorable Bob Coates. J'aimerais rendre hommage aux personnes qui le méritent vraiment.

Bob Coates et l'ancien sénateur Bob Muir ont dit au sénateur Buchanan que j'étais ici depuis 36 ans. Cela prouve que l'on peut avoir des amis dans tous les partis.

Après avoir remercié le sénateur John Buchanan, je regrette que chaque fois que quelque chose d'agréable m'arrive, je suis en retard. Je suis arrivé dans cette enceinte 10 minutes après que le sénateur Buchanan m'ait rendu hommage. Le sénateur Bolduc, mon nouveau voisin, m'a dit: «Vous auriez dû être ici.»

Honorables sénateurs, je voudrais parler maintenant du drapeau canadien. Cela vous intéressera peut-être de savoir que des parlementaires qui ont assisté au débat sur le drapeau canadien, seuls trois sont toujours vivants. Si quelque étudiant ou chercheur est curieux de savoir de quoi il retournait durant ce débat, je me ferai un honneur de le lui dire. Nous sommes trois parlementaires en vie et, j'espère, encore en pleine forme. Deux se trouvent à la Chambre des communes: le très honorable Jean Chrétien - mon ami depuis 1953, une amitié qui n'a rien à voir avec la politique - et le vice-premier ministre, l'honorable Herb Gray. Nous ne sommes plus que trois parlementaires à avoir voté en faveur du drapeau national en décembre 1964.

Honorables sénateurs, notre drapeau a été hissé le 15 février 1965 et cela a été pour moi un grand événement.

(1420)

J'ai été ravi d'entendre l'intervention du sénateur Graham. Qu'est-il arrivé à ce pays? Vous avez de la chance que je ne sois plus en mesure de prononcer des discours passionnés comme à la belle époque. Mon médecin me l'interdit absolument. Il m'arrive cependant de me laisser encore emporter. Qu'est-il advenu de ce pays? Qu'est-il advenu de nous tous? Que sont devenus les Canadiens français qui ont tant donné au Canada?

Le sénateur Graham a rappelé que, en 1834, ce sont les Canadiens français qui avaient proposé, par l'entremise de la Société Saint-Jean-Baptiste, le projet d'adopter la feuille d'érable comme emblème du Canada. Nous oublions facilement que c'était une autre section de cette même société, dans la ville de Québec, qui avait demandé à Calixa Lavallée de composer la mélodie, et à sir Adolphe-Basile Routhier d'écrire les paroles de notre hymne national, "Ô Canada", que l'on chante différemment en anglais et en français. Aujourd'hui, tandis que nous célébrons le 35e anniversaire du drapeau canadien, nous aurions peut-être intérêt à prendre le temps de réfléchir sur le passé au vu de notre actualité. Nous en sommes à une époque où ceux qui l'ont le plus réclamé sont ceux qui s'en réclament le moins aujourd'hui.

Le décès de J. Angus MacLean, c.p.

Hommage

L'honorable Catherine S. Callbeck: Honorables sénateurs, je suis profondément attristée de me lever pour rendre hommage à un Canadien exemplaire de l'Île-du-Prince-Édouard, dont nous déplorons le décès aujourd'hui. L'honorable J. Angus MacLean est devenu une figure légendaire dans sa province. On le respecte en tant qu'homme politique de premier ordre venant de la base - un homme qui a toujours lutté afin d'obtenir ce qu'il jugeait avantageux pour ceux qu'il représentait.

Angus MacLean était aussi un véritable héros de guerre; son appareil a été abattu en Europe au cours de la Seconde Guerre mondiale, alors qu'il servait dans l'Aviation royale du Canada. Il a passé dix semaines qui ont dû être pénibles derrière les lignes de l'ennemi avant de réussir à s'évader. M. MacLean a raconté avec verve bon nombre de ses exploits dans ses mémoires intitulés: Making It Home. Les incidents qu'il rapporte dans ces pages sont fascinants - c'est le testament d'un homme énergique, déterminé et engagé.

J. Angus MacLean aurait laissé sa marque comme remarquable insulaire, même s'il n'avait pas réussi des exploits inégalés en politique, mais c'est vraiment comme homme politique qu'il a acquis sa réputation de grand homme et de grand Canadien. Élu une première fois aux élections partielles de 1951, aussi incroyable que cela peut sembler, il a été réélu neuf fois, la dernière fois au niveau fédéral, en 1974. M. MacLean a été nommé ministre des Pêches en 1957, poste qu'il a occupé jusqu'en 1963. Sa carrière en politique fédérale suscite beaucoup de respect dans tous les milieux, mais, personnellement, j'ai toujours cru que son coeur battait plus fort pour son coin de pays. Il a démissionné de la Chambre des communes en 1976 et, la même année, il a été désigné chef du Parti progressiste-conservateur de l'Île-du-Prince-Édouard. Il a été assermenté comme premier ministre de la province et président du Conseil exécutif le 3 mai 1979. M. MacLean a pris sa retraite comme premier ministre en 1981, mais il a continué de servir comme membre de l'assemblée législative pour le district de 4th Queens pendant encore un an.

J. Angus MacLean était réellement un homme spécial que je suis honorée d'avoir connu. Il est rare qu'une personne réussisse aussi bien dans autant de champs d'activité. C'était un héros de guerre, un politicien qui avait du succès - tant au niveau fédéral que provincial - et un grand homme. Il avait en plus le mérite de placer ses amis et ses proches au-dessus de tout.

À ce stade-ci, je voudrais offrir mes condoléances à son épouse, Gwen, et à ses enfants. L'Île-du-Prince-Édouard a perdu l'un de ses plus grands hommes d'État. Il va beaucoup nous manquer.

La défense nationale

Le Timor oriental-L'utilisation de mines terrestres

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, peut-être qu'en un sens, ce n'est pas le jour pour soulever cette question. Quoi qu'il en soit, nous avons appris cette semaine que des soldats canadiens au Timor oriental étaient équipés et le sont encore de mines terrestres antipersonnel télécommandées. Un porte-parole du ministère de la Défense nationale a confirmé qu'environ 100 mines terrestres Claymore avaient été envoyées aux troupes canadiennes en octobre de l'année dernière.

Le ministère de la Défense a précisé que ces types de mines Claymore, ces dispositifs à fragmentation antipersonnel sous contrôle intégral, sont exemptes du traité que le Canada a signé avec le reste du monde, car nos militaires doivent délibérément faire exploser ces mines lorsqu'ils ont identifié la cible. Les Forces canadiennes ont déclaré que ces mines terrestres ne frappaient pas de façon aveugle. Cependant, le ministère des Affaires étrangères inscrit les mines Claymore sur son site Web «Passage» comme des armes qui tuent sans discernement, à l'instar d'autres mines terrestres. Les États-Unis utilisent des mines terrestres Claymore avec des fils-pièges pour piéger l'ennemi, surtout dans des positions défensives.

Même s'il est vrai, honorables sénateurs, que ces mines Claymore ne sont pas visées par le traité, l'hypocrisie du ministre des Affaires étrangères et du gouvernement n'est que trop apparente.

Honorables sénateurs, en mai 1996, le Canada annonçait qu'il serait l'hôte d'une réunion internationale pour élaborer une stratégie tendant à parvenir à une interdiction totale de toutes les mines antipersonnel. Le Canada a adopté la loi interdisant les mines terrestres antipersonnel en novembre 1997. À l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-22, à l'autre endroit, le ministre a déclaré:

C'est la preuve que ces armes représentent un danger non seulement pour les gens vivant dans le voisinage de champs de mines, mais également pour nos casques bleus, où qu'ils soient dans le monde. Voilà pourquoi nos militaires et les Forces canadiennes ont joué un rôle actif au Cambodge et en Bosnie, par exemple, dans l'élimination des mines terrestres.

Le gouvernement a prétendu qu'il soutenait les principes du traité sur les mines terrestres lorsqu'il a détruit pratiquement tous les stocks des mines terrestres, plus d'un mois avant que la convention tendant à interdire ces mines ne soit prête à être ratifiée. Selon les documents du ministère des Affaires étrangères, le Canada a conservé un petit nombre de mines.

[...] uniquement à des fins de sensibilisation aux mines et d'entraînement au déminage, comme le prévoit le paragraphe 3(1) de la Convention.

Cependant, aujourd'hui, honorables sénateurs, il y a 100 mines terrestres canadiennes au Timor oriental. Nos forces armées sont actuellement déployées dans le cadre de 21 missions outre-mer dans les Balkans, au Moyen-Orient, en Asie et dans d'autres points chauds du monde. Les Canadiens ont le droit de savoir combien de nos mines terrestres sont impliquées dans ces opérations. Que ces mines soient utilisées dans le cadre d'une stratégie militaire ou non et que les gens puissent être en désaccord à ce sujet, il incombe au gouvernement à tout le moins d'informer le public canadien de ses véritables intentions et de lui présenter les faits.

Honorables sénateurs, si les militaires canadiens avaient été convenablement équipés pour des opérations de pacification, ils n'auraient pas eu besoin de mines Claymore. C'est le comble de l'hypocrisie, et j'espère qu'on y remédiera.


Visiteurs de marque

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, j'aimerais vous présenter des visiteurs de marque qui sont présents à la tribune. Ce sont des présidents d'assemblées législatives provinciales. Je vais les présenter dans l'ordre selon lequel leur province s'est jointe à la Confédération.

Nous avons tout d'abord l'honorable Murray Scott, président de l'Assemblée législative de la Nouvelle-Écosse.

Des voix: Bravo!

Son Honneur le Président: Nous avons ensuite l'honorable George Hickes, président de l'Assemblée législative du Manitoba.

Des voix: Bravo!

(1430)

Son Honneur le Président: Il y a ensuite l'honorable Anthony Whitford, président de l'Assemblée législative des Territoires du Nord-Ouest.

Deux autres honorables présidents d'assemblée législative provinciale étaient ici hier. Cependant, comme certaines affaires les réclamaient dans leur province respective, ils ne pouvaient malheureusement pas être des nôtres cet après-midi. Il s'agit de l'honorable Bev Harrison, présidente de l'Assemblée législative du Nouveau-Brunswick, et de l'honorable Ron Osika, président de l'Assemblée législative de la Saskatchewan. Je les ai reçus hier soir au nom de tous les honorables sénateurs. Ils étaient accompagnés de leurs greffiers, que nous avons accueillis eux aussi.

Je leur souhaite à tous la bienvenue au nom du Sénat du Canada.

Des voix: Bravo!


AFFAIRES COURANTES

L'autonomie gouvernementale des autochtones

Dépôt du rapport du comité sur l'étude

L'honorable Charlie Watt: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le troisième rapport du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, qui porte sur l'autonomie gouvernementale des autochtones et s'intitule: «Forger de nouvelles relations: L'autonomie gouvernementale des autochtones au Canada».

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons-nous ce rapport?

Le sénateur Watt: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)g) du Règlement, je propose que l'étude du rapport soit inscrite à l'ordre du jour de la séance d'aujourd'hui.

Son Honneur le Président: Permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(Sur la motion du sénateur Watt, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la séance d'aujourd'hui.)

Les données du recensement

Présentation de pétitions

L'honorable Lorna Milne: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer 59 pétitions adressées au Parlement du Canada de la part de citoyens du Canada et de citoyens des États-Unis et du Royaume-Uni qui demandent au Parlement d'adopter une loi permettant de préserver les données des recensements postérieurs à 1901, de les confier aux Archives nationales du Canada et de mettre ces données, de même que celles des recensements à venir, à la disposition du public après 92 ans, comme cela est actuellement conforme aux nombreuses dispositions de la Loi sur la protection des renseignements personnels et aux délais actuellement en vigueur. Ces pétitions regroupent 2 607 signatures.

PÉRIODE DES QUESTIONS

Les affaires étrangères

La guerre civile au Soudan-Demande de clarification de la politique diplomatique

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, compte tenu des observations qu'a faites le ministre Axworthy, hier, le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il m'informer au sujet de la politique du Canada à l'égard du Soudan?

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je remercie madame le sénateur de sa question. Le ministre a déclaré que diverses mesures seront mises en oeuvre pour prêter assistance au Soudan. En réponse au rapport Harker, il a annoncé un ensemble de nouvelles initiatives canadiennes. Le Canada appuiera la nouvelle visite, dans le sud du Soudan, du rapporteur spécial des Nations Unies et accordera une aide financière au comité sur l'éradication des enlèvements de femmes et d'enfants.

Le ministre a également déclaré qu'en avril, il tirera parti du fait que le Canada présidera le Conseil de sécurité des Nations Unies pour faire progresser les efforts de l'Autorité intergouvernementale pour le développement dans le processus de paix dans cette région.

En outre, le ministère des Affaires étrangères ouvrira un bureau à Khartoum, capitale du Soudan, afin de surveiller constamment et de plus près la situation.

Le sénateur Andreychuk: Honorables sénateurs, si j'en crois l'observation du ministre, il répond au rapport Harker. Ma question était la suivante: quelle est la position du Canada à l'égard du Soudan? Le gouvernement du Canada estime-t-il qu'il y a des violations flagrantes et persistantes des droits de la personne au Soudan? Dans l'affirmative, quelles mesures le Canada prendra-t-il?

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, le ministre s'est dit très préoccupé par les activités signalées dans ce pays. Quelques-unes des mesures dont j'ai parlé dans ma réponse précédente seront mises en oeuvre immédiatement. Le Canada continuera de s'intéresser constamment à la question. Le ministre continuera d'user de toute son autorité pour intervenir dans la situation qui règne dans ce pays, afin d'élaborer une réponse au rapport Harker et de réagir aux conditions qui existent en général dans le pays.

Les questions posées précédemment au Sénat portaient spécifiquement sur une société appelée Talisman Energy. En fait, la position du ministre, et celle du gouvernement, c'est que les mesures dont j'ai parlé seront appliquées et que le gouvernement surveillera constamment la situation là-bas.

Le sénateur Andreychuk: Honorables sénateurs, je sais, pour avoir suivi la question à la fin des années 80, que le Canada estimait qu'il y avait des violations des droits de l'homme graves et persistantes et qu'il fallait employer les moyens les plus efficaces et les plus énergiques pour ramener le Soudan à des pratiques acceptables. À l'époque, la Commission des droits de l'homme de l'ONU avait pris des mesures et les violations des droits de la personne avaient fait l'objet de condamnations bilatérales répétées. On examinait également, au même moment, des stratégies de rétablissement de la société civile.

La réponse du ministre me donne à penser que le recours à ces solutions n'est plus nécessaire au Soudan et qu'on se limite, pour l'instant, à établir des mécanismes de surveillance. Si c'est le cas, dans quel but le fait-on? Est-ce pour définir la position que nous devrions avoir à l'endroit du Soudan, ou croyons-nous honnêtement qu'en manifestant au Soudan notre intention d'avoir recours à des mécanismes de surveillance, ce pays modifiera ses pratiques?

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, le bilan de la guerre au Soudan est tout simplement horrible. Selon les notes que j'ai en ma possession, le conflit aurait fait près de deux millions de morts depuis 1983. C'est tout à fait inacceptable et déplorable. Plus de quatre millions de personnes ont été forcées de quitter leurs foyers. En fait, on trouve peu d'endroits dans le monde où la sécurité des gens soit plus précaire qu'au Soudan.

Le Canada a appuyé et continue d'appuyer énergiquement le processus de paix régional de l'Autorité intergouvernementale pour le développement. Selon nous, l'énoncé de principes de cet organisme est le seul moyen efficace pour instaurer une paix juste au Soudan. Le Canada continuera d'accorder son appui et le renforcera, en espérant que la présidence du Conseil de sécurité des Nations Unies nous donne un autre moyen de poursuivre notre objectif encore plus énergiquement que nous ne l'avons fait par le passé.

Le sénateur Andreychuk: Honorables sénateurs, le ministre a parlé des efforts passés. Je ne vois pas clairement quels sont les efforts déployés au Soudan depuis cinq ans, si nous n'avons recours qu'aujourd'hui à des mesures de surveillance et si nous n'entendons exercer qu'à compter de maintenant notre volonté politique au sein du Conseil de sécurité. Ce ne sont pourtant pas là des questions nouvelles.

La guerre civile au Soudan-Le rôle de la société Talisman Energy Inc.

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, le vice-président de la société Talisman a déclaré que sa société réfute l'affirmation voulant que Talisman contribue aux problèmes au Soudan.

La position du gouvernement est-elle que Talisman n'a pas contribué aux problèmes au Soudan?

(1440)

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, comme le sait l'honorable sénateur, le ministre des Affaires étrangères a rencontré des dirigeants de Talisman en novembre. La compagnie a reconnu qu'elle avait la responsabilité d'apporter une contribution positive au Soudan, y compris en ce qui concerne le respect des droits de la personne.

La position du gouvernement est que nous nous attendons à ce que Talisman prenne au sérieux les engagements qu'elle a pris auprès du ministre des Affaires étrangères et nous continuons de chercher des moyens plus efficaces - j'en ai mentionné plusieurs tout à l'heure - pour faire pression sur ce pays et obtenir les résultats recherchés.

La guerre civile au Soudan-Les violations des droits de la personne

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, le gouvernement actuel appuie-t-il ou non la résolution 1503 de l'Assemblée générale?

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je n'ai pas le texte de la résolution sous les yeux, mais je peux certainement le trouver et répondre rapidement à cette question. Je suppose que nous l'appuyons en général.

Le sénateur Kinsella: Comme l'honorable sénateur s'en apercevra, la résolution 1503 porte précisément sur les violations flagrantes et continues des droits de la personne et énonce les mesures à prendre par tous les États membres des Nations Unies, mesures dont ils ont convenu. La question posée par mon honorable collègue, le sénateur Andreychuk, nous met au défi de revoir notre position et de déterminer si toutes les mesures ont bien été prises pour mettre en oeuvre la résolution. Le ministre n'en convient-il pas?

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, je conviens - et je suppose que le ministre en convient également - que nous devons sans cesse revoir notre position à l'égard du Soudan ainsi que nos activités dans ce pays. Le Canada doit faire tout en son pouvoir pour mettre fin à l'horrible guerre civile qui ravage ce pays et aux terribles conséquences qu'elle entraîne.

La défense nationale

Le Timor oriental-L'utilisation des mines terrestres

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, je veux revenir sur la question des mines Claymore et du conflit grandissant entre le ministre des Affaires étrangères et le ministre de la Défense nationale. D'une part, le ministre de la Défense nationale affirme que les forces armées vont conserver des mines Claymore au Timor oriental et ailleurs où elles seront déployées. D'autre part, le ministre des Affaires étrangères a lancé une enquête en manifestant toute son indignation à ce sujet.

Ne sont-ils pas membres du même groupe parlementaire? Ils ne rendent pas service aux Forces canadiennes en laissant planer sur le dossier cette aura de secret et de possible faute. Les membres du gouvernement parlent-ils d'une même voix en ce qui concerne les mines Claymore? Si oui, quel ministre a raison et lequel a tort?

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, la présence des mines terrestres partout dans le monde, et surtout dans le tiers monde, a toujours représenté un risque terrible et pas seulement pour les combattants. Le problème qui persiste, c'est la menace constante qu'elles représentent et les blessures qu'elles causent aux non-combattants - c'est-à-dire les femmes, les enfants et les autres civils - même longtemps après la fin des conflits.

Le traité sur les mines terrestres visait à corriger la situation où des mines restaient sur un théâtre de guerre longtemps après la fin du conflit ou même durant le conflit, car ces mines frappent sans discrimination. Je ne suis pas un expert en la matière, mais ces mines peuvent exploser n'importe quand. Les efforts pour mettre fin à ce danger ont donné lieu au traité sur les mines terrestres.

Honorables sénateurs, il faut faire une distinction. Si le ministre affirme que les armes défensives en question ne contreviennent pas à l'accord, c'est qu'un opérateur doit volontairement les faire exploser. En l'espèce, les forces armées disposent d'armes qui tuent, et c'est regrettable.

Le ministre de la Défense nationale a précisé que les mines terrestres en question sont des mines que les forces armées vont employer à titre d'armes défensives et qu'elles vont faire exploser à l'intention d'un ennemi en particulier, un peu comme les forces armées emploient les autres armes contre un ennemi. Dans une telle situation, il n'est pas question de blesser ou de massacrer sans discernement des civils. C'est ce que je comprends.

Le sénateur Stratton: À quel moment une mine terrestre n'est-elle pas une mine terrestre?

Le sénateur Forrestall: Honorables sénateurs, je remercie le ministre de son discours, mais j'aimerais qu'il réponde à ma question.

Le sénateur Di Nino: Bonne chance!

Le sénateur Forrestall: Permettez-moi de poser ma question le plus simplement possible, honorables sénateurs. Si le gouvernement du Canada a une position au sujet des mines Claymore, quelle est-elle?

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, le gouvernement du Canada a pris position en signant le traité sur les mines terrestres. La position du gouvernement ne saurait être plus claire. En signant ce traité, le gouvernement fédéral s'est engagé à en respecter les dispositions, et c'est ce qu'il fait. Que je sache, il n'y a eu aucune allégation selon laquelle le gouvernement aurait enfreint le traité.

Le sénateur Lynch-Staunton: Il y a eu atteinte à l'esprit du traité!

Le sénateur Boudreau: Il ne s'agit pas d'une distinction sans importance, d'une distinction banale.

Le sénateur Forrestall: Nous parlons d'une confrontation publique entre les ministres Axworthy et Eggleton.

Le sénateur Boudreau: Ce dont il est question, c'est des risques auxquels était exposée la population civile non combattante longtemps après le retrait des combattants du terrain. C'est bien différent de ce dont il est question quand nous discutons de cette arme particulière.

Le ministre des Affaires étrangères s'inquiète de la présence de mines, quelles qu'elles soient, et je suis certain qu'il poursuivra son travail afin d'éliminer toutes ces armes, comme il se doit.

Le sénateur Forrestall: De quel côté se range le leader du gouvernement, honorables sénateurs? Se range-t-il dans le camp du ministre Eggleton ou dans celui du ministre Axworthy? Il ne peut pas être dans les deux camps, même si c'est ce qu'il tente de faire actuellement. Je lui conseille de demander à ceux qui sont responsables de le renseigner d'examiner cette question ce soir et de lui remettre des notes afin que nous puissions tirer cette question au clair, d'une façon ou d'une autre, demain. Je présume que les ministre Eggleton et Axworthy ont fait partie du même comité du Cabinet qui a approuvé l'utilisation de mines par le personnel des Forces armées canadiennes dans le cadre d'opérations de maintien de la paix.

Quelle est la position du leader? Dans quel camp se range-t-il?

Le sénateur Boudreau: Je suppose que le sénateur ne sera pas choqué d'apprendre que j'appuie les deux ministres.

Le sénateur Lynch-Staunton: Peu importe ce qu'ils pensent?

Le sénateur Boudreau: Cela n'a rien d'incompatible.

Le sénateur Di Nino: Pourquoi ne sommes-nous pas surpris?

Le sénateur Boudreau: Le ministre de la Défense nationale a l'obligation - que j'appuie - de respecter les termes d'un traité que le Canada a non seulement signé, mais qu'il a poussé à voir le jour pour constituer un monument remarquable. Je suis pour que le Canada continue de respecter ce traité. Je le répète: personne ne nous accuse de ne pas respecter le traité.

Je suis persuadé que le ministre des Affaires étrangères voudrait voir interdire toutes sortes d'armes, et je suis d'accord avec lui. Je voudrais au bout du compte que tout le monde interdise toutes les armes militaires. Ce n'est pas pour demain, mais c'est certes ce que je souhaite. J'espère que même les hélicoptères militaires seront un jour interdits.

Des voix: C'est une honte!

Le sénateur Di Nino: Lorsqu'on n'en a pas, on ne peut pas les interdire.

Le sénateur Boudreau: Je dis au sénateur que je ne crois pas que les positions des ministres soient contradictoires.

Le sénateur Forrestall: Vraiment?

Le sénateur Lynch-Staunton: C'est là une interprétation de libéraux.

Le sénateur Forrestall: Une magnifique interprétation de libéraux, en effet!

(1450)

La citation du sergent Mike Kipling devant la cour martiale

L'honorable Norman K. Atkins: Honorables sénateurs, j'ai une question à poser au leader du gouvernement au Sénat. Je comprends qu'on puisse vouloir donner des injections aux militaires canadiens pour les protéger des armes biologiques, mais je n'arrive pas à voir pourquoi, maintenant que le sergent Mike Kipling a quitté les Forces canadiennes et mis fin à sa carrière, les militaires le poursuivent toujours en cour martiale. Ces poursuites sont maintenues même s'il est clair que l'inoculation du personnel des Forces armées ne s'est pas faite comme il se doit, que les vaccins étaient périmés et qu'ils ont été administrés en dépit de conseils juridiques et médicaux défavorables.

Le leader du gouvernement peut-il expliquer au Sénat la position du gouvernement sur ces poursuites en cour martiale et dire comment elles servent une vraie justice militaire?

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je comprends que le sénateur s'inquiète et soulève la question au Sénat. Cependant, j'hésite à commenter l'affaire en détail, car les tribunaux en sont saisis. C'est la justice militaire, mais ce sont tout de même des procédures judiciaires. Tous les arguments qu'on peut invoquer seront sans doute utilisés dans l'intérêt du prévenu, et la question se réglera selon les procédures de la justice militaire. Je répugne à m'ingérer dans cette affaire et même à la commenter.

Le sénateur Atkins: Étant donné que le sergent Kipling a reçu une libération honorable, pourquoi fait-il toujours l'objet de poursuites en cour martiale? La cause ne devrait-elle pas être entendue par les tribunaux civils?

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, je ne peux répondre à la question. On peut présumer que, s'il y a eu erreur de juridiction et de procédure, l'avocat compétent du sergent Kipling élèvera des objections qui seront retenues. J'hésite à commenter.

Les affaires étrangères

La Chine-La détention d'un archevêque catholique

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, sommes-nous tous conscients qu'il se tient un débat au Sénat au sujet de la liberté de religion et des violations des droits de la personne en Chine? Certains de nos collègues sont d'avis que la liberté de religion n'est pas vraiment un problème dans cette région du monde.

Étant donné que le Canada soutient qu'il est un grand ami de la Chine, le leader du gouvernement pourrait-il nous parler de la position du gouvernement sur l'emprisonnement récent d'un archevêque catholique chinois par le gouvernement de Beijing pour avoir refusé de renoncer à sa loyauté envers le pape et de devenir un humble mouton de l'Église catholique approuvée par l'État?

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je ne suis pas en mesure de vous dire en ce moment quelle est la position du gouvernement. Cependant, je prends note de la question, je vais tenter d'obtenir l'information et je communiquerai la réponse au sénateur dès que possible. Pour ma part, je suis toujours favorable à la fidélité au pape.

Le sénateur Di Nino: En tant que bon catholique, évidemment.

Demande de clarification de la politique des droits de la personne dans les petits pays par rapport aux grands pays

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, par la même occasion, le ministre pourrait-il se renseigner sur la position du gouvernement relativement à la politique officielle de la Chine en vertu de laquelle il n'y a que cinq religions autorisées en Chine, qui ne comprennent pas le judaïsme, entre autres?

Le gouvernement ne convient-il pas que son programme relatif à la sécurité humaine et aux droits de la personne comprend tous les pays, y compris la Chine, et qu'il ne se limite pas aux petits pays?

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, il est clair que, pour avoir un sens, le programme doit comprendre tous les pays.

Quant à la position sur les cinq religions reconnues, on ne m'a pas communiqué de réponse officielle. Toutefois, je ne peux croire que le gouvernement du Canada approuverait une situation où la pratique libre d'une religion, comme le judaïsme selon l'exemple donné par le sénateur, ne serait pas autorisée. En pareil cas, je ne doute pas que le gouvernement considérerait qu'il n'y a pas vraiment de liberté de religion dans le pays en cause.

Le sénateur Di Nino: Le ministre pourrait-il répondre également à la question de savoir si le programme des droits de la personne se limite aux petits pays? Le programme comprend-il la Chine également?

Le sénateur Boudreau: Je crois que tous les principes en matière de droits de la personne devraient s'appliquer à tous les pays. Cependant, s'il est possible d'obtenir une réponse plus précise pour l'honorable sénateur, je le ferai.

La Chine-La détention d'un archevêque catholique

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, ma question est complémentaire à celle du sénateur Di Nino. En s'informant, le ministre pourrait-il demander à son collègue, le ministre des Affaires étrangères, s'il peut prier l'ambassadeur de Chine au Canada d'intervenir pour réclamer la liberté de l'archevêque Yang, le prélat de l'Église catholique romaine âgé de 80 ans qui a été arrêté à Fuzhou hier par la police?

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je présenterai certainement cette requête au ministre.

Le développement des ressources humaines

Les programmes de création d'emplois-La possibilité d'une mauvaise gestion des fonds-La répartition des subventions

L'honorable Marjory LeBreton: Honorables sénateurs, jeudi dernier, le leader du gouvernement au Sénat, en répondant à une question posée par le sénateur Angus, a déclaré que les circonscriptions de l'opposition avaient reçu plus de subventions et de versements du Fonds transitoire pour la création d'emplois que les circonscriptions libérales. Il a déclaré que 568 des 1 083 projets approuvés, soit plus de la moitié, étaient dans des circonscriptions de l'opposition.

Puisqu'il doit de toute évidence avoir une liste détaillée de ces projets et des paiements qui ont été faits, le leader du gouvernement voudrait-il déposer au Sénat une liste des subventions ventilées par circonscription de députés ministériels et de députés de l'opposition?

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, cette question a été soulevée par un autre honorable sénateur lors de la dernière période des questions. J'avais alors fait savoir que je déposerais l'information que j'avais en ma possession. Il est clair que je n'administre pas le ministère. L'information dont je dispose est très succincte. J'ai reporté son dépôt parce que je croyais qu'une réponse plus complète que celle que j'ai en ma possession était dans l'ordre des choses. Je crois qu'une telle réponse viendra bientôt, mais je ne l'ai pas avec moi aujourd'hui.

Le sénateur LeBreton: Honorables sénateurs, en plus de la liste détaillée des circonscriptions, et compte tenu du fait que toutes les circonscriptions du Canada atlantique, à l'exception d'une seule, étaient détenues par des députés ministériels avant les élections de 1997, le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il aussi présenter une liste des subventions par date, plus précisément en donnant le mois et l'année de l'approbation du versement des fonds?

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, tous les renseignements que je fournirai seront les plus complets possible. Comme je l'ai dit, étant donné que je n'ai pas ces renseignements entre les mains, je n'en connais pas exactement la forme, mais je fournirai certainement les renseignements les plus complets possible.

Le Fonds transitoire pour la création d'emplois-Le taux de chômage nécessaire pour être admissible

L'honorable Ron Ghitter: Honorables sénateurs, le leader du gouvernement au Sénat pourrait-il nous dire quel doit être le taux de chômage dans une région pour qu'on soit admissible à une subvention du Fonds transitoire pour la création d'emplois de DRHC?

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, si ma mémoire m'est fidèle, et on me corrigera si je me trompe, je crois que, à l'origine, le taux de chômage nécessaire était de 12 p. 100. Il a ensuite été ramené à 10 p. 100 parce que le taux de chômage général pour l'ensemble du pays avait baissé, comme nous sommes tous heureux de le reconnaître.

Une voix: Grâce au programme de création d'emplois?

Le sénateur Boudreau: Oui, une des raisons de cette baisse du chômage pourrait bien être le programme de création d'emplois.

Ce sont les chiffres que je peux donner de mémoire, et j'espère qu'ils sont justes.

Le sénateur Ghitter: Honorables sénateurs, le programme n'est peut-être plus nécessaire parce que le chômage n'est plus un problème au Canada, comme nous l'entendons souvent. Toutefois, le leader du gouvernement au Sénat peut-il nous expliquer la théorie des poches de chômage relativement à l'octroi des subventions de DRHC?

Le sénateur Lynch-Staunton: Tout va dans la poche du ministre.

Le sénateur Boudreau: Premièrement, je tiens à dire le plus clairement possible que je ne suis pas d'accord avec le sénateur pour dire que le programme n'est plus nécessaire, que nous avons vaincu le chômage dans tout le pays et que nous n'avons plus à nous en préoccuper. Il y a des régions de notre pays où le chômage demeure un problème grave, dont celle où je suis né et où j'ai grandi. Je m'oppose donc vigoureusement à la remarque qu'a faite le sénateur.

(1500)

Quel que soit le taux de chômage général, si une personne est sans emploi, le taux de chômage pour cette personne est de 100 p. 100.

Le sénateur Ghitter: Répondez à la question!

Le sénateur Boudreau: Dans ces circonstances, il y a un point très important à soulever. C'est probablement un point sur lequel le sénateur et moi-même sommes en profond désaccord. Toutefois, je veux quand même soulever ce point.

En réponse à la question sur les poches de chômage, il arrive que, même si le taux de chômage général est acceptable, il existe des poches de chômage élevé dans certaines régions examinées par DRHC sur la base des statistiques sur le chômage, parfois en raison de l'étendue géographique de ces régions. Si je comprends bien, le programme peut s'appliquer dans ces cas.

Le Fonds transitoire pour la création d'emplois-Le taux de chômage nécessaire à Edmonton-Ouest pour être admissible

L'honorable Ron Ghitter: En 1997 et en 1998, est-ce que la ville d'Edmonton et la circonscription d'Edmonton-Ouest appartenaient à cette catégorie?

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je ne puis répondre sur-le-champ à la question. Je pourrai faire une recherche et me renseigner sur les critères retenus et sur la détermination d'une poche à l'intérieur d'une région donnée de DRHC.

Le sénateur Ghitter: Se peut-il qu'un endroit soit une poche pour l'octroi des subventions quand c'est avantageux pour un ministre dans sa circonscription avant la tenue d'une élection, comme dans le cas d'Edmonton-Ouest? Avant les élections de 1997, trois subventions ont été accordées à une région où le chômage était bien en deçà des seuils que le leader a mentionnés. Se pourrait-il que le ministre ait eu quelque influence sur la politique en vigueur, à l'occasion d'une élection très serrée, pour susciter un peu plus d'intérêt et d'appui en sa faveur dans la circonscription? Pourrait-on en venir à cette conclusion en prenant connaissance de ces chiffres?

Le sénateur Lynch-Staunton: Oui ou non?

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, bien entendu, je ne suis pas au courant de la subvention donnée. Il existe environ 30 000 dossiers et je ne les connais pas tous.

Le sénateur Meighen: Bien entendu, vous êtes occupé en Nouvelle-Écosse!

Le sénateur Boudreau: Je ne peux pas me prononcer sur chacune des subventions. Il y a 30 000 dossiers environ. Je ne les connais pas tous. Selon les chiffres de DRHC concernant le Fonds transitoire pour la création d'emplois, plus de la moitié de ces subventions sont allées à des circonscriptions de l'opposition. Je suis persuadé que certaines d'entre elles sont allées à des circonscriptions représentées par des ministériels, voire par des ministres.

Toutefois, même dans des régions où le taux d'emploi est relativement faible, comme dans le cas d'Edmonton ou de Winnipeg, il y a sans doute au sein de la communauté autochtone des poches qui connaissent des taux de chômage incroyablement élevés. Il se peut qu'une de ces subventions ait été accordée à ce groupe au titre de subvention destinée au développement autochtone. Je ne sais pas. Je dirais qu'on ne peut pas conclure dans le sens de l'honorable sénateur.

Le sénateur Ghitter: C'est une observation intéressante, honorables sénateurs, compte tenu du fait que, à Winnipeg-Nord, je crois, où l'on trouve une vaste population autochtone et un taux élevé de chômage, aucune subvention n'a été accordée. Je me demande si la situation aurait été la même si le ministre Axworthy avait été le représentant de cette région.

Les programmes de création d'emplois-La possibilité d'une mauvaise gestion des fonds-La subvention au promoteur de l'entrepôt de Wal-Mart

L'honorable Ron. Ghitter: Honorables sénateurs, on a annoncé ce matin que le résultat net de Wal-Mart au quatrième trimestre de l'an dernier s'établissait à 1,92 milliard de dollars. À mon avis, un promoteur immobilier comptant Wal-Mart comme locataire possible n'aurait pas de difficulté à obtenir de l'argent de la banque pour effectuer cet aménagement pour cette entreprise.

Le leader du gouvernement aurait-il l'obligeance d'indiquer comment on peut justifier que le gouvernement accorde une subvention de 500 000 $ à un promoteur immobilier canadien prospère afin qu'il situe un entrepôt dans une région particulière, compte tenu du fait que n'importe quel montant d'argent pourrait être réuni avec l'engagement de Wal-Mart, sur la base de ses bénéfices et du caractère désirable de son engagement?

Une voix: C'est une honte!

L'honorable J. Bernard Boudreau (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, à mon avis, il est assez facile de répondre à cette question. Peut-être est-ce parce que je viens de la Nouvelle-Écosse. Toutefois, dans le passé, les gouvernements de toute allégeance politique qui ont eu l'occasion de prendre le pouvoir en Nouvelle-Écosse, c'est-à-dire deux, ont fait face à des critiques précisément de cette nature. Des subventions sont accordées à Sobey's, Michelin, Wal-Mart ou autres pour créer des emplois. C'est là le but, car, autrement, il n'y aurait pas de création d'emplois dans cette région. Cette situation se produit tout le temps.

Le sénateur Lynch-Staunton: Ce sont des prêts et non des subventions.

Le sénateur Boudreau: Personnellement, je me sens mieux. Si le gouvernement donne une subvention à une entreprise sans scrupule qui déclare faillite, la critique suivante se fait entendre: pourquoi traitez-vous avec une entreprise semblable? Pourquoi ne faites-vous pas affaire avec une entreprise responsable qui a un bon dossier et de l'étoffe? Si vous accordez la subvention à quelqu'un qui est susceptible d'utiliser l'argent pour créer des emplois et qui a de l'étoffe, vous vous faites aussi critiquer par ceux d'en face.

Si des entreprises comme Wal-Mart, J.D. Irving, Michelin ou autre étaient disposées à créer des emplois dans des régions qui présentent un taux élevé de chômage et où elles n'auraient pas créé des emplois autrement, c'est tant mieux. Ce n'est peut-être pas un aussi grand besoin au centre-ville de Toronto, mais la situation est différente dans de nombreuses régions du pays. Je suis plus enclin à donner à ces entreprises plutôt qu'à quelque entreprise sans scrupule dont je n'ai jamais entendu parler.

Le sénateur Ghitter: Honorables sénateurs, le leader du gouvernement vient en fait de donner les raisons pour lesquelles ces subventions devraient être abandonnées. Laisser entendre qu'on doit donner de l'argent aux Wal-Mart, aux Sobey's, aux Vidéotron et aux Bombardier du monde est inapproprié. Si la pratique commerciale fonctionne, laissons-les faire. Ils n'ont pas besoin de bourses du gouvernement pour réussir. C'est là que nos opinions divergent quant à ce que sont ces subventions.

Je dirais qu'il ne faut pas donner d'argent à ces compagnies. Si c'est un projet rentable, elles le réaliseront quand même. Je me souviens d'une subvention publique de 200 000 $ pour ouvrir un tube broyeur à Brooks, en Alberta. Cela n'a pas fonctionné, car il n'y avait pas de travail. Le tube broyeur a fermé. On ne peut pas, de façon artificielle, avec une mesure de rapiéçage, arriver avec ces programmes et laisser entendre qu'on crée des emplois. Si le projet est rentable, il réussira. Vous n'avez pas besoin de l'argent du gouvernement. Wal-Mart, avec son bénéfice net de 1,9 milliard de dollars, ne fait pas de peine au gouvernement du Canada. Sa cote de solvabilité est meilleure que celle du gouvernement du Canada.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, j'aimerais vous rappeler que la période des questions n'est pas une période de débat. Nous passons aux réponses différées à des questions orales.

L'honorable Dan Hays (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, nous aimerions demander la permission de prolonger la période des questions afin de donner l'occasion au leader du gouvernement de répondre à la question.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, la permission est-elle accordée de prolonger la période des questions afin de permettre au leader du gouvernement de répondre?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Lynch-Staunton: Prenez votre temps.

Le sénateur Boudreau: Honorables sénateurs, je le répète, je crois que l'honorable sénateur a relevé le niveau du débat sur cette question. Nous ne sommes pas d'accord là-dessus. Je respecte son opinion. Je respecte sa position. Je ne suis toutefois pas d'accord avec lui. Je pourrais lui donner de nombreux exemples illustrant que l'intervention du gouvernement, au moment opportun, et dans des proportions raisonnables, a eu pour effet de créer de nombreux emplois permanents et à long terme. Michelin emploie des milliers de Néo-Écossais. C'est maintenant le plus gros exportateur de la province en termes de valeur. Sans l'intervention du gouvernement, la compagnie Michelin ne serait pas là. Elle est présente dans ma province depuis des décennies.

Je ne peux pas m'empêcher de dire à l'honorable sénateur que lorsque le leader de son parti s'est rendu à Halifax, le week-end dernier, je ne me souviens pas qu'il ait soulevé la moindre objection en ce qui concerne les programmes de création d'emplois du genre dont nous parlons et auxquels ont souscrit tous les gouvernements qui se sont succédé dans notre pays, y compris les gouvernements conservateurs.

Des voix: Bravo!


Le programme d'échange de pages avec la Chambre des communes

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, j'aimerais présenter le page de la Chambre des communes qui passera la semaine avec nous. Christie Meadows étudie les sciences politiques à la faculté de gestion et des affaires publiques de l'Université Carleton. Christie est originaire de Labrador City, à Terre-Neuve et Labrador.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat. J'espère que vous trouverez votre semaine parmi nous intéressante et éducative.

La Loi sur le casier judiciaire

Projet de loi modificatif-Message de la Chambre des communes

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, nous avons reçu un message des Communes informant le Sénat qu'elles ont adopté sans amendement les amendements apportés par ce dernier au projet de loi C-7, Loi modifiant la Loi sur le casier judiciaire et une autre loi en conséquence.
(1510)

ORDRE DU JOUR

Projet de loi facilitant la prise de certaines décisions médicales

Deuxième lecture-Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Carstairs, appuyée par l'honorable sénateur Pépin, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-2, Loi facilitant la prise de décisions médicales légitimes relativement aux traitements de survie et au traitement de la douleur.-(L'honorable sénateur Lavoie-Roux).

L'honorable Mabel M. DeWare: Honorables sénateurs, je voudrais prendre part aujourd'hui au débat à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi S-2, Loi facilitant la prise de décisions médicales légitimes relativement aux traitements de survie et au traitement de la douleur, présenté par notre collègue, le sénateur Sharon Carstairs.

Comme nous le savons tous, une autre de nos collègues, le sénateur Thérèse Lavoie-Roux, s'intéresse également et vivement aux questions de santé. Elle s'y est intéressée tout au long de sa carrière et continue à le faire dans cette enceinte. Il convient de signaler que le sénateur Lavoie-Roux a coprésidé le comité sénatorial spécial sur l'euthanasie et l'aide au suicide, auquel j'ai moi-même collaboré. En avril 1999, elle a présenté le projet de loi S-29, visant la protection des patients et des soignants, le prédécesseur de l'actuel projet de loi S-2. Le projet de loi S-29 a franchi l'étape de la deuxième lecture et a été renvoyé au comité avant la prorogation des travaux parlementaires.

Honorables sénateurs, pour ces raisons, le sénateur Lavoie-Roux souhaitait intervenir pour nous parler de cette initiative avant son renvoi au comité. Malheureusement, il lui est impossible d'être des nôtres aujourd'hui. Elle m'a cependant exposé ses idées et ses sujets de préoccupation sur le projet de loi S-2, me chargeant de vous les transmettre avec mes propres observations.

Madame le sénateur Lavoie-Roux s'inquiète des pressions publiques croissantes en faveur de la légalisation de l'euthanasie et de l'aide au suicide. Elle accorde - comme nous tous, j'en suis sûre - une très grande importance au rôle qui est celui du Parlement de clarifier les ambiguïtés de la loi qui risquent de prêter à de fausses interprétations. Les témoins qui ont comparu devant le comité sénatorial spécial sur l'euthanasie et l'aide au suicide en 1993 et en 1994, ont fait remarquer qu'il existait une confusion au sujet du statut juridique de l'abstention ou de l'interruption d'un traitement de survie. Cela a alarmé le comité et nous avons recommandé que la loi soit clarifiée, tout comme la Commission de réforme du droit l'avait fait dans son rapport de 1983.

La nécessité de faire preuve de prudence et de veiller à ce qu'il y ait des sauvegardes afin de protéger le caractère sacré de la vie est d'une importance essentielle. Où tirer un trait, ce n'est pas clair, et c'est ce que le projet de loi S-2 tente d'éclaircir.

Le projet de loi S-29 avait essayé de le faire. Il faisait suite aux recommandations de la Commission de réforme du droit du Canada dans son rapport intitulé: «Euthanasie, aide au suicide et interruption de traitement», ainsi que du comité sénatorial spécial sur l'euthanasie et l'aide au suicide dans son rapport intitulé: «De la vie et de la mort». Le sénateur Lavoie-Roux m'a dit toutefois qu'on lui avait dit depuis que la nécessité d'une telle mesure législative était discutable. Si l'on s'interroge là-dessus, c'est à cause des changements dans les pratiques médicales actuelles au Canada, comme l'introduction de programmes agréés de formation aux soins palliatifs, et du fait que la loi en vigueur ne prévoit pas l'immunité pour les soignants qui commettent des fautes.

Il existe aussi une forte opposition à la légalisation de l'euthanasie et de l'aide au suicide qui reflète le souci de veiller à ce que la loi canadienne protège les patients vulnérables. Il est donc important que tout projet de loi concernant l'interruption de traitement ne comporte aucune ambiguïté pouvant ouvrir la porte à l'euthanasie ou à l'aide au suicide. Tant que la loi sera ambiguë, notamment dans l'esprit des soignants, la vie de Canadiens sera menacée.

Tout d'abord, je tiens à préciser que madame le sénateur Lavoie-Roux reconnaît les bonnes intentions dont s'inspire le projet de loi S-2 et l'esprit dans lequel il a été présenté. Toutefois, elle croit qu'il risque de ne pas atteindre l'objectif visé, à savoir protéger les soignants qui cherchent à satisfaire les désirs de leurs patients. Le sénateur tient à ce que nous nous assurions que ce projet de loi ne nous conduira pas sur la pente glissante de l'euthanasie, comme aux Pays-Bas.

Le sénateur Lavoix-Roux craint également beaucoup que le projet de loi S-2 ne comporte pas suffisamment de sauvegardes contre ce danger. Par exemple, les représentants des Médecins du Canada pour le respect de la vie lui ont dit que le projet de loi S-2 pourrait:

[...] affaiblir les mécanismes actuels qui protègent les patients vulnérables, comme les personnes âgées, les handicapés ou les personnes frappées d'incapacité.

Bien entendu, nous savons tous que ce n'est pas là le but du projet de loi.

Honorables sénateurs, je voudrais également vous faire part de préoccupations de première importance au sujet du projet de loi S-2. La première concerne ce qui nous paraît être une omission majeure. Le projet de loi ne fait pas mention de l'obligation d'obtenir le consentement du patient, ou de son représentant, relativement à l'administration de médicaments contre la douleur. En dépit du fait que l'administration de ce type de médicament puisse accidentellement abréger la vie du patient, l'article 2 du projet de loi stipule:

Le soignant n'est pas coupable d'une infraction prévue par le Code criminel du seul fait qu'il administre au patient, afin de soulager ses souffrances physiques - et non pour lui causer la mort -, des médicaments en doses susceptibles d'abréger sa vie.

Le projet de loi ne mentionne pas l'obligation d'obtenir le consentement du patient ou de son représentant avant de lui administrer le médicament. L'obligation d'obtenir le consentement libre et éclairé assure une protection supplémentaire au patient. Le fait d'administrer à un patient, sans son consentement, un médicament pouvant abréger sa vie est un acte d'euthanasie. C'est pourquoi le sénateur Lavoie-Roux craint que le projet de loi n'ouvre la porte à la légalisation de l'euthanasie au Canada. Madame le sénateur nous rappelle également que le comité sénatorial spécial sur l'euthanasie et l'aide au suicide, dont nous faisions partie, n'était certes pas favorable à l'idée d'administrer à un patient, sans son consentement, des médicaments contre la douleur.

À cet égard, je dois évidemment reconnaître qu'il y a des cas où les médecins ne peuvent pas obtenir le consentement du patient et doivent agir selon leur propre jugement.

Le projet de loi S-2 constitue une mesure législative distincte, plutôt qu'une modification au Code criminel, même s'il traite d'immunité contre des sanctions pénales. Selon la pratique légale privilégiée, on modifierait tout simplement le Code criminel. Il semble qu'on ait choisi de présenter une mesure législative distincte pour y insérer un préambule comprenant certaines recommandations formulées dans le rapport «De la vie et de la mort». Cependant, il n'est peut-être pas indiqué d'insérer dans une mesure législative une recommandation vieille de cinq ans, formulée par un sous-comité du Sénat.

Comme le sénateur Carstairs l'a souligné un jour, il n'est pas conforme à la pratique légale d'insérer un préambule dans une mesure législative. S'il y a lieu de présenter un contexte, la rédaction d'un sommaire constitue la pratique habituelle. En outre, les dispositions du projet de loi devraient être suffisamment claires pour permettre au lecteur d'en comprendre l'objet.

Lorsqu'on a demandé à madame le sénateur Carstairs pourquoi elle avait présenté un projet de loi qui modifierait le Code criminel, au lieu de le présenter tout simplement comme un projet de loi modificatif, elle a souligné qu'il était difficile d'incorporer des lignes directrices nationales, des normes de sensibilisation et des pratiques de recherche dans une mesure législative de ce genre. Certes, nous pouvons tous féliciter le sénateur Carstairs de son désir de favoriser la sensibilisation de la population aux soins palliatifs, de préconiser une formation améliorée des professionnels de la santé dans ce domaine et d'encourager la recherche en matière d'évaluation.

Lorsque madame le sénateur Losier-Cool a parlé du projet de loi S-2, elle a souligné l'importance d'améliorer l'accessibilité des services de soins palliatifs de qualité à l'échelle du Canada. Je crois moi aussi beaucoup aux services de soins palliatifs. Je souscris entièrement à l'idée de réexaminer, par exemple, la façon dont les gens sont soignés à la fin de leur vie et les mesures à prendre pour aider ceux qui s'occupent d'eux, que ce soit dans les hôpitaux, dans les établissements de soins de longue durée ou à domicile. La meilleure façon de contrer les pressions publiques en faveur de l'euthanasie n'est-elle pas de fournir des solutions de rechange acceptables, c'est-à-dire des soins palliatifs de bonne qualité et accessibles?

La question des soins palliatifs et de leur signification est très importante, et c'est une question à laquelle le projet de loi S-2 tente d'apporter une réponse. Je ne suis toutefois pas certaine que ce projet de loi soit bien indiqué pour mettre en oeuvre des dispositions concernant la sensibilisation de la population ainsi que la formation et la recherche en matière de soins palliatifs. Il vise à fournir une protection pénale. La réforme des soins palliatifs est une question complètement distincte, mais c'est une question qu'il nous faut toutefois examiner.

Honorables sénateurs, les dispositions du projet de loi qui concernent les instructions préalables et les décisions prises par un mandataire pourraient aussi poser des problèmes. Les lois concernant les instructions préalables et les «testaments biologiques», ainsi que la désignation de mandataires chargés de prendre les décisions, relèvent de la compétence des provinces. Je ne vois pas la nécessité de décrire les étapes à suivre pour désigner les mandataires, comme le fait le projet de loi S-2, et de risquer ainsi d'empiéter sur les compétences provinciales. Le projet de loi pourrait plutôt exiger que les lois provinciales soient respectées et que le processus d'obtention du consentement ou de présentation d'une demande concernant des décisions en matière de soins de santé s'en inspire, comme le projet de loi S-29 le mentionnait.

(1520)

Comme nous le savons, quand vient le temps d'adopter des lois portant sur les soins de santé, l'un des plus grands défis consiste à établir un lien entre deux domaines bien différents, soit le droit et la médecine. La communauté médicale répugne tout naturellement à préciser dans une mesure législative que certains médicaments contre la douleur pourraient écourter la vie d'une personne. La plupart des experts maintiennent que s'ils sont administrés convenablement, les tranquillisants ne causent pas la mort. Comme nous l'avons vu avec le projet de loi S-29, il est possible d'éviter ce problème en omettant de préciser que ces médicaments «pourraient écourter la vie d'une personne».

Il faut également se pencher sur la question des directives relatives au retrait ou au refus de traitement de survie ou à l'administration de médicaments antidouleur. Nous devons avoir des directives sur ces sujets et les recommandations unanimes du comité sénatorial permanent en faisaient tout particulièrement état. Toutefois, nous continuons de constater que le gouvernement fédéral hésite à prendre des mesures pour établir de telles normes.

Madame le sénateur Lavoie-Roux a introduit la notion de l'obligation du gouvernement d'établir des lignes directrices le printemps dernier. Le projet de loi S-2 effleure la question en donnant au ministre de la Santé la possibilité d'établir des lignes directrices nationales en collaboration avec les autorités et les associations provinciales, et non fédérales. Selon elle, pour que ce projet de loi soit efficace, le ministère de la Santé doit établir des lignes directrices, et ce après de longues consultations auprès des autorités provinciales et fédérales.

Le projet de loi S-2 tente de fournir une défense aux prestateurs de soins de santé qui sont accusés de meurtre et de renforcer la nécessité de réformer les soins palliatifs. Chacun de ces éléments renferme une bonne dose de mérite. Toutefois, le projet de loi S-2 pourrait créer un ensemble de mesures disparates qui risqueraient de devenir inconstitutionnelles.

Pour toutes ces raisons, madame le sénateur Lavoie-Roux a souligné qu'elle n'appuierait pas le projet de loi S-2.

Honorables sénateurs, je vous encourage à bien tenir compte de ces préoccupations ainsi que des commentaires et observations qui ont été faites sur cette mesure législative tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du Sénat. Quand on étudie une question qui a autant d'importance sur la vie et sur la mort, on se doit de faire preuve de la plus grande prudence. Toutefois, j'aimerais féliciter madame le sénateur Carstairs d'avoir déposé ce projet de loi S-2, et j'attends avec impatience les délibérations du comité à ce sujet.

(Sur la motion du sénateur Cools, le débat est ajourné.)

Projet de loi sur la dénonciation dans la fonction publique

Deuxième lecture-Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Kinsella, appuyée par l'honorable sénateur DeWare, tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-13, Loi visant à favoriser la prévention des conduites répréhensibles dans la fonction publique en établissant un cadre pour l'éducation en ce qui a trait aux pratiques conformes à l'éthique en milieu de travail, le traitement des allégations de conduites répréhensibles et la protection des dénonciateurs.-(L'honorable sénateur Finestone, c.p.).

L'honorable Sheila Finestone: Honorables sénateurs, je suis heureuse de pouvoir parler du projet de loi S-13, sur la dénonciation dans la fonction publique, qu'a présenté l'honorable chef adjoint de l'opposition. Ce projet de loi vise à résoudre des enjeux cruciaux dans la fonction publique et dans ses rapports avec le Parlement et la population. Il entend offrir un mécanisme permettant aux fonctionnaires de signaler les cas de corruption dont ils sont témoins, protéger contre des mesures de représailles les fonctionnaires qui dénoncent des abus dans le lieu de travail, favoriser des pratiques conformes à l'éthique, et sensibiliser les fonctionnaires à l'importance de signaler ces cas et à l'existence du mécanisme permettant de le faire.

Des mécanismes de dénonciation ont déjà été mis en place dans d'autres pays. Aux États-Unis, l'Office of the Special Counsel exerce ce mandat depuis 20 ans. En février 1999, Elaine Caplan, conseillère spéciale auprès du U.S. Office of the Special Counsel, a souligné qu'une loi et des mécanismes sur la dénonciation revêtent une importance cruciale pour lutter contre la corruption au sein de l'État. Elle a dit:

[...] à défaut de mesures efficaces pour protéger les dénonciateurs, tout effort contre la corruption est voué à l'échec, car il prive ceux qui cherchent à enrayer la corruption au sein de l'État de la source d'information la plus précieuse sur son existence, les fonctionnaires. [...] Selon la théorie, les fonctionnaires - en raison de leur travail - sont dans une position exceptionnelle pour attirer l'attention sur la corruption au sein de l'État; ils sont de précieux éléments d'un bon gouvernement.

La notion de dénonciation est relativement récente. Le terme lui-même ne remonte qu'aux années 60. Au Canada, cette notion n'est apparue qu'au cours des deux dernières décennies, car nos institutions gouvernementales ont évolué pour répondre aux besoins d'une société dotée de la technologie moderne et d'une fonction publique croissante, appelée à exercer diverses fonctions, et pour répondre à un besoin de décentraliser et de déléguer afin d'améliorer l'efficacité du processus décisionnel, d'éliminer les tracasseries administratives et d'investir les gestionnaires de nouvelles responsabilités liées à l'interprétation et à l'adoption de lois d'intérêt public.

Ces changements ont placé les anciennes relations dans un nouveau contexte et engendré le risque de nouvelles tensions entre les individus - c'est-à-dire entre les fonctionnaires - et leur milieu de travail. Selon l'approche traditionnelle en matière de services à la population, la solution face à ce genre de tensions réside dans les relations hiérarchiques, où chacun fait rapport à son supérieur dans la chaîne de commandement, où chaque employé obéit implicitement à son superviseur et où les décisions sont définitives. Les désaccords sont seulement tolérés, s'ils le sont le moindrement, jusqu'à ce que la décision définitive soit communiquée. Ceux qui acceptent mal cette structure sont rapidement mis sur la voie d'évitement ou partent de leur plein gré. Cela signifie également qu'il n'y a presque pas de recours pour quiconque fait l'objet d'un traitement inéquitable de la part de son patron ou voit un supérieur commettre un acte illégal. Faire rapport à son supérieur dans la chaîne de commandement risque simplement d'alerter le contrevenant et de lui permettre de se venger. Celui qui ne respecte pas la chaîne de commandement s'expose à de sévères sanctions, peu importe s'il a raison. Il est considéré déloyal et, par conséquent, n'a plus le droit d'être protégé contre la vengeance d'un supérieur et la politique partiale. À l'heure actuelle au Canada, la common law confère uniquement la plus maigre des protections au dénonciateur, même si ses allégations s'avèrent exactes.

Certains aspects de l'approche traditionnelle persistent encore solidement dans la fonction publique, mais ils sont maintenant souvent remis en question par les nouvelles tendances. Les nouvelles approches en matière de prestation de services exigent un processus décisionnel décentralisé. La complexité des dossiers transcende aujourd'hui les vieilles hiérarchies, nécessitant la coordination et la collaboration de divers gouvernements, de divers ordres de gouvernement, d'organisations du secteur privé et du secteur bénévole ainsi que d'autres pays. À mesure que le gouvernement s'intéresse à la réglementation de divers domaines, il dépend de plus en plus des fonctionnaires, des experts et des professionnels en ce qui a trait à des questions d'intérêt public qui sont cruciales.

Dans ce nouvel environnement, quand le gouvernement tente de décentraliser le processus décisionnel pour accroître l'efficacité, quand les lois sur l'accès à l'information rendent discutable la protection de documents confidentiels, quel est le rôle des fonctionnaires? Quelle est leur responsabilité envers leurs supérieurs, la population et eux-mêmes? À mesure que les fonctionnaires doivent assumer le blâme de leurs décisions, ont-ils le droit de dévoiler comment ces décisions ont été prises? N'y aurait-il pas à l'occasion des conflits d'intérêts entre la nécessité de fournir une information complète et celle d'être loyal envers l'organisation? Comment l'intérêt public est-il mieux servi dans de tels cas, et qui peut en juger?

Les causes les plus souvent citées dans la presse sont des cas évidents de fraude ou d'autres activités illégales. Dans ces cas, honorables sénateurs, il est clair que tout fonctionnaire témoin de tels actes illégaux a le devoir d'en informer les services policiers. D'autres fois, les conflits d'intérêts ne sont pas si faciles à résoudre. Un expert dans un domaine en particulier peut respecter des normes professionnelles qui diffèrent des dispositions de la loi ou des règlements. Lorsque des experts sont employés à titre de fonctionnaires, sont-ils tenus de divulguer ces différences et leurs possibles conséquences?

(1530)

Dans les domaines de la santé et de la sécurité publiques, bien des citoyens pourraient croire qu'il vaut mieux être trop prudent que de vouloir aller trop vite. Dans ces domaines, une seule erreur peut avoir des effets tragiques et durables. La présence de sang contaminé dans les systèmes de santé est un exemple où une approche plus prudente pour le contrôle du sang et la confirmation de son innocuité parfaite aurait sauvé des vies. L'exemple plus ancien des effets horribles de la thalidomide est suffisant pour inciter les scientifiques à user de prudence lorsqu'ils doivent approuver des médicaments d'usage général.

Aux États-Unis, l'explosion de la navette Challenger et le décès spectaculaire de ses occupants ont mis en évidence les désaccords entre les ingénieurs, qui étaient des fonctionnaires à l'époque, et leurs supérieurs à la NASA au sujet de la sécurité de certaines pièces, qui ont effectivement causé la terrible catastrophe, comme on l'a démontré par la suite.

Ainsi, nous devrions donc demander et clarifier quel est le devoir de l'expert qui travaille pour le gouvernement en cas de conflits entre ses normes professionnelles et les règlements du gouvernement. Comment résoudre les conflits de la sorte lorsqu'il existe un désaccord sur les risques potentiels et lorsque le gouvernement a décentralisé ses opérations en confiant aux gestionnaires la tâche de prendre de telles décisions? Rappelons-nous qu'il existe souvent un écart important entre l'objectif des lois et règlements et l'interprétation qu'en font les fonctionnaires.

Les associations d'ingénieurs et autres ordres professionnels ont maintenant rédigé des lignes directrices sur ce que j'appelle les «divergences de vues fondées sur des considérations d'éthique», cela afin de guider les gens sur la ligne de conduite à suivre lorsque leur jugement professionnel va à l'encontre des instructions qu'ils reçoivent de leur superviseur. Il est donc tout à fait de mise que le projet de loi dont nous sommes saisis propose que l'on déploie, dans la fonction publique, des efforts semblables afin de sensibiliser les fonctionnaires à l'éthique du processus décisionnel et aux recours dont ils disposent pour faire valoir leurs préoccupations sérieuses sans pour autant être étiquetés comme des fauteurs de troubles. Parallèlement, parce que les allégations de conduite répréhensible ont des conséquences graves, il faut prévoir dans les lignes directrices des critères pour l'évaluation des allégations, ainsi que des peines pour les allégations frivoles.

On conçoit aussi aisément la nécessité de désigner un commissaire de l'intérêt public qui soit indépendant, comme le propose le projet de loi. Actuellement, si des fonctionnaires ont l'impression que certaines façons de faire entraînent du gaspillage ou sont peu judicieuses, à qui peuvent-ils le signaler? Habituellement, il n'est pas difficile de faire rapport de gaspillages relatifs à des programmes que le gouvernement en place n'appuie pas fermement. Il peut toutefois être plus compliqué de faire rapport de gaspillages concernant des projets que le gouvernement a fortement appuyés et publicisés. Dans l'optique politique, on peut penser que de tels rapports témoignent d'un manque de loyauté ou d'un engagement qui laisse à désirer à l'égard des priorités gouvernementales. Il est donc essentiel de prévoir un mécanisme indépendant du gouvernement qui examinera de près les allégations de gaspillage et de corruption. En l'absence d'un mécanisme indépendant, le champ d'action sera extrêmement limité une fois qu'une allégation sera faite.

Honorables sénateurs, j'en arrive finalement à la question de savoir ce qu'il advient des personnes qui tentent de signaler des fraudes, des actes illégaux, du gaspillage, des mesures inefficaces, des risques ainsi que des écarts entre les règles gouvernementales et les normes professionnelles ou des cas de harcèlement. Certains organismes ont créé un poste d'ombudsman qui est chargé d'enquêter sur ces allégations tout en tentant de garder secrète l'identité des dénonciateurs. La Loi sur les droits de la personne et le droit civil donnent des recours aux employés et leur permettent de porter des affaires de harcèlement ou de discrimination devant des tribunaux ordinaires ou devant les instances responsables des droits de la personne. Ces procédures sont toutefois longues et épuisantes et elles comportent des risques pour la personne en question. Toute poursuite intentée contre un employeur est coûteuse. Lorsque l'employeur est le gouvernement, il a un accès illimité à de l'aide et à des conseils de nature juridique. Qu'arrive-t-il alors à l'employé? Celui-ci doit, entre-temps, travailler dans un climat difficile, dans un milieu où il est perçu comme un être déloyal, un fauteur de troubles, et cetera.

Comme l'a souligné la conseillère juridique spéciale des États-Unis, Elaine Kaplan, au sujet des dénonciateurs dans la fonction publique:

[...] contrairement aux simples citoyens qui vivent dans une démocratie, ils sont particulièrement vulnérables aux mesures de représailles de la part des responsables et des institutions dont ils ont dénoncé la corruption. Dans les cas extrêmes, ces responsables peuvent priver un dénonciateur de son gagne-pain et détruire sa réputation professionnelle. Ils peuvent aussi, plus subtilement, lui rendre la vie misérable en l'isolant ou en lui refusant des affectations professionnelles ou des possibilités d'avancement.

Il est donc essentiel de protéger les dénonciateurs, comme le propose le projet de loi. La nécessité de créer la fonction de commissaire de l'intérêt public s'en trouve renforcée, car ce fonctionnaire serait chargé de maintenir la confidentialité des allégations qui ont été faites et devrait être indépendant du gouvernement dans l'exercice de ses fonctions. De même, les peines visant à punir un dénonciateur qui fait des allégations doivent être suffisamment rigoureuses pour décourager n'importe qui de prendre pareille initiative, sauf s'il le fait dans un souci du bien public bien fondé et bien intentionné.

Étant donné le contexte en pleine évolution de la fonction publique et de notre société, étant donné le changement des valeurs que nous accordons à la loyauté envers l'organisme plutôt qu'à la loyauté à l'égard des normes professionnelles, d'un sens solide de la moralité ou de ce qu'on appelle l'intérêt public, le potentiel de conflit entre les employés et leur employeur a également augmenté de façon spectaculaire. La nécessité de protéger les employés qui cherchent à révéler de l'information pour ces motifs a augmenté en conséquence.

Même si le gouvernement agissait aujourd'hui en ce sens, le Canada ne serait pas à l'avant-garde quant à l'adoption d'une loi sur la dénonciation dans la fonction publique. Outre les États-Unis, comme on le fait remarquer dans l'excellente recherche que nous a fournie la Bibliothèque du Parlement, l'Australie, tant au niveau fédéral qu'à celui des États, et la Grande-Bretagne ont adopté des mesures législatives ou des règlements visant à protéger les dénonciateurs dans la fonction publique. Nous accusons donc un certain retard à cet égard.

Au Canada, le Nouveau-Brunswick semble être la seule province où existe une telle loi, bien que sa portée soit limitée aux allégations de violation des lois provinciales et fédérales et qu'elle ne s'applique pas aux allégations de gaspillage, de mauvaise gestion ou de risques en général pour la santé et la sécurité du public non visés par des lois. En Ontario, bien que l'assemblée législative ait adopté une très bonne loi assurant une vaste protection aux dénonciateurs de la fonction publique, le gouvernement provincial actuel ne l'a pas encore fait proclamer par le lieutenant-gouverneur.

Pour toutes ces raisons, honorables sénateurs, je pense que le projet de loi sur la dénonciation proposé par le sénateur Kinsella vient à point nommé et devrait faire l'objet d'une étude approfondie. Il faudra examiner attentivement un certain nombre de points au comité.

Tout d'abord, c'est une proposition intéressante que celle de désigner un commissaire de la fonction publique comme commissaire de l'intérêt public, car la Commission de la fonction publique relève du Parlement et est indépendante du gouvernement en place. Cependant, l'adoption de cette loi-cadre ne garantira pas à ce commissaire les ressources nécessaires pour s'acquitter de son mandat. Trop souvent, par le passé, des gouvernements de tous les niveaux ont mis en place des mécanismes pour protéger les droits de la personne, mais se sont empressés ensuite de réduire leurs ressources. L'établissement d'une nouvelle structure sous-financée dans la fonction publique ne rehaussera en rien sa crédibilité. Cela suscitera des attentes et, si le nouveau service est suffisamment connu, nous aurons simplement créé du jour au lendemain un autre arriéré de cas en attente. Nous aurons bientôt une période d'attente de plusieurs années, ce qui n'est que trop familier à ceux d'entre nous qui travaillent avec les Commissions des droits de la personne. Nous devons donc nous attarder à ce problème pendant nos délibérations. Nous devons convoquer des témoins qui sauront nous éclairer à ce sujet.

Deuxièmement, je m'inquiète de l'exception prévue au paragraphe 20(2) à la protection de l'anonymat. Il peut y avoir exception lorsque la commission établit que les allégations n'ont pas été faites de bonne foi et pour des motifs raisonnables. Ce qui semble être un motif raisonnable pour l'un ne l'est pas forcément pour quelqu'un d'autre. Ce type de critère peut être subjectif et les préjugés peuvent jouer. Si l'interprétation est trop stricte, cette disposition empêchera toute plainte. Il faudrait définir rigoureusement les motifs de divulgation.

Troisièmement, il faudrait au paragraphe 9(4) une explication détaillée du sens du terme «raisonnable», dans le passage «à moins qu'il ne l'ait fait pour des motifs raisonnables de préoccupation au sujet de la santé ou de la sécurité publiques». Cette interprétation a des répercussions directes sur celle de l'expression «motifs raisonnables» au paragraphe 20(2).

Le type de problème éthique que je viens d'esquisser existe déjà dans la fonction publique. Il est évident que, dans le fonctionnement d'un gouvernement moderne et complexe, il est plus critique que jamais de trouver le juste milieu entre la loyauté et la nécessité d'une divulgation complète.

En adoptant un projet de loi sur la dénonciation, nous franchirons une étape importante en vue de permettre à notre fonction publique et à nos fonctionnaires, qui travaillent fort et sont bien intentionnés, de faire face aux défis croissants de l'exercice des pouvoirs délégués, de la divulgation et de l'obligation de rendre compte de l'usage des fonds publics.

(1540)

Avec les quelques changements mineurs que j'ai signalés, ce projet de loi donnera au Canada un moyen d'atteindre cet objectif tout en éduquant les fonctionnaires, en faisant la promotion d'une démarche éthique commune à toute la fonction publique et en protégeant l'anonymat des personnes qui dénoncent les méfaits et omissions. J'appuie fermement ce projet de loi et je recommande qu'il soit soumis à l'examen du comité.

(Sur la motion du sénateur Lynch-Staunton, le débat est ajourné.)

Le Code criminel

Projet de loi modificatif-Deuxième lecture-Ajournement du débat

L'honorable Wilfred P. Moore propose: Que le projet de loi C-202, Loi modifiant le Code criminel (fuite), soit lu une deuxième fois.-(L'honorable sénateur Hays).

- Honorables sénateurs, je tiens à appuyer le projet de loi C-202. Le député de Pickering-Ajax-Uxbridge, M. Dan McTeague, mérite des félicitations pour avoir présenté, l'automne dernier, à l'autre endroit le projet de loi C-202, sur les automobilistes qui prennent la fuite lorsqu'ils sont poursuivis par un agent de la paix. Les sénateurs se rappelleront peut-être que ce projet de loi avait d'abord été présenté en octobre 1998, au cours de la première session de la présente législature, en tant que projet de loi C-440.

À la fin de l'année dernière, le comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes a fait rapport du projet de loi C-202 avec certaines propositions d'amendement et, le 7 février 2000, le projet de loi a été adopté à l'unanimité à la Chambre des communes. Je dois dire que, dans son vingt et unième rapport, intitulé: «Vers l'élimination de la conduite avec facultés affaiblies», qui a été déposé à la Chambre le 25 mai 1999, le comité permanent de la justice et des droits de la Chambre des communes a aussi estimé que la question des poursuites policières méritait d'être approfondie.

Des organisations policières comme l'Association canadienne des policiers, l'Association canadienne des chefs de police et la Fédération des policiers et policières du Québec ont appuyé publiquement le projet de loi C-202. Les milieux policiers appuient nettement le progrès représenté par le projet de loi C-202. Les risques créés par les automobilistes qui prennent la fuite lorsqu'ils sont poursuivis par un agent de la paix sont intolérables. Les risques de mort et de blessure sont bien réels pour l'automobiliste en question, les agents de la paix et la population en général.

D'un côté, les agents de la paix se sentent pressés par le public de poursuivre et d'arrêter les automobilistes en fuite, qui sont souvent coupables de vol ou de conduite avec facultés affaiblies. Cependant, certains préféreraient que les forces policières ne se livrent à aucune poursuite afin d'éviter les collisions. On peut donc voir que les agents de la paix subissent d'énormes pressions lorsqu'ils doivent décider de poursuivre ou non un automobiliste qui refuse de s'arrêter et, s'ils optent pour la poursuite, de déterminer quand les risques sont devenus tellement grands qu'ils devraient mettre fin à la poursuite.

Honorables sénateurs, nous savons que la police ne prend pas ces décisions à la légère. Il arrive souvent que la police doive prendre ces décisions instantanément, sans profiter du recul. Je ne pense pas que nous devrions restreindre les pouvoirs de la police en lui disant de ne jamais donner la chasse. L'objet de ce projet de loi n'est pas de lui dire qu'elle doit, à tout prix, capturer les fugitifs, mais de placer les responsabilités là où il faut. La responsabilité doit être imposée uniquement à ceux qui fuient la police et entraînent celle-ci dans des poursuites motorisées.

Le député de Pickering-Ajax-Uxbridge a présenté d'utiles modifications au projet de loi C-202 durant l'étude article par article de celui-ci par le comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes. Le projet de loi C-202 modifié ajoutera au Code criminel une infraction pour tout automobiliste qui refuse de s'arrêter ou qui cherche à fuir la police. Cette nouvelle infraction suivra immédiatement l'article 249, qui porte sur la conduite dangereuse. Elle comprendra certaines situations qui pourraient ne pas être considérées comme des cas de conduite dangereuse. Par exemple, il y a des cas où un automobiliste en fuite dépasse la limite permise dans une ligne droite sur une autoroute pour tenter d'échapper à la police et où le procureur de la Couronne ne peut faire la preuve que cela correspond à de la conduite dangereuse. En vertu du projet de loi C-202, le simple fait de ne pas s'arrêter constituerait une infraction criminelle.

Initialement, le projet de loi C-202 aurait fait de la tentative d'échapper à la police un acte criminel passible d'un emprisonnement de deux ans. Comme dans le cas de la conduite dangereuse et de la conduite avec facultés affaiblies, le nouveau délit de fuite fera partie des infractions où le procureur de la Couronne pourra choisir de procéder par mise en accusation ou par procédure sommaire. Cela permettra à la Couronne de procéder de façon expéditive dans les cas où les circonstances et le dossier criminel du délinquant sont moins sérieux. La peine maximale pour la procédure sommaire serait de six mois d'emprisonnement. Quant à la mise en accusation, la peine d'emprisonnement maximale serait de cinq ans. Ce sont les mêmes que celles s'appliquant à la conduite dangereuse et à la conduite avec facultés affaiblies.

Honorables sénateurs, la conduite dangereuse est déjà passible de plusieurs peines maximales sévères. La conduite dangereuse causant des lésions corporelles ou la mort entraîne un emprisonnement de 10 ans ou 14 ans respectivement. Le projet de loi C-202 précise clairement qu'une telle conduite dangereuse où les personnes en cause essaient également d'échapper à la police est encore plus dangereuse. Lorsqu'un automobiliste en fuite cause la mort du fait de sa conduite dangereuse, la peine maximale est l'emprisonnement à perpétuité. Lorsqu'un automobiliste en fuite cause des lésions corporelles à une autre personne, la peine maximale est un emprisonnement de 14 ans. Ces peines maximales seraient réservées aux pires circonstances et aux pires délinquants. Cela montre que toute infraction impliquant une fuite pour échapper à la police, lorsque la conduite dangereuse conduit à la mort ou à des lésions corporelles, devrait entraîner une peine plus sévère que si l'intéressé, dans les mêmes circonstances, n'essaie pas d'échapper à la police.

En conclusion, honorables sénateurs, le projet de loi C-202 dit aux automobilistes qu'ils ne devraient pas forcer la police à les poursuivre. S'ils tuent ou blessent une personne alors qu'ils conduisent dangereusement pour échapper à la police, les peines seront sévères. En fin de compte, on crée une infraction distincte au Code criminel pour les automobilistes qui tentent d'échapper à la police. Le message envoyé aux délinquants possibles est le suivant: arrêtez-vous à la demande de la police ou soyez prêts à en subir les conséquences. Je demande à tous les honorables sénateurs d'appuyer le projet de loi C-202.

(Sur la motion du sénateur Kinsella, au nom du sénateur Ghitter, le débat est ajourné.)

[Français]

(1550)

Les données du recensement

La recevabilité des pétitions

L'honorable Fernand Robichaud (Son Honneur le Président suppléant): Honorables sénateurs, on a porté à mon attention que les pétitions présentées au Sénat plus tôt aujourd'hui n'étaient pas entièrement signées par des citoyens canadiens. J'aimerais vous citer la Jurisprudence parlementaire de Beauchesne, à l'article 1035.(3):

[Traduction]

1035.(3) Il est arrivé que la Chambre a reçu, du consentement unanime, une pétition signée à la fois par des citoyens canadiens et des étrangers.

[Français]

Honorables sénateurs, vous plaît-il d'accorder votre consentement au dépôt de ces pétitions du sénateur Milne telle qu'elle les a présentées à l'appel de la présentation de pétitions?

[Traduction]

L'honorable Lorna Milne: Honorables sénateurs, je demande le consentement unanime pour présenter cette pétition, qui contient de nombreuses signatures, dont quelques-unes des États-Unis et de Grande-Bretagne, comme je l'ai signalé au début. Cette pétition demande la publication des résultats de recensements tenus après 1901.

Selon Beauchesne, Son Honneur le Président suppléant avait raison: j'aurais dû demander le consentement unanime pour présenter la pétition. Je le fais donc maintenant. Si le consentement est refusé, je retirerai la pétition et présenterai demain la grande majorité des noms, ceux de Canadiens.

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint de l'opposition): Les honorables sénateurs de ce côté-ci de la Chambre accorderont volontiers leur consentement à la présentation de la pétition telle qu'elle a été présentée, en partie en vertu du principe énoncé dans la Charte canadienne des droits et libertés. Comme le savent les honorables sénateurs, nous reconnaissons ces droits et libertés à tous, sauf trois droits, à savoir le droit de quitter le Canada et d'y revenir, qui est limité aux citoyens canadiens; le droit de voter, qui est limité aux citoyens canadiens; et certains droits des minorités en matière d'éducation, qui sont limités aux citoyens canadiens. Tous les autres droits que nous reconnaissons s'appliquent à tous. Ce genre de pétition, nonobstant Beauchesne, est recevable en vertu de ce principe. C'est pourquoi nous sommes heureux d'accorder notre consentement.

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, je suis moi aussi disposée à accorder mon consentement au sénateur Milne dans ce cas précis. Toutefois, il s'agit là d'une question que nous devrions tenter d'éclaircir tôt ou tard. Je n'ai malheureusement pas entendu la présentation de la pétition, mais j'ai entendu ce que vient de dire le sénateur Kinsella. Je comprends et reconnais le principe selon lequel les droits sont accordés à tout le monde. Je ne suis cependant pas entièrement convaincue les citoyens des États-Unis d'Amérique ou de quelque autre pays aient le droit de présenter une pétition au Parlement canadien. Toutefois, considérant tout le travail accompli par le sénateur Milne, je suis tout à fait disposée à lui accorder mon consentement dans ce cas-ci.

Son Honneur le Président suppléant: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'accepter les pétitions?

Des voix: D'accord.

L'union monétaire européenne

Le rapport du comité des affaires étrangères sur l'étude-Ajournement du débat

Le Sénat reprend l'étude du quatrième rapport du comité sénatorial permanent des affaires étrangères intitulé: «Le point sur l'Europe: les implications d'une intégration accrue de l'Europe pour le Canada», déposé au Sénat le 17 novembre 1999.- (L'honorable sénateur Stollery).

L'honorable Peter A. Stollery: Honorables sénateurs, je voudrais dire quelques mots sur notre rapport intitulé: «Le point sur l'Europe: les implications d'une intégration accrue de l'Europe pour le Canada», qui a été déposé au Sénat en novembre dernier.

Honorables sénateurs, en préparant mes notes pour mon intervention, j'ai relu attentivement le rapport. Je voudrais souligner que, à la page 25, il y a une erreur dans la section sur la «dollarisation», car nous avons par inadvertance inclus le Mexique avec l'Argentine. Ce n'est pas exact. J'ai été moi-même étonné de cette erreur.

Le comité des affaires étrangères s'intéresse depuis les années 80 à l'évolution de la situation économique internationale, depuis l'Accord de libre-échange et l'ALENA; il s'intéresse aussi depuis les années 70 à l'Europe et à l'Union européenne. Notre comité a consacré beaucoup de temps à l'étude de l'évolution de la situation économique internationale parce que beaucoup de décisions prises au nom des citoyens canadiens le sont de plus en plus par des organisations internationales, à telle enseigne que des Canadiens et des gens d'autres pays ont l'impression de ne plus avoir leur mot à dire.

Il est devenu habituel pour notre comité d'étudier ces questions - je parle ici de l'évolution de la situation économique internationale. Le rapport sur l'Union européenne s'inscrit dans la droite ligne d'une étude réalisée par notre comité en 1995 et en 1996, et dans le cadre de laquelle nous nous étions rendus en Europe, où nous avons eu une série de réunions fructueuses qui ont beaucoup contribué à assurer la haute qualité du rapport.

Fondamentalement, le rapport porte sur deux sujets: l'Union monétaire européenne et la réforme de l'Union européenne. Toutes les personnes qui s'intéressent à ces deux sujets très importants trouveront notre rapport très utile.

Je voudrais présenter cet après-midi aux honorables sénateurs quelques statistiques qui, même si les Canadiens les ont oubliées, je crois, n'en sont pas moins importantes.

Beaucoup de gens disent que notre influence en Europe et dans les pays de l'Union européenne n'est pas aussi grande qu'elle devrait l'être. Avant de répondre à cette remarque, j'aimerais donner quelques chiffres de population qui sont importants pour les pays de l'Union européenne et pour le Canada.

Le Canada où je suis né comptait environ 13 millions d'habitants. La population du Canada atteint maintenant 31 millions d'habitants, et ce nombre croît rapidement. Il est juste de dire qu'avant longtemps, nous aurons la même population que l'Espagne, qui compte 40 millions d'habitants. La Pologne, qui cherche activement à devenir membre de l'Union européenne, compte 38 millions d'habitants. Dans le moment, la population du Canada dépasse celle du Benelux, qui regroupe la Hollande, la Belgique et le Luxembourg.

Pour ce qui est du commerce international, l'Irlande, par exemple, a une population de 3,5 millions d'habitants. C'est un très petit pays.

(1600)

On doit regarder les chiffres de population pour comprendre l'importance du fait que l'Union européenne est maintenant le plus important marché du monde. Beaucoup de gens croient que, sur le plan du commerce, le Canada ne se tire pas aussi bien d'affaire qu'il le devrait dans le plus important marché du monde.

M. John Beck, qui, je crois, est directeur des affaires internationales pour l'Union européenne, a dit à notre comité, lorsque nous étions en Europe, que le Canada ne représente que 1,7 p. 100 du commerce européen, comparativement à la part des États-Unis, qui dépasse les 20 p. 100. C'est une statistique très importante. Si on prend uniquement la population, les États-Unis sont un peu plus que huit fois plus populeux que nous. Par conséquent, si on suit cette logique, notre commerce avec l'Europe devrait se situer autour de 2,5 ou 3 p. 100. Il y a donc quelque chose qui ne va pas.

Honorables sénateurs, 8 ou 9 p. 100 des échanges commerciaux du Canada se font avec l'Union européenne. J'ai entendu dire, l'autre jour, qu'un des problèmes qui affligent le Canada, c'est que nous sommes fondamentalement des exportateurs de produits primaires, c'est-à-dire des produits forestiers et miniers, et cetera. Toutefois, entre 50 et 75 p. 100 de nos exportations sont constituées de produits manufacturés, notamment d'un nombre croissant de biens comme des avions-navettes. Nos exportations à destination de l'Europe sont de nature très hautement technique. Par conséquent, il est faux de dire que nous éprouvons des problèmes en Europe parce que nous ne produisons que certains types de matières premières.

Il est également important que les Canadiens comprennent que le Canada exporte énormément de capitaux en Europe. Une des grandes réussites du Canada dans le domaine du commerce international est liée au marché de l'importation et de l'exportation de capitaux. En effet, nos investissements en Europe ont augmenté de 230 p. 100 au cours des dix dernières années. Fait intéressant, les États-Unis ont des investissements d'environ 150 milliards de dollars au Canada, tandis que ceux des pays de l'Union européenne totalisent quelque 50 milliards de dollars, soit environ le tiers du montant investi par les Américains. Quant aux investissements canadiens dans les pays de l'Union européenne, ils s'établissent à environ 50 milliards de dollars, ce qui est vraiment un gros montant. Il s'agit là d'une de nos grandes réussites, et nos investissements augmentent plus rapidement que ceux des États-Unis en Europe.

Cet état de chose m'amène aussi à me demander pourquoi seulement 1,7 p. 100 des échanges commerciaux européens s'effectuent avec le Canada, par rapport à plus de 20 p. 100 avec les États-Unis. Le Canada devrait faire preuve de beaucoup plus de dynamisme dans certains de ses rapports avec l'Union européenne.

Je ne cherche qu'à faire ressortir l'importance de notre rapport, qui traite de l'Union monétaire européenne. Nous entretenons du scepticisme au sujet de l'Union monétaire européenne. Nos témoins étaient sceptiques, non pas parce qu'elle ne s'est pas réalisée, mais bien parce qu'elle s'est concrétisée. Comme vous le savez, il y a, au Canada, des gens qui pensent que, parce que l'Union monétaire européenne constitue une si belle réussite, entre guillemets, le Canada devrait conclure une union monétaire avec les États-Unis. Ce n'est pas la conclusion à laquelle est arrivé notre comité, et il vous faudrait lire le rapport pour savoir pourquoi. Je ne vous accaparerai pas avec cela cet après-midi. Il importe cependant de comprendre à quelles difficultés s'expose à long terme l'Union monétaire européenne en l'absence d'un gouvernement européen central.

La deuxième partie de notre rapport traite des problèmes que présentent la refonte de l'Union européenne et les pressions conflictuelles, qui ont une grande importance pour le pays. Au Canada, nous connaissons bien les pressions qui marquent les relations entre un gouvernement national et les régions. Cela a été monnaie courante chez nous. Les Européens, eux, n'ont absolument aucune expérience en la matière.

Vous connaissez le célèbre Parlement européen. Il y a également les gouvernements des États membres. Les honorables sénateurs croient-ils qu'il serait facile pour le premier ministre de la Grande-Bretagne, pour le président français ou pour le chancelier allemand de permettre au Parlement européen de leur prendre leur pouvoir? L'expérience canadienne dans ce domaine prouve le contraire.

Selon moi, ils n'en ont pas encore pris conscience. Je crois que le succès de l'euro repose sur une structure de gouvernement central qui peut s'occuper des incitatifs fiscaux dans les diverses régions dont l'euro est la monnaie. La situation économique de l'Espagne diffère de celle de l'Allemagne, celle de l'Irlande diffère de celle de l'Italie, et ainsi de suite.

Soit dit en passant, la raison d'être de l'euro et de l'Union européenne est essentiellement politique. Le sénateur Bolduc et moi avons assisté à de nombreuses réunions à l'occasion desquelles on nous a expliqué que ce n'était pas tant une affaire économique qu'une affaire politique, que le fait d'avoir la même monnaie obligerait, croyait-on, les États membres à se doter d'une forme quelconque de gouvernement central, car cela allait de pair, et que les gouvernements nationaux seraient par conséquent forcés d'opter pour un gouvernement central. Or, c'est tout le contraire qui s'est produit.

Dans de nombreux pays, mais pas tous, seulement 20 à 22 p. 100 des électeurs se donnent la peine de voter pour le Parlement européen. Le Parlement européen a perdu de la crédibilité. Les gens se sentent loin des structures centrales qui se trouvent à Bruxelles. Comme vous le savez, en France, le traité de Maastricht n'a été adopté que par une majorité de 0,2 p. 100 des voix lors du référendum. La Grande-Bretagne n'ose pas tenir un référendum sur l'Union monétaire européenne parce qu'elle sait parfaitement que l'idée serait rejetée.

Bien sûr, au cours de l'année écoulée et même des six derniers mois, on constate un recul du gouvernement national en Europe. Les gouvernements nationaux prennent de plus en plus leurs distances vis-à-vis du système en place à Bruxelles. J'ignore où tout cela mènera, mais il importe que nous, au Canada, suivions l'évolution de la situation. Il nous faut absolument observer les tentatives d'élargissement de la structure européenne, compte tenu du fait qu'il sera difficile de prendre des décisions quand la Pologne, la République tchèque et d'autres pays à vocation fortement agricole en feront partie.

(1610)

Comment vont-ils payer les subventions agricoles? Cela va-t-il profiter au Canada? Les subventions agricoles versées aux agriculteurs européens font qu'il est difficile pour les agriculteurs canadiens de vendre leurs produits à des tiers. Les exportations agricoles européennes fortement subventionnées font concurrence aux exportations agricoles canadiennes moins subventionnées. C'est un gros problème pour notre pays.

Je recommande ce rapport au Sénat, et j'espère que les honorables sénateurs s'intéresseront suffisamment à ces questions pour les suivre car elles sont très importantes pour le niveau de vie des Canadiens. Le comité sénatorial des affaires étrangères continuera d'étudier ces questions très importantes.

[Français]

L'honorable Roch Bolduc: Honorables sénateurs, le sénateur Stollery voudrait-il répondre à une question?

Le sénateur Stollery: Oui.

Son Honneur le Président suppléant: Honorables sénateurs, la période réservée au débat de cet article à l'ordre du jour est terminée. La permission est-elle accordée de poursuivre?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Bolduc: Le sénateur Stollery laisse entendre qu'il était un peu pessimiste quant à l'avenir politique de l'Union européenne. Le changement fondamental en cours ne résulte-t-il pas plutôt du fait que les gouvernements européens ont réalisé que l'Union européenne ne pouvait pas être gouvernée par une bureaucratie à Bruxelles mais par les gouvernements des pays en question? Cela me semble très sain et représente un certain progrès. Ces gouvernements sont élus démocratiquement.

Le sénateur Stollery: Honorables sénateurs, l'idée que les gouvernements nationaux aient plus de pouvoirs politiques est bonne. En quoi cela va-t-il affecter le système financier? Nous soulignons dans notre rapport que le système monétaire est basé sur un gouvernement national. Comment ces 16 pays vivant des circonstances économiques tout à fait différentes, ces 16 gouvernements décidant de la valeur de la monnaie, des impôts, et cetera agenceront-ils ce système? J'y vois une contradiction. Ce n'est pas que je suis pessimiste. Je sais très bien que le débat entre les gouvernements régionaux et le gouvernement fédéral a difficilement fonctionné au Canada. J'y vois plutôt une contradiction qu'un pessimisme sceptique.

(Sur la motion du sénateur Andreychuk, le débat est ajourné.)

[Traduction]

Énergie, environnement et ressources naturelles

Adoption du deuxième rapport du comité

Le Sénat passe à l'étude du deuxième rapport du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles (embauche de personnel et déplacement), présenté au Sénat le 15 décembre 1999.-(L'honorable sénateur Spivak).

L'honorable Mira Spivak propose: Que le rapport soit adopté.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

Les travaux du Sénat

L'honorable Charlie Watt: Honorables sénateurs, je vous demande un peu de patience, s'il vous plaît.

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, de quel article de l'ordre du jour parlons-nous?

[Français]

Son Honneur le Président suppléant: Honorables sénateurs, je porte à votre attention le fait que le sénateur Watt, lors du dépôt de ce rapport, a demandé la permission d'étudier ce rapport plus tard aujourd'hui. Cette permission lui a été accordée.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, l'article no 5 de l'ordre du jour sous la rubrique «Rapports de comités» a été appelé.

L'honorable Eymard G. Corbin: Il a parlé de l'article no 4.

[Traduction]

L'honorable Dan Hays (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, quand j'ai demandé la permission, pour le sénateur Watt, d'aborder ce rapport plus tard au cours de la journée, j'en avais d'abord discuté avec mon homologue, le sénateur Kinsella. J'avais cru comprendre que ce point figurerait à l'ordre du jour à la fin des rapports de comités.

Le sénateur Kinsella: Non, il devait être examiné à la fin de la journée.

Le sénateur Hays: Dans ce cas, j'avais mal compris. Puisqu'il n'y a plus que deux points à traiter d'ici la fin de la journée, notamment la motion du sénateur Lynch-Staunton, je devrais peut-être y repenser. Nous pourrions peut-être passer directement à cette motion, si le sénateur Lynch-Staunton le souhaite.

[Français]

Son Honneur le Président suppléant: Honorables sénateurs, je suis entre vos mains. Dois-je céder la parole à l'honorable sénateur Watt?

[Traduction]

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, d'après ma liste, c'est la motion no 5 à la rubrique «Autre» qui doit être appelée. Il s'agit d'une motion concernant le comité de l'énergie; elle est présentée par le sénateur Spivak et appuyée par le sénateur Andreychuk. Le débat est ajourné au nom du sénateur Taylor. Voilà où nous en sommes dans le déroulement des travaux d'aujourd'hui.

Le sénateur Hays: C'est exact. Si cet élément figure à l'ordre du jour, c'est que j'ai parlé au greffier de mon malentendu avec mon homologue quant à l'entente que je croyais avoir avec lui pour que nous revenions au rapport du sénateur Watt aujourd'hui. En temps normal, ce rapport ne serait débattu que demain. Je croyais qu'il devait figurer à la fin des rapports de comités, au Feuilleton, tandis que le sénateur Kinsella avait compris que la question serait inscrite à la toute fin du Feuilleton, point.

Je suis disposé à reconnaître que je me suis trompé. Pour régler le problème, j'annonce aux sénateurs, avec l'accord du sénateur Watt, que son intervention sur le rapport de son comité sera la dernière avant que je ne revienne aux avis de motion émanant du gouvernement pour aborder la motion d'ajournement.

Il conviendrait par conséquent de s'en tenir à la liste telle qu'elle a été imprimée, et non pas telle que proposée par le greffier.

Son Honneur le Président suppléant: Honorables sénateurs, vous plaît-il de procéder ainsi?

Des voix: D'accord.

[Français]

(1620)

Les communautés francophones et acadienne hors Québec

La détérioration des services en français-Interpellation

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Simard, attirant l'attention du Sénat sur la situation qui prévaut présentement vis-à-vis le développement et l'épanouissement des communautés francophones et acadienne, de sa détérioration progressive, du désengagement des gouvernements au cours des dix dernières années et de la perte d'accessibilité des services en français.-(L'honorable sénateur Kinsella).

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, le 16 novembre dernier, l'honorable sénateur Jean-Maurice Simard nous a interpellés sur la situation qui prévaut présentement vis-à-vis le développement et l'épanouissement des communautés francophones et acadienne, de sa détérioration progressive, du désengagement des gouvernements au cours des dix dernières années et de la perte d'accessibilité des services en français. Aujourd'hui, je désire prendre la parole pour appuyer cette interpellation de mon collègue, l'honorable sénateur Simard.

Cette dernière fait suite au dépôt, par le sénateur Simard, en novembre dernier, d'un rapport très critique au sujet du rôle des gouvernements fédéral et provinciaux sur la situation de plus en plus précaire des minorités francophones qui vivent à l'extérieur du Québec. Le dépôt du rapport de cette étude très détaillée visait à répondre à un engagement qu'avait pris le sénateur Simard en juin dernier. À l'époque, il avait interpellé les membres de cette Chambre quant à la détérioration des services en français pour les communautés francophones et acadienne du Canada.

Honorables sénateurs, le rapport s'intitule: «De la coupe aux lèvres: un coup de coeur qui se fait attendre». Il fait état des difficultés de plus en plus nombreuses auxquelles les communautés francophones et acadienne sont confrontées pour avoir accès à des services dans leur langue. Le rapport mentionne clairement que si les communautés francophones et acadienne de plusieurs provinces ont pu faire des gains importants en ce qui concerne le respect de leurs droits, c'est grâce à leur perspicacité et non en raison des initiatives des gouvernements fédéral et provinciaux pour améliorer leur situation.

Honorables sénateurs, le rapport souligne que ces acquis, dans le domaine de la gestion des écoles françaises et de certains services communautaires, demeurent extrêmement précaires. Forts de leur victoire, les francophones osaient espérer que ceux-ci seraient maintenus par leurs gouvernements. Malheureusement, ils ont dû déchanter au cours des dernières années.

En effet, les Canadiens français n'ont pas réussi à se nantir de services et d'infrastructures équitables et essentiels à leur développement. De plus, ils n'ont pas été en mesure de faire enchâsser dans la Constitution canadienne les droits qu'ils ont déjà. Dans plusieurs provinces, ils ont subi les contrecoups des compressions budgétaires pour combattre le déficit. Il me vient à l'esprit le cas très médiatisé de l'Hôpital Montfort, à Ottawa.

Honorables sénateurs, les impératifs de la réduction du déficit n'ont pas épargné ma province. Au cours des dernières années, nous avons assisté au démantèlement du régime de gestion scolaire au Nouveau-Brunswick. Rappelons-nous qu'en mars 1996, le gouvernement du Nouveau-Brunswick avait remplacé tous les conseils scolaires de langue française et de langue anglaise par une nouvelle structure composée de trois paliers: des comités consultatifs de parents au sein de l'école, des comités de district scolaire et deux commissions provinciales, l'une francophone et l'autre anglophone. Les comités de parents et la commission provinciale ayant plus d'autorité décisionnelle, les principaux pouvoirs furent concentrés entre les mains du Conseil des ministres.

M. Claude Nadeau, président des comités de parents du Nouveau-Brunswick, considérait que la nouvelle loi scolaire niait le droit de contrôle de la gestion des écoles francophones. La nouvelle structure de participation ne permettait pas aux Acadiens d'exercer pleinement ce droit de gestion. Les comités des parents du Nouveau-Brunswick ont décidé par conséquent de poursuivre le gouvernement de la province pour qu'il respecte leurs droits.

Heureusement, le nouveau gouvernement du premier ministre Bernard Lord s'est engagé à revoir cette politique au moment de la dernière campagne électorale. Toutefois, les parents ont décidé de maintenir leur démarche juridique en attendant les suites concrètes des promesses électorales. À ce titre, l'Association des juristes d'expression française, au Nouveau-Brunswick, considérait récemment que malgré la présence de la Loi sur les langues officielles du Nouveau-Brunswick et de la Loi 88 sur les écoles homogènes et la dualité en éducation, l'engagement du gouvernement provincial à les appliquer pleinement est demeuré mitigé et partiel au cours des dernières années.

N'oublions pas, honorables sénateurs, que l'école française se doit d'être l'outil par excellence de la francisation, de l'intériorisation de la culture et de l'éducation de la jeunesse francophone et acadienne du Canada moderne.

Le rapport du sénateur Simard contient plus de 43 recommandations qui abordent tous les aspects de la vie des francophones hors Québec. Elles ont été appuyées par la nouvelle commissaire aux langues officielles, Mme Dyane Adam, et par le président de la Fédération des communautés francophones et acadienne, M. Gino LeBlanc. Ces recommandations sont, pour la plupart, adressées aux gouvernements fédéral et provinciaux. Elles ont pour but, dans un premier temps, d'améliorer les conditions de vie des francophones hors Québec. Dans un deuxième temps, elles visent à consolider le respect des droits linguistiques et constitutionnels au sein des services gouvernementaux, communautaires et du système d'éducation, garantis en vertu des articles 16, 17 et 23 de la Loi constitutionnelle de 1982. Ces propositions visent à établir des politiques qui, au-delà de la Charte canadienne des droits et libertés et de la Loi sur les langues officielles, pourraient assurer aux francophones et aux Acadiens une égalité réelle avec les Canadiens anglais.

Le rapport propose l'implantation du bilinguisme officiel dans toutes les provinces, la création d'un poste de ministre d'État au développement des communautés de langues officielles et la création d'un fonds fiduciaire de 500 millions de dollars consacré au développement des communautés francophones et acadienne.

Honorables sénateurs, le Parlement du Canada se doit d'étudier plus attentivement les recommandations de cet important rapport du sénateur Simard, en fonction des nouvelles réalités auxquelles sont confrontées les communautés francophones et acadienne du pays.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, si aucun autre sénateur ne désire prendre la parole sur cette interpellation, le débat est clos.

[Traduction]

(1630)

La défense nationale

motion visant à établir un comité sénatorial spécial chargé d'examiner la conduite du personnel au cours de la mission en Somalie et la destruction de dossiers médicaux du personnel en mission en Croatie-ajournement du débat

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition), conformément à l'avis du 2 novembre 1999, propose:

Qu'un comité spécial du Sénat soit constitué afin d'enquêter et de faire rapport sur deux questions importantes qui touchent la conduite de la chaîne de commandement des Forces canadiennes, autant dans les opérations sur le théâtre qu'au quartier général de la Défense nationale: c'est-à-dire sa réaction aux problèmes opérationnels, décisionnels et administratifs qui se sont manifestés au cours du déploiement de forces en Somalie, dans la mesure où ces questions n'ont pas été approfondies par la Commission d'enquête sur le déploiement des Forces canadiennes en Somalie; et les allégations selon lesquelles des troupes canadiennes ont été exposées à des substances toxiques en Croatie entre 1993 et 1995 de même que les allégations de destruction des dossiers médicaux de militaires envoyés en Croatie;

Que le comité, dans l'examen des questions précédentes, soit habilité à interroger des témoins qui, selon lui, pourraient contribuer au déroulement de l'enquête, notamment, mais non exclusivement:

1. l'actuel ministre de la Défense, quant aux deux questions spécifiées;

2. d'anciens ministres de la Défense, quant aux deux questions spécifiées;

3. le sous-ministre de la Défense nationale à l'époque, quant aux deux questions spécifiées;

4. le chef de cabinet par intérim du ministre de la Défense nationale à l'époque, quant aux incidents survenus en Somalie;

5. le conseiller spécial du ministre de la Défense nationale à l'époque (M. Campbell), quant aux incidents survenus en Somalie;

6. le conseiller spécial du ministre de la Défense nationale à l'époque (J. Dixon), quant aux incidents survenus en Somalie;

7. les personnes ayant occupé le poste de juge-avocat général pendant la période concernée, quant aux incidents survenus en Somalie;

8. le juge-avocat général adjoint-Litiges à l'époque, quant aux incidents survenus en Somalie; et

9. le chef d'état-major de la Défense et le sous-chef d'état-major de la Défense à l'époque, quant aux deux questions spécifiées.

Que sept sénateurs nommés par le comité de sélection remplissent les fonctions de membres du comité spécial, et que trois constituent le quorum;

Que le comité soit autorisé à convoquer des personnes, à faire produire des documents et des dossiers, à entendre des témoins assermentés, à faire rapport de temps à autre et à faire imprimer au jour le jour documents et témoignages selon les instructions du comité;

Que le comité soit habilité à autoriser, s'il le juge opportun, la radiodiffusion et la télédiffusion de la totalité ou d'une partie de ses délibérations;

Que le comité soit autorisé à retenir les services de conseillers, professionnels, techniciens, employés de bureau ou d'autres personnes nécessaires, pour l'aider à mener son étude;

Que les partis politiques représentés au comité spécial reçoivent une allocation pour la contribution de spécialistes aux travaux du comité;

Que le comité soit autorisé à voyager à l'intérieur et à l'extérieur du Canada;

Que le comité soit autorisé à siéger pendant les séances et les congés du Sénat;

Que le comité soumette son rapport un an au plus après sa formation et que, si le Sénat ne siège pas au moment où le rapport est déposé, celui-ci soit considéré comme ayant été déposé le jour où il est remis au greffier du Sénat.

- Honorables sénateurs, cette motion ressemble énormément à une autre qui a été débattue et approuvée en mars 1997, il y a près de trois ans, la seule différence importante étant une référence aux événements survenus en Croatie. Le déclenchement des élections de juin 1997, d'une manière commode pour le gouvernement, l'a fait passer aux oubliettes et la tentative du Sénat pour reconfirmer sa décision à l'automne 1997 a échoué.

Le Sénat est saisi d'une motion qui, si elle est approuvée, mettra de côté tout esprit de parti et réaffirmera la décision positive que le Sénat a prise il y a près de trois ans. Si elle n'est pas adoptée, le Sénat s'alliera, sciemment ou non, avec ceux qui maintiennent que les tentatives pour étouffer les affaires et l'ignorance valent mieux que la révélation et la vérité. C'est aussi simple que cela.

Un bref résumé des événements qui ont donné lieu à cette motion s'impose. En mars 1995, le gouvernement annonçait la constitution d'une Commission d'enquête sur le déploiement des Forces canadiennes en Somalie, laquelle recevait le mandat d'enquêter et de faire rapport sur certains événements qui s'étaient produits en Somalie et auxquels avaient participé des civils et des militaires du ministère de la Défense. La commission n'a jamais pu mener son mandat à bonne fin. Alors qu'elle était sur le point de commencer l'étude de la phase post-déploiement, le ministre de la Défense d'alors lui ordonna, en janvier 1997, de mettre fin aux audiences avant la fin du mois de mars et de déposer son rapport pas plus tard que le mois de juin 1997. Décision sans précédent et des plus honteuses qui conduisit aux propos suivants de la part des membres de la commission, propos qui se trouvent dans le volume 1 du rapport de cette dernière. Nous avons reçu:

... l'ordre de faire rapport sur tous les alinéas de notre mandat original concernant la phase pré-déploiement du déploiement des Forces canadiennes en Somalie. Sur toutes les autres questions, nous avons eu toute latitude pour faire enquête et rapport avant la date butoir du 30 juin 1997...

Le présent rapport [...] porte dans un certain sens sur chaque alinéa de notre mandat original. En raison de l'interruption de notre mandat, nous n'avons toutefois pas pu étudier plusieurs questions importantes (notamment la torture et la mort, le 16 mars, de Shidane Arone, la réaction des échelons supérieurs du quartier général de la Défense nationale aux événements des 4 et 16 mars 1993, ainsi que les allégations de camouflage de ces événements par des hauts gradés).
La décision d'imposer des délais du genre de ceux auxquels nous avons été contraints est sans précédent dans le cadre d'une enquête de cette ampleur au Canada. Elle a compromis notre recherche de la vérité. Elle retardera ou empêchera qu'on apporte des mesures correctives au système qui a permis que de tels événements se produisent.
La recherche soigneuse de la vérité peut être très laborieuse et parfois frustrante. Les enquêtes publiques disposent des meilleurs outils que notre système juridique puissent fournir pour rechercher la vérité, mais même en possédant des pouvoirs importants en matière de procédure, le but peut demeurer hors de portée.
En conséquence, la réputation d'un nombre incalculable de Canadiens a été ternie à jamais, y compris celle de politiciens, de civils et de militaires très en vue qui auraient été heureux de pouvoir expliquer publiquement leur participation à des événements que la commission n'a pas eu le temps d'examiner. Le but de cette motion n'est pas de causer de l'embarras, mais bien de clarifier la situation. Bien sûr, des erreurs ont été commises, mais ce n'est pas en les écartant ou en les niant qu'on pourra les éviter à l'avenir. Ce n'est qu'au moyen d'une enquête publique qu'on y parviendra.

Comparons ce refus de rechercher la vérité avec ce qui se passe ailleurs dans le monde. J'ai cité de nombreux exemples du genre dans le passé. Je vais en citer de plus récents sans ordre d'importance, parce que je tiens à souligner que la vérité, peu importe qu'elle soit embarrassante ou même sordide, doit être sue, confrontée et utilisée pour en tirer des leçons. C'est essentiel pour toute société qui se respecte le moindrement et qui respecte ses membres.

Le gouvernement de l'Irlande vient d'entamer une nouvelle enquête sur les attentats à la voiture piégée qui ont eu lieu à Dublin et à Monaghan en une seule journée, il y a plus de 25 ans, et qui ont tué 33 personnes et en ont blessé plus de 300. Les enquêtes menées dans les années 70 et 80 n'avaient pas permis de tirer des conclusions et aucune accusation n'avait encore été portée.

En décembre dernier, un rapport parrainé par les Nations Unies et ordonné par le secrétaire général Kofi Annan lui-même a conclu que l'ONU et certains de ses dirigeants étaient responsables de n'avoir pas empêché ou arrêté le génocide au Rwanda en 1994. M. Annan dirigeait alors les opérations des casques bleus.

En Allemagne, un comité multipartite, incluant des membres de l'Union chrétienne démocrate, enquête sur des allégations de contributions illégales à la campagne électorale et de commissions occultes mettant en cause des politiciens haut placés, dont l'ancien chancelier Helmut Kohl, qui a longtemps dirigé la CDU.

Aux États-Unis, le gouvernement fait enquête sur des rapports voulant que des troupes américaines aient suivi des ordres et mitraillé des centaines de réfugiés sud-coréens au début de la guerre de Corée, il y a un demi-siècle. Cette enquête se tient même si, il y a à peine trois ans, la position officielle du gouvernement était qu'il n'y avait aucune preuve que les troupes en question se trouvaient même dans la région à l'époque.

Après avoir nié pendant des décennies les risques de rayonnement et de contamination par des produits chimiques, il y a à peine trois semaines, le gouvernement américain a finalement reconnu que l'exposition à des rayonnements entraînait des taux supérieurs à la normale de cancer et de mort prématurée.

Le procureur général des États-Unis et le directeur du Federal Bureau of Investigation ont ordonné la tenue d'une enquête indépendante sur l'utilisation de contenants de gaz militaires dans l'incendie du complexe des Davidiens qui a eu lieu à Waco, au Texas, en avril 1993, causant la mort de 76 personnes.

La fin de semaine dernière, le président d'Israël a été interrogé pour une deuxième fois par la police relativement à des allégations de fraude fiscale et de corruption qui auraient eu lieu entre 1988 et 1993.

Au Canada, lorsque des rapports et des allégations aussi importants font surface, on a généralement recours à la dénégation ou à un examen privé ou aux deux, dans l'espoir que le temps et les réponses évasives pourraient faire disparaître toute controverse.

J'aimerais citer un éditorial paru dans l'édition du 18 décembre 1999 de The Economist relativement à un rapport d'une commission indépendante parrainée par le parlement suisse sur certaines activités ayant eu lieu en Suisse au cours de la Seconde Guerre mondiale. Je cite:

Les Suisses ne se sont pas lancés tout à fait volontairement dans cet auto-examen. Ils y ont été poussés en grande partie par la pression sous-jacente exercée par les groupes juifs qui, au fil des ans, n'ont jamais accepté que les banques suisses rejettent leur requête. Les banques en retour se sont toujours dérobées derrière la loi du secret. Il est également vrai que jusqu'à très récemment, le gouvernement suisse lui-même a traité de façon maladroite et insensible les demandes répétées en vue de faire la lumière sur les diverses allégations.

Quoi qu'il en soit, que cet exercice ait eu lieu est tout à l'honneur des Suisses. De nombreux autres pays ont vécu des épisodes peu glorieux au cours de ce siècle et même si on les a poussés à le faire, ils ont choisi de ne pas réexaminer le passé de façon aussi approfondie. Ce n'est qu'en 1995, après tout, que le président Jacques Chirac a reconnu pour la première fois la responsabilité de l'État français pour le régime de Vichy et même à l'heure actuelle, l'effort officiel des Français pour ressortir cette épisode de l'histoire est à moitié complété. En fait, même si elle est de façon admirable très ouverte depuis longtemps sur son passé, l'Allemagne elle-même n'est parvenue que cette semaine à un accord sur l'indemnisation des victimes du travail forcé en temps de guerre. Pour des motifs divers, sans doute, la Suisse fait maintenant face à son passé. C'est loin d'être facile.
Je vais maintenant rendre hommage à un homme dont le récent décès, à l'âge de 44 ans, est passé largement inaperçu. Je veux parler du major Vincent Buonamici, un Canadien courageux. Sa notice chronologique dans le National Post mérite d'être répétée ici:
Le major Vincent Buonamici, qui est mort à l'âge de 44 ans, était l'officier de la police militaire qui a fait éclater le scandale somalien. Sans se préoccuper de sa carrière, le major Buonamici a procédé à une enquête complète sur l'incident en mars 1993, alors que les soldats du Régiment aéroporté du Canada, qui a maintenant été démantelé, ont capturé un adolescent somalien, l'ont torturé et l'ont tué.
Le Régiment aéroporté était en Somalie dans le cadre de la mission militaire visant à apporter de l'aide aux gens qui faisaient face au chaos de la guerre civile dans le pays. Le major Buonamici a dirigé l'enquête sur cet incident et sur un incident précédent au cours duquel des soldats canadiens avaient fait feu sur des Somaliens à l'extérieur de la base canadienne en Somalie. Il a prétendu que son enquête était gênée aux plus hauts niveaux de la hiérarchie militaire et du gouvernement.

On a notamment saisi les dossiers que le major Buonamici détenait à son bureau au quartier général de la Défense nationale à Ottawa. Il a dû installer des cadenas spéciaux anti-intrusion sur son classeur pour protéger ses dossiers contre les hauts gradés. On lui a refusé une promotion et il a lui-même fait l'objet d'une enquête par d'autres agents de la police militaire pour vérifier s'il avait coulé de l'information aux médias.

Le ministre de la Défense, David Collenette, et le premier ministre ont dénoncé les allégations à l'époque. Cependant, quatre ans plus tard, une enquête publique sur les tueries a donné raison au major Buonamici en précisant qu'il y avait eu, en fait, un camouflage par les militaires des détails de ce qui est devenu l'affaire somalienne.

L'enquête honnête du major Buonamici sur l'affaire somalienne et son refus de céder aux pressions de ses supérieurs ont nui à sa carrière militaire. Il n'a jamais été amer et n'en a jamais voulu à l'armée.

(1640)

Je ferai remarquer, à l'honneur des Forces canadiennes, que l'avis de décès se terminait comme ceci:

Les Forces canadiennes ont reconnu son courage et son haut sens du devoir et lui ont fait des funérailles militaires en bonne et due forme à Hamilton.

Ce que cette motion cherche à confirmer, c'est la transparence et la responsabilisation, et non le camouflage et le déni. Si on refuse de faire une enquête publique sur la phase post-déploiement de la mission en Somalie, non seulement on laissera de nombreuses questions sans réponse, mais, ce qui est tout aussi important, on laissera la réputation de nombreuses personnes innocentes ternie à tout jamais. Si ce n'est que pour sauver la réputation de ces Canadiens, civils et militaires, une enquête est plus que justifiée.

Il est déplorable que le ministère de la Défense ne soit pas prêt à mettre ses problèmes sur le tapis et continue d'assurer aux Canadiens que les enquêtes internes sont la solution idéale. Quelles que soient les accusations - le fait qu'on ait gardé des armes serbes confisquées en Croatie, le passage illégal de réfugiés pour de l'argent en Bosnie, le suicide d'un membre du Régiment aéroporté au Rwanda, peut-être causé par le médicament méfloquine contre la malaria, l'exposition à des substances toxiques en Croatie, le déchiquetage d'un document clé dans les dossiers médicaux, pour n'en nommer que quelques-uns, et les deux derniers sont mentionnés dans la motion - la première réaction du ministère a été de rejeter ces accusations ou de les soumettre à une enquête interne, ce qui revient à peu près au même.

À propos d'une question connexe, l'enthousiasme soulevé par la nomination d'un ombudsman au ministère de la Défense s'est vite transformé en frustration parce que son mandat lui donnait en fait autant d'indépendance et de pouvoir que le conseiller en éthique.

L'exemple le plus triste de l'attitude de déni qui existe au ministère découle du décès de Joseph Riordan, qui a servi dans la police militaire des Forces canadiennes dans la guerre du Golfe en 1991 et qui a souffert de ce qu'on appelle le syndrome de la guerre du golfe Persique, causé peut-être par l'uranium appauvri. Au fil des années, le ministère de la Défense a continuellement nié l'existence de tout lien entre l'uranium appauvri et les maladies semblables qui ont frappé au moins 100 victimes connues. M. Riordan a demandé que son corps fasse l'objet d'une autopsie. Il y a une semaine, le Globe and Mail a publié les résultats de cette autopsie en disant ce qui suit:

Asaph Durokavic, spécialiste du syndrome de la guerre du golfe Persique et ancien chercheur scientifique au Département américain des affaires des anciens combattants, a dit à la radio de la SRC hier qu'il ne s'attendait pas à trouver des niveaux aussi élevés d'isotopes d'uranium dans les os de M. Riordan presque dix ans après la guerre. Le docteur Durokavic a aussi trouvé des traces d'uranium dans l'urine d'anciens combattants vivants. On s'attend à ce que ces nouveaux résultats alimentent l'argument controversé selon lequel l'uranium appauvri - utilisé comme revêtement pour renforcer les armes et les chars d'assaut - est la cause des maladies mystérieuses qui ont frappé les anciens combattants de la guerre du Golfe et du conflit en Croatie.
Après des années de dénégation, quelle a été la réaction du ministre de la Défense nationale? D'après le Globe and Mail - et je le dis sans commentaire:
... le ministre de la Défense, Art Eggleton, a dit que les anciens combattants de la guerre du Golfe qui craignent que l'exposition à la poussière d'uranium appauvri ne les ait rendus malades devraient communiquer avec le gouvernement fédéral afin qu'il prenne les dispositions nécessaires pour leur faire subir des tests médicaux.
On estimera peut-être qu'un comité spécial n'est pas nécessaire et qu'une enquête effectuée par un comité permanent suffira. Si on s'entend là-dessus, je ne soulève certainement aucune objection. En fait, la structure des comités du Sénat est présentement utilisée à la limite de ses capacités et souffre d'un calendrier trop comprimé, d'un manque de ressources financières et du fait que trop de greffiers doivent s'acquitter d'une double tâche. C'est avec peu d'enthousiasme qu'on propose cette méthode d'enquête.

Cependant, c'est un simple détail par rapport à ce qui est en jeu. Le Sénat doit décider s'il accepte d'examiner un dossier dans le but de donner à des Canadiens innocents l'occasion de lever des soupçons et de répondre aux allégations désobligeantes dont ils font l'objet depuis trop longtemps, ou s'il accepte l'idée que tout cela est chose du passé, qu'il n'est pas nécessaire de revenir sur un dossier aussi déplaisant, que seul le ministère de la Défense peut apporter les remèdes nécessaires pour éviter que cela ne se reproduise, et ainsi de suite. L'expérience passée et présente n'appuie certes pas le dernier argument; quoi qu'il en soit, la responsabilité parlementaire nous justifie amplement d'appuyer cette motion.

L'honorable John G. Bryden: Honorables sénateurs, le sénateur Lynch-Staunton accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Lynch-Staunton: Bien sûr, honorables sénateurs.

Le sénateur Bryden: D'après les propos du sénateur, l'enquête, telle que définie dans la motion, serait vaste et exhaustive, non seulement dans le temps, mais aussi quant aux questions mentionnées par l'honorable sénateur.

La motion numéro 7 stipule, en partie:

Qu'un comité spécial du sénat soit constitué afin d'enquêter et de faire rapport sur deux questions importantes...

Malgré tout le respect que je porte au sénateur Lynch-Staunton, je ne peux déterminer, en lisant la motion, quelles sont ces deux questions importantes sur lesquelles le comité spécial du Sénat doit se pencher et faire rapport. Plusieurs éléments sont mentionnés dans la motion. On y lit notamment:

[...] faire rapport sur deux questions importantes qui touchent la conduite de...

La motion parle ensuite de la prise de décisions et des problèmes administratifs. À la fin, elle se lit comme suit:

[...] et les allégations selon lesquelles des troupes canadiennes ont été exposées à des substances toxiques en Croatie entre 1993 et 1995 de même que les allégations de destruction des dossiers médicaux de militaires envoyés en Croatie;

Lorsque le sénateur parle de deux questions importantes, il faut préciser que les deux seules questions importantes mentionnées dans la motion sont que le Sénat devrait enquêter et faire rapport sur «les allégations selon lesquelles des troupes canadiennes ont été exposées à des substances toxiques en Croatie entre 1993 et 1995, de même que les allégations de destruction des dossiers médicaux de militaires envoyés en Croatie». Sont-ce bien là les deux questions que le sénateur veut soumettre à l'examen du Sénat pour qu'il fasse ensuite rapport à ce sujet?

Le sénateur Lynch-Staunton: Honorables sénateurs, je conviens avec le sénateur Bryden qu'il y aurait lieu d'améliorer le libellé de la motion. Les deux questions importantes sont la phase de post-déploiement des troupes en Somalie ainsi que les allégations d'exposition à des substances toxiques et la destruction connue des dossiers médicaux de certains militaires envoyés en Croatie. Je reconnais que la formulation porte un peu à confusion.

S'il est fait mention de la Croatie dans la motion, c'est pour souligner que, même si les deux questions ne sont pas directement liées, elles ont été toutes les deux escamotées par le ministère de la Défense nationale et le gouvernement. Nous ne savons rien de ces questions, à vrai dire. Tout ce que nous savons, c'est que les forces armées et le ministère de la Défense les étudient, mais ils le font plus ou moins dans le secret.

Dans notre société moderne, nous avons le droit de connaître non seulement les résultats, mais aussi la façon dont ils ont été obtenus. Le Parlement doit être partie à la démarche qui nous mène aux résultats.

L'objet de la motion est de faire en sorte que le Sénat du Canada participe à ce très important travail, pour établir la vérité et dissiper les doutes, comme je l'ai dit dans mon exposé. Il s'agit d'aider ces Canadiens, dont quelques-uns nous sont connus. Ils étaient disposés à comparaître devant le comité au printemps 1997, comme le sénateur Bryden s'en souviendra. Ils étaient prêts à faire la queue pour témoigner. Je ne peux pas croire que, s'ils étaient prêts à le faire à l'époque, ils ne seraient pas encore plus empressés de comparaître devant un comité aujourd'hui, soit trois ans plus tard, pour donner leur version des faits.

Le sénateur Bryden: Honorables sénateurs, étant donné ses observations sur la portée plus vaste de l'étude qu'il envisageait, l'honorable sénateur a-t-il envisagé de laisser tomber la question? A-t-il songé à reformuler sa proposition d'enquête à la lumière de ce que nous savons aujourd'hui et des propos qu'il a tenus dans son passionnant discours?

(1650)

Le sénateur Lynch-Staunton: Honorables sénateurs, si tout le monde comprend l'intention de la motion, pourquoi alors en changer la formulation? J'ose espérer que nous en viendrons au plus tôt à une décision là-dessus, dans un sens ou dans l'autre. Le Sénat est saisi de cette affaire depuis près de trois ans. Je n'ai pas l'intention que cela se prolonge davantage. J'espérais prendre la parole plus tôt à ce sujet. J'espère que d'autres sénateurs prendront aussi la parole là-dessus.

Je crois que l'intention est claire. Je le répète, je conviens que la formulation pourrait être améliorée. Je suis peut-être allé trop vite - et je m'excuse pour toute confusion que cela a pu causer -, mais j'espère que mes explications, tant dans le texte officiel qu'au cours de la période des questions, ont tiré au clair ce que certains d'entre vous voudraient voir accomplir.

(Sur la motion du sénateur Bryden, le débat est ajourné.)

L'autonomie gouvernementale autochtone

Rapport du comité sur l'étude-Ajournement du débat

Permission ayant été accordée de revenir aux rapports de comité:

Le Sénat passe à l'étude du troisième rapport du comité sénatorial permanent des peuples autochtones intitulé: «Forger de nouvelles relations: l'autonomie gouvernementale des autochtones au Canada», qui a été déposé au Sénat plus tôt aujourd'hui.

L'honorable Charlie Watt: Honorables sénateurs, le moment et l'endroit sont intéressants.

À l'automne de 1998, le comité sénatorial permanent des peuples autochtones a entrepris ses audiences sur l'autonomie gouvernementale des autochtones. Avec l'aide de ses conseillers autochtones, dont Rosemarie Kuptana, Konrad Sioui et Larry Chartrand, que je tiens à remercier, le comité directeur a pu cibler des témoins clés et il a entendu plus d'une centaine de témoignages, surtout d'autochtones.

Je suis extrêmement reconnaissant à tous les membres du comité, et notamment à mes collègues du comité directeur. Je tiens également à remercier sincèrement Alex Ker, la greffière du comité, Mme Jill Anne Joseph, et Kae Schade.

L'ajournement de l'été et la prorogation de l'automne ont malheureusement retardé le dépôt de ce rapport. Cependant, ils ont donné l'occasion au comité de débattre attentivement la question et d'évaluer les témoignages à la lumière d'autres études récentes. L'ajournement nous a permis de profiter de l'expérience et des connaissances inestimables de chacun des membres du comité et de dégager un consensus sur les mesures que nous étions disposés à recommander.

En vertu de l'ordre de renvoi pour l'étude spéciale de l'autonomie gouvernementale, le comité est appelé à se concentrer sur les aspects clés de l'autonomie gouvernementale et des nouvelles relations entre le Canada et les peuples autochtones. Il était demandé au comité de se pencher sur les principes fondamentaux de ces relations ainsi que sur les questions et processus concernant les négociations et la mise en oeuvre. Le comité a donc considéré des mesures pratiques pour aider les peuples autochtones et leurs partenaires gouvernementaux dans l'établissement, la mise en oeuvre et la conduite de nouvelles relations.

D'après les témoignages entendus, le comité a conclu que l'élaboration de pareilles relations et de relations renouvelées fondées sur le partenariat avec les peuples autochtones nécessite des réformes institutionnelles et législatives fondamentales. Nous reconnaissons que la restructuration des relations représente un défi à la fois complexe et urgent.

Les recommandations énoncées dans notre rapport sont axées sur quatre aspects de nos relations structurelles qui ont été examinées par les témoins. D'abord, les témoins ont attiré notre attention sur le fait que l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 désigne les Indiens, les Inuits et les Métis comme étant les peuples autochtones du Canada. Cependant, ces peuples ne jouissent pas d'un accès égal à la possibilité de négocier et de mettre en oeuvre des accords d'autonomie gouvernementale et des relations avec le Canada. Pour résoudre le problème, le comité a adopté des recommandations globales appelant le Canada à donner aux peuples autochtones une chance égale de réaliser leurs aspirations d'autonomie gouvernementale. Nous recommandons que le gouvernement adopte une démarche plus flexible et inclusive en engageant avec les Premières nations, les Inuits et les Métis des négociations sur l'autonomie gouvernementale. Le comité recommande en outre que des processus de négociation et de mise en oeuvre soient mis à la disposition de tous les peuples autochtones en tenant compte de leurs revendications et de leurs intérêts respectifs.

Ensuite, les témoins nous ont parlé de l'incompatibilité entre les objectifs gouvernementaux relativement aux relations de partenariat avec les peuples autochtones et la répartition des responsabilités de négociation au sein du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.

À cet égard, nous recommandons de retirer au ministère des Affaires indiennes la responsabilité des négociations et de la mise en oeuvre des traités et des ententes d'autonomie gouvernementale ou autres. Le comité recommande que ces responsabilités soient confiées à un nouveau bureau des relations avec les autochtones, qui, selon nous, devrait être établi au sein du Conseil privé.

Beaucoup de témoins nous ont dit que le gouvernement manquait de volonté politique lorsqu'il s'agit de s'engager dans des négociations sérieuses et de donner un véritable sens aux engagements symboliques pris, par exemple, dans «Rassembler nos forces», la politique sur le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. Tout au long de ses audiences, le comité a entendu parler de problèmes découlant de l'absence de cadre législatif énonçant clairement la politique du gouvernement en matière de négociation et de mise en oeuvre de nouveaux rapports avec les peuples autochtones.

Par conséquent, honorables sénateurs, le comité a recommandé qu'une nouvelle loi soit présentée par le gouvernement fédéral afin de remédier à cette situation en définissant un cadre législatif large. Une telle loi aiderait le gouvernement fédéral à s'organiser en vue de négocier, de gérer et d'administrer ses relations avec les peuples autochtones.

Beaucoup de témoins autochtones ont parlé de la nécessité d'avoir des structures indépendantes des tribunaux ordinaires pour entendre les griefs des autochtones, surveiller les négociations et la mise en oeuvre des rapports entre les peuples autochtones et le Canada. De précédentes commissions d'enquête avaient déjà recommandé d'établir de nouvelles structures et de nouvelles institutions indépendantes ayant des pouvoirs réels de surveillance sur les relations entre les autochtones et le gouvernement. Il est étonnant que si peu ait été fait en ce sens à l'échelle nationale.

Le comité recommande qu'une commission nationale d'examen des traités et de la mise en oeuvre des droits des autochtones soit mise sur pied en tant qu'organisme de surveillance indépendant. Cette commission ferait directement rapport au Parlement. Elle produirait des rapports, ferait des enquêtes et agirait comme conciliateur. Elle surveillerait les rapports entre les autochtones et le gouvernement afin de promouvoir et de faire respecter les droits issus de traités et les autres droits autochtones, l'honneur de la Couronne et l'esprit et la lettre des traités, des accords sur l'autonomie gouvernementale, des accords ainsi que des lois connexes.

Enfin, certains se sont dits préoccupés par le fait que, au sein du système judiciaire canadien, on semble incapable de se prononcer sur les droits ancestraux et issus des traités et de rendre des décisions conformes, opportunes et exécutoires pouvant aider le Canada à s'acquitter de ses obligations légales. Le comité a examiné d'autres approches, mais nous ne sommes pas prêts à ce stade à faire des recommandations. Toutefois, nous pensons que la capacité de l'appareil judiciaire canadien peut être renforcée, de même que celle d'autres personnes travaillant au sein du système. Nous mettons l'accent sur les possibilités d'une formation et d'une éducation interculturelles dans le domaine des droits ancestraux et issus des traités, l'évolution des lois autochtones et des traités, ainsi qu'au niveau des perspectives, de la culture et des traditions. Le rapport comprend une recommandation à cet égard.

Les recommandations faites dans le rapport du comité ont pour but de surmonter les obstacles à des négociations opportunes et efficaces et à de nouvelles relations.

(1700)

Selon nos prévisions, si l'on y donne suite, nos recommandations en faveur d'une réforme institutionnelle et législative aideront les gouvernements et les peuples autochtones dans leurs efforts en vue d'établir ensemble des partenariats. Une telle réforme permettra d'améliorer la situation économique et d'éliminer les difficultés que connaissent les collectivités autochtones.

En fait, nous pensons qu'un bon nombre de nos recommandations peuvent être mises en oeuvre sans qu'il soit nécessaire pour le Canada d'engager d'importantes ressources financières additionnelles. En revanche, elles exigeront dans certains cas la réaffectation des ressources existantes. À long terme, nous pensons que la conclusion d'accords dans des délais plus opportuns et de façon plus conforme permettra de faire des économies. Les structures administratives du gouvernement du Canada seront réorganisées en vue d'appuyer des relations politiques fondées sur le partenariat plutôt que sur la dépendance. Les autochtones et le gouvernement s'en remettront moins au tribunaux pour régler leurs différends.

Dans une première phase, le comité se devait de recommander ces changements structurels au niveau des arrangements gouvernementaux afin de faciliter la négociation et la mise en oeuvre et aussi d'éviter des querelles juridiques coûteuses. Toutefois, les témoins ont aussi attiré notre attention sur un ensemble plus vaste de questions.

Beaucoup de témoins ont fait part de leur expérience avec les différentes possibilités de gouvernement autochtone et ont exposé dans le détail leurs propositions et leurs aspirations à cet égard. Nous avons été particulièrement intéressés par les solutions novatrices proposées en matière d'autonomie gouvernementale pour les autochtones en milieu urbain. Nous reconnaissons la nécessité urgente de nous pencher sur les besoins et les conditions de vie des autochtones établis dans les villes.

D'autres intervenants ont également parlé de la nécessité d'aider les autochtones à renforcer leur capacité à se gouverner et à rendre des comptes. Ils ont abordé des questions importantes, notamment l'effectif des bandes, le logement, l'éducation, le développement socioéconomique, les droits de la femme, et la nécessité de prévoir une assise foncière suffisante pour fonder des économies autochtones prospères et durables. Le comité estime également qu'il est urgent de se pencher sur la question des femmes en particulier.

Malheureusement, le délai que le comité s'était fixé ne nous a pas permis d'entreprendre une étude exhaustive de toutes ces questions cruciales. Le rapport reflète toutefois les nombreux points de vue et sujets de préoccupation exprimés par les autochtones à leur sujet. Nous espérons néanmoins être en mesure de poursuivre notre étude à l'avenir.

(Sur la motion du sénateur Johnson, le débat est ajourné.)

Ajournement

Permission ayant été accordée de revenir aux avis de motion du gouvernement:

L'honorable Dan Hays (leader adjoint du gouvernement), avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)h) du Règlement, propose:

Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, il demeure ajourné jusqu'à demain, le mercredi 16 février 2000, à 13 h 30;

Que, à 15 h 30 demain, si le Sénat n'a pas terminé ses travaux, le Président interrompe les délibérations pour ajourner le Sénat;

Que, si un vote est différé à 17 h 30 demain, le Président interrompe les délibérations à 15 h 30 pour suspendre la séance jusqu'à 17 h 30 pour la mise aux voix du vote différé; et

Que tous les points figurant à l'ordre du jour et au Feuilleton des avis, qui n'ont pas été abordés, demeurent dans leur ordre actuel.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 16 février 2000, à 13 h 30.)


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